Le 4ème paquet ferrovière Européen et la libération des services intérieures des voyageurs-2017

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ETAT DE LA QUESTION

LE QUATRIÈME PAQUET

FERROVIAIRE EUROPÉEN ET LA LIBÉRALISATION DES SERVICES INTÉRIEURS DE VOYAGEURS

ER Gilles Doutrelepont13 Bd de l’Empereur1000 Bruxelles OCTOBRE 2017
Olivier Legrand

2. En quoi consiste le quatrième paquet ferroviaire ?

3. Le règlement OSP et la libéralisation du transport intérieur de voyageurs

3.1. Ouverture des transports intérieurs de voyageurs pour des services commerciaux

3.2. Attribution des contrats de service public

3.3. Quand le nouveau système d’attribution des contrats de service public entrera-t-il en vigueur ? 4.

1. Introduction
2.1. Le volet technique
2.2. Le volet politique
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Libéralisation du rail : quel avenir pour la SNCB ? SOMMAIRE

1. Introduction

Depuis le début des années 1990, la Commission européenne a entrepris de libéraliser les grands services en réseaux tels que la poste, l’énergie ou les télécommunications. Le bilan est pour le moins mitigé. La dégradation du service public, l’augmentation des prix, le marché non concurrentiel et la régression sociale dans le chef des travailleurs qui œuvrent au fonctionnement de ces services ont en effet souvent émaillé cette vague de libéralisation.

Le rail n’échappe pas à la tendance vers la libéralisation. L’objectif de la Commission européenne est de créer un espace ferroviaire unique européen supposé revitaliser un secteur en perte de vitesse face à ses concurrents directs que sont la route et le transport aérien.

La libéralisation du secteur ferroviaire a été réalisée graduellement, suivant la formule dite « open access ». Ceci signifie que toute entreprise détenant une licence ferroviaire dans un Etat membre de l’UE et un certificat de sécurité belge1 peut opérer des services ferroviaires en Belgique.

C’est le cas :

- depuis 2003, pour le transport international de marchandises ;

- depuis 2007, pour tout transport de marchandises, y compris national ;

- depuis 2010 : pour le transport international de voyageurs.

Devant les réticences de nombreux États membres, la Commission européenne n’était toutefois pas encore parvenue, jusqu’à l’adoption toute récente du quatrième paquet ferroviaire, à imposer le dernier stade de libéralisation, celui des services intérieurs de voyageurs.

La spécificité du transport domestique de voyageurs tient à la proportion considérable de lignes sous obligations de service public : 90% des voyages effectués en train le sont en effet sur des lignes sous obligations de service public2

Ces lignes constituent généralement un ensemble non rentable, opéré par l’opérateur historique en contrepartie de droits exclusifs. En d’autres termes, il s’agit d’un service qui, par nature, n’est pas rentable et est largement compensé par l’État3. Cette compensation présente l’avantage d’éviter que l’opérateur se focalise sur les seules lignes à haut intérêt commercial, au détriment de dessertes moins rentables mais pourtant indispensables aux citoyens.

Il va sans dire que le transport domestique de voyageurs possède des effets structurants au niveau économique, social et territorial. C’est la raison pour laquelle de nombreux Etats européens restent attachés au maintien d’un service public fort, au nom de l’intérêt général de leurs citoyens.

A cette vision de service public portée par la gauche, la droite oppose les vertus de la libre concurrence, supposée stimuler les performances, l’innovation ainsi qu’une baisse des prix.

Pourtant, les avantages de la libre concurrence restent à démontrer. Ainsi, l’étude d’impact qui a précédé les travaux sur le quatrième paquet ferroviaire n’a pu mettre en avant que les seules expériences allemande, suédoise et hollandaise4 d’ouverture des services nationaux de transports de voyageurs5. A l’inverse, la privatisation du rail britannique est souvent citée comme l’exemple de ce qu’il ne faut pas faire en la matière, que ce soit pour l’usager, qui paye plus cher pour un service de moindre qualité, ou pour la collectivité, contrainte à subsidier des entreprises privées. Au point que les citoyens britanniques sont aujourd’hui largement favorables à une renationalisation complète du secteur.

Les avantages d’une ouverture à la concurrence doivent aussi s’analyser au regard de ses

1 Délivré par le SSICF, soit le Service de Sécurité et d’Interopérabilité des Chemins de Fer.

2 Communication de la Commission européenne relative au « Quatrième paquet ferroviaire – achever l’espace ferroviaire unique européen pour stimuler la compétitivité et la croissance européennes », 2013.

