#14 novembre 2022 - Architecture de l'urgence

Page 1

N°14 // novembre 2022 // Gratuit Journal Ă©tudiant de l’ENSA Paris Val-de-Seine
interview Atelier Rita Architecture
Vie étudiante Chers tous ! Visite Sur le chantier de Shigeru Ban AthÚnes comme ma poche Le berceau de la civilisation occidentale
© David Boureau
de l’urgence

Qu’ est ce que l’urgence ? Aujourd’hui, ce terme est reliĂ© Ă  de nombreuses problĂ©matiques : Ă©cologiques, Ă©conomiques, sociales, et mĂȘme mĂ©dicales. Toutes ses urgences apparaissent aprĂšs des crises sanitaires, climatiques, Ă©conomiques, politiques, sociales. Elles reprĂ©sentent le caractĂšre pressant des consĂ©quences de ces crises, par la prĂ©caritĂ© financiĂšre, alimentaire ou sanitaire; un manque, allant parfois jusque l’absence d’un foyer. Ce manque est synonyme de besoin. Malheureusement le caractĂšre temporel rapide de ces situations nĂ©cessite une ingĂ©niositĂ© technique vis-Ă -vis de la construction de ces foyers. Comment produire un logement dĂ©cent Ă  moindre coĂ»t, dans une dynamique Ă©phĂ©mĂšre? Comment inscrire cette conception d’un projet limitĂ©e dans le temps dans les circonstances Ă©cologiques actuelles? Cette architecture, ayant pour vocation d’abriter, a un rĂŽle Ă  jouer sur cette scĂšne. Un rĂŽle que diffĂ©rents architectes ont jouĂ© au cours du temps : Jean ProuvĂ© et ses 12 structures prĂ©fabriquĂ©s dites maisons des jours meilleurs en est un exemple. Aujourd’hui, en parallĂšle de l’architecture star et des grands projets luxueux, la question de l’architecture de l’urgence se matĂ©rialise en grandes rĂ©fĂ©rences comme Shigeru

Ban, « architecte de l’urgence » de par ses innovations en la matiĂšre avec le papier et le carton. Aujourd’hui nous partons Ă  la rencontre de l’Atelier Rita, une agence ayant travaillĂ© main dans la main avec des associations comme EmmaĂŒs pour rĂ©pondre Ă  cette urgence du foyer pour des rĂ©fugiĂ©s de multiples horizons, et l’antenne Française du Cabinet Shigeru Ban, avec une visite des abris d’urgence face Ă  la crise ukrainienne. L’urgence en architecture, bien qu’elle soit la plus pressante dans les dimensions citĂ©es plus tĂŽt, est prĂ©sente en des lieux bien plus internes. En 2020 l’ENSA PVS, subit un Ă©vĂ©nement tragique. La question du bien-ĂȘtre Ă©tudiant en architecture revient sur le devant de la scĂšne des mĂ©dias et de la polĂ©mique. Il est plus urgent de rĂ©fugier, mais n’est il pas Ă©galement urgent de maintenir (ou rĂ©tablir?) un environnement sein est propice Ă  l’apprentissage ? Il s’agit aprĂšs tout des annĂ©es qui donneront le « La » pour le reste de notre trajet dans cette profession qu’est l’architecture. Et si ce « La » n’était simplement pas juste ?

2
Léa Balmy Pauline Toussaint Mathieu Khairallah Présidente Vice-présidente Rédacteur chef Valora Brice Thomas Nodari Co -TrésoriÚre Co -Trésorier Johanna Lepante B. Secrétaire Rodrigo Romero S. Camille de Ruffray Romane Bernard Jean-Cassien Marmey Iliona Médard Valentin Bonvarlet
2 L’équipe
Paul Priel Ornella Trantoul Laure Manissadjan Agathe-Paloma Pastré Mathieu Khairallah Ainsi que , Dorianne Dupré, Martin Lefevre et Safaa Sentissi Maquettiste

Architecture de l’urgence SOMMAIRE

DOSSIER

VIE ÉTUDIANTE

Extrait

« C’est une action citoyenne avant d’ĂȘtre architecte »

Action solidaire : crĂ©ation d’une intimitĂ© en explosĂ©e p.4

Architecture et urgence ? p.6

Entretien avec Atelier Rita

Extrait

« Nous ne vivons pas tous la mĂȘme rĂ©alitĂ© »

Chers Tous, ThĂšse CIFRE

Mental Obssessions Atelier Rita

AthĂšnes comme ma poche

« Les gens souffrent du manque d’intimitĂ© »

Extrait p.8

p.15 p.16 p.18 p.19

3

Action solidaire : la crĂ©ation d’une intimitĂ© explosĂ©e

Jeudi 24 février 2022, la guerre en Ukraine éclate.

LAes chaines d’infos s’emparent du sujet brĂ»lant, le Monde publie un papier sur les ukrainiens dont la vie vient de changer Ă  jamais.

Marc Ferrand, architecte de profession mais avant tout citoyen, ne peut s’empĂȘcher de remuer les diffĂ©rentes instances, mairie, assos, pour accueillir ces milliers de personnes dĂ©racinĂ©es dont l’espace intime vient de voler en Ă©clat.

AssociĂ© Ă  l’architecte Shigeru Ban, pour lequel la notion d’intimitĂ© lors de catastrophes est une prioritĂ© et un sujet de prĂ©dilection (utilisation depuis des annĂ©es de carton en tube pour la crĂ©ation d’habitat d’urgence), Marc Ferrand est habitĂ© par une volontĂ© urgente de recrĂ©er un espace intime grĂące Ă  un systĂšme ingĂ©nieux de structure en carton recouvert de tissus.

Le systĂšme de partition de l’espace permet de recrĂ©er une intimitĂ©, grĂące aux tubes de carton et aux chutes de tissus. En appelant aux dons, l’association Aurore, en charge des rĂ©fugiĂ©s, a permis de bĂ©nĂ©ficier de nombreuses chutes de tissus de divers fournisseurs de textile. Le point positif de cette trame est avant tout sa structure

facile Ă  mettre en Ɠuvre car, les cartons peuvent ĂȘtre dĂ©coupĂ©s et assemblĂ©s n’importe oĂč et par n’importe qui. L’ensemble de la matiĂšre premiĂšre nĂ©cessaire Ă  la fabrication de ces cases au sein d’un gymnase du 11Ăšme arrondissement a Ă©tĂ© fourni bĂ©nĂ©volement par diverses usines touchĂ©es par la gravitĂ© et l’urgence de la situation.

L’apparition de ce systĂšme permet de partitionner l’ensemble pour en faire des espaces privĂ©s. Car lorsque l’on vous prend tout l’intimitĂ© reste tout de mĂȘme un droit fondamental.

Ce chantier n’est pas un chantier habituel, audelĂ  de penser et construire cette trame afin de construire une structure cartonnĂ©e, c’est un projet citoyen et humain. L’ensemble de la main d’Ɠuvre est bĂ©nĂ©vole, des Ă©tudiants de diffĂ©rentes Ă©coles d’architecture, des citoyens, des bĂ©nĂ©voles sont rĂ©quisitionnĂ©s pour scier, dĂ©couper, coller le tout pour qu’en une journĂ©e le tout soit bouclĂ©.

En somme, ce projet est une aide dĂ©pourvue de bĂ©nĂ©fices financiers, bĂ©nĂ©vole, c’est une action citoyenne.

4 Dossier PremiĂšre
partie
5
VAN and Shigeru Ban Architects © photos : Romane Benard

Architecture et urgence ?

Dans un contexte de catastrophe et de crise, l’urgence est souvent mĂ©dicale ou alimentaire avec pour contrainte la nĂ©cessitĂ© d’agir rapidement.

«O

Dns’accorderait tous pour dire que pratiquer une intervention chirurgicale sans ĂȘtre soit mĂȘme chirurgien n’est pas une bonne idĂ©e »1. L’architecture ayant originellement comme but d’offrir un toit, son rĂŽle dans ces situations la place alors parmi les professions concernĂ©es pour agir.

