Yessod 17

ISSN 2552-1691

www.keren-hayessod.fr

n° 17 DECEMBRE

DECEMBRE 2020 - PRIX : 5 €

2020

DOSSIER

KEREN HAYESSOD

100 ANS DÉJÀ !

ON NE LÂCHE RIEN !

LA REVUE DU KEREN HAYESSOD FRANCE

partez à la

découverte collection 2020/2021

groupehomesalons photo retouchée et non contractuelle. sauf erreurs typographiques. Magasins indépendants,membres du réseau Homesalons.

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Ce n’est pas une raison pour baisser les bras !

É DI TO

C’est un numéro cher à nos yeux que nous vous présentons, car vous le savez peut-être, en 2020, le Keren Hayessod fête ses 100 ans. Cent ans ! 1920-2020 C’est à Londres qu’est né le Keren Hayessod. Rappelons-nous : la guerre de 14-18 vient de prendre fin et l’empire ottoman se disloque.

En 1920, la Société des Nations « donne mandat » à la GrandeBretagne sur la Palestine, à la condition qu’elle aide à y construire un foyer juif. La Palestine est peu peuplée, archaïque et si on veut y installer des immigrants, il faudra les aider : ce sera le but du tout nouveau Keren Hayessod. Depuis, celui-ci s’est toujours trouvé à l’avant-garde de la construction d’Israël et de son développement.

Avi Pazner a bien voulu revenir pour nous, dans ce numéro, sur quelques-uns des temps forts de cette longue (et parfois douloureuse) épopée et nous le remercions pour sa contribution.

Il y a quelques mois à peine, nous aurions pu nous féliciter des accomplissements de notre institution centenaire et toujours pleine d’allant. Sauf que la pandémie est passée par là et, comme partout, Israël en subit les conséquences tant sur le plan humain, qu’économique. Le pays vit sa plus grande contraction depuis 1975, si ce n’est depuis toujours. Un PIB qui plonge, près de 20% de chômeurs : qu’en est-il exactement ? Yessod se penche sur la question.

Devant cette situation inédite, le Keren Hayessod agit et réagit !

La crise sanitaire frappe les personnes les plus fragiles et en particulier les personnes âgées qui sont en première ligne.

Quel sens aurait une communauté qui ne se soucierait pas de ses aînés ? Le Keren Hayessod renforce ses programmes d’entraide, plus essentiels que jamais pour soutenir les personnes âgées mais aussi les jeunes et les familles. Ils vous sont présentés dans ce numéro.

Une année difficile nous attend. Ce n’est certes pas une raison pour baisser les bras. C’est même la meilleure des raisons pour redoubler d’efforts et nous mobiliser ! À tous, bonne lecture – et prenez soin de vous !

PAR JUDITH OKS ET DAN SERFATY CO-PRÉSIDENTS DU KEREN HAYESSOD FRANCE

DECEMBRE 2020 - # 17 • LA REVUE DU KEREN HAYESSOD FRANCE

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n° 17 DECEMBRE

SOMMAIRE

2020

Yessod 10, place de Catalogne 75014 Paris Tél. : 01 77 37 70 80 www.keren-hayessod.fr Facebook

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Éditorial

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Regard

RÉDACTRICE EN CHEF Sophie Atlan Tél. : 01 77 37 70 85 Sophie.atlan@kh-aui.fr DIRECTRICE ARTISTIQUE / GRAPHISME Joëlle Paris jparis@free.fr

Par David BENHAYM

DOSSIER SPÉCIAL

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PUBLICITÉ Ran Keiny 01 77 37 70 91 07 66 39 78 79 ran.keiny@kh-aui.fr

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Société israélienne L'ÉCONOMIE ISRAÉLIENNE À L'HEURE DU CORONA

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Des programmes qui s'adaptent à la crise AVENIR DES JEUNES ET AMIGOUR

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Ensemble, 100 x plus pour Israël : Retour sur une campagne gagnante L'écho des régions NOUVELLE PRÉSIDENCE À LYON : LA RELÈVE DE LA JEUNESSE

ADMINISTRATION /COMPTABILITÉ Johanna Cohen 01 77 37 70 90 Johanna.guetta@kh-aui.fr

PRÉPRESSE / IMPRESSION / FABRICATION PRN Carpiquet

100 ANS !

AVI PAZNER, HOMMAGE AU KEREN HAYESSOD LE SAVIEZ-VOUS ? LES COUPS DE CŒUR DU KEREN HAYESSOD

CONTRIBUTEURS :

Sandra Allouch Myriam Azogui Caroll Azoulay David Benhaim Paula Haddad Carole Ouaknine Richard Prasquier Sylvie Sebag

CE N'EST PAS UNE RAISON POUR BAISSER LES BRAS !

RENDRE TOUTE LEUR GRANDEUR AUX CAMPAGNES

ISSN 2552-1691 DIRECTEUR DE LA PUBLICATION Alain Belhassen

POUR LE PEUPLE D’ISRAËL

EHPAD : QUAND LA SOLIDARITÉ S’EXPRIME AUSSI AVEC LES PERSONNES ÂGÉES EN FRANCE

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Culture LIVRE : JUIFS D'AILLEURS DIGRESSIONS LINGUISTIQUES : ZEKHER, LE SOUVENIR

REG RD MAKE CAMPAIGNING GREAT AGAIN

RENDRE TOUTE LEUR GRANDEUR AUX CAMPAGNES

PAR DAVID BENAYM JOURNALISTE TV ET RADIO, SPÉCIALISTE DES ÉTATS-UNIS, DAVID BENAYM COUVRE LA POLITIQUE AMÉRICAINE DEPUIS 1999.

© PHOTO DAVID BENAYM

Vu sur les routes de campagne, Donald Trump passager arrière en vitrophanie !

J’en ai traversé des campagnes cette année… Malgré la pandémie, j’ai rencontré des dizaines de milliers de personnes dans le monde entier, des téléconférences pour le Keren Hayessod, pour le Maguen David Adom, les EI, l’UEJF, j’ai même fait des appels aux dons pour un village près de Haïfa, pour Saint-MartinVésubie, ravagé, un village de justes proche de mes souvenirs d’en France. Jamais je n’ai cessé de me réinventer pour traverser les épreuves du passé.

Mais la campagne qui m’aura le plus marqué est celle que je couvre depuis déjà 20 ans, en Floride, en Géorgie, dans les banlieues de Pennsylvanie ou de Caroline, sur les traces d'évangélistes ou de suprématistes, là où Black Lives Matter plus que jamais, cette couverture de campagne masqué, parfois ganté, toujours socialement distant mais jamais distancé, m’aura surpris à plus d’un point.

Des nouveautés d’abord, les classiques autocollants sur le pare-brise arrière, les bumper stickers, ont fait place à des décalcomanies du candidat Trump pour avoir le président comme passager permanent.

Les objets de campagne dont les associations pourraient bien s’inspirer, des couvertures chauffantes pour les candidats septuagénaires, des ballets brosse à la chevelure orange, même du papier toilette doublement molletonné, ont fait place aux casquettes rouges de 2016, joignant l’utile au désagréable, c’est selon, en fonction de ses opinions.

La leçon pour ce cycle clivant mais jamais décevant, c’est de ne pas désespérer, de continuer d'innover, l’Amérique toujours aussi divisée prendra du temps à se remettre d’autant de disparité.

