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La force de la non-violence

web comme Wikipedia permettent aux gens de partager leurs expériences et connaissances.74

A la base de toute violence il y a un schéma de pensée qui prétend que dans toute différence il est question de vrai et de faux et que l’erreur de l’autre (ou de nous-même) doit être corrigée. Cette forme de pensée exclusive et binaire mène à l’analyse, à la classification et au diagnostic, mais aussi aux reproches, aux accusations et finalement au conflit, à la dispute, à la violence et à la guerre. Par cela nous nous aliénons de nos propres besoins et de la prise de conscience de notre responsabilité pour nos pensées, sentiments et besoins. Ceci est souvent incorporé et incrusté dans notre langage, comme nous l’avons déjà dit. Une attitude consciente, non-violente contribue à une attention et une présence bienveillante en nous concentrant sur des sentiments et des besoins qui existent maintenant, au lieu de sur ce que nous considérons comme erroné en nous-même ou chez les autres. Ceci exige une pensée ouverte, complémentaire et une attention pour les sentiments et besoins de nous-mêmes et de l’autre, au lieu de chercher des explications, des interprétations, des diagnostics, des conseils ou de faire des reproches, convaincu qu’il est de notre devoir de résoudre tous les problèmes et d’assurer que les autres se sentent mieux. Nous avons la capacité d’être réellement attentif et conscient de ce qui se passe en nous et en même temps d’être présent à l’autre et d’écouter ses sentiments et ses besoins de ce moment.

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Le modèle de base d’une attitude non-violente est que chaque comportement est la conséquence d’une émotion qui est à son tour la conséquence d’un besoin. L’être humain fait, à chaque moment, de son mieux. Chaque comportement part en principe d’une intention positive, notamment la satisfaction d’un certain besoin ou désir.

Besoin => émotion => comportement

74 Jeremy Rifkin. The Empathic Civilization. The Race to Global Consciousness in a World in Crisis. New York: Jeremy P. Tarcher/Putnam, 2009. Cf. Également Jeremy Rifkin. The Age of Access. New York: Jeremy P. Tarcher/Putnam, 2000.

Une attitude non-violente part du principe que l’autre n’a pas à satisfaire nos besoins. Personne n’est venu au monde pour satisfaire nos besoins. Nous pouvons avoir des souhaits et des désirs concernant quelqu’un d’autre, nous pouvons demander si l’autre serait d’accord pour y répondre, mais nous ne pouvons en aucun cas l’exiger. Aussi longtemps que la colère et l’agressivité sont présentes en nous, la colère et l’agressivité seront également dans nos relations. Une dispute, c’est de l’agressivité mutuelle. Toute agressivité et toute violence commence par l’idée que l’autre n’est pas assez bien tel qu’il est, et qu’il doit être corrigé. L’idée est que l’autre présente des défauts et des faiblesses qui nous donnent le droit de nous irriter et de nous énerver et que nous devons corriger. La colère et l’agressivité peuvent être explicitement exprimées comme de la violence psychique sous la forme de reproches et d’insultes, ou même sous la forme de violence physique, mais peuvent aussi être implicites sous la forme d’attentes, de déceptions, de tristesse et d’autres formes d’agressivité affective et de chantage émotionnel. La colère et l’agression indiquent que l’autre n’est pas considéré comme un être de valeur, mais comme un être imparfait et à améliorer. C’est un manque fondamental de bienveillance et de respect. De cette manière, chaque relation, au quotidien, se dégrade inévitablement vers une zone de guerre dans laquelle une bataille de pouvoir a lieu. La plupart des armes utilisées sont des expressions lourdement chargées d’émotions, insultantes et humiliantes, telles que « tu es un égoïste », « tu ne veux pas comprendre », « tu es de mauvaise volonté », « je me sens trahi », « tu m’as trompé », « tu profites de moi », « tu m’abuses », « tu m’abandonnes », et bien d’autres. Ainsi, nous projetons des caractéristiques négatives sur l’autre qui, ainsi, devient le « mauvaisautre»sur lequel nous pouvons à juste titre nous fâcher parce qu’il nous a fâché. L’autre est la faute de notre colère. Pour se construire une vie avec moins de violenceune attitude fondamentalement pacifisteest nécessaire. Pour cela il n’y a que deux ingrédients qui sont indispensables : d’un côté prendre les reproches et l’agression des autres de façon moins personnelle, et de l’autre faire soi-même moins de reproches et d’agression en créant plus de lien et d’une attitude de plus de compassion. Une histoire zen illustre le premier point. Supposons que vous êtes en train de naviguer tranquillement dans votre petit bateau sur une rivière et que vous jouissiez pleinement de la nature. Soudain un autre petit bateau heurte le vôtre. Il est compréhensible que vous alliez alors réagir de façon irritée et fâchée. Mais quand vous vous retournez, vous remarquez que l’autre petit bateau est simplement vide… Alors, votre colère ne disparaît-elle pas ? Toujours est-il que l’événement est fâcheux, mais il n’y a tout simplement personne sur laquelle vous pouvez vous fâcher. Alors, vous vous contentez de le repousser et, apaisé, vous continuez votre trajet au fil de l’eau. L’idée libératrice est, donc, que les autres sont souvent comme un bateau vide. Il n’y a personne qui a consciemment voulu vous énerver ou vous mettre en colère. L’autre était si occupé avec ses propre problèmes, qu’il a heurté votre bateau par simple inadvertance. Autrement dit : voyez le comportement de l’autre comme une expression de ses problèmes, plutôt que comme un assaut sur votre vie et sur votre bien-être.