3 En 2011 et 2012, quelque 18 milliards d’euros d’aide publique ont été octroyés pour des obligations de services publics ferroviaires dans l’UE, dont 6 milliards en Allemagne, 4,5 milliards en France et 2 milliards en Italie. « Rapport de la Commission au Conseil et au Parlement européen : Quatrième rapport sur le suivi de l’évolution du marché ferroviaire », 2014, p. 54.

4 Le soi-disant « exemple » hollandais devant être pris avec une extrême prudence, la privatisation de la ligne Amsterdam-Bruxelles ayant contribué à pénaliser gravement les finances de la NS (société de chemins de fer néerlandaise).

Voir notamment : https://doorbraak.be/privatisering-de-moeder-van-alle-kwaad/?print=pdf

5 Si l’étude a conclu, dans ces pays, à une réduction des coûts pouvant aller, selon les cas, jusqu’à 20 à 30%, le caractère récurrent de cette économie est vivement contesté. Voy. not. Analyse d’impact sur l’ouverture des services nationaux de transport de voyageurs par chemin de fer, SWD (2013)10 final, p. 68.

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possibles effets négatifs : augmentation des coûts de coordination, risque de désorganisation des services, offres anormalement basses mettant en péril la continuité du service, distorsion de concurrence, concentration du marché, etc.

A cet égard, la libéralisation du fret ferroviaire en 2007 n’a pas pu démontrer une incontestable pertinence du modèle libéral : l’objectif de renforcer la part modale du rail au détriment du transport routier reste, pour l’instant, hors d’atteinte.

Bref, c’est un grand saut vers l’inconnu que le transport intérieur de voyageurs s’apprête à effectuer depuis l’adoption toute récente du quatrième paquet ferroviaire.

2. En quoi consiste le quatrième paquet ferroviaire ?

Le quatrième paquet ferroviaire correspond à un ensemble de textes, composé de deux grands volets : un volet « technique » et un volet « politique ».

2.1. Le volet technique

Le volet technique contient une série de propositions visant à réduire les obstacles divers auxquels sont confrontés les opérateurs ferroviaires et les fabricants de matériel roulant6

Il vise notamment à :

dispenser les entreprises d’introduire plusieurs demandes dans le cas d’opérations transfrontalières. A l’avenir, l’Agence ferroviaire européenne (ERA) délivrera les autorisations de mise sur le marché des véhicules et les certificats de sécurité des entreprises ferroviaires. Ces autorisations seront valables dans toute l’UE alors qu’actuellement, les entreprises et les constructeurs ferroviaires doivent faire l’objet d’une certification distincte délivrée par les autorités nationales de sécurité de chacun des États membres où ils prévoient d’exploiter des trains.

créer un guichet unique, qui servira de point d’entrée unique pour toutes ces demandes. Ce système d’information et de communication rendra la procédure simple et transparente. Il permettra aussi d’assurer la cohérence dans le cas de demandes multiples pour des autorisations similaires.

rationaliser les nombreuses règles nationales. Elle sont environ 11.000 pour toute l’UE. La diminution et la simplification des règles en vigueur contribueront à réaliser l’espace ferroviaire unique européen « à accroître le trafic transfrontalier et stimuler la compétitivité du secteur ferroviaire »7

2.2. Le volet politique

Dans la négociation qui a précédé l’adoption du quatrième paquet ferroviaire, le volet technique a rapidement pu faire l’objet d’un consensus, au contraire du volet politique, qui a donné lieu à des débats particulièrement difficiles.

Le volet politique contient trois parties distinctes :

la modification du règlement 1370/2007 relatif aux services publics de transport de voyageurs par chemin de fer et par route, aussi appelé règlement OSP (obligations de service public) ;

la modification de directive 2012/34/UE établissant un espace ferroviaire européen unique, aussi appelée directive gouvernance ;

une proposition de règlement abrogeant le règlement 1192/69 du Conseil du 26 juin 1969 relatif aux règles communes pour la normalisation des comptes des entreprises de chemin de fer.

Nous aborderons essentiellement ce qui touche à la libéralisation du rail proprement, soit le règlement OSP. C’est en effet celui-ci qui a cristallisé l’essentiel des discussions autour du quatrième paquet ferroviaire.

6 Il comprend un règlement instituant l’Agence de l’Union européenne pour les chemins de fer et abrogeant le règlement (CE) n°881/2004, une directive relative à l’interopérabilité du système ferroviaire au sein de l’Union européenne (refonte de la directive 2008/57/CE) et une directive relative à la sécurité ferroviaire (refonte de la directive 2004/49/CE).

