Réflexions autour de la réforme du tronc commun-2019

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ETAT DE LA QUESTION

RÉFLEXIONS

AUTOUR DE LA RÉFORME DU TRONC COMMUN

Rim Ben Achour & Cyrille Cornerotte

ER Gilles Doutrelepont13 Bd de l’Empereur1000 Bruxelles
NOVEMBRE 2019
SOMMAIRE 1. Constats sur notre système d’enseignement 3 2. La réforme du tronc commun 4 3. Que nous apprend l’analyse des autres systèmes éducatifs ? 5 4. Conclusion : Le décret est voté. Et après ? 6

Le 2 mai 2019, le Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles (FWB) a adopté le « Décret portant les livres 1er et 2 du code de l›enseignement fondamental et de l›enseignement secondaire, et mettant en place le tronc commun » 1

Ce décret marque une nouvelle étape dans la concrétisation du Pacte pour un enseignement excellence. L’avis N° 3 du Pacte pour un enseignement d’excellence, adopté par le groupe central du Pacte2, proposait en effet « la mise en place d’un tronc commun polytechnique et pluridisciplinaire jusqu’à la troisième secondaire » 3

Depuis l’adoption de l’avis N° 3, les débats autour du tronc commun se sont souvent focalisés autour de la question de l’allongement d’un an de celui-ci. Si le décret adopté prévoit bien cet allongement d’un an du tronc commun, sa portée est bien plus large.

Cette note propose une présentation de la réforme adoptée. Dans la première partie, nous examinerons les problèmes soulevés par le système actuel. Dans une deuxième partie, nous présenterons les différents aspects de la réforme. Dans la troisième partie, nous analyserons la réforme à la lumière des comparaisons des autres systèmes éducatifs. Enfin, en guise de conclusion, nous dresserons des perspectives visant à approfondir la réflexion autour de l’amélioration du continuum pédagogique.

1. Constats sur notre système d’enseignement

Le système scolaire de la FWB est marqué par trois phénomènes.

Premièrement, une proportion importante d’élèves est en retard scolaire. La durée de scolarisation en Fédération Wallonie-Bruxelles est de 12 ans (6 ans en primaire et 6 ans en secondaire). L’obligation scolaire étant fixée à 6 ans4, après un parcours de 12 ans, chaque élève devrait en théorie sortir de l’enseignement secondaire l’année de ses 18 ans. Les élèves dont le parcours scolaire dépasse cette durée sont comptabilisés en retard scolaire. Selon les indicateurs de l’enseignement, en 2016-2017, 46 % des élèves qui fréquentent l’enseignement secondaire ordinaire de plein exercice sont en retard scolaire en FWB.5

Ces chiffres sont confirmés par le Programme international pour le suivi des acquis des élèves (PISA) organisé par l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE). Lors de l’enquête PISA de 2012, avec un pourcentage de 48% d’élèves ayant redoublé au moins une fois à l’âge de 15 ans, la FWB se place en dernière position des 66 pays ayant participé à l’enquête PISA. La moyenne pour l’OCDE étant de 12%.6

Deuxièmement, ce taux de redoublement n’est pas nécessairement garant d’un niveau d’acquisition des savoirs optimal en comparaison des autres pays de l’OCDE. Par rapport au niveau atteint par les jeunes de 15 ans, la FWB se classe 14ème sur 22 parmi les pays européens ayant participé aux tests de l’OCDE.7

Troisièmement, notre système scolaire est caractérisé par l’inégalité. L’origine socioéconomique des élèves pèse sur leur parcours scolaire, tant en termes de retard scolaire que d’orientation. Si l’on classe les élèves de 16 ans par décile selon leur indice socioéconomique (le premier décile regroupant les élèves issus des milieux les moins favorisés), les résultats scolaires des élèves issus de milieux défavorisés sont plus faibles comparativement aux résultats des élèves d’origine socioéconomique plus privilégiée ou fréquentant un établissement accueillant des élèves issus d’un milieu socioéconomique favorisé. Les indicateurs 2018 de l’enseignement précisent :

1 Décret portant les livres 1er et 2 du code de l›enseignement fondamental et de l›enseignement secondaire, et mettant en place le tronc commun disponible sur le site internet du Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles, à l’adresse http://archive.pfwb.be/1000000020c10f4, dernière consultation le 19/07/2019.

