la belgique actrice de l autonomie strategique europeenne

Page 1


DANS LA MÊME COLLECTION / ETAT DE LA QUESTION IEV www.iev.be

Le recours au temps partiel par le personnel infirmier en milieu hospitalier

Anna-Maria LIVOLSI

L’offre équilibrée d’enseignement supérieur : agir pour un meilleur accès

Bérenger AMELOOT

Salles de consommation à moindre risque : une vraie bonne idée !

Martin JOACHIM

Le P.O.B. et le service militaire - Des origines jusque 1928

Samuel VAN CROMBRUGGE

L’immersion linguistique : pour qui et pourquoi ?

Bérenger AMELOOT

Vers un impôt européen sur la grande fortune : fondements et modalités

Juliette DELACROIX

Interdire TikTok, bonne ou mauvaise idée ?

Gauthier HANSEL

Désinformation : comment la Russie mène la guerre à nos démocraties ?

Gauthier HANSEL

Jean De Nooze (1923-2023), « L’homme du syndicat »

Joffrey LIÉNART

Inégalités sociales et politiques de mobilités : le cas de la taxe kilométrique Smartmove à Bruxelle

François PERL

Climat et santé : une urgence partagée

Wissal SELMI

Paysage institutionnel intra-francophone et perspectives de réforme

Letizia DE LAURI

Les enjeux actuels de du budget de l’assurance-maladie

François PERL

Travail et santé : le cas de l’invalidité en Belgique

François PERL

Institut Emile Vandervelde Boulevard de l’Empereur 13 1000 Bruxelles www.iev.be

SOMMAIRE

Introduction

1. Une industrie européenne de la Défense réactive et résiliente 2

2. La Belgique, bonne élève de l’Europe de la Défense ? 4

2.1. Partenariats européens 4

2.2. Vers une augmentation du budget militaire belge 6

2.3. La DIRS, une révolution industrielle belge en matière de Défense ? 6

3. Interviews d’acteurs de terrain 8

3.1. Quelles perspectives d’autonomie stratégique pour la Commission européenne ? 8

3.2. La DIRS, un changement de paradigme pour la Défense belge 10

3.3. L’autonomie stratégique : un long chemin vers une base industrielle réellement européenne 11

4. Conclusion 14

Biographie de l’auteur

Maxime Leclercq-Hannon est Conseiller Défense et Intérieur au Groupe PS de la Chambre des représentants de Belgique.

Introduction

Le 24 février 2022 commençait l’invasion de la Fédération de Russie contre l'Ukraine

Dès les premiers jours de cette invasion militaire destructrice, l’Union européenne et ses Etatsmembres se sont mobilisés pour apporter rapidement un soutien notamment matériel aux forces armées ukrainiennes afin de défendre leur territoire.

Cette guerre a constitué et continue de constituer un moment charnière dans l’histoire de l’Union européenne avec le retour, à ses frontières, d’un conflit armé de haute intensité sur notre continent. Ce conflit a remis profondément en cause le multilatéralisme et le droit international, deux piliers du projet européen

Comme souvent face à une crise majeure, ce conflit a obligé l’UE et ses Etats-membres à de nombreuses remises en question. Une remise en question notamment en matière de Défense et de renforcement de l’autonomie stratégique européenne et de la base industrielle et technologique de Défense européenne (BITDE).

Le morcellement de la BITDE se révèle comme particulièrement problématique face à la nécessité pour les entreprises européennes de Défense d’atteindre la taille critique face à une concurrence en pleine reconfiguration et dans un environnement technologique en mutation1

Au sein de l’UE, par son histoire et sa position géographique, notre pays a depuis longtemps eu une tradition volontariste en matière d’Europe de la Défense tout en veillant à rester un allié fidèle au sein de l’OTAN

En mai 2013 déjà, la Chambre des représentants adoptait ainsi une résolution2 relative à l’avenir de l’armée belge dans un cadre européen qui demandait au gouvernement « de promouvoir le renforcement de l’industrie de la défense, notamment via une base industrielle et technologique de défense européenne innovante et compétitive, avec des synergies entre la recherche et développement civile et militaires ».

Cela s’est traduit quelques années plus tard dans un engagement clair et fort de l’accord de gouvernement De Croo du 30 septembre 2020 : « La Belgique poursuivra et renforcera son engagement pour une défense européenne effective. Cela contribuera à une réelle stratégie et autonomie européennes et renforce également le ‘pilier européen’ au sein de l’OTAN. L’OTAN reste la pierre angulaire de la défense collective de l’Europe. »3

Quelques mois plus tard, le Haut Représentant de l’Union européenne, Josep Borrell, écrivait sur ce concept d’autonomie stratégique et le besoin pour les Européens de se prendre en charge dans un monde de plus en plus dur4. Selon lui, il était difficile de prétendre être une « union politique » capable d’agir en « acteur mondial » et de se proclamer « Commission géopolitique » sans faire preuve d’ « autonomie ».

En mars 2022, alors que la guerre déclenchée par la Russie à l’Ukraine venait de débuter, l’Union européenne se dotait d’une « Boussole stratégique »5 illustrant que la référence exclusive à l’OTAN ne suffisait plus Malgré une perception des risques différente entre les Etats européens par leur histoire ou leur géographie, l’UE se dotait enfin d’un document central pour assurer son autonomie stratégique.

Cette boussole est définie comme un plan d'action ambitieux pour renforcer la politique de sécurité et de Défense de l'UE d'ici à 2030. Elle entend couvrir tous les aspects de la politique de sécurité et de défense et s'articule autour de quatre piliers : agir, investir, coopérer et protéger.

1 Matelly, S., Simon, E., Pour une stratégie industrielle européenne de défense in Revue Défense Nationale, Editions Comité d’Etudes de Défense Nationale, 2020/7 (N° 832), pp. 69

2 53K2203009.indd (lachambre.be)

3 Accord_de_gouvernement_2020.pdf (belgium.be) pp. 77

4 De l’intérêt de l’autonomie stratégique européenne | EEAS (europa.eu)

5 Une boussole stratégique pour renforcer la sécurité et la défense de l'UE au cours de la prochaine décennie - Consilium (europa.eu)

Alors que de nombreuses initiatives ont été prises aux niveaux belge et européen pour renforcer l’Europe de la Défense, l’heure est à tirer un premier bilan et de se poser la question suivante : quelle est la contribution de la Belgique au renforcement de la BITDE ?

Pour ce faire, c’est sur le pilier « investir » de la boussole stratégique que se concentrera cet état de la question et sur ses conséquences en matière d’industrie de la Défense.

En effet, face à l’invasion de l’Ukraine par la Russie, les Etats-membres se sont engagés à augmenter considérablement leurs dépenses de Défense pour répondre à leur ambition collective de combler les insuffisances critiques et l’autonomie stratégique en matière de capacités militaires et civiles et à renforcer la BITDE

Nous étudierons la mise en œuvre de ces principes dans la pratique et la contribution de notre pays à l’autonomie stratégique européenne en matière de Défense et plus particulièrement de BITDE

Pour ce faire, plusieurs interviews aux niveaux belge et européen ont été menées afin de tirer un premier bilan à l’aune d’un potentiel futur nouveau gouvernement fédéral belge et d’une nouvelle Commission européenne sortis des urnes le 9 juin dernier.

1. Une industrie européenne de la Défense réactive et résiliente

L’autonomie stratégique européenne peut être définie comme la capacité pour l’UE d'agir de manière autonome lorsque c'est nécessaire et avec des partenaires lorsque c'est possible, pour toutes les questions de signification stratégique6 La Défense et l’industrie de Défense relèvent évidemment de cette importance stratégique.

