Idées pour un avenir meilleur
Comment la mĂ©decine hightech en Suisse rĂ©concilie lâhomme et la machine afin de nous maintenir en bonne santĂ©

Idées pour un avenir meilleur
Comment la mĂ©decine hightech en Suisse rĂ©concilie lâhomme et la machine afin de nous maintenir en bonne santĂ©
Nicole Thurn est une journaliste de longue date. Elle est Ă©galement autrice, animatrice et facilitatrice dâateliers. Pour nous, elle sâest penchĂ©e sur les projets de deux Autrichiens dont lâobjectif est de dĂ©velopper une Ă©nergie nuclĂ©aire « sĂ»re » Ă base de thorium.
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Lorsque nous avons commencĂ© Ă rĂ©diger ce numĂ©ro, lâEurope et le monde Ă©taient confrontĂ©s Ă certains des plus grands dĂ©fis de notre temps. Six mois plus tard, nous avons rĂ©ussi Ă faire beaucoup de choses que lâon ne croyait pas possibles Ă lâĂ©poque, grĂące Ă lâengagement, au dĂ©vouement et Ă lâinventivitĂ©. Et grĂące Ă des personnalitĂ©s qui façonnent notre sociĂ©tĂ© avec de nouvelles idĂ©es, et en font chaque jour un endroit meilleur.
Michael Sieber est un photographe suisse primĂ©. Ses Ćuvres ont Ă©tĂ© publiĂ©es entre autres dans GEO, 11 Freunde, Die Zeit et le NZZ Folio. Pour The Red Bulletin Innovator, il a photographiĂ© lâavenir virtuel de la mĂ©decine avec lâĂ©quipe du CHU de Berne.
SUJET DE COUVERTURE, PAGE 62
Nous les appelons les « faiseurs et les faiseuses de courage ». Cette Ă©dition leur est dĂ©diĂ©e. Elle Ă©voque des projets audacieux visant Ă remettre notre approvisionnement en Ă©nergie sur de toutes nouvelles bases, des pionniers et pionniĂšres de la mĂ©decine de demain et de nombreux esprits crĂ©atifs qui rĂ©inventent tout, de la musique aux vĂȘtements en passant par nos centres urbains, et par une rĂ©volution technologique en matiĂšre de voilier volant.
Nous vous souhaitons beaucoup de plaisir et de confiance en lâavenir Ă la lecture de ce nouveau numĂ©ro de The Red Bulletin Innovator !
Lâavenir en confiance
Le désir de nouveauté nous est inné. Celles et ceux qui y voient leur vocation changent notre monde.
10 Médecine spatiale
Lâastronaute Matthias
Maurer mĂšne des recherches Ă bord de lâISS.
12 Une robe en spray
Un liquide qui se transforme en tissu : la mode du futur ?
14 Mister Groovy
GrĂące Ă lâappli MyGroove, Martin Grubinger vous met Ă la pratique.
16 Confluence
à Zurich, art, économie et technologie se croisent.
18 Lampe magique
Elle produit de la lumiĂšre, de lâeau potable et du sel, par la seule force du soleil.
20 Tradi moderne
La CitroĂ«n Oli rĂ©unit le meilleur de lâancien et du nouveau.
22 Coup de pouce
Une start-up suisse transforme les drones en boĂźtes Ă outils volantes
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La révolution de la voile
Si les bateaux peuvent voler, câest bien grĂące Ă un travail dâingĂ©nierie mĂ©ticuleux et audacieux. Comme le dĂ©montre les voiliers AC75 du team Alinghi Red Bull Racing.
24 Love Generation
La Suissesse Yaël Meier explique aux entreprises comment fonctionne la génération Z.
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Les visages du virage
Ănergie solaire dans les champs, mini-Ă©oliennes, piles Ă hydrogĂšne⊠voilĂ lâavenir Ă©nergĂ©tique.
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Expédition dans le virtuel
Le mĂ©tavers est une Ă©norme entreprise, et tout Ă fait particuliĂšre. Notre auteur sâest « infiltrĂ© ».
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Intelligence artificielle
La psychologue Martina Mara et le philosophe Mark Coeckelbergh nous expliquent ce phénomÚne.
90 Conférence
Urban Future Global réunit les personnalités du changement et des décisions.
92 Optimiser
Le biohackeur Andreas Breitfeld nous aide Ă ĂȘtre en forme plus rapidement.
93 Mes perles
La fondatrice du podcast
Womens Authors of Achievement parle et partage.
94 Agenda
Six mois remplis dâĂ©vĂ©nements passionnants nous attendent.
96 Chronique
Ali Mahlodji raconte comment nos peurs peuvent nous rendre plus forts.
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Opération Austrotom
Deux Autrichiens veulent rendre la lâĂ©nergie nuclĂ©aire sĂ»re, propre et bon marchĂ©. Merci le thorium !
98 Humour
Notre illustratrice
La Razzia porte son regard sur lâavenir.
STIMULE LE CORPS ET LâESPRIT.
Le 23 mars 2022, lâastronaute de lâESA
Matthias Maurer a effectuĂ© une sortie extravĂ©hiculaire depuis lâISS.
ENVOYĂ SPATIAL
Lâastronaute allemand Matthias Maurer rĂ©alise dans lâespace des expĂ©riences destinĂ©es Ă faire avancer la recherche mĂ©dicale sur Terre.
Alors que lâhumanitĂ© tente depuis des dĂ©cennies de trouver des remĂšdes aux maladies mortelles, faut-il espĂ©rer que ça nous tombe un jour du ciel ? « Oui ! », nous rĂ©pond Matthias Maurer, 53 ans, qui voyage dans lâespace pour le compte de lâAgence Spatiale EuropĂ©enne. Pour lui, la recherche spatiale nâest pas un luxe de milliardaires en mal de destinations insolites : câest un des moyens les plus effcaces de booster et de tester les avancĂ©es scientifques, notamment dans le domaine mĂ©dical.
Sa derniĂšre mission, pour laquelle il succĂ©dait Ă Thomas Pesquet, lâa envoyĂ© Ă bord de la Station Spatiale Internationale pour une durĂ©e de six mois. BaptisĂ©e Cosmic Kiss, cette mission avait pour objectif de rĂ©aliser une centaine dâexpĂ©riences dans les domaines les plus variĂ©s
â recherche fondamentale, physique, biologie, mĂ©decine et observation terrestre.
Matthias Maurer est particuliĂšrement fer de certaines avancĂ©es qui ont Ă©tĂ© testĂ©es pendant sa mission. LâexpĂ©rience Touching Surfaces a ainsi permis de « mettre au point des surfaces totalement anti-microbiennes, en traitant au laser des matĂ©riaux tels que lâacier, le cuivre ou le laiton. AprĂšs le traitement, ces surfaces dĂ©truisent tous les microbes, les virus et les bactĂ©ries qui entrent en contact avec elles ». Une dĂ©couverte de la recherche spatiale qui pourrait trouver de nombreuses applications sur Terre, dans le domaine mĂ©dical.
De tels matĂ©riaux peuvent dĂšs aujourdâhui ĂȘtre utilisĂ©s pour les stimulateurs cardiaques et
« Nous avons testĂ© un petit muscle cardiaque en milieu spatial : il sâest mis Ă fonctionner pour de vrai â câest de la science fiction ! »
les stents (endoprothĂšses vasculaires, ndlr) » Un progrĂšs qui sauverait potentiellement des millions de vies, quand on sait que les implants actuels occasionnent, auprĂšs de la moitiĂ© des patiente·s, des infections qui peuvent sâavĂ©rer dangereuses, voire mĂȘme mortelles.
Retombées du ciel
Mais ce nâest pas tout : selon Matthias Maurer, le traitement au laser testĂ© au sein de la Station spatiale internationale (ISS) a Ă©galement montrĂ© que « la rĂ©sistance thermique surfacique diminue de 80 % par rapport Ă celle dâautres alliages ». Un avantage qui pourrait servir Ă booster la performance des panneaux solaires « dâenviron 30 %, ce qui permettrait dâapporter une solution concrĂšte aux dĂ©fs Ă©nergĂ©tiques que lâon rencontre sur Terre ».
Labo sur orbite
Une autre expĂ©rience rĂ©alisĂ©e par lâastronaute allemand et son Ă©quipe lui tient particuliĂšrement Ă cĆur : baptisĂ©e Lab-on-Chip, elle consiste à « mettre en culture des petites cellules cancĂ©reuses et Ă tester diffĂ©rents fuides ou mĂ©dicaments sur elles. De telles manipulations rĂ©alisĂ©es en milieu spatial permettent, grĂące Ă la visualisation 3D, de voir instantanĂ©ment comment la tumeur rĂ©agit. Les expĂ©riences rĂ©alisĂ©es sur Terre dans des conditions classiques en laboratoire ne sont pas toujours fables. Ces expĂ©riences en milieu spatial sont forcĂ©ment bĂ©nĂ©fques Ă la recherche sur le cancer ».
Ă terme, on imagine aussi quâelles pourraient mettre fn Ă lâexpĂ©rimentation animale. Devant de tels espoirs, il ne semble pas Ă©tonnant que notre astronaute ait voulu baptiser sa mission Cosmic Kiss (trad. le baiser cosmique) : « Câest une dĂ©claration dâamour au cosmos, mais aussi Ă lâISS, que je considĂšre comme le lien qui unit lâhumanitĂ© au cosmos, ainsi quâĂ toutes les dĂ©couvertes, passĂ©es et Ă venir, que lâISS engendre. » esa.int
LâINFO EN PLUS Panneaux solaires, GPS, filtre Ă eau, scan IRM, appareils sans fil, etc. Plusieurs innovations faites pour lâaventure spatiale font dĂ©sormais partie de notre quotidien.
IngĂ©nieur et docteur en sciences des matĂ©riaux, Matthias Maurer travaille depuis 2010 au sein de lâAgence Spatiale EuropĂ©enne (ESA).
Originaire de la Sarre, région frontaliÚre de la France, Matthias Maurer aime préparer des spécialités du cru à bord !
Manel Torres mÚne des recherches sur la fast fashion durable depuis plus de deux décennies.
Lorsque des crĂ©ateurs vaporisent sur le corps nu de Bella Hadid un liquide qui se transforme en robe, le monde de la mode en reste bouche bĂ©eâŠ
La scĂšne se passe dans la Salle des Textiles du musĂ©e des Arts et MĂ©tiers Ă Paris, Ă lâautomne 2022 : le dĂ©filĂ© Coperni va bientĂŽt se terminer, et pour le clore en beautĂ©, les deux designeurs de la maison française, SĂ©bastien Meyer et Arnaud Vaillant, ont imaginĂ© un numĂ©ro qui va bientĂŽt entrer dans lâHistoire de la mode.
Uniquement vĂȘtue dâun simple slip, Bella Hadid se tient au milieu du podium, seule figure Ă©clairĂ©e de la salle qui est plongĂ©e dans le noir. Le reste a Ă©tĂ© maintes fois relatĂ©, commentĂ© et reliĂ© sur les rĂ©seaux sociaux : une robe nĂ©e de la technique spray-on fabric, invention du designeur et chimiste catalan Manel Torres.
« LâidĂ©e mâest venue durant mes Ă©tudes de mode : si lâon arrivait Ă enfermer des fibres naturelles ou synthĂ©tiques dans une bombe aĂ©rosol ou un pistolet, ça rĂ©duirait instantanĂ©ment le coĂ»t et le temps de production, »
explique Manel Torres. Lors de ses Ă©tudes au prestigieux Royal College of Art de Londres, il dĂ©cide, avec le soutien dâun ami chimiste, dâĂ©crire son doctorat sur ce quâon appelle les liquid fabrics (trad. tissus liquides). Un travail colossal quâil est en quelque sorte « encore en train dâĂ©crire », comme il ajoute en plaisantant â il faut dire que les spray-on fabrics nâen sont quâau tout dĂ©but de leur histoireâŠ
Actuellement, Manel Torres travaille avec son équipe au sein du London Bioscience Innovation Centre,
En fait, il sâagit dâun mĂ©lange de cellulose, mais le couturier
Manel Torres compare volontiers son spray Ă du daim.
VaporisĂ© Ă lâaide dâune bombe aĂ©rosol sur le corps, le liquide devient fibre en quelques minutes.
testant dans son laboratoire dâapprenti sorcier les rĂ©actions de diffĂ©rents ingrĂ©dients â comme le sel et lâamidon : pour la robe du dĂ©filĂ© Coperni, il a ainsi utilisĂ© un mĂ©lange de solvant alcoolisĂ© et de fibres de cellulose, qui sont venues sâagglomĂ©rer sur la peau pour former un voile.
« Câest la mĂȘme matiĂšre utilisĂ©e pour un tee-shirt ou un pull, sauf que câest sous forme liquide. »
Au contact de lâair, le liquide blanc composĂ© de fibres de coton et de matĂ©riaux synthĂ©tiques intĂ©grĂ©s Ă une solution polymĂšre se transforme en un voile nontissĂ© : câest ainsi que la mannequin Bella Hadid se retrouve en quelques minutes habillĂ©e dâune robe ultra-fine mais bien opaque. Quand on lui demande ce que lâon pourrait encore confectionner en utilisant
Automne 2022, lors de la Fashion Week à Paris : le monde découvre la robe en spray de Bella Hadid, brevetée par Manel Torres.
LâINFO EN PLUS LâEspagne et le Portugal sont devenus des sites incontournables de la mode durable : les marques Ecoalf, Lefrik, Organique ou NĂ€z cĂ©lĂšbrent les tendances slow fashion et upcycling en beautĂ©.
son procĂ©dĂ©, Torres rĂ©pond, enthousiaste : « Tout ! » Que ce soit des pantalons, des chapeaux, des sacs Ă main, voire des revĂȘtements textiles pour les voitures ou les maisons, ou encore des bandages chirurgicaux⊠Les dĂ©bouchĂ©s dâun tel procĂ©dĂ© sont infinis. Cerise sur le gĂąteau : chaque piĂšce pourrait ĂȘtre liquĂ©fiĂ©e et rĂ©utilisĂ©e indĂ©finiment â sans altĂ©rer sa qualitĂ©. Concernant le prix de tels vĂȘtements, Manel Torres prĂ©fĂšre rester vague : « Prenons la chemise que je porte en ce moment. Elle vaudrait 1 000 livres Sterling chez Chanel et 100 livres ailleurs. »
Mais le fondateur de Fabrican nâest pas prĂšs de brader son invention : depuis le dernier show de Coperni, il reçoit quotidiennement 300 Ă 400 e-mails de personnes intĂ©ressĂ©es. Quel que soit lâavenir de sa boĂźte, Torres a dĂ©jĂ rĂ©alisĂ© son plus grand rĂȘve : prĂ©senter une robe de haute couture Ă Paris. fabricanltd.com
Fondateur dâune start-up, le percussionniste Martin Grubinger fait dĂ©couvrir la musique Ă la jeune gĂ©nĂ©ration.
Comment Martin Grubinger, grĂące Ă son application
MyGroove, repense la pratique de la musique et fait swinger un peu plus la planĂšte.
Le batteur et percussionniste Martin Grubinger est mondialement connu. Câest surtout au marimba (une sorte de xylophone gĂ©ant) quâil est considĂ©rĂ© comme un brillant soliste. Il ne faudrait pas penser pour autant que ce Salzbourgeois de 39 ans est quelquâun dâĂ©gocentrique et rĂ©fugiĂ© dans sa tour dâivoire. Au contraire, il aime bien jouer avec les autres et dans des groupes. Transmettre la joie de pratiquer la musique est sa mission. Cela commence dĂ©jĂ Ă lâuniversitĂ© Mozarteum de Salzbourg oĂč il enseigne. Ă prĂ©sent, Martin a un nouveau support pour sa mission. Il veut mettre en relation les musiciens et musiciennes du monde
MyGroove est lâinterface virtuelle entre la salle de cours, le local de rĂ©pĂ©tition, le studio dâenregistrement et la scĂšne de concert.
entier. Point de rencontre : sa toute nouvelle application MyGroove, qui sera lancĂ©e au printemps 2023. Il explique : « Jâai observĂ© que beaucoup dâenfants ne chantent plus ou ne dansent plus. Peut-ĂȘtre parce que lâĂ©cole ne considĂšre plus la musique comme essentielle. Et peut-ĂȘtre aussi parce que la pratique dâun instrument a Ă©tĂ© remplacĂ©e par YouTube ou la PlayStation. »
Mission : musique
Sur la nouvelle appli, des pistes audio du monde entier sont reliĂ©es entre elles pour nous permettre de trouver lâinspiration.
Martin Grubinger veut lutter contre la disparition de la musique jouĂ©e Ă la maison et dans les Ă©coles grĂące Ă la dynamique de groupe. Car selon son expĂ©rience, la musique fonctionne mieux dans un groupe : « Câest dĂ©jĂ bien de jouer dâun instrument tout seul Ă la maison. Mais la meilleure motivation, câest de
travailler avec les autres sur un bon rythme ou une chanson. Les dĂ©fis de notre Ă©poque et les progrĂšs de la technologie nous permettent de nous retrouver dans un espace en ligne pour faire une jam et apprendre les uns des autres avec des musicien·ne·s du monde entier ». MyGroove propose une interface virtuelle entre salle de cours, local de rĂ©pĂ©tition, studio dâenregistrement et scĂšne de concert.
Cette application novatrice remplit trois fonctions fondamentales : premiĂšrement, elle offre aux musicien·ne·s la possibilitĂ© de sâentraĂźner de maniĂšre ludique â en solo, en mode accompagnement. Il est possible de jouer 200 morceaux, appelĂ©s « missions », et ce, le plus correctement possible selon plusieurs niveaux de difficultĂ©. Tout comme un jeu vidĂ©o dans lequel il faut franchir des niveaux. La reconnaissance IA dĂ©veloppĂ©e par lâinstitut Fraunhofer est pour lâinstant compatible avec les instruments les plus jouĂ©s, Ă savoir le piano, la guitare, la basse, la batterie, les percussions et le chant. MyGroove affiche la notation, enregistre ta piste sonore, lâanalyse et te signale tes erreurs, notamment rythmiques.
Lorsque deux artistes ou plus se rĂ©unissent pour cĂ©lĂ©brer le groove, ils et elles ont dĂ©jĂ lâesprit de la musique en eux, celui du partage. Ce qui nous amĂšne Ă la deuxiĂšme fonction de lâapplication : MyGroove
peut bien sĂ»r ĂȘtre aussi jouĂ© en mode multijoueur. Ici vous pouvez dĂ©cider de rĂ©pĂ©ter un morceau ensemble ou simplement faire un bĆuf. Le batteur peut se trouver dans le Tyrol, le bassiste Ă GenĂšve, la chanteuse Ă Singapour et la guitariste Ă Brooklyn. Ce forum sera Ă©galement utilisĂ© pour des master class, pour lesquelles Martin a dĂ©jĂ pu convaincre quelques noms connus (voir Ă droite). LuimĂȘme donnera Ă©galement des cours en ligne.
Le troisiĂšme domaine dâapplication de MyGroove est la scĂšne numĂ©rique avec des concerts et des concours permettant de gagner des billets et mĂȘme des collaborations avec des labels de musique.
La qualitĂ© du matĂ©riel avec lequel tu utilises lâapplication est laissĂ©e Ă ton apprĂ©ciation. Earpods ou casque audio bien isolant, microphone portable ou professionnel : tous les MyGroovistes dĂ©cident euxmĂȘmes combien ils veulent investir, afin de sâen donner Ă cĆur joie.
mygroove.app
Dans lâapplication MyGroove, il est possible de jouer 200  morceaux de musique. Lâenseignement est prodiguĂ© par des artistes qui excellent dans leur domaine.
1 Loreen Sima, basse
2 Hyung Ki Joo, piano
3 Joannie Labelle, percussions
4 Eko Fresh, voix
5 Yasi Hofer, guitare
6 Ben Jud, basse
7 Anika Nilles, batterie
8 Holly Madge, batterie
9 Arto MÀkelÀ, guitare
Lâart Ă portĂ©e de main, câest ce que propose le Zurich Art Weekend avec plus de cent Ă©vĂ©nements dans soixante lieux.
ĂvĂ©nement atypique qui entend bousculer la crĂ©ation artistique en invitant les acteurs et actrices de la sociĂ©tĂ©, la deuxiĂšme Ă©dition du Zurich Art Weekend se tiendra du 9 au 11 juin.
Tout en dĂ©ambulant dans les rues du centre de Zurich, Charlotte von Stotzingen raconte la genĂšse de son dernier projet : « LâĂ©volution de lâart est faite de soubresauts, de ces Ćuvres pionniĂšres oĂč lâartiste emploie pour la premiĂšre fois un procĂ©dĂ©, une technique, qui va se normaliser avec le temps â ce sont ces instants-charniĂšres qui mâont toujours fascinĂ©e. » Cette passionnĂ©e dâart contemporain, française dâorigine, est la fondatrice du Zurich Art Weekend, un festival inĂ©dit de la scĂšne artistique suisse puisquâil rassemble, sur trois jours, plusieurs disciplines.
« Pour Ă©voluer sur le plan artistique, il faut dâabord se dĂ©faire de ses modes de pensĂ©e traditionnels et ouvrir
son regard vers la nouveautĂ©. Câest dans cette Ă©mergence de nouvelles perspectives, au croisement de lâart, de la science et de lâĂ©conomie, que nous avons conçu le Zurich Art Weekend. »
En matiĂšre dâart et de technologie, Zurich dispose dâun vĂ©ritable avantage
Lors du Zurich Art Weekend, les artistes parlent avec des expert e s de lâĂ©conomie et de la science.
LâidĂ©e de crĂ©er un Ă©vĂ©nement interdisciplinaire lui est venue lors dâun projet quâelle menait au Kenya autour de lâautonomie numĂ©rique.
concurrentiel dans le paysage urbain europĂ©en, car elle allie un monde artistique de haut niveau et trĂšs diversifĂ© Ă un paysage technologique rĂ©volutionnaire. « Zurich abrite quelques-uns des musĂ©es europĂ©ens les plus avancĂ©s, des centres dâart, des galeries, des fondations, des collections et des universitĂ©s, raconte von Stotzingen. Et câest aussi un carrefour mondial pour le mĂ©tavers, avec des entreprises comme Microsoft, Facebook, Google, Disney Research et Magic Leap, qui ont ouvert des bureaux ou des laboratoires de recherche Ă Zurich. » LâĂcole polytechnique fĂ©dĂ©rale de Zurich (EPFZ) abrite le plus grand centre dâIA au monde et hĂ©berge son propre centre au Zurich Art Weekend.
Diversité fertile
Replacer lâart au cĆur des changements contemporains : Charlotte von Stotzingen veut bousculer la scĂšne artistique.
lĂ aussi, il se passe actuellement beaucoup de choses nouvelles.
Pendant lâĂ©vĂ©nement, des expositions sont organisĂ©es dans toute la ville, comme ici Ă la galerie dâart Liz Larner.
« La scĂšne artistique de Zurich est trĂšs diversifĂ©e, mais aussi trĂšs fragmentĂ©e â des grandes institutions artistiques aux petites galeries et aux espaces off, poursuis von Stotzingen. Nous crĂ©ons les conditions pour regrouper tout cela dans lâintĂ©rĂȘt de lâart. » Dans ce cadre, des institutions suisses comme des banques et des institutions scientifques sont Ă©galement Ă©troitement impliquĂ©es. « Non seulement parce quâelles possĂšdent elles-mĂȘmes des collections, mais aussi parce que lâart est toujours un bon placement », souligne-t-elle. Et parce que
« Le meilleur exemple dâinnovation majeure dans le domaine Tech & Art, ce sont les NFT. DâoĂč cette question : quelles opportunitĂ©s se crĂ©ent lorsquâune Ćuvre dâart, dans tous ses aspects, y compris fnanciers, peut ĂȘtre reproduite Ă lâidentique dans lâespace numĂ©rique ? » ConfĂ©rences, expositions, concerts, reprĂ©sentations de la Schauspielhaus, discussions et autres Ă©vĂ©nements : le programme du 9 au 11 juin sera chargĂ©, et entiĂšrement gratuit. « Si on dĂ©cide dâinclure tout le monde, pas simplement les artistes, les banques et les scientifques, il faut que cet Ă©vĂ©nement soit vraiment ouvert Ă tous les publics. »
zurichartweekend.com
LâINFO EN PLUS Zurich devient le centre de la scĂšne artistique internationale avec expos, visites, dĂ©bats, ateliers etc. Cela, une semaine avant Art Basel, lâautre grand rendez-vous suisse.
Le Néo-Zélandais
Henry Glogau, 26 ans, sâest spĂ©cialisĂ© dans les environnements extrĂȘmes.
LâidĂ©e la plus simple est parfois la meilleure : ces lampes fabriquĂ©es Ă partir de plastique et de ruban adhĂ©sif produisent de lâeau potable et de la lumiĂšre.