2 Le Groupe central est composé d’un représentant détaché de chaque pouvoir organisateur (PO), de chaque syndicat d’enseignant, de chaque fédération de parents, de représentants de l’administration générale de l’Enseignement, d’un représentant du ministre de l’Enseignement Supérieur et d’un représentant du ministre de l’Enseignement de Promotion sociale. Informations disponibles sur le site du Pacte pour un enseignement d’excellence à l’adresse http://www. pactedexcellence.be/index.php/les-acteurs-du-pacte/, dernière consultation le 08/07/2019.

3 Avis N° 3 du Groupe central, p.3 disponible sur le site internet du Pacte pour un enseignement d’excellence à l’adresse http://www.pactedexcellence.be/wp-content/uploads/2017/05/PACTE-Avis3_versionfinale.pdf, dernière consultation le 08/07/2019.

4 L’obligation scolaire sera abaissée à partir du 1er septembre 2020.

5 Les indicateurs de l’enseignement 2018, p.30, disponible sur le portail de l’enseignement en Fédération Wallonie-Bruxelles à l’adresse http://www.enseignement.be/index.php?page=0&navi=2264, dernière consultation le 08/08/2019.

6 Contribuer au diagnostic du système scolaire en FWB, Rapport à la Vice-Présidente, Ministre de l’Education, de la Culture et de l’Enfance, 10 juin 2015, p.34, document disponible sur le site internet du Pacte pour un enseignement d’excellence à l’adresse http://www.pactedexcellence.be/wp-content/uploads/2017/04/Rapport-final-FWB.pdf, dernière consultation le 08/08/2019.

7 Ibid., p.39

Etat de la Question 2018 • IEV 3

« Dans le premier décile, 76 % des élèves sont en retard, 53 % des élèves sont dans le qualifiant et 7 % des élèves sont dans le spécialisé alors que ces proportions atteignent respectivement 36 %, 19 %, et 2 % dans le décile le plus favorisé. »8

2. La réforme du tronc commun

Le projet de décret balisant le nouveau tronc commun comporte de nombreux volets que nous ne pouvons détailler exhaustivement dans cette note. Cette réforme du tronc commun propose des changements importants dans la philosophie sur laquelle repose le parcours des élèves.

Outre l’allongement, l’exposé des motifs du décret identifie les deux piliers du nouveau tronc commun : redéfinir le parcours des élèves de la première maternelle à la troisième secondaire et mener chaque élève à maitriser un socle ambitieux de savoirs avec pour perspective la lutte contre le redoublement et l’échec scolaire.9

La redéfinition du parcours des élèves s’appuie sur la mise en place d’un tronc commun polytechnique et pluridisciplinaire. Celui-ci repose sur sept domaines d’apprentissage : Français, Arts et Culture (langue française, langues anciennes, éducation artistique et culturelle) ; Langues modernes ; Mathématiques, Sciences et Techniques ; Sciences humaines et Cours philosophiques (histoire, géographique, cours de philosophie et de citoyenneté) ; Éducation physique, Bien-être et Santé. Les deux derniers domaines « Créativité, Engagement et Esprit d’entreprendre » et « Apprendre à apprendre et Poser des choix » seront transversaux et déclinés à travers plusieurs disciplines.10

Cette redéfinition des savoirs vise à offrir à tous les élèves un accès aux différentes formes de savoirs (savoirs de base, techniques et artistiques) afin de favoriser une orientation positive tout au long du tronc commun. C’est une des réponses apportées face au constat que l’origine socioéconomique des élèves influence leur orientation ultérieure.

Le second pilier vise à amener tous les élèves à maitriser un socle de savoirs au sein de ces différentes disciplines. Le décret mobilise plusieurs leviers pour y parvenir.

Le premier levier vise à la mise en place d’un dispositif d’accompagnement personnalisé afin d’accompagner au mieux les élèves en difficultés. Ce dispositif prévoit trois moyens d’intervention.

Le premier moyen d’accompagnement personnalisé est proposé au sein de la classe et encourage les enseignants à « s’adapter à des profils d’apprenants variés, mais tout en gardant un but final commun, en termes d’acquisition » 11 Il s’agit pour l’enseignant d’essayer de prendre en compte les profils différents des élèves et de proposer un enseignement adapté.

