Notre existence est toujours imparfaite et est surtout une non-existence. Il y a plus de nonexistence que d’existence. Notre existence est comme une flamme qui brule pendant un court moment et qui déjà s’éteint. Il y a plus de choses que nous ne sommes pas que de choses que nous sommes. Tout le reste du monde, on peut l’observer mais on ne l’est pas. Les individus sont séparés entre eux et du reste du monde. On peut les observer, leur donner de l’attention, les sentir, nous mettre à leur place, mais ils restent fondamentalement séparés. Nous vivons au milieu des phénomènes, mais nous ne connaissons pas la réalité sousjacente. Nous ne savons même pas ce qui se passe en la personne à nos côtés, et souvent, nous vivons de façon automatique et sans attention, sans même savoir ce qui se passe en nous-mêmes. Nous vivons donc une existence très imparfaite, dont la plus grande partie dans l’ignorance et dans la séparation du monde, emprisonnés dans les limites étroites de notre propre temporalité.
La spiritualité comme remède à l’absence de sens Le philosophe chinois Chuang Tsu remarquait que le petit lopin de terre sous nos pieds, suffit pour être dans le monde. Mais que serait la vie, se demandait-il, si nous devions enlever la terre autour de nos pieds ? L’homme a besoin de plus que le petit lopin de terre sous ses pieds. Sa conscience se libère graduellement des limites étroites de son propre corps, pour s’ouvrir vers son entourage, vers des proches connus et inconnus et, finalement, vers toute la vie et vers l’univers. Et même ça, ne suffit pas pour l’esprit qui cherche. La spiritualité, précisément, va au-delà des limites de l’existence humaine restreinte et de ses petits besoins.
La spiritualité met la vie temporaire dans le cadre d’une réalité plus ample dans laquelle la vie individuelle trouve son sens ultime. Un individu sans spiritualité, tout comme une civilisation sans spiritualité, sombre finalement dans le néant, dans l’absence de sens et dans la dépression. Les multiples religions sur terre sont autant de chemins que l’homme a pris dans sa quête d’un sens à la vie. La spiritualité exprime le désire d’être. Chaque spiritualité et chaque religion, comme forme concrète de spiritualité, parle du respect pour l’existence, de l’adoration de l’existence et du désir d’une existence plus complète. L’existence y est vue comme sacrée. La spiritualité est le fruit d’une conscience qui est plus vaste et une sensibilité qui va plus loin que les impressions et les sensations des fonctions corporelles. Une conscience spirituelle dépasse les limites de l’existence physique pour pénétrer une réalité qui est infinie. C’est dans cette réalité que la vie peut trouver sa destination. La spiritualité n’est pas une science alternative pour s’expliquer le monde. Elle ne traite pas de besoins ou désirs concrets de la vie et ne propose pas de techniques psychologiques pour satisfaire certains désirs conscients ou inconscients ou pour devenir heureux. Il ne peut donc pas y avoir de conflit entre la spiritualité et la science. En effet, la science tente d’expliquer le monde alors que la spiritualité se concentre sur l’expérience du monde. Le fait que la science ne puisse pas observer cette expérience, ne veut pas dire que celle-ci n’existerait pas ou qu’elle serait en conflit avec la science. Tout comme une description biologique d’une rose ne peut pas être en conflit avec l’expérience de la beauté de cette rose, de même, une théorie scientifique sur l’origine du monde ou sur l’évolution de la vie ne peut pas être en conflit avec l’expérience de la vie. Par contre, l’expérience du mystère de la vie