C’est dans une combinaison entre indépendance et interdépendance que l’autonomie stratégique d’un pays dépend sur le plan technologique7

Pour certains – et c’est particulièrement vrai en matière de Défense et d’appartenance à l’OTAN – être autonome stratégiquement signifie le potentiel d’un découplage des Américains8

Le 18 mai 2022, le Haut Représentant de l’UE diffusait une communication afin d’analyser les déficits d’investissement dans le domaine de la Défense et sur la voie à suivre9 L’objectif alors affiché était que l’augmentation des dépenses des Etats-membres en matière de Défense se traduise par un renforcement considérable de la BITDE en vue d’accentuer l’effet de dissuasion conventionnelle sur tous les types d’adversaires potentiels.

La communication indique ainsi que la perception qu’ont les citoyens de la nécessité de renforcer l’action de l’UE en matière de Défense a été mise en évidence dans le rapport final de la conférence sur l’avenir de l’Europe et de poursuivre : « Les Etats membres ont annoncé des augmentations de leur budget de la défense, pour un montant approchant, à ce jour, les 200 milliards d’euros supplémentaires sur les années à venir. Bien que ces augmentations soient essentielles, il existe un risque sérieux qu'elles ne suffisent pas à pallier les insuffisances existantes si elles sont dépensées de manière non coordonnée. Les Etats membres de l’UE ne doivent donc pas seulement dépenser plus, mais aussi investir davantage et mieux ensemble, comme le soulignent la déclaration de Versailles et la boussole stratégique.

6 S&D_Group_Strategy_Paper_on_European_Union_Open_Strategic_Autonomy_230206_0.pdf (socialistsanddemocrats.eu)

7 Lebert, D., Meunier, F.-X., L’autonomie stratégique d’un pays: une analyse en termes de technologies in Revue Défense Nationale, Editions Comité d’Etudes de Défense Nationale, 2020/7 (N° 832), pp. 85

8 Souveraineté européenne, autonomie stratégique, Europe puissance : quelle réalité pour l’Union européenne et pour quel avenir ? - Question d'europe N°619 - Fondation Robert Schuman (robert-schuman.eu), pp. 2

9 eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:52022JC0024

Ce n’est qu’en collaborant que les Etats membres peuvent maximiser les économies d’échelle et faire face aux coûts élevés des capacités de pointe, tout en évitant de se faire concurrence pour des capacités d’approvisionnement limitées et en se gardant des doubles emplois inutiles. ».

Il s’agit d’une véritable évolution dans le chef des institutions européennes en voulant sortir d’un modèle presque exclusivement souverain ou intergouvernemental vers une approche plus communautaire et intégrée. En effet, la construction d’une identité de Défense européenne se heurte à d’importantes disparités culturelles et à des différences d’appréciations politiques entre les pays membres10

Cette évolution semble s’imposer à l’heure où tous les Etats-membres – en ce compris la Belgique –ont décidé face aux nouvelles menaces de largement augmenter leurs dépenses en matière de Défense après des années de diminution11 .

De 1999 à 2021, les dépenses combinées de l’UE dans le domaine de la Défense ont augmenté de 19,7 % contre 65,7 % pour les Etats-Unis d’Amérique, de 292 % pour la Russie et de 592 % pour la Chine. Dans le même temps, on estime que le manque de coopération entre les Etats-membres en matière de Défense coûte entre 25 et 100 milliards d’euros par an12

Dans sa communication, la Commission tire le constat qu’entre 2007 et 2016, plus de 60 % du budget de l’UE consacré à l’acquisition d’équipements de Défense l’ont été à des importations militaires en provenance de pays tiers13

Cet écart entre les ambitions affichées et la réalité des chiffres est interpellant.

Les enjeux sont pourtant majeurs en termes d’autonomie stratégique mais aussi d’emplois et de recherche et développements14 Nous pouvons donc tirer un premier constat : le reflexe européen des Etats-membres est loin d’être une réalité. Ce constat semble donc pousser les institutions européennes à aller plus loin

Après plus de deux ans de guerre en Ukraine, la Commission européenne a ainsi dévoilé le 5 mars dernier la première stratégie industrielle de Défense (EDIS) et un nouveau programme annoncé pour l’industrie de la Défense (EDIP), visant à renforcer la préparation de l’Europe en matière de Défense15

L’objectif affiché par la stratégie industrielle de Défense vise à renforcer l’état de préparation de la Défense européenne et sa BITDE. Il s’agit ainsi pour la Commission de répondre aux besoins de Défense des Etats-membres, en les incitant à investir davantage, mieux, ensemble et avec une préférence européenne, et également de prendre en compte les besoins militaires de l’Ukraine.

Un tel « coup de pouce » européen est donc le bienvenu. « C’est là qu’intervient la politique industrielle de Défense. En effet, la production d’équipements militaires et l’investissement dans la R&D de défense ne sont pas nécessairement rationnels pour un industriel ou pour les investisseurs privés qui le financent. Les caractéristiques techniques des équipements militaires imposent en effet des investissements risqués, car lourds et de long terme pour des séries beaucoup plus courtes que dans

10 Comité 4, Lescoopérationsd’armementàl’heuredel’autonomiestratégiqueeuropéennein Revue Défense Nationale, Editions Comité d’Etudes de Défense Nationale, 2021/1 (N° 836), pp. 33

11 Selon la communication, en 2020, les Etats-membres ont dépensé collectivement plus de 200 milliards d’EUR dans le domaine de la défense et, en 2021, selon les estimations, leurs dépenses cumulées ont atteint 220 milliards d’EUR. Ces évolutions récentes font néanmoins suite à une période prolongée de coupes substantielles dans les dépenses consacrées à la défense après la crise économique et financière de 2007-2008 ; ces dépenses sont passées de 183 milliards d’EUR en 2008 à 159 milliards d’EUR en 2014 et n’ont atteint les niveaux d’avant la crise qu’en 2018-2019. Entre 2009 et 2018, les réductions opérées par les Etats-membres s’élèvent à un sous-investissement total d’environ 160 milliards d’EUR, par rapport au niveau des dépenses de 2008.

12 69aa3194-4361-48a5-807b-1a2635b91fe8_en (europa.eu) pp. 2

13 Selon la communication, en 2022, les dépenses de défense des Etats-membres ont augmenté pour la huitième année consécutive, pour atteindre 240 milliards d’euros. Quelque 78 % des acquisitions réalisées dans le domaine de la défense par les Etats membres de l’UE entre le début de la guerre d’agression menée par la Russie et juin 2023 provenaient de l’extérieur de l’UE, les Etats-Unis représentant à eux seuls 63 % de ces acquisitions. Entre 2021 et 2022, l’acquisition de nouveaux équipements a augmenté de 7 %, mais seuls 18 % du total des dépenses d’équipements ont été consacrés à l’acquisition collaborative d’équipements de défense par l’UE en 2022, soit bien moins que le critère collectif actuel de 35 % fixé par les Etats-membres.

14 Selon la Commission européenne, la BITDE est compétitive à l’échelle, avec un chiffre d’affaire annuel estimé à 70 milliards d’euros et des volumes d’exportation importants (plus de 28 milliards d’euros en 2021). Globalement, la BITDE emploie environ 500 000 personnes.