Henry Glogau a toujours pensĂ© que ses compĂ©tences en design pouvaient servir Ă apporter des solutions aux dĂ©fs du monde actuel. Lorsquâil termine ses Ă©tudes dâarchitecture en 2018, au lieu de se mettre sur le marchĂ© du travail dans son pays natal, la Nouvelle-ZĂ©lande, il part Ă Copenhague pour Ă©tudier Ă lâAcadĂ©mie royale du Danemark. Aujourdâhui, le designeur de 26 ans, qui travaille pour le cabinet danois 3XN, sâest spĂ©cialisĂ© dans les solutions innovantes en milieux extrĂȘmes. « Jâai lâimpression que nous, architectes et designeurs, sommes trop tentĂ©s de nous isoler dans le confort de notre cocon, explique Glogau. Nous dessinons des projets sans aller voir Ă lâextĂ©rieur quels sont vĂ©ritablement les besoins et les conditions de vie des gens pour lesquels nous travaillons. »
Ses Ă©tudes de master Ă Copenhague le mĂšnent successivement en Alaska pour un projet de recherche, puis en 2019 au Chili, dans la petite ville cĂŽtiĂšre de Nueva Esperanza/Mejillones, situĂ©e au bord du dĂ©sert de lâAtacama. Câest dans cette rĂ©gion trĂšs aride, dont les prix dâaccĂšs Ă lâeau potable sont les
« Nous sommes prisonniers de notre zone de confort. Il est nécessaire de nous en dégager afin de comprendre le contexte de vie des gens que nous voulons aider. » Henry Glogau
BaptisĂ©e Solar Desalination Skylight, cette lampe solaire diffuse une douce lumiĂšre tout en transformant lâeau de mer en eau potable.
Une seule petite lampe
Skylight produit jusquâĂ 540 ml dâeau potable par jour, par Ă©vaporation et dĂ©salinisation.
plus Ă©levĂ©s dâAmĂ©rique latine, quâil trouve le terrain idĂ©al pour expĂ©rimenter lâune de ses idĂ©es : construire une lampe-fltre qui puisse fonctionner avec les deux seules ressources disponibles sur place en quantitĂ© illimitĂ©e âlâeau de mer et le soleil.
Produire de la lumiĂšre ET de lâeau potable avec un seul petit objet, qui plus est magnifque et facile Ă fabriquer ? La Solar Desalination Skylight utilise non seulement lâĂ©nergie solaire mais aussi la saumure rĂ©coltĂ©e grĂące Ă la fltration de lâeau de mer pour produire de lâĂ©lectricitĂ©. Un systĂšme ingĂ©nieux qui rĂ©pond parfaitement aux besoins des locaux : « Les habitant·e·s des bidonvilles de Mejillones nâont aucun accĂšs aux ressources de base, que ce soit lâeau potable, lâĂ©lectricitĂ© ou les Ă©quipements sanitaires. Câest dans ce contexte, en tenant compte des conditions climatiques extrĂȘmes, que lâidĂ©e de cette lampe nous est venue. »
La lampe en question est en fait un fltre qui fonctionne par Ă©vaporation et dĂ©salinisation : en douze heures, elle est capable de produire 540 ml dâeau potable, tout en se rechargeant de maniĂšre autonome grĂące Ă ses capteurs solaires. La saumure rĂ©sultant du fltrage sert Ă alimenter les batteries au sel, qui totalisent une production quotidienne â si lâon y ajoute celle de ses capteurs solaires â de 9,53 volts, soit lâĂ©quivalent dâune pile PP3. « Il sâagit aujourdâhui de rĂ©fĂ©chir Ă des solutions qui nous permettent
de nous adapter à des milieux hostiles, pas de savoir comment faire pour les éviter. »
Henry Glogau voulait un objet qui sâinsĂšre parfaitement dans son environnement : la forme bombĂ©e rĂ©sulte dâun moulage fait par CNC (pour commande numĂ©rique par calculateur) sur lequel sont gravĂ©es des rainures. Lâeau de mer est versĂ©e par le haut et ressort progressivement par le bas, prĂȘte Ă ĂȘtre consommĂ©e.
Le jeune architecte-designeur travaille actuellement sur dâautres prototypes perfectionnĂ©s ainsi que sur un projet plus concret : il forme la population des bidonvilles de Nueva Esperanza Ă monter eux-mĂȘmes des fltres gĂ©ants quâil a Ă©galement conçus.
Simplissimes Ă utiliser et faciles Ă monter, ces fltres fonctionnent comme des distillateurs et sont trĂšs Ă©conomes puisquâon peut les bricoler soi-mĂȘme. Une bĂąche en plastique, quelques bouts de bois, du ruban adhĂ©sif, et le tour est jouĂ© !
« Ce que je veux, câest avoir un produit fni et commercialisable, mais aussi dâautres versions disponibles en open source, en expliquant aux gens comment faire ces fltres avec les moyens du bord. Tout le monde nâa pas la mĂȘme approche du mĂ©tier de designeur : pour moi, lâessentiel est de partager mes idĂ©es pour en faire profter le plus de monde possible. » henryglogau.com
Le nord du Chili compte parmi les régions les plus arides de la planÚte : une situation aggravée par la sécheresse qui frappe le pays depuis douze ans.
LâINFO EN PLUS
Plus de deux milliards de personnes nâont pas ou peu accĂšs Ă lâeau potable. Des associations comme Water For People ou The Water Project tentent de remĂ©dier Ă ce dĂ©fi planĂ©taire. 3xn.com
Le toit et le capot de la CitroĂ«n Oli, en carton alvĂ©olaire, sont bien plus solides que sâils Ă©taient en mĂ©tal.
Un poids réduit de moitié, moins de matiÚres premiÚres, et une autonomie totale : avec le concept-car Oli, Citroën nous montre de quoi seront faits ses futurs modÚles.
borne de recharge. Le fait que lâon ne doive renoncer Ă rien malgrĂ© la retenue de lâOli est dĂ» Ă lâintelligence du concept global. Les siĂšges en sont un bon exemple : ils sont fabriquĂ©s Ă partir de trois piĂšces seulement et faits de matĂ©riaux recyclĂ©s extrĂȘmement lĂ©gers. Au fnal, 80 % de matĂ©riaux en moins par rapport aux siĂšges traditionnels. De plus, le design des dossiers en maille permet dâaugmenter la luminositĂ© Ă lâintĂ©rieur du vĂ©hicule, un facteur important, typique de CitroĂ«n, pour un meilleur bien-ĂȘtre Ă bord.
Bien que le concept-car
CitroĂ«n Oli ressemble fortement Ă lâavenir, lâidĂ©e vient du passĂ©. Dans les annĂ©es 70, une voiture familiale pesait 800 kilos, mesurait 3,7 m de long et 1,6 m de large. Compacte, intĂ©rieur rĂ©duit Ă lâessentiel et peu gourmande en essenceâ pas de superfu. Quand on regarde les routes aujourdâhui, la situation est toute autre. Le paysage est dominĂ© par des SUV massifs de 2 tonnes et plus de 4,5 m de long. Avec pour consĂ©quence une augmentation de la consommation de matiĂšres premiĂšres et dâĂ©nergie, tant
Avec un poids de 1 000 kilos, la Citroën Oli est deux fois moins lourde que les voitures électriques actuellement disponibles sur le marché.
Le design du tableau de bord est fonctionnel : au lieu dâun cockpit high-tech avec plusieurs Ă©crans, lâOli se contente dâun seul support symĂ©trique qui sâĂ©tend sur toute la largeur du vĂ©hicule. Dâun cĂŽtĂ©, la colonne de direction ; de lâautre, une station dâaccueil multimĂ©dia ; au milieu, un espace oĂč sâinsĂšre le smartphone et cinq interrupteurs Ă bascule clairement identifĂ©s pour la climatisation. Câest tout ce quâelle a et tout ce dont elle a besoin. La planche de bord de lâOli ne compte que 34 piĂšces alors que dans une voiture familiale compacte comparable, on en dĂ©nombre au moins 75.
20 INNOVATOR ARNAUD TAQUET/CONTINENTAL PRODUCTIONS PATRICK AULEHLA
En haut : le smartphone et le haut-parleur font office dâordinateur de bord. Ce qui en fait un cockpit minimaliste.
En bas : les siÚges de la Citroën Oli sont constitués de seulement trois éléments, ce qui les rend trÚs légers.
Toutes les piÚces du concept-car ont été recyclées et sont réutilisables, ce qui facilite la réparation et le remplacement.
Autre point fort : lâinfotainment est contrĂŽlĂ© par le smartphone personnel arrimĂ© Ă la prise centrale. Les informations tĂ©lĂ©phoniques et les applications sont ainsi combinĂ©es avec les donnĂ©es du vĂ©hicule, telles que la vitesse et lâĂ©tat de charge de la batterie, et projetĂ©es sur le pare-brise via un systĂšme de smartband. Le mĂȘme principe sâapplique au systĂšme audio : pour jouir de la musique Ă bord, il est possible de brancher des enceintes Bluetooth aux deux extrĂ©mitĂ©s du tableau de bord.
Et CitroĂ«n a compris que lâutilisation dâun vĂ©hicule
L'INFO EN PLUS CitroĂ«n a profitĂ© de la prĂ©sentation de la CitroĂ«n Oli pour dĂ©voiler son nouveau logo : un hommage Ă lâoriginal de 1919.
ne sâarrĂȘte pas lorsque lâon en sort. MĂȘme en stationnement, la batterie de lâOli peut servir de source dâĂ©nergie : avec 40 kWh dâĂ©nergie, un appareil Ă©lectrique externe de 3 000 watts peut ĂȘtre utilisĂ© pendant douze heures. Pratique pour les barbecues Ă©lectriques, les glaciĂšres ou les enceintes de fĂȘte.
Durée de vie des pneus : 500 000 km
CitroĂ«n prĂ©voit en outre dâinscrire lâOli dans une Ă©conomie circulaire. Une grande partie des matiĂšres premiĂšres qui la composent peuvent ĂȘtre recyclĂ©es et sa durĂ©e de vie doit ĂȘtre prolongĂ©e le plus longtemps possible. Par exemple, grĂące Ă des pneus spĂ©cialement conçus pour durer jusquâĂ 500 000 km.
Lâensemble du vĂ©hicule peut en outre ĂȘtre « rĂ©inventĂ© » pour plusieurs propriĂ©taires, en utilisant de nouvelles dĂ©corations ou couleurs, voire des piĂšces modernisĂ©es. Il en va de mĂȘme pour les rĂ©parations : des piĂšces recyclĂ©es sont disponibles pour les portes, les phares ou les parechocs. Pour Vincent CobĂ©e, CEO de CitroĂ«n, une chose est claire : « Les vĂ©hicules Ă©lectriques doivent ĂȘtre plus lĂ©gers et moins chers. Oli montre de maniĂšre impressionnante comment CitroĂ«n envisage cet avenir. » citroen.ch
HIGH TECH
Jusquâici, lâusage de drones civils se concentrait sur la crĂ©ation dâimages spectaculaires. Une start-up suisse explore des possibilitĂ©s insoupçonnĂ©es.
Si je mây attendais ? Pas le moins du monde », avoue Timo MĂŒller, CPO et cofondateur de Voliro. En compagnie dâautres Ă©tudiant·e·s de lâĂcole polytechnique fĂ©dĂ©rale de Zurich (EPFZ), il participe en 2019 Ă un concours de projets de drones innovants organisĂ© Ă Abu Dhabi et dĂ©croche la premiĂšre place haut la main grĂące au concept « work at height ». LâidĂ©e: dĂ©velopper un drone capable dâeffectuer des travaux manuels comme le vissage ou la peinture dans des endroits en hauteur extrĂȘmement difficiles dâaccĂšs. « Au cours mes recherches dans le labo dâessai de lâEPFZ consacrĂ© au dĂ©veloppement des drones, je me suis demandĂ© comment faire pour construire un engin qui puisse disposer dâune force de charge suffisante pour exĂ©cuter ces travaux tout en pouvant rester assez longtemps dans les airs »,
Les drones de Voliro peuvent pivoter jusquâĂ 90 ° et ĂȘtre Ă©quipĂ©s dâune multitude de capteurs et dâoutils.
raconte Timo. Ce qui a fini par constituer le thÚme central de son mémoire de master.
PrĂ©dispositions pratiques Ă lâuniversitĂ©, Timo MĂŒller et Mina Kamel (son binĂŽme de recherche de lâĂ©poque devenu cofondateur de Voliro) travail-
Le fondateur de Voliro, Timo MĂŒller (au centre) et son Ă©quipe travaillent sur lâun de leurs drones.
Un drone de Voliro inspecte une Ă©olienne jusquâĂ 50 fois plus vite que ne le permettent les mĂ©thodes classiques.
LâINFO EN PLUS
La Suisse est un hotspot pour les drones spĂ©cialisĂ©s. Le plus grand show de drones dâEurope se tiendra Ă GenĂšve du 18 au 21 mai, ainsi que les Swiss Drone Days, Ă Zurich, chaque mois de juin.
veloppement pour lui trouver de nouvelles applications. Et la demande ne tarit pas : « La plupart de nos gros clients aux Ătats-Unis, en Allemagne et au Benelux sont des entreprises dâinspection. »
laient autant sur la faisabilitĂ© technique dâun tel drone que sur les futures possibilitĂ©s dâutilisation commerciale. Et lĂ aussi, câĂ©tait une vraie forĂȘt vierge : « La rĂ©putation du savoir-faire technique suisse nâest plus Ă faire. En revanche, niveau vente et marketing, il faut reconnaĂźtre quâil y a encore de la marge », explique Laurent Zimmerli, responsable de lâexpĂ©rience client chez Voliro. Suite Ă sa victoire Ă Abu Dhabi, la start-up a rĂ©uni des investissements de deux millions de francs de la part de bailleurs de fonds suisses.
Les jeunes techniciens ont mis au point un drone capable, grĂące Ă six rotors orientables Ă 360°, de maintenir une position constante en plein vol, mĂȘme en cas de vent, et ce Ă quelques centimĂštres seulement de la surface Ă traiter.
« En fait, on utilise plutÎt le
Voliro conçoit son robot comme une sorte de plateforme dâoutils volants, qui est continuellement dĂ©veloppĂ©e pour de nouvelles applications.
terme de robot volant, indique Laurent. Donc pour ĂȘtre prĂ©cis, nous ne sommes pas des fabricants de drones mais une entreprise spĂ©cialisĂ©e en robotique. »
Une niche du marchĂ© qui concerne actuellement le contrĂŽle des paratonnerres situĂ©s sur les rotors des Ă©oliennes et la mesure par ultrasons de lâĂ©paisseur des rĂ©servoirs en acier ou des ponts afin de dĂ©terminer la porositĂ© du matĂ©riau. Il suffit de changer lâembout du drone pour adapter celui-ci aux diffĂ©rentes manĆuvres et surfaces dâapplication. Voliro considĂšre son robot comme une sorte de plateforme dâoutils volants en perpĂ©tuel dĂ©-
En effet, ce sont gĂ©nĂ©ralement des pros de la grimpe industrielle spĂ©cialisĂ©e qui se chargent de ces travaux dâinspections cycliques et obligatoires situĂ©s dans des endroits en hauteur ou quasiment inaccessibles. Ce qui coĂ»te du temps et de lâargent. « Normalement, il faut monter, vĂ©rifier, redescendre⊠On rĂ©duit ce temps par dix ! », sâenorgueillit Laurent.
Pour bien mettre en Ă©vidence cet avantageux potentiel Ă©conomique, Voliro mise sur la transparence maximale : son site internet propose une Ă©valuation du robot volant par les entreprises dâinspection ainsi quâune comparaison avec le prestataire de services prĂ©cĂ©dent. « DerniĂšrement, il ne nous a fallu que quelques jours pour contrĂŽler lâensemble des paratonnerres des parcs Ă©oliens dâAllemagne du nord. En fait, câest le client qui sâen est chargĂ© lui-mĂȘme », sourit Timo. Car lâidĂ©e de Voliro, câest de former ses client·e·s en quelques semaines afin quâils et elles les pilotent en toute autonomie. voliro.com
La Suissesse
Yaël Meier a créé, à 19 ans, ZEAM, une agence qui prépare les grandes entreprises à la génération Z.
Une nouvelle génération, la génération Z, se prépare à renouveler le marché du travail. Cette jeune femme explique aux entreprises comment elle conçoit l'emploi.
Ă23 ans, YaĂ«l Meier a dĂ©jĂ fait pas mal de choses dans sa vie : Ă 15 ans, elle a jouĂ© dans son premier long mĂ©trage, Ă 19 ans elle a fondĂ© sa premiĂšre agence, Ă 20 ans elle a eu son premier bĂ©bĂ© (le deuxiĂšme est en route), et entre-temps, elle a Ă©galement sorti un livre. Gen Z : FĂŒr Entscheider:innen (trad. GĂ©nĂ©ration Z pour les dĂ©cideurs et dĂ©cideuses, pas encore traduit) examine les attentes de la gĂ©nĂ©ration Z, câest-Ă dire de celles et ceux qui sont né·e·s entre 1997 et 2012.
gĂ©nĂ©ration sur le marchĂ© du travail, la gĂ©nĂ©ration Z, si lâon en croit un TikTok publiĂ© en 2022. Ces formules semblent symboliser le mĂ©lange de dĂ©tachement et de soif de libertĂ© qui caractĂ©rise cette gĂ©nĂ©ration. Entre les deux, on perçoit leur inquiĂ©tude rĂ©elle face aux dommages environnementaux que les humains infligent sans rĂ©pit Ă la Terre.
prĂ©dĂ©cesseuses, plus axĂ©e sur la justice sociale, plus radicale sur les questions environnementales et climatiques et plus ouverte sur la tolĂ©rance en matiĂšre de genre et de sexualitĂ©. Les entreprises devraient sây prĂ©parer. LĂ oĂč la gĂ©nĂ©ration Y a secouĂ© et frappĂ© aux portes de lâinĂ©galitĂ©, la gĂ©nĂ©ration Z abat maintenant les murs.
Instagram : @yaelmeier
âIâm outâ, âDonât replyâ et âApologies for existingâ Voici un Ă©chantillon des formules de conclusion des e-mails de la derniĂšre
24 INNOVATOR SIMON TANNER/NZZ JULIA C. SEIDL
Avec des ingrĂ©dients dâorigine 100 % naturelle. Au goĂ»t unique.
Nous naissons avec une insatiable soif de nouveautĂ© qui change nos vies et nous pousse Ă innover. Comment ? Câest-ce que nous allons voir dans ce numĂ©ro.
ConfrontĂ© Ă la nouveautĂ©, notre corps libĂšre une fopĂ©e de neurotransmetteurs : la dopamine nous inonde de plaisir, le cortisol et lâadrĂ©naline boostent notre niveau de stress, la sĂ©rotonine stimule notre sentiment de bonheur et lâocytocine renforce nos liens sociaux. Nous craignons la nouveautĂ© autant que nous la dĂ©sirons et en faisons une quĂȘte quotidienne. La preuve avec ce reportage pour lequel nous nous sommes, nous aussi, mis en quĂȘte de toutes celles et ceux qui en ont fait
un métier et une vocation.
Ă lâimage de Thomas Sauter, chercheur en Medical
Extended Reality (XR) Ă lâhĂŽpital universitaire de Berne, un secteur qui englobe tĂ©lĂ©mĂ©decine, simulation dâopĂ©rations pour chirurgien·ne·s et de soins thĂ©rapeutiques par casque de rĂ©alitĂ© virtuelle (VR) et permet de dĂ©velopper de nouveaux vaccins contre le cancer (p. 62).
La technologie de demain, câest aussi le thĂšme central de notre grand entretien consacrĂ© Ă lâintelligence artifcielle (IA). Midjourney, ChatGPT ou Eleven Labs bouleversent internet avec des sons, des images et des dialogues gĂ©nĂ©rĂ©s par ordinateur. Notre auteure Saskia Jungnikl-Gossy discutera avec la psychologue robotique Martina Mara et le philosophe de la technique Mark Coeckelbergh (p. 46) de cette nouvelle Ăšre, des dĂ©fs posĂ©s par lâIA et de la raison pour laquelle certains algorithmes de mĂ©dias sociaux sont dĂ©jĂ plus puissants que nâimporte quel robot. « La question que tout le monde se pose : Ă quand lâamour avec un robot ? », explique Martina Mara.
Dans notre dossier Sport meets Tech, nous nous pencherons sur des cyborgs dĂ©jĂ bien rĂ©els : grĂące Ă leurs hydrofoils, les voiliers de lâĂ©quipe suisse Alinghi Red Bull Racing survolent les eaux en atteignant des vitesses de 40 nĆuds (74 km/h) et seul un Ă©quipage de huit personnes est nĂ©cessaire Ă leur pilotage (p. 34). Une prouesse uniquement rendue possible grĂące Ă une parfaite synergie entre lâĂȘtre humain et la machine qui a permis aux Suisses de ramener la coupe de lâAmerica en Europe pour la premiĂšre fois depuis 152 ans, et leur vaut dâĂȘtre imitĂ©s par les navigateurs et navigatrices du monde entier. Cette symbiose entre ĂȘtre humain et machine est Ă©galement au cĆur du concept de mĂ©tavers : nouveau ? AssurĂ©ment, mais peut-il vraiment nous faire vibrer, nous surprendre et surtout nous satisfaire ? Des questions que notre auteur, Marc Baumann, se posera en testant un casque de rĂ©alitĂ© virtuelle (p. 54). Il cherchera des rĂ©ponses auprĂšs dâexpert·e·s du mĂ©tavers et au cours dâun dialogue entre un poulet virtuel et une cacahuĂšte numĂ©rique.
7 pionniers et pionniĂšres du changement
Panneaux solaires au-dessus des champs, éoliennes dans les villes ou mini-centrales hydroélectriques : le tournant énergétique est en marche.
Retour Ă la rĂ©alitĂ© physique : lâun des plus grands dĂ©fs de lâĂ©poque est de dĂ©velopper une Ă©nergie sĂ»re, verte et bon marchĂ©. DĂ©f relevĂ© par nos avant-gardistes de la transition Ă©nergĂ©tique (p. 72) grĂące Ă des panneaux solaires au-dessus des parkings et des champs, des Ă©oliennes en forme de turbines et bien dâautres approches qui nous promettent un feu dâartifce Ă©nergĂ©tique.
Qui dit nature ne dit pas seulement eau, soleil et vent mais aussi tonnerre, donc thorium. Une cuillĂšre (10 g) de ce matĂ©riau peu radioactif suffrait Ă alimenter annuellement 250 foyers en Ă©lectricitĂ© (p. 80). Deux Autrichiens travaillent actuellement sur un rĂ©acteur Ă sels fondus. Une Ă©nergie atomique apparemment sĂ»re (sans uranium) qui ne produirait que de faibles quantitĂ©s de dĂ©chets radioactifs. Une rĂ©volution en marche dans la patrie de Mozart elle-mĂȘme trĂšs critique Ă lâĂ©gard de lâĂ©nergie nuclĂ©aire ?
Ce qui est sĂ»r, câest quâune foule de nouveautĂ©s nous attend. Et un petit coup de dopamine Ă chaque page de ce magazine. Bonne lecture !
Certaines sont attendues depuis longtemps, dâautres viennent de nulle part : chaque jour, de nouvelles idĂ©es et inventions changent notre vie et chamboulent profondĂ©ment lâĂ©conomie. Voici quelques exemples marquants.
ont utilisĂ© ChatGPT (un modĂšle dâIA de type chatbot), dans les deux mois qui ont suivi son lancement. La croissance dâutilisation la plus rapide dâun nouvel outil dans toute lâhistoire dâinternet.
1,5
mĂštre
au-dessus de lâeau : le voilier AC75 fle Ă toute allure lors de lâAmericaâs Cup grĂące aux toutes derniĂšres innovations technologiques suisses.
de personnes BRATISLAV MILENKOVIC
investis par Meta, maison mĂšre de Facebook, dans son propre mĂ©tavers. Plus que lâensemble des investissements annuels en Suisse pour la recherche et le dĂ©veloppement.
ce que devrait atteindre le marché de la réalité virtuelle médicale dans les cinq prochaines années. Le rÎle de la VR dans la médecine va devenir essentiel.
2,6
seraient suffsants pour alimenter 10 000 foyers en électricité pendant un an, sans risque de catastrophe nucléaire. Deux Autrichiens développent le réacteur nécessaire à cet effet.
Disputée sur des voiliers AC75 taillés comme des missiles, la régate la plus high-tech au monde est avant tout une aventure humaine.
LLâAmericaâs Cup est une course qui cumule aussi bien les paradoxes que les superlatifs : historiquement dâabord, il sâagit de la plus ancienne rĂ©gate au monde, dont les rĂšgles ont Ă©tĂ© Ă©tablies pour la premiĂšre fois en 1852. Avec le temps, elle est devenue la grande vitrine de lâĂ©volution nautique, mettant en scĂšne les voiliers les plus modernes et les plus rapides du moment : ce sont les fameux AC75, monocoques gĂ©ants de 22 mĂštres de long hĂ©rissĂ©s de foils, quâon croirait sortis tout droit dâun flm de science-fction. Ă bord, la machinerie et le tableau de bord ressemblent effectivement au cockpit dâun vaisseau spatial : des ordinateurs Ă la pointe de lâinnovation technologique contrĂŽlent aussi bien les ailes que lâhydraulique. Cependant, aucune commande automatique nâest autorisĂ©e : protocole oblige, toutes les manĆuvres Ă bord doivent ĂȘtre effectuĂ©es Ă la main. Le mĂ©lange de cybernĂ©tique (autorĂ©gu-
lation) et dâorganique (dans ce cas : rĂ©gulation par lâhomme) a un nom : Cyborg. Comme quoi, mĂȘme sur ces cyborgs fottants, la tradition est plus forte que tout.
