La_Quête_numéro 223_Juillet 2020

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MODE ÉPHÉMÈRE :

OBSOLESCENCE PSYCHOLOGIQUE

Traditionnellement, on pouvait compter sur trois à quatre collections de vêtements par année, en fonction des saisons. Aujourd’hui, il n’est pas rare d’en compter plus de 50 annuellement. La mode éphémère est donc caractérisée par un rythme de production massive de l’industrie du prêt-à-porter. Né dans les années 1990, ce type de confection est porté par des bannières telles que Zara et MANGO qui proposent des pièces inspirées des défilés de mode de luxe, mais à moindre coût. Une surconsommation notable résulte de ce phénomène, puisqu’il encourage une consommation effrénée de vêtements à prix modiques. « Les gens se lassent des produits avant même que ceuxci soient désuets. Le rythme du changement de collection entraîne une obsolescence psychologique auprès des consommateurs », indique Daniella Besse. Bien que l’usure prématurée des vêtements soit due à la baisse de la qualité qu’a imposé le rythme de production, elle souligne que les entreprises n’ont nul besoin d’intégrer une désuétude physique aux produits, car le phénomène de mode s’en charge.

UNE RESPONSABILITÉ COLLECTIVE Selon Mme Besse, la responsabilité est collective et repose autant sur les consommateurs que sur les entreprises. « Oui, la marque produit, mais, si elle cesse, les consommateurs seront mécontents, car ils se sont habitués à ce cycle de consommation. L’obsolescence psychologique entraînée par la mode est peut-être une conséquence de ce que l’industrie a fait, mais c’est avant tout par le comportement des consommateurs que

UN DÉSASTRE POUR L’ÉCOLOGIE Dans ce cycle frénétique de l’éphémère, la planète ne ressort pas gagnante. Selon l’agence gouvernementale Recyc-Québec, 20 % de la pollution industrielle de l’eau est causée par l’industrie du textile. Un rapport des Nations unies estime qu’il faut 7 500 litres d’eau pour fabriquer un jean, soit l’équivalent de l’eau bue par un être humain pendant sept ans. Andrew Morgan, dans son documentaire The True Cost (2015) démontrant les conséquences de la mode rapide,

les choses s’amélioreront », argumente la doctorante. Cette dernière constate effectivement une grande dissonance entre, d’une part, la conscience générale des enjeux environnementaux et sociétaux liés à la surconsommation et, d’autre part, le rythme de consommation qui demeure ahurissant. Le slow-fashion, soit la production locale ou encore le recyclage, est souvent présenté à contrario au fast-fashion, mais reste un concept utopique selon Mme Besse. affirmera même que « l’industrie de la mode est la deuxième industrie la plus polluante sur Terre, après celle du pétrole ». Pollution de l’air par dioxyde de carbone, pollution des sols par pesticides, émissions excessives de gaz à effet de serre à l’origine du réchauffement climatique… tout ceci pour des vêtements qui, en définitive, ne seront jamais portés plus de douze mois. Lis Suarez, fondatrice d’Ethik et Fem International, en dressait déjà un alarmant constat en 2016 : sur 26  kg de textile achetés par les Québécois, 23  kg sont jetés dans la même année. Malia Kounkou et Elisa Zanetta

Crédit photo : iStock

L’industrie de la mode est au deuxième rang des plus grands pollueurs mondiaux, notamment à cause du fast-fashion soit la mode éphémère. Daniella Besse, doctorante de l’Université Laval, se penche sur une option économiquement viable pour les entreprises de prêt-àporter, afin qu’elles emboîtent le pas vers le développement durable. La Quête s’est entretenue avec elle afin de connaître les solutions potentielles à notre surconsommation.

Selon Greenpeace, en moyenne 60  % de vêtements de plus sont achetés qu’il y a 15 ans, et la moitié d’entre eux est jetée après un an.

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LA QUÊTE

JUILLET 2020


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