7 http://europa.eu/rapid/press-release_MEMO-16-1383_fr.htm?locale=FR

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3. Le règlement OSP et la libéralisation du transport intérieur de voyageurs

Le règlement OSP8 suit une double approche : dans le prolongement des précédents paquets ferroviaires (voir point 1), il élargit le concept de libre accès aux services intérieurs de voyageurs ; il prévoit, ce qui constitue une innovation majeure, une certaine ouverture des procédures d’attribution des contrats de service public.

3.1. Ouverture des transports intérieurs de voyageurs pour des services commerciaux

Toute entreprise ferroviaire munie d’une licence et du certificat de sécurité nécessaire pourra entamer les procédures de demande de sillons (c’est-à-dire des créneaux horaires sur une ligne donnée) dès 2019, pour des trafics commençant au 14 décembre 2020.

Le règlement OSP prévoit tout de même une réserve : le régulateur pourra intervenir pour moduler ces trafics commerciaux s’ils mettent en péril l’équilibre économique de contrats de services publics existants (en Belgique, la SNCB). La Commission européenne a été chargée de fixer les critères et les procédures pour mettre en œuvre cette réserve, qui vise à protéger les opérateurs historiques contre des concurrents qui se concentreraient sur les seules lignes rentables9 (« cherry picking »).

3.2. Attribution des contrats de service public

A l’issue de longues discussions, il a finalement été décidé de maintenir la liberté de choix des Etats membres de choisir entre l’organisation d’un appel d’offres et l’attribution directe à un opérateur déterminé.

Les chantres de la libéralisation n’ont pas réussi, en dépit de leurs efforts, à imposer le recours obligatoire à l’appel d’offres : l’attribution directe reste possible et c’est une concession de taille par rapport au texte initial de la Commission européenne. Néanmoins, les conditions de l’attribution directe sont nombreuses et laissent une importante marge de manœuvre à des autorités européennes généralement acquises aux thèses libérales.

L’attribution directe sera à l’avenir soumise aux conditions cumulatives suivantes : lorsque l’autorité compétente10 estime qu’une telle attribution directe est justifiée par les caractéristiques structurelles et géographiques du marché concerné (taille, caractéristiques de la demande, complexité du réseau, etc.) et que ce mode d’attribution conduira à une amélioration des services et/ou du rapport qualité/prix par rapport au contrat précédent ; moyennant publication d’une décision motivée, qui doit être transmise dans le mois à la Commission européenne ;

cette décision étant susceptible de vérification par un expert indépendant désigné par l’Etat ; avec l’obligation d’insérer des KPI (« key performance indicators », indicateurs clés de performance) dans le contrat : la conformité aux KPI devra être vérifiée par l’autorité compétente au moins tous les 5 ans. En cas d’écart, l’autorité prendra les « mesures appropriées ».

8 Règlement (UE) 2016/2338 du Parlement Européen et du Conseil du 14 décembre 2016 modifiant le règlement (CE) n°1370/2007 en ce qui concerne l’ouverture du marché des services nationaux de transport de voyageurs par le chemin de fer

9 Une exception à la réserve existe en faveur des transports intérieurs en open access par des trains à grande vitesse, ceux-ci étant définis comme les trains circulant sur des lignes équipées pour permettre de dépasser les 250 km/h, avec une moyenne correspondante, et ne s’arrêtant qu’au moins tous les 200 km. Les pouvoirs d’intervention du régulateur sont, dans ce cas, plus réduits. Cette exception est toutefois d’un intérêt limité pour un territoire aussi restreint que celui de la Belgique et concerne plutôt les grands Etats membres comme la France, l’Italie, l’Allemagne, la Pologne ou encore l’Espagne.

10 En Belgique, l’Etat fédéral.

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3.3. Quand le nouveau système d’attribution des contrats de service public entrera-t-il en vigueur ?

Le règlement OSP entrera en vigueur le 25 septembre 2017.

Le nouveau système d’attribution des contrats de service public entrera, lui, en vigueur le 3 décembre 2019. A partir de cette dernière date, la Belgique pourra donc choisir d’appliquer la nouvelle procédure d’attribution et recourir à l’appel d’offres. Ce n’est toutefois pas une obligation et le 3 décembre 2019 ne constitue donc pas nécessairement une date-couperet pour la SNCB. Il s’agit surtout d’une décision de politique interne (cf. infra).