Parce quâil faut bien lâavouer : câest la dimension humaine et tout ce quâelle implique dâincertain et de faillible qui rend cette compĂ©tition passionnante, quelles que soient les avancĂ©es technologiques qui ont bouleversĂ© lâAmericaâs Cup ces derniĂšres dĂ©cennies. Ces fusĂ©es vĂ©liques, aussi modernes soient-elles, ne sont rien sans la parfaite coordination dâun Ă©quipage surentraĂźnĂ©, au sein duquel chaque membre a un rĂŽle Ă jouer. Ă bord, on aura le groupe formant « les jambes » du bateau â des gros costauds qui savent mouliner Ă fond â et les autres qui constituent « la tĂȘte », choisis pour leur expĂ©rience et leur sens tactique.
« On apprend Ă reconnaĂźtre le vent sur lâeau et on dĂ©veloppe un sixiĂšme sens pour lâenvironnement. »
MAXIME BACHELIN, BARREURNicolas Charbonnier, lâun des barreurs, Ă bord du voilier AC75 lors dâun entraĂźnement au large de Barcelone.
Les hydrofoils (Ă gauche et Ă droite) soulĂšvent le yacht AC75 jusquâĂ 1,5 m au-dessus de lâeau, ce qui lui permet dâatteindre des vitesses allant jusquâĂ 40 nĆuds (74 km/h).
Il vole, il vole, le voilier. La technologie qui se cache derriĂšre est la mĂȘme que celle qui fait dĂ©coller les avions.
Le foiling est une technique qui permet aux voiliers de sâĂ©lever hors de lâeau et de naviguer sur des « hydrofoils » (câest-Ă dire des ailes sous-marines). Celles-ci crĂ©ent une portance et rĂ©duisent la rĂ©sistance Ă lâair, offrant au bateau la possibilitĂ© de glisser au-dessus de lâeau.
Lâaugmentation de la vitesse et de lâefficacitĂ© qui en rĂ©sulte permet Ă lâĂ©quipage de naviguer plus tranquillement. Le team ARBR est un pionnier de la technologie du foiling dans le monde de la voile.
Le voilier AC75 utilise des foils en forme de T et un systĂšme de stabilitĂ© dynamique pour obtenir un foil stable et efficace, mĂȘme par gros temps. La technologie des voiles a permis Ă lâĂ©quipe de remporter de nombreuses victoires dans les grandes compĂ©titions internationales de voile, notamment lors de lâAmericaâs Cup.
Les AC75, que lâon verra Ă lâĆuvre lors de la prochaine Coupe qui aura lieu en 2024 Ă Barcelone, ont la particularitĂ© dâavoir de gigantesques foils capables de soulever les 6,5 tonnes du voilier dĂšs lors quâil dĂ©passe les 18 nĆuds (soit environ 33 km/h). La rĂ©sistance de lâeau devient alors quasiment nulle et le bateau accĂ©lĂšre dâun coup, volant Ă la surface de lâeau Ă une vitesse pouvant atteindre jusquâĂ 100 km/h. Dans cette phase critique oĂč lâĂ©quilibre du bateau menace Ă tout moment de rompre, la moindre erreur de jugement ou de synchronisation peut avoir des consĂ©quences fatales. Les voiles doivent ĂȘtre rĂ©ajustĂ©es, « rĂ©glĂ©es » comme on dit, lâangle des ailes doit ĂȘtre mis en position en un clin dâĆil afn de garantir une tenue rĂ©guliĂšre sur et au-dessus de lâeau. Les deux Ă©quipes Ă bord â au total, huit tĂȘtes et autant de paires de bras â doivent ĂȘtre parfaitement synchrones, connaĂźtre leur partition Ă la note prĂšs, et garder Ă lâesprit lâĆuvre dans son ensemble.
« Ăa ressemble Ă un orchestre », rĂ©sume Pietro Sibello, conseiller de la Team Alinghi Red Bull Racing (ARBR), qui reprĂ©sentera le dĂ©f suisse lors de la 37e Americaâs Cup.
« Chaque musicien doit savoir précisément à quel moment jouer quelle note et pour combien de temps. »
Pour nous aider Ă comprendre le travail complexe des Ă©quipiers entre eux, et avec la machine, The Red Bulletin est parti Ă la rencontre des membres de lâĂ©quipage qui fera voler son AC75 aux couleurs dâAlinghi Red Bull Racing en 2024. Dans ce texte, vous apprendrez ce que signife ĂȘtre un composant « vivant » dâun bateau.
« Câest comme un orchestre. Chaque instrument complĂšte les autres. La mesure, le tempo et la hauteur sâaccordent entre eux. »
PIETRO SIBELLO, CONSEILLER NAVIGATION
Le voilier dâentraĂźnement AC40 Ă Barcelone lors de sa premiĂšre sortie. Il sâagit dâune version plus petite de lâAC75.
LâĂ©dition 2024 de lâAmericaâs Cup impose une limite de huit Ă©quipiers Ă bord (on en comptait onze en 2021) : ce changement inĂ©dit oblige Ă repenser complĂštement la composition des Ă©quipages, dont celui dâARBR, qui nâest pas encore fixĂ© Ă ce jour. Petite prĂ©sentation â non exhaustive âdes diffĂ©rents rĂŽles quâon peut avoir sur ces monocoques Ă foils.
AppelĂ© âdriving groupâ en anglais, il est rassemblĂ© autour du cockpit (Ă lâarriĂšre du bateau) et comprend le(s) barreur(s), le tacticien, le navigateur, les rĂ©gleurs de foils et de voiles. Câest le « cerveau » du bateau, responsable de la stratĂ©gie Ă suivre avant et pendant la course.
Il dirige le bateau â en cumulant parfois les fonctions de capitaine, tacticien et de navigateur â et a une grosse responsabilitĂ© sur le lancement et la coordination des manĆuvres. Il est reliĂ© aux autres par radio. Traditionnellement, il nây a quâun seul barreur, qui change de bord Ă chaque changement dâamure (et est remplacĂ© temporairement par le rĂ©gleur le temps de passer de tribord Ă bĂąbord, ou vice-versa).
Mais en 2021, les Italiens de la Team Luna Rossa crĂ©ent la surprise avec deux barreurs Ă bord, un de chaque cĂŽtĂ© du bateau. « Sur un AC75 lancĂ© Ă pleine vitesse sur ses foils, on risque dâĂȘtre Ă©jectĂ© par-dessus bord dĂšs quâon se dĂ©place », explique Pietro Sibello, ancien tacticien de Luna Rossa maintenant chez ARBR.
Cette mesure de sĂ©curitĂ© pose cependant des problĂšmes de coordination, puisquâon a deux Ă©quipiers pour une seule barre. VoilĂ un exercice de communication de haut niveau qui a ses avantages et ses inconvĂ©nients.
3 Le régleur de foils
SurnommĂ© âfight controllerâ en anglais, câest lui qui rĂšgle lâangle des foils de chaque cĂŽtĂ© du bateau. Habituellement, seul le cĂŽtĂ© sous le vent est dans lâeau, alors que la partie au vent fotte dans les airs. Sauf lorsque la vitesse est plus faible : dans ce cas, on va sortir les deux en mĂȘme temps pour rĂ©duire la rĂ©sistance de lâeau. Le rĂ©gleur de foils doit ĂȘtre constamment aux aguets dĂšs que la mer devient un peu agitĂ©e.
4 Le régleur de voiles
Petit cours de voile accĂ©lĂ©rĂ© : la principale source dâĂ©nergie Ă©olienne sur un AC75 est la grand-voile Ă double bord. Câest une grande toile de 145 mÂČ, hissĂ©e sur un mĂąt en fbre de carbone, haut de 26,5 mĂštres. Ă lâavant du bateau, on a une voile plus petite, en gĂ©nĂ©ral, le foc. Lâespace entre le foc et la grand-voile est appelĂ© « fente ». Câest lâĂ©coulement dâair entre les deux qui va agir â entre autres â sur la vitesse du bateau. Les rĂ©gleurs de foc et de grand-voile sont donc constamment obligĂ©s de se
coordonner pour optimiser la portance du bateau. Par petit temps, on va essayer de gonfer les voiles en augmentant le creux, mais dĂšs que les foils sont en action et que la rĂ©sistance de lâeau disparaĂźt, lâaction des voiles devient tellement violente que le rĂ©gleur de grand-voile doit instantanĂ©ment rĂ©duire le creux pour Ă©quilibrer le bateau.
Ce groupe, Ă©galement appelĂ© âpower groupâ, est traditionnellement constituĂ© de gros costauds, capables de mouliner suffisamment pour alimenter la centrale hydraulique qui permet toutes les manĆuvres Ă bord. Plus ça mouline, plus lâĂ©quipe de pilotage va pouvoir ĂȘtre prĂ©cise dans ses rĂ©glages.
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Les winchers ou cyclistes Les Ă©quipiers chargĂ©s de mouliner sont appelĂ©s âgrindersâ en anglais parce que les poignĂ©es avec lesquelles ils actionnent les winchs (treuils Ă main) pour rĂ©gler les voiles et dĂ©placer la bĂŽme ressemblent Ă dâĂ©normes moulins Ă cafĂ©, tout en imitant leur bruit. Tout a changĂ© en 2017 lorsquâon a dĂ©couvert que le voilier de lâEmirates Team New Zealand (ETNZ) avait Ă©tĂ© Ă©quipĂ© de pĂ©daliers : perchĂ©s sur leurs vĂ©los, les Ă©quipiers produisaient ainsi 20 % dâĂ©nergie en plus, tout en ayant les mains libres pour dâautres manipulations. Les Kiwis ont remportĂ© la Coupe cette annĂ©e-lĂ . AprĂšs avoir Ă©tĂ© bannis en 2021, les pĂ©daliers seront de nouveau autorisĂ©s en 2024 : ce qui explique pourquoi, en ce moment, lâentraĂźnement des Anglais ressemble Ă celui des coureurs du Tour de France. Du cĂŽtĂ© suisse, on hĂ©site encore entre les bras et les jambes â mĂȘme si lâun des Ă©quipiers ARBR est un ancien champion olympique de cyclisme en salle et que lâentraĂźnement des sept autres comprend des heures de pĂ©dalage.
Plus jeune barreur de lâĂ©quipe Ă seulement 24 ans, Maxime Bachelin jouit pourtant dâune solide expĂ©rience de marin : aprĂšs avoir tirĂ© ses premiers bords en Optimist Ă 8 ans, il se dĂ©couvre une vĂ©ritable passion pour la voile, qui ne le quittera plus. Certes, les petites barquettes Ă frites quâil manĆuvrait Ă©tant gamin nâont rien Ă voir avec les bolides flottants quâil barre dĂ©sormais, mais comme il lâexplique, « lâOptimist tâapprend Ă sentir le bateau, Ă voir lâaction du vent sur lâeau, Ă dĂ©velopper un sixiĂšme sens pour tout ce qui tâentoure ». Les annĂ©es passĂ©es comme Ă©quipier sur diffĂ©rents bateaux lui ont aussi appris Ă dĂ©velopper un sens de la communication quasi tĂ©lĂ©pathique au sein de lâĂ©quipage. Toute cette expĂ©rience est pourtant loin dâĂȘtre suffisante pour espĂ©rer remporter lâAmericaâs Cup : comme pour les pilotes de F1, les Ă©quipiers doivent entraĂźner leur temps de rĂ©action : « On passe des heures dans le simulateur Ă devoir amĂ©liorer notre rĂ©activitĂ© face Ă toutes sortes de situations susceptibles dâarriver lors de la rĂ©gate. On chronomĂštre par exemple le temps quâon met Ă changer une petite ampoule. Plus on est rĂ©actif, plus on sera efficace une fois sur lâeau. »
La premiĂšre fois quâil a fait de la voile, Bryan Mettraux ne sâen souvient pas, car il nâavait pas encore fĂȘtĂ© son premier anniversaire : « Mon pĂšre nous emmenait souvent naviguer avec lui, raconte ce marin aujourdâhui ĂągĂ© de 32 ans. Jâai fait mes gammes sur du 420 (quillard de 4,20 mĂštres, ndlr)», avant de dĂ©couvrir les joies de la rĂ©gate en duel â une formule que lâon retrouve dans lâAmericaâs Cup.
« Jâai longtemps rĂ©gatĂ© sur des GC32 (catamarans Ă hydrofoils, ndlr), et mĂȘme si ce nâest pas aussi rapide ou technique quâun AC75, câest parfait pour aiguiser sa rĂ©activitĂ©. » Bryan Mettraux sâentraĂźne actuellement sur deux missions : savoir rĂ©gler les foils et la grand-voile. « Ăa permet de mieux comprendre lâinterconnexion des diffĂ©rents postes Ă bord, et puis câest
Ă partir de 2024, seuls huit membres dâĂ©quipage pourront sâemployer Ă faire voler un yachtâŠ
toujours mieux dâavoir des Ă©quipiers polyvalents. » Par exemple lorsque le rĂ©gleur de foils doit aider Ă wincher, le barreur peut sâoccuper des foils pendant ce temps-lĂ . Quant au rĂ©glage des voiles, Mettraux explique quâil se fie autant Ă son instinct quâaux indications sur son Ă©cran. Ă long terme, il espĂšre devenir un navigateur 100 % instinctif â aprĂšs tout, lâĂ©lectronique nâest utilisĂ© en voile que depuis peu, et les donnĂ©es ne reflĂštent que les Ă©vĂ©nements rĂ©cents. Il est bien plus important de deviner, dans le feu de lâaction, ce que lâavenir proche nous rĂ©serve : « Avec lâexpĂ©rience, on arrive vraiment Ă sentir ce dont le bateau a besoin. »
« Lors du parage, environ la moitiĂ© est de lâinstinct et lâautre un regard sur les donnĂ©es Ă lâĂ©cran. »
BRYAN METTRAUX, RĂGLEUR DE FOILS ET DE GRAND-VOILE
Nils Theuninck a passĂ© ses annĂ©es de voile en solitaire. Il a commencĂ© en Optimist, puis a Ă©voluĂ© vers le finning lourd de 4,5 m, un dĂ©riveur qui exige une force et une intelligence brutales de la part des navigateurs et qui a formĂ© plus dâune recrue de lâAmericaâs Cup. En 2021, Theuninck prenait la tĂȘte du classement mondial des navigateurs finlandais et remportait le bronze aux championnats dâEurope. Certes, son rĂȘve de reprĂ©senter la Suisse aux JO de Tokyo sâest envolĂ©, mais lors de la prochaine Americaâs Cup, le marin de 26 ans est bien dĂ©cidĂ© Ă rendre fier son pays dâorigine. « On y affronte les meilleurs navigateurs au monde, sur les bateaux les plus avancĂ©s jamais construits », dit-il. Pour pouvoir donner le meilleur de lui-mĂȘme dans la salle des machines de lâARBR AC75, il sâentraĂźne Ă des niveaux de forme et de force toujours plus Ă©levĂ©s. En tant que gĂ©ant de 1,94 m et 93 kilos, il sait que tout dĂ©pend du bon rapport poids/puissance. De plus, il faut avoir lâesprit clair pour prendre des dĂ©cisions tactiques et pousser le bateau vers ses meilleures performances. En Finndinghy, premier bateau de course en solitaire, il a bien pu sây prĂ©parer.
La Coupe de lâAmerica 2024 se dĂ©roulera Ă Barcelone.
LâĂ©quipe dâARBR sâentraĂźne dĂ©jĂ sur place.
Augustin Maillefer a toujours dĂ©testĂ© le vent â enfin, dans le sport quâil pratiquait avant de dĂ©couvrir la voile : lâaviron. Ce rameur vaudois, trente ans au mois dâavril, a Ă©tĂ© titrĂ© champion du monde juniors en 2010, 2013 et 2014 et a reprĂ©sentĂ© la Suisse aux Jeux olympiques de 2012 et 2016 avant de prendre sa retraite, il y a trois ans. RecrutĂ© pour le power group dâARBR, il doit dĂ©sormais apprendre Ă travailler en synchronisation parfaite avec les autres membres de lâĂ©quipage. « En aviron, tu ne te prĂ©occupes pas de ce que font les trois autres coĂ©quipiers, tu tiens ton rĂŽle et câest tout. Sur un voilier aussi complexe quâun AC75, on doit ĂȘtre conscient du rĂŽle de chacun, de son action sur la performance globale du bateau et de ce quâil faut faire pour faciliter la tĂąche de nos coĂ©quipiers. Cela dit, je suis lĂ avant tout pour fournir de lâĂ©nergie, et mon expĂ©rience dans la rame mâa appris Ă ĂȘtre endurant et performant, mĂȘme au-delĂ de la souffrance physique. »
ConceptualisĂ©s en Suisse, utilisĂ©s sur toutes les mers du monde. Les yachts dâARBR sont une vitrine de la technologie de pointe helvĂ©tique.
Analyste performance
Andrea Emone, 26 ans, est responsable des donnĂ©es tĂ©lĂ©mĂ©triques collectĂ©es par les nombreux capteurs qui entourent lâARBR AC75. « Jâai concouru dans la catĂ©gorie olympique de planche Ă voile, jâai Ă©tudiĂ© lâingĂ©nierie aĂ©rospatiale et je suis titulaire dâun master en mĂ©canique des fluides numĂ©rique », explique-t-elle. Son expertise lui donne du poids sur une question Ă©pineuse : lâARBR AC75 est-il encore un bateau ? « Ce nâest pas un avion, rĂ©pond-elle, et ce nâest pas non plus un bateau traditionnel. La navigation a toujours Ă©tĂ© basĂ©e sur la crĂ©ation dâune portance, mais avec des voiles verticales. LâARBR AC75 sâĂ©lĂšve aussi horizontalement hors de lâeau. Mais câest bien un bateau. » Un bateau qui peut se dĂ©placer deux fois plus vite que les frĂšres Wright lors du premier vol motorisĂ© au monde en 1903âŠ
Conseiller navigation Pietro Sibello
Lui aussi pense que, dans le milieu de la rĂ©gate, les ordinateurs surpassent les performances humaines Ă bien des Ă©gards â notamment sur la prĂ©cision. « Barrer un AC75, câest comme piloter un avion, rĂ©sume ce skipper italien de 43 ans, sauf que sur un voilier de rĂ©gate, comme rien nâest automatisĂ©, le boulot doit ĂȘtre fait par tous les Ă©quipiers, qui doivent ĂȘtre parfaitement synchrones. » Comme un orchestre. « Les ordinateurs sont beaucoup plus prĂ©cis et rapides, et câest vrai que le voilier irait plus vite si lâon avait le droit dâautomatiser les manĆuvres. Mais lĂ oĂč lâĂȘtre humain surpasse lâordinateur, câest dans sa capacitĂ© Ă anticiper les situations, Ă profiter de son expĂ©rience, Ă deviner les bourrasques qui arrivent rien quâen regardant la surface de lâeau⊠Au final, les Ă©quipages humains sont encore supĂ©rieurs aux ordinateurs lors des rĂ©gates â pour le moment. »
6 Groupe dâĂ©nergie« En aviron, on se concentre simplement sur le fait de donner le meilleur de soi-mĂȘme. »
AUGUSTIN MAILLEFER, GROUPE DâĂNERGIE
LâIA est-elle la rĂ©ponse Ă tout ?
Ou bien représente-telle un danger ?
Ă propos de lâimage de lâIA dans notre sociĂ©tĂ© et de ce quâelle peut nous apporter de bon.
»
Une aprĂšs-midi dans le centre-ville de la capitale autrichienne. La nuit commence Ă tomber. Il bruine. Dans la suite de lâhĂŽtel Altstadt, le dĂ©bat est trop intense pour que quiconque sâen aperçoive.
La manipulation positive existe-t-elle ? Quâest-ce que lâhumanisme ? Quâest-ce qui inquiĂšte encore les expert·e·s en intelligence artificielle comme Martina Mara ou Mark Coeckelbergh ? Entretien croisĂ© sur le pouvoir de lâIA.
Lâintelligence artificielle transforme nos vies, notre maniĂšre de travailler, de passer nos vacances, de voir les choses. Si lâidĂ©e vous prenait de consacrer, comme nous, un magazine entier Ă lâinnovation, nous ne saurions trop vous conseiller de rĂ©unir deux experts comme Martina Mara et Mark Coeckelbergh autour dâune table, qui sâintĂ©ressent depuis des annĂ©es aux effets, aux dangers et aux opportunitĂ©s de lâIA. Robopsychologue Ă lâuniversitĂ© Kepler de Linz, Martina Mara Ă©tudie la maniĂšre dont les ĂȘtre humains et les machines peuvent collaborer en harmonie. Coeckelbergh analyse quant Ă lui lâimpact Ă©thique des innovations technologiques sur notre sociĂ©tĂ©. Le dĂ©bat est riche, et pourrait durer encore longtemps. Le long du couloir qui mĂšne Ă la sortie, les deux personnes interviewĂ©es sâarrĂȘtent Ă plusieurs reprises pour poursuivre la discussion.
the red bulletin innovator : Imaginons un graphique sur lequel 100 % reprĂ©senteraient une vie totalement imprĂ©gnĂ©e dâIA : oĂč en serions-nous actuellement ?
coeckelbergh : Pas haut, vers 20%. Mon tĂ©lĂ©phone ne mâenvoie pas encore de notification pour me dire : « Tu es trop stressĂ©, Mark ! » (rires) Mais ça ne devrait pas tarder. mara : Oui, on a encore de la marge. Peu de monde se rend rĂ©ellement compte de tous les domaines oĂč lâIA est utilisĂ©e. Quand on leur parle dâIA, la plupart des gens sâimaginent une sorte dâhumanoĂŻde fantastique. La vĂ©ritĂ©, câest que lâIA est invisible. On la retrouve dans les prĂ©visions mĂ©tĂ©o, les systĂšmes de traduction, etc. Donc, dâun cĂŽtĂ©, on a peut-ĂȘtre encore de la marge, mais de lâautre, on ne mesure pas Ă quel point lâIA est dĂ©jĂ prĂ©sente dans nos sociĂ©tĂ©s, tout simplement parce quâelle ne ressemble pas Ă lâidĂ©e que lâon sâen fait.
coeckelbergh : En tout cas, pas Ă un robot ou Ă une superintelligence.
Il y a une certaine ambivalence chez les gens : dâun cĂŽtĂ©, ils ont peur des robots qui risqueraient de prendre le pouvoir, de lâautre, ils nâont aucun problĂšme Ă partager des informations privĂ©es avec des assistants vocaux intelligents. Faut-il quâun robot ressemble Ă un robot pour en ĂȘtre un ?
mara : Câest le privacy paradox : des Ă©tudes montrent que mĂȘme si les gens se prĂ©occupent de leurs donnĂ©es, ils nâagissent pas en consĂ©quence.
coeckelbergh : Cela fait longtemps que nous avons tirĂ© un trait sur notre vie privĂ©e. Ces donnĂ©es sont dĂ©jĂ lĂ , mais elles ne sont pas toutes personnelles. Selon moi, il faudrait plus prĂȘter attention Ă ce qui est fait de ces donnĂ©es et Ă ce que cela implique. Si mes donnĂ©es sont utilisĂ©es pour me manipuler, ce nâest pas la mĂȘme chose. Le problĂšme, câest que lâIA est invisible. Câest pour cela que lâon nây fait pas attention.
Mark Coeckelbergh, dans votre dernier livre AI Ethics, vous affirmez quâil est essentiel de prendre de la distance avec les histoires vĂ©hiculĂ©es dans notre sociĂ©tĂ© quand on aborde les questions Ă©thiques liĂ©es Ă la technologie. Quâest-ce que cela signifie ?
Robopsychologue
NĂ©e Ă Linz (Autriche) en 1981, elle a Ă©tudiĂ© les sciences de la communication Ă Vienne et obtenu un doctorat en psychologie Ă lâuniversitĂ© de Coblence-Landau (Allemagne).
AprĂšs avoir effectuĂ© des recherches dans le domaine extrauniversitaire, notamment Ă lâArs Electronica Futurelab, elle est depuis 2018 professeur de robopsychologie â la premiĂšre du genre dans le monde entier â Ă lâInstitute of Technology de lâuniversitĂ© Johannes Kepler, Ă Linz.
Elle Ă©tudie la maniĂšre dont lâĂȘtre humain et la machine peuvent coexister en harmonie.
Robots sexuels ou Terminator⊠Il ne faut pas se limiter aux rĂ©cits utopiques et dystopiques. LâIA va bien plus loin que cela, souligne Mara.
coeckelbergh : De nombreuses histoires qui manquent cruellement de sens critique nous font croire quâavec la technologie, tout ira mieux Ă lâavenir. La technologie a du bon, mais on a tĂŽt fait de ne plus considĂ©rer les choses quâĂ travers ce genre dâhistoires, parce que câest tout ce que lâon ne nous propose. Et câest important dâapporter aussi dâautres perspectives. mara : La maniĂšre dont on parle de lâIA dans le discours public est trĂšs importante. La question qui revient tout le temps, câest de savoir quand le Terminator ou les robots sexuels deviendront une rĂ©alitĂ©. Dans mon labo, nous avons analysĂ© 10 000 images diffusĂ©es par les mĂ©dias sur le thĂšme de lâintelligence artificielle et le contenu le plus frĂ©quent, câest une reprĂ©sentation de lâIA Ă lâimage de lâĂȘtre humain ou bien avec un aspect menaçant. On voit beaucoup plus rarement des personnes qui font rĂ©ellement quelque chose avec lâIA. Donc il faudrait revenir Ă la rĂ©alitĂ© quant Ă la vĂ©ritable apparence de lâIA.
coeckelbergh : Personne ne parle des outils que lâon utilise au quotidien, comme Google Search. En comparaison, les robots sont rudimentaires.