15 eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:52024JC0010

le cas d’équipements civils et avec des spécifications complexes et contraignantes (résistance, capacités à fonctionner dans des conditions extrêmes, etc.). »16

Afin d'aider les Etats-membres à atteindre ces objectifs, la EDIS avance un ensemble d'actions visant à :

- Affirmer le principe d’acquisition commune de matériels de défense ;

- Renforcer la capacité de la BITDE à produire davantage, en garantissant sa sécurité d’approvisionnement ;

- Créer des incitations financières au profit de l’industrie de défense européenne ;

- Développer des liens plus étroits avec l'Ukraine ;

- Travailler plus efficacement avec les partenaires de l’Union européenne, notamment l’Alliance atlantique ;

- Développer une culture de préparation à la défense au niveau européen.

Avec le programme EDIP, l’UE cherche à passer des mesures d'urgence de court terme, adoptées en 2023 et se terminant en 2025, à une approche plus structurelle visant à renforcer durablement l’état de préparation de l’industrie de Défense européenne.

Il a été prévu qu’EDIP mobilisera initialement, pour la période 2025-2027, 1,5 milliards d’euros du budget de l’Union européenne.

2. La Belgique, bonne

élève de l’Europe de la Défense ?

2.1. Partenariats européens

Comme nous le disions en guise d’introduction, notre pays a une longue tradition de collaborations au sein de l’UE et notamment de ses pays voisins

Notre pays est classé – à l’instar d’autres Etats-membres européens comme le Danemark, la Roumanie, la Bulgarie, la Grèce, la Slovaquie, l’Autriche, les Etats baltes, le Portugal et, plus en retrait, la Slovénie, la Hongrie et la Croatie – comme se distinguant par l’existence d’entreprises agissant majoritairement en qualité de sous-traitants, souvent au profil de PME dont certaines détentrices de compétences de niche17

Un rapport du Sénat français18 de 2019 consacré à la Défense européenne soulignait que notre pays peut être vu comme un « partenaire exemplaire » :

« Lorsque le Gouvernement belge a décidé l’achat d’avions américains F35 pour moderniser sa flotte, beaucoup d’analystes y ont vu une forme de manque d’esprit européen, alors que le Rafale français était également en compétition. Ces commentaires traduisent une vision incomplète de la réalité de l’effort capacitaire belge, et ces critiques sont en définitive aussi injustes que malvenues.

Certes, la Belgique, comme d’autres pays européens, a décidé d’acheter le coûteux F35. Ce n’est pas très surprenant venant d’un pays qui est, comme les Pays-Bas voisins qui sont un partenaire de défense privilégié, particulièrement attaché au lien atlantique. Par ailleurs, les avions belges ont vocation, comme les avions allemands, à emporter les armes atomiques de l’OTAN fournies par les Etats-Unis. Autant il semble qu’il soit possible de faire emporter ces armes par le F35, autant cela aurait sans doute été difficile à imaginer avec le Rafale, dans la mesure où il s’agit d’armes sur lesquelles les Etats-Unis conservent toujours leur capacité de décision.

16 Matelly, S., Simon, E , op. cit , pp. 68

17 Masson, H, QuelleindustriededéfensepourquelleEurope ? in Editions Comité d’Etudes de Défense Nationale, 2020/7 (N° 832), pp. 63-64

18 r18-626-11.pdf (senat.fr) pp. 74 et suivantes

Si cette décision concernant le renouvellement de la flotte aérienne a retenu beaucoup l’attention, tel n’est pas du tout le cas dans deux autres dossiers d’importance pourtant considérables :

- Le renouvellement des chasseurs de mines de la Belgique et des Pays-Bas19 (la Belgique étant chargée par les Pays-Bas de choisir les chasseurs de mines qui équipent les marines des deux pays dans le cadre d’un partenariat extrêmement poussé). Il s’agit pourtant d’un contrat de 2 milliards d’euros, remporté par Naval group ;

- La conclusion avec la France d’un partenariat sans précédent dans le domaine terrestre pour le renouvellement de la capacité motorisée (CaMo) de l’armée de terre belge, pour un montant de 1,6 milliard d’euros. ».

D’autres exemples plus récents viennent encore renforcer le propos, citons par exemple l’Accord Technique pour un bataillon binational avec le Grand-Duché de Luxembourg20 et l’achat en commun d’A400M dans une flotte binationale ou encore l’Accord entre notre pays, le Grand-Duché de Luxembourg, la France et les Pays-Bas relatif à la coopération en matière de défense aérienne contre les menaces aériennes non militaires21

Depuis la publication de ce rapport, notre pays a posé de nouveaux actes concrets en faveur de l’Europe de la Défense.

Durant le gouvernement Vivaldi, la Défense belge s’est ainsi dotée en juin 2022 du « Plan Star »22 sous l’impulsion de la Ministre de la Défense, Ludivine Dedonder.

Ce plan définit pour la prochaine décennie une trajectoire visant à augmenter nos efforts de Défense de manière significative et est fondé sur 10 principes de base dont le 5b qui indique « un ancrage capacitaire avec nos partenaires privilégiés européens et internationaux sera recherché, renforçant l’efficience et l’efficacité de la Défense et soutenant une politique de défense plus européenne. Cela contribuera à une réelle stratégie et autonomie européennes et renforce également le ‘pilier européen’ au sein de l’OTAN. ».

Ce plan STAR a été accompagné d’une loi de programmation militaire actualisée23 adoptée en juillet 2022

En 2017, la Chambre avait déjà adopté pour la première fois une loi de programmation militaire qui prévoyait les investissements en matériel majeur de la Défense belge pour la durée de la Vision stratégique du gouvernement Michel (2016-2030).

L’actualisation adoptée en 2022 visait, elle, à prendre compte les évolutions du contexte sécuritaire en actualisant la précédent et en couvrant une période allant de 2023 à 2030. Ce nouveau projet allait cependant au-delà, puisqu’il a élargi la portée de la loi du 23 mai 2017 en posant des jalons supplémentaires pour asseoir davantage encore la crédibilité de la vision stratégique en étendant l’exercice de financement du matériel majeur à la programmation en matière de personnel et au renforcement de la base industrielle et technologique de Défense.

Dans le projet de loi, on peut ainsi lire : « Principe n° 8 “En consultation avec les autres acteurs régionaux et fédéraux compétents, la Défense soutiendra pleinement l’élaboration, la mise en œuvre et le suivi d’une Stratégie de recherche, d’industrie et de défense (DIRS). Elle contribuera à garantir que les investissements dans le domaine de la Défense pour le développement des capacités ou la recherche bénéficie à la société sous forme de connaissances, de technologie et d’emploi, conformément à la législation nationale et européenne en vigueur. Outre les partenariats atlantiques, une attention particulière sera portée aux projets de coopération dans le cadre du Fonds européen de la défense (FED) et aux coopérations permanentes structurées (PESCO). L’ensemble doit intensifier le lien entre la Défense, la recherche et l’industrie pour maximiser la valeur ajoutée pour notre sécurité nationale et les retombées sociétales. De plus, les domaines de production et de services critiques pour la Défense seront identifiés afin d’assurer leur disponibilité pour les situations de crise.” L’objectif

19 Depuis la publication de ce rapport, ce programme a été rejoint par la France.

20 Beldefnews | Belgique et Luxembourg: des partenaires fidèles en matière de sécurité (mil.be)

21 La Chambre des représentants de Belgique

22 Plan STAR.pdf (belgium.be) pp. 178

23 La Chambre des représentants de Belgique

de cette loi est donc de définir un trajet cohérent et solidaire, non seulement par le biais d’une programmation de l’investissement en matériel, mais également par le biais d’une programmation en termes d’effectifs du personnel ainsi que par le biais du renforcement de la base technologique et industrielle nationale dans le domaine de la sécurité et défense. ».