La procédure d’attribution directe « libre » ou encore « à l’ancienne », comme elle est pratiquée aujourd’hui, vient à échéance six ans après l’entrée en vigueur du règlement OSP. Ce qui signifie donc qu’à partir du 25 décembre 2023, l’Etat belge ne pourra plus l’appliquer et devra se conformer à la procédure d’attribution directe telle qu’étroitement encadrée par le règlement OSP.

Toutefois, les contrats attribués directement « à l’ancienne » entre le 3 décembre 2019 et le 24 décembre 2023 pourront être menés à leur terme. La durée maximale des contrats attribués directement étant fixée à 10 ans, leur survie potentielle ne dépassera pas le 24 décembre 2034.

4. Libéralisation du rail : quel avenir pour la SNCB ?

En matière ferroviaire, le secteur public assure chez nous historiquement le financement des infrastructures et des matériels lourds, lequel suppose en effet de pouvoir investir dans la durée. Ce choix repose sur le constat que les acteurs privés ont généralement tendance à privilégier des objectifs à court terme, bien éloignés de la durée de vie des équipements ferroviaires.

La Belgique est aujourd’hui confrontée, comme les autres Etats européens, à la libéralisation complète du transport ferroviaire, désormais irréversible.

Dans ce contexte, le PS belge s’est battu, avec d’autres, pour maintenir la possibilité pour les États membres de choisir un opérateur interne public. Non sans succès puisque Paul Magnette, puis Jean-Pascal Labille, qui avaient la tutelle de la SNCB sous le Gouvernement Di Rupo, ont pu convaincre leurs partenaires du Benelux d’adopter une position commune demandant le maintien de l’attribution directe à un opérateur interne, ainsi que la possibilité pour un État membre de garantir le maintien de normes sociales fortes11

Cette stratégie a permis de réellement peser dans le rapport de force au niveau européen et d’aboutir à un compromis qui, s’il n’est pas idéal, est néanmoins nettement préférable aux propositions initiales de la Commission européenne.

Lors des débats au sein du Parlement européen, le PS, avec d’autres partis de gauche, a pointé le potentiel impact négatif sur les droits des travailleurs et le risque de dumping social. Le nouveau règlement OSP ne prévoit en effet pas le transfert automatique du personnel de l’ancien opérateur lorsqu’un contrat de service public est attribué à un nouvel opérateur. Il existe donc un risque que le personnel devienne une variable d’ajustement et que le dumping social pratiqué dans d’autres secteurs le soit demain dans le secteur ferroviaire.

Un amendement avait été déposé par le groupe Socialistes et démocrates au Parlement européen afin de rencontrer ce problème et de rendre obligatoire la reprise des travailleurs. Celui-ci a été rejeté par 333 voix contre 349.

A défaut de disposition expresse dans le règlement OSP, il reviendra donc à l’Etat belge d’être vigilant sur les critères sociaux qui figureront dans les documents de mise en concurrence qui seront, le cas échéant, établis à l’avenir. En pareil cas, il conviendra de prévoir le transfert obligatoire du personnel en cas de changement d’opérateur, ainsi que la sauvegarde de ses droits sociaux.

Le rejet de cet amendement explique notamment pourquoi le PS, comme beaucoup d’autres partis de gauche, a voté contre le règlement OSP, sans toutefois être en mesure d’empêcher son

11 Position commune adoptée par les pays du Benelux en avril 2014 concernant le quatrième paquet ferroviaire et plus particulièrement son volet politique

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adoption, à une courte majorité (354 pour, 330 contre et 24 abstentions)12 en date du 14 décembre 2016.

Alors, quel avenir désormais pour le rail belge ?

Pour sa part, le PS est convaincu que l’attribution directe à un opérateur interne est la plus à même de garantir le maintien d’un service public fort au bénéfice de l’ensemble des citoyens. Le recours à un opérateur unique comme la SNCB permet en effet à l’autorité publique de garder la maitrise du service et de mettre plus facilement en œuvre ses objectifs politiques et sociaux. Cela autorise également plus de souplesse afin de faire évoluer rapidement les modalités d’exécution du service en évitant de longues et coûteuses négociations ou en évitant de devoir attendre le terme du contrat.

Il est néanmoins possible, voire probable, que d’autres opérateurs que la SNCB vont émerger dans les prochaines années et se lancer des transports publics sur les lignes les plus rémunératrices. Ils pourront fixer librement leurs tarifs et leur offre de transport et donc se concentrer sur les itinéraires et leurs heures de parcours les plus rentables. La SNCB pourra faire appel au régulateur pour encadrer cette liberté, par exemple en imposant des amplitudes et fréquences minimales. Ces décisions seront susceptibles de recours devant une Commission européenne largement acquise aux thèses néolibérales.