Mais alors, Ă quoi cela ressemble, un robot classique ?
coeckelbergh : La robotique, ça nâa rien Ă voir avec ce que lâon sâimagine. Bien sĂ»r, il y a de bons robots industriels, mais câest autre chose. Les humanoĂŻdes, en tout cas, ne sont pas comme dans la science-fiction.
mara : On parle beaucoup des humanoĂŻdes, mais il nâexiste pratiquement aucun robot de ce genre qui soit capable de monter les escaliers ou dâouvrir une porte tout seul. Et pourtant, dans les esprits, câest ce genre de robot qui prĂ©domine.
coeckelbergh : Il faudrait sâintĂ©resser Ă celles et ceux qui font dĂ©jĂ partie de notre vie quotidienne, comme les gens qui utilisent lâIA pour
nous influencer sur le plan politique par exemple. Le truc, câest que lâon ne peut pas en faire de jolies photos, parce que ce ne sont que des gens assis Ă leur bureau. Et pourtant, cela peut avoir un Ă©norme impact sur toute une Ă©lection. Je fais actuellement des recherches sur la dĂ©mocratie et lâIA. Notre comportement en matiĂšre de vote politique est influencĂ© par lâIA et les grandes entreprises tentent de manipuler notre comportement, nous devrions nous en inquiĂ©ter.
Il faudrait donc rĂ©glementer lâIA sur le long terme et dans le monde. Mais est-ce vraiment possible ?
coeckelbergh : Il nâexiste actuellement aucune solution au niveau international. Parce que le problĂšme nâest pas assez pris au sĂ©rieux. Et parce que les institutions sont internationales et que, mĂȘme si les Ătats dialoguent entre eux, cela nâa rien dâobligatoire. Il nây a que des documents sur les stratĂ©gies IA. Il faudrait une vĂ©ritable rĂ©gulation.
mara : Dans lâUE, on travaille actuellement sur lâAI Act, un rĂšglement europĂ©en sur lâIA. Un Ă©norme challenge. Ce nâest pas facile de trouver un compromis entre le besoin dâinnovation et les principes Ă dĂ©fendre dans notre systĂšme de valeurs, comme lâĂ©quitĂ©, la vie privĂ©e, la transparence.
coeckelbergh : Ce sont des questions politiques et sociales, et le numĂ©rique devrait ĂȘtre une affaire dâĂtat, car il influence toute notre Ă©conomie.
Quels sont les changements structurels nĂ©cessaires dans la politique, la sociĂ©tĂ©, lâĂ©ducation ?
mara : Il y a des manquements au niveau de lâĂ©ducation. Les nouvelles gĂ©nĂ©rations sont plus sensibilisĂ©es Ă ces questions. Des dĂ©cisions doivent ĂȘtre prises au niveau politique.
coeckelbergh : Il est important dâapporter des changements dans lâĂ©ducation dans le sens oĂč lâon apprend Ă argumenter, Ă avoir un esprit critique vis-Ă -vis de ce que lâon lit et de ce que lâon entend, car il est de
« Que se passe-t-il si je dĂ©cide, en tant quâĂȘtre humain autonome, que je veux ĂȘtre influencĂ© ?
Comment jugeons-nous cela dâun point de vue Ă©thique ? »
Martina Maraplus en plus difficile de dĂ©terminer Ă quel point nous sommes influencĂ©s. Le problĂšme se pose aussi quand on nâĂ©change quâavec des gens qui partagent notre opinion. Le numĂ©rique dans lâĂ©ducation, cela ne se limite pas Ă distribuer des iPads aux Ă©lĂšves et Ă donner des cours sur Zoom. Il sâagit aussi de savoir quel genre de citoyennes et citoyens nous voulons former. Il sâagit de dĂ©mocratie.
Zoom est en train de mettre au point une technologie qui permet, de lire sur les visages Ă quel point les personnes participantes Ă une visio sont attentives, comment elles se sentent, etc. Câest terrifiant. coeckelbergh : Câest de la manipulation. Quâadvient-il de mes donnĂ©es ? Câest une tentative de changer le comportement des travailleur·euse·s, des consommateur·rice·s. Il faut donc nous assurer de ne pas nous retrouver dans une vĂ©ritable dystopie.
En quoi consiste lâAI Act de lâUE et quâest-ce quâun humanoĂŻde : petit lexique des termes importants.
Il nây a pas de dĂ©finition universelle de lâintelligence artificielle (IA), parce que lâintelligence en soi nâest pas clairement dĂ©finie. Dâune maniĂšre gĂ©nĂ©rale, ce terme dĂ©signe la tentative de transposer lâapprentissage et le raisonnement humains sur un ordinateur. Le principe est donc de concevoir et de programmer des ordinateurs de maniĂšre Ă ce quâils puissent rĂ©soudre des problĂšmes par eux-mĂȘmes. Lâobjectif de la recherche en IA est de comprendre le fonctionnement de notre cerveau et de le reproduire de maniĂšre artificielle.
Les humanoĂŻdes sont des robots reproduits Ă lâidentique des ĂȘtres humains, mais qui ne prĂ©sentent pas de caractĂ©ristiques telles que les traits du visage. Les positions des articulations ainsi que les mouvements sâinspirent de lâappareil locomoteur humain. Les possibilitĂ©s de lâIA, câest-Ă dire la capacitĂ© dâapprentissage du robot, pourraient permettre dâutiliser des robots humanoĂŻdes pour des tĂąches simples dans le domaine des soins aux personnes et aux malades.
Avec lâAI Act, lâUE entend crĂ©er une loi pour une rĂ©glementation globale de lâintelligence artificielle. Alors que lâIA sâimmisce dans presque tous les domaines de notre vie, il nâexiste encore aucune rĂ©glementation adĂ©quate. LâUE compte ainsi renforcer lâinnovation tout en limitant les atteintes aux droits fondamentaux des personnes Ă travers un cadre juridique uniforme. Un accord est attendu au premier trimestre 2023. Le rĂšglement devrait ĂȘtre mis en application dâici 2025.
Lâutilitarisme est un courant philosophique qui Ă©value les actions humaines non pas en fonction de leurs motivations, mais de leurs consĂ©quences. Les actions utilitaristes sont des actions qui augmentent le bien-ĂȘtre global dâune sociĂ©tĂ© en crĂ©ant plus dâavantages pour tous les individus (ou du moins pour un grand nombre dâentre eux) ou en les rendant plus heureux. Autrement dit : la fin justifie-t-elle les moyens ? Pour lâutilitarisme, la rĂ©ponse est oui, dĂšs lors que le moyen utilisĂ© a globalement plus dâeffets positifs.
mara : Influencer les gens, cela ne date pas dâhier. Mais il y a des choses sur lesquelles je me laisserais volontiers influencer. Un exemple : je ne suis pas du tout sportive et je tĂ©lĂ©chargerais Ă la seconde nâimporte quelle application qui rĂ©ussirait Ă me manipuler pour me faire faire un peu plus de sport. (rires) Donc quâestce que cela ferait si, en tant quâĂȘtre humain totalement autonome, je dĂ©cidais de me laisser influencer ?
Ou prenons le thĂšme de la durabilitĂ© : si une IA nous incitait Ă Ă©conomiser de lâĂ©nergie de maniĂšre efficace et cohĂ©rente, quây aurait-il Ă en dire sur le plan Ă©thique ?
Influence positive ?
coeckelbergh : Câest un problĂšme trĂšs intĂ©ressant. Câest presque vouloir se manipuler soi-mĂȘme, en fait. Jâen parle justement dans mon livre Self Improvement. On a lâimpression de devoir faire du sport. On se sent obligĂ© de sâamĂ©liorer. SâamĂ©liorer, câest une bonne chose en soi, mais cela devient obsessionnel de nos jours.
mara : Laissons le sport de cÎté alors ! Et la conscience écologique ?
coeckelbergh : Dâun point de vue macro, câest sĂ»r que ce serait super si davantage de personnes changeaient leurs habitudes. Mais ce nâest pas sans poser de problĂšmes. La vision utilitariste du monde va Ă lâencontre de lâidĂ©e selon laquelle nous voulons ĂȘtre des individus autonomes. Ce serait donc comme la manipulation et lâutilitarisme opposĂ©s Ă lâhumanisme, qui place lâĂȘtre humain au centre.
mara : En tant quâindividu autonome, jâai grandi dans le plus grand luxe en Europe centrale, oĂč lâon a de la viande dans nos assiettes et parfois plusieurs voitures par foyer. Mais je sais quâil y a un besoin urgent de changer nos comportements. Ce quâil faudrait peut-ĂȘtre, ce serait que les algorithmes sur Internet ne me montrent plus que des publicitĂ©s de produits neutres en carbone. Quâen est-il si je le dĂ©cide moi-mĂȘme ?
coeckelbergh : DĂ©cider soi-mĂȘme, câest dĂ©jĂ mieux, oui. Mais une dĂ©cision aussi peut ĂȘtre influencĂ©e. Quelles influences sont acceptables ?
Je nâai pas de rĂ©ponse Ă cette question, il faudrait en discuter. Dans quelle mesure est-il possible et souhaitable dâexercer une influence positive ? On nâa aucune envie que les
choses se passent comme en Chine. Mais ici, chez nous, le comportement des individus ne subit quasiment aucune influence. Alors, oĂč se situent les limites ? Câest un problĂšme trĂšs intĂ©ressant.
Lâun des domaines dans lesquels lâIA est de plus en plus prĂ©sente, câest le monde du travail. Le nombre de tĂąches qui sont et qui peuvent ĂȘtre effectuĂ©es par lâIA est en augmentation constante. Allons-nous un jour ĂȘtre contraints de crĂ©er des emplois fictifs pour que les gens aient quelque chose Ă faire et se sentent utiles ?
coeckelbergh : Certains métiers seront remplacés.
Remplacés ou supprimés ?
coeckelbergh : Et aprĂšs, quoi, on prend tous du bon temps ? Pour moi, câest une utopie. LâidĂ©e de la sociĂ©tĂ© des loisirs existe depuis longtemps, câest un leurre. Ce qui existe, ce sont des gens qui ont lâimpression de ne servir Ă rien. Câest lĂ que le gouvernement doit prendre les choses en main pour veiller au bon fonctionnement de nos systĂšmes sociaux. La dĂ©mocratie avec ses Ă©lĂ©ments sociaux sera mise sous pression.
Le revenu universel sans conditions est-il une solution sociale ?
coeckelbergh : Je ne sais pas quelle est la solution, mais il nous faut des alternatives. Car il y aura aussi des bouleversements sur le plan dĂ©mographique et du fait de lâautomatisation. Ce sera compliquĂ© de sâen sortir sans un travail bien payĂ© et une retraite complĂ©mentaire.
mara : Le principe mĂȘme du progrĂšs technologique devrait ĂȘtre que la technologie nous libĂšre de certaines tĂąches et nous facilite la vie. Si lâIA pouvait effectuer des tĂąches que nous, ĂȘtres humains, nâavons pas envie de faire, ce serait super. Oui mais, oĂč est-il donc, ce monde ? OĂč tout le monde peut faire ce quâil a envie ?
LâidĂ©e existe depuis longtemps. Je pense pourtant quâil sâagit dâune utopie.
Mark CoeckelberghCâest vrai que ce serait gĂ©nial en thĂ©orie. Nous, ĂȘtres humains, qui avons le privilĂšge dâĂȘtre des esprits crĂ©atifs, nâaurions sĂ»rement aucun mal Ă trouver quoi faire de notre temps. coeckelbergh : Ce nâest pas ça le problĂšme. Le problĂšme, câest que dans ce monde, les gens sont trĂšs stressĂ©s et inquiets, et dâune maniĂšre bien particuliĂšre. Prenons lâexemple du travail de bureau : les e-mails Ă©taient censĂ©s nous soulager puisquâils nous permettaient dâenvoyer des courriers plus facilement. Mais au final, câest lâinverse qui sâest produit : nous sommes totalement dĂ©passĂ©s par la quantitĂ© dâe-mails que nous recevons dĂ©sormais. Ce sont toujours ces choses dont on nous raconte quâelles nous soulageront qui finissent par nous compliquer la vie. Et cela ne sâapplique pas quâau travail. Les loisirs aussi deviennent de plus en plus stressants.
La technologie aurait-elle ouvert une brĂšche ?
mara : Oui, et ce qui est plus simple devient forcĂ©ment beaucoup plus frĂ©quent. Ce ne sont donc plus cinq courriers que lâon reçoit par jour, mais cent. Avant, on se posait peut-ĂȘtre plus la question avant de se dĂ©cider Ă Ă©crire quelque chose Ă un instant T.
Martina Mara, vous avez dit que lâobjectif Ă©tait de crĂ©er un avenir robotique centrĂ© sur lâĂȘtre humain. Ă quoi cela pourrait-il ressembler et quâest-ce que cela impliquerait ?
mara : En psychologie, on parle de besoins fondamentaux et il y en a trois qui sont essentiels : lâautonomie, la compĂ©tence et les relations sociales. Avec lâautonomie, je peux
dĂ©cider moi-mĂȘme de mes actes. Pour moi, lâIA entre en ligne de compte ici, car dans nos vies quotidiennes, de plus en plus de dĂ©cisions sont au moins suggĂ©rĂ©es par des algorithmes. Ensuite, la compĂ©tence : nous, ĂȘtres humains, voulons ĂȘtre compĂ©tents dans quelque chose, et lâIA a aussi une incidence sur cela, en mĂ©decine par exemple, oĂč elle peut analyser une radiographie plus rapidement quâun mĂ©decin. La question est donc de savoir comment les compĂ©tences humaines et de la machine peuvent se complĂ©ter au mieux. Et enfin, les relations sociales sont, elles aussi, impactĂ©es par lâIA, notamment Ă cause des chatbots : on a lâimpression de discuter avec des amis, mais en fait, ils ne font quâenregistrer tout ce que lâon dit pour alimenter leurs donnĂ©es et nous dire ce que lâon a envie dâentendre. En ce qui concerne lâapproche centrĂ©e sur lâĂȘtre humain, il faudrait trouver le moyen de prĂ©server toute lâautonomie humaine et dâutiliser lâIA comme un outil. Si des robots sociaux pouvaient servir dâintermĂ©diaires pour que la grand-mĂšre qui se sent seule chez elle puisse entrer en contact avec dâautres personnes par ce biais, ce serait formidable.
Philosophe de la technologie
NĂ© en Belgique en 1975, il est professeur de philosophie des mĂ©dias et de la technologie Ă lâInstitut de philosophie de lâUniversitĂ© de Vienne, depuis 2015. Il est expert en Ă©thique de lâintelligence artificielle â son dernier livre Robot Ethics est paru en 2022 â et fait partie du groupe dâexperts de haut niveau sur lâintelligence artificielle de la Commission europĂ©enne. Ses recherches portent sur les dĂ©veloppements dans le domaine de la robotique, de lâIA et des technologies de lâinformation et de la communication.
coeckelbergh.wordpress.com
« Que les robots fassent la besogne à notre place ?
»
LâIA peut vraiment avoir du bon.
« Ce quâil faut, câest bien garder Ă lâesprit les consĂ©quences Ă©thiques et aussi rĂ©flĂ©chir au monde que nous voulons en dĂ©finitive », dĂ©clare Coeckelbergh.
LâIA est devenue accessible pour beaucoup de monde. Des outils en ligne comme Midjourney crĂ©ent des images sur la base de ce que lâon appelle des prompts (mots clĂ©s). Des applis telles que Lensa transforment les selfies en incroyables photos de profil.
Et les systĂšmes de dialogue comme ChatGPT effectuent des tĂąches basĂ©es sur du texte dâune maniĂšre semblable Ă ce que ferait un ĂȘtre humain.
coeckelbergh : ConsidĂ©rer lâIA non pas comme un ennemi, mais comme un intermĂ©diaire.
Et puisquâon a dĂ©jĂ Ă©voquĂ© ce qui vous faisait peur, dites-nous ce que lâIA peut avoir de bon Ă nous apporter.
coeckelbergh : Je pense que lâIA peut contribuer Ă rĂ©soudre des problĂšmes tels que le changement climatique. Ou du moins, nous aider Ă mieux les gĂ©rer. Les scientifiques ont besoin de lâIA et de donnĂ©es. Dans
le domaine mĂ©dical, par exemple, Ă lâinstar des diagnostics oĂč un cancer est dĂ©tectĂ© alors quâil aurait pu passer inaperçu. Ce quâil faut, câest bien garder Ă lâesprit les consĂ©quences Ă©thiques et aussi rĂ©flĂ©chir au monde que nous voulons en dĂ©finitive. mara : Il y a de vrais risques, mais aussi de rĂ©elles opportunitĂ©s. Il va de soi que la lutte contre le changement climatique ne fonctionnera que si nous, les ĂȘtres humains, faisons Ă©galement des efforts pour changer. On ne peut pas se contenter de se dire que la technologie rĂ©soudra le problĂšme Ă notre place. Mais telle quâelle fonctionne aujourdâhui, lâIA peut tout de mĂȘme ĂȘtre utile â en tant quâoutil statistique basĂ© sur lâanalyse des donnĂ©es et capable de faire des prĂ©visions. Par exemple : oĂč peuton Ă©viter la surproduction ? Quant Ă moi, dâun point de vue tout Ă fait profane, je voudrais un jour avoir un assistant IA qui me dĂ©barrasserait de mes e-mails. Quand serons-nous enfin rĂ©ellement soulagĂ©s par ce genre dâoutils ? (rires) Je nâai aucune envie de lire 300 e-mails par jour, donc personnellement, jâai vraiment hĂąte que cela arrive. Mais comme on lâa dit : on a encore de la marge !
Quâest-ce que le mĂ©tavers ? OĂč le trouve-t-on ? Comment draguer quand on est un poulet virtuel ? Est-ce vraiment le monde qui nous attend demain ? ExpĂ©rience avec casque de rĂ©alitĂ© virtuelle et rĂ©sultats dĂ©concertants. TEXTE
Le métavers est un pendant virtuel de notre monde réel.
Le fondateur de Facebook et PDG de Meta, Mark Zuckerberg (Ă droite), semble y trouver son bonheur.
Jâai harcelĂ© une cacahuĂšte. VoilĂ comment dĂ©marre ma premiĂšre journĂ©e dans le mĂ©tavers. Une explication sâimpose : la cacahuĂšte gĂ©ante bipĂšde est le premier avatar que je croise dans ce chat en rĂ©alitĂ© virtuelle (VR). AnimĂ©e en style BD, cette derniĂšre, une femme dâaprĂšs sa voix, sâadresse Ă moi en anglais (prĂ©cisons que nous sommes les seuls dans ce chat situĂ© dans un bar en images de synthĂšse perchĂ© sur les toits dâune grande ville fctive). « Ah, je ne suis pas toute seule, me dit la cacahuĂšte dâun ton enjouĂ©. Salut, comment ça va ? »
Jâaimerais lui rĂ©pondre, mais dire Ă voix haute « Salut, ravi de te rencontrer » comme ça, debout dans son salon au beau milieu de la nuit avec un casque de rĂ©alitĂ© virtuelle vissĂ© sur le crĂąne requiert une certaine hardiesse qui me fait prĂ©sentement dĂ©faut. Jâopte pour lâenvoi dâun emoji amical au moyen dâune des deux manettes qui simulent mes mains dans cet univers virtuel. Mais mon pouce fait dĂ©fler la barre des emojis beaucoup trop vite et au lieu du « clin dâĆil », câest un « clin dâĆil-bisou » que jâenvoie fotter dans lâespace-temps. La cacahuĂšte exprime haut et fort son dĂ©goĂ»t puis prend ses jambes Ă son cou. Mon avatar de poulet essaie de la retenir : « Fausse manipâ ! DĂ©solĂ© ! Je suis nouveau ici ! » Trop tard. « Avec qui tu hurles comme ça au milieu de la nuit ? », mâapostrophe alors ma copine. JâĂŽte mon casque et lui rĂ©ponds : « Avec une cacahuĂšte. GĂ©ante. » Bienvenue dans le mĂ©tavers.
Dans soixante ans, je serai le premier à en rire. Nous serons en 2082, mon vieux corps usé et ridé sera maintenu en vie dans un bassin artifciel tandis que je vivrai, éternel jeune
Jhomme, des aventures extraordinaires dans un monde virtuel. Câest du moins ainsi que je me reprĂ©sente lâavenir dans le mĂ©tavers, un peu comme dans le classique hollywoodien Matrix ou dans le roman Ready Player One, oĂč lâhumanitĂ©, en 2045, se rĂ©fugie dans la rĂ©alitĂ© virtuelle de lâOASIS pour Ă©chapper Ă la morositĂ© du quotidien. Le mot mĂ©tavers, dans ce contexte prĂ©cis, apparaĂźt pour la premiĂšre fois dans le roman Snow Crash, de lâĂ©crivain Neil Stephenson, paru en 1992. Dans ce livre, les entreprises mondiales ont pris le pouvoir et remplacĂ© lâĂtat. (SpĂ©ciale dĂ©dicace Ă Elon Musk.) Dans Snow Crash, les plus riches peuvent se rĂ©fugier dans le mĂ©tavers. Vision dystopique terriblement noire.
Ready, Player Marc ?
Mais quand la rĂ©daction de The Red Bulletin Innovator mâappelle pour me demander si je veux tester le mĂ©tavers, je rĂ©ponds pourtant : « Oui, carrĂ©ment, jâadore ce sujet ! »⊠avant de googler timidement, sitĂŽt la conversation terminĂ©e : « Câest quoi le mĂ©tavers? » Puis poursuis mes recherches par « Comment entrer dans le mĂ©tavers? » et « De quoi ai-je besoin pour le mĂ©tavers? ». Les pages web sâenchaĂźnent et sâaccroissent, tout comme ma perplexitĂ©. Ici, je lis quâil faut se rendre sur Decentraland, ce serait la Mecque du mĂ©tavers. Ailleurs, quelquâun Ă©crit que câest plutĂŽt sur The Sandbox ou sur Roblox quâil faut aller. LĂ encore, jâapprends que le jeu vidĂ©o Fortnite, câest dĂ©jĂ du mĂ©tavers, fnalement. Et aussi quâun casque VR nâest certes pas indispensable mais essentiel et que le produit phare, le Quest 2, a Ă©tĂ© interdit Ă la vente en Allemagne pendant deux ans pour raison de protection des donnĂ©es.
Tout cette histoire de mĂ©tavers reste bien confuse et sâapparente davantage Ă une phase bĂȘta prĂ©maturĂ©e quâĂ une technologie avancĂ©e. Seuls 15 % de la gĂ©nĂ©ration Z, nĂ©e entre 1995 et 2012, ont dĂ©jĂ Ă©tĂ© dans le mĂ©tavers (enquĂȘte menĂ©e auprĂšs de gamers et gameuses). Et seulement 8 % parmi celles et ceux de ma gĂ©nĂ©ration, la gĂ©nĂ©ration X. Je fais donc partie des 92 % restant, alors que jâutilise internet depuis 1997, que jâai travaillĂ© avec la rĂ©alitĂ© augmentĂ©e en 2009 et que je me suis bravement frottĂ© aux montagnes russes en VR,
Marc Baumann a 45 ans.
Il vit Ă Munich et travaille comme auteur indĂ©pendant pour le SĂŒddeutsche Zeitung Magazin Actuellement, il se consacre aux impondĂ©rables du mĂ©tavers.
des vraies, avec pleins de loopings, le tout avec un casque de rĂ©alitĂ© virtuelle, sâil vous plaĂźt. Et jâai mĂȘme failli essayer un simulateur de vol lors dâun grand salon de la technologie, mais le businessman avant moi avait vraiment lâair trop con, Ă plat ventre sur une sorte de banc de ftness Ă sâagiter en tous sens, imitant un vol avec son casque VR sur le crĂąne. Sa chemise est sortie de son pantalon et il sâest retrouvĂ© les fesses Ă lâair, ce quâil nâa mĂȘme pas remarquĂ©, parti quâil Ă©tait dans son dĂ©lire VR. Le mĂ©tavers est peut-ĂȘtre passionnant, visionnaire, rĂ©volutionnaire, mais pas trĂšs stylĂ©.
Jouer, bavarder, faire ses courses, travailler⊠Le mĂ©tavers doit faciliter tout cela. Lâexperte en logiciels Johanna Pirker (Ă droite) prĂ©vient : « Nous transposons dans le monde virtuel nos problĂšmes du monde rĂ©el. »
« à qui parles-tu si fort au milieu de la nuit ? », me demande mon amie. Je retire mes lunettes de VR et lui réponds : « Avec une cacahuÚte. »
DĂ©jĂ , Ă lâĂ©poque, la vidĂ©o Youtube dâoctobre 2021 oĂč Mark Zuckerberg, le fondateur de Facebook, dĂ©voila au public ses grands projets de mĂ©tavers Ă©tait franchement craignos. Ce court-mĂ©trage dâune dizaine de minutes le met en scĂšne se transformant en son propre avatar en images dâanimation, puis il annonce que son entreprise sâappellera dĂ©sormais Meta. Ensuite, avatar Zuckerberg rencontre ses autres potes avatars dans une station spatiale et ils font une partie de cartes. Mark Z. lance alors Ă un collĂšgue : « Hey, jâĂ©tais censĂ© ĂȘtre le robot ! » Et tout le monde rit aux Ă©clats, de ce rire forcĂ© qui rĂ©pond Ă la boutade dâun chef. Cette vidĂ©o Youtube, que lâon peut considĂ©rer comme le coup dâenvoi offciel du mĂ©tavers, ne donne malheureusement pas trĂšs envie dây goĂ»ter et fait plutĂŽt penser Ă des parents qui auraient forcĂ© leur gamin ado Ă jouer Ă la Nintendo-Wii avec son petit frĂšre. Quelques semaines plus tard, Zuckerberg dâenfoncer le clou avec son avatar en selfe devant une tour Eiffel en mode mĂ©tavers Ă lâanimation si ringarde que tout le monde sur Twitter sâest moquĂ© de son grand projet.