Le deuxième moyen concerne l’intégration, au sein de la grille horaire obligatoire des élèves, de deux périodes consacrées à la remédiation, à la consolidation ou au dépassement. Ces deux périodes permettront aux élèves de recevoir deux heures de remédiation pour les matières face auxquelles ils éprouvent des difficultés. Pour les élèves qui n’éprouvent pas de difficultés particulières, ces deux heures permettront de consolider ou d’approfondir certaines matières.

Enfin, comme troisième moyen, le décret précise que : « les élèves qui ont besoin d’un soutien accru ne pouvant ni être rencontré dans la classe ni régulé à travers les périodes d’accompagnement personnalisé structurelles pourront bénéficier d’un soutien durant des périodes en dehors de la grille hebdomadaire imposée et, le cas échéant, être pris en charge par des « spécialistes » : logopèdes, orthopédagogues, suivi dys —, suivi psychosocial, etc. » . 12

8 Les indicateurs de l’enseignement 2018, op. cit., p.26

9 Décret portant les livres 1er et 2 du code de l’enseignement fondamental et de l’enseignement secondaire, et mettant en place le tronc commun, exposé des motifs, op. cit.

10 Ibidem.

11 Article 2.1.1-1, Décret portant les livres 1er et 2 du code de l’enseignement fondamental et de l’enseignement secondaire, et mettant en place le tronc commun, exposé des motifs

12 Décret portant les livres 1er et 2 du code de l’enseignement fondamental et de l’enseignement secondaire, et mettant en place le tronc commun, exposé des motifs, op. cit.

Etat de la Question 2018 • IEV 4

Pour lutter contre le décrochage scolaire, le décret précise également que : «Dans le cadre de leur projet d’école, les écoles secondaires peuvent mettre en place un dispositif interne d’accrochage scolaire (DIAS) »13 avec pour objectif d’ « aider les élèves en situation de décrochage scolaire ou d’absentéisme à reconstruire la confiance et l’estime de soi et à développer tant un projet personnel qu’un projet de formation. »14

Le décret encourage également les écoles à mettre en place des évaluations formatives de façon à déceler les lacunes des élèves et à mettre sur pied les procédures d’accompagnement personnalisé. L’article 1.5.1-5 du décret précise que : « Chaque école met en place les pratiques de différenciation et l’évaluation formative. »15

Outre l’accompagnement personnalisé, le second levier mobilisé par le décret vise à renforcer l’enseignement maternel. Ce renforcement a en partie déjà été concrétisé par l’adoption du Décret relatif à l’encadrement dans l’enseignement maternel.16 Plusieurs études ont en effet démontré l’importance de l’enseignement maternel pour poser les bases des apprentissages futurs. Le nombre d’élèves par enseignant dans l’enseignement maternel en FWB est supérieur à la moyenne des pays de l’OCDE. Ce renforcement vise à combler ce retard.17

Par ailleurs, le renforcement de l’encadrement maternel est aussi envisagé au travers de l’élaboration de référentiels. Jusqu’à présent, contrairement à la plupart des pays européens, la FWB ne disposait pas de référentiel pour ce niveau d’enseignement. Les référentiels précisent les objectifs et les savoirs précis qui doivent être appris aux différents moments de la scolarité.18

Le projet de décret mettant en place le nouveau tronc commun met donc l’accent sur trois éléments :

• un allongement du tronc commun depuis la première maternelle jusqu’à la troisième secondaire ;

• une réforme des contenus d’apprentissage afin de favoriser une orientation positive des élèves ;

• un accompagnement personnalisé et une différenciation des apprentissages afin de favoriser l’acquisition des acquis nécessaires par tous les élèves.

3. Que nous apprend l’analyse des autres systèmes éducatifs ?

Il n’est évidemment pas encore possible d’analyser les retombées de ce nouveau décret. Sa mise en œuvre sera progressive.19 Néanmoins, il est possible de comparer les options choisies avec les systèmes des autres pays de l’OCDE et de leurs performances.

Actuellement et avant l’entrée en vigueur complète de la réforme adoptée, le système de la FWB se caractérisait par la mise en place d’un tronc commun depuis la première année de l’enseignement fondamental jusqu’au début de l’enseignement secondaire. La filière de formation professionnelle ne pouvait débuter qu’à partir de la troisième année de l’enseignement secondaire. Néanmoins, certains élèves n’obtiennent pas le certificat d’études de base (CEB). Ces élèves se voyaient alors proposer un parcours différencié lors du premier degré de l’enseignement secondaire.20

Ce système en vigueur en FWB est qualifié de modèle de la séparation. Il comporte comme principales caractéristiques : un tronc commun court, un taux de redoublement élevé, des classes de niveau dans certains

13 Art. 1.7.1-26 du Décret portant les livres 1er et 2 du code de l’enseignement fondamental et de l’enseignement secondaire, et mettant en place le tronc commun.