Cependant, comment peut ĂȘtre conciliĂ©e la temporalitĂ© contraignante de l’urgence avec les contraintes propres Ă  l’architecture aux dĂ©lais de construction continuellement allongĂ©s ?

En effet, l’architecture liĂ©e Ă  l’urgence restant sans dĂ©finitions prĂ©cises, le champ d’action et le cadre d’étude en font alors un questionnement large et ouvert au dĂ©bat. On pourrait rapprocher les architectes Ɠuvrant en ce sens d’une forme d’architecture humanitaire2. Pourtant, par exemple les actions des membres d’ICONEM ou encore Forensic Architecture n’en font-elles pas alors dans ce cas aussi des architectes de l’urgence ?

Qui intervient au sein de l’architecture pour ce domaine au fort caractĂšre humaniste ? L’architecte de l’urgence est-il finalement un nom ou modestement une organisation3 ? Et avec quelle lĂ©gitimitĂ© agir ? En effet, les territoires concernĂ©s Ă©tant sans frontiĂšres face aux alĂ©as des crises et risques omniprĂ©sents, la population sinistrĂ©e a-t-elle aussi un rĂŽle ? Dans certains cas, savoir-faire occidentaux et techniques traditionnelles locales cohabitentelles alors ou sont-elles mĂȘme prise en compte l’une comme l’autre ?

6 PAR Dossier PremiĂšre partie

Effectivement, face aux sources multiples de crises, les interventions sont alors constamment Ă  rĂ©adapter. L’architecte doit composer avec les consĂ©quences des altĂ©rations du temps (patrimoine), d’alĂ©as climatiques comme des catastrophes naturelles, mais Ă©galement technologiques ou encore humaines dans des contextes de guerres et destructions. L’architecture liĂ©e Ă  l’urgence dĂ©passe donc la simple construction avec un caractĂšre social extrĂȘmement fort dans la mesure oĂč il s’agit d’intervention aprĂšs une catastrophe auprĂšs de populations touchĂ©es physiquement ou moralement.

Quelles sont donc les prioritĂ©s d’intervention et comment sont-elles mise en place ? Des techniques et matĂ©riaux4 de construction sont-ils alors exclusifs de l’architecture d’urgence et pour quelle qualitĂ© et pĂ©rennitĂ©?

Outre la problĂ©matique de l’intervention, la question de la reconstruction se pose Ă©galement. Il s’agit de pouvoir mobiliser rapidement, financiĂšrement et en termes d’équipements, une approche technique adaptĂ©e pour Ă©valuer et sĂ©curiser. Cependant, arrive tout de mĂȘme la question Ă  plus long terme de la reconstruction d’abord des habitats et des infrastructures dĂ©clarĂ©es essentielles (hĂŽpitaux, routes ou encore les Ă©coles). En effet, l’architecture ne doit pas devenir source de catastrophe non plus. Une infrastructure fragilisĂ©e par un manque de moyen peut devenir un risque, « l’enjeu c’est de construire vite (
) mais pas prĂ©caire »5

L’architecture et l’urgence ne convoquent donc pas seulement l’immĂ©diat mais amĂšnent Ă  penser l’aprĂšs. L’urgence ne convoque donc pas seulement l’immĂ©diat mais doit amener Ă  penser l’aprĂšs. Cette boĂźte de Pandore sociale, environnementale, culturelle ouvre ainsi la rĂ©flexion sur l intervention comme la reconstruction des ses acteurs.

"CitĂ©s millĂ©naires, voyage virtuel de Palmyre Ă  Mossoul", exposition Ă  l'Institut du monde arabe, 2018 - 2019 de l agence ICONEM qui choisit ses projets selon l’urgence de l’actualitĂ©. «Nous sommes particuliĂšrement engagĂ©s sur les pays en crise, notre objectif Ă©tant de documenter des villes historiques, des sites archĂ©ologiques, des Ă©difices patrimoniaux qui risquent de disparaĂźtre», Yves Ubelmann.

FĂ©vrier 2020, Röhsska Museum, exposition du Forensic Architecture prĂ©sentant trois affaires judiciaires et interrogeant la place du design comme outil de promotion des droits de l’homme et d’enquĂȘtes.

1 Alice Moreira, directrice de la Fondation Architectes de l’urgence Fondation créée par Patrick Coulombel, auteur

2 Multiplication de la naissance des ONG comme par exemple en 1979 : Architectes sans frontiĂšres ou encore de formation

Cyrille Hanappe

créé en 2005 le DSA Architecture et risques majeurs à Paris-Belleville

3 Penser l’architecte de l’humanitaire comme alors facilitateur : « Quand un architecte achĂšve sa mission (
) ce n’est pas son nom qui est citĂ©, mais celui de l’organisation », Samuel Bonnet, chef de la construction au sein de l’UnitĂ© eau et habitat du ComitĂ© International de la Croix-Rouge.

4 Exemple des maisons en carton de Shigeru Ban proposĂ©es pour les rĂ©fugiĂ©s suite au gĂ©nocide rwandais en 1994, au sĂ©isme de Kobe en 1995 ou encore d’Istanbul en 1999

5 « L’architecture d’urgence ne doit pas crĂ©er de l’habitat d’urgence. On conçoit des bĂątiments en adĂ©quation avec l’habitat local, les usages sociaux et les contraintes environne mentales. », Patrick Coulombel

7
du livre ArrĂȘtons l’amateurisme au nom de l’urgence, 2020 comme qui Maison en carton de Shigeru Ban pour Kobe, 1995

PremiĂšre partie

ATELIER RITA ENTRETIEN AVEC

Propos recueillis par Agathe-Paloma Pastré interview assurée par Paul Priel

L’Atelier RITA a Ă©tĂ© fondĂ© en 2016, par l’architecte Valentine Guichardaz. Le centre d’hĂ©bergement d’urgence situĂ© Ă  Ivry-sur-Seine a fait connaĂźtre l’agence et a Ă©tĂ© rĂ©compensĂ© du Prix de la PremiĂšre ƒuvre de l’Equerre d’argent en 2017. Ce projet met en avant l’engagement social de l’agence.

8
Dossier
© Photo : BAM ARCHIAtelier Rita

Dans votre projet de centre d’hĂ©bergement d’urgence Ă  Ivry-sur-Seine, le mot d’ordre a Ă©tĂ© « l’hospitalitĂ© ». Pouvez-vous nous en parler davantage ? Comment donner un moment de rĂ©pit, un sentiment de bienveillance auprĂšs des refugiĂ©s ?

On s’est dit qu’on allait faire un projet qui allait durer assez peu de temps, cinq ans, mais de faire en sorte que les gens trouvent une forme de repos un petit peu et trouvent dans leur parcours long et compliquĂ©, une espĂšce de bulle un peu oĂč se poser quelque temps.

On a essayĂ© de mettre en place un fonctionnement comme un village , c’est-Ă -dire qu’on reprend tous les codes des seuils progressifs, de l’extraversion Ă  l’intime.

On arrive par le centre, un espace public avec une grande place centrale qui est l’espace de sociabilitĂ©, l’espace d’échange. Progressivement, on va entrer dans les rues qui sont dĂ©jĂ  un espace plus intime oĂč l’on peut connaĂźtre ses voisins. Une fois que l’on est dans sa rue, on rentre chez soi. On souhaitait des rues plus larges que des coursives de logements classiques, c’est-Ă -dire non pas 1,2m mais 4 m : on peut s’approprier une part de ce lieu. On a bataillĂ© aussi pour avoir des vraies portes paliĂšres de logement et pas des portes en plastiques, lorsque l’on rentre chez soi, il y a un vrai acte de rentrer chez soi, de domesticitĂ© et la dignitĂ© passe par lĂ  aussi. Ça a fait partie des choses assez minimales, assez essentielles, mais qui nous ont paru ĂȘtre le minimum qu’on devait donner.