Hype, hype, hourra
Câest donc pour ça quâil dĂ©pense des milliards et met la santĂ© fnanciĂšre de Facebook en pĂ©ril, comme le rĂ©vĂšlent anonymement certains employé·e·s de lâentreprise ? Heureusement, je tombe sur le podcasteur Thomas Riedel, qui se dĂ©crit lui-mĂȘme par cette magnifque tournure : « Jâai bien peur dâĂȘtre le premier journaliste allemand du mĂ©tavers. » Le fait que je cherche vainement la porte dâentrĂ©e du mĂ©tavers ne le choque pas outre mesure : « Votre exaspĂ©ration mâinonde de joie, car jâai moi-mĂȘme lâintime conviction que le mĂ©tavers nâexiste pas encore. » Pardon ? « Câest un hold-up mĂ©diatique oĂč tout le monde cherche Ă se faire du fric en disant que câest du mĂ©tavers », explique Thomas Riedel. Okay, temps mort, on arrĂȘte les frais, jâappelle la rĂ©daction, cette histoire de mĂ©tavers câest du pipeau, on retente le coup dans cinq ans, dâici lĂ , bye-bye !
Pas si vite, me retient Thomas Riedel. Le mĂ©tavers deviendra un jour un immense rĂ©seau dâexpĂ©riences de rĂ©alitĂ© virtuelle et augmentĂ©e oĂč tout sera interconnectĂ©.
Dans le métavers, la réalité virtuelle, la réalité augmentée et la réalité physique se rejoignent. Petit lexique des termes les plus importants.
Le métavers est un équivalent virtuel de notre monde réel.
Le mĂ©tavers peut ĂȘtre utilisĂ© avec un smartphone, un ordinateur portable, une tablette ou des lunettes VR. La rĂ©alitĂ© virtuelle (VR) ou la rĂ©alitĂ© augmentĂ©e (AR) sont une option, mais ne sont pas indispensables.
Lâun des principaux objectifs du mĂ©tavers est de crĂ©er une Ă©conomie numĂ©rique propre, dans laquelle les biens virtuels sont vendus avec leurs propres monnaies.
Les investissements dans le domaine du métavers sont réalisés par de grandes entreprises de technologie comme Microsoft, ainsi que par des marques de mode comme Nike, Adidas et H&M.
Le mĂ©tavers est toujours en cours. Il ne peut pas ĂȘtre mis en pause, rĂ©initialisĂ© ou arrĂȘtĂ©.
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Les plateformes métavers seront accessibles dÚs 2023. Meta, la société mÚre de Facebook, en développe actuellement deux.
Câest cette annĂ©e-lĂ que le terme mĂ©tavers a Ă©tĂ© mentionnĂ© pour la premiĂšre fois, dans le roman de science-fiction Snow Crash de Neal Stephenson.
Câest le capital en bourse que reprĂ©sente le marchĂ© des mĂ©tavers selon les estimations.
Câest, selon la banque JP Morgan, la somme des biens prĂ©sents dans le mĂ©tavers en 2029.
450 000 dollars ont été payés en 2021 pour un terrain dans le métavers
The Sandbox
62 % de toutes les terres virtuelles actuellement disponibles se trouvent dans le métavers
The Sandbox, qui a été lancé
La question est donc de savoir qui sera le premier Ă construire lâemballage virtuel qui enrobera le tout. VoilĂ pourquoi Mark Zuckerberg est en train dâessayer de construire une sorte de html pour mĂ©tavers. La phase de dĂ©veloppement prendra encore cinq, dix ou vingt ans, mais en attendant, on peut dĂ©jĂ en essayer les diffĂ©rentes parties, que ce soit en rĂ©alitĂ© virtuelle ou augmentĂ©e, ou tout simplement sur notre Ă©cran.
Je tente une seconde excursion dans la rĂ©alitĂ© virtuelle et me tourne vers lâalpinisme. SaluĂ© par les critiques, The Climb propose des graphismes extrĂȘmement rĂ©alistes, ce qui correspond bien plus Ă ce que jâattends du mĂ©tavers. AprĂšs trois ou quatre minutes de chargement (un casque VR coĂ»te dans les 500 euros, un prix destinĂ© Ă attirer le plus grand nombre dâacheteur·euse·s possible. Ils ne sont donc pas ultra performants), je commence The Climb sur une mince plateforme en pleine montagne, entourĂ© de ravins. Les manettes permettent de sâemparer des prises dans la roche pour se hisser au sommet mĂštre aprĂšs mĂštre. Une erreur et câest la chute fatale, je ne peux rĂ©primer un bref sursaut au moment de lâimpact. Je passe Ă Medal of honor : me voilĂ en soldat britannique blessĂ© sur un champ de bataille pendant la Seconde Guerre mondiale. Deux camarades me portent secours. Fascinant de se retrouver sur un lit dâhĂŽpital avec ces manettes qui imitent de vraies mains. Mais quand commence le premier combat et que mon soldat dĂ©fouraille Ă tout va, me voilĂ pris de nausĂ©e alors que je suis immobile dans mon salon. Un phĂ©nomĂšne appelĂ© motion sickness qui retarde encore le grand boom de la VR. AprĂšs 90 minutes, jâai besoin
dâune pause. JâenlĂšve mon casque et sors sur la terrasse. Pendant une ou deux minutes, jâai lâimpression que mon chien et le paysage sont des images de synthĂšse. Autre chose de bizarre, mais peut-ĂȘtre est-ce mon imagination : mon rythme cardiaque me semble chamboulĂ© quand je remets le casque.
PPlus je passe de temps dans le mĂ©tavers, plus jâai envie dâaller folĂątrer dans la nature ; situation devenue trop rare, je promĂšne mon chien sans emporter mon tĂ©lĂ©phone. Le corps sâhabituera-t-il au va-et-vient entre le monde rĂ©el et ce monde imaginaire en trompe-lâĆil ? Ou tout va-t-il se brouiller, comme au sortir du sommeil, quand on est encore Ă moitiĂ© dans le rĂȘve et quâon nâest pas sĂ»r dâĂȘtre Ă©veillĂ© ? « Impossible de tenir plus de deux heures avec un casque VR », explique Thorsten Hennig-Thurau. Enseignant Ă MĂŒnster et Ă Londres, ce professeur en marketing multimĂ©dia a recréé une partie de lâuniversitĂ© de MĂŒnster, son propre bureau inclus, en images de synthĂšses. Il travaille actuellement sur les premiers cours entiĂšrement en VR. Je le retrouve dans son bureau au bord de la mer. La plage que jâaperçois derriĂšre lui nâexiste que dans mon casque VR, puisquâil se trouve en fait Ă MĂŒnster et moi Ă Munich. Mais nos avatars se font face assis tous deux autour de la mĂȘme table virtuelle, et en Ă©tirant mes jambes chez moi Ă Munich, je crains lâespace dâun instant de frĂŽler les siennes sous la table avant de me rappeler que 600 kilomĂštres nous sĂ©parent. Nous sommes des avatars en style BD, avec juste le haut du corps animĂ© (dans un souci dâoptimisation du traitement de donnĂ©es). Toutefois, la rencontre est Ă©tonnamment immersive. Le professeur me montre comment se passer des manettes pour travailler uniquement avec les gestes de la main, puis nous allons tous deux Ă©crire un peu au tableau. Il est juste devant moi et jâai vĂ©ritablement lâimpression de pouvoir le toucher. Hennig-Thurau porte un modĂšle de casque VR dernier cri
Notre auteur se dĂ©plaçant dans le mĂ©tavers en haut lors dâun appel vidĂ©o virtuel, en bas avec un avatar flottant.
qui, contrairement au mien, est capable de reconnaĂźtre les expressions du visage : quand il rit, son avatar rit aussi, quand une question est complexe, lâavatar fronce les sourcils. ComparĂ©e Ă toutes ces rĂ©unions zoom emblĂ©matiques de ces derniĂšres annĂ©es de pandĂ©mie, oĂč lâon apparaĂźt dans de minuscules fenĂȘtres, une rĂ©union VR avec des avatars a en effet lâair plus « rĂ©elle ». VoilĂ peutĂȘtre lâavenir du tĂ©lĂ©travail.
Ou pas. Car nul ne sait Ă quoi le monde de demain ressemblera exactement ; tout comme nous Ă©tions loin dâimaginer, en 1992, mĂȘme si nous pouvions dĂ©jĂ envoyer des e-mails, que trente ans plus tard, nous serions tous et toutes scotché·e·s sur nos smartphones Ă regarder messages persos, vidĂ©os et nouvelles du monde entier dans le mĂ©tro en allant au boulot. Tout est encore possible dans le mĂ©tavers, mĂȘme les scĂ©narios les plus sombres : « Pour lâinstant, nous copions tous nos problĂšmes rĂ©els dans le mĂ©tavers : crise immobiliĂšre
« Le mĂ©tavers est un battage mĂ©diatique oĂč tout le monde veut faire de lâargent. »
THOMAS RIEDEL
(des terrains virtuels sont dĂ©jĂ vendus Ă des prix absurdes), racisme, harcĂšlement sexuel et mĂȘmes des cellules de soutien VR pour les femmes », explique Johanna Pirker, dĂ©veloppeuse informatique Ă lâuniversitĂ© technique de Graz et chercheuse en systĂšmes interactifs et sciences des donnĂ©es. « Ce qui est gĂ©nial, câest que ce cyberespace permet enfn lâintĂ©gration des personnes exclues, handicapĂ©es ou dĂ©munies dans le rĂ©el, toutes cultures confondues. »
AprĂšs 90 minutes de rĂ©alitĂ© virtuelle, la nature nous attire dâautant plus. Le mĂ©tavers nous rend-il finalement plus actifs dans le monde rĂ©el ?
gigantesque chantier totalement improvisé, légÚrement déjanté et incroyablement excitant.
LâidĂ©e du mĂ©tavers est nĂ©e dans un roman de sciencefiction. Aujourdâhui encore, la culture pop, Hollywood et les entreprises de jeux sont Ă lâorigine des idĂ©es de la Silicon Valley.
Snow Crash (1992)
Dans le roman de Neal Stephenson, le mĂ©tavers est un lieu de retraite dâune AmĂ©rique dystopique oĂč seuls « la musique, les films, les logiciels et la livraison de pizzas Ă grande vitesse » sont encore valables.
Second Life (2003)
Le proto-métavers
LLe mĂ©tavers pourrait devenir un lieu oĂč lâespace virtuel est conçu par toutes et tous, oĂč lâon bĂątit son propre espace sous la forme dâune longue avenue qui fait le tour du monde et sur laquelle nous pouvons nous rencontrer. Câest lâexacte description du mĂ©tavers dans Snow Crash : une route. Il ne reste plus quâĂ espĂ©rer que chacun·e puisse emprunter cette route de maniĂšre Ă©quitable et que des lois empĂȘchent les crimes de rester impunis (contrairement Ă ce qui se passe actuellement sur le darknet). Les prochaines annĂ©es nous diront si lâavenir virtuel choisira lâombre ou la lumiĂšre.
Dâici lĂ , il faut peut-ĂȘtre se reprĂ©senter le mĂ©tavers comme Berlin-Est aprĂšs la chute du mur en 1990 : un
Alors que mon avatar de poulet se promĂšne dans un McDo virtuel, un chariot dâentretien fotte dans les airs, peut-ĂȘtre est-ce un bug, peutĂȘtre sommes-nous toutes et tous devenu·e·s fous. Jâobserve le menu au dessus du comptoir et me sens un peu insultĂ© par les Chicken McNuggets, tout poulet VR que je suis, puis mâempare dâun gobelet de Coca qui traĂźne et le « sirote », ce qui ne fait Ă©videmment aucun sens, avec mon casque VR sur la tĂȘte.
Revenu sur le parking, je suis soudain abordĂ© par un groupe dâavatars, dont un Ă©norme chat et un monstre sinistre qui, au fl de la conversation, fnit par mâinviter Ă une soirĂ©e de chat VR. Un peu plus tard, alors que je me mets Ă agiter mes ailes de poulet sur une piste de danse presque dĂ©serte, je trĂ©buche sur mon chien endormi dans le monde rĂ©el et mâĂ©crase brutalement au sol. Mon casque est intact, mais mon genou sâorne bientĂŽt dâun joli bleu, ultime crĂ©ation nĂ©e de cette union du monde rĂ©el et virtuel.
Second Life, dĂ©veloppĂ© par Linden Lab, existe depuis vingt ans dĂ©jĂ . JusquâĂ 200 000 adeptes utilisent la plateforme chaque jour.
World of Warcraft (2004)
Avec plus de 8 millions de joueurs actifs par mois, WoW détient le record du jeu de rÎle en ligne multijoueur (MMORPG) le plus populaire de tous les temps.
Ready Player One (2011/18)
Le film de Steven Spielberg, adaptĂ© du roman dâErnest Cline, a rendu le monde virtuel OASIS cool, malgrĂ© la dystopie qui lâentoure.
PRĂPARE-TOI POUR UNE DESCENTE ĂPIQUE
DĂPART: 3023, LES ATTELAS
TEXTE
Muamer Becirovic & GĂŒnther Kralicek
PHOTOS
Michael Sieber
Un diagnostic ultra précis en quelques secondes réalisé par un algorithme ? Des robots-chirurgiens ? Des vaccins anti-cancer ? Ce qui ressemble à de la science-fiction pourrait bientÎt faire partie du quotidien des hÎpitaux.
Grùce aux techniques les plus modernes, la médecine est à l'aube d'une nouvelle Úre.
LLa scĂšne se passe en 2050. Un homme est allongĂ© dans une salle dâopĂ©ration pour subir lâablation dâune tumeur cĂ©rĂ©brale. Au-dessus de sa tĂȘte, des bras robotisĂ©s se dĂ©placent lentement, selon une chorĂ©graphie tĂ©lĂ©guidĂ©e dâune prĂ©cision Ă couper le souffe. Assis derriĂšre une vitre sans tain, non loin de la table dâopĂ©ration, le chirurgien en chef commande les bras du robot Ă partir dâune modĂ©lisation en 3D du cerveau du patient : la tumeur, qui apparaĂźt sur lâĂ©cran dans une couleur vive, y est parfaitement localisable. Le chirurgien marque, Ă lâaide dâun stylo, une entaille minuscule : 1,3 mm trĂšs exactement. Inutile de dire quâĂ lâĆil nu, une main humaine ne pourrait atteindre la mĂȘme prĂ©cision : câest en fait le robot-assistant, avec sa vision haute rĂ©solution, qui est Ă lâĆuvre, et câest lui qui va bientĂŽt procĂ©der Ă une opĂ©ration qui semblait inimaginable quelques dĂ©cennies plus tĂŽt. Si lâassistance robotique en chirurgie nâen est encore quâĂ ses dĂ©buts, ce domaine de recherche est promis Ă un trĂšs bel avenir : Thomas Neumuth, qui travaille au CHU de Leipzig, en Allemagne, en est convaincu. Ce professeur allemand, ingĂ©nieur informaticien de formation, sait de quoi il parle, puisquâil dirige le centre de recherche sur la chirurgie assistĂ©e par ordinateur, au sein du CHU.
Son projet, câest de faire en sorte que ce rĂȘve devienne rĂ©alitĂ©. Lâun des plus gros obstacles Ă surmonter est assez surprenant, Ă premiĂšre vue : il sâagit de lâincompatibilitĂ© des diffĂ©rents appareils utilisĂ©s en salle dâopĂ©ration. Tous ceux quâon y trouve ont leurs
propres systĂšmes dâopĂ©ration, leurs propres interfaces, leurs propres Ă©crans â et sont souvent incompatibles entre eux. Quâelle soit le rĂ©sultat de considĂ©rations techniques ou de stratĂ©gies marketing des fabricants, cette situation pose de gros problĂšmes fnanciers, puisque lâĂ©quipement technologique opĂ©ratoire doit ĂȘtre renouvelĂ© tous les dix Ă douze ans pour rester Ă la pointe.
Mais alors, la solution ne seraitelle pas, pour les hĂŽpitaux, de sâapprovisionner chez un seul fabricant ? Dâun point de vue technico-mĂ©dical, cette option est rejetĂ©e par de nombreux mĂ©decins, qui prĂ©fĂšrent lâidĂ©e dâune interconnexion modulaire permettant de combiner, de relier et, si nĂ©cessaire, de remplacer des appareils ultra
LâhĂŽpital universitaire de Berne a plus de 600 ans dâhistoire mĂ©dicale derriĂšre lui. Avec plus de 10 000 collaborateurs et collaboratrices, il est aujourdâhui le plus grand hĂŽpital de Suisse.
Lâavenir de la mĂ©decine sâĂ©crit Ă Leipzig, Berne et Hambourg, avec la rĂ©alitĂ© virtuelle, la biotechnologie et la tĂ©lĂ©santĂ©.
Médecin & professeur Rendre la numérisation utile à la médecine est sa passion.
Thomas Sauter est mĂ©decin spĂ©cialiste en mĂ©decine interne gĂ©nĂ©rale Ă lâhĂŽpital de lâĂle Ă Berne, professeur Ă lâuniversitĂ© de Berne, et codirecteur du Virtual Inselspital Simulation Lab.
Il y effectue des recherches sur des phénomÚnes tels que la télémédecine, les wearables et la réalité étendue en médecine (XR), ce qui correspond à une réalité virtuelle (VR) ou réalité augmentée (AR) pour les médecins et les chirurgien·ne·s.
Des lunettes VR sont utilisĂ©es par les chirurgien·ne·s du laboratoire de simulation virtuelle pour sâentraĂźner Ă des opĂ©rations rares Ă haut risque.
Une combinaison de progrÚs techniques et de recherche ciblée permet de mettre de nouvelles percées médicales à portée de main.
1 LA RĂALITĂ ĂTENDUE (XR) GrĂące Ă la rĂ©alitĂ© virtuelle et Ă la rĂ©alitĂ© augmentĂ©e, les mĂ©decins peuvent s'entraĂźner Ă des interventions difficiles.
2 LA TĂLĂMĂDICINE Suivi Ă distance, l'Ă©change de donnĂ©es et les appels vidĂ©o permettent de traiter les patient·e·s plus rapidement et mieux.
3 LES VACCINS Ă ARNM La technologie peut non seulement ĂȘtre utilisĂ©e pour se protĂ©ger du Covid, mais pourrait bientĂŽt combattre le paludisme, le VIH ou la grippe, et le cancer.
spĂ©cialisĂ©s. Cette « modularitĂ© » serait rendue possible par la crĂ©ation dâune plate-forme numĂ©rique suffsamment bien confgurĂ©e pour intĂ©grer tous les fux de donnĂ©es et les diffĂ©rents composants des appareils : en Allemagne, le CHU de Leipzig est justement lâun des premiers Ă utiliser ce systĂšme, qui permet aux appareils dâĂ©changer leurs donnĂ©es et de les faire converger dans le systĂšme central de lâhĂŽpital.
Thomas Neumuth sâenfammelorsquâil dĂ©crit les progrĂšs ainsi rĂ©alisĂ©s : « La personne en charge de la chirurgie peut dĂ©sormais surveiller dâun seul coup dâĆil toute la salle dâopĂ©ration. » Certaines infos cruciales comme lâactivitĂ© cardiaque ou le niveau dâanesthĂ©sie proviennent de diffĂ©rents appareils installĂ©s dâun bout Ă lâautre de la salle. Or, le·la chirurgien·ne ne peut aller consulter ces infos puisquâil doit rester prĂšs de la personne malade. Câest dans ce cas que la compatibilitĂ© des appareils devient intĂ©ressante car « [elle] permet au mĂ©decin de consulter les donnĂ©es directement sur son Ă©cran â des donnĂ©es ultra prĂ©cises, en plus dâune commande Ă distance simplifĂ©e : tout cela facilite le travail du chirurgien ». Une effcacitĂ© accrue qui concerne Ă©galement toute la paperasse administrative post-opĂ©ratoire : toutes ces tĂąches rĂ©barbatives seront bientĂŽt exĂ©cutĂ©es par des programmes, ce qui soulagera les Ă©quipes mĂ©dicales.
Au total, Thomas Neumuth estime Ă 20 % le gain de temps et dâeffcacitĂ© quâun tel systĂšme apporterait en salle dâopĂ©ration, sans parler des coĂ»ts Ă©conomisĂ©s. Dâici 2032, prĂ©voit-il, tous les hĂŽpitaux dâAllemagne, de Suisse et dâAutriche seront Ă©quipĂ©s dâun systĂšme modulaire.
Respecter le corps humain
Mais lĂ nâest pas, selon Thomas Neumuth, le principal avantage de cette rĂ©volution technologique. La chirurgie est en effet arrivĂ©e Ă un tournant majeur de son histoire et doit prendre en compte le fait que
Lâhistoire de la chirurgie est Ă un tournant. La technologie numĂ©rique rendra les opĂ©rations plus prĂ©cises Ă lâavenir, ce qui permettra de rĂ©duire la taille de lâintervention et dâaccĂ©lĂ©rer le processus de guĂ©rison.
chaque acte chirurgical reste une intrusion, un traumatisme pour le corps humain, qui rĂ©cupĂšre plus ou moins vite selon lâĂ©tat de santĂ© et la gravitĂ© des opĂ©rations.
« Chaque acte chirurgical a des effets collatĂ©raux, pour la simple raison que lâon incise des tissus sains pour aller enlever ou rĂ©parer des tissus endommagĂ©s. Tout lâenjeu consiste maintenant Ă rĂ©duire au maximum le traumatisme en amĂ©liorant la prĂ©cision des interventions chirurgicales, ce qui va permettre de rĂ©duire considĂ©rablement le temps de rĂ©cupĂ©ration post-opĂ©ratoire, et donc le temps que les patient·e·s passent Ă lâhĂŽpital. LĂ encore, on va gagner en effcacitĂ©, puisque davantage pourront ĂȘtre traité·e·s, » conclut Neumuth.
anglais eHealth â et de ce quâon appelle la « mĂ©decine dâurgence Ă distance ». Câest dans le cadre de ces domaines quâil a créé, il y a deux ans, un poste de professeur-assistant Ă lâuniversitĂ© de Berne â le tout premier dans lâespace germanophone.
LLa scĂšne se passe sur une autoroute, un accident terrible vient de se produire et les ambulances viennent dâarriver sur place pour sâoccuper des blessé·e·s. PenchĂ©e sur lâun dâeux, une jeune mĂ©decin urgentiste est en train de lui prodiguer les premiers secours. Des gestes prĂ©cis quâelle doit connaĂźtre par cĆur et pouvoir rĂ©aliser dans toutes les situations de stress. Ăa y est, le patient est maintenant hors de danger. SoulagĂ©e, elle retire son casque de rĂ©alitĂ© virtuelle et essuie la sueur de son front : exercice pratique rĂ©ussi !
Simuler des situations dâurgence pour favoriser la formation mĂ©dicale : câest lâune des nombreuses applications concrĂštes de la rĂ©alitĂ© virtuelle qui sont utilisĂ©es aujourdâhui dans des centres de formation : comme par exemple Ă lâhĂŽpital universitaire de Berne, dont le dĂ©partement de mĂ©decine dâurgence utilise de tels moyens pour former les futurs urgentistes. Thomas Sauter est le directeur responsable de la formation, de la santĂ© numĂ©rique â en
« Le dĂ©partement que je dirige sâintĂ©resse Ă tous les aspects liĂ©s Ă la numĂ©risation de la mĂ©decine urgentiste », explique Sauter. Si lâon sâen tient Ă la dĂ©fnition stricto sensu que donne lâOMS de la « tĂ©lĂ©mĂ©decine », celle-ci dĂ©signe une forme de pratique mĂ©dicale mettant en relation patient·e·s et professionnel·le·s de santĂ© via les technologies dâinformation et de communication. « Par contre, le domaine de ce quâon appelle la âtĂ©lĂ©-santĂ©â regroupe dâautres aspects, comme celui de la formation notamment, oĂč lâutilisation de casques VR, de lâintelligence artifcielle, de âwearablesâ (câest-Ă -dire lâinformatique vestimentaire, ndlr) et dâapplis fait partie intĂ©grante de la formation du personnel soignant. » Parmi ces wearables, on peut citer par exemple les montres connectĂ©es qui informent le ou la malade de son Ă©tat de santĂ©. Quant aux applis de santĂ©, elles permettent de lâaider Ă choisir son lieu de prise en charge ou de calculer la nĂ©cessitĂ© dâun traitement. Quelles que soient les avancĂ©es que cela reprĂ©sente en termes dâeffcacitĂ©, la numĂ©risation de la mĂ©decine est un vrai dĂ©bat de sociĂ©tĂ© parce quâelle peut prĂ©senter des risques, notamment une dĂ©shumanisation des relations mĂ©decin-patient·e mais aussi une concentration exponentielle de donnĂ©es personnelles. Pour Thomas Sauter, ces interrogations lĂ©gitimes ne doivent pas remettre en question le progrĂšs Ă©norme que reprĂ©sente la tĂ©lĂ©-santĂ© : « Il ne sâagit pas dâĂ©loigner le ou la patient·e de son mĂ©decin mais au contraire dâĂ©tablir une vĂ©ritable collaboration. Par le biais de ces accessoires Ă©lectro-
niques et des applications smartphone, la personne malade devient lâactrice de sa santĂ© car elle est pleinement intĂ©grĂ©e au processus mĂ©dical. »
Selon Sauter, il nây aucune raison de croire que les mĂ©decins soient un jour remplacĂ©s par des algorithmes : au contraire, la numĂ©risation servira tout au plus Ă renforcer la relation entre le mĂ©decin et ses patient·e·s. Encore faut-il que tout le monde sây mettre : si certains hĂŽpitaux ont tout de suite intĂ©grĂ© les derniĂšres innovations, quitte Ă ressembler Ă des dĂ©cors de science-fction, la situation est loin dâĂȘtre la mĂȘme partout. « La rĂ©alitĂ©, câest quâon a encore beaucoup de praticien·ne·s qui sâĂ©chinent Ă tout documenter Ă la main sur papier⊠Une habitude qui freine considĂ©rablement lâĂ©change des donnĂ©es mĂ©dicales », regrette Sauter.