14 Ibidem

15 Article 1.5.1-5 du Décret portant les livres 1er et 2 du code de l’enseignement fondamental et de l’enseignement secondaire, et mettant en place le tronc commun, op. cit.

16 Décret relatif à l’encadrement dans l’enseignement maternel, disponible à l’adresse https://www.gallilex.cfwb.be/document/pdf/44435_000.pdf, dernière consultation le 08/08/2019.

17 Contribuer au diagnostic du système scolaire en FWB, Rapport à la Vice-Présidente, Ministre de l’Education, de la Culture et de l’Enfance, 10 juin 2015, op. cit., p.61.

18 Décret portant les livres 1er et 2 du code de l’enseignement fondamental et de l’enseignement secondaire, et mettant en place le tronc commun, exposé des motifs, op. cit.

19 La nouvelle organisation pédagogique s’appliquera aux trois années de l’enseignement maternel dès le 1er septembre 2020. Elle concernera les deux premières années de l’enseignement primaire à partir du 1er septembre 2021. Ensuite, l’entrée en vigueur suivra la cohorte d’élèves fréquentant la deuxième année du primaire dans l’année 2021-2022.

20 DRAELANTS H., DUPRIEZ V., MAROY C., Le système scolaire. Dossier du CRISP n°76, CRISP, Bruxelles, 2011, pp. 60-62.

Etat de la Question 2018 • IEV 5

établissements en primaire, une orientation selon les performances et un faible recours à l’enseignement individualisé (la remédiation par exemple). Il existe d’autres systèmes scolaires de ce type en Europe (Allemagne, Pays-Bas, Luxembourg, Suisse). Le modèle de séparation est caractérisé par des performances moyennes ou faibles, des inégalités scolaires ou sociales fortes, une proportion d’élèves en difficultés importante et une élite peu développée.21

Outre ce modèle de séparation, il existe trois modèles d’intégration : individualisée (Finlande, Corée du Sud, Islande, Danemark, Norvège, Japon), à la carte (Royaume-Uni, Canada, Etats-Unis) et uniforme (France, Espagne, Portugal, Italie, Grèce).22

Parmi ces trois modèles de système scolaire, c’est le système d’intégration individualisée qui produit les meilleurs résultats : de meilleures performances, une élite scolaire importante mais surtout un pourcentage moindre d’élèves en grande difficulté. C’est un modèle plus égalisateur, avec des disparités sociales et scolaires limitées. Le modèle d’intégration uniforme se caractérise par contre par des performances peu élevées et un important pourcentage d’élèves en difficulté.23

Le système scolaire de séparation de la FWB, où les parcours peuvent se différencier plus tôt, a tendance à creuser les inégalités. Les élèves les plus performants sont orientés vers des filières qui conduisent à des positions sociales plus hautes (filières universitaires à haut potentiel). Les élèves les moins performants sont envoyés dans les filières peu valorisées, comptant proportionnellement plus d’élèves issus de milieux défavorisés.24

Les enquêtes internationales démontrent aussi que les systèmes dits individualisés (tronc commun long, classes hétérogènes, etc.) engendrent moins d’inégalités que le système de séparation.25 Selon Dominique Lafontaine, le modèle d’intégration individualisée est un modèle « plus égalisateur » 26

L’allongement d’un an du tronc commun, la suppression de la première différenciée ou encore la mise en place d’un accompagnement personnalisé constituent trois éléments centraux de la réforme du tronc commun et sont de nature à rapprocher la FWB des caractéristiques de ces systèmes scolaires les plus performants et les plus égalisateurs. L’ambition est d’offrir un socle commun de savoirs élevé à tous les élèves.

L’évaluation de la mise en place du tronc commun devra permettre de vérifier que les objectifs du décret sont bien rencontrés. En parallèle, la réflexion autour de notre système scolaire et de son amélioration doivent se poursuivre.