2.2. Vers une augmentation

du budget militaire belge

En juin 2022, dans la perspective du sommet de l’OTAN qui se tenait à Madrid, le gouvernement De Croo était parvenu à un accord sur un engagement belge visant à consacrer 2% du Produit intérieur brut (PIB) à la Défense d'ici 2035. La Belgique répondrait ainsi à la demande en ce sens formulée par l'OTAN depuis 2014.

Précédemment, un accord avait été conclu en février 2022 sur un effort d'1,54% du PIB d'ici 2030. La Ministre de la Défense, Ludivine Dedonder, indiquait alors que « Cette trajectoire de croissance confirme le redimensionnement de notre armée, avec une perspective d'un retour social et sociétal »24

En effet, le gouvernement fédéral avait alors assorti cette trajectoire budgétaire de six conditions :

- La Belgique réclamait davantage d'intégration européenne, en complémentarité avec l'Otan ;

- Le gouvernement souhaitait un retour sur investissement plus important pour le tissu industriel belge et européen ;

- Le retour sociétal devait lui aussi être plus important, notamment en matière de cybersécurité et d'éducation ;

- Les investissements dans la Défense ne devaient pas être réalisés au détriment d'autres enjeux, comme le climat les défis sociétaux ;

- La notion d'aide à la nation devait être incluse dans les dépenses de la Défense ;

- Et enfin, il était pointé l'importance d'élaborer un cadre européen qui encourage l'investissement productif.

2.3. La DIRS, une révolution industrielle belge en matière de Défense ?

Dans cette continuité et sur base des communications de la Commission européenne évoquées précédemment, en septembre 2022, la Défense présentait la Defence,IndustryandResearchStrategy (DIRS)25

On peut ainsi y lire : « Une Defence,IndustryandResearchStrategy(DIRS) à part entière est plus que jamais pertinente et s’inscrit dans le droit fil de la déclaration de Versailles, des ambitions de la Boussole stratégique en matière de sécurité et de défense de l’Union européenne et des orientations politiques de la Stratégie de sécurité nationale, mais aussi de la mise à jour de la stratégie industrielle de l’UE, des projets du gouvernement fédéral dans le cadre de la « Facilité européenne pour la reprise et la résilience » et des plans de relance régionaux. »26

Il s’agissait pour notre pays d’une révolution dans son approche des objectifs militaires belges repris dans le Plan STAR27 et dans la loi de programmation militaire actualisée28 La DIRS a été adoptée et présentée communément par les Ministres de la Défense et de l’Economie29 et prévoit notamment la mise en œuvre d’un Conseil industriel de Défense30 collaborant avec le comité directeur de DIRS

24 Budget défense : l'engagement d'atteindre les 2% du PIB en 2035 soumis à six conditions - RTBF Actus

25 Defence, Industry and Research Strategy - IRSD-KHID-RHID (defence-institute.be)

26 Ibid, pp. 1

27 Plan STAR.pdf (belgium.be)

28 La Chambre des représentants de Belgique

29 En Belgique, c’est en effet le SPF Economie qui est en charge des retours sociétaux des marchés de Défense.

30 Le Conseil industriel de défense sera présidé par des représentants des ministres de la Défense et de l'Economie et comprendra des représentants des ministres des Finances, du Développement durable, des PMÉ et du Commerce extérieur et du secrétaire d’État pour la relance et les investissements stratégiques, qui réunira des experts de haut niveau des domaines industriel, scientifique, de la défense et du droit international avec des représentants de la SFPI, qui conseilleront le gouvernement sur l’orientation stratégique à donner à l'effort de défense accru, afin que les dépenses de défense s'accompagnent d'un renforcement de la base technologique et industrielle en Belgique.

L’objectif affiché était de mieux prendre en compte les intérêts industriels belges et européens contrairement à certains reproches formulés vis-à-vis de la politique qui avait notamment menée par le gouvernement Michel lors de l’adoption de la première loi de programmation militaire31 de notre pays A l’époque, de vives critiques avaient été émises à la Chambre32 en la matière ainsi que dans le monde de l’industrie belge au regard notamment du dossier particulièrement important d’un point de vue stratégique et budgétaire du remplacement des F-16 belges par les F-35 américains.

Auditionné à la Chambre, le CEO d’Orizio (holding SABCA & Sabena Engineering), Stéphane Burton, avait ainsi indiqué « La compétitivité des entreprises est déterminée dès le stade de la conception, d’où la grande importance d’être impliqué dans un programme dès son lancement. L’industrie aéronautique belge est totalement dépendante de l’étranger, en l’absence d’un marché intérieur. D’où l’importance du modèle triple hélice précité (autorités – industrie – centres de recherche), qui a également été appliqué au programme F-16. Le fait que de nombreuses applications concernent des biens ayant des applications tant militaires que civiles (biens dits à double usage) constitue un levier supplémentaire. Ce modèle économique n’a pas été appliqué lors de la procédure d’acquisition du F- 35, même si l’industrie belge sera impliquée dans la production de certains composants et dans des éléments des programmes de maintenance. »33

Ce dossier emblématique a mis en lumière que pour optimiser le volet industriel d'un projet d'une telle envergure, il faut se positionner dès le début de son développement.

Justement, la DIRS vise à doter notre pays d’une base industrielle et technologique de Défense belge performante en soutient de la politique de sécurité et de Défense nationale et en renforçant l’autonomie stratégique ouverte de l’UE. De cette manière, les investissements repris dans la loi de programmation militaire actualisée et dans le Plan STAR s’intègrent dès leur conception dans une véritable stratégie industrielle, de recherche et développement et européenne, et ce, dès le départ.

La DIRS affiche plusieurs objectifs :

- Positionner la Belgique comme un partenaire technologique pertinent, fiable et compétitif ;

- Garantir l’autonomie nationale dans les domaines critiques ;

- Générer un retour économique et social sous la forme de connaissances, d’emplois et de technologies liées à la défense et à double usage ;

- Assurer une coopération étroite entre la Défense et le SPF Économie, d’une part, et les acteurs du secteur BITD, d’autre part ;

- Atteindre le niveau d’ambition fixé dans les domaines prioritaires ;

- Protéger et ancrer les connaissances scientifiques, l’expertise technologique et la capacité industrielle ;

- Viser un effet multiplicateur pour un retour économique et social comparable à celui des autres États membres de l’UE ;

- Aligner la part de la base industrielle et technologique de défense belge sur la position socioéconomique de la Belgique au sein de l’UE.

La DIRS doit ainsi permettre de renforcer la base industrielle de Défense belge par un ancrage des activités et des emplois mais aussi de mobiliser un budget de 1,8 milliard d’euros inscrits dans la nouvelle loi de programmation militaire sur la période 2022-2030 pour stimuler et soutenir les projets de recherche, de développement et d’innovation.

Avec cette nouvelle stratégie, le souhait est de développer et d’ancrer davantage notre base industrielle et technologique de Défense dans un contexte de reconfiguration à l’échelle européenne. L’objectif est, entre autres, de promouvoir les collaborations avec des partenaires externes et d’impliquer davantage les centres de R&D belges, l’industrie et le monde universitaire dans la recherche et le développement de nouvelles capacités de Défense.