CCar câest justement dans ce domaine quâil perçoit le plus gros potentiel de la santĂ© numĂ©rique : la formation dâun vĂ©ritable rĂ©seau dâĂ©changes, qui permettrait non seulement aux mĂ©decins de collaborer Ă distance en Ă©changeant des informations, mais aussi dâinteragir avec le ou la malade et de lâinclure davantage dans ce processus. « La mĂ©decine numĂ©rique sera mieux adaptĂ©e Ă lâindividu, plus participative et beaucoup plus effcace dans la prĂ©vention. Que ce soit pour interprĂ©ter des radiographies, prescrire le bon mĂ©dicament, Ă©tablir un diagnostic fable : la mĂ©decine numĂ©rique est avant tout lĂ pour aider le personnel mĂ©dical dans son travail, pas pour le remplacer. Il nâest pas question de toucher Ă la relation de confance qui existe entre le mĂ©decin et son ou sa
La visite de mondes virtuels sur tablette, comme ici une grotte marine, aide Ă soulager les douleurs.
patient·e. » Dernier rejeton du dĂ©partement de mĂ©decine dâurgence au sein du CHU bernois, le projet VISL â pour Virtual Insel Simulation Lab, trad. Laboratoire de simulation dâĂźlots virtuels â sâintĂ©resse depuis 2020 Ă ce quâon appelle la Medical Extended Reality ou rĂ©alitĂ© Ă©tendue (abrĂ©gĂ©e XR), un domaine qui inclut la rĂ©alitĂ© augmentĂ©e (AR), la rĂ©alitĂ© virtuelle (VR) et la rĂ©alitĂ© mixte (MR). Si ces innovations ont tout de suite Ă©tĂ© intĂ©grĂ©es dans lâunivers du gaming, elles sont en train de rĂ©volutionner le domaine mĂ©dical. Tanja Birrenbach est la cofondatrice, avec son collĂšgue Thomas Sauter, du
LâHĂŽpital universitaire de Berne utilise la rĂ©alitĂ© virtuelle pour aider les malades en cas de douleur ou dâanxiĂ©tĂ©.
projet VISL : spĂ©cialiste de la mĂ©decine dâurgence, elle est convaincue que la rĂ©alitĂ© Ă©tendue trouvera une multitude dâapplications concrĂštes dans tous les secteurs de la mĂ©decine, de la formation du personnel soignant Ă la prise en charge des patient·e·s.
« Les simulations en MR ou en VR permettent de sâentraĂźner Ă des interventions rares ou Ă haut risque, pour lesquelles les exercices pratiques conventionnels seraient bien trop chers Ă mettre en place ou beaucoup trop dangereux. En utilisant la MR et la VR, nous avons mis au point toute une palette dâexercices qui touchent Ă tous les niveaux de compĂ©tence : on y apprend aussi bien comment bien utiliser son Ă©quipement de protection que la maniĂšre adĂ©quate de mettre un cathĂ©ter jugulaire sur quelqu'un de gravement blessĂ©. »
Mais ce nâest pas tout : la rĂ©alitĂ© virtuelle facilite les formations interdisciplinaires des Ă©quipes et optimise le suivi de ces formations â grĂące Ă la quantitĂ© de matĂ©riel numĂ©rique ainsi produit. Elle intervient aussi dans le traitement des malades, notamment pour aider Ă gĂ©rer la douleur ou le stress. On les place dans des mondes virtuels qui leur permettent dâoublier â au moins pour un temps â leurs douleurs. Tanja Birrenbach : « Le potentiel dâapplications concrĂštes est dĂ©jĂ Ă©norme, mais il va certainement sâamplifer au fur et Ă mesure que lâutilisation de la XR deviendra plus intuitive. »
Assis dans le cabinet de son mĂ©decin, un pĂšre de famille vient dâapprendre que son cancer de la peau est trop avancĂ© pour pouvoir envisager une ablation chirurgicale. DĂ©sespĂ©rĂ©, il comprend que son seul espoir rĂ©side dĂ©sormais dans une chimiothĂ©rapie, avec tous les effets secondaires douloureux que cela suppose â sans certitude dâune issue heureuse : dans le meilleur des cas, ce lourd traitement
« Nous avons dĂ©veloppĂ© diffĂ©rents entraĂźnements VR et AR : des formations simples sur les compĂ©tences aux procĂ©dures trĂšs complexes, comme la pose dâun cathĂ©ter dans lâaorte chez un·e patient· e gravement blessĂ© · e. »
Tanja Birrenbach
lui permettra de vivre encore quelques années, mais à quel prix et dans quel état physique ?
Le cancer de la peau est une maladie qui touche de plus en plus de personnes sur Terre et dont les chances de survie diminuent sâil est diagnostiquĂ© trop tard pour envisager une intervention chirurgicale. Depuis quelques annĂ©es, une thĂ©rapie rĂ©volutionnaire est en train dâĂȘtre dĂ©veloppĂ©e, avec des rĂ©sultats trĂšs prometteurs. La pandĂ©mie de Covid-19 a permis au grand public de dĂ©couvrir les fameux vaccins Ă ARN messager (abrĂ©gĂ© en ARNm) â ARN pour acide ribonuclĂ©ique. Ces nouvelles thĂ©rapies, loin de se limiter au coronavirus, promettent de trĂšs nombreuses applications, notamment dans la prĂ©vention et le traitement du cancer.
Chaque annĂ©e, rien quâen Suisse, 40 000 nouveaux cas de cancer sont dĂ©celĂ©s : câest la deuxiĂšme cause de mortalitĂ© dans le pays, juste aprĂšs les maladies cardiovasculaires. Alors que lâon connaĂźt cette maladie depuis plus de deux siĂšcles, les traitements restent lourds, invasifs et â si le cancer nâest pas dĂ©pistĂ© Ă temps ou pour les formes graves â trop souvent ineffcaces.
la vaccination Ă ARNm â avec peu dâeffets secondaires.
2. la radiothérapie, qui convient aux carcinomes diffciles à opérer mais bien délimités ;
3. la chimiothĂ©rapie, oĂč lâon administre par voie intraveineuse des mĂ©dicaments dits « cytotoxiques » qui vont tuer les cellules tumorales. Cette thĂ©rapie est Ă©videmment redoutĂ©e en raison des terribles effets secondaires.
La stratĂ©gie la plus communĂ©ment adoptĂ©e aujourdâhui est de combiner ces trois traitements : aprĂšs opĂ©ration, la personne malade est soumis Ă des sĂ©ances de radiothĂ©rapie sur les zones Ă risque. La chimiothĂ©rapie vient ensuite aider Ă Ă©radiquer dĂ©fnitivement toutes les cellules cancĂ©reuses qui pourraient encore circuler dans le sang. Lâun des points faibles de ces thĂ©rapies, en plus dâĂȘtre invasives, câest quâelles ne peuvent ĂȘtre adaptĂ©es Ă chaque individu â contrairement aux thĂ©rapies utilisant lâARN messager.
DUn atout de taille
forme grave ou gĂ©nĂ©ralisĂ©e, la thĂ©rapie Ă base dâARN messager nâest pas suffsante. LĂ oĂč elle dĂ©montre en revanche toute son effcacitĂ©, câest pour les mĂ©lanomes, parce quâils sont â au mĂȘme titre que le cancer du rein â directement liĂ©s au systĂšme immunitaire. Alors que dâautres cancers, comme celui du poumon ou du sein, interagissent moins avec le systĂšme immunitaire : dans ces cas-lĂ , un vaccin ARNm va ĂȘtre moins effcace pour empĂȘcher la formation de cellules cancĂ©reuses. »
Directeur et mĂ©decin-chef du prestigieux Tumorzentrum Ă Hambourg, Dirk Arnold est considĂ©rĂ© comme lâun des plus grands spĂ©cialistes du cancer en Allemagne. Il dĂ©crit la complexitĂ© de cette maladie en quelques mots : « Les tumeurs sont des systĂšmes intelligents qui apprennent trĂšs vite, et câest cette capacitĂ© Ă sâadapter et Ă muter rapidement qui leur permet de rĂ©sister non seulement au systĂšme immunitaire du corps humain mais Ă©galement aux traitements extĂ©rieurs. »
Il existe actuellement trois voies classiques pour le traitement du cancer de la peau :
1. lâintervention chirurgicale, avec ablation de la tumeur ;
VoilĂ qui intĂ©resse de plus en plus la recherche mĂ©dicale, parce que cela bouleverse lâapproche thĂ©rapeutique : en effet, les trois voies classiques ont comme point commun de constituer des « agressions » venant de lâextĂ©rieur, face auxquelles lâorganisme malade reste dans un Ă©tat de passivitĂ©. Alors que la thĂ©rapie Ă lâARN messager utilise activement le systĂšme immunitaire la personne malade : elle intervient aprĂšs lâablation de la tumeur sous forme dâun sĂ©rum « individuel » Ă©laborĂ© Ă partir de cellules cancĂ©reuses prĂ©levĂ©es sur cette personne.
Cette substance nâa pas le mĂȘme rĂŽle quâun vaccin classique : il ne sâagit pas de protĂ©ger des personnes saines potentiellement Ă risque, mais plutĂŽt de prĂ©venir les rĂ©cidives.
Autre bĂ©mol, lâARN messager ne convient pas Ă tous les types de cancer, comme lâexplique Dirk Arnold : « Pour de nombreux types de cancer, notamment ceux prĂ©sentant une
Quel que soit lâĂ©tat actuel de la recherche autour de lâARNm, cette technologie est promise Ă un bel avenir : les Ă©tudes rĂ©alisĂ©es sur des patient·e·s atteint·e·s dâun cancer de la peau, Ă un stade trop avancĂ© pour pouvoir ĂȘtre opĂ©ré·e·s, ont livrĂ© des rĂ©sultats positifs â sans augmentation, ou alors minime, des effets indĂ©sirables. DiffĂ©rents laboratoires dans le monde travaillent sur dâautres terrains dâaction de lâARNm, en Ă©valuant comment il pourrait intervenir pour dâautres cancers. LâĂ©quipe de Dirk Arnold dirige actuellement une Ă©tude rĂ©alisĂ©e sur 200 patient·e·s souffrant dâun cancer de lâintestin, pour voir dans quelle mesure un vaccin ARNm aiderait Ă empĂȘcher les rĂ©cidives une fois la tumeur enlevĂ©e. Certes, il faudra attendre quelques annĂ©es pour en connaĂźtre les conclusions, et quelques autres encore pour voir arriver sur le marchĂ© des « vaccins anti-cancer » mais une chose est sĂ»re : la mĂ©decine actuelle nâa pas fni de faire reculer les frontiĂšres de lâimpossible. Une raison de plus de croire en lâavenir.
Au cours des cinq prochaines années, le marché de la réalité virtuelle en médecine devrait croßtre de 35 % par an.
Sur Youtube, Philippe Cattin, directeur du DĂ©partement dâingĂ©nierie biomĂ©dicale de lâUniversitĂ© de BĂąle, montre Ă quoi cela ressemble en pratique.
Des patient· e ·s dont le cancer de la peau Ă©tait si grave quâil ne pouvait plus ĂȘtre opĂ©rĂ© ont dĂ©jĂ Ă©tĂ© traitĂ©s avec succĂšs par
LâĂ©nergie solaire du Tessin, des bĂątiments intelligents, de la lumiĂšre de GenĂšve Ă Delhi...
Ces six personnalités rendent notre électricité propre.
Cette visionnaire de 27 ans nâen dĂ©mord pas : la technologie peut changer le monde. « Je ne me laisse pas gouverner par la peur comme la plupart de mes contemporain·e·s. Jâessaie de me focaliser sur ce que je peux faire pour construire un avenir meilleur sur cette planĂšte », explique Greta Ziegler.
Elle nâa pas 30 ans mais dĂ©jĂ un parcours professionnel trĂšs impressionnant. Cheffe de projet, elle encadre diffĂ©rentes start-ups issues de la Green Tech Valley, ce nouvel Eldorado technologique autrichien pour la protection climatique et lâĂ©conomie circulaire
Nom
Greta Ziegler
Fonction
Cheffe de projet
Projet
La Green Tech Valley soutient les innovations vertes en Autriche. Plus de 300 pionnier·Úre·s mondiaux de la Green Tech y poursuivent leurs travaux de recherche.
basĂ© en Styrie et en Carinthie. « Si je mâimplique dans quelque chose, il faut que ça ait du sens, poursuitelle. Jâentends par lĂ un travail aux ramifications plus larges tout en gardant une ligne de conduite claire pour aboutir Ă des changements positifs. Ăa doit rester un plaisir, Ă©videmment. »
AprĂšs des Ă©tudes en sciences des systĂšmes environnementaux, Ziegler soumet son propre concept Ă lâAcademic Startup Accelerator du GrĂŒndungsgarage de Graz (le garage des crĂ©ations, programme de soutien Ă la crĂ©ation de startups). Un enthousiasme de la premiĂšre heure pour cette communautĂ© qui ne lâa plus quittĂ©e depuis. Son rĂŽle au sein du groupe de la Green Tech Valley ? Connecter start-ups vertes, entreprises Ă©tablies et grands investisseurs pour stimuler la croissance de ces jeunes pousses et donner ainsi davantage de visibilitĂ© Ă leur succĂšs.
Quâil soit Ă©cologique ou social, le dĂ©veloppement durable est au cĆur de presque toutes les prĂ©occupations de Greta Ziegler. « Pour moi, câĂ©tait lâĂ©vidence mĂȘme dĂšs le dĂ©part: je devais travailler dans une entreprise qui soit favorable au dĂ©veloppement durable et qui participe activement Ă son essor. » Ă ce titre, les chiffres de la Green Tech Valley sont Ă©loquents : plus de trois cents entreprises et instituts de recherche en sont membres, dont un vingtaine a dĂ©jĂ rejoint le cercle trĂšs fermĂ© des leaders technologiques mondiaux. Plus de 2 300 chercheurs et chercheuses travaillent sur les solutions vertes de demain, six cents produits sont dâores et dĂ©jĂ sur le marchĂ©. Dâune centrale thermique de recyclage inĂ©dite alimentant lâusine de papier Norske Skog aux plus grandes installations solaires thermiques et photovoltaĂŻques dâAutriche, le tournant Ă©nergĂ©tique est devenu une rĂ©alitĂ©.
« Oubliez la Silicon Valley, le futur est ici dans la Green Tech Valley ! », proclame, non sans malice, Greta Ziegler.
Dans un monde oĂč beaucoup rĂ©sistent au changement, Mauro Caccivio penche pour les dĂ©cisions audacieuses et nâhĂ©site pas Ă se lancer dans lâinconnu.
LâingĂ©nieur en Ă©lectronique de 51 ans a dĂ©jĂ pas mal roulĂ© sa bosse, tant dans le domaine de la conception de cartes Ă©lectroniques pour lâindustrie spatiale que dans le dĂ©veloppement de panneaux solaires pour les satellites et les missions scientifiques dans lâespace.
En 2008, retour sur Terre pour rejoindre les rangs dâune start-up spĂ©cialisĂ©e dans la production dâun nouveau type de panneaux solaire Ă couche mince avant dâaccepter, quatre ans plus tard, un poste de chercheur et testeur au sein de lâInstitute for Applied Sustainability to the Built Environment de la Supsi, Haute Ă©cole spĂ©cialisĂ©e de Suisse italienne.
de lâĂ©lectricitĂ© aujourdâhui. De lĂ Ă conclure que les panneaux solaires sont faits pour durer, il nây a quâun pas !
Loin de cantonner son engagement au domaine strictement professionnel, Caccivio a dĂ©cidĂ© de lâĂ©tendre Ă sa vie quotidienne. Sa compagne et lui ont dĂ©libĂ©rĂ©ment optĂ© pour un logement prĂšs de la gare afin de privilĂ©gier le vĂ©lo et les transports en commun. Ils achĂštent essentiellement des fruits et lĂ©gumes de saison et des produits locaux, et Caccivio essaie de rĂ©duire chaque annĂ©e un peu plus sa consommation en viande, mĂȘme sâil a du mal Ă tirer un trait dĂ©finitif sur le fameux bifteck Ă la florentine de sa Toscane natale.
Ăduquer les gĂ©nĂ©rations
Nom
Mauro Caccivio
Fonction
Cofondateur & CEO
Projet
Anywhere.Solar transforme tous types de surfaces en centrales solaires grĂące Ă des installations simples et pratiques surplombant parkings et champs agricoles.
Mauro Caccivio dirige dĂ©sormais le laboratoire photovoltaĂŻque (PVLab) de la SUPSI, le seul dans son genre officiellement reconnu en Suisse. Il pilote des projets pour amĂ©liorer la fiabilitĂ© et la qualitĂ© des panneaux solaires par le biais de tests accĂ©lĂ©rĂ©s, de suivi sur le long terme et dâune charte de caractĂ©risation prĂ©cise des technologies standard et innovantes.
Son Ă©quipe peut se vanter dâavoir créé, dĂšs 1982, la premiĂšre installation photovoltaĂŻque en Europe reliĂ©e au rĂ©seau Ă©lectrique. Et celle-ci produit encore
Son plus grand souhait pour lâavenir ? La mise en place dâune transition durable en faveur des Ă©nergies renouvelables et une production dâĂ©nergie dĂ©centralisĂ©e pour aboutir Ă un rĂ©seau Ă©lectrique synonyme de durabilitĂ© et de dĂ©mocratie. Il rĂȘve que la rĂ©volution des smart grids, ou rĂ©seaux Ă©lectriques intelligents, soit aussi rapide que celle des tĂ©lĂ©communications mobiles et quâelle connaisse le mĂȘme succĂšs. Une attitude aussi positive quâoptimiste qui se reflĂšte bien dans ses travaux destinĂ©s Ă amĂ©liorer lâavenir de notre planĂšte grĂące Ă des technologies innovantes et des dĂ©cisions audacieuses.
Caccivio conclut : « Je pense que la technologie peut nous sauver. Mais pour cela, il faut avoir la bonne approche. Car si lâunique objectif est de faire toujours plus de profits, on court tout droit Ă notre perte. Pour rendre le monde meilleur, il faut injecter un peu plus dâhumanitĂ© dans nos technologies. »
« Rendre lâĂ©lectricitĂ© dĂ©mocratique et durable grĂące Ă une Ă©nergie renouvelable et dĂ©centralisĂ©e. »
Fabiana Lisco est ingĂ©nieure chez 3S Swiss Solar Solutions, une entreprise suisse spĂ©cialisĂ©e dans le dĂ©veloppement et la production de matĂ©riaux de construction Ă©metteurs dâĂ©nergie solaire avec de lâĂ©lectricitĂ© sans COÂČ. Câest dĂšs lâenfance que cette femme aujourdâhui ĂągĂ©e de 39 ans a pris conscience de son environnement : « Pour moi, il Ă©tait normal que mes grandsmĂšres italiennes nous prĂ©parent des repas sains, quâelles se fournissent en fruits et lĂ©gumes frais sur les marchĂ©s locaux et jamais, au grand jamais, elles nâauraient achetĂ© dâaliments transformĂ©s. »
Elle estime quâil faudrait enseigner ce respect de lâenvironnement aux enfants dĂšs leur plus jeune Ăąge : « Leur montrer la magie de planter des lĂ©gumes, de les laisser suivre leur cycle naturel et dâattendre patiemment la bonne saison pour rĂ©colter leur fruit prĂ©fĂ©rĂ©. »
Une patience et une persĂ©vĂ©rance dont Fabiana Lisco nâa pas manquĂ© non plus au cours de sa carriĂšre : un master en chimie dĂ©crochĂ© Ă Bari, un second master en matĂ©riaux et Ă©nergie renouvelable Ă lâuniversitĂ© de Novare, puis un doctorat au Centre for Renewable Energy Systems de lâuniversitĂ© britannique de Loughborough, avant de rejoindre 3S Swiss Solar Solutions en 2022.
« VoilĂ plus de vingt ans que nous dĂ©veloppons et produisons des systĂšmes photovoltaĂŻques, souligne Fabiana Lisco. « Nos modules solaires ne sont pas montĂ©s sur le toit, mais directement intĂ©grĂ©s dans le bĂątiment â le toit, la façade ou la balustrade. Ils produisent ainsi de lâĂ©lectricitĂ© propre sans Ă©mettre de COÂČ et sans devoir Ă©tanchĂ©ifier des surfaces supplĂ©mentaires. » Et pourquoi est-ce si important ? « Les bĂątiments sont responsables de 40 % des Ă©missions mondiales de COÂČ. Environ 15 % sont causĂ©es par la production de matĂ©riaux de construction et 25 % proviennent de la climatisation et du chauffage des bĂątiments, y compris en Suisse. »
Lisco travaille au sein dâune Ă©quipe dâingĂ©nieur·e·s chargĂ©e de la conception, des processus, des lignes et systĂšmes de production. En plus de la crĂ©ation de panneaux solaires, la sĂ©lection de fournisseur·euse·s agrĂ©gé·e·s et lâorganisation de tests pour Ă©tudier la fiabilitĂ© des produits, elle sâoccupe Ă©galement des essais de matĂ©riaux, de lâanalyse des don-
nées et du développement des processus de production.
« Je suis ravie de faire partie de cette Ă©quipe : ensemble, nous rĂ©flĂ©chissons et Ă©changeons des idĂ©es en permanence, explique Lisco. Je suis fermement convaincue que le succĂšs dĂ©pend de lâesprit dâĂ©quipe. Depuis mon enfance, je rĂȘve de faire quelque chose dâimportant pour notre sociĂ©tĂ©. » LâingĂ©nieure conclut :
« On devrait toutes se demander comment améliorer nos décisions quotidiennes en termes de durabilité pour rendre le monde meilleur. »
Nom
Fabiana Lisco
Fonction
Ingénieure chez 3S
Swiss Solar Solutions
Projet
SystÚme photovoltaïque intégré aux bùtiments
Energie Zukunft Schweiz (EZS) veut accĂ©lĂ©rer le tournant Ă©nergĂ©tique en Europe. Lâentreprise suisse, titulaire de fliales en Italie, Roumanie, Allemagne et Espagne, compte dĂ©sormais prĂšs de 200 collaborateurs et collaboratrices. Leur mission ? Aider les entreprises de distribution dâĂ©nergie, le secteur immobilier et les pouvoirs publics Ă utiliser les Ă©nergies renouvelables et Ă amĂ©liorer lâeffcacitĂ© Ă©nergĂ©tique.
La dream team
Sabine Marbet est responsable du secteur dâactivitĂ© EffcacitĂ© Ă©nergĂ©tique, et vice-prĂ©sidente du directorat suisse. Elle sâoccupe de stratĂ©gies climatiques et Ă©nergĂ©tiques ainsi que de la planifcation et de la mise en Ćuvre de mesures dâeffcacitĂ© dans la construction. « Et je suis aussi responsable culturelle chez EZS, ajoute Marbet. Ma devise : People frst » Sa collĂšgue Lidia Gallego est cheffe dâĂ©quipe pour les projets photovoltaĂŻques et sâoccupe des stratĂ©gies climatiques et Ă©nergĂ©tiques, ainsi que de la planifcation et la mise en Ćuvre de mesures dâeffcacitĂ© dans la construction. « Je consacre beaucoup de temps et dâĂ©nergie Ă mon travail. Donc pour moi, câest important que celui-ci soit aussi utile quâagrĂ©able. »
Si, pour lâune comme pour lâautre, le chemin vers EZS nâĂ©tait
Noms
Sabine Marbet (en haut), Lidia Gallego
Fonctions
Responsable de lâefficacitĂ© Ă©nergĂ©tique ; Responsable des projets photovoltaĂŻques.
Projet
Energie Zukunft Schweiz aide les entreprises à accélérer le tournant énergétique.
pas tout tracĂ©, il correspond en tous points Ă leurs ambitions. Marbet a Ă©tudiĂ© les sciences de lâenvironnement Ă lâEPF de Zurich et sâest particuliĂšrement intĂ©ressĂ©e aux processus atmosphĂ©riques Ă une Ă©poque oĂč la thĂ©matique du trou dans la couche dâozone Ă©tait trĂšs actuelle. « Jâai ensuite travaillĂ© trois ans comme mĂ©tĂ©orologue et prĂ©sentatrice chez MeteoNews avant de rejoindre Energie Zukunft Schweiz en 2018. JâĂ©tais la seconde employĂ©e, jâai donc pu accompagner pas Ă pas sa genĂšse. Quand jâai choisi mes Ă©tudes, le dĂ©veloppement durable Ă©tait dĂ©jĂ un sujet essentiel pour moi. Je suis pragmatique, câest lâimpact des choses qui mâintĂ©resse : pas seulement parler mais agir, apporter ma pierre Ă lâĂ©difce. »
Le tournant, câest maintenant Gallego obtient son master avec spĂ©cialisation en Ă©nergie solaire Ă la Haute Ă©cole des sciences appliquĂ©es de Zurich (ZHAW). Elle travaille ensuite pour des entreprises solaires en ThaĂŻlande et en Suisse en tant que dĂ©veloppeuse de projets avant de rejoindre lâĂ©quipe dâEnergie Zukunft Schweiz en 2018.
