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La langue : réalité et théâtralité
Ce que les adhérents du modèle créatif appellent de nouveaux modes de pensée, les disciples de l’ancien l’appellent des délires dénués de sens, de plan et de cohérence. Par ces commentaires négatifs ils suggèrent qu’il y manque quelque chose, et qu’un sens, un plan ou une cohérence ne serait pas seulement souhaitable mais serait même nécessaire. Pour les partisans du nouveau modèle, par contre, les anciennes modes de pensée sont fossilisées, momifiées et ils reprochent aux partisans de celui-ci leur dogmatisme et leur rigidité. Il est vrai que le modèle ancien satisfaisait davantage notre besoin de sécurité, de prévisibilité et de certitude. L’abandon de l’ancien modèle du monde peut être angoissant. Il est pourtant essentiel de réaliser que s’accrocher à un ancien modèle du monde peut être un obstacle à une expérience de bonheur. Dans le modèle du monde linéaire nous cherchons pour le bonheur ou le malheur des raisons, des causes ou des coupables en dehors de nous. Nous essayons alors d’éliminer ou de vaincre ces obstacles à notre bonheur. Notez, au passage, les métaphores techniques ou militaires de cette pensée. Dans le modèle systémique le bonheur et le malheur sont créées de l’intérieur. C’est un paradigme qui libère, qui rend mature, qui donne un pouvoir émancipateur, mais qui, également, responsabilise.
De mens in de samenleving
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Disfuncties van het systeem…
Sociale cultuur Conditionering Rigiditeit Stress Onevenwicht Levensomstandigheden
…komen lokaal tot uiting als mentale ziekte, fysieke ziekte, sociale ziekte.
Ontsnappingsroutes
“Ziekte” als probleemoplossing
die er vaak niet in slaagt dit op een gezonde wijze op te lossen… Vele “zieken” zijn normale mensen die proberen te overleven in een zieke maatschappij
Gezondheid = flexibiliteit
La langue: réalité et théâtralité
Les paroles sont les médecins de l’esprit malade. AESCHULOS, 525-456
Celui qui ne connaît pas la force des paroles, Ne peut point connaître l’homme. CONFUCIUS
La genèse du sujet et de l’inconscient coïncide avec l’entrée dans l’ordre du langage.
J. LACAN
Les paroles sont comme des toiles d’araignée dans lesquelles les gens peuvent rester empêtrés, bien longtemps après que l’araignée a disparu. J. DERRIDA
Les limites de mon langage Sont les limites de mon monde.
LUDWIG WITTGENSTEIN (1889-1951)
La pensée se manifeste dans la parole, la parole se manifeste dans l’acte, l’acte se consolide dans l’habitude et l’habitude se durcit dans un caractère. Prenez donc bien garde de vos pensées et où elles vous mènent, et laissez les provenir de l’amour qui prend ces racines dans la compassion pour tous les êtres. Comme l’ombre suit le corps, nous devenons ce que nous pensons.
LE BOUDDHA
La langue que nous parlons est déterminée par une loterie géographique qui fait que nous sommes venus au monde dans un certain pays et chez certaines personnes. La langue qui est parlée dans ce pays et par ces personnes, s’incruste insidieusement et inévitablement dans notre cerveau. Elle va faire partie de nos processus automatiques de pensée. Elle est comme « parlée en nous ». Nous ne l’avons pas choisi sciemment. Personne n’a sa propre langue ou ses propres mots, même pas dans son monologue interne. Nous sommes comme contaminés par la langue et par le modèle du monde de notre environnement. Un aspect important de notre activité cérébrale habituelle se déroule à la lumière du modèle du monde qui prédomine dans notre lieu de naissance. Simultanément avec notre langue et également à notre insu, une certaine vision du monde s’établit dans notre mode de pensée. C’est comme si la société était présente et parle en nous. La langue installe un programme culturel. C’est ainsi que des mots et des discours culturels surgissent quasi automatiquement dans notre conscience. Et comme la plupart des mots et des discours sont porteurs de significations et d’émotions, certaines situations émotionnelles surgissent également comme automatiquement dans notre conscience. Nos mots sont comme des étiquettes que nous utilisons pour marquer et organiser nos expériences. Nous pouvons ensuite utiliser ces étiquettes comme un système de fichiers pour récupérer telle ou telle expérience et au besoin l’incorporer dans une nouvelle situation. Ainsi, l’énumération des plats sur une carte de menu invoquent l’aspect et le goût de certains mets, ce qui nous permet de choisir ce que nous voulons manger. Ils ne sont cependant pas la nourriture même, ils y réfèrent seulement.