voyez le comportement de l’autre comme une expression de ses problèmes, plutôt que comme un assaut sur votre vie et sur votre bien-être.

Faire soi-même moins de reproches et être moins agressif nécessite que nous cessons d’exiger des autres qu’ils satisfassent nos besoins. Sinon nous réduisons l’autre à un instrument de satisfaction de nos besoins. Alors il s’agit de nous-mêmes et pas de l’autre, tandis que l’amour est justement l’attention pour et l’acceptation de l’autre. Une difficulté est que, bien souvent, nous n’osons pas dire ce que nous désirons vraiment. Nous avons peur de nous dévoiler et nous pensons que nous nous montrons alors faible et vulnérable. Nous avons peur de devenir dépendant de l’autre. Au lieu de cela il est plus facile et plus « fort » de reprocher à l’autre son manque d’attention, de tendresse ou d’amour. Nous projetons plutôt notre mécontentement sur l’autre. La conséquence en est que l’autre se sentira attaqué et se défendra en faisant, lui aussi, des reproches et des accusations. Le remède pour cela est de d’être plus transparent et d’exprimer simplement ce qu’on ressent et désire vraiment, sur la base de ses besoins, au lieu de se cacher derrière des reproches et des accusations.

Pour cela vous devez bien faire attention à vos propres sentiments d’irritation et de colère, pour examiner ce que vous désirez dans le fond. Vous pouvez alors exprimer ce besoin comme un souhait, un désir, plutôt que comme une exigence, un ordre ou un reproche. Ceci est la base de la communication non-violente.75 Il serait bien de parler un langage plus pacifiste et respectueux au lieu d’un langage lourdement chargé d’émotions, comme décrit au préalable. Vous pouvez par exemple parler du choixque l’autre a fait, au lieu de sa trahison ou de sa mauvaise volonté. Il s’agit d’utiliser un langage plus respectueux et descriptif au lieu d’un langage jugeant et condamnant. Le respect mutuel est la base de chaque relation. Quand cette base n’y est plus, la relation devient inévitablement un terrain de combat. Il est nécessaire, dans certains cas, de recourir à une intervention ferme. En soi, le bien ne peut jamais être acquis par la violence. L’utilisation de la force est seulement justifiée pour protéger les droits ou la vie des individus ou pour prévenir des accidents ou des injustices. On parle alors d’un pouvoir protecteurnécessaire quand des personnes sont en danger, par ignorance, de se porter préjudice ou de nuire aux autres. De cette façon on va empêcher avec fermeté qu’en enfant traverse la rue sans regarder.

75 Marshall B. Rosenberg. Geweldloze Communicatie. Rotterdam: Lemniscaat, 2003. Voir également : Thomas D’Ansembourg. Cessez d’être gentil, soyez vra i! Editions de l’homme, 2001. Voir aussi : Deborah Tannen. Je begrijpt me gewoon niet. Amsterdam: Ooievaar pocket, 1993.

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