Absence de substance, mais jamais d’insolence et de ressource, le vaccin du bonheur devrait être disponible dans deux semaines, c’est promis, c’est le président qui l’annonce depuis 3 mois. Moi j’ai de la chance, ça fait des années que je suis immunisé, j’ai les anticorps qui favorisent l’optimisme, vous devriez essayer, ça change toutes les perspectives.

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DOSSIER SPÉCIAL 100 ANS

AVI PAZNER :

HOMMAGE AU KEREN HAYESSOD Par Caroll Azoulay

« LE PROCHAIN CHALLENGE DU KEREN HAYESSOD POURRAIT CONSISTER À ŒUVRER EN FAVEUR D’UNE MEILLEURE COHÉSION EN ISRAËL ».

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LA REVUE DU KEREN HAYESSOD FRANCE • # 17 - DECEMBRE 2020

DOSSIER SPÉCIAL 100 ANS

AVI PAZNER, FIGURE EMBLÉMATIQUE DU KEREN HAYESSOD EST UN HOMME OCCUPÉ. À PRESQUE 85 ANS, IL EST TOUJOURS AUTANT SOLLICITÉ PAR LES MÉDIAS. SA CLARTÉ, SON EXPÉRIENCE, SA VIVACITÉ, SA MAITRISE DES LANGUES ET SON HUMOUR SONT DES DENRÉES RARES À NOTRE ÉPOQUE. MAIS COMME IL AIME À LE RÉPÉTER, IL SERA « TOUJOURS DISPONIBLE » POUR LE KEREN HAYESSOD. CAR POUR LUI LE KEREN HAYESSOD C’EST TOUT SIMPLEMENT ISRAËL. À L’OCCASION DU CENTENAIRE DE L’INSTITUTION, IL PARTAGE AVEC NOUS SES SOUVENIRS ET SES ESPOIRS POUR L’AVENIR.

Vous souvenez vous de votre première rencontre avec le Keren Hayessod ?

Jeune adolescent, j’étudiais dans le très réputé lycée Gymnasia situé à 400 mètres des locaux du Keren Hayessod.

Je passais devant chaque jour, et comme j’étais curieux, je voulais savoir ce qu’était cette institution. On m’a répondu qu’en Israël on appelait cela ‘Magbit’ c’est-à-dire ‘L’appel’, soit une des plus importantes institutions de l’État d’Israël créée avant même la création officielle du pays. À 16 ans je ne me doutais pas qu’un jour j’assumerais de hautes responsabilités au sein du Keren Hayessod…

Bien avant la naissance de l’État juif, le Keren Hayessod crée des villes, bâtit le fondement administratif d’une nation... Pensez-vous qu’aujourd’hui les dirigeants d’Israël ont encore cette capacité à voir aussi loin ?

Aujourd’hui nous sommes gâtés. Nous avons un État. C’est chose acquise. Chacun d’entre nous est occupé dans sa vie quotidienne par son travail et à comment procurer à sa famille la meilleure vie possible. Forcément on pense moins au futur. Il faut se mettre à la place des fondateurs du Keren Hayessod qui avaient une idéologie, un rêve et une vision pour concrétiser cette aspiration suprême. Le Keren Hayessod était l’instrument avec lequel ils avaient l’intention de réaliser ces rêves. Qui aurait cru qu’il y aurait un tel mouvement de solidarité au sein du peuple juif, lui qui souvent, souffrait tant dans le monde, pour servir cette vision ? Pour moi le Keren Hayessod est un arbre qui a donné de nombreux fruits et continue d’en donner.

Avi Pazner avec Yitzhak Shamir dont il a été le conseiller.

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DOSSIER SPÉCIAL 100 ANS

Pensez-vous que l’on pourra accomplir autant au cours des cent prochaines années ? Quels sont vos rêves, vous qui appartenez à cette génération de bâtisseurs ?

C’est vrai qu’Israël est un pays prospère (bien sûr en dehors de cette période de pandémie) mais ce qui nous manque actuellement c’est une cohésion intérieure.

Je n’aime pas cette division qui sépare les religieux des laïcs, la gauche de la droite, les juifs des arabes etc…

Il faut améliorer notre situation. Après la Covid 19, il faudra réfléchir à notre société afin qu’elle devienne un exemple resplendissant pour le peuple juif dans son ensemble. Nous devons redonner tout son éclat à la notion de peuple. Il y a beaucoup de critiques au sein de la communauté juive américaine à l’égard de notre politique même si nous allons, avec la signature d’accords économiques avec le monde arabe notamment, de succès en succès. La cohésion intérieure et le lien avec le reste du monde juif en diaspora doivent représenter un nouveau défi pour Israël. Cela pourrait constituer le nouveau challenge du Keren Hayessod.

Comment peut-il aujourd’hui œuvrer en faveur de cette cohésion que vous appelez de vos vœux ?

Le Keren Hayessod a été en première ligne depuis Reçu d'un don au Keren Hayessod 100 ans sur la question de l’identification du peuple juif en date du 15 décembre 1923 avec Israël. Nous y sommes parvenus car nous sommes une organisation qui demande que l’on s’investisse très concrètement. Donner de soi-même, donner de son argent, c’est cela qui fait la force du Keren Hayessod et a permis de construire le pays. Maintenant que nous avons ce pays, il faut continuer à consacrer une partie de ces moyens en faveur de la construction d’une société meilleure. J’aimerais voir le Keren Hayessod actif sur ce sujet, non seulement dans les communautés juives de Diaspora, mais également en Israël. Il faut des moyens, il y a beaucoup de travail de communication et d’éducation, mais il me semble que c’est un des buts que le Keren Hayessod doit se fixer, et nous pourrons parvenir à des résultats aussi brillants que ceux que nous avons atteints au cours des cent dernières années.

Quel conseil donneriez-vous à l’actuel Premier ministre en ce moment ?

Je vais donner une recommandation qui n’a rien à voir avec le Keren Hayessod car comme vous le savez, le Keren Hayessod s’occupe des communautés juives dans le

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LA REVUE DU KEREN HAYESSOD FRANCE • # 17 - DECEMBRE 2020

AVI PAZNER est né à Dantzig en 1937. En juin 1939, deux mois avant le début de l'invasion de la Pologne par l'Allemagne, sa famille fuit le pays pour la Suisse, d'où était originaire sa mère.

Il émigre en Israël avec sa famille alors qu'il n'a que 16 ans. Avi Pazner fait partie de cette génération de bâtisseurs dont la carrière se confond avec leur vie et leur engagement pour l’État d’Israël.

Brillant diplomate, conseiller de grandes figures politiques, il est nommé président mondial du Keren Hayessod en 1998. Pendant douze ans, il représente magnifiquement l’institution et réalise des missions d’envergure.

Aucun président n’a servi pendant une période aussi longue. Au total, sous son impulsion, le Keren Hayessod parviendra à récolter 2 milliards et demi de dollars pour Israël.

La deuxième Intifada éclate fin septembre 2000. Il se voit alors confié par le Premier ministre de l’époque, Ehoud Barak, la fonction de porte-parole du gouvernement pour contrer la couverture médiatique négative qui sévit contre Israël tout en poursuivant sa mission de président du Keren Hayessod. Il travaille jour et nuit sur les deux fronts pour servir son pays.

Il conservera ces deux casquettes jusqu’en 2004.