31 La Chambre des représentants de Belgique

32 Voir notamment dans les débats parlementaires de l’époque, SÉANCE PLÉNIÈRE (lachambre.be) pp. 24 et suivantes

33 Voorstel (lachambre.be) pp. 5

Pour contribuer à préserver et développer le savoir-faire belge, le Plan STAR a ainsi confirmé la volonté politique déjà clairement exprimée par le gouvernement au travers des « Intérêts belges dans le domaine de la politique de sécurité et de défense » de renforcer la BITD belge comme intérêt essentiel de sécurité (IES) et fait jouer à la Défense un rôle d’incubateur d’innovation dans ce domaine via la DIRS.

En outre, la DIRS doit permettre également à la Belgique de se positionner comme un partenaire technologique pertinent et fiable.

3. Interviews d’acteurs de terrain

Afin d’approfondir les perspectives en matière d’autonomie stratégique belge et européenne, il a semblé utile de réaliser une série d’interviews avec des acteurs de celles-ci au niveau de la Commission européenne, de l’Institut Royal de Sécurité et de Défense (IRSD) et du secteur industriel de Défense belge (AGORIA).

Pour ce faire, un même questionnaire34 leur a été soumis comme support aux échanges. La partie qui suit constitue une retranscription des grandes lignes de ces entretiens analysés à la lumière des éléments que nous avons déjà étudiés dans cet état de la question

3.1. Quelles perspectives d’autonomie stratégique pour la Commission européenne ?

Au sein de la Commission européenne35 , on nous indique d’emblée qu’il faut faire la distinction Ce sont donc bien les Etats-membres qui ont la charge de leur politique de Défense qui échappe donc aux institutions de l’UE comme la Cour de Justice de l’UE, le Parlement européen et la Commission européenne. Cependant, la Commission européenne a bien une compétence en matière de politique industrielle de Défense.

L’objectif affiché de la Commission est de faire fonctionner ce système en « symphonie » entre ce qui relève de l’intergouvernemental – la politique de Défense – et de la politique communautaire – la politique industrielle de Défense. Les premières initiatives en la matière remontent aux années 90 avec la volonté de développer un marché intérieur en matière de Défense

En 2009, deux directives importantes ont été prises selon la Commission

La directive 2009/81/CE relative à la coordination des procédures de passation de marchés par des pouvoirs adjudicateurs ou entités adjudicatrices dans les domaines de la défense et de la sécurité a pour objet de définir des règles spécifiques de passation de marchés pour les domaines de la Défense et de la sécurité afin d’ouvrir ce marché sans mettre en péril les intérêts légitimes en matière de sécurité des Etats-membres. Elle vise à accroître la concurrence et la transparence dans ces domaines pour que les sociétés européennes puissent répondre à davantage d’appels d’offres de marchés de Défense et de sécurité dans l’UE.

La directive s’applique, en principe, à tous les marchés d’acquisition de services, de travaux et d’équipements militaires et aux achats sensibles destinés à des fins de sécurité et comportant des informations classifiées.

Il est à noter que, en vertu de l’article 346 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE)36, les Etats-membres sont dotés d’un droit d’exemption de certains marchés du champ

34 Voir annexe.

35 Interview réalisée dans les locaux de la Commission européenne, le 6 septembre 2024.

36 Conformément à une jurisprudence constante de la Cour de justice de l’Union européenne, l’exemption prévue à l’article 346 du TFUE se limite à des cas exceptionnels et clairement définis. Il doit être démontré, sur la base d’une appréciation au cas par cas, que les conditions de son application sont remplies.

d’application de cette directive, lorsque cela est strictement nécessaire pour protéger leurs intérêts essentiels en matière de sécurité.

L’autre directive, 2009/43/CE, a, elle, comme objectif de définir les conditions des transferts de produits liés à la Défense dans la Communauté. L’objectif ici est d’éliminer les divergences qui existent entre les Etats-membres au niveau de leurs législations et de leurs règles encadrant les transferts de produits liés à la Défense (allant des fusils, bombes et torpilles aux sous-marins et aéronefs destinés à un usage militaire).

Elle instaure un système d’autorisation fondé sur l’octroi de licences de transfert aux fournisseurs et elle facilite la circulation transparente et sûre des produits liés à la Défense dans l’UE, contribuant ainsi à dynamiser la compétitivité du secteur européen de la Défense.

Sur cette base, en 2017, dans le périmètre du Cadre Financier Pluriannuel (CFP) 2014-2020, pour la première fois une partie du budget européen a été utilisée pour investir directement dans la base industrielle de Défense de l’UE via le Fonds Européen de la Défense (FED). Le FED est un instrument de financement de l'Union européenne pour soutenir et développer l'autonomie stratégique de son industrie de Défense. Sur la base d'un programme de travail annuel, des actions de développement et de recherche sont financés. Au cours de la période 2021-2027, un budget total de près de 8 milliards d'euros a été et sera alloué aux différentes actions et auxquels 1,2 milliards ont été ajoutés en 202337

Même avec un budget revu à la baisse par rapport aux ambitions affichées, il s’agit là d’une véritable révolution au sein de l’UE car pour la première fois l’Europe investit dans l’industrie spécifiquement de Défense et non uniquement à double usage (civilo-militaire)

Cette évolution s’explique principalement par les effets durables de la présidence de Donald Trump aux Etats-Unis mais aussi évidemment par la guerre en Ukraine. Cette dernière a conduit les Etatsmembres à se ruer littéralement sur l’industrie de Défense mettant en lumière l’extrême fragmentation du marché et de l’industrie et l’absence d’outil européen pour gérer la supply chain de Défense. La concurrence entre les Etats-membres sur les produits de Défense mais aussi la gestion des stocks et la crise de la fourniture de minutions sont autant de défis auxquels il a fallu faire face.

En juillet 2023, l’UE a donc mis sur pied le programme ASAP (action de soutien à la production de munitions). Ce règlement a permis de mobiliser d'urgence 500 millions d'euros provenant du budget de l'UE pour soutenir la montée en puissance des capacités de fabrication pour la production de munitions sol-sol et de munitions d'artillerie ainsi que de missiles.

En effet, au début de la guerre en Ukraine, très vite les Etats-membres se sont également rendu compte que personne ne connaissait réellement les capacités industrielles à disposition ou si telles munitions ou tels systèmes d’arme étaient interopérables. Si le but de la Commission n’est pas de rentrer en concurrence avec l’OTAN en termes de fixation des normes, l’objectif clairement affiché était de disposer désormais d’une véritable cartographie des chaines d’approvisionnement et d’identifier les goulets d’étranglement. Via ASAP, le but est d’agir directement sur le marché de Défense avec une logique de politique industrielle Le message adressé aux Etats-membres est le suivant: « Si vous achetez le même matériel européen, nous vous soutenons ». Le programme EDIP lancé en mars dernier prendra le relai lors de l’extinction d’ASAP.

On retrouve donc la philosophie que nous avons étudiée plus en avant dans cet état de la question : la volonté est – face à une augmentation souvent considérable des budgets nationaux en matière de Défense – de dépenser mieux et ensemble dans le chef des Etats-membres et de la Commission qui semble pleinement utiliser de sa compétence d’initiative

Concernant le regard porté sur la Belgique et ses collaborations, tout ce qui va dans le sens d’une consolidation du tissu industriel européen doit être soutenu. La masse critique est cependant selon la Commission atteinte lorsqu’au moins 3 Etats-membres sont impliqués.