4. Conclusion : Le décret est voté. Et après ?

La réforme du tronc commun ambitionne de contribuer à une orientation positive et de transmettre les acquis nécessaires à chaque élève, quel que soit son milieu d’origine socio-économique. L’ambition affichée est de réduire le redoublement de 50% d’ici 2030 et, comme la seconde partie l’a démontré, plusieurs moyens sont mobilisés pour y parvenir.27

Ce nouveau tronc commun trouve son origine au sein de l’avis N° 3 du groupe central. La création d’un consensus parmi les représentants des acteurs de l’enseignement et l’adoption du décret étaient deux étapes importantes à franchir dans le cadre de la réforme du parcours scolaire des élèves. Néanmoins, une mise en œuvre réussie nécessite de rassembler plusieurs conditions.

Premièrement, il s’agira de garantir qu’au cours de leur parcours scolaire, les élèves puissent réellement avoir

21 LAFONTAINE D., Vingt ans de réformes dans l’enseignement en Fédération Wallonie-Bruxelles : quelles avancées, quels défis pour demain ?, Exposé lors du colloque de l’Institut Emile Vandervelde L’école de demain, Namur, 14/05/2016.

22 LAFONTAINE D., op. cit.

23 MONS N., Les nouvelles politiques Educatives, PUF, Paris, 2007, pp.116-134. Cité dans LAFONTAINE D., op. cit.

24 JACOBS D., Chaque talent compte-t-il ? La position des enfants issus de l’immigration dans les écoles belges. In : Itinera Institute Discussion Paper, Intinera Institute, Bruxelles, 2012, n°9, 26 p. Cité dans : DANHIER J., DEVLEESHOUWER P., JACOBS D., RÉA A., Comment rendre notre système éducatif plus juste et plus efficace ?, contribution réalisée dans le cadre de l’opération de réflexion collective « Citoyens engagés », p. 5. Disponible sur internet (dernière consultation le 13/04/2016) : http://www.citoyensengages.be/Questions/Comment-rendre-notre-systeme-educatif-plus-juste-e/Contexte.aspx?ThID=7

25 JACOBS D., op. cit., p. 5.

26 LAFONTAINE D., op. cit.

27 « On pourra redoubler en première secondaire », Le Soir, article mis en ligne le 19 septembre 2018 disponible sur le site du Soir à l’adresse https://plus.lesoir. be/196489/article/2018-12-19/pourra-redoubler-en-premiere-secondaire

Etat de la Question 2018 • IEV 6

accès aux enseignements polytechniques. Cela est nécessaire pour favoriser une orientation positive des élèves mais également pour offrir l’opportunité à ceux qui le souhaitent de s’émanciper dès le plus jeune âge dans les disciplines artistiques ou techniques. A cet égard, les moyens nécessaires ou des collaborations renforcées, entre établissements ou avec l’environnement de l’école (secteur associatif, culturel et sportif), devront être mises en œuvre pour garantir cet accès à tous les élèves.

En outre, concernant l’accompagnement personnalisé des élèves, les moyens nécessaires devront être dégagés pour concrétiser dans les faits cet engagement. Il en va du bien-être des élèves et de leur réussite mais également des conditions de travail des enseignants qui ne pourront assumer seul l’accompagnement personnel de tous les élèves.

Par ailleurs, pour porter pleinement ses effets, toute réforme du système scolaire nécessite une certaine appropriation sur le terrain. Car « (…) toute inflexion politique d’un système éducatif (la modification des contenus à enseigner, la suppression ou l’ajustement de filières de formation, la valorisation des finalités de l’école, la lutte contre les inégalités de résultats des élèves, etc.) implique nécessairement un ajustement du travail pédagogique et l’échec de multiples initiatives de ce type s’explique entre autres par la difficulté à transformer le travail pédagogique dans les classes et les écoles. Dans cette perspective (…) l’importance, vu la complexité du travail attendu, de pouvoir s’appuyer sur un corps enseignant dont l’autorité, c’est-à-dire le pouvoir et la légitimité, est forte» 28

Le nouveau tronc commun fera aussi face à ces deux défis centraux. D’une part, le premier consistera à fédérer le plus largement possible les énergies des équipes éducatives autour d’objectifs communs, notamment en les impliquant davantage dans l’évaluation des réformes mises en œuvre. A cet égard, si le nouveau tronc commun a été réfléchi par les représentants des acteurs de l’enseignement, il ne fait pas l’unanimité au sein des enseignants. Une évaluation participative du tronc commun permettrait de connaitre ce dont les enseignants ont réellement besoin pour mettre en œuvre cette réforme de manière réussie. Le nouveau cadre de pilotage qui crée les conditions d’un dialogue au sein de tous les établissements scolaire pourrait par exemple être mobilisé à cet effet.29