DOSSIER SPÉCIAL 100 ANS

monde entier mais pas aux USA. Et c’est pourtant ce pays qui me préoccupe car on y trouve une jeunesse juive qui ne connait pas assez Israël, et qui, en grande majorité, ne l’a pas encore visité. Nous devons consacrer une grande partie de nos efforts vers cette immense diaspora de 6 millions de personnes au sein de laquelle on constate un fléchissement envers le judaïsme et envers Israël. Sans des efforts concentrés, on risque de voir cette communauté dériver et s’éloigner.

Etes-vous inquiet face à la crise économique suscitée par la Covid en Israël ?

On s'est relevé de toutes les crises, et je n’ai aucun doute que nous sortirons de celle-ci. Rappelez-vous lors de la deuxième guerre du Liban, il y a 14 ans, le nord était dévasté. Les universités fermées, les forêts brûlées et les petits commerces avaient fait faillite. Pendant les trois années qui ont suivi, le Keren Hayessod a consacré beaucoup de moyens pour reconstruire le nord du pays.

Aujourd’hui, quand on se promène dans cette belle région, il ne subsiste presque aucune trace de cette grave crise.

Le Keren Hayessod peut avoir un rôle majeur en aidant la société israélienne à se sortir de cette période difficile que nous traversons.

Aux USA, la jeunesse juive ne connaît pas Israël et risque de s'éloigner de son identité DECEMBRE 2020 - # 17 • LA REVUE DU KEREN HAYESSOD FRANCE

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DOSSIER SPÉCIAL 100 ANS

COMMENT LE KEREN HAYESSOD A-T-IL ÉTÉ CRÉÉ ?

1920. La conférence internationale de San Remo approuve le mandat britannique pour la Palestine.

Le Yishuv juif en Eretz Israël est en crise et a perdu la moitié de ses habitants. D’énormes sommes d’argent sont nécessaires pour faire venir en Israël des centaines de milliers de Juifs du monde entier, créer des villes, des quartiers et paver les routes. Une chose est sûre : il y a un besoin urgent de changement, et d’une solution immédiate pour accroître les ressources.

Les comités se réunissent encore et encore et ne peuvent prendre aucune décision. Nous sommes dans l’impasse. Isaac Asher Naidich, un commercant juif, publie en mars 1920 la proposition de créer « un fonds de fondation ». Il s’agit de collecter des contributions auprès des Juifs du monde entier pour soutenir et financer l’entreprise sioniste. Beaucoup s’opposèrent à cette idée la trouvant hors de propos mais Naidich continua de promouvoir sa vision.

En juin 1920, il s’exprime au Congrès sioniste de Londres en ces termes : « Le Fonds de la Fondation [Keren Hayessod] doit nous donner la capacité – non seulement pour commencer le travail – mais également pour le finir… C’est un temps de responsabilité pour notre peuple et un temps d’épreuve. Il vous incombe de préparer notre peuple à sortir de cette épreuve avec une couronne de vainqueur sur la tête ». La proposition est adoptée à une large majorité.

Une solution est trouvée. Le Keren Hayessod sera le dispositif de gestion des sommes affectées à la construction de la patrie juive en Terre d’Israël.

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DOSSIER SPÉCIAL 100 ANS

ARYEH OZ, L’ENFANT RESCAPÉ DE L’HOLOCAUSTE DEVENU PILOTE POUR DES OPÉRATIONS DE SAUVETAGE L’histoire fascinante de la vie d’Aryeh Oz illustre l’importance du principe de responsabilité mutuelle du peuple juif, l’un des fondamentaux du Keren Hayessod. Oz est un survivant de l’Holocauste, après la nuit de cristal en Allemagne, sa famille s’est enfuie en Hollande, conquise peu après par les Allemands. La veille de son transfert dans un camp de concentration, un étudiant juif l’a mis en relation avec une famille qui l’a caché jusqu’à la fin de la guerre. À l’âge de 11 ans, il décide de faire sa aliyah et est envoyé dans un village de jeunes, où il trouve un foyer et reçoit une instruction. « Ce que j’y ai trouvé m’a guidé sur le chemin de la vie », atteste-t-il. « J’ai été accepté dans un cours de pilotes puis j’ai été heureux de pouvoir redonner à l’entité qui m’a permis d’être ici ».

Commandant d’un escadron de l’Air Force, Oz a largué des parachutistes au col de Mitla pendant la campagne du Sinaï et piloté l’un des avions de l’opération Entebbe. Devenu plus tard un pilote El Al, il a été l’un des pilotes clés de l’opération Salomon pour amener des Juifs éthiopiens en Israël. À un moment dramatique de l’opération, alors qu’il n’y avait plus de siège disponible dans l’avion, Oz a courageusement autorisé l’embarquement des personnes restées au sol. Au total, ils furent 1 000 passagers, un record du Guiness ! Oz raconte « Lorsque nous avons survolé Jérusalem et que j’ai amorcé un virage vers l’aéroport, l’avion tout entier a entonné ‘Yérouchalaïm chel zahav’. Nous étions tous très émus ». De l’enfant secouru au pilote secourant les autres.

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DOSSIER SPÉCIAL 100 ANS

KEREN HAYESSOD, UN NOM DE RUE, MAIS PAS UNIQUEMENT !

Questionnez un Israélien à propos du Keren Hayessod et il risque de penser que vous lui demandez le chemin vers la rue Keren Hayessod la plus proche. Pourquoi ? Parce que quasiment chaque ville en Israël a une rue Keren Hayessod.

En reconnaissance envers les donateurs et l’organisation, chaque ville d’Israël a nommé l’une de ses artères principales « Keren Hayessod ». Vous pouvez l’arpenter à Ramat Gan, Ramat Hasharon, Herzliya, Givatayim, Petach Tikva, Kfar Saba, Tel Aviv, Jérusalem, Haifa, Les Krayot, Kiryat Shemona, Mazkeret Batya, Netanya, Afula, Tirat HaCarmel, Kfar Shmaryahu, Beer Yaacov, Ashdod, Holon, Safed, Sderot, et en bien d’autres endroits – Et la liste continue.

Lors de votre prochaine visite en Israël, promenez-vous sur l’une des rues Keren Hayessod !

COLLECTE DE FONDS SANS PRÉCÉDENT À LA VEILLE DE LA GUERRE DES SIX JOURS À la veille de la guerre des Six jours, Israël était en état d’urgence nationale, un sentiment de peur régnait et le pays avait urgemment besoin d’aide. Le 20 mai 1967, le Keren Hayessod prend l’initiative d’une campagne d’urgence et envoie des émissaires à l’étranger. En ce moment difficile, le Keren Hayessod découvre que le monde juif mondial répond encore une fois à son appel. Des files interminables de donateurs se pressent devant les bureaux du Keren Hayessod dans les grandes villes, une réponse formidablement émouvante. Au Canada, pas moins de 25 millions de dollars sont collectés, deux jours avant le déclenchement de la guerre. Les Juifs du monde entier et de tous les milieux socio-professionnels contribuent à la campagne, chacun à sa manière. Certains ont vendu des bijoux, d’autres ont hypothéqué leur maison, les communautés et les synagogues ont vendu des biens, les enseignants ont donné un mois de salaire et les enfants des orphelinats ont contribué en offrant les sous de leur visite hebdomadaire au cinéma. Tous voulaient donner, exprimer leur solidarité avec l’État d’Israël assiégé. Parmi les donateurs, de nombreux artistes et acteurs de renom, Peter Sellers, Danny Kaye, Arthur Rubinstein, Marc Chagall et Serge Gainsbourg. Le Keren Hayessod a collecté un total de 151 millions de dollars. L’effort conjoint du Keren Hayessod et de l’Agence juive a prouvé une fois de plus que l’État d’Israël et les communautés juives du monde sont indissociables et que leur lien est plus fort que toute menace.

