TRANSHUMANISME
LES RELIGIONS DU FUTUR C’est un enjeu qui touche au plus profond des croyances. Quand la plupart des religions traditionnelles promettent un paradis céleste, le transhumanisme prédit la vie éternelle. Plongée dans cette idéologie qui entend vaincre la mort grâce à la technologie et au progrès scientifique.
surpeuplé. Au 20e siècle, le « désenchantement » du monde, propulsé par les Lumières et rythmé par la marche optimiste du progrès scientifique ont concordé avec la naissance du transhumanisme. Selon Elaine Després, coordonnatrice du Centre de recherche sur le texte et l’imaginaire de l’Université du Québec à Montréal, la période était idéale. « La post-religion était la façon parfaite pour le capitalisme de s’emparer de la volonté d’améliorer l’individu. »
Sur le site de l’Association française transhumaniste, à aucun moment l’impact écologique de l’humain amé-
La chercheuse analyse les œuvres de science-fiction pour voir comment ces auteurs imaginent le futur de l’huCrédit photo : Victor Lhoest (ZinkGlobal, the key to the future exposé à Copenhague)
Le transhumanisme rêve d’un homme sans limites. Ici, on ne parle pas des dieux au sens qu’ils pourraient faire s’abattre la foudre, mais d’entrepreneurs de la Silicon Valley, d’universitaires, et même d’associations. Nicolas Le Dévédec, auteur du livre
société qui pousse les personnes à se dépasser jusqu’au burnout. Promettre une vie éternelle est complètement déconnecté des réalités ». Le Dévédec regrette aussi que les transhumanistes ne cherchent pas à réduire l’impact écologique des humains sur terre, mais plutôt à changer leur nature. « Ce sont toujours des solutions technologiques ou scientifiques. Ils vont par exemple évoquer l’idée de modifier génétiquement les êtres humains pour qu’ils soient moins polluants ».
Elaine Després estime que si on compare la façon dont on imaginait le 21e siècle au début du 20e, à chaque fois les œuvres de fiction pointent des problèmes de cette époque-là, ça ne dit rien de la nôtre.
La perfectibilité humaine des Lumières au transhumanisme, explique que « toutes tendances confondues, l’idée du transhumanisme est d’améliorer et de maîtriser l’humain, tant son corps que ses émotions. »
lioré (et possiblement immortel !) n’est présenté comme un problème. Le remède ? La technologie, encore et toujours. Le sociologue fait le parallèle entre ces hypothétiques solutions et une « économie de la promesse complètement spé« Promettre une vie éternelle culative » propre au est complètement déconnecté modèle capitaliste. des réalités. »
Le docteur en sociologie et sciences p o l i t i q u e s , p e rsuadé des limiN O U V E A U X tes de l’humain, Nicolas Le Dévédec BLASPHÈMES s’inquiète. « Il y a l’épuisement des Bien sûr, les idées transhumanistes ressources naturelles, mais aussi des sont apparues bien avant la crise cliressources humaines. On vit dans une matique ou la crainte d’un monde
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LA QUÊTE
main et son évolution. Le fantasme transhumaniste ultime, explique-t-elle, est de scanner l’âme humaine pour la télécharger sur un support numérique. « C’est une idée assez ancienne dans la science-fiction. Dans la série Upload, des crises émergent dans les cercles familiaux parce que certains sont encore croyants. Si on décide de devenir immortel, on échappe à l’élévation pour rejoindre un certain paradis. » Autre blasphème souvent mis en image dans la science-fiction : le contrôle de notre libre arbitre et la prédiction SEPTEMBRE 2021