Comment vous avez eu l’idĂ©e de crĂ©er une petite ville dans le sens oĂč il y a une dimension personnelle et une dimension collective. Comment faire en sorte de ne pas ĂȘtre perdu dans la masse ?

C’est un centre qui accueille 400 Ă  450 personnes. EmmaĂŒs voulait des unitĂ©s de 50 personnes pour des questions de domesticitĂ©, d’accueil digne et de gestion, car ils ont un travailleur social pour 50 personnes. On s’est dit que ce systĂšme de rues avec 50 personnes fonctionnait bien. C’est un croisement entre la volontĂ© de gestion d’EmmaĂŒs et la volontĂ© du projet qu’on a voulu mettre en place qui coĂŻncidait plutĂŽt bien.

Par rapport Ă  ce projet et d’autres projets quelle est la part d’indĂ©terminisme et de flexibilitĂ© des usages ?

On a voulu rendre neutre et appropriable beaucoup d’espaces parce que les gens qui arrivent ont entre 15 et 20 nationalitĂ©s. Il y a des cultures d’habiter qui varient beaucoup entre l’intime et le dehors. Ces cultures d’habiter sont aussi liĂ©es Ă  des questions climatiques, quand il fait plus chaud, on se protĂšge plus, on ferme plus et ça fabrique. Il y a des gens qui sont plus introvertis, il y a des gens qui se projettent beaucoup vers l’extĂ©rieur.

On a pu leur donner des espaces relativement neutres, mais relativement vastes pour qu’ils puissent s’approprier comme ils ont envie, qu’ils puissent ĂȘtre chez eux, et que ça ne gĂȘne personne. Les travailleurs sociaux d’EmmaĂŒs accompagnent pour pouvoir vivre ensemble, de la maniĂšre la plus Ă©quilibrĂ©e qui soit.

C’est compliquĂ© de vivre ensemble, pour nous, pour les gens qui arrivent. Il y a une vraie adaptation et les gens souffrent un peu du manque d’intimitĂ© de ce point de vue. C’est une rĂ©alitĂ©, mais quoi qu’il en soit on a voulu rendre neutre cela pour que les choses soient possibles.

9
«
Pour essayer de donner de la dignitĂ©, il faut «prendre soin» avec de l’architecture que l’on met en place. »

Avez-vous suivi une formation sur le sujet de l’architecture de l’urgence Ă  l’école ou rĂ©aliser un projet Ă©tudiant sur ce thĂšme ?

Moi, typiquement, je n’ai jamais Ă©tĂ© formĂ©e Ă  l’architecture temporaire. NĂ©anmoins, j’arrive Ă  fabriquer une architecture temporaire avec mes outils d’architecte. C’est finalement plus une question

PremiĂšre partie

L’équipe de DH est allĂ©e visiter un autre chantier de l’agence Shigeru Ban, pionniĂšre en terme d’architecture de l’urgence, des chutes de tissus ainsi qu’une structure tubulaire cartonnĂ©e et mise en place sur la base d’un volontariat des Ă©tudiants de l’ensa Versailles afin d’accueillir des centaines de rĂ©fugiĂ©s ukrainiens forcĂ©s de quitter un pays en guerre. Les industriels français fournissent les chutes de tissus et cartons de leurs industries, en soutien aux rescapĂ©s. ConcrĂštement comment se passe un appel Ă  projet dans ces conditions d’urgence extrĂȘme ?

C’est trĂšs diffĂ©rent. C’était presque une dĂ©lĂ©gation de service public dans le sens oĂč ce fut confiĂ© Ă  EmmaĂŒs SolidaritĂ©. Ils ont construit le centre d’hĂ©bergement et le gĂšrent, mais c’étaient des financements de la mairie de Paris et de la prĂ©fecture. C’est donc un marchĂ© privĂ©, sans appel Ă  projet, sans concurrence. C’était dans l’urgence donc cela a permis d’accĂ©lĂ©rer le processus de cette maniĂšre-lĂ .

Nous sommes passĂ©s assez classiquement sur une conception-rĂ©alisation avec un systĂšme de modulaire bois 3D parce qu’il fallait que ce projet soit temporaire : il va durer cinq ans, il a durĂ© cinq ans, de 2017 Ă  2022. Il fallait donc qu’il ait une deuxiĂšme vie.

On n’est pas sur le mĂȘme degrĂ© sur l’intervention de Shigeru Ban, c’est un entre deux et c’est quand mĂȘme dĂ©jĂ  du bĂąti mĂȘme si c’est temporaire, c’est un peu plus organisĂ©.

de programmation qu’une question fondamentale d’architecture. Que ce soit temporaire ou que ça dure, la question de l’architecture est la mĂȘme. Ce qui qui m’intĂ©resse et que je dĂ©veloppe le plus, c’est la question du temps, de la temporalitĂ© de l’architecture. Qu’est-ce qui va nous survivre ? Comment le bĂątiment va dans son cycle de vie avoir plusieurs vies ? Comment va-t-il ĂȘtre dĂ©montĂ© ? C’est quelque chose de plus mĂ©tabolique, du temps de l’architecture qui subit le temps qui passe. Comment l’architecture peut ĂȘtre Ă  mĂȘme d’accepter ce temps qui passe qui la fait forcĂ©ment changer ?

Quand vous Ă©tiez en Ă©cole d’architecture, Ă©tiez-vous engagĂ©e dans des associations ?

On Ă©tait moins engagĂ©. NĂ©anmoins, Ă  titre personnel, j’ai toujours eu ce truc d’ĂȘtre dans le soin d’une certaine maniĂšre. L’idĂ©e d’une architecture qui peut prendre soin au sens large de la planĂšte, mais ça je l’ai dĂ©couvert aprĂšs. Prendre soin des gens, une espĂšce de fibre sociale, mais c’est un rĂ©tropĂ©dalage parce qu’en rĂ©alitĂ©, je ne l’analysais pas du tout Ă  l’époque. Je l’ai analysĂ© ensuite parce que quelqu’un m’a dit ensuite « ah bah tiens tu n’as fait que des projets de tel type », je suis un peu lente avec ça, mais c’est vrai que j’ai toujours Ă©tĂ© un peu lĂ -dedans.

10
«
L’architecture temporaire est une vraie question d’architecture tout court »
Dossier
©David Boureau

Est-ce que vous pensez toujours sur cette notion-lĂ  de vie Ă©tudiante que le thĂšme de l’urgence et de l’architecture temporaire est un peu survolĂ© en Ă©cole et l’est toujours ou vous pensez que ça commence Ă  changer, est-ce que vous pensez que ça doit changer ?

Les Ă©coles d’architecture, mine de rien, mĂȘme si vous ne le matĂ©rialisez pas, elles suivent la sociĂ©tĂ© parce que l’architecture suit la sociĂ©tĂ©. Oui, cela Ă©volue avec des initiatives pĂ©dagogiques dans les Ă©coles.

Ce qui manque, c’est la centralisation de ces expĂ©riences pĂ©dagogiques et de ces recherches. J’ai participĂ© Ă  une recherche sur cette question avec l’idĂ©e de fabriquer une plateforme collaborative. On y recense toutes les initiatives qui sont dans le sens de l’hospitalitĂ© au sens large, qui peuvent contrer toutes les prĂ©caritĂ©s urbaines. Ce ne sont pas que les migrants et les SDF mais aussi les femmes dans l’espace public parce qu’il y a de la discrimination de genre dans l’espace public, et plus largement de genre sur les communautĂ©s LGBT, queer... C’est l’idĂ©e d’une recension de tous ces projets qui cherche Ă  contrer l’inhospitalitĂ© urbaine.

La plateforme : architecture-prĂ©caritĂ©s.fr existe, elle naĂźt Ă  peine et se nourrit de plein de choses. L’idĂ©e est de pouvoir augmenter la force de frappe, leur diffusion et la maniĂšre dont on peut les rĂ©pandre pour les faire connaĂźtre.