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SOCIÉTÉ ISRAÉLIENNE

L'ÉCONOMIE ISRAÉLIENNE À L’HEURE DU CORONA…

ÇA PASSE OU ÇA CASSE ?

Par Myriam Azogui À L’HEURE DE LA CRISE DU CORONA QUI A MIS À GENOUX LA PLUPART DES ÉCONOMIES MONDIALES, QU’EN EST-IL DE LA FAMEUSE START-UP NATION ?

COMMENT ISRAËL TRAVERSE-T-ELLE LA CRISE ? COMMENT LES STRUCTURES DU PAYS RÉAGISSENT À CETTE ATTAQUE SUBIE PAR L’ENSEMBLE DES SOCIÉTÉS ?

LA SITUATION ANTÉRIEURE PERMETTAIT-ELLE D’ABORDER LA CRISE AVEC UNE CERTAINE DOSE DE CONFIANCE ? A-T-ELLE EXACERBÉ DES DÉFIS STRUCTURELS ?

Pour appréhender la situation actuelle et les effets de la crise, il convient de comprendre l’évolution du modèle économique ainsi que l’aspect social et démographique du pays.

D’un modèle socialiste et collectiviste centré sur l’agriculture, Israël est passé à une économie de marché dans les années 90.

Propulsé par l’arrivée massive des Juifs de l’ex-URSS dont beaucoup de scientifiques, le pays a opéré un tournant vers les nouvelles technologies en devenant un fer de lance de l’innovation. Les structures de transfert de technologies au sein des universités ont également permis l’essor de start-up innovantes pouvant aussi s’appuyer sur des financements gouvernementaux en recherche et développement parmi les plus élevés au monde.

En 2010 Israël rejoint l'OCDE consacrant ainsi l’ascension époustouflante de ce jeune pays ayant réussi un passage à l’économie de marché. L'adhésion d’Israël à cette organisation fut saluée comme un pas important dans son développement économique et lui vaut désormais l'appellation courante de Nation Start-up.

En février 2020, à l’occasion d’une soirée du Business Club Israël du Keren Hayessod, l'ancienne vice-gouverneure de la Banque d’Israël, Nadine Baudot Trajtenberg, déclarait ainsi que l’économie israélienne pouvait s’enorgueillir d’une croissance économique, d’un marché du travail exemplaire, d’une balance commerciale en surplus, d’un secteur financier stable et d’une inflation basse avec une devise forte.

Pour autant, elle indiquait que cette réussite s’accompagnait également d’un fort mécontentement social, ce qui constitue ce que l’on nomme le paradoxe israélien, confirmé par les rapports de l'OCDE.

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SOCIÉTÉ ISRAÉLIENNE

ISRAËL, UNE ÉCONOMIE À 2 VITESSES ?

Malgré les succès économiques indéniables, des différences importantes de richesses et de niveau de vie persistent en fonction des communautés et zones géographiques s’accompagnant d’un niveau de formation professionnelle très inégal.

Société jeune de 9,2 millions d'habitants1 avec un taux de fécondité de 3,1, Israël est composé d’un ensemble disparate de populations et de communautés. Les populations arabes et ultra-orthodoxes (haredim) soit plus de 30% de la population, sont en retrait par rapport au reste de la société tant au niveau de l'éducation que la pauvreté. Les haredim qui constituent 12% de la population représentent 53% des citoyens vivant sous le seuil de pauvreté, avec 49% des hommes ne travaillant pas. Dans les communautés arabes, près de 50% des femmes sont sans emploi.

Les disparités touchent également aux zones géographiques. Si les habitants de Tel Aviv et de sa banlieue peuvent bénéficier de services éducatifs en sus de l’école, les habitants des villes plus pauvres, la périphérie sociale, n’y ont pas accès. La périphérie sociale reste complètement en marge de la réussite du centre.

Combinées à un coût de la vie très élevé, ces disparités ont participé à l’émergence d’une catégorie de travailleurs pauvres. Il s’agit de “travailleurs dont les revenus se situent en dessous du seuil de pauvreté, vivant dans un ménage comptant un chef de famille d'âge actif et au moins un actif occupé” selon la définition de l’OCDE.

De nombreux magasins en Israël ne rouvriront pas...

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SOCIÉTÉ ISRAÉLIENNE

D'après le dernier rapport de la Banque Mondiale sur le coût de la vie, le coût du logement a augmenté de 120% depuis 2011 et Israël est devenu 22% plus cher que la France.

Selon Yaelle Ifrah, attachée parlementaire et experte en consommation, Israël est le pays qui a connu la hausse la plus spectaculaire.

Cette situation est issue d’un ensemble de facteurs dont l’un des premiers est le système monopolistique et le protectionnisme des corporations qui continuent de régir le marché empêchant l’établissement d’une libre concurrence bénéficiant au consommateur.

UNE SITUATION COMPLEXE EXACERBÉE PAR LA CRISE DU CORONA Et de fait, selon l’OCDE, la “pandémie de coronavirus a atteint l’économie israélienne en profondeur”2 Dès le début de la crise, le marché de l’emploi a été sévèrement touché alors que le taux de chômage était très bas (4% avant la crise). Plus d’un million de salariés ont dû quitter temporairement leur emploi. Moins de la moitie a repris le chemin du travail depuis. Le pays ne fonctionnant pas sur un modèle d’État providence assurant un filet de sécurité constant aux citoyens, beaucoup se sont retrouvés sans ressource. Malgré les aides gouvernementales pour la reprise, incitatives pour les entreprises, la 2e vague et le second confinement ont rendu le futur incertain pour de nombreux employés et pour les PME. Des pans entiers de l’économie tels que le tourisme et l’évènementiel se retrouvent exsangues laissant des familles de la classe moyenne désormais vulnérables.

Le système bancaire a pu démontrer sa solidité dès le début de la crise. La Banque d’Israël a abaissé le taux directeur de 0,25% à 0,1%. Grâce à l’assouplissement de la règlementation et de la politique monétaire ainsi qu’au dispositif public de garantie des prêts, les effets sur l’offre de crédit ont été limités3. Mais les différentes aides apportées vont inévitablement faire monter le déficit budgétaire en flèche faisant augmenter la dette publique. À ce climat d’incertitude s’ajoute une situation politique très tendue. En effet, un mouvement de contestation populaire s’est développé, issu dans un premier temps des indépendants

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SOCIÉTÉ ISRAÉLIENNE

réclamant un soutien financier de l’État, puis gagnant les autres couches de la société dénonçant entre autres la gestion de la crise.

Les disparités sociales et géographiques pointées du doigt par l’OCDE, se révèlent ainsi être la faiblesse de l’économie israélienne, voire son cheval de Troie.

Dans ce climat, la reprise tant au niveau de la productivité que des exportations risque d’être laborieuse.

LA FORCE SECRÈTE D’ISRAËL Pour autant, la société israélienne peut compter sur l’une de ses forces qui transcende les disparités évoquées. Il s’agit de la solidarité entre citoyens. En dehors de la crise même, des relais existent pour assister les populations plus vulnérables. Que ce soit sous forme d’associations ou sous la houlette des municipalités plus riches, des systèmes d’entraide offrent de la nourriture, du soutien scolaire, des biens, etc..

