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Le plaisir

Toute expérience humaine a une structure interne, une architecture qui comporte plusieurs dimensions. Cela vaut également pour l’expérience du bonheur. Le bonheur a trois ingrédients ou dimensions. Ce sont trois dimensions du « dire oui». Les trois dimensions sont nécessaires pour un bonheur durable. Plus on avance dans chaque dimension, plus on s’approchera de la source interne du bonheur et plus l’expérience du bonheur sera profonde.

Le plaisir est la dimension horizontale, celle qui est la plus simple, celle que les gens comprennent le plus facilement: il s’agit du « sentir bien », de l’expérience du plaisir. Cette dimension est en fait le dire ouià la satisfaction immédiate et à un ressenti agréable. Il s’agit d’une satisfaction corporelle et émotionnelle, d’un plaisir, d’un agrément. C’est, par exemple, l’expérience d’un bon verre de vin, de belles vacances ou d’une nouvelle voiture.

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Dimensie 1: het pleziergehalte

Winst op korte termijn Onmiddellijke bevrediging “Goed-voelen” Emoties van het lichaam Plezier - amusement Freud-principe Moederlijke functie (Lacan) Emotionele afhankelijkheid Ongebreideld hedonisme Festival-theorie van het leven Consumentencultuur “Graaicultuur” Samsara

Le plaisir peut s’apprendre et peut se cultiver et se développer. Cela ne nécessite pas une compétence particulière mais plutôt de la compréhension et de l’attention. Beaucoup d’expériences communes ou même désagréables peuvent être transformées en des expériences agréables.

Lors d’un séjour à Paris, il y a plusieurs années, j’étais invité par une amie pour un tour dans la grande roue près des Tuileries. Considérant que je ne pouvais pas honorablement décliner cette invitation, j’acceptais, bien que l’expérience m’angoissait terriblement. Quand je me trouvais, terrifié, dans la petite gondole, face à mon amie, je ne pouvais que m’agripper au garde-corps. « Quelque chose » en moi était angoissé et redoutait la mort. Quelque chose en moi criait haut et fort « Non » et m’angoissait et me stressait. Ce quelque chose paraissait

« plus fort que moi ». J’avais beau m’opposer à la peur et à l’angoisse, je n’arrivais pas à me calmer, bien au contraire, la peur montait et s’amplifiait. J’avais l’impression d’être totalement paralysé et impuissant. Dans ces circonstances, il était bien sûr hors de question d’éprouver un quelconque plaisir … Jusqu’à ce que, d’une manière ou d’une autre, l’idée me vint que je serais bloqué aussi longtemps que je m’opposerais à ce «quelque chose». Ce « quelque chose en moi » n’était, en fait, rien d’autre que moi-même. J’étais en train de me battre contre moi-même. J’étais en train de dire « non » contre mon propre « non ». Je menais un combat qu’il était impossible de gagner. Je comprenais que la seule solution était de commencer à dire « oui ». Mais à quoi? D’abord à mon propre « non »! Aussi longtemps que je m’opposais contre mon opposition, les choses ne pouvaient que s’empirer. Mais, si je commençais à accepter ma « non acceptation », si je faisais savoir à ce « quelque chose en moi » que le message était passé, ce « quelque chose en moi » n’aurait plus besoin de protester toujours plus fort pour se faire entendre. De cette manière je pouvais graduellement, peu à peu, muscle après muscle, un doigt à la fois, d’abord réduire et ensuite abandonner l’opposition, la tension et le stress. Je pouvais commencer à laisser sortir la tension de mon corps jusqu’à ce que je puisse me laisser emporter, sans résistance, par le mouvement de la roue. J’avais repris la maîtrise de mes émotions et de mon corps. Aussi longtemps que je continuais à croire qu’il y avait un quelque chosequi était plus fort que moi, j’étais littéralement paralysé et impuissant. Dès que je reconnaissais que j’étais l’auteur de ce quelque choseet que j’en étais responsable, je n’en étais plus l’esclave et je pouvais faire d’autres choix. A ce momentlà, je pouvais aussi commencer à éprouver du plaisir, car qu’est-ce que le plaisir, sinon, se laisser emporter dans un mouvement sans résister ? Qu’il s’agisse du saut à l’élastique ou d’écouter de la musique. Quand on lit un livre ou qu’on regarde un film, n’est-ce pas pour se laisser prendre dans un mouvement et d’y éprouver du plaisir ?. Aussi longtemps qu’on reste critique et qu’on recherche ce qui est imparfait ou invraisemblable, on n’éprouve pas de plaisir. On éprouve du plaisir en disant « oui » et en abandonnant toute résistance, en étant prêt à « volontairement suspendre son incrédulité ».36