Pour revenir sur le caractĂšre temporel, vous avez parlĂ© de mutabilitĂ© des structures, la flexibilitĂ© des structures n’est atteignable que par le bĂ©ton armĂ© ou la transparence, le verre ou des structures de grandes portĂ©es en bĂ©ton ou il y a d’autres possibilitĂ©s ? Peut-on faire de la flexibilitĂ© qu’avec ces matĂ©riaux ?

Ça peut ĂȘtre du bĂ©ton, de l’acier, du bois oĂč l’on peut aussi faire de grandes portĂ©es ou du plan libre puisque par nature c’est une ossature et un assemblage et pas du refend donc oui, il y a toutes sortes de maniĂšre de fabriquer de la flexibilitĂ©. Lacaton et Vassal par exemple sont un peu dans cette logique du plan libre et « lowtech » qui va pouvoir se transformer.

Vous allez avoir Ă  faire plutĂŽt Ă  de la transformation que du neuf. C’est plutĂŽt une bonne chose, car on n’artificialise pas d’autres sols, on vient finalement digĂ©rer les bĂątiments qu’on a dĂ©jĂ . Le XXe siĂšcle a fait du bĂ©ton et on peut tout faire avec. Maintenant, le bĂ©ton c’est « mal ». Seulement pour faire autre chose que du bĂ©ton, fabriquer des spatialitĂ©s, transformer des bĂątiments, il faut que l’on soit costaud sur des questions constructives de structures.

Que vous évoque la double hauteur ?

Une double hauteur cela pourrait ĂȘtre interprĂ©ter comme l’idĂ©e de prendre du recul sur ce que l’on fait. Si on le transpose dans le champ littĂ©raire, c’est de prendre de la hauteur. C’est se dire que l’on fabrique mais on prend aussi de la hauteur par rapport Ă  ce que l’on fabrique. C’est donc aussi analyser et dĂ©cortiquer.

11
«
On est passĂ© Ă  cĂŽtĂ©, c’est vous qui ĂȘtes dedans, car il y a urgence. »
plan masse © Atelier Rita ©David Boureau
12
13
©David Boureau

Cher tous,

En 2020 l’ENSA Paris - Val de Seine a Ă©tĂ© secouĂ©e par un Ă©vĂ©nement tragique. Aujourd’hui, plus que jamais, se pose la question du bien-ĂȘtre Ă©tudiant.

DDans les ENSA de France, la santĂ© physique et psychologique des Ă©tudiants en architecture est un sujet toujours vivement abordĂ©. En 2018, l’UNEAP (Union Nationale des Etudiants en Architecture et Paysage) publie une Ă©tude sur la santĂ© des Ă©tudiants en architecture indiquant que “durant la semaine qui prĂ©cĂšde un rendu, 38% des Ă©tudiants en architecture dorment en moyenne moins de 4 heures par nuit, que pour remĂ©dier au manque de sommeil, 17,7% des Ă©tudiants en architecture dĂ©clarent avoir recours Ă  des mĂ©dicaments, Ă  l’alcool ou aux drogues et que 75,5% des Ă©tudiants en architecture disent ressentir un impact physique liĂ© au stress.”1

En novembre 2020, LibĂ©ration publie un article sur les abus de pouvoir et harcĂšlement dans une ENSA française2, suite Ă  la lettre ouverte rĂ©digĂ©e en octobre 2020 par les Ă©tudiants “Nous constatons une dĂ©gradation de l’environnement de travail liĂ©e aux rapports de pouvoir en place ainsi qu’à des Ă©vĂ©nements, choquants, sinon intolĂ©rables”3. Puis deux semaines plus tard, Le Monde publie un article4 mettant le doigt sur la culture de la charrette6 . ParallĂšlement, Le Monde publie un second article, qui parle de l’évĂ©nement tragique du suicide d’un.e Ă©tudiant.e Ă  Val de Seine5. Ce jour-lĂ , nous recevons, dans notre boĂźte mail scolaire, une lettre ouverte de ses amis qui “nous invite Ă  tĂ©moigner, et Ă  ne plus hĂ©siter Ă  demander de l’aide” et affirme que “nous sommes tous prĂ©sents les uns pour les autres”. RĂ©cemment, en mai 2022, LibĂ©ration publie un article, dans le cadre de l’enquĂȘte ouverte par le parquet de Paris qui vise Ă  dĂ©terminer si l’ENSA Paris - Val de Seine est responsable ou non du suicide de l’étudiant.e7 VoilĂ  trĂšs succinctement oĂč nous en sommes aujourd’hui.

Double Hauteur Ă©tant l’unique support d’expression Ă©tudiante, il Ă©tait temps de rĂ©diger un article, une expĂ©rience vĂ©cue depuis l’intĂ©rieur.

Cette tribune tente avant tout d’apporter de l’espoir et de potentielles solutions, sachant qu’il est impossible

de traiter ce vaste sujet en seulement quelques lignes, voici quelques mots qui s’adressent Ă  notre Ă©cole, Ă  ses Ă©tudiants et ses enseignants.

À l’échelle nationale - le plan d’action 2022 - 2027 -

En mars 2020, un groupe de travail a vu le jour au sein du MinistĂšre de la Culture, composĂ© d’étudiants, d'enseignants et de personnels administratifsa pour mettre en place un Plan d’action 2022 - 2027 visant Ă  “amĂ©liorer le bienĂȘtre et la santĂ© des Ă©tudiants des ENSA “b

aPour notre Ă©cole Ă©taient prĂ©sents : Nathalie HEBREARD (Administration) , Thierry CAZALS (Enseignant) , Lucie BROS (CFVE) bConsultable sur le Sharepoint de l’ENSA Paris - Val de Seine, ou sur les sites internets de l’ENSA Malaquais et ENSA Normandie.

1EnquĂȘte sur la santĂ© et le bien-ĂȘtre des Ă©tudiants en architecture , UNEAP, 2018

2Ecole d'architecture : «Un rĂ©gime basĂ© sur la terreur, le harcĂšlement et l’intimidation», article de LibĂ©ration, 5 novembre 2020, Montpellier.

3Et si le silence tombait ? lettre ouverte des Ă©tudiants en architecture de l’ENSA Montpellier, Mercredi 28 octobre 2020

4En Ă©cole d’architecture, les dĂ©rives de la « culture charrette », article de Le Monde, 19 novembre 2020, Paris.

5Malaise Ă  l’école d’architecture Val-de-Seine aprĂšs le suicide d’un Ă©tudiant, article de Le Monde, 19 novembre 2020, Paris.

7Une charrette : expression utilisée depuis les Beaux-Arts en architecture pour désigner une période de travail trÚs intense précédant un rendu de projet.

6Suicide en Ă©cole d’architecture: On nous poussait Ă  bout psychologiquement et physiquement, article de LibĂ©ration, 3 mai 2022, Paris.

14 Vie étudiante DeuxiÚme
partie

ChÚre école,

stages, sont gĂ©rĂ©s comme des entitĂ©s entiĂšrement cloisonnĂ©es avec, sans aucune communication, des rendus et examens qui se chevauchent, incitant les Ă©tudiants Ă  la charrette. Il faudrait donc possiblement, allonger les Ă©tudes d’architecture afin de rĂ©partir le travail de maniĂšre plus uniforme, plutĂŽt que de voir le quart des promotions de master partir en cĂ©sure par peur d’un manque d’expĂ©rience aprĂšs le diplĂŽme. Il faudrait embaucher plus d’enseignants titulaires pour assurer nos cours dans des conditions idĂ©ales et mettre en place plus de soutien scolaire.

I

Il y a maintenant 12 ans, tu es nĂ©e d’un agrĂ©gat de 4 petites Ă©coles 1 et de pensĂ©es diamĂ©tralement opposĂ©es, crĂ©ant ainsi les 14 ateliers et studios que nous connaissons aujourd’hui. MalgrĂ© cette hĂ©tĂ©rogĂ©nĂ©itĂ©, cette Ă©cole continue d’exister, dans ce bĂątiment «usine» aux 7 Ă©tages et Ă  la grande cheminĂ©e.

