L'économie collaborative et l'économie de plateforme pour construire une société plus juste

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L’ÉCONOMIE COLLABORATIVE ET L’ÉCONOMIE DE PLATEFORME POUR CONSTRUIRE UNE SOCIÉTÉ PLUS JUSTE

ETAT DE LA QUESTION DECEMBRE 2016

IEV Editeur responsable : Gilles Doutrelepont- 13 Bd de l’Empereur - 1000 Bruxelles
NATHAN LALLEMAND

1. Introduction...................................................................................................

2. Les caractéristiques de l’économie collaborative et de l’économie de plateforme

2.1. L’économie collaborative....................................................................

2.2 L’économie de plateforme et la possible ubérisation de l’économie

3. Différents types d’économie collaborative

3.1. La consommation collaborative..........................................................

3.2. La production collaborative.................................................................

3.3. La finance participative

3.4. La connaissance collaborative

4. Potentiel de l’économie collaborative ........................................................

4.1. De l’économie de la possession vers l’économie d’usage....................

4.2. Vers un coût marginal zéro

5. Comment réguler l’économie collaborative et l’ubérisation ?

5.1. Stimuler l’économie collaborative

5.2. Réguler l’économie de plateforme pour éviter l’ubérisation de l’économie

5.2.1. L’avènement des mini-jobs

5.2.2. La lutte contre les faux indépendants

7.

....................................................
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5.2.3. L’extension des droits des indépendants
6. Conclusions
Bibliographie 4 4 4 5 7 7 8 9 9 10 10 12 12 13 15 15 16 16 17 18

1. Introduction

Tant l’économie collaborative que l’économie de plateforme sont en plein essor depuis quelques années. Ces deux pans de la nouvelle économie prennent appui sur les nouvelles technologies, singulièrement internet, pour mettre en relation les individus. La différence entre les deux modèles économiques tient avant tout au but poursuivi.

L’économie collaborative s’inscrit dans une vision d’une société solidaire et durable. Elle crée notamment des réseaux d’internautes qui collaborent, souvent bénévolement, pour concevoir des projets. Le développement de ce mouvement pourrait avoir un impact bénéfique considérable sur le plan social, économique et environnemental dans les décennies à venir.

Si l’économie de plateforme est mal régulée, elle mènera à une ubérisation de l’économie, c’est-à-dire une déstructuration de l’emploi salarié : absence de protection sociale et faible rémunération. L’ubérisation se caractérise par un ultra-libéralisme exacerbé, soit du dumping social, une dérégulation de notre économie, un accroissement des inégalités et une mise à mal de notre protection sociale.

Dans cet Etat de la question de l’IEV, nous définirons dans un premier temps l’économie collaborative et l’économie de plateforme. Nous aborderons ensuite le potentiel et les menaces que représentent ces deux phénomènes. Finalement, nous présenterons des pistes d’avenir pour ces deux formes d’économie : les villes collaboratives (sharing cities), l’instauration de l’équivalent d’un salaire minimum pour les indépendants, etc.

2. Les caractéristiques de l’économie collaborative et de l’économie de plateforme

2.1. L’économie collaborative

L’économie collaborative est un modèle économique qui prend de l’importance depuis la crise de 2008. Elle se développe en réaction aux excès de la société de surconsommation. Elle propose de consommer autrement et souvent mieux, en mettant en avant la mutualisation et la réutilisation des ressources. Ce mouvement s’inscrit dans une optique de solidarité et de respect de l’environnement. L’économie collaborative valorise en effet l’usage plutôt que la possession de biens. Elle remet ainsi en question la notion de propriété privée.

Les plateformes internet donnent un coup d’accélérateur au mouvement collaboratif. L’outil qu’est internet facilite la mise en relation des différents ac-

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teurs économiques (producteurs, vendeurs, prestataires de service, consommateurs, etc.)1. Les plateformes suppriment les intermédiaires classiques tels que les supermarchés favorisant ainsi les échanges directs en « peer to peer », c’est-à-dire de personne à personne2.

Cette relation « peer to peer » permet de renouer les liens sociaux entre les consommateurs et les petits producteurs. L’économie collaborative aide à contrebalancer le pouvoir des grandes entreprises qui produisent généralement de manière centralisée. L’économie collaborative crée de la valeur en commun en redonnant du pouvoir aux individus.

Les organisations d’économie collaborative n’ont en principe pas pour objectif principal de maximiser leur profit mais plutôt de rechercher le bien-être social. Elles ne se concentrent pas uniquement sur les intérêts des dirigeants et des actionnaires mais sur ceux de l’ensemble des parties prenantes (travailleurs, consommateurs, investisseurs, citoyens). L’économie collaborative prône la démocratie économique, c’est-à-dire la participation des travailleurs aux prises de décision de l’entreprise. Par conséquent, ce mouvement incite à une « déhiérarchisation » de notre société, en rendant les structures sociales moins rigides et surtout moins verticales. Il s’agit ainsi de rééquilibrer le rapport de force entre le patronat et les travailleurs au bénéfice de ces derniers.