D’autre part, le second défi consistera à valoriser davantage la fonction d’enseignant et à renforcer l’attractivité de la profession. La mise en œuvre de la réforme de la formation initiale des enseignants et la réforme de la formation continue des enseignants y participeront et permettront de donner aux enseignants les clés pour faire face aux évolutions des défis de l’enseignement.

Enfin, le décret prévoit une évaluation du tronc commun : « À partir de l’année scolaire 2021-2022 et jusqu’en 2030 au minimum, le Gouvernement évalue annuellement les effets de la nouvelle organisation de l’enseignement sur la base d’un rapport de la Commission de pilotage ».30

Cette évaluation pourrait de ce point de vue être l’opportunité d’approfondir la réflexion autour du tronc commun. Un champ d’investigation privilégié pourrait être le renforcement des liens entre l’enseignement et le secteur de l’enfance. Avant l’enseignement maternel, l’accueil de la petite enfance recèle en effet un potentiel important pour lutter contre les inégalités. Différentes études internationales l’ont démontré.31 L’accès aux milieux d’accueil devra être garanti et des liens entre les milieux d’accueil et les établissements scolaires devront être approfondis.

Un autre champ d’investigation concerne le renforcement des liens entre les secteurs scolaire et extrascolaire. Actuellement, de nombreux enfants n’ont pas accès aux activités culturelles et sportives extrascolaires ou au soutien scolaire. Ce manque d’accès s’explique en partie par le manque de lien entre le secteur scolaire et le secteur extrascolaire. Les activités ne sont pas toujours facilement accessibles depuis l’école. Or, ces activités représentent le troisième milieu de vie de l’enfant et contribuent également à son émancipation. La mise en place d’un plan ambitieux rapprochant scolaire et extrascolaire pour en faciliter l’accessibilité pourra aussi contribuer au développement et à l’émancipation de chaque enfant. La lutte pour l’égalité ne devant pas s’arrêter aux frontières de l’école.

28 DUPRIEZ V., Peut-on réformer l’école ? Approches organisationnelle et institutionnelle du changement pédagogique, De Boeck, Louvain-La-Neuve, 2015, p.161.

29 Décret modifiant le décret du 24 juillet 1997 définissant les missions prioritaires de l›enseignement fondamental et de l›enseignement secondaire et organisant les structures propres à les atteindre afin de déployer un nouveau cadre de pilotage, contractualisant les relations entre la Communauté française et les établissements scolaires, disponible à l’adresse http://www.ejustice.just.fgov.be/cgi/article_body.pl?language=fr&caller=summary&pub_date=18-1009&numac=2018014116, dernière consultation le 19 juillet 2019.

30 Art. 2.6.1-1 du Décret portant les livres 1er et 2 du code de l’enseignement fondamental et de l’enseignement secondaire, et mettant en place le tronc commun, op. cit.

31 Voir, notamment : La transition en cours dans la garde et l’éducation de l’enfant. In : Bilan Innocenti 8, UNICEF, Florence (Italie), décembre 2008, p.40. Disponible sur internet à l’adresse https://www.unicef.fr/sites/default/files/userfiles/garde_education_enfant.pdf, dernière consultation le 22/04/2016.

Etat de la Question 2018 • IEV 7

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RÉSUMÉ

Le 2 mai dernier, le Parlement de la Fédération Wallonie Bruxelles a adopté le décret mettant en place le tronc commun. Ce décret marque une nouvelle étape dans la concrétisation du Pacte pour un enseignement d’excellence.

Ce état de la question propose, après avoir posé certains constats sur notre système d’enseignement, d’examiner les principales mesures de ce décret en vue de la mise en place d’un tronc commun d’enseignement de la maternelle à la troisième secondaire. Cette note comparera ensuite notre modèle d’enseignement actuel, basé sur une séparation précoce des élèves, avec d’autres modèles développés dans les pays de l’OCDE. Enfin, l’état de la question envisagera les conditions nécessaires pour réussir la mise en place de ce tronc commun d’enseignement.

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