AprĂšs avoir Ă©tĂ© confrontĂ© Ă  un rĂ©el problĂšme, celui d’étudiants isolĂ©s, confinĂ©s, tu as pu mettre en place, depuis deux ans : une cellule psychologique, des cours de soutien scolaire ainsi qu’une lettre d’information hebdomadaire par email qui contient un lien “Aides et soutien aux Ă©tudiants et Ă©tudiantes”

Était-ce assez ? A croire que non, puis qu’en ce dĂ©but d’annĂ©e il y a : une confĂ©rence sur le sommeil une augmentation des permanences psychologiques, un atelier de sophrologie, des consultations d’ostĂ©opathie, une infirmerie restructurĂ©e prĂȘte Ă  accueillir des nouveaux souffrants. Notre Ă©cole est en bonne voie pour devenir 
 une maison de santĂ© ! Plus sĂ©rieusement, est-ce qu’il ne faudrait pas plutĂŽt rĂ©soudre le problĂšme Ă  sa racine, plutĂŽt prĂ©venir que guĂ©rir ?

A chaque fin de semestre, nous pouvons remplir un formulaire pour noter nos enseignements. Nous ne savons pas qui reçoit ces rĂ©ponses. Est-ce que les enseignements sont mieux notĂ©s ? Est-ce que de nombreux tĂ©moignages d’étudiants ont Ă©tĂ© reçus et si oui, est-ce que les Ă©tudiants ont pu ĂȘtre guidĂ©s et est-ce que des mesures ciblĂ©es ont Ă©tĂ© prises ? Lors des Ă©changes avec l’administration, nous n’avons pas reçu de rĂ©ponses claires. Beaucoup souffrent de la surcharge de travail. Les cours magistraux, les travaux dirigĂ©s, les encadrements de rapport de licence, les cours de projet, les

Tu n’es pas la seule dans ta dĂ©tresse car ces problĂ©matiques sont prĂ©sentes dans toutes les ENSA de France. Ainsi, voici une petite histoire pleine d’espoir.

Pendant le premier confinement, grĂące Ă  une association aux Ă©tudiants dĂ©terminĂ©s, l’ENSA ParisEst (anciennement Marne la VallĂ©e) a su mettre en place un comitĂ© hebdomadaire rassemblant des Ă©tudiants, dĂ©lĂ©guĂ©s de classes et de promotion, des enseignants et administratifs, siĂ©geant dĂ©jĂ  au CA. En 6 mois, tous les problĂšmes d’absences, de remarques discriminantes, de rĂ©partition des rendus et des partiels Ă©taient ciblĂ©s. Le suivi hebdomadaire fut efficace.

Bien Ă©videmment, cette solution n’est pas si facilement applicable pour une Ă©cole comme l’ENSA Paris - Val de Seine qui compte 2 000 Ă©tudiants, 240 enseignants et 70 administratifs, sans compter les courants de pensĂ©es pluriels.

Il faut prĂŽner la cohĂ©sion entre les diffĂ©rents ateliers, entre les diffĂ©rents enseignements, plutĂŽt que de dresser des murs entre les Ă©tudiants qui ne sont que le reflet de querelles dogmatiques. Les ateliers, lorsqu’ils ne sont pas une deuxiĂšme famille et un lieu d’entraide, ne doivent jamais ĂȘtre le lieu d’exclusion sociale, de source de pression, ni mĂȘme de chantage se substituant Ă  un rĂ©el choix d’enseignement.

La pluralitĂ© de cette Ă©cole ne doit jamais devenir un frein Ă  l’épanouissement de ses Ă©tudiants.

15
1 Paris-Villemin, Paris La Défense, Paris La Seine, Paris Conflans .

Chers étudiants,

NNombre

d’entre vous sont en colĂšre , Ă  bout de forces, lĂ  oĂč d’autres ne se sentent que peu, ou pas, concernĂ©s par le sujet. Parce que oui, certains d’entre nous vivent leurs Ă©tudes en idylle, comprenant Ă©videmment quelques moments de charrette, mais qui sont, avec du recul, davantage de bons que de mauvais souvenirs.

Il est vrai qu’il y a une grande diffĂ©rence entre une nuit sacrifiĂ©e entourĂ©e de ses amis dans le but de peaufiner son rendu final et un enchaĂźnement de nuits blanches plusieurs fois par mois, par semaine, avec la boule au ventre la veille d’un rendu dĂ©guisĂ©e en correction, s’agissant de produire une esquisse entiĂšre d’une semaine Ă  l’autre.

Sachez dire stop et Ă©teindre votre ordinateur lorsqu’il le faut, pour ne pas mettre votre santĂ© en danger, deux heures de sommeil ne changeront pas grandchose Ă  votre rendu. Et enfin, pour Ă©viter la charrette ”lorsqu’un prof vous demande 3 coupes 4 Ă©lĂ©vations et que vous manquez de temps ne soyez pas scolaire. Ne faites qu’une coupe et deux Ă©lĂ©vations, mais vraiment bien.” recommande un enseignant de l’école.

Soyez conscients que nous avons la chance de faire des Ă©tudes sans classement, par dĂ©finition, basĂ©es sur l’entraide. Soyons Ă  l’écoute les uns des autres. Malheureusement, la culture de la charrette, les abus de pouvoir et les violences, sont profondĂ©ment ancrĂ©s depuis des centaines d’annĂ©es dans ce systĂšme scolaire. Le changement ne peut venir que de nous.

Pendant les corrections ou les rendus, n’oubliez pas une chose : votre travail ne vous dĂ©finit pas. MĂȘme s’il est difficile de ne pas penser qu’une partie de notre Ăąme rĂ©side dans cette maquette en carton, la critique qu’apporte l’enseignant est uniquement portĂ©e sur votre production et non sur votre personne.

Tentez d’éviter la charrette. Aujourd’hui, ceux qui sont les plus efficaces en termes de temps sont ceux qui savent bien maĂźtriser les logiciels, cela vous Ă©vite de tout redessiner d’une semaine Ă  l’autre. Cultivezvous ! Si vous rĂ©coltez des rĂ©fĂ©rences d’architectures, des lectures, si vous allez Ă  des expositions, Ă  des confĂ©rences, vous aurez un regard intelligent sur l’architecture et sur votre projet, cela vous permettra de dessiner avec plus de justesse.Prenez de vĂ©ritables pauses et arrĂȘtez de culpabiliser. Souvenez-vous que Tadao Ando et Le Corbusier Ă©taient autodidactes, que le premier projet d’Antoni GaudĂ­ n’était rien d’autre que les WC d’une coopĂ©rative ouvriĂšre et que Louis Kahn a créé son agence Ă  50 ans.

N’hĂ©sitez plus Ă  aller voir vos professeurs et leur demander leur indulgence, ou de dĂ©noncer les problĂšmes que vous avez rencontrĂ©s en vous adressant aux reprĂ©sentants de l’école. N’hĂ©sitez plus Ă  tĂ©moigner, Ă  libĂ©rer la parole sur ce que vous vivez ou voyez, car ĂȘtre tĂ©moin de violence et ne rien faire vous rend complice. N’hĂ©sitez plus Ă  aller demander de l’aide Ă  vos proches, en cellule psychologique, Ă  vous tourner vers les associations et ateliers.

Vous pouvez vous engager dans vos masses, dans vos groupes, dans les associations de l’école qui souhaitent accompagner ce changement, afin de faire Ă©voluer les pensĂ©es et favoriser l’entraide. Vous pouvez vous engager Ă  l’échelle de l’école : au Conseil d’Administration (CA), et Ă  la Commission des formations et de la vie Ă©tudiante (CFVE). Ces deux instances sont les uniques supports de discussions avec les enseignants et l’administration, recueillant avis ou propos, qui nous permettent de changer les choses Ă  l’échelle de l’école. Vous pouvez rejoindre l’Union Nationale des Etudiants en Architecture et Paysage (UNEAP), l’association nationale Ă©tudiante qui permet d’établir un dialogue avec les hautes instances telles que le ministĂšre de la Culture. Du moins, engagez-vous autour de vous, il suffit parfois d’un “et toi, comment vas-tu en ce moment ?”

