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Légende vivante
Une silhouette de rêve, une renommée internationale et une histoire passionnante : l’Acropole – et ses chefs-d’œuvre antiques – continue de fasciner touristes et Athéniens.

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C’est une grande dame qui toise l’agglomération. Un point de repère dans l’espace et dans le temps. L’Acropole, littéralement « la ville haute », domine Athènes du haut de ses 156 mètres. Elle protège la cité depuis l’affrontement mythologique qui s’y tint entre Poséidon et Athéna. Inscrit au patrimoine mondial de l’Unesco, le site est l’un des plus visités de la planète. Le Parthénon y trône comme un joyau, en chantier permanent, symbole du triomphe d’Athènes au V e siècle av. J.-C., ce fameux siècle de Périclès qui vit naître la notion de démocratie. Ne pas oublier, à ses côtés, l’ Érechthéion, le temple d’Athéna Nikè ou encore le théâtre de Dionysos, agrippé aux flancs calcaires de la butte.

Chaque jour, un flot incessant de visiteurs foule les marches qui mènent au sommet de l’Acropole, direction le Parthénon. En contre-bas, le quartier de Monastiraki, avec ses bars, restaurants et boutiques, accueille les touristes après leur périple antique.
Habitée dès le néolithique
Dans le quartier de Plaka, juste sous l’Acropole, des légions de boutiques vendent des souvenirs aux motifs antiques par milliers. « Le Parthénon est à la fois une bénédiction et une malédiction », estime Eugenia Kokkala-Mela, patronne du magasin d’artisanat Heroes. « C’est un bonheur de l’admirer chaque jour dans le soleil couchant. En même temps, c’est un lieu figé. C’est dur de faire bouger une ville dont le centre est occupé par un tel monument. » Habitée dès le néolithique, l’Acropole a, tour à tour, abrité des maisons, un sanctuaire et ses temples, une forteresse, un dépôt de munitions et une mosquée, avant de devenir l’incontournable du tourisme que nous connaissons. Au sommet, la foule ininterrompue de visiteurs internationaux s’avère parfois indisciplinée et le personnel chargé de la surveillance veille au grain. « Non, madame, vous ne pouvez pas toucher les statues », gronde une gardienne, sifflet en main. « Si vous saviez… Il y a les touristes qui franchissent les barrières, ceux qui font des pompes à côté du temple pour la photo, ceux qui ramassent des pierres. Sans parler de ceux qui demandent où est le Colisée… »

L’architecte Dimitris Karampatakis (lire page 16) a installé son studio sur les pentes de l’autre colline d’Athènes, le Lycabette, qui offre une vue spectaculaire sur la ville. Que ressent-il quand il ouvre les yeux sur l’Acropole ? « D’abord, un immense respect. J’y monte régulièrement, c’est très inspirant pour moi. Outre la beauté romantique du lieu, j’adore l’expérience qu’il procure. Cela permet de faire le lien mental avec le monde qui a érigé ça. » Certains établissent même une connexion spirituelle. De nos jours encore, des adeptes du culte hellénistique organisent des cérémonies rendant hommage aux dieux de l’Olympe. Il est arrivé que certains de ces néopaïens helléniques, fans d’Apollon, d’Artémis ou d’Athéna, entament une grève de la faim pour préserver l’intégrité d’un temple. Nom de Zeus !
Éternel Parthénon
« L’Acropole, c’est une évidence, une donnée. Mais les Athéniens connaissent souvent mal son histoire », affirme Andronike Makres*, historienne et fondatrice du Hellenic Education & Research Center (Herc). « Il n’y a pas de relation de continuité indubitable entre la Grèce ancienne et moderne. »


L’eau a coulé sous les ponts depuis Périclès, et le pays a connu diverses occupations au cours de son histoire, notamment quatre siècles de domination ottomane. « En 1832, après l’indépendance, il y a eu une volonté de recréer une identité grecque. Tous les monuments de l’Acropole qui n’étaient pas de l’époque classique ont été détruits. Il y avait des maisons privées partout sur la colline. »

Miniature en souvenir ou majestueux vu de la ville, le Parthénon, bien qu’en perpétuel chantier, reste l’attraction numéro un de l’Acropole… et d’Athènes.
Encore plus radical, dans les années 1940, un intellectuel communiste avait écrit un manifeste proposant de raser le Parthénon. Heureusement, l’idée n’a pas rencontré un énorme succès. « C’est inimaginable, l’Acropole sans le Parthénon. Il est une source de fierté et de réconfort, poursuit l’historienne. Sa disparition rendrait tout le monde hystérique. Il faut essayer de le rendre éternel. S’il a survécu depuis deux mille cinq cents ans, ça peut continuer pour toujours. » Prenons rendez-vous dans deux millénaires, pour voir si le charme opère encore. On parie que oui.
*Auteur de Power & the People — Five Lessons from the Birthplace of Democracy (avec Alev Scott), paru aux Éditions Riverrun.