Et depuis le début de la crise, cette solidarité ne s’est pas démentie. De façon très discrète et spontanée, des aides ont été mises en place afin de soutenir les plus vulnérables. Que ce soit pour les malades du Corona, les personnes mises en isolement, les personnes à risques ne pouvant sortir de chez elles, et bien sûr les familles les plus vulnérables financièrement, des chaines de solidarité ont permis à ces personnes de recevoir leurs courses, des repas, des aides financières... À cette solidarité locale s’ajoute celle d’organisations internationales comme le Keren Hayessod qui assurent le lien entre Juifs de diaspora et Israël et apportent une aide active aux plus démunis. De nombreux Israéliens bénéficient directement d’un soutien, d'autant plus vital aujourd’hui, grâce aux campagnes de levée de fonds organisées par ces organisations.

C'est cette énergie humaine et cette solidarité qui permettent d’avoir une lueur d’optimisme pour la reprise économique et le futur du pays.

Kol Israel arevim zeleze.

"Tous les Juifs sont responsables les uns des autres" 1 - https://www.cbs.gov.il/he/mediarelease/DocLib/2019/413/11_19_413e.pdf 2 - Rapport OCDE Israel 2020 3 - Rapport OCDE Israel 2020

La société civile et les organisations internationales jouent un rôle fondamental, pour l'aide aux plus démunis.

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100 ans d'actions du Keren Hayessod LES PROGRAMMES DU KEREN

POUR LE PEUPLE D’ISRAËL

EN CES TEMPS DE CRISE, BEAUCOUP D’ISRAÉLIENS SONT DUREMENT TOUCHÉS PAR LA SITUATION ACTUELLE, NOTAMMENT LES PERSONNES ÂGÉES ET LES FAMILLES DÉFAVORISÉES, PREMIÈRES VICTIMES DE CETTE CRISE. LE CHÔMAGE ATTEINT DES TAUX RECORDS ET DE NOMBREUSES PERSONNES ISSUES DE LA CLASSE MOYENNE BASCULENT DANS LA PAUVRETÉ : 73% DES FAMILLES À RISQUE SONT DANS UNE SITUATION DE GRANDE PRÉCARITÉ FINANCIÈRE. LE KEREN HAYESSOD PREND SOIN DES PLUS FRAGILES.... GRÂCE À VOUS !

VOICI DEUX PROGRAMMES PHARES DU KEREN HAYESSOD QUI REPRÉSENTENT UN SOUTIEN ESSENTIEL PENDANT CETTE PÉRIODE DE CRISE...

Par Sandra Allouch

AVENIR DES JEUNES POUR LES JEUNES ET LES FAMILLES Avenir des jeunes est un programme d’encadrement éducatif destiné aux enfants israéliens de 6 à 18 ans, issus de milieux défavorisés. Des éducateurs s’occupent de ces enfants dits « à risques » et de leur famille. Ce projet ambitieux est mené en relation avec les écoles, dans les villes les plus pauvres d’Israël. Il permet d’extraire ces jeunes de comportements d’échec. À ce jour, 14 000 enfants et leur famille en sont bénéficiaires, répartis dans 200 écoles partout en Israël.

Depuis le début de la Covid, et notamment pendant les périodes de confinement, les éducateurs sont restés en relation avec les enfants qu’ils suivent : les rendezvous se sont transformés en visioconférence, les mails et appels téléphoniques se sont accrus mais le contact est là ! Ces enfants, souvent abandonnés par la société sont quotidiennement en relation avec leur éducateur qui leur apporte l’aide dont ils ont besoin pour s’épanouir.

Un soutien personnalisé.

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au service des plus fragiles en Israël !

HAYESSOD S'ADAPTENT À LA CRISE En lien également avec les familles des jeunes, l’éducateur les accompagne dans les démarches nécessaires auprès des institutions pour qu’ils ne tombent pas davantage dans la pauvreté. Une aide non négligeable pour ces familles, qui sont pour la plupart, de nouveaux immigrants (olim hadachim).

AMIGOUR POUR LES AÎNÉS Le Keren Hayessod aide ses aînés qui font face depuis la pandémie à des problèmes à la fois économique et sanitaire. À l’heure actuelle, 10 % des personnes âgées en Israël vivent sous le seuil de pauvreté dont beaucoup de rescapés de la Shoah. La plupart n’ont pas les moyens de se payer un logement décent et la crise de la Covid a amplifié ce phénomène.

Pour répondre à ce besoin, le Keren Hayessod finance les 57 résidences Amigour qui accueillent plus de 7500 personnes âgées défavorisées. Ces résidences leur offrent un logement adapté ainsi que de nombreux services sociaux et culturels ou encore des activités telles que des ateliers d’art, des cours de gymnastique, la célébration des fêtes… Toutes ces activités ont bien évidemment été suspendues depuis le début de la Covid.

Des mesures sanitaires ont été instaurées pour éviter la contamination des résidents : dépistage du personnel, limitation des visites, distribution de paniers solidaires comprenant des produits d’hygiène et du matériel de protection...

Tout est mis en place pour leur permettre de vivre sereinement cette période compliquée.

Distribution de halot pour Shabbat.

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DÉPARTEMENT UNION CLUB

Gisèle et Sauveur Assous vous présentent leurs Meilleurs Vœux pour la Nouvelle Année

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CAMPAGNE NATIONALE

ENSEMBLE,

100 FOIS PLUS POUR ISRAËL Par Sylvie Sebag RETOUR SUR UNE BELLE CAMPAGNE DE COLLECTE ORGANISÉE PAR LE KEREN HAYESSOD QUI S'EST TENUE DU 13 AU 15 SEPTEMBRE 2020. CHAQUE EURO DONNÉ ÉTAIT DOUBLÉ PAR DES MÉCÈNES. SYLVIE SEBAG, BÉNÉVOLE ACTIVE DE CETTE CAMPAGNE NOUS RACONTE… LUNDI : réunion d’information pour les bénévoles. J’arrive dans une salle accueillante où tout est pensé pour la convivialité : dégustation de vins israéliens, buffet. Des regards se croisent : qui est un habitué, qui est nouveau ? Nous rejoignons la table de réunion et tout de suite, au travail : je ne connais rien aux collectes de dons, ni à la psychologie des donateurs. Eva me guide : ne pas parler de soi, se concentrer sur les centres d’intérêt des donateurs... Et voilà la grande amorce : sortir du « je » pour entrer dans le « jeu » ; mettre de côté ses représentations, entrer de plain-pied dans l’altérité. Ran, le délégué israélien du Keren Hayessod explique alors l'essence du projet, avec simplicité et sincérité : rénover un village de jeunes en grande difficulté, les aider à retrouver le goût de la vie... Son discours est soutenu par Hannah, qui connait bien les ficelles du fundraising et va booster les équipes qui participent à la campagne.

DIMANCHE APRÈS-MIDI : les premiers appels sont pour nos proches. On doit les convaincre ! Notre cause est forte. On se fait la main, on va de plus en plus vite, on est déjà grisé.

LUNDI : Des tablettes débarquent ! Elles nous aident à appeler les personnes inscrites dans le fichier du Keren Hayessod : je ne suis pas « geek », les numéros défilent vite !