En partenariat avec la Fed

Voici une liste d’étudiants, d’administratifs, et d’associations, qui se veulent ĂȘtre des oreilles attentives.

16
«
Prenez des vĂ©ritables pauses et arrĂȘtez de culpabiliser »

Chers enseignants,

BBien que nombre d’entre vous soient Ă  l’écoute et ont su faire preuve de bienveillance, “Si vous ĂȘtes dans une situation difficile, n’hĂ©sitez pas Ă  venir nous en parler” comme nous Ă©crivait par mail pendant le premier confinement une des enseignantes. N’oubliez pas que, confinement ou non, nous comptons sur vous pour apporter du soutien dans nos Ă©tudes.

Les questions que nous nous posons aujourd’hui ne datent pas d’hier, vous l’avez parfois vous-mĂȘme vĂ©cu “Je subis donc le bizutage de plein fouet (...) et je me suis jurĂ© qu’un jour, si j’étais enseignant, j’empĂȘcherais cette ignominie !” s’exclame un enseignant de l’école qui tĂ©moigne avoir Ă©tĂ© victime de bizutage pendant ses Ă©tudes aux Beaux-Arts. Pourquoi les problĂšmes subsistent sous d’autres formes aujourd’hui ?

Comme le souligne un autre enseignant de l’école, “Il faut avoir Ă  l’esprit que mener de front deux activitĂ©s parallĂšles est difficile pour vos enseignants, d’autant qu’ils doivent effectuer 320h d’enseignement par an ; lĂ  oĂč un professeur des universitĂ©s n’en doit que 192h”. Cependant n’oubliez pas qu’assumer vos horaires de cours tout au long du semestre, gĂ©rer les rendus dans des temps convenables - 23h n’est pas un horaire convenable - et venir en prĂ©sentiel quand cela est demandĂ© par les Ă©tudiants sont des engagements que vous avez pris en toute conscience.

Pour le bonheur de tous, l’architecture d’aujourd’hui en Ă©cole est enseignĂ©e par des praticiens, alors pour la pĂ©rennitĂ© de cette pratique, soyez pĂ©dagogues avec les Ă©tudiants. Montrez du respect pour le travail de vos Ă©tudiants. L’exemple de la destruction d’une maquette Ă  coups de cutter sans l’accord de l’étudiant ne doit plus ĂȘtre banalisĂ©.

“Pour rappel, nous sommes passĂ©s d’un diplĂŽme en 7 ans (DPLG) Ă  un diplĂŽme en 5 ans (DE), or dans le mĂȘme temps, les exigences du mĂ©tier ont augmentĂ©. Aussi, les enseignants ne peuvent « vous demander moins », car votre avenir est en jeu, et en mĂȘme temps, c’est difficile Ă  vivre pour vous.Si nous rĂ©duisons votre apprentissage en projet, vous ne saurez pas dessiner Ă  la sortie de l’école” tĂ©moigne un enseignant de l’ENSA Paris - Val de Seine.

8“Moyenne des heures travaillĂ©es par les salariĂ©s en agence d’architecture en France tourne actuellement autour de 52 Ă  56 heures par semaine» source : Tema archi

Vous savez que nous sommes passionnĂ©s, pas fainĂ©ants. Il est vrai que le processus crĂ©atif prend beaucoup plus de temps qu’apprendre une leçon, mais faudrait-il pour autant “mettre la pression” aux Ă©tudiants pour qu’ils atteignent “l’excellence”?

Il n’est pas question de ne pas travailler ou d’ĂȘtre trop choyĂ©, nous souhaitons davantage de bienveillance, de pĂ©dagogie et de mĂ©thodologie.

Certains d’entre nous l’ont bien compris lors de nos annĂ©es d’échanges aux Etats-Unis, en CorĂ©e du Sud, ou Ă  travers des entretiens d’architectes, comme avec ce journal Double Hauteur, Craig Dykers (SnĂžhetta), Glenn Murcutt 
 tant de grands noms qui sont tout autant rĂ©putĂ©s pour leur architecture que pour leur bienveillance dans leur pĂ©dagogie.

Un Ă©tudiant en architecture Ă©panoui et crĂ©atif est aussi un Ă©tudiant qui a le temps d’aller au musĂ©e, de voyager, de visiter de l’architecture, d’écrire, de pratiquer ses passions. Accordeznous ce temps, tant que nous sommes Ă©tudiants !

Pour lutter contre la culture de la charrette, imposez un dĂ©pĂŽt des planches de rendu et de correction en fin de journĂ©e plutĂŽt qu’à 8h du matin (oĂč la nuit aura Ă©tĂ© rude). Ne demandez pas Ă  chaque semaine la mĂȘme charge de travail pour une correction que pour un rendu final. “Il faudrait revoir les enseignements : plus de cours de mĂ©thodologie et plus de cours oĂč l’enseignant montre des rĂ©fĂ©rences et dessine avec vous, et moins de correction frontale (...) adapter les exigences et rythme selon les Ă©tudiants”, propose un des enseignants.

Apprenez-nous Ă  gĂ©rer notre temps plutĂŽt que de perpĂ©tuer cette culture de la derniĂšre minute. Vous ĂȘtes bien conscients que ces habitudes que nous prenons en Ă©cole d’architecture se rĂ©percutent dans le monde professionnel8 oĂč les burn-out sont de plus en plus frĂ©quents. Le monde de l’architecture est beaucoup plus complexe que l’on ne l’imagine Ă  l’école mais aidez-nous Ă  comprendre ce monde avec sagesse plutĂŽt que de perpĂ©tuer ce systĂšme de pensĂ©e.

17

ThĂšse CIFRE

Propos recueillis par Agathe-Paloma Pastré

PAR

EMILY MUGEL

Doctorante en Architecture, laboratoire GRIEF EA 7465, ED 595, ENSA Bretagne -UniversitĂ© de Rennes 2 ThĂšse en contrat CIFRE Ă  l’Association Quatorze

Les architectes de l’accueil

Le rĂŽle des architectes dans l’accueil des personnes exilĂ©es depuis 2015

CIFRE = Convention Industrielle de Formation par la Recherche

Création: 1981

Objectif: triple partenariat en faveur de l’innovation et la recherche pour soutenir les Ă©changes entre recherche privĂ©e ou public et favoriser l’emploi des doctorantsen faisant collaborer entreprise ou association, universitĂ©s et doctorant.

En pratique...: dispositif de l’Etat pour une aide financiĂšre auprĂšs des entreprises recrutant des doctorants Ă©galement en lien avec un laboratoire extĂ©rieur. Les CIFRE ce sont 10% des doctorants bĂ©nĂ©ficiant d’un financement.

Cette recherche interroge le rĂŽle des architectes, en tant qu’acteurs et actrices, dans l’accueil des personnes exilĂ©es depuis2015.

Cette approche architecturale des conditions d’accueil permet Ă  la fois de documenter les diffĂ©rents projets existants en France et les rouages dans lesquels ils se mettent en place. Mais Ă©galement de comprendre les ressources employĂ©es par les architectes et leurs approches pour dĂ©velopper ces projets dans un contexte sociĂ©tal et politique tendu.

MĂ©thodologie d’approche

ETUDE HISTORIQUE

2

1. Documenter les influences théoriques et construites des architectes.

2. EnquĂȘte sur l’évolution de l’enseignement des architectes depuis ces dix derniĂšres annĂ©es pour connaĂźtre le parcours des architectes s’engageant dans les questions d’hospitalitĂ©.