Plus tard, j’ai compris que cette anecdote pouvait être un modèle pour beaucoup d’autres expériences de vie et que je pouvais y apprendre comment adopter un style de vie plus

36 La pilosophe Patricia de Martelaere a él&boré ces idées et les suivantes dans un certain nombre d’essayes dans ces recueils Wereldvreemdheid, Een verlangen naar ontroostbaarheid et Verrassingen. Ed. Meulenhof.

heureux. Si, par exemple, on abandonne l’opposition au froid, le froid est tout d’un coup beaucoup moins désagréable mais devient simplement une autre façon de sentir son corps qui peut même devenir une source de plaisir.

Souvent on croît comme évident que le plaisir va aussi apporter le bonheur. Hélas, toute forme de jouissance est soumise à la loi des rendements décroissants, la fameuse law of diminishing returns : à chaque nouvelle acquisition, le plaisir devient moins grand. Deux croisières ne vous rendent pas deux fois plus heureux et trois repas par jour dans un restaurant cher ne vous rendent pas trois fois plus heureux. Une culture du plaisir,une course hédoniste, semble, a première vue, séduisante, mais mène au long terme à la déception et est source de beaucoup de comportements problématiques comme des addictions, des problèmes alimentaires, de l’automutilation, de la dépression ou de la délinquance. Plus on essaie de jouir, moins on jouit. C’est ce que j’ai appelé plus haut la philosophie du naufragé : une vie de désespoir. Il est dit que le désespoir des riches est plus grand que le désespoir des pauvres. En effet, les pauvres peuvent avoir l’illusion ou l’espoir que plus d’argent les rendrait plus heureux, mais les riches savent que ce n’est pas vrai. C’est le soi-disant paradoxe d’Easterbrook : le bien-être n’accroit pas avec l’affluence matérielle, bien au contraire : c’est la dépression qui va en augmentant.37 Pour celui qui a déjà tout, il ne reste plus rien à espérer, à désirer. Beaucoup de gens prétendent savoir que l’argent ne rend pas heureux, mais ça ne les empêche pourtant pas de le désirer. Ce n’est que celui qui a largement assez d’argent et de possessions matérielles, qui sait vraiment que l’argent ne rend pas heureux. Mais c’est quoi « assez » ?38

Une vie de plaisir ne peut, en effet, pas être une expérience de plénitude et de bonheur. Rien ne peut être, à long terme, plus fade et ennuyeux que l’éternelle satisfaction immédiate de tous les souhaits et désirs. En donnant à nos enfants, avec les meilleurs

37 Gregg Easterbrook. How Life Gets Better While People Feel Worse. Random House, 1993.

38 Cela peut être lié au principe de plaisir décrit par Freud. Un peu lapidairement, on peut dire que, selon Freud, le bonheur de l’homme est entravé par le conflit entre le principe de plaisir et le principe de réalité, entre le désire de laisser libre cours à nos convoitises de façon débridé d’une part, et les contraintes, les obligations et les interdits de la société de l’autre. Ce sont ces limitations qui feraient obstacle au bonheur de l’homme. Il s’ensuivrait donc, que la levée de ces restrictions conduirait à un plus grand bonheur.

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