« JâespĂšre que le grand changement vers une sociĂ©tĂ© durable se produira dans les annĂ©es Ă venir, parce quâil nây pas dâautre alternative, tout simplement », rĂ©sume Lidia Gallego.
« Ce qui mâintĂ©resse câest lâimpact des choses. Parler, câest bien, agir, câest mieux. »
Chaque Ă©tĂ©, nos parents nous emmenaient, mon frĂšre et moi, dans le village de nos ancĂȘtres en Inde. Mais il nây avait pas dâĂ©lectricitĂ©, raconte Govinda Upadhyay. Et comme le gouvernement nâĂ©tait pas fiable, il a fallu beaucoup de temps pour que le village en ait. Câest ce qui a Ă©veillĂ© mon intĂ©rĂȘt pour les solutions Ă©nergĂ©tiques dĂ©centralisĂ©es. Des solutions qui ne nĂ©cessitent pas dâintervention extĂ©rieure et qui permettent nĂ©anmoins un accĂšs sĂ»r et propre Ă lâĂ©lectricitĂ©. »
Govinda Upadhyay est le fondateur et le PDG de SmartHelio. Cette entreprise de logiciels améliore les performances et la longévité des installations solaires.
« Nous voulons ainsi jouer notre rĂŽle dans la rĂ©alisation des objectifs en matiĂšre dâĂ©nergie propre, dans la rĂ©duction des dĂ©chets Ă©lectriques et dans lâaccĂ©lĂ©ration de la transition Ă©nergĂ©tique, explique-t-il. Nous pensons que lâĂ©nergie propre est une solution importante pour rĂ©duire drastiquement les Ă©missions de carbone dans notre sociĂ©tĂ©. »
ĂgĂ© aujourdâhui de 34 ans, il a fondĂ© sa deuxiĂšme entreprise, SmartHelio, en 2019. La premiĂšre, LEDSafari, est spĂ©cialisĂ©e dans lâĂ©ducation des enfants des
Nom
Govinda Upadhyay
Fonction
Fondateur & CEO de SmartHelio & LEDSafari
Projet
SmartHelio améliore la performance et la longévité des installations solaires ; LEDSafari enseigne la durabilité aux enfants des pays émergents.
pays Ă©mergents au dĂ©veloppement durable et Ă lâĂ©nergie propre. « Jâai alors constatĂ© que les installations solaires ne fonctionnaient souvent pas comme elles le devraient pour couvrir les besoins Ă©nergĂ©tiques. » Câest ainsi quâil a eu lâidĂ©e de dĂ©velopper une solution qui aiderait Ă dĂ©tecter Ă distance les dĂ©fauts de performance et les pannes des installations Ă©nergĂ©tiques, et Ă y remĂ©dier rapidement.
Ce chercheur en climatologie et en énergie a fait ses études en SuÚde, aux Pays-Bas et en Inde. En 2016, Upadhyay a été classé dans la liste Forbes des trente
meilleurs pour son travail dans le domaine de lâĂ©nergie durable. « La conscience climatique est au cĆur de mon activitĂ© et de mon style de vie. Jâessaie de faire attention aux petites habitudes qui peuvent avoir un impact important, nourriture, transport, etc. Je nâai pas de voiture, par exemple. » En Europe, Upadhyay se dĂ©place le plus souvent en train. Il est vĂ©gĂ©tarien et prĂ©fĂšre acheter des aliments produits localement.
Avec courage et fermeté
« Jâai grandi Ă Delhi et jâai vu la ville prospĂ©rer, mais aussi devenir polluĂ©e. Je vois lâimpact sur la santĂ© et la vie des gens, dĂ©clare Upadhyay. Il faut apprendre Ă nos enfants Ă ĂȘtre conscients des risques, leur enseigner quâils et elles ont le pouvoir dâagir et de changer le statu quo. Nous ne devons pas nous rĂ©signer Ă une situation injuste et nous pouvons nous battre pour nos convictions afin de servir les gens. Je veux que mon enfant et tous les autres vivent dans une sociĂ©tĂ© durable oĂč lâair est propre. Je veux quâil y ait de lâĂ©nergie propre partout. Câest la mission de SmartHelio : accĂ©lĂ©rer lâintroduction de lâĂ©nergie propre dans la sociĂ©tĂ©. JâespĂšre que nous pourrons aller vite, et par lĂ jâentends vraiment vite. »
« La conscience climatique est au cĆur de mon activitĂ© et de mon mode de vie. »
Il se jette dans lâocĂ©an depuis les falaises, part Ă lâassaut des montagnes et parcourt les rues de GenĂšve Ă vĂ©lo. Aventurier passionnĂ©, MaĂ«l Perret sâest fxĂ© un objectif de taille : insuffer un peu plus de durabilitĂ© dans le monde de lâimmobilier. IngĂ©nieur en Ă©nergie spĂ©cialisĂ© dans lâIoT (Internet of Things) et les bĂątiments intelligents, il sâest concentrĂ© sur la gestion de donnĂ©es pour garantir lâeffcacitĂ© Ă©nergĂ©tique des bĂątiments.
E-nno, sa société fondée en 2018, a développé une technologie capable de décoder les bùtiments
Nom
Maël Perret
Fonction
Directeur gĂ©nĂ©ral et fondateur dâE-nno
Projet
E-nno transforme les bĂątiments en bĂątiments intelligents grĂące Ă des Ă©conomies dâĂ©nergie pouvant atteindre 35 %.
pour fournir une multitude de donnĂ©es sur leur fonctionnement. Cette solution permet dâidentifer en douze semaines toutes les Ă©conomies dâĂ©nergie potentielles et de rĂ©duire automatiquement la consommation Ă©nergĂ©tique du bĂątiment jusquâĂ 35 % sans rien changer au bien-ĂȘtre des occupant·e·s. « Pour moi, la durabilitĂ© nâest pas quâun mot Ă la mode, câest un engagement au quotidien, dĂ©clare Perret. Je veux contribuer Ă lâavĂšnement dâun monde meilleur et je suis convaincu que le secteur immobilier a un rĂŽle important Ă jouer. »
Pour lui, il ne fait aucun doute que les technologies destinĂ©es Ă rĂ©duire lâempreinte Ă©cologique vont continuer de se dĂ©velopper Ă lâavenir. « Câest bien dâinclure les besoins de sĂ©curitĂ© dans la pyramide de Maslow, ce serait encore mieux dây ajouter les questions environnementales. »
Perret gĂšre son entreprise selon un modĂšle durable, sollicitant les boĂźtes locales pour le dĂ©veloppement et lâapplication de sa technologie tout en veillant Ă lâĂ©nergie et aux ressources mobilisĂ©es. BaptisĂ© pay-as-you-save, son modĂšle commercial se base sur une Ă©conomie dâĂ©nergie autofnancĂ©e, ce qui permet aux professionnels de lâimmobilier de prendre les bonnes dĂ©cisions concernant leurs futurs investissements en Ă©nergie.
Pour les gĂ©nĂ©rations Ă venir Perret est trĂšs engagĂ© en faveur dâune intĂ©gration de thĂšmes tels que la crise environnementale et lâĂ©volution technologique dans les programmes scolaires. « Je veux que les nouvelles gĂ©nĂ©rations soient pleinement conscientes du problĂšme et Ă©quipĂ©es des outils nĂ©cessaires au changement. »
Ă 35 ans, MaĂ«l Perret fait fgure de prĂ©curseur dans le secteur de lâimmobilier. « On ne peut pas rendre le monde meilleur si chacun·e ne prend pas sa part de responsabilitĂ©. La mienne, câest de faire des bĂątiments plus effcaces en termes dâĂ©nergie tout en prĂ©servant lâenvironnement. Jâai hĂąte de me lancer dans de nouvelles aventures. »
Deux Autrichiens travaillent en labo sur un prototype de rĂ©acteur sans danger â qui pourrait ĂȘtre alimentĂ© par du thorium. Câest bien plus quâune utopie, encore Ă lâĂ©tat de projet.
Entrepreneur
nucléaire et ami des animaux : Florian Wagner (ci-contre) vit à Graz avec 21 chats et 3 chiens, et élÚve des crapauds pendant son temps libre. Ici en photo : son chat ragdoll « Dior ».
30 g de thorium, un métal faiblement radioactif (ici sous forme de poudre) devraient suffire à alimenter 360 foyers en électricité, en toute sécurité pendant un an.
Le « bon » nucléaire, est-ce possible ?
LâĂ©nergie nuclĂ©aire â rien que ce mot dĂ©clenche automatiquement une rĂ©action de rejet chez beaucoup. On pense Ă Hiroshima, Tchernobyl et Fukushima, Ă la guerre froide et aux missiles qui sâabattent autour des centrales nuclĂ©aires ukrainiennes. Et aux flms de Bond, dans lesquels Dr. No et Blofeld menacent le monde avec des armes radioactives⊠Et voilĂ que notre duo entre en scĂšne !
Il est composĂ© dâun entrepreneur dĂ©brouillard qui vit dans une villa blanche en forme de vaisseau extraterrestre Ă fanc de colline avec 21 chats et trois chiens et qui
LĂ©lĂšve des crapauds pendant son temps libre. Et dâun ex-activiste de Greenpeace et physicien nuclĂ©aire. Ensemble, ils veulent sauver le monde du changement climatique â et ce, grĂące Ă du « bon » nuclĂ©aire. Lâentrepreneur sâappelle Florian Wagner, et a 43 ans. Le physicien sâappelle Mario MĂŒller, et a onze ans de plus.
Au moment de leur rencontre, Florian Wagner venait dâemmĂ©nager avec sa nouvelle start-up Emerald Horizon dans la communautĂ© Greentech de la Science Tower de Graz. Homme imposant au parler Ă©nergique, Wagner avait fondĂ© avec des amis la sociĂ©tĂ© dâinvestissement QBasis Invest pendant ses Ă©tudes
Depuis 1962, il existe un rĂ©acteur expĂ©rimental prĂšs du parc du Prater, Ă Vienne. Mario MĂŒller (Ă gauche) et Florian Wagner lâutilisent pour la recherche.
de mĂ©decine aprĂšs lâĂ©clatement de la bulle dotcom en 2002 ; il lâavait dĂ©veloppĂ©e pour en faire une place de marchĂ© de plusieurs millions et Ă©tait Ă la recherche de placements dans le domaine des Ă©nergies alternatives. Une seule chose lui manquait : le savoir-faire scientifque.
Câest alors que MĂŒller est arrivĂ©. DĂ©jĂ passionnĂ© dâĂ©lectrotechnique au lycĂ©e, il a Ă©tudiĂ© la physique, sâest engagĂ© pour Greenpeace, a toujours votĂ© vert et a fait de la recherche pendant quelques annĂ©es au CERN, lâOrganisation europĂ©enne pour la recherche nuclĂ©aire prĂšs de GenĂšve. Câest lĂ quâil Ă©tait entrĂ© en contact avec Carlo Rubbia, laurĂ©at du prix Nobel et inventeur, dans les annĂ©es 1980, dâun concept utopique dâaccĂ©lĂ©rateur de particules pour les centrales nuclĂ©aires. Cette idĂ©e deviendra plus tard une piĂšce importante du puzzle pour Emerald Horizon.
Florian Wagner venait de faire des recherches sur les rĂ©acteurs de quatriĂšme gĂ©nĂ©ration et butait sur des approches de valorisation des dĂ©chets nuclĂ©aires : « Chaque approche en soi prĂ©sentait des solutions partielles prometteuses, mais nâĂ©tait pas satisfaisante dans son ensemble », explique-t-il. Câest alors quâil a dĂ©cidĂ©, avec Mario MĂŒller, de rĂ©unir les meilleures solutions partielles en un concept global. Best of the past, selon MĂŒller, qui sâest joint au projet en tant que directeur de la recherche et du dĂ©veloppement. En 2019 la start-up a dĂ©marrĂ©, en 2020 le travail sur un modĂšle numĂ©rique a commencĂ©, en 2021 lâentreprise a lancĂ© la recherche fondamentale en laboratoire. Le rĂ©sultat est lâ « ADES Amplifer » : un amplifcateur qui peut aussi produire
sa propre Ă©nergie en tant que centrale Ă©lectrique. Avec une puissance allant jusquâĂ 25 MW, un module pourrait alimenter de 5 000 Ă 10 000 foyers en Ă©lectricitĂ© et en chaleur. Une centrale souterraine au thorium et Ă sels fondus, petite et modulaire, sans risque de fusion du cĆur du rĂ©acteur nuclĂ©aire, utilisant le thorium faiblement radioactif comme source dâĂ©nergie et dotĂ©e dâun petit accĂ©lĂ©rateur de particules rĂ©volutionnaire, dont la technologie est utilisĂ©e dans la recherche mĂ©dicale pour lutter contre le cancer. Des composants de
MĂŒller montre une maquette du rĂ©acteur ADES. Le prototype de la grande version devrait ĂȘtre mis Ă lâessai avant la fin de lâannĂ©e 2023.
lâamplifcateur sont dĂ©veloppĂ©s et testĂ©s au cĂ©lĂšbre institut Jozef Stefan de Ljubljana, en SlovĂ©nie, et le prototype est en cours de construction.
Sur simple pression dâun bouton Dans la rĂ©alitĂ©, lâamplifcateur ADES devrait ĂȘtre assez peu spectaculaire : une petite boĂźte grise pour la commande, Ă cĂŽtĂ© de grands boĂźtiers pour la production dâĂ©lectricitĂ© et dâhydrogĂšne. La fssion nuclĂ©aire proprement dite se dĂ©roule cachĂ©e, sous terre, dans un conteneur fermĂ© et Ă©tanche. La principale diffĂ©rence dâADES par rapport Ă une centrale nuclĂ©aire classique rĂ©side dans le fait que « les rĂ©acteurs des centrales nuclĂ©aires classiques sont toujours dangereux. Cela signife quâil faut maĂźtriser le dĂ©veloppement massif dâĂ©nergie et faire des efforts pour que ça ne surchauffe pas et nâexplose pas comme une bombe atomique", explique MĂŒller. ADES fonctionne « de maniĂšre plus sĂ»re, car une fusion du cĆur du rĂ©acteur, et donc une catastrophe, est impossible. On peut lâallumer et lâĂ©teindre de lâextĂ©rieur. Et en cas dâun hypothĂ©tique incident, il sâarrĂȘterait de luimĂȘme plus vite quâen un millioniĂšme de seconde, explique Wagner. GrĂące Ă lâaccĂ©lĂ©rateur de particules, on peut contrĂŽler avec prĂ©cision le dĂ©veloppement de la chaleur et sans devoir introduire au prĂ©alable ni uranium ni plutonium ». Ă vrai dire, le terme de rĂ©acteur ne convient pas non plus Ă lâADES, « car nous le pilotons de
Contrairement aux centrales, il ne reste pas de transuraniens hautement radioactifs, comme le plutonium, Ă partir duquel fabriquer des bombes atomiques.
lâextĂ©rieur â peut-ĂȘtre devrions-nous lâappeler module de production contrĂŽlĂ©e dâĂ©nergie nuclĂ©aire », rĂ©fĂ©chit Wagner Ă haute voix.
Le fonctionnement du conteneur est le suivant : lâaccĂ©lĂ©rateur de particules est activĂ© de lâextĂ©rieur par la commande et envoie un faisceau de particules ciblĂ© dans un anneau rempli de thorium et de sels fondus. Le thorium faiblement radioactif est transformĂ© en uranium 233 et un Ă©tat intermĂ©diaire est créé, ce qui permet de « rĂ©colter » dâĂ©normes quantitĂ©s dâĂ©nergie et de chaleur jusquâĂ 900 °C. Contrairement aux centrales nuclĂ©aires traditionnelles, il ne reste pas de transuraniens hautement radioactifs comme le plutonium, Ă partir duquel on peut fabriquer des bombes atomiques.
LâidĂ©e nâest pas tout Ă fait nouvelle. Des rĂ©acteurs au thorium et Ă sels fondus ont dĂ©jĂ Ă©tĂ© dĂ©veloppĂ©s dans les annĂ©es 1960 et ont Ă©chouĂ© car le risque de corrosion des cuves par les sels fondus Ă©tait trop Ă©levĂ©. Câest pourquoi, dans lâADES, les sels fondus sont maintenus en mouvement continu dans un anneau par une pompe de circulation afn quâils ne se dĂ©posent pas. Lâanneau est composĂ© de cĂ©ramique en carbure de silicium rĂ©sistant Ă la corrosion et est entourĂ© dâune enveloppe de protection. Si les sels fondus devaient malgrĂ© tout sâĂ©chapper, ils sâĂ©couleraient dans un bac et se solidiferaient immĂ©diatement au contact de lâair. « Le module ADES fnal nâaura pas besoin dâune maintenance maximale », explique MĂŒller. Un logiciel appelĂ© Safety Security Environment doit garantir le contrĂŽle en toute sĂ©curitĂ©.
LâĂ©quipe dâEmerald Horizon veut construire un rĂ©acteur Ă sels fondus made in Austria, appelĂ© module ADES.
AprĂšs la mise en marche, lâaccĂ©lĂ©rateur de particules 1 est activĂ© : il bombarde lâanneau (loop 2 ) rempli de thorium et de sels avec des protons, et produit des neutrons de haute Ă©nergie. Une unitĂ© de circulation 3 maintient les sels Ă lâĂ©tat liquide en mouvement dans lâanneau. Le thorium transmute et se dĂ©sintĂšgre,
libĂ©rant ainsi de lâĂ©nergie. La chaleur obtenue est transportĂ©e par des Ă©changeurs de chaleur 4 vers deux conteneurs situĂ©s Ă lâextĂ©rieur ( 5 et 6 ), oĂč une turbine Ă vapeur et un gĂ©nĂ©rateur produisent de lâĂ©lectricitĂ© ou de lâhydrogĂšne. Une partie de lâĂ©lectricitĂ© peut ĂȘtre rĂ©injectĂ©e : lâamplificateur devient ainsi une centrale Ă©lectrique. ADES peut ĂȘtre Ă©teint et allumĂ© via la fonction On/Off, et sâĂ©teint automatiquement en cas de panne.
FFini ce qui dérange et qui irradie ?
Nikolaus MĂŒllner, chercheur Ă lâInstitut des sciences du risque et de la sĂ©curitĂ© de lâUniversitĂ© des ressources naturelles de Vienne, est sceptique. Le chercheur a notamment rĂ©alisĂ© des analyses de sĂ©curitĂ© pour la centrale nuclĂ©aire argentine dâAtucha et des rapports de recherche sur lâĂ©limination des dĂ©chets nuclĂ©aires. Les startups technologiques comme Emerald Horizon Ă©mergent au niveau international. Personne ne sait comment
Ce mĂ©tal blanc-gris a Ă©tĂ© dĂ©couvert en NorvĂšge en 1828 et nâest que faiblement radioactif. Il doit son nom au dieu nordique du tonnerre, Thor. Selon les estimations de lâAgence internationale de lâĂ©nergie atomique, basĂ©e Ă Vienne, il existe entre six et onze millions de tonnes de thorium dans le monde. Le gisement en Autriche serait
compris entre 25 000 et 100 000 tonnes, ce qui en ferait le plus grand dâEurope. 2,6 kg de thorium dans un rĂ©acteur ADES permettrait dâalimenter 10 000 foyers en Ă©nergie pendant un an. MathĂ©matiquement parlant, les gisements existants permettraient dâalimenter tous les foyers de lâUE pendant des centaines dâannĂ©es.
Directeur de recherche chez Emerald Horizon, Mario MĂŒller a construit lâanneau du rĂ©acteur ADES Ă Graz, et lâinjecteur de neutrinos Ă Vienne.
une nouvelle technologie rĂ©agit rĂ©ellement dans la pratique. « Tout peut fonctionner en thĂ©orie et en laboratoire, mais en exploitation constante, des perturbations imprĂ©vues peuvent survenir », fait remarquer MĂŒllner.
Florian Wagner ne se laisse pas freiner dans son enthousiasme.
« Nous ne construisons pas une grande installation dont lâissue est incertaine, mais une machine qui peut ĂȘtre testĂ©e avec prĂ©cision, adaptĂ©e sans complication et menĂ©e Ă la production en sĂ©rie. » Pour une sĂ©curitĂ© et un contrĂŽle optimaux, les modules resteront la propriĂ©tĂ© dâEmerald Horizon, et les client·e·s ne paieront que les frais dâachat dâĂ©nergie de 12 cents par kilowattheure via un contrat : « Comme nous le faisons dĂ©jĂ avec nos installations photovoltaĂŻques », explique Wagner.
Les Atomic-Twins autrichiens sont mĂȘme si optimistes quâils ont avancĂ© Ă 2029 le dĂ©but de la production en sĂ©rie de lâADES, initialement prĂ©vu pour 2039 : « Nous allons bientĂŽt construire le dĂ©monstrateur, avant mĂȘme que le prototype ne soit terminĂ©, car nous savons dĂ©jĂ assez prĂ©cisĂ©ment ce qui fonctionne ou pas grĂące au jumeau numĂ©rique et aux tests effectuĂ©s jusquâĂ prĂ©sent », explique Wagner. La construction du dĂ©monstrateur et la procĂ©dure dâautorisation coĂ»teront 250 millions dâeuros. La moitiĂ© de cette somme devrait provenir de partenaires et futur·e·s acheteur·euse·s : « Des producteurs dâĂ©lectricitĂ©, des groupes industriels, des hĂŽpitaux, des chantiers navals, etc. MĂȘme une Ăźle est intĂ©ressĂ©e et souhaite devenir autonome en Ă©nergie avec ADES », poursuit Wagner. MĂŒllner doute que le calendrier
dâEmerald Horizon tienne la route. « Lâapproche est encore trĂšs innovante en termes de matĂ©riaux et de mise en Ćuvre. MĂȘme si tous les tests de sĂ©curitĂ© et de matĂ©riaux se dĂ©roulent bien, les autorisations prennent des dĂ©cennies en raison de la complexitĂ© de la lĂ©gislation. Les fondateur·rice·s de nombreuses start-ups sont Ă©loignĂ©s du secteur et sous-estiment lâextrĂȘme lenteur de tels projets. »
LĂ encore, Florian Wagner ne veut pas se laisser dĂ©contenancer. Câest justement le fait dâĂȘtre Ă©loignĂ© du secteur qui permet de trouver des solutions plus innovantes. GrĂące Ă la coopĂ©ration de divers partenaires et
« Nous ne construisons pas une grande installation Ă lâissue incertaine, mais une machine qui peut ĂȘtre testĂ©e avec prĂ©cision et adaptĂ©e sans complication.
»
MARIO MĂLLER
De nombreux pays europĂ©ens investissent dans des technologies nuclĂ©aires amĂ©liorĂ©es. Dâautres sâaccrochent Ă leurs anciens rĂ©acteurs. Un aperçu.
En tant quâopposante convaincue Ă lâĂ©nergie nuclĂ©aire, lâAutriche est dĂ©sormais bien seule en Europe :
1 En Finlande, la centrale nucléaire Olkiluoto-3 a été inaugurée en 2022.
2 La Slovaquie construit les troisiÚme et quatriÚme unités de la centrale de Mochovce.
3 La France redĂ©marre des centrales nuclĂ©aires arrĂȘtĂ©es en 2022 et prĂ©voit de construire de petites centrales modulaires (appelĂ©es SMR) dĂšs 2030.
4 La centrale nuclĂ©aire hongroise de Paks, et son homologue anglaise 5 Hinckley Park reçoit des millions de subventions nationales. LâUE a rejetĂ© une plainte de la RĂ©publique dâAutriche Ă ce sujet. Dâautres
misent sur les centrales de quatriÚme génération.
6 La RĂ©publique tchĂšque prĂ©voit la plus petite centrale nuclĂ©aire dâEurope dans le parc nuclĂ©aire de TemelĂn : elle devrait ĂȘtre construite dâici 2035.
7 La Pologne prĂ©voit de se lancer dans lâutilisation de lâĂ©nergie nuclĂ©aire en 2033, avec un total de six unitĂ©s dâune capacitĂ© totale de 6 Ă 9 GW dâici 2043.
En dehors de lâEurope, la Chine construit un petit rĂ©acteur au thorium et aux sels liquides Ă Wuhei. Bill Gates veut lui aussi, avec sa sociĂ©tĂ© TerraPower, produire dâici 2050 des centaines de petites centrales nuclĂ©aires refroidies au sodium. Le premier rĂ©acteur est actuellement en construction dans le Wyoming pour 180 millions dâeuros et devrait ĂȘtre mis en service en 2028.
du monde de la fnance, ADES doit ĂȘtre rapidement produit en sĂ©rie. Pour la recherche et le dĂ©veloppement, lâentreprise a dĂ©jĂ quelques soutiens assurĂ©s comme le groupe Bernard ou lâuniversitĂ© technique de Graz. Ă lâaide dâune obligation verte quâil a Ă©mise, Wagner veut « apporter les milliards de Wall Street Ă lâindustrie autrichienne ».
