
4 minute read
Prestation de traitements non indiqués dans le cadre d’incitations financières
système de santé. Par exemple, même dans les projets pilotes à l’échelle nationale, le renforcement des capacités sur le terrain peut parfois être insuffisant en raison d’une approche axée sur les projets qui n’est pas toujours propice à une mise en œuvre et à une gestion décentralisées. Étant donné que les approches en matière de FBP influent sur l’ensemble du système de santé, une critique des évaluations d’impact des projets pilotes de FBP est qu’elles ne parviennent pas à porter sur l’ensemble des impacts induits. Le chapitre aborde donc également le moment et la conception des évaluations qui visent à informer les décideurs sur les répercussions des programmes de FBP sur le système de santé à plus grande échelle.
Bien souvent, la mauvaise qualité des soins se traduit non seulement par une offre insuffisante de traitements nécessaires, mais aussi par la prestation de traitements non indiqués ou « mal adaptés », c’est-à-dire que le patient reçoit un traitement autre que celui dont il a besoin, ou en excès. Il est de plus en plus admis que les ordonnances et la fourniture non nécessaires de médicaments et de diagnostics affectent non seulement les pays à revenu élevé, mais aussi les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire (Brownlee et al. 2017 ; Busfield 2015 ; Holloway et al. 2013 ; OMS 2009).
Alors que la principale priorité de toute initiative de soins de qualité dans les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire est généralement de réduire l’insuffisance des traitements et d’étendre la couverture, il y a plusieurs raisons pour lesquelles les décideurs et les chercheurs ne devraient pas perdre de vue la fourniture excessive dans ces contextes. Tout d’abord, les éléments probants récapitulés ci-après montrent que les soins non indiqués se produisent souvent parallèlement à des soins insuffisants. Ainsi, lorsque les budgets sont serrés et que le capital humain et le matériel se font rares, on peut réellement craindre que la fourniture de soins non nécessaires dans une partie du système de santé ne prive ailleurs les patients des ressources dont ils ont un besoin urgent. Prévenir les traitements non nécessaires peut donc contribuer directement à réduire la sous-utilisation. Outre le gaspillage de ressources, les soins non indiqués peuvent également causer des problèmes d’ordre médical : aux patients eux-mêmes, en provoquant des effets secondaires, des interactions médicamenteuses ou des traumatismes dus à des procédures invasives, et au grand public, en favorisant la résistance des agents
pathogènes. En effet, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a déclaré que la résistance accrue aux antimicrobiens était « l’une des dix principales menaces mondiales pour la santé publique auxquelles l’humanité est confrontée » (OMS 2020). Enfin, le chapitre fait valoir que les incitations préexistantes à fournir des soins non indiqués peuvent augmenter à mesure que les pays s’enrichissent et que leurs systèmes de santé sont moins soumis à des contraintes budgétaires, et que ces incitations peuvent être renforcées par des systèmes de rémunération au rendement qui récompensent la quantité de soins sans vérifier si ces soins sont nécessaires.
Le problème des traitements non indiqués ou trop coûteux est peut-être plus familier, et peut-être considéré comme plus urgent, dans les pays à revenu élevé, mais il est omniprésent dans les systèmes de soins de santé et constitue un problème répandu pour de nombreuses pathologies et de nombreux médicaments. Dès 2009, l’OMS a compilé une base de données de 679 études publiées entre 1990 et 2006 et portant sur les indicateurs d’utilisation des médicaments courants dans 97 pays. Les conclusions ont été résumées dans un dossier documentaire (OMS 2009) qui a ensuite été mis à jour pour inclure les études jusqu’en 2009 (Holloway et al. 2013). La plupart des études citées portent sur les soins dispensés dans le secteur public2, où l’on pourrait s’attendre à ce que les normes minimales en matière de disponibilité des outils de diagnostic, de formation des prestataires et d’utilisation des médicaments soient médiocres. C’est ainsi que plus de 40 % des cas de pneumonie n’ont pas été traités avec un antibiotique (comme ils devraient l’être dans presque tous les cas), tandis que près de 50 % des infections des voies respiratoires supérieures en ont reçu un (ce qui constitue des soins non indiqués). De même, des soins non pertinents ont été fournis pour le paludisme et la diarrhée, le plus souvent simultanément avec un traitement considérablement insuffisant. Dans l’ensemble, 40 % ou moins des cas ont été traités conformément aux directives types (Holloway et al. 2013).
Ce chapitre commence par résumer les données probantes sur les traitements non indiqués dans les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire, en particulier dans le domaine des soins curatifs, en s’appuyant fréquemment sur les données recueillies pour une étude du traitement du paludisme dans les centres de santé communautaire de Bamako (Mali), en 2016, qui est décrite dans l’encadré 3.1, au chapitre 3 (Lopez, Sautmann et Schaner 2022a, 2022b). Il examine ensuite la question de l’interaction entre la rémunération au rendement et la prestation de soins non indiqués. Enfin, les données sur les soins prénatals du chapitre 4 sont utilisées pour montrer