On m’explique quand et où appuyer sur les touches…

MARDI : Je rentre dans l’univers des donateurs : tantôt en réunion ou en proie à des difficultés économiques, généreux inconditionnellement, réservés.

LES DERNIÈRES HEURES : j’ai du mal à croire que nous pourrons atteindre 1 000 000 d’euros ! La tension monte, monte et victoire : l’objectif est atteint : on a gagné, on est heureux, on ressent la fatigue d’une fin de marathon. Champagne, sourires : les jeunes du village auront un bâtiment tout neuf et confortable ! On est contents, tout simplement. Ce fut une belle aventure humaine pour une cause juste.

Plus d'un million d'euros collecté en 48 h, grâce à une équipe très investie.

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L’ÉCHO DES RÉGIONS

NOUVELLE PRÉSIDENCE À LYON :

LA RELÈVE DE LA JEUNESSE A LYON, LA SECTION DU KEREN HAYESSOD CHANGE DE VISAGE AVEC NON PAS UN MAIS DEUX PRÉSIDENTS POUR SUCCÉDER À THIERRY TOUBIANA, MILITANT INCONTOURNABLE DE L’INSTITUTION DEPUIS DE NOMBREUSES ANNÉES. LE DUO EST INCARNÉ PAR YOHAN GUIGUI ET XAVIER AMSELLEM, DEUX QUADRAGÉNAIRES LYONNAIS, AMIS DANS LA VIE, ET ANIMÉS PAR UNE MÊME VOLONTÉ, MOBILISER LA JEUNESSE AUTOUR DE L’ENGAGEMENT ET DU DON AU PROFIT D’ISRAËL. PORTRAITS.

Par Paula Haddad

YOHAN GUIGUI De son passé dans les mouvements de jeunesse, il a été président du BBYO et de l’UEJF Lyon, Yohan Guigui a gardé l’envie de donner de soi et de son temps. Un état d’esprit qui remonte également à sa formation de kinésithérapeute ostéopathe, son métier durant quinze ans qu’il associe à la démarche d’aider l’autre à avancer.

Ce père de famille de deux enfants, désormais marchand de biens, n’a donc pas hésité à rejoindre le Keren Hayessod : « Cela me manquait de ne plus m’investir auprès de la communauté, j’avais besoin de redonner du sens à mon parcours et ma rencontre avec Michaël Sfez, délégué d’Israël et responsable du Business Club a été déterminante même si je connaissais peu le Keren Hayessod.

On a créé un lien et j’ai commencé à m’impliquer pour développer le Club avec Xavier Amsellem dont je suis proche depuis des années ».

Si la crise sanitaire actuelle ne permet malheureusement pas d’être dans l’action immédiate, le militant de 43 ans ne manque pas de dynamisme pour réussir sa mission avec son co-président. Il a bien sûr participé activement à l’extraordinaire collecte « 48h pour Israël » de septembre dernier. Israël, Yohan en parle sous l’angle d’un attachement « sioniste, familial et religieux » avec en ligne de mire, le soutien à ceux qui feront le pays demain. Il se dit très sensible rés de à g.

Yohan et Xavier entou au programme Net@ qui aide les jeunes de zones défavorisées d. Amir à et Thierry Toubiana z.

Sfe à se former à la High-tech. l haë Mic et id Lap Et pour inciter la jeunesse française à s’investir, le bénévole a une vision bien précise : « La génération à laquelle j’appartiens est beaucoup plus individualiste, chacun pense à son travail, à sa famille et c’est très bien. Mais il n’y a plus trop de place pour Israël.

Avec Xavier, nous souhaitons rassembler les jeunes actifs, grâce à notre réseau amical et professionnel, en s’appuyant sur une approche différente. Aujourd’hui, le constat

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est clair : il n’y a plus rien de gratuit. Il faut donner avant de recevoir. Le Business Club est un levier séduisant, les gens assistent à des after work, développent leur réseau et sont ensuite amenés à donner au Keren Hayessod en retour. Autre idée, organiser des événements ludiques pour les enfants. Dans ce contexte, fragilisé par la crise, où les gens sont très sollicités, il faut sensibiliser autrement ».

XAVIER AMSELLEM Accompagné de son ami Yohan Guigui, ils se connaissent depuis leur bar mitva, Xavier Amsellem, 45 ans, a lui aussi, pour ambition de fédérer la jeunesse lyonnaise. Un sujet crucial pour le bénévole depuis cette soirée qu’il a organisé avec l’UEJF Lyon (ndlr : il en fut trésorier) où il a compris l’importance d’un tissu solide pour assurer la relève de la communauté. Après s’être consacré à son métier de courtier en assurances et à ses trois fils, le besoin de s’engager a ressurgi. « Michaël Sfez nous a présenté les objectifs du Keren Hayessod, d’abord à travers le Business Club et j’ai de suite eu envie de m’investir. Puis, il a trouvé que nos profils correspondaient pour reprendre la présidence et développer le réseau dans notre génération ».

Il y a le réseau à tisser et des causes à défendre, mission essentielle pour le militant encore « débutant » précise-t-il en matière de collecte. Il cite entre autres Amigour, programme pour les survivants de la Shoah qui le touche particulièrement. Il poursuit sur son lien avec Israël : « Une partie de ma famille est en train de progressivement migrer en Israël, mais jusqu’à présent, je ne me sentais pas prêt à aller vivre là-bas. En revanche, je m’interroge sur l’avenir de mes enfants (ils sont 15, 13 et 7 ans), si demain ils souhaitaient construire leur futur en Israël, je ne les freinerai pas et leur motivation pourrait nous amener à franchir le pas. La question de l’accompagnement des jeunes dans l’alyah pour faire leurs études m’intéresse beaucoup ».

En attendant de mener à bien des actions sur le terrain, Xavier Amsellem partage la vision de son co-président pour sensibiliser la jeunesse à travers le Keren Hayessod. « J’apprécie l’esprit du Business Club qui permet de rassembler des actifs de notre génération, un peu éparpillés au sein de la communauté actuelle.

Par ailleurs, avec la récente fermeture de l’Espace Hillel, il faut aussi repenser des événements adaptés aux jeunes afin qu’ils ne soient pas livrés à euxmêmes une fois qu’ils quittent le Talmud Torah. Récemment, j’ai privatisé à titre personnel une salle pour réunir des adolescents autour d’une séance de krav-maga.

Je suis très inquiet par le manque d’initiatives, les gens ne sont pas impliqués. Il faut redonner du sens à tout ça ».

THIERRY TOUBIANA a été le président du Keren Hayessod Rhône-Alpes de 2014 jusqu’en octobre 2020. Durant toutes ces années, il n’a pas ménagé ses efforts pour diffuser les actions du Keren Hayessod à Lyon. Il est à présent Vice-président chargé du développement et des "Amis d'Israël". Nous lui souhaitons Beatslaha !

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L’ÉCHO DES RÉGIONS

QUAND LA SOLIDARITÉ S’EXPRIME AUSSI AVEC LES PERSONNES ÂGÉES EN FRANCE Par Sandra Allouch À la suite de la crise déclenchée par la Covid, le Keren Hayessod France a mené une campagne de collecte pour aider les personnes âgées, fortement impactées, en Israël.

Les fonds ont été essentiellement distribués au programme Amigour, qui offre un hébergement adapté aux personnes âgées défavorisées (voir l’article page 19).