Cela étant dit, même si la probabilité de voir arriver d’autres opérateurs sur le marché belge à partir du 3 décembre 2019 existe, le risque pour la SNCB de devoir affronter des concurrents sérieux à court et moyen terme semble assez limité. L’étroitesse du marché belge, le peu de liaisons réellement attractives d’un point de vue purement commercial ou encore certaines complexités administratives propres notre pays (la législation sur l’emploi des langues notamment) sont en effet autant d’obstacles à l’arrivée de nouveaux opérateurs, du moins dans un premier temps.

En revanche, l’Etat belge devra assez rapidement se positionner par rapport au choix entre le recours à la procédure d’appel d’offres, impliquant la mise en concurrence entre plusieurs opérateurs potentiels, et l’attribution directe.

S’il opte pour le maintien de l’attribution directe au bénéfice de l’opérateur historique qu’est la SNCB, il ne disposera que d’une « fenêtre de tir » relativement limitée pour recourir, une dernière fois, à la procédure d’attribution directe « à l’ancienne », qui vient en effet à échéance le 24 décembre 2023. Au-delà, c’est la nouvelle procédure mise en place par le règlement OSP qui devra être suivie, impliquant une motivation spécifique et le respect d’une série de conditions drastiques et non dépourvues de conséquences pour la SNCB.

Dans un tel contexte, la sagesse serait de permettre à la SNCB de disposer du temps nécessaire pour se préparer à la libéralisation du secteur ferroviaire. Entre un mode de fonctionnement nettement perfectible et une dette abyssale, la SNCB est en effet confrontée à un des plus grands défis de sa longue existence.

Par ailleurs, si le PS est convaincu qu’il est préférable de continuer à recourir à l’avenir à l’attribution directe, il n’en sera pas nécessairement de même pour les partis de droite, qui ont tous voté en faveur de la libéralisation, et dont certains pourraient être tentés de privilégier le recours à l’appel d’offres ou de scinder l’actuel contrat de gestion au profit de différents opérateurs.

De plus, la N-VA, dans sa visée nationaliste, ne fait pas mystère de leur volonté de régionaliser le rail et de privatiser la SNCB13. Or, la libéralisation du rail, en permettant l’entrée de nouveaux acteurs sur le marché, par exemple pour l’exploitation de certaines lignes régionales, pourrait être utilisée comme instrument pour démanteler l’opérateur unique qu’est la SNCB. Certes, la structure en étoile du réseau belge, avec Bruxelles au centre, demeure un obstacle technique difficilement surmontable pour permettre une défédéralisation complète du réseau. Ceci ne fait toutefois pas obstacle à une forme de régionalisation larvée via l’exploitation des lignes.

En tout état de cause, avant même son entrée en vigueur, il est certain que le quatrième paquet ferroviaire pèse déjà sur les décisions prises en matière ferroviaire, le plus souvent comme prétexte pour imposer des économies supplémentaires sur le personnel ou faire admettre des coupes sombres dans les effectifs. En ce sens, la libéralisation est déjà bien une triste réalité.

12 Les quatre eurodéputés PS et sp.a ont rejeté ce texte, qui a en revanche reçu le support des élus MR, CD&V et N-VA.

13 Voir notamment les déclarations du Ministre J. Van Overtveldt au sujet d’une possible privatisation de la SNCB (L’Echo, 25 août 2007, « L’idée de privatisation de la SNCB du ministre Van Overtveldt ne fait pas recette »).

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Quoiqu’il arrive et dépit de toutes les menaces qui planent sur l’avenir du rail belge, le PS continuera le combat pour défendre un service public efficace et protéger l’intérêt général dans ce secteur vital.

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Après la libéralisation du transport de marchandises et du transport international de voyageurs, l’Union européenne vient, au travers du quatrième paquet ferroviaire, de décréter celle du transport intérieur de voyageurs. C’est dès lors un grand saut dans l’inconnu que s’apprête à effectuer le rail belge, dont le développement avait, jusqu’à présent, toujours reposé sur le secteur public. En quoi consiste le quatrième paquet ferroviaire ? Quelles sont ses implications pour l’avenir de la SNCB ? A quoi peuvent, dans les prochaines années, s’attendre les voyageurs et le personnel de la SNCB ? Quelles sont les options stratégiques dont dispose l’Etat fédéral face à l’ouverture, désormais irréversible, du marché du transport intérieur de voyageurs ? C’est à ces interrogations que le présent Etat de la question de l’IEV tente d’apporter quelques éléments de réponse.

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