Aujourd’hui, avec l’ensemble des initiatives européennes dont la volonté de voir émerger en quelque sorte un « single market act for Defense », la balle est clairement dans le camp des Etats-membres

37 Programme de travail et appels du Fonds européen de défense pour 2023 - Adopté ! (europa.eu)

qui doivent collaborer là où il y a un même besoin. L’horizon est celui d’une intégration par la coopération.

Pour les services de la Commission et en attendant les initiatives de la prochaine législature, l’ambition est désormais d’avoir un volet de Défense dans l’ensemble des politiques européennes comme celle de cohésion, ce qui n’est aujourd’hui que trop peu le cas. Nous sommes donc au début d’un processus

Si de nouvelles initiatives peuvent être prises pour renforcer le réflexe européen (Erasmus ou Bologne militaires par exemple), les moyens restent limités au regard des nombreux objectifs. En juin 2024, la Présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, a ainsi indiqué que l’Union européenne devait investir quelque 500 milliards d'euros pour renforcer sa Défense38

Et pour cause, selon de nombreux experts, l’existence d’un budget communautaire significatif, comme levier critique de l’émergence d’une identité de Défense commune et d’une démarche de coopération d’armement efficace au service de tous les pays de l’UE, constitue un impératif politique, technologique et industriel39

3.2. La DIRS, un changement de paradigme pour la Défense belge

Steven Lauwereys40 , colonel d’aviation et ChiefStrategyandPolicyOfficerà l’Institut Royal de Sécurité et de Défense et en charge du pilotage de la DIRS, indique en guise d’introduction que la stratégie développée au travers du Plan STAR constitue un changement de paradigme. Cela faisait plus de 20 ans que l’on n’avait pas travaillé à un tissu joignant industrie, recherche et Défense. La logique qui prévalait précédemment était soit d’acheter « sur étagère »41 ou de s’intégrer dans de grands programmes. Cependant, dans ces deux cas, il y a une grande différence avec la démarche développée aujourd’hui qui consiste à impliquer l’industrie et les centres de recherche en amont.

Si c’est l’IRSD qui pilote la DIRS et non le SPF Economie comme ce fut le cas par le passé, la volonté est bien d’impliquer le niveau fédéral et les niveaux régionaux. D’emblée l’objectif n’a pas été de se limiter à une « stratégie » selon le colonel mais de mettre en place des politiques ainsi que des projets pilote concrets pour découvrir et identifier les éventuelles difficultés, montrer le champ des possibles et lancer la nouvelle dynamique voulue.

Il revient également, via la DIRS, de changer la culture de nos entreprises en les aidant à se positionner à un niveau européen car les besoins de la Défense belges sont trop limités pour se positionner uniquement vis-à-vis d’elle.

Selon le colonel, à l’heure actuelle, aucune entreprise belge n’est capable de produire un « systemof systems » à l’instar de ce qu’exige un avion de combat par exemple. Sans une telle réflexion, l’autonomie stratégique européenne ne se fera jamais. « Nous avons l’obligation d’essayer » indique le colonel.

Les autres écueils clairement mis en évidence étaient d’une part d’identifier les niches dans lesquelles notre pays et son industrie peuvent se démarquer et ensuite de mieux tenir compte de l’ensemble de la chaine de fourniture entre autres en matière de munitions.

Ainsi, un exemple est mis en avant lors de cet entretien La Défense a mis en place un partenariat stratégique multinational relatif aux systèmes d’armement léger avec la FN Herstal. Ce partenariat42 doit permettre la poursuite et la satisfaction permanentes d’un double objectif : garantir l'opérationnalité, notamment en pérennisant la sécurité d’approvisionnement et l’autonomie stratégique, et répondre, tant quantitativement que qualitativement, aux besoins futurs en matière

38 L'UE doit investir 500 milliards d'euros pour renforcer sa défense selon Ursula Von der Leyen - RTBF Actus

39 Comité 4, op. cit., pp. 38

40 Interview réalisée dans les locaux de l’Institut Royal de Sécurité et de Défense le 11 septembre 2024

41 En achetant ce qui est produit en série sans adaptation aux besoins spécifiques de la Défense belge à l’instar du F-35.

42 Le partenariat comporte 5 volets principaux : maintien du patrimoine et maintenance préventive, corrective et évolutive ; gestion du patrimoine ; Engineering, consulting et research & development ; la location d’armes ou de systèmes d’armes (besoins ponctuels) ; et la fourniture de munitions de petits calibres.

d'armement léger et de munitions. Ce partenariat stratégique – une première pour notre pays –représente un montant de 1,463 milliard d’euros pour une durée de 20 ans. La DIRS a permis d’y intégrer une dimension de recherche et développement ainsi que l’encrage de la capacité de production des munitions en Belgique.

Selon le colonel, c’est une responsabilisation des acteurs de disposer d’une ligne de production chez nous, en Europe et en Belgique. Nous devons intégrer notre industrie dans un ensemble beaucoup plus large en s’assurant de la synchronisation des processus notamment politiques par exemple pour assurer la surveillance de l’espace aérien et le besoin d’assurer la compatibilité des systèmes d’armes.

L’autre dossier cité en exemple lors de cet entretien est celui du Système de Combat Aérien du Futur (SCAF). En avril dernier, la Belgique a ainsi officiellement signé un accord avec la France, l'Allemagne et l'Espagne pour obtenir le statut d'observateur dans ce programme, l’objectif étant de permettre à notre pays de suivre de près le développement de ce programme crucial pour l'avenir de la Défense belge et européenne. À cette occasion, un budget spécifique de 60 millions d'euros a été débloqué afin de positionner l'industrie belge de la Défense dans les meilleures conditions possibles pour participer à ce programme.

Concernant les initiatives européennes que nous avons étudiées, le colonel souligne qu’elles sont relativement nouvelles et donc difficiles à déjà évaluer même si on peut identifier certains doublons et lourdeurs

L’équilibre à trouver est d’être techniquement ET économiquement faisable tout en évitant les saupoudrages.

Il reviendra maintenant à synchroniser les différentes initiatives et écosystèmes industriels belges et européens, ce qui passera forcément par un changement de culture. En ce sens, toute initiative favorisant le réflexe européen est bonne à prendre

Et le colonel de terminer en insistant qu’il s’agit bien d’une responsabilité étatique car pour le secteur privé les risques sont souvent trop forts et les effets retours trop incertains.

3.3. L’autonomie stratégique : un long chemin vers une base industrielle réellement européenne

Georges Heeren43 , Senior Business Group Leader chez Agoria, indique que l’arrivée de la DIRS a marqué une évolution qui fait la différence dans le monde belge de la Défense et qui a été accueillie avec optimisme. L’objectif est d’augmenter la coopération et échanger les points de vue entre la Défense – que ce soit au niveau politique ou administratif – et l’industrie en s’accordant ensemble sur des objectifs communs.