ETUDE SOCIOLOGIQUE

1. Entretiens avec un panel variĂ© d’architectes « de l’accueil ».

2. Comprendre ce qui qualifie ce titre.

3. Définir ce qui fait accueil dans leurs pratiques.

APPROCHE SPATIALE ET ARCHITECTURALE

1. Etudier les Ă©lĂ©ments constructifs et programmatiques de projets grĂące Ă  des outils tirĂ©s de l’architecture, de la cartographie et de la sociologie: relevĂ© du bĂąti et relevĂ© habitĂ©, documents photographiques, presse, ouvrages architecturaux, mise en rĂ©cit dessinĂ© etc.

18
1
3

L’INVISIBILITÉ DE PERSONNES EXILÉES

formes constructives et méthodologiques, et transgressant parfois les normes urbaines.

L

Mes conditions d’accueil des personnes exilĂ©es en France et plus largement en Europe les placent dans des situations d’instabilitĂ©et d’erranceimposĂ©e.

Elles sont gĂ©ographiques par la politique d’évacuations, d’évitement de points d’accroches, de mises Ă  l’abri temporaires en pĂ©riphĂ©ries des centres urbains, d’enfermement en centre de rĂ©tention ou le renvoi dans les pays voisins qui participent fortement Ă  l’expĂ©rience du confinement vĂ©cu par les personnes exilĂ©es.

On tĂ©moigne ainsi, au cours des derniĂšres annĂ©es, d’une banalisation de l’éloignement et de la “mise en altĂ©ritĂ©â€ (Kobelinsky, Makaremi, 2009) des personnes exilĂ©es, qui accentuent leur invisibilisation. Les individus, d’une part, disparaissent dans une image de masse migrante, transformant l’exil d’une expĂ©rience individuelle Ă  un phĂ©nomĂšne de masse (Ivecoviyć, 2015).

Le contexte français de l’accueil est intrinsĂšquement liĂ© Ă  un contexte plus large. Les actions locales ont des rĂ©percussions Ă  une Ă©chelle nationale et internationale, et inversement. La constellation des lieux d’accueil, les trajectoires des personnes exilĂ©es, les rĂ©seaux d’acteurs impliquĂ©s Ă  chaque Ă©chelle gĂ©nĂšrent une articulation entre le soutien local et les politiques migratoires internationales. C’est dans ce cadre qu’interviennent les architectes.

UN BREF ÉTAT DES LIEUX DES ARCHITECTES DE L’ACCUEIL

DDiffĂ©rent.e.s architectes se sont engagĂ©.e.spar des projets construits et thĂ©oriques, mettant Ă  l’épreuve des

Des plus mĂ©diatisĂ©.e.s nous mentionnerons Julien Belleret le centre humanitaire Ă  Porte de la Chapelle en 2016, Valentine GuichardazVersini (Atelier Rita) dont le Centre d’hĂ©bergement d’urgence d’Ivry de 2017 a Ă©tĂ© primĂ© d’une Ă©querre d’argent ou Cyrille Hanappe (Actes & CitĂ©) dont les Ă©tudiants s’intĂ©ressent aux espaces « d’habitats spontanĂ©s » tels que la Jungle de Calais.

Le collectif Sans Plus Attendre qui a par ailleurs employĂ© les outils de reprĂ©sentation d’architectes en dressant un relevĂ© de cette mĂȘme Jungle Ă  Calais, dans le cadre d’un projet de recherche de PEROU. Fiona Meadows interroge quant Ă elle le rapport entre l’idĂ©e de la permanence de l’habitat et du provisoire du campement dans son exposition puis ouvrage Habiter le Campement en 2016.

L’association Quatorze souhaite de son cĂŽtĂ© se positionner en experts de l’accueil inconditionnel au travers de ses expĂ©rimentations par le projet et la recherche-action, explorant les enjeux d’urbanisation douce, d’investissement du vacant et de participation.

Il se dessine l’émergence d’acteurs transdisciplinaires tels que Plateau Urbain ou Yes We Camp qui ouvrent des lieux d’accueil Ă©phĂ©mĂšres dans des «espaces disponibles»1mettant en avant une multiplicitĂ© d’usages et de public, en crĂ©ant un modĂšle Ă©conomique autour de la fĂȘte, la nourriture et la culture.

Ce bref Ă©tat des lieux permet de commencer Ă  trouver des liens et des distinctions entre ces architectes, Ă  dresser des figures ou des postures parmi les architectes de l’accueil, et finalement Ă  dĂ©celer les diffĂ©rences de maniĂšre d’envisager l’accueil depuis 2015.

19

PROBLEMATIQUES

Les expĂ©rimentations architecturales interrogeant et rĂ©pondant aux questions d’hospitalitĂ© sont ainsi multiples : de l’hĂ©bergement d’urgence, Ă  l’insertion professionnelle, de l’inclusivitĂ© de l’espace public Ă  la transformation par la transgression des normes qui font la ville. Dans quelles mesures les architectes peuvent-ils et elles participer Ă  l’amĂ©lioration des conditions d’accueil des personnes exilĂ©es ? Quel type de vision de la ville future, dans sa transformation Ă©merge de cet engagement du champ disciplinaire de l’architecture ? Quels sont les outils mis en Ɠuvre par les architectes pour rĂ©pondre Ă  la question de l’accueil ? Trois hypothĂšses Ă©mergent de ces problĂ©matiques.

LA QUESTION DE L’ACCUEIL RELÈVE DE L’EXPÉRIMENTATION ARCHITECTURALE

LMa relation entre les architectes et les personnes exilĂ©es donne lieu Ă  des enjeuxs cientifiques, critiques, politiques qui posent des imaginaires de l’habitat futur et mettent les architectes dans une « posture intellectuelle » (Kobelinsky, Makaremi, 2009).

Il émerge par ailleurs une forme de fantasme de la débrouille expérimentale et des stratégies de survie des personnes exilées de la part des architectes étudiant le phénomÚne de campements, les comparant à des villes du futur ou encore des laboratoires de la ville

La dimension du fantasme architectural semble nĂ©anmoins nĂ©cessaire pour faire Ă©merger des expĂ©riences novatrices pour concevoir des nouveaux modĂšles d’habitats pour les personnes exilĂ©es.

LES ARCHITECTES AGISSENT AU SEIN D’UN RÉSEAU

LMa position des architectes se dĂ©finit par le rĂ©seau-ou l’absence de rĂ©seau -d’acteurs dans lequel ils agissent sur chaque projet. Les rĂ©seaux reflĂštent les expĂ©rimentations dont font part les projets d’architectes dans le contexte

de l’accueil. Il s’agit ainsi de comprendre les motivations de ces rĂ©seaux, leurs idĂ©ologies et leurs engagements.

Ces rĂ©seaux d’acteurs de l’accueil -associatifs, individuels, militants, spontanĂ©s ou encore institutionnels -mettent en place un tissage d’enjeux personnels, de visibilitĂ©s et de compĂ©tences. Les interactions entre ces diffĂ©rents acteurs de l’accueil pourraient ainsi orienter les politiques d’accueil.

CONSÉQUENCE DES ACTIONS ARCHITECTURALES

LMes actions architecturales, par des ressources innovantes et inclusives, se posent ainsi dans une rĂ©sistance Ă  l’invisibilisation des personnes exilĂ©es.

De la rĂ©ponse aux commandes publiques Ă  la transgression des normes, les actions des architectes reprĂ©sentent indĂ©niablement une forme d’engagement, qu’elle soit Ă©thique, politique, militante ou pragmatique , qui participe Ă  la transformation de leur figure.

Un des outils de cet engagement et dans cette innovation est l’urbanisme transitoire. Hors, du point de vue architectural et politique, l’occupation temporaire d’espaces vacants n’est-elle pas reprĂ©sentative de la mobilitĂ© forcĂ©e des personnes qui y habitent ?

Elle questionne les moyens de constitution du chez soi, et du heimat (Saunder, 2016, Arendt 1949). La temporalitĂ© des lieux s’inscrit dans l’incertitude, le mouvement constant des situations juridiques et sociales des personnes qu’ils accueillent.

