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FBP, performance du système de santé et effort des agents de santé en théorie

radicalement différente qui pouvait simultanément réduire l’absentéisme ainsi que le manque de ressources et de responsabilisation (Meessen, Soucat et Sekabaraga 2011).

Cela étant, ces programmes ne sont pas exempts de critiques. Certains ont remis en question l’utilisation du FBP étant donné la complexité de sa mise en œuvre par rapport aux approches de financement décentralisées. De même, des questions ont été soulevées concernant ses effets sur l’équité et l’hétérogénéité des régimes de paiement et de la conception des programmes, ce qui complique l’extrapolation des effets et rend l’efficacité de l’intervention particulièrement tributaire d’une mise en œuvre systématique (Paul et al. 2018 ; Ridde et al. 2018 ; Ireland, Paul et Dujardin 2011). Une autre critique concerne le rôle des organismes donateurs dans la promotion des approches FBP. On a signalé que certains de ces organismes auraient ignoré les demandes locales ou même les besoins pour faire adopter le FBP. Les critiques ont fait valoir qu’un tel « programme dicté par les bailleurs de fonds » limite les effets, à long terme et à l’échelle du système, des interventions FBP parce qu’elles deviennent essentiellement des mesures à court terme qui n’ont pas l’adhésion des parties prenantes. En effet, l’une des principales critiques à l’égard de la rémunération liée à la performance — et par extension du FBP — est qu’elle peut nuire aux systèmes de santé en réduisant la motivation des agents (Turcotte-Tremblay et al. 2016 ; Lohmann, Houlfort et De Allegri 2016). Cette critique postule qu’en payant pour des tâches spécifiques, la rémunération liée à la performance évince la motivation intrinsèque des agents de santé, qui devraient être motivés par des raisons sociales (Paul et al. 2018 ; Ridde et al. 2018). Les critiques affirment que lorsque les bailleurs de fonds sont à court d’argent, le système de santé se retrouve avec un personnel démotivé, sans aucun gain durable en termes de résultats sanitaires ou même de prestation de services.

Pour bien cerner le lien entre le FBP et la couverture effective, ce chapitre résume un cadre conceptuel qui relie l’effort des agents de santé, ainsi que des considérations plus générales sur le système de santé, avec les incitations pécuniaires pour motiver la prise en compte des interventions FBP comme moyen d’améliorer la prestation de services et la couverture effective [ce cadre conceptuel est présenté dans Friedman et Scheffler (2016)].

Ce cadre établit un lien entre la couverture effective et les paiements de santé incitatifs en évaluant les différents moyens par lesquels le financement incitatif peut avoir un impact sur la couverture effective.

Un cadre économique standard qui sert souvent à motiver l’approche FBP est le modèle « principal-agent », dans lequel l’acheteur de services de santé (« le principal ») délègue les services, souvent par le biais d’un contrat formel, à un prestataire de services de santé (« l’agent »). Même un arrangement contractuel simple peut créer des complications si les objectifs du principal et de l’agent sont différents ou si l’agent ne dispose pas des mêmes informations que le principal. Dans le modèle du principal et de l’agent, le degré d’information différentielle entre le principal et l’agent ainsi que la capacité du principal à contrôler la production et l’effort de l’agent déterminent la forme optimale du contrat. Dans les situations où il est difficile de contrôler l’effort de l’agent mais pas les résultats de cet effort, ou lorsque l’agent peut disposer d’informations privées sur le processus de production du système de santé local que le principal n’a pas, il peut être préférable de payer l’agent en fonction de la performance et, en particulier, de l’obtention de résultats prédéfinis [voir Savedoff et Partner (2010) pour une discussion générale de ce cadre].

Un autre aspect pertinent du contrat principal-agent est le degré de risque financier imposé à l’agent par le contrat choisi. D’une part, si une partie trop faible de la rémunération globale est versée à l’agent par le biais d’une composante performance du contrat, elle risque de ne pas être suffisante pour susciter l’effort nécessaire pour atteindre les objectifs. D’autre part, si une partie trop importante de la rémunération globale est subordonnée à la performance, cela peut créer un risque financier excessif pour l’agent, ce qui peut entraîner une démotivation, un stress élevé, une baisse de performance ou une forte rotation du personnel.

En plus des incitations financières, les projets FBP impliquent des réformes supplémentaires du système de santé, comme l’autonomisation des établissements et le renforcement de la supervision et du suivi. Dans l’ensemble, la nouvelle combinaison de services et de leur efficacité produite dans le cadre des projets FBP peut avoir un effet positif ou négatif sur la santé de la population, selon au moins six facteurs : substitution qui augmente la santé, substitution qui diminue la santé, extraction de la plus-value des prestataires, externalités nettes, coûts de surveillance et primes de risque. La mesure dans laquelle ces six facteurs sont modifiés par les projets FBP déterminera l’impact du programme sur la couverture effective des services de santé. La figure 5.1 illustre ces six facteurs de manière très stylisée afin de démontrer leur impact potentiel sur la santé de la population.

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