Force est de constater que si les objectifs sont ambitieux, la DIRS nécessitera dans sa mise en œuvre plus de moyens humains et budgétaires pour pleinement les atteindre selon Monsieur Heeren

Le chemin à parcourir reste long pour le secteur industriel belge et européen. On sort d’une longue période d’ « optimisme » et d’espoir en une « paix éternelle » depuis les années 90. Durant cette période, beaucoup d’Etats n’ont plus vu le besoin de disposer d’une capacité matérielle étendue, de stocks et de la base industrielle qui va avec. L’option de la production « just in time » valait comme culture industrielle puisque constituer des stocks coûte cher et que cela correspondait à la logique militaire d’alors Ce mouvement fut le même en Belgique, dans l’UE et même au sein de l’OTAN

La crise de la Covid-19 et la guerre en Ukraine ont mis fin brutalement à ce modèle même si un mouvement de redéploiement de la Défense belge avait été amorcé au préalable sous le gouvernement De Croo via le Plan STAR et la loi de programmation militaire actualisée

43 Interview réalisée par visioconférence le 25 septembre 2024.

L’adoption de la DIRS après le début de la guerre en Ukraine montre, selon Monsieur Heeren, le besoin pour notre pays de s’adapter à ce qui se passe aux frontières de l’Europe et de définir certains domaines critiques pour notre Défense belge et européenne où être à la pointe et de redévelopper notre autonomie nationale selon ces domaines.

L’exemple des secteurs aéronautique et spatial belges est ainsi mis en avant durant cet entretien : si notre pays n’est pas capable de construire un système complet, nous disposons d’une expertise de pointe pour contribuer à l’autonomie stratégique européenne.

Il s’agit cependant d’un mouvement qui prend et prendra du temps comme nous l’indiquaient également nos deux autres acteurs précédemment interviewés

Au niveau européen, les différentes initiatives comme EDIP sont des pas en avant au regard du secteur industriel belge. Cependant, Monsieur Heeren insiste que, selon les traités européens, c’est la responsabilité première des Etats-membres de se montrer précurseurs et d’ainsi restructurer le marché européen de Défense et de l’industrie Comme nous l’indiquait la Commission, l’Union européenne joue davantage un rôle d’appui et de cohérence face à des décisions nationales à l’instar des initiatives que nous avons étudiées prises par la Belgique au sein du Benelux ou avec la France par exemple. Dans ce cadre, la Commission et les Etats-membres ont donc une responsabilité partagée.

Pour Monsieur Heeren, tant que la demande des Etats-membres est fragmentée, le marché sera également fragmenté. L’heure est donc à harmoniser les besoins car sans cela, le réflexe national restera prégnant car plus facile. Par exemple, la France se base actuellement sur un modèle fondé essentiellement sur quatre grandes entreprises dont l’Etat est actionnaire. Dans un tel modèle, l’industriel fournit ce qu’il sait faire et non ce qu’il doit faire.

L’Europe a donc beaucoup à apprendre des Etats-Unis où les fournisseurs composant leur BITD sont plus nombreux et sont mis en concurrence. L’Etat fait appel au marché et couvre les risques pris par l’industrie dans le développement et la production initiale d’un système d’arme. Cela permet de garder à la fois la capacité de développement et de production, c’est ainsi que l’on crée une capacité industrielle résiliente sans miser seulement sur un acteur unique.

Rien n’empêche non plus d’acheter du matériel américain à condition qu’il soit produit en Europe à l’instar de ce que font les Américains. Il faut savoir reconnaitre, qu’à l’heure actuelle, l’Europe n’a pas la possibilité de construire certaines capacités comme l’AWAX44 par exemple.

L’urgence actuelle est d’assurer la sécurité d’approvisionnement en Europe en commençant par la capacité de production Cette analyse rejoint donc celles des instances européenneset du colonel Lauwereys. Si l’Europe reprend les rênes de la production, alors on pourra également développer à terme de nouvelles capacités.

Concernant les initiatives prises par notre pays notamment avec les Pays-Bas (frégates et chasseurs de mines) et avec la France (CaMo), celles-ci ne constituent pas, selon lui, une collaboration industrielle au sens de la DIRS. Il s’agit avant tout de la décision de deux Etats d’acheter le même matériel tout en reconnaissant le rôle moteur joué par notre pays. Le futur grand pas qui sera à poser une fois ce nouveau matériel commun entré en action sera de s’entendre sur leur entretien et l’entraînement tout en assurant que la maintenance reste sur le sol belge ou avoir un accord avec des garanties pour assurer notre autonomie stratégique Cette analyse rejoint en grande partie celle de la Commission pour qui la masse critique éteint atteinte avec 3 Etats-membres.

La BITD de notre pays repose avant tout selon Monsieur Heeren sur les entreprises plutôt de grandes tailles qui exportent directement aux clients militaires comme par exemple : - La Fabrique Nationale ; - John Cockerill ; - OIP ; - Et MECAR.

44 NATO - Topic: AWACS : les yeux de l'OTAN dans le ciel

A ceux-ci, on doit également rajouter les entreprises comme Thalès, la SABCA et la SONACA qui sont des fournisseurs de sous-ensembles qui desservent aussi bien le marché civil que militaire Ces entreprises belges ont plutôt vocation à être intégrée dans des projets de plus grande envergure

4. Conclusion

L’autonomie stratégique est un concept large et multifacettes sur lequel nous n’avons pu, dans le cadre de cet état de la question, que nous concentrer sur quelques-unes.

Avoir une conscience géopolitique, prendre en main son autonomie et viser à identifier ses intérêts stratégiques communs n’est pas une évidence dans un monde où les crises se succèdent et où la notion de menace évolue sans cesse

Elle l’est d’autant moins quand, comme l’Union européenne, on est une instance politique composée de 27 Etats-membres aux intérêts et réalités variables.

A l’instar de la crise sanitaire liée à la pandémie de la Covid-19, les Etats-membres européens sont cependant aujourd’hui contraints par la guerre en Ukraine à revoir leur grille de lecture en matière de sécurité et de Défense. Ils doivent mettre en perspective un modèle fragmenté en matière de Défense et de BITD et essentiellement basé sur une approche nationale et/ou intergouvernementale.

La guerre en Ukraine montre clairement que nous devons, entre autres, devenir moins dépendants au niveau de la Défense et de la sécurité notamment vis-à-vis des Etats-Unis et de l’OTAN L’ambition de définir un véritable pilier européen au sein de l’Alliance atlantique relève d’une importance vitale.

Nos interviews ont montré que l’Union européenne avait beaucoup à apprendre du modèle américain pour réellement redimensionner sa BITDE. L’objectif ne doit cependant pas être de copier un modèle mais bien de créer le nôtre.

Plus que jamais, nous devons tirer les bonnes leçons et prendre des mesures pour accroître notre autonomie stratégique et notre sécurité d’approvisionnement nationale et européenne sur l’ensemble de la chaine inhérente à la production d’un système d’arme Il revient de prendre les mesures à l’échelon européen pour mieux appréhender l’ensemble de la chaîne d’une capacité militaire et d’un système d’arme.

La question du tissu industriel et économique est essentielle afin d’assurer notre autonomie stratégique mais aussi en termes d’emplois et de retours sociétaux.

Or, nous l’avons vu, les Européens sont parfois, bien malgré eux et leurs réflexes habituels, à la croisée des chemins : soit coopérer pour assurer leur autonomie stratégique soit laisser leurs BITD nationales continuer à s’étioler dans un monde de plus en plus complexe.

Le travail reste énorme mais des évolutions notoires sont en marche et notre pays fait partie des fers de lance en la matière.

Pendant longtemps, la vision de nombreux pays de l’Union européenne selon laquelle seuls l’OTAN et les Etats-Unis étaient en mesure de garantir leur sécurité a occulté en partie la discussion sur la question de l’autonomie stratégique comme voie possible dans le partage du fardeau de la défense de notre vieux continent45

Pour cela, l’articulation entre les politiques européennes – en matière de politique industrielle – et nationales – en matière de Défense – sera la clef et une condition de départ essentielle. L’européanisation des mécanismes et programmes nationaux apparait comme centrale si l’on veut joindre la parole aux actes.