POUR CONCLURE

Cette recherche est entreprise dans le cadre d’un contrat CIFRE au sein de l’association d’architectes Quatorze.

Cette recherche embarquĂ©e (Mabi, Prothais, 2015) permet de garder un lien privilĂ©giĂ© avec le terrain et les «enquĂȘtĂ©.e.s», apportant une richesse de ressources, mais dont il est pourtant parfois difficile de prendre la distance nĂ©cessaire : participant Ă  une pratique et prenant part au terrain, comment apprendre Ă  devenir « indigĂšne de sa propre culture » (AugĂ©, 1992) tout en Ă©tant « un informateur privilĂ©giĂ© » (ibid.) ?

20

Mental obsessions

De la capsule de deux minutes Ă  l’émission Ă  plus d’une heure, les podcast constituent un mĂ©dia parfait pour cleaner un plan, pimper une pers’ ou maquetter joyeusement ; pour vous encourager dans les derniĂšres semaines de rendus, DH vous a donc concoctĂ© une petite sĂ©lection.

société art musique

VĂ©nus s’épilait-elle la chatte ? 30-60min - depuis 2019

Julie Beauzac choisit un titre percutant pour le podcast engagĂ© dans lequel elle interroge la place de la femme - artiste ou reprĂ©sentĂ©edans l’art occidental. Elle dĂ©construit les regards en Ă©tablissant des liens rĂ©flexifs entre les artistes, la rĂ©ception des Ɠuvres dans la sociĂ©tĂ©, Ă  leur Ă©poque et aujourd’hui. De nouvelles grilles de lecture s’offrent Ă  nous au fil de sa narration et des personnes interviewĂ©es : une vĂ©ritable immersion dans un art vivant et actualisĂ©.

PAR Kiffe ta race 20-60min - depuis 2018

US apprĂ©cieront les Ă©pisodes sur ASAP Rocky ou encore Juice WRLD ; les fans d’électro, seront ravis par ceux sur Thylacine ou encore Four Tet ; les curieux se laisseront tenter par les Ă©pisodes sur le Misirlou ou bien la Baile Funk. Bonne Ă©coute !

Disponible sur nova.fr, podtail.com, ApplePodcast, Youtube, Spotify


Disponible sur ApplePodcast, Spotify et Deezer Pour complĂ©ter l’écoute, interview en ligne dans le magazine Brunhilde : https://www.brunhilde-mag.com/index.php/2020/10/09/ julie-beauzac-creatrice-du-podcast-venus-sepilait-elle-lachatte/

Le sample de la semaine 5-10min - 2018-2019

Rediffusion d’une chronique de Radio Nova, ce podcast est fait pour les amateurs de musique. Le format court retrace l’histoire de samples et de sampleurs iconiques : Jazz, Funk, Rap, Electro
les genres s’y croisent pour le plus grand plaisir des oreilles. Les adeptes de tubes

Rokhaya Diallo est une femme noire, Grace Ly est une femme asiatique. Toutes deux sont auteures, engagĂ©es, et ouvrent le podcast en se dĂ©finissant ainsi, afin d’expliciter leur identitĂ©, situer leur regard et leur parole. Autour du micro, les voix de journalistes, de sociologues, de confĂ©renciers, de membres d’association, Ă©changent et expliquent : identitĂ©s, groupes raciaux, tabous, intersectionnalitĂ©, histoire coloniale, clichĂ©s, imaginaires, minoritĂ©s, antiracisme, dĂ©colonisation de l’art, discriminations, reprĂ©sentations, fĂ©minisme, domination de classe
 Des discussions ponctuĂ©es de touches d’humour, marquĂ©es par les parcours de vie et surtout qui rendent accessibles des interrogations sociales et historiques actuelles.

Disponible sur BingeAudio, SoudClound, ApplePodcast, Youtube, Spotify


21
VALORA BRICE

AthĂšnes comme ma poche...

sous la plume

et le coup de crayon PAUL

PRIEL

ConsidĂ©rĂ©e comme le berceau de la civilisation occidentale, AthĂšnes fut fondĂ©e au VIIIĂšme siĂšcle avant notre Ăšre. Mais ce n’est qu’au XIXĂšme siĂšcle qu’elle devint la capitale de la GrĂšce unifiĂ©e et connut alors un rapide essor.

Davantage reconnue pour ses monuments antiques que pour son architecture contemporaine, AthĂšnes est aujourd’hui une capitale cosmopolite et animĂ©e oĂč les ruines de l’antiquitĂ© cĂŽtoient les lieux les plus alternatifs.

Nous vous proposons de retracer l’histoire de ses deux derniers siĂšcles au travers quatre architectures emblĂ©matiques.

Bernard Tschumi

Construit par franco-suisse Bernard Tschumi et inaugurĂ© le de l’Acropole n’accueille que fresques originelles du ainsi collection d’objets trouvĂ©s sur le site. ComposĂ© d’acier, et de bĂ©ton, le bĂątiment sur transparences et neutre de Ce projet pour optique Ă  trois enjeux fondamentaux liaison visuelle avec l’Acropole, la complĂšte des bas-reliefs aux vestiges archĂ©ologiques en sous-sol. La promenade architecturale dĂ©veloppe sur trois niveaux et les ParthĂ©non dans une de mĂȘme orientation et la vue sur celui-ci.

22
RAPHAËLLE DE PRIESTER
MusĂ©e de l’Acropole, 22

National Technical University of Athens

CommandĂ©e par le roi Othon pour sa nouvelle capitale, l’école d’architecture d’AthĂšnes fut construite par l’architecte Lysandros Kaftantzoglou (1811–1885) et achevĂ©e en 1871. DotĂ©e de colonnes ioniques, et d’un patio central, elle est l’archĂ©type des bĂątiments nĂ©oclassiques de cette Ă©poque. À la fin des annĂ©es soixante, elle fut le point de dĂ©part de nombreuses manifestations Ă  l’encontre du dictateur. Celles-ci aboutirent le 17 novembre 1973 Ă  l’intervention de chars dans l’enceinte du bĂątiment, des dizaines d’étudiants furent tuĂ©s et l’armĂ©e procĂ©da Ă  de multiples interpellations. Cet Ă©pisode, particuliĂšrement marquant pour le peuple grec, contribua au renversement du dictateur quelques mois plus tard. Aujourd’hui encore, l’école d’architecture est le point de dĂ©part de manifestations anarchistes, bien que les affrontements avec la police se fassent moins frĂ©quents depuis quelques annĂ©es.

L’amĂ©nagement paysager du tour de l’Acropole permit la crĂ©ation d’accĂšs, de sentiers et de points de vue menant aux diffĂ©rents monuments de ce site historique. AchevĂ© en 1957, il s’agit sans doute du projet le plus connu de l’architecte grec Dimitris Pikionis (18871968), figure majeure du rĂ©gionalisme critique. C’est avec une grande sensibilitĂ© et un respect pour l’histoire que Pikionis a su magnifier ce lieu. Afin de façonner le site, il a n eu recours Ă  des essences locales et Ă  des matĂ©riaux vernaculaires mais son travail fut aussi influencĂ© par la tradition japonaise du paysage.

Chemin de l’Acropole et Colline de Filopappou

The Blue condominium

Le Blue Condominium est un immeuble de logement situĂ© non loin de l’école d’architecture d’AthĂšnes, Ă  l’angle de la place Exarchia. Construit entre 1932 et 1933 par l’architecte Kyriakos Panagiotakos, il est un des premiers exemples de « polykatoikia » (immeuble d’habitation) de style moderne, construit pendant l’entre-deuxguerres. De passage Ă  AthĂšnes Ă  l’occasion du CIAM 4, Le Corbusier serait mĂȘme venu le visiter. L’immeuble doit aujourd’hui son surnom Ă  la couleur bleue qui recouvrait sa façade.

23
24 doublehauteur @doublehauteur doublehauteur@gmail.com

Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.
#14 novembre 2022 - Architecture de l'urgence by Double Hauteur - Issuu