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Parcours sans frontières du recrutement international

LA PÉNURIE DE MAIN-D’ŒUVRE A INCITÉ PLUSIEURS RÉSIDENCES QUÉBÉCOISES À SE TOURNER VERS LE RECRUTEMENT INTERNATIONAL POUR COMBLER LEURS BESOINS EN PRÉPOSÉS AUX BÉNÉFICIAIRES. CETTE DÉMARCHE VISE À RÉPONDRE AUX DÉPARTS À LA RETRAITE, AUX NOUVELLES EMBAUCHES ET À L’AUGMENTATION DE LA DEMANDE EN SOINS.

Le recrutement international est né d’un besoin de la difficulté croissante de recruter des préposés aux bénéficiaires au Québec en 2016. À la Villa St-Georges, qui compte une centaine d’employés, le tiers est composé de travailleurs étrangers. Pour cette résidence de Victoriaville, le recrutement international entraîne des coûts annuels d’environ 125 000 $ pour embaucher une dizaine de préposés.

Après avoir effectué plusieurs missions à travers la francophonie africaine et européenne, David Alain, propriétaire de la Villa St-Georges et Mylène Cloutier, vice-présidente à la direction, ont acquis une certaine expérience du processus de recrutement international.

PRÉQUALIFICATION

Lors d’une Journée Québec en France, en Tunisie ou au Maroc, « on peut recevoir 1 000 candidats », indique David Alain, ce qui peut rendre la sélection difficile. Vient ensuite la rencontre de 50 à 60 candidats sélectionnés sur deux ou trois journées. L’ajout de nombreuses règles complexifie ce processus déjà ardu, notamment en ce qui a trait à la reconnaissance des formations, et il est recommandé de faire appel à un partenaire à l’étranger pour la présélection des candidats, car cette étape est importante. Il souligne également l’importance d’effectuer les entrevues en présentiel, car cela permet d’évaluer non seulement le savoirfaire, mais aussi le savoir-être, en plus d’offrir une occasion d’évaluer le niveau de français du candidat.

Pour Manisha Matadeen Rand ayant cumulé une expérience d’aidesoignante en Irlande, aux États-Unis, ainsi qu’à l’île Maurice, la pratique du métier reste sensiblement la même. « Seules la terminologie, la loi 90, RCR et PDSB changent, mais les soins sont les mêmes », dit-elle. En entrevue, lors du recrutement, cette préposée raconte avoir passé un test théorique. « Ils ont posé des questions à propos de [mes] études, mais avec mes 14 ans d’expérience, j’étais à l’aise ».

RAC OU ÉVALUATION COMPARATIVE ?

En reconnaissant le diplôme, l’évaluation comparative permet au nouvel employé de démarrer immédiatement son travail, ce qui en fait une option à privilégier. Toutefois, elle n’est malheureusement pas garantie dans tous les cas, explique Mylène Cloutier. De plus, dans certains pays, le relevé de notes n’existe pas, ce qui entrave le processus.

En l’absence d’évaluation comparative, l’employé doit passer par un processus de reconnaissance des acquis et des connaissances (RAC) pour déterminer s’il doit continuer à se former. Manisha a déjà complété la partie théorique de ce processus et est maintenant engagée dans la partie pratique, qui implique l’observation en milieu de travail.

Par ailleurs, lorsque les employés sont recrutés à l’étranger, il leur est impossible d’être formés au premier jour de leur embauche sans évaluation comparative, ce qu’impose la certification, précise Mylène Cloutier.

Dans tous les cas, explique David Alain, à leur arrivée, les travailleurs suivent une formation initiale de deux à trois semaines où ils sont jumelés avec un employé expérimenté.

Il est déjà arrivé que des personnes surqualifiées se présentent, mais elles ne sont pas recrutées à tous les coups. Il faut rester vigilant à cet égard, soutient le propriétaire, car cela peut entraîner un taux de rétention plus faible. Et elles n’auront pas forcément le savoir-être nécessaire à la fonction de préposé.

Quant à elle, la francisation des préposés ne semble pas poser un problème pour le contexte de travail, mais plutôt pour l’accès à la résidence permanente qui requiert la réussite d’un test de français complexe et exigeant, signale Mylène Cloutier. C’est la raison pour laquelle la résidence souhaite déployer prochainement un programme de francisation pour ses employés. Si Manisha envisage de s’inscrire au programme, c’est surtout pour les nombreux régionalismes utilisés au Québec !

RÉTENTION DE PERSONNEL

David Alain souligne que plusieurs facteurs peuvent influencer la rétention du personnel recruté à l’étranger et il n’est pas rare de rencontrer des situations de déception, engendrant des frustrations. C’était d’ailleurs particulièrement le cas lorsque les permis de travail obtenus avaient une durée d’un an seulement.

L’équipe de la Villa St-Georges s’accorde à dire que le niveau de qualification adéquat est un élément essentiel, car il influence la motivation à rester en poste. Il leur est arrivé de recruter des médecins dans leur pays d’origine, de même que des infirmiers qui parfois envisagent d’autres perspectives que le métier de préposé aux bénéficiaires. Lors de leur première embauche de personnes candidates au diplôme d’infirmier dans leur pays, le taux de rétention était de 30 %, explique David Alain. Il vise désormais 50 à 60 % de rétention avec les cohortes subséquentes, car ils ont « tous renouvelé leur permis ».

L’embauche d’aide-soignants au poste de préposé aux bénéficiaires favorise donc une plus grande rétention. Il est crucial que les objectifs de chacun soient alignés avec ceux de l’établissement, souligne David Alain.

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