Les milliards viennent donc de Manhattan, mais oĂč vont les dĂ©chets ? ADES produit des dĂ©chets nuclĂ©aires radioactifs, mais ceux-ci ne doivent ĂȘtre stockĂ©s « que » pendant 300 ans, le matĂ©riau ayant dĂ©jĂ perdu beaucoup de sa dangerositĂ© aprĂšs cinquante ans. Pour le plutonium en revanche, il sâagit de 240 000 ans, et mĂȘme de millions dâannĂ©es pour certains transuraniens. Selon Florian Wagner, le thorium prĂ©sente mĂȘme une production dâĂ©nergie Ă©levĂ©e avec peu de dĂ©chets : « On peut utiliser 97 % du thorium pour produire de lâĂ©nergie ; pour lâuranium, ce nâest que 3 %. » Cela tombe bien : en novembre de lâannĂ©e derniĂšre, le plus grand gisement de thorium du monde aurait Ă©tĂ© dĂ©couvert en Carinthie (Autriche). Selon Florian Wagner, les modules ADES devraient mĂȘme, dans une prochaine Ă©tape, rĂ©duire la nocivitĂ© des dĂ©chets nuclĂ©aires des centrales nuclĂ©aires traditionnelles. Mais pour lâinstant, ils doivent ĂȘtre utilisĂ©s pour produire de lâĂ©nergie et renforcer les installations Ă©oliennes et hydroĂ©lectriques.
MMais lâobjectif principal dâEmerald Horizon est de remplacer le « mauvais » nuclĂ©aire par le « bon » et dâaccĂ©lĂ©rer la sortie du nuclĂ©aire des centrales obsolĂštes, notamment autour de lâAutriche. La voie est-elle ouverte Ă une « opĂ©ration Austrotom » ? « LâAutriche a toujours Ă©tĂ© un pays sans nuclĂ©aire, neutre et aussi siĂšge de lâAIEA. Nous sommes aujourdâhui assis sur un incroyable trĂ©sor de thorium. Quel pays serait donc plus appropriĂ© comme point de dĂ©part pour une technologie rĂ©volutionnaire ? », interrogent en chĆur Wagner et MĂŒller.
Transports publics non-polluants, villes sans Ă©missions : Gerald Babel-Sutter, fondateur dâUrban Future, propose une confĂ©rence sur lâessor des mĂ©tropoles durables.
the red bulletin innovator : Pourquoi Urban Future est-elle devenue la conférence sur le développement urbain durable numéro un en Europe ?
Gerald b abel-Sutter : Parce nous avons un objectif prĂ©cis. Notre confĂ©rence internationale se tient chaque annĂ©e dans une ville innovante diffĂ©rente. Des expert·e·s et des dĂ©cideur·euse·s de la politique, de lâĂ©conomie et du civil unissent leur savoir-faire et leur passion pour que le changement sâopĂšre enfn dans nos villes. Cette annĂ©e, la confĂ©rence se tient Ă Stuttgart, rĂ©gion passionnante elle-mĂȘme confrontĂ©e Ă dâimmenses changements structurels.
Quelle est la genĂšse dâUrban Future?
Tout a commencé en 2014 à Graz avec un atelier sur le thÚme de la mobilité pour favoriser les échanges entre expert·e·s sur
leurs défs et leurs projets. Nous nous sommes soudain retrouvés avec mille personnes invitées de plus de trente nations, ce qui nous a totalement surpris : nous avions manifestement touché une corde sensible. Les conférences traitent généralement du « pourquoi ». Nous nous intéressons au « comment ». Comment transformer une idée ou une vision en réalité ? Quelles sont les obstacles ? Comment les surmonter ? Voilà les différents thÚmes abordés par Urban Future.
Y a-t-il des domaines dans lesquels les villes se sont améliorées au cours des dix derniÚres années ?
Oui, heureusement. Les choses ont bien Ă©voluĂ©. De nombreuses grandes mĂ©tropoles se sont rĂ©unies pour fxer des rĂšgles communes en matiĂšre de gaz dâĂ©chappement Ă lâentrĂ©e des villes. Et citons aussi
Le Viennois est fondateur et PDG dâUrban Future, qui connecte les dĂ©cideurs et dĂ©cideuses des villes du monde entier avec les acteurs et actrices du changement. Ses prĂ©cĂ©dents postes : Head of Conferences (cb brand), Head of Business Development & Marketing (CMS), Marketing Manager (Steiner Optics).
Participant·e·s lors de lâUrban Future Global Conference Ă Oslo en 2019.
les « C40 Cities », une coalition de villes qui ont annoncĂ© quâĂ partir de 2025, elles nâachĂšteraient plus que des bus sans Ă©missions de COÂČ pour le transport public. Cette nouvelle approche se traduit Ă©galement par une plus grande marge de manĆuvre.
Que peuvent faire les villes pour développer leur durabilité plus rapidement ?
Les villes subissent dâĂ©normes transformations dans presque tous les domaines. Pour la mobilitĂ©, il faut favoriser les transports publics, le vĂ©lo et lâautopartage. Pour le bĂątiment, la construction durable et la rĂ©novation Ă©nergĂ©tique. Et pour lâĂ©nergie, Ă©conomiser, dĂ©velopper les Ă©nergies renouvelables locales et abandonner les Ă©nergies fossiles.
Vous avez des exemples positifs en milieu urbain ?
Bien entendu. Lâessentiel est de fxer des objectifs communs, faire preuve dâinnovation et de crĂ©ativitĂ© et encourager la coopĂ©ration. Parmi les projets rĂ©ussis, on peut citer le concept de la villeĂ©ponge de Rotterdam : absorber et stocker lâeau de pluie dans les villes au lieu de la canaliser et de lâĂ©vacuer. Le centreville dâOslo sans voitures, les canaux de dĂ©bordement de Graz en cas de fortes pluies ou encore Tokyo et son gigantesque projet dâinfrastructure pour la prĂ©vention des inondations sont autant dâexemples de bonnes pratiques.
Y a-t-il des diffĂ©rences dâapproches marquantes selon les villes ?
Absolument ! Si les villes europĂ©ennes excellent dans lâoptimisation et la planifcation stratĂ©gique, les villes dâAfrique et dâAmĂ©rique latine impressionnent par leur crĂ©ativitĂ© et leur approche pragmatique.
Urban Future ne propose pas que des dialogues mais aussi des ateliers, des visites interactives et bien plus encore.
Quelle est la situation en Suisse, en Allemagne et Autriche ?
Les transports publics de lâespace germanophone sont parmi les meilleurs au monde. Câest un atout majeur. En revanche, les structures rigides, lâadministration lĂ©thargique et les interminables processus de dĂ©cision freinent la transformation des villes. Dans de nombreux cas, la devise reste : « PrĂ©server plutĂŽt que changer. »
Comment provoquer défnitivement le changement ?
Pour assurer une meilleure durabilitĂ©, le pouvoir reste entre les mains de toutes les personnes agissant en ce domaine. Si lâensemble est encadrĂ© par de « bonnes » personnalitĂ©s dirigeantes et des Ă©quipes passionnĂ©es, on trouvera toujours un moyen, quel que soit lâendroit de la planĂšte oĂč le changement sâopĂšre.
du 21 au 23 juin 2023, Ă Stuttgart (Allemagne)
Toutes les infos sur : urban-future.org
Quâattendez-vous du dĂ©veloppement urbain durable dans les dix, voire les vingt prochaines annĂ©es ?
Des dirigeants et dirigeantes qui pensent autrement, plus de jeunes aux postes clĂ©s, plus de diversitĂ© au sein des Ă©quipes dirigeantes urbaines, et surtout, plus de femmes. Lâobjectif est que la durabilitĂ© dĂ©passe ce statut de secteur pour devenir une attitude fondamentale qui concerne tout le monde.
Le biohackeur Andreas Breitfeld prĂ©sente ce gadget sensĂ© amĂ©liorer la vie. Comment un brassard intelligent vous aide Ă ĂȘtre visiblement plus musclé·e.
Les hormones de croissance sont la clĂ© pour prendre de la masse musculaire, pour une rĂ©gĂ©nĂ©ration plus rapide et une peau plus lisse. Il est donc judicieux de stimuler la sĂ©crĂ©tion de ces hormones lors de lâentraĂźnement. On peut le faire avec des poids qui sollicitent les articulations, les ligaments et les tendons, ou on peut obtenir le mĂȘme effet en rĂ©duisant de maniĂšre dosĂ©e la circulation sanguine avec un poids dâentraĂźnement plus faible (â 75 %) et un nombre de rĂ©pĂ©titions Ă©levĂ© (20-40). Pourquoi ? Lâaugmentation de la circulation sanguine aprĂšs lâentraĂźnement de musculation entraĂźne, en plus de
lâamĂ©lioration visuelle due au « pompage », une production accrue dâhormones en rĂ©compense des efforts fournis Ă la salle de sport. Un certain nombre dâĂ©tudes affrment dĂ©sormais que le meilleur rĂ©sultat est obtenu lorsque lâapport sanguin aigu est rĂ©duit Ă court terme par des bandes ou des manchettes. Il est important de noter quâil sâagit toujours dâune rĂ©duction du dĂ©bit, et non dâun Ă©tranglement. En consĂ©quence, je recommande uniquement des solutions spĂ©cifques comme B-Strong, et non lâutilisation dâĂ©lastiques, qui peuvent entraĂźner des lĂ©sions nerveuses ou pire encore. Les bandeaux spĂ©ciaux B-Strong sont disponibles pour le bras et la cuisse en diffĂ©rentes tailles, avec une appli qui calcule la pression avec laquelle ils rĂ©duisent le fux sanguin (comme un brassard de tension). env. 490 CHF ; win.gs/B-Strong
Le cĆur de B-Strong : un bandeau pour le haut du bras afin de rĂ©guler le dĂ©bit sanguin.
Andreas Breitfeld est un biohackeur qui prend sa santé en main et teste des gadgets dans son laboratoire. Il évalue pour nous divers gadgets.
1.
Quel est le livre qui tâa le plus appris ?
Guerre et Paix, de LĂ©on TolstoĂŻ. Il est intemporel. Il permet de dĂ©celer les mĂ©canismes de la vie et la profondeur des relations humaines. Plus les personnages et leurs relations sont variĂ©s, mieux on peut comprendre les autres et aussi se comprendre soimĂȘme. Ce livre permet de se pencher sur sa propre vie.
2.
Quelle newsletter lis-tu jusquâĂ la fin ?
Cee Cee Berlin, Ă laquelle je suis abonnĂ©e depuis 2015. Jâaime cette lettre dâinfos sur la vie culturelle de la capitale. Et il y a bien sĂ»r, la WAA Podcast Newsletter ;)
3.
Quel est le compte Insta que tu likes le plus?
Sans aucun doute
This Place: une marque de cosmĂ©tiques clean créée par une de mes amies invitĂ©e du podcast, Laura Simonow. Jâadore Ă la fois lâesthĂ©tique et la qualitĂ© des produits mais aussi le vrai sentiment « dâappartenir Ă la communautĂ© ».
4.
Quel est le podcast dont tu ne rates aucun épisode ?
Question difficile, car je nâai guĂšre le temps, Ă cĂŽtĂ© de mon podcast, dâen Ă©couter dâautres. Mais quand jây arrive, câest Fast&Curious, de Verena Pausder et LeaSophie Cramer, un duo trĂšs dynamique qui se dĂ©marque et qui mâinspire avec des insights personnels et originaux sur le monde des affaires et de la carriĂšre.
5.
Quelle est la derniÚre appli que tu as découverte ?
RĂ©cemment, jâai eu la chance de lire des articles sur les thĂšmes passion economy et side hustle pour lâappli Informed. Jâai trouvĂ© ça vraiment plein de bon sens et trĂšs informatif.
6.
Quel est le plaisir coupable que tu tâoctroies ?
La recherche de meubles dâoccasion ou vintage sur Cocoli (site allemand de revente de meubles, ndlr)! Câest toujours pour moi une vraie petite chasse au trĂ©sor.
Daria Suvorova est la fondatrice et lâanimatrice du podcast, en anglais, Women Authors of Achievement (WAA), dans lequel elle raconte des histoires de femmes qui ont rĂ©ussi dans tous les domaines possibles. Elle travaille Ă©galement comme directrice de lancement pour la fintech europĂ©enne Klarna et enseigne en tant que professeure invitĂ©e Ă la Popakademie Baden-WĂŒrttemberg. ThĂšme : « Le pouvoir des podcasts » Le podcast Women Authors of Achievement (WAA) peut ĂȘtre Ă©coutĂ© sur toutes les grandes plateformes.
Quelles applications et quels textes ont inspiré la fondatrice de Women Authors of Achievement, Daria Suvorova ?DONYA JOSHANI, COCOLI, OMR
Avec le slogan Artificial Worlds, le festival international de la culture numĂ©rique fait son retour Ă lâautomne. Le DA Z âDigital Art Zurich rĂ©unit en un seul lieu les artistes numĂ©riques les plus remarquables au monde. Pendant dix jours, on pourra dĂ©couvrir ces artistes et leurs Ćuvres lors dâexpositions, dâinstallations, dâexpĂ©riences virtuelles, de concerts et de dĂ©bats dans le centre-ville de Zurich. Lâart numĂ©rique nâest donc plus seulement prĂ©sent sur les smartphones, mais aussi dans les rues.
DA Z â Digital Art Zurich da-z.net
âThatâs Infotainment at its best!â VoilĂ qui plonge dans lâesprit angliciste du festival. Trois journĂ©es de rencontre dans la Marx Halle de Vienne, trois thĂ©matiques bien distinctes : 4Pioneers, 4Future, 4Gamechangers. Conseils pour start-ups et investisseur·euse·s, avenir du systĂšme de santĂ©, discussions sur le journalisme de qualitĂ©, corruption et Ă©mancipation fĂ©minine, presque tous les sujets brĂ»lants du moment seront abordĂ©s. Le programme sera Ă©galement retransmis Ă la tĂ©lĂ©vision sur Puls24 et ORF et en streaming sur lâapplication ZAPPN.
4Gamechangers
4gamechangers.io
avril 2023
Martina Panchyrz (ci-dessus) a plusieurs cordes Ă son arc : journaliste, fondatrice de lâentreprise de mĂ©dias M.STORIES, dĂ©voreuse de livres⊠et dĂ©sormais organisatrice du Female Business Festival. Sous la devise Courage, 1 500 participantes sont conviĂ©es pour la premiĂšre fois Ă Munich pour cerner et atteindre leurs objectifs grĂące Ă un large panel dâactivitĂ©s, entre scĂšne de pitch et de podcasts en live, sessions de yoga et dĂ©gustations de vin. RĂ©aliser ses rĂȘves nâa jamais Ă©tĂ© aussi fun !
Female Business Festival martinastories.com
QuinziĂšme Ă©dition du Swiss Innovation Forum de Zurich, le rendez-vous annuel numĂ©ro un dans le domaine de lâinnovation. Objectif de la confĂ©rence suisse : faire dialoguer science et Ă©conomie avec un menu trĂšs variĂ©, cette annĂ©e encore, entre Experience Zone, exemples de meilleures pratiques et discours inspirants sans oublier la remise du Swiss Technology Award (STA). Si lâĂ©vĂ©nement nâaura lieu quâĂ la fin de lâannĂ©e, les billets Early Bird sont disponibles dĂšs maintenant.
Swiss Innovation Forum swiss-innovation.com
Un petit air dâHollywood et du cash pour vos idĂ©e innovantes et durables : tous les rendez-vous incontournables en Suisse, en Autriche et en Allemagne.
Tu es jeune, pĂ©tri dâinnovation, tes idĂ©es sont gĂ©niales mais il te manque encore le partenaire idĂ©al pour les concrĂ©tiser ? Alors, tu ferais mieux de te jeter illico sur le programme annuel du Social Impact Award (SIA) et marquer la date du 8 mai en rouge dans ton calendrier. Ce printemps, des Ă©vĂ©nements et des ateliers seront organisĂ©s dans toute lâAutriche pour tâaider Ă dĂ©velopper ton projet ou ton concept social. Et tu as jusquâau dĂ©but du mois de mai pour soumettre celui-ci, recevoir un ticket pour lâappel Ă projet SIA dâune valeur de plus de 20 000 euros et avoir accĂšs Ă toute une Ă©quipe dâexpertes, dâexperts et de mentors.
Social Impact Award
socialimpactaward.net
Le festival OMR de Hambourg est le plus grand Ă©vĂ©nement germanophone de ce type pour les crĂ©ateurs de contenu numĂ©rique. Cette annĂ©e, des intervenant·e·s sont dĂ©jĂ annoncé·e·s : Pamela Reif, productrice de vidĂ©os web et influenceuse, le designeur Ronnie Fieg (entre autres fondateur de la marque de mode Kith) ainsi que lâinvestisseur tech et mĂ©dia Scooter Braun. Dans la ville hansĂ©atique, tout tourne autour de lâinformation, de lâinspiration et du rĂ©seautage autour du business numĂ©rique ainsi que de nombreux aperçus du monde des grands. Cela vaut donc la peine de se rendre au festival OMR ; y participer est encore bien plus important !
OMR Festival omr.com
TroisiĂšme Ă©dition du Customer Experience Forum de Biel/Bienne. Sous la devise Impact matters!, lâĂ©vĂ©nement organisĂ© par SUCCUS se focalise sur la stratĂ©gie CX au niveau de lâentreprise. De la conception de produits au dĂ©veloppement commercial et Ă la vente, tout ce qui est important pour lâexpĂ©rience client est prĂ©sent. Et cette annĂ©e, honneur au networking ! Au programme : des discours dâexpert·e·s, ateliers et dĂ©bats ouverts. Les billets Early Bird sont dĂ©jĂ disponibles. Customer Experience Forum succus.at
avril et 25 mai 2023
Quelle forme auront les espaces de travail de demain ? Quelle sera lâimportance du bien-ĂȘtre mental ? Comment mĂšnera-ton son Ă©quipe vers la rĂ©ussite ? Trois des centaines de questions auxquelles le Female Future Festival (au lac de Constance et Ă Munich) rĂ©pondra grĂące Ă lâintervention de confĂ©renciers, confĂ©renciĂšres, et entrepreneurs, entrepreneuses Ă©clairé·e·s. Le thĂšme de cette annĂ©e : Level-up: nouveaux mondes du travail
Female Future Festival female-future.com
Ali Mahlodji, conférencier de renom et fondateur de startups, explique sa notion de la liberté, et pourquoi il est si important de faire face à ses peurs pour la conquérir.
En dâautres termes, derriĂšre notre peur se cache la libertĂ©. Quand je rencontre des personnes qui ont (apparemment) rĂ©ussi, je constate encore et toujours la mĂȘme chose : leur libertĂ© intĂ©rieure a fait place Ă la peur. Comme ce directeur de stratĂ©gie dâune grande banque europĂ©enne qui mâexpliquait rĂ©cemment combien il dĂ©testait son travail. Pourtant, lorsque je lui ai rĂ©torquĂ© dâun ton lapidaire quâil nâavait quâĂ dĂ©missionne et prendre une annĂ©e sabbatique, il mâa rĂ©pondu : « Câest impossible. Quâest-ce que je vais faire aprĂšs ? Imagine quâon ne veuille plus de moi ? »
Il mâa confĂ© ressentir une vĂ©ritable angoisse existentielle Ă lâidĂ©e de se retrouver sans emploi. Il prĂ©fĂ©rait attendre que la situation sâamĂ©liore sur son lieu de travail. Il avait acceptĂ© ce poste il y a plus de trois ans et avait dĂ©jĂ eu envie de tout quitter au bout de six mois. Il avait 39 ans, une santĂ© de fer, de brillantes Ă©tudes derriĂšre lui et un splendide CV. Sans femme ni enfants ni dettes, il disposait dâun confortable matelas fnancier qui lui aurait permis de tenir facilement pendant un an et demi sans avoir Ă travailler ni rien sacrifer Ă son style de vie.
Ali Mahlodji est un maĂźtre du changement : de lâabandon scolaire Ă la crĂ©ation de start-ups et au conseil en entreprise, de lâenfant rĂ©fugiĂ© Ă lâun des meilleurs confĂ©renciers de lâespace germanophone. Ă 41 ans, il est ambassadeur auprĂšs de lâUE pour la jeunesse, podcasteur, auteur et chroniqueur.
Et quel style de vie ! Vacances Ă HawaĂŻ, soirĂ©es cocktails hyper branchĂ©es et un magnifque loft mansardĂ© de 150 mÂČ au cĆur Vienne. Il avait tout ce dont rĂȘve le commun des mortels et pourtant, la plupart de mes connaissances aux revenus bien plus modestes se sentaient plus libre que luiâŠ
Succombant au mirage de la possession, il sâĂ©tait enfermĂ© dans un carcan dâopulence. Oui, ses possessions sâĂ©taient littĂ©ralement emparĂ©es de lui. Il avait commencĂ© Ă confondre son train de vie actuel avec lâapparente illusion de la sĂ©curitĂ©.
Une peur manifestement ridicule pour les personnes menacées de pauvreté. Néanmoins, il souffrait des symptÎmes caractéristiques de ce mal qui le rongeait : panique, mains moites et tendance à éviter le sujet.
Une peur est toujours quelque chose de trĂšs individuel. Ce qui fait trembler une personne en remplit peut-ĂȘtre une autre de dĂ©licieux frissons. Aussi me paraĂźt-il essentiel de respecter la peur de chacun·e, Ă dĂ©faut de la comprendre.
Certain·e·s ont peur des chiens, dâautres de parler en public, dâautres encore de voler et en mĂȘme temps on trouve autant dâami·e·s des bĂȘtes, de confĂ©rencier·Úre·s fanatiques et dâaccros de lâavion qui passent leur temps Ă guetter les offres des compagnies aĂ©riennes.
Je me souviens encore de ce jour oĂč une peur panique sâest emparĂ©e de moi lors dâun vol secouĂ© par de fortes turbulences sur le territoire amĂ©ricain. Les dix annĂ©es suivantes, jâai vĂ©cu un enfer Ă chaque vol, quâil soit sans histoires ou non. Je me bourrais de sprays, de mĂ©dicaments et faisais des exercices respiratoires au moment du dĂ©collage. Peine perdue : jâavais mĂȘme lâimpression que la situation ne faisait quâempirer.
Je suis en train dâĂ©crire ces lignes dans un avion qui me ramĂšne de France. Le vol est agitĂ©, les prĂ©visions mĂ©tĂ©o pour lâatterrissage Ă Vienne sont catastrophiques. Le commandant de bord vient dâannoncer quâĂ cette altitude, nous sommes confrontĂ©s Ă un vent latĂ©ral trĂšs fort et quâil faut sâattendre Ă de nouvelles turbulences lors des 25 prochaines
minutes. JâĂ©coute cela tout en Ă©crivant et je suis dĂ©tendu. TrĂšs dĂ©tendu mĂȘme. Ă plusieurs milliers de mĂštres au-dessus de la terre ferme, je termine de dĂźner et sirote paisiblement mon cafĂ©. Il y a probablement plusieurs personnes sur ce vol qui sont en train de se dire : « Mais comment il fait ce type devant moi pour rester aussi calme alors que lâavion est secouĂ© comme un prunier ? »
Que sâest-il passĂ© au cours des dix derniĂšres annĂ©es ? Par quel miracle la poule mouillĂ©e que jâĂ©tais sâest-elle changĂ©e en un passager presque neurasthĂ©nique et ce, en lâespace dâune seule journĂ©e ?
La solution est Ă la fois simple et incroyablement complexe : jâai affrontĂ© ma peur et me suis confrontĂ© Ă ce que je craignais le plus : les scĂ©narios dans lesquels nous sommes pris dans de terribles turbulences et oĂč lâissue sera probablement fatale.
Ma dĂ©livrance a eu lieu au cours dâune soirĂ©e oĂč le hasard a voulu que je me retrouve assis Ă cĂŽtĂ© dâun homme qui travaillait comme pilote privĂ© pour un cĂ©lĂšbre champion de Formule 1. AprĂšs quelques verres, je lui ai parlĂ© de ma peur de voler et il mâa simplement rĂ©pondu : « Câest comme de prendre le bus, sauf que de rouler en bus est beaucoup plus dangereux. » Avisant mon air perplexe, il a pris le temps de rĂ©pondre Ă toutes mes peurs de voler. Au cours de la nuit, il mâa expliquĂ© calmement comment fonctionne un avion, sans Ă©luder aucune de mes questions et en opposant des rĂ©ponses claires Ă toutes mes objections. Ma peur sâest changĂ©e en savoir.
Une semaine plus tard, je suis de nouveau dans les airs et jâai dĂ©libĂ©rĂ©ment choisi de mâasseoir cĂŽtĂ© hublot. La peur a dĂ©fnitivement fait place au respect. En me confrontant Ă mes craintes, en choisissant de me faire aider, jâai retrouvĂ© le plaisir de prendre lâavion. Quant Ă ma peur, je lâai rangĂ©e dans le tiroir des inquiĂ©tudes infondĂ©es, ce grinçant tiroir qui ne sâouvre que lorsquâon Ă©vite de se confronter Ă ses angoisses.
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Doris Schamp est illustratrice et caricaturiste. Elle a remportĂ©, en 2013, le Prix international de la bande dessinĂ©e dâAix-la-Chapelle (Allemagne). Doris Schamp, 39 ans, explore les abĂźmes de lâhumour et de Los Angeles, oĂč elle a vĂ©cu, et autrefois dĂ©veloppĂ© des images animĂ©es pour Red Bull. Quand elle ne fait pas de planche Ă voile, elle dessine et Ă©volue entre la campagne et la capitale autrichienne.
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