Certains Etats indiquent la voie à suivre. Notre analyse montre que la Belgique – au travers du Plan STAR, de la DIRS et de la loi de programmation militaire actualisée – dessine clairement une voie même s’il reviendra de sortir des collaborations binationales pour atteindre une plus forte masse critique

45 Comité 4, op. cit., pp. 34

Sans doute par la taille de notre pays, nous semblons avoir compris que la collaboration, la synchronisation des processus et la recherche de synergies sont des processus essentiels à l’heure où les menaces sont grandes et les moyens budgétaires limités.

Le recentrage sur l’Union européenne dans les termes choisis dans l’interview du colonel Lauwereys en charge de la DIRS est un élément intéressant car il semble traduire le début d’un déplacement du centre de gravité traditionnellement plus orienté vers l’OTAN dans l’état-major

Même si la DIRS rappelle explicitement que les mesures possibles sont aux mains de diverses autorités compétentes aux niveaux fédéral, régional et communautaire, force est de constater qu’il reste encore du travail pour mieux impliquer dans notre pays les autorités des entités fédérées en charge de l’industrie et de la recherche.

La bonne implication de l’ensemble des acteurs au sein de notre Etat fédéral sera une clef lorsqu’il s’agira d’évaluer à terme la DIRS et les mécanismes et investissements qui en sont inhérents.

Au niveau européen, nous l’avons étudié, de nombreux mécanismes, fonds et programmes volontaristes ont été mis en place. Il revient maintenant d’activer ces fonds et textes législatifs dans la pratique et surtout de les faire connaître par les Etats-membres et les acteurs industriels A l’inverse des Etats-Unis46, l’approche européenne est en effet essentiellement bottom-up : la décision sur l’utilisation des fonds relève principalement du niveau régional, ce qui entraîne de facto de nombreuses duplications et une incapacité à optimiser les projets d’innovation au niveau européen faute d’une vision d’ensemble sur les technologies de production. Une approche top-down devrait pouvoir être pratiquée par la Commission pour mieux employer ces fonds, une telle stratégie permettrait par ailleurs une meilleure inclusion des petits pays dans les projets européens.

« Pour poursuivre dans la voie de la construction européenne en matière de défense, une volonté politique est plus que jamais nécessaire. Cela suppose d’insuffler une nouvelle dynamique de consolidation et d’intégration, par le développement de champions européens que pourraient faire ressortir l’établissement d’une directive « BuyEuropeanAct », la reconquête du marché européen et l’engagement des Etats-membres, au-delà du couple franco-allemand. »47 .

Il semble donc évident que l’Europe doit inventer des modalités d’application au secteur de la Défense du principe de préférence communautaire qui existe déjà pour d’autres politiques de l’UE, comme la politique agricole commune (PAC), par la mise en place d’un « BuyEuropeanAct »48 dans le domaine de la Défense qui viendrait compléter les directives déjà existantes et que nous avons analysées.

Cependant, nous pouvons faire preuve d’optimisme à l’heure de l’avènement d’une nouvelle Commission européenne qui, pour la première fois, compte désormais un Commissaire en charge de la Défense et où une meilleure implication du Parlement européen en la matière semble se dessiner

Alors que l’ « Europe de la Défense » semblait plus relever du slogan que d’une politique effective de l’Union européenne et de ses Etats-membres, la guerre en Ukraine a constitué un catalyseur en faveur d’une prise de conscience des 27. L’enjeu crucial réside désormais dans la faculté des Européens à répondre à ces besoins suivant une approche « flexilatérale »49, combinant logiques nationales, intergouvernementales et communautaires.

En conclusion, le succès des coopérations industrielles d’armement suppose la capacité d’adapter les projets à la nature des relations avec les pays partenaires, tout en recherchant à faire émerger une vision commune et partagée des enjeux de sécurité au niveau européen50 Toute initiative visant à renforcer le réflexe européen notamment dans les états-majors doit être encouragée.

Cela passera par des choix politiques, une évolution des mentalités mais également par une émancipation des entreprises européennes et du secteur de la recherche et développement avec le soutien des autorités publiques notamment face aux risques encourus

46 Comité 3, La Base industrielle et technologique de défense européenne, une opportunité historique in Revue Défense Nationale, Editions Comité d’Etudes de Défense Nationale, 2021/1 (N° 836), pp. 31

47 Ibid., pp. 32

48 Ibid., pp. 28

49 Comité 4, op. cit., pp. 37

50 Ibid., pp. 38

Autant de défis auxquels notre pays et ses entreprises semblent prêts à répondre, il restera désormais à pleinement mettre en œuvre la DIRS et notamment le Conseil industriel de Défense tel que prévu pour structurer et pérenniser la collaboration et la communication entre les différents acteurs51 et ainsi aller de l’avant

51 Comme confirmé en commission de la Défense nationale auditionnant l’état-major le 23 octobre 2024 sur les défis à venir Voir le rapport numérique : https://www.lachambre.be:443/media/index.html?sid=56U0084

État de la question 2024 - IEV • 16

Liste des questions aux personnes interviewées

1. Peut-on déjà tirer un premier bilan de la mise en œuvre de la loi de programmation militaire actualisée et plus spécifiquement au regard de la DIRS et de l’objectif d’autonomie stratégique belge et européenne ?

2. Le gouvernement Michel avait été le premier à adopter une loi de programmation militaire cependant celle-ci, selon certains, l’avait été sur plusieurs aspects sans réelle vision industrielle globale et sans réelle prise en compte de l’autonomie stratégique européenne. Le choix du F-35 pour remplacer les F-16 belges avait ainsi donné lieu à de nombreux débats. Comment expliquez-vous qu’il ait fallu autant de temps pour qu’une vision industrielle globale soit développée par notre pays ?

3. Le Haut Représentant de l’UE, fort du constat que le monde a changé notamment suite à la guerre russe en Ukraine, s’est prononcé pour une autonomie stratégique accrue de l’UE. Au regard des différentes initiatives européennes, quel regard portez-vous sur les pas posés par la Belgique dont la DIRS, le Plan STAR et la loi de programmation militaire actualisée ?

4. Dans quelles autres initiatives européennes notre pays pourrait s’intégrer en vue notamment de remodeler l’organisation du marché de la Défense de l’Union sur le long terme ? Est-ce qu’un modèle américain afin de favoriser le « made in Europe » est souhaitable et/ou réalisable alors que 80 % des achats des deux dernières années ont été effectués en dehors de l’UE, dont environ 60 % aux Etats-Unis, et qu’il sera difficile d’inverser cette tendance ? Comment voyez-vous l’articulation entre l’OTAN et l’UE dans le cadre de cette politique d’achats ?

5. Quel regard posez-vous sur la collaboration avancée de notre pays au sein du Benelux mais aussi notamment avec la France ?

6. Quel premier bilan peut être tiré des programmes d’achats communs menés avec la France (CAMO) et les Pays-Bas (frégates et chasseurs de mine) ?

7. Du point de vue industriel, quelles sont les spécialisations de l’industrie belge de Défense qui peuvent être mise en avant au sein de l’UE ?

8. Enfin, lorsque l’on parle « autonomie stratégique européenne » l’on a tendance à la résumer à une approche industrielle. Au niveau humain, des initiatives sont-elles déjà prises ou pourraient-elles prises afin de renforcer le « réflexe » européen à l’instar par exemple des programmes Erasmus+ ou Bologne dans le civil ?

Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.