Mais à situation exceptionnelle, aide exceptionnelle : le Keren Hayessod a souhaité qu’une partie des fonds soit attribuée à des EHPAD français, pour marquer sa solidarité avec l’ensemble du peuple juif. Les établissements suivants en ont bénéficié et ont apprécié ce geste hautement symbolique : Eliza à Strasbourg, FIR à Paris, Alfred Kermes Saint-Antoine à Saint-Martin-Vésubie dont la région a été fortement touchée par la tempête Alex.

Remise de chèque à FIR De g. à d. : Judith Oksc o-présidente du KH, Marie-Laure Delillle, directrice de l'Ehpad, Nadia Neiman, présidente d'honneur et Amir Lapid.

"Ce soutien indispensable s'est imposé comme une évidence au vu de la situation" a déclaré Amir Lapid, directeur général du Keren Hayessod France.

Etablissement Eliza à Strasbourg.

En présence de Thierry Ross, Arnaud Weill et Fabienne Gaude, directrice de l'Ehpad.

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CULTURE

JUIFS D'AILLEURS

DIASPORAS OUBLIÉES, IDENTITÉS SINGULIÈRES Recension : Sylvie Sebag Cet ouvrage de référence se lit comme une encyclopédie : c’est une vraie mine d’or avec des informations -parfois surprenantes- sur les diasporas juives d’aujourd’hui.

On y apprend, par exemple, que, « jusque vers 1800 environ, les Juifs du Suriname constituent la plus importante communauté juive des Amériques ».

Le livre est sous-tendu par une « thèse politique » qui se décline en plusieurs points et suscite des questions et débats fructueux, alimentés par diverses contributions théoriques proposées dans l’introduction générale et dans la dernière partie « Identités en mouvement ».

1/ Les diasporas juives constituent le paradigme des autres diasporas, si nombreuses aujourd’hui et du multiculturalisme contemporain.

2/ Les diasporas « émergentes », notamment en Afrique, en Amérique latine et en Inde, sont plus des diasporas « d’adhésion », ancrées dans les contextes sociopolitiques des pays dans lesquels elles vivent, que des diasporas réellement liées à des origines juives perdues. Du fait des déplacements et des immersions successives dans les cultures locales, les membres de ces diasporas n’ont pas une identité figée.

Ce qui les caractérise, c’est plutôt un « kit identitaire », un large spectre identitaire.

E. Bruder semble préférer ce judaïsme d’adhésion, conforme aux valeurs juives, à un judaïsme « ethnique » et « génétique », lié selon elle à un « idéal-nationalisme ».

En tant qu’historienne, elle est est à cet égard réservée à propos de certaines recherches sur les crypto-judaïsmes et le marranisme, qui font l’hypothèse d’un ancrage historique direct des communautés dans des racines juives.

3/ Dans son chapitre « Les tribus perdues d’Israël, mythe moderne et post-moderne », E. Bruder déconstruit les représentations conventionnelles sur cette question, confortant la thèse de l’hétérogénéité des diasporas contemporaines.

Finalement, une question essentielle demeure : y a-t-il une spécificité de la diaspora juive ? Dans le chapitre « L’exil selon la Bible et la littérature rabbinique », Julien Darmon rappelle que le peuple juif a pour mission d’être Or La Goyim, lumière parmi les nations.

C’est là que l’approche spirituelle peut se découpler de l’approche socio-historique. E. Bruder nous permet de mettre sa thèse en débat, ce qui est stimulant et fidèle à la tradition juive de « mahloket ».

Ce livre riche et stimulant témoigne d’une marche incessante SOUS LA DIRECTION D'EDITH BRUDER de la pensée, du questionnement fertile.

JUIFS D’AILLEURS ED. ALBIN MICHEL, 2020

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CULTURE

ZEKHER (LE SOUVENIR) Par Richard Prasquier Les commémorations qui marquent le centième anniversaire de la création du Keren Hayessod sont l’occasion de réfléchir sur le mot ‫( זכר‬zekher), le souvenir.

C’est probablement une des racines les plus connues de l’hébreu.

Yzkor est la cérémonie du souvenir : l’Yzkor de Yom Kippur est le moment où beaucoup de Juifs qui ont par ailleurs abandonné toute pratique religieuse viennent à la synagogue en mémoire de leurs défunts. « Zekher litsiat Mitsraïm » (en souvenir de la sortie d’Egypte), le texte du Kiddoush lui-même rappelle que si le Shabbat commémore la création du monde, la sortie d’Égypte est aussi un Shabbat, celui de ia création du peuple juif. Le Shabbat Zakhor, " le Shabbat du Souvenir ", est celui qui précède la fête de Pourim. Il est signalé dans la synagogue par la lecture d'un court passage du livre du Deutéronome (25 : 17-19) qui commence par le mot Zakhor : ‫מצ ְרָ י ִם‬ ִּ ‫מ‬ ִ ‫תכ ֶם‬ ְ ‫בצ ֵא‬ ְּ ‫בּדֶ ּרֶ ְך‬ ַ ‫מלֵק‬ ָ ֲ ‫שׂה לְָך ע‬ ָ ָ ‫שר ע‬ ֶ ׁ‫א‬ ֲ ‫( ז ָכֹור אֵת‬zakhor ma asa lekha Amalek baderekh bemitsraïm): rappelle-toi ce que t’a fait Amalec sur la route au sortir de l’Égypte. L’injonction du souvenir est reprise sous une autre forme à la fin du paragraphe : ‫שכָּח‬ ְ ׁ‫ת‬ ּ ִ ‫( לֹא‬lo tichkah) : n’oublie pas. Haman, le génocidaire avorté de Pourim, est un descendant de Amalec. ‫( זיכרון‬zikaron) est le souvenir (Yom ha zikaron, le jour du souvenir), le ‫ מזכיר‬est le secrétaire. Le secrétaire général d’un parti au secrétaire d’État ou encore une personne qui exerce le métier de secrétaire: celui qui note pour qu’on puisse se rappeler...

La racine se retrouve à peu près identique (d ou dh remplaçant le zain initial) dans toutes les langues sémitiques. Elle ne semble pas poser de problème particulier. Elle soulève cependant deux remarques, l’une d’ordre linguistique, l’autre d’ordre culturel.

Sur le plan linguistique, on ne peut pas ne pas remarquer que la même racine ‫ זכר‬ne signifie pas seulement mémoire, mais aussi mâle : ‫זָכ ָר ּונ ְ ֵקבָה‬, « Zahar ve nekeva », mâle et femelle, écrit la Genèse au moment où Noé fait entrer dans son arche les couples d’oiseaux. La prise électrique « mâle », se dit chèka zekher ‫שקע זכר‬ Inutile de dire qu’on s’est posé la question du lien entre le souvenir et la masculinité.

Pour certains, passablement sexistes, seul l’homme véhiculerait la transmission.

Comme le judaïsme se transmet par les femmes, cette assertion doit être prise avec

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CULTURE

beaucoup de réserves... L’antonyme de zekher, autrement dit la féminité connote indiscutablement l’idée de « perforation » ‫ ניקוב‬nikouv, (depuis les cartes perforées, jusqu’à la ponction...). On est tenté de penser que la comparaison s’est faite a contrario entre membre viril, monolithe dressé et signal commémoratif... À moins que se souvenir signifie simplement enfoncer quelque chose dans sa tête...

