GLNF Magazine n°117 - mars 2018

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EVENEMENT

Bruno Pinchard

Ted conférence

QUATRE TEMPS POUR DÉCOUVRIR L'ÉTERNITÉ Ce soir-là dans le Grand Temple de la GLNF, le temps s'est suspendu l'espace d'un court instant. Quatre-vingt minutes, quatre fois vingt minutes, pour quatre conférences uniques dédiées au "Temps". Des conférences courtes, incisives, poétiques - dites par cœur et avec le cœur, par un chef d'orchestre, un historien, un neurologue et un philosophe.

P

our commencer, le musicien Philippe Fournier a pris le temps de parler tempo. Celui du corps : le premier signe de vie n'est-il pas un son, le son du cœur qui bat ? Un son qui se transforme aussitôt en rythme, dans un battement rappelant celui du métronome, pendule aux vibrations infaillibles gradué entre 40 et 200 battements par minute. Soit très exactement le rythme le plus lent ou le plus rapide que le corps humain "comprenne"... En dessous, on perd le tempo, au dessus également.

Mais le temps musical pour Philippe Fournier, s'exprime surtout à l’Opéra, dont le génie consiste à dissocier perception et compréhension : « il y a d'abord le temps où je comprends ce qui se passe en écoutant les paroles, puis vient ensuite le temps où je ressens l'émotion, véhiculée par la musique», explique-t-il. Un second temps plus lent, qui prend son temps et n'est pas dans le même rythme que celui de l'intellect. Voilà pourquoi le chef d'orchestre qui doit dissocier les temps des instruments pour les rendre harmonieux n'est pas le chef « au-dessus des autres » - meilleur que les autres - mais tout simplement celui chargé de dire à l'orchestre quel sera le temps suivant. Celui qui a un temps d'avance.

L'espace de quelques secondes, l’assistance réunie pour ce moment exceptionnel a cru ressentir, derrière cette remarque, un guide oublié pour quelque Vénérable Maître désireux de s’assurer qu’il possède toujours un temps d'avance sur les Frères dans le déroulement des cérémonies. Vint alors - avec l'historien Yves Hivert Messeca - le temps de parler mémoire et histoire, en débutant par cette sentence : « Le temps passe ! La mémoire s’efface ! L’histoire balbutie ! » À la différence de l'harmonie musicale du chef d'orchestre, « Temps et histoire ne marchent pas d’un même pas » nous confie le second conférencier. Le temps est l’espace où le passé se déploie, mais le temps passe, « coule » s’efface. La « résurrection objectivée du passé par l’histoire est donc en partie illusoire ». Ce qui entraîne des liens difficiles entre mémoire et histoire. « La mémoire est un vécu à la fois sélectif, évolutif et émotionnel, partiel, partial pouvant atteindre un caractère collectivement sacré », rappelle Yves Hivert-Messeca. Elle est constituante des corps sociaux, et change avec le temps. À l’inverse de la mémoire, l’histoire se définit comme un savoir, une démarche scientifique. Dans ces conditions, « l’historien

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