#4 Juin 2019

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Japan-ness : Arata Isozaki, Pritzker 2019

le Japon accĂšde au SeptiĂšme Ciel » Il est de ces penseurs-bĂątisseurs traversant les Ă©poques qui reprĂ©sentent Ă  eux seuls un fragment impĂ©rissable et quasi-Ă©ternel de l’histoire architecturale de leur pays. Arata Isozaki, au prix de plus d’un demi-siĂšcle de dĂ©votion Ă  la matiĂšre, s’est vu en mars dernier dĂ©cernĂ© la plus prestigieuse rĂ©compense de notre profession, le Pritzker Price. NĂ© en 1931 sur les rivages de la ville cĂŽtiĂšre nippone d’Oita, sur l’üle de Kyushu, c’est pourtant Ă  l’UniversitĂ© de Tokyo, comme nombre de ses confrĂšres, qu’il obtenu en 1954 son diplĂŽme d’architecte avec comme professeur Ă©mĂ©rite le paisible Kenzo Tange (Pritzker Price 87’) (pour qui il travailla jusqu’en 1963.) L’Ɠuvre construite de l’architecte, maintes fois rĂ©compensĂ©e (RIBA (1986), Prix Leono d’Oro (1996)) et acclamĂ©e pour son avant-gardisme, se caractĂ©rise pourtant comme une architecture « sans style dĂ©fini ». Une premiĂšre pĂ©riode notable marquĂ©e par des Ă©di-

fices Brutalistes (Oita Prefectural Library) trĂšs influencĂ©s par le Modernisme europĂ©en en expansion qui se poursuivit au milieu des annĂ©es 70’s par une seconde, plus composite, caractĂ©risĂ©e par l’assimilation des prĂ©ceptes du Post-Modernisme et de la gĂ©omĂ©trie traditionnelle japonaise (Tsukuba Center Building, MOCA, Art Museum MITO). Un alliage mariant des compositions Ă  la puretĂ© gĂ©omĂ©trique ou au design vernaculaire Ă  de l’ingĂ©nierie de pointe qui ont permis Ă  l’architecte de bĂątir aux quatre coins du globe en proposant une Ɠuvre architecturale complexe et hĂ©tĂ©rogĂšne. Si son architecture, conciliant avec habiletĂ© tradition et internationalisme a traversĂ© les Ăąges, la renommĂ©e croissante d’Isozaki s’explique aussi par ses recherches expĂ©rimentales et thĂ©oriques comme urbaniste. De ses « Cluster In The Air », vĂ©ritable manifeste du MĂ©tabolisme qui redĂ©finissait les tracĂ©s de la ville de Tokyo, aux expĂ©riences remarquĂ©es du Fukuoka Nexus World Housing Project, Isozaki est restĂ© l’un des plus influents Ă©missaires responsables de l’émergence du Japon sur la scĂšne architecturale contemporaine mondiale. AprĂšs « La Pluie Noire » qui a considĂ©rablement marquĂ© ses annĂ©es d’enfance, c’est une pluie d’applaudissements qui a donc consacrĂ© Ă  jamais au panthĂ©on de la profession le thĂ©orico-practicien Arata Isozaki. Un parcours sculptĂ© par une architecture protĂ©i-style qui dĂ©buta par le vide et le nĂ©ant des dĂ©combres de la guerre pour se « conclure » sous les projecteurs pailletĂ©s d’or de la « Windy City ». A l’image d’un sulfureux dialogue d’ « Hiroshima Mon Amour », le huitiĂšme astre intronisĂ© de son pays (K. Tange, F. Maki, Ando, SANAA, T. Ito & S. Ban) a donc rĂ©ussi avec ingĂ©niositĂ© a « nouĂ© une relation durable entre l’Est et l’Ouest » tout en dĂ©voilant une architecture japonaise capable d’assimiler les multiples influences culturelles extĂ©rieures pour en extraire l’essence et rassembler ses adeptes sous l’étendard de la « Japan-Ness ». Vincent Richard du Perron Illustrations : Pasha Muradov

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culture architecturale


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