Chaque représentation de la réalité est traduite, concrétisée et réalisée dans un certain langage. La langue réduit la réalité aux concepts dont on dispose, c'est-à-dire qui sont connus et définis au préalable. La complexité et l’infinie diversité de la réalité sont ainsi rendues pensables et communicables. Elles sont conçues comme une construction de concepts linguistiques. Par ces concepts nous attribuons au monde, en perpétuel mouvance, un semblant de solidité, une stabilité que, par lui-même, il n’a pas. Nos concepts sont comme des momies, ce sont des réductions pétrifiées de la réalité, qui dissèquent la réalité en catégories et l’organisent en des cases bien ordonnées. Nos concepts ne sont donc pas des miroirs de la réalité mais, avec les paroles de Nietzsche, des manifestations de notre « volonté de puissance ». Nos émotionssont beaucoup plus déterminées par les mots, les significations et les croyances dans notre conscience que par les faits en soi. Nos émotions sont toujours à l’écoute de notre dialogue intérieur et réagissent à son contenu qu’elles prennent toujours très au sérieux et au pied de la lettre. Nos émotions ne réagissent donc pas à la réalité externe mais à la théâtralitéinterne. Ceci explique, par exemple, pourquoi certaines personnes peuvent être terrorisées par une simple tâche comme parler en public ou faire un entretien d’embauche, tandis que d’autres y réagissent de façon enthousiaste et énergique. Ceci explique aussi pourquoi certaines personnes peuvent souffrir et rester figé pendant des années à la suite d’un évènement qui est vécu comme une perte, tandis que d’autres reprennent et continuent leur vie beaucoup plus rapidement. Les émotions sont toujours vigiles et prennent tout très au sérieux. Elles n’entendent pas que certains messages ne peuvent être que des métaphores ou des clichés exprimés de façon irréfléchi ou qu’ils soient seulement « des façons de parler ». Une même réalitépeut être interprétée comme un jeu politique ou comme une réflexion sérieuse sur une situation, comme une divagation ou comme une idée créatrice, comme un enlisement dans le relativisme ou comme un regard nouveau sur la réalité. En effet, la plupart des mots ne sont pas une simple description de la réalité mais sont déjà un jugement et souvent même une condamnation. Il y a des façons négatives et positives d’observer la réalité, des colorations négatives et positives, des lectures négatives et positives des faits, des cadres d’interprétation négatifs et positifs. Les mots sont comme des sceauxcolorés qu’on met sur la réalité pour exprimer une approbation ou une désapprobation. Par ces
marques d’évaluation on exprime que l’autre est, à nos yeux, un être bon ou mauvais, ayant de bonnes ou de mauvaises intentions.31
L’utilisation des mots négatifs est aussi bien la conséquence que la cause d’émotions négatives. Ainsi s’engendre un processus qui s’auto-perpétue :
Émotions négatives => cadre d’interprétation négatif => encore plus d’émotions négatives =>
Il est important de comprendre que les émotions sont beaucoup plus déterminées par notre grille de lecture que par les faits eux-mêmes, alors que les émotions maintiennent justement cette grille de lecture. Supposons que vous ayez pris un rendez-vous avec un ami sur une terrasse. Vous attendez en vain votre ami à l’heure convenue. Comment allez-vous réagir ? Peut-être penserez-vous : « Je ne compte pas pour lui » ou « Il ne veut plus de moi ». Cela est une lecture défavorable, une coloration malveillante, une grille de lecture négative. Vous pourriez tout aussi penser : « Il est tellement occupé qu’il a oublié son rendez-vous » ou « Il a oublié son agenda » ou « Il a sans doute une bonne raison, même si je ne la connais pas pour l’instant. » Ceci est une lecture favorable, une coloration bienveillante, une grille de lecture positive.
Nous utilisons une grille de lecture malveillantepour les personnes que nous n’aimons pas, alors que nous utiliserons une grille de lecture bienveillantepour ceux qui nous sont chers.
Supposons que vous apprenez de quelqu’un que vous n’appréciez pas, qu’il a une relation extraconjugale. Il y a des chances que vous alliez dire : « Bien sûr, il n’est même pas capable d’être fidèle, cela ne m’étonne pas de ce pauvre type. » c’est le langage de la malveillance, de l’inimitié et de la guerre. Mais supposons que vous apprenez de votre meilleure ami qu’il a une autre relation, alors vous allez probablement réagir avec plus de compréhension : « Probablement qu’il lui manque quelque chose dans sa relation, c’est au
31 Dans la psychologie cognitive on parle de styles d’attribution.