Sur le plan culturel, il est banal de dire que les Juifs sont le « peuple de la mémoire ». Dans un livre magnifique d’érudition et de finesse, Zakhor, histoire et mémoire juive, le grand historien Yosef Hayim Yerushalmi s’interroge sur ce paradoxe de l’absence de référence historique dans la littérature rabbinique. L’histoire est une perte de temps, aurait écrit Maïmonide. Ce qui compte c’est la recherche du sens, témoignage de la participation divine dans l’histoire et injonction de comportement. D’où la référence, à Amalec, qui est capitale : ne pas oublier celui qui a voulu faire disparaitre les Juifs de la terre.

Ce n’est qu’au XIXe siècle, dans la ligne de la haskala, que s’est développée une historiographie juive factuelle et scientifique, dont les archives du ghetto de Varsovie, sous la direction de Emmanuel Ringelblum, sont le témoignage héroïque. Mais dans le temps long, les Juifs ont été le peuple de la mémoire plutôt que le peuple de l’histoire.

L’année 2020 est aussi la soixante quinzième année du la « libération » d’Auschwitz (toujours avec des guillemets, le camp avait été vidé des survivants encore valides, engagés dans les terribles marches de la mort...). La dénomination du génocide des Juifs aurait pu utiliser le mot ‫( השמדה‬hachmada, anéantissement, vernichtung en allemand), mais ce mot qui fait partie du vocabulaire courant de l’hébreu, et probablement pour cette même raison, ne fut pas utilisé.

Le terme de ‫( חרבן‬hourban) proche de herev (le glaive) et de hourva (la ruine, comme la synagogue célèbre de Jérusalem), avait été employé déjà pour les grandes catastrophes de l’histoire juive: destruction du premier et du second Temple avant

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CULTURE

tout, puis les massacres, par exemple ceux d’Ukraine sous la houlette des cosaques de Chmielniciki. Dans l’après-guerre, ce terme, largement employé en yiddish fut celui de la plupart des Juifs survivants pour qualifier les événements et il est resté utilisé dans le monde des yechivot. Or, le mot hourban insère l’événement (souvent aussi appelé la « catastrophe » dans une chaine religieusement signifiante : destructionexil-rédemption (gueoula). Il en fait un épisode paroxystique mais supplémentaire du long martyrologue juif, dont le premier exemple faillit être Isaac (l’Akeda). Les victimes étaient éprouvées en lien avec leur foi (kidoush haChem). Cependant, certains dérivés de la racine ‫ חרב‬s’étaient trivialisés dans le yiddish parlé au point de contribuer à des expressions argotiques reprises en hébreu moderne (détruire, « foirer » un projet, voire déféquer), ce qui a pu contribuer au progressif déclin de cette dénomination, d’autant que sa connotation religieuse n’était pas acceptée dans les milieux juifs marxistes ou bundistes.

En France, c’est le terme de Shoah qui est utilisé. Le film de Claude Lanzmann l’a imposé. Lanzmann, ne parlait pas hébreu et a dit l’avoir choisi pour sa sonorité hermétique et son sens mystérieux, qui en faisait un événement hors norme.

Le terme de Shoah avait été utilisé à plusieurs reprises dès avant la guerre par des dirigeants sionistes, tel Moshe Sharett, ou par la presse juive de l’époque, pour évoquer la « catastrophe » qui s’abattait sur les Juifs d’Allemagne avec l’arrivée des nazis au pouvoir, catastrophe dont nul ne pouvait à l’époque prévoir l’ampleur. Un tel emploi serait aujourd’hui évidemment impossible. La Shoah était bien une catastrophe, toute catastrophe n’est pas la Shoah.

Le mot de Shoah signifie un événement destructeur, qui peut aussi être d’origine « naturelle » par exemple météorologique.

S’il n’avait pas la même historicité que le hourban, le terme de Shoah n’était pas non plus dénué de connotation théologique.

Avec certains de ses dérivés, il est retrouvé à une dizaine de reprises dans la Bible, notamment chez les Prophètes, Job ou les Psaumes : il prend l’aspect d’une mise en garde. En voici quelques exemples dans la traduction (mise entre guillemets) du Mechon Mamre.

PSAUME 35/8 ‫י ֵדָ ע‬-‫ לֹא‬,‫תּבֹואֵהּו ׁשֹואָה‬ ְ (qu’une « catastrophe » fonde sur eux à l’improviste) ESAIE 47/11 ‫ לֹא תֵדָ ע ִי‬,‫שאָה‬ ֹ ׁ ‫תאֹם‬ ְ ‫פ‬ ִּ ‫וְתָב ֹא עָלַי ְִך‬ (la « ruine » t’accable soudain à l’improviste) EZECHIEL 38/9 ‫שאָה תָבֹוא‬ ָ ‫וְעָלִי‬ ֹּ ׁ ַ ‫ת ּכ‬ (tu monteras, tu viendras comme « l’ouragan ») DECEMBRE 2020 - # 17 • LA REVUE DU KEREN HAYESSOD FRANCE

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CULTURE

« Shoah » est devenu un terme officiel en Israël avec le décret du 12 avril 1951 instituant une Journée du Souvenir, fixée au 27 nissan de chaque année et portant le nom de Yom ha-Shoah vemèred ha-Guètaoth. Le 9 août 1953 la Knesset vote la loi sur « la Shoah et la Guevoura » (guevoura signifie héroïsme) qui institue le Mémorial de Yad Vashem. Cette association avec l’héroïsme est une constante de l’époque qui voit se créer deux lieux emblématiques du combat des Juifs contre le nazisme : le kibboutz Lochamei Hagetaot (les Combattants des ghettos) et le Kibboutz Yad Mordekhai (d’après Mordekhai Anielewicz, chef de la révolte du ghetto de Varsovie). Ce n’est qu’avec le procès Eichmann que la disproportion entre le génocide et les moyens de résistance armée est devenue si flagrante que les arrière-pensées sur la « passivité » des victimes se sont amorties.

Dans la majorité des pays cependant, et en particulier aux États-Unis, en Allemagne et dans les pays slaves, le terme utilisé pour parler du génocide des Juifs n’est pas Shoah mais « Holocauste ».

Holocauste est un terme grec, utilisé par la Septante, qui signifie une consomption par le feu (καύστος, « kaustos », qu’on retrouve dans « caustique ») se faisant de façon complète (ὅλος, holos, entier, avec de nombreux dérivés en « holo »).

C’est avec la série du même nom (Holocaust), présentée à la télévision américaine en 1978, et vue par des centaines de millions de téléspectateurs que le nom de Holocauste s’est imposé. Cette fiction, qui conte le destin de la famille Weiss, des Juifs allemands, a été à juste titre critiquée pour ses approximations et ses invraisemblances, mais c’est par elle, peut-être plus que par n’importe quelle autre oeuvre de plus grande qualité historique ou artistique que la notion de génocide des Juifs s’est imposée dans la mémoire collective et a notamment enfin transformé le regard des Allemands sur la guerre. À méditer : les difficultés et les spécificités de « l’enseignement de la mémoire/ histoire de la Shoah » en un temps où une étude montre que plus de la moitié des jeunes Allemands de moins de 17 ans ne savent pas aujourd’hui ce qui s’est passé à Auschwitz Birkenau, dont le nom est pourtant devenu, à tort, une sorte de métonymie de la Shoah. Et des résultats comparables ont été retrouvés en France…

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