2.2 L’économie de plateforme et la possible ubérisationde l’économie

Dans l’économie de plateforme, il n’y a plus d’agences, ni de magasins ; toutes les transactions ont lieu via internet. Les plateformes internet se posent en intermédiaire entre le client et le vendeur ou le prestataire de service. Ces plateformes se rémunèrent généralement en s’octroyant une commission sur chaque transaction. Il s’agit donc plutôt d’une relation « P to B to P » (person to business to person ou personne à entreprise à personne) : une entreprise met en lien deux individus tout en se posant en intermédiaire entre eux. Elles proposent donc d’une part un nouveau mode de consommation innovant qui est généralement plus pratique et/ou moins cher tout en conservant d’autre part une logique de maximisation des profits pour le capital.

L’économie de plateforme offre ainsi une image rafraichie et, pour certains, plus attrayante au capitalisme, tout en permettant aux citoyens, si elle est bien régulée, de consommer plus avec moins de ressources. Cependant, certaines de ces entreprises s’inscrivent dans une mouvance ultra-libérale du tout au marché et de dérégulation, celle de l’ubérisation de l’économie. On parle d’ubérisation en référence à la plateforme Uber qui a généralisé à l’échelle planétaire un service de voiture avec chauffeur entrant directe-

1 Bazin, C., Les 7 clés de l’économie collaborative - Un mouvement aux dimensions multiples et paradoxales, octobre 2014, http://www.culturemobile.net/nouveau-monde-telecoms/7-cles-economie-collaborative

2 Mouzon, C., Babyloan, le mini-prêt solidaire et participatif, novembre 2015, Alternatives économiques.

L’économie collaborative et l’économie de plateforme pour construire une société plus juste 5

ment en concurrence avec les taxis. « Les caractéristiques de ce service sont en premier lieu les gains financiers importants liés à l’évitement des contraintes réglementaires et législatives de la concurrence classique (l’acquisition d›une licence de taxi dans le cadre d’Uber), mais aussi la quasiinstantanéité,lamutualisationderessourcesetlafaiblepartd›infrastructure lourde (bureaux, services supports, etc.) dans le coût du service, ainsi que la maîtrise des outils numériques. »3

La dérégulation qu’induit l’ubérisation – notamment le fait de ne pas financer dans une juste mesure les services publics et la Sécurité sociale – permet à ces entreprises d’offrir un prix plus faible qu’elles présentent comme un résultat de leur innovation – celle offerte par leur désintermédiation.

L’économie de plateforme est souvent considérée comme faisant partie de l’économie collaborative. En apparence, ces deux modèles économiques partagent de nombreux points communs. Premièrement, ils utilisent les plateformes internet pour connecter les individus et leur permettre de collaborer pour leurs intérêts mutuels. Deuxièmement, leur essor semble avoir été favorisé par la crise économique de 2008 dans un contexte de remise en question grandissante du fonctionnement de l’économie et de perte du pouvoir d’achat.4

Malgré ces quelques similitudes, les deux modèles économiques sont fondamentalement différents. L’économie collaborative a pour principe le bienêtre des parties prenantes5. Elle poursuit des objectifs sociaux et environnementaux : elle prône le partage, la solidarité et l’égalité. L’économie de plateforme regroupe des entreprises qui participent à l’ubérisation de l’économie, qui s’inscrit dans une logique ultra-libérale de maximisation à tout prix du profit. L’économie de plateforme engendre du dumping social. Elle contourne les lois sociales, ne propose généralement pas de protection ni de formation aux travailleurs et ne financent pas la Sécurité sociale. Elle menace donc notre modèle social, fragilisant les travailleurs au profit principalement des actionnaires.

L’économie de plateforme et l’ubérisation de l’économie présentent d’autres menaces pour le bien-être des citoyens.

Premièrement, les entreprises actives dans l’économie de plateforme ont souvent un pouvoir très important par rapport à leurs utilisateurs car elles

3 https://fr.wikipedia.org/wiki/Uberisation

4 C’est à ce moment-là que les deux figures de proue de l’économie de plateforme font leur entrée. Airbnb et Uber sont fondées fin 2008 et début 2009 avec un capital respectif de 30 000 $ et 200 000 $. Apres 6 ans de croissance fulgurante ces deux entreprises ont étendu leurs activités partout dans le monde. La valeur d’Airbnb est estimée à 24 milliards de dollars et celle d’Uber à 50 milliards de dollars Galbraith, R., Uber vaut désormais 50 milliards de dollars ! A quand l’entrée en bourse ?, aout 2015, La tribune.

5 A priori, cela concerne tant les utilisateurs que les personnes impactées par leurs activités sans directement y participer.

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ne laissent que peu de place à d’autres acteurs sur le marché. La nature de leurs activités induit un effet winner takes all : l’entreprise qui parvient à rendre un service un peu meilleur gagne tout le marché. Plus une plateforme possède d’utilisateurs, plus les utilisateurs l’apprécient. Par exemple, dans le cas d’Uber, plus il y a de chauffeurs et d’usagers, moins le temps d’attente est grand tant pour les usagers que pour les chauffeurs. De même, il est plus facile de trouver un appartement qui répond à ses attentes sur une plateforme qui rassemble de nombreux propriétaires que de devoir visiter plusieurs sites concurrents. Par conséquent, l’économie de plateforme peut concentrer certaines activités économiques dans les seules mains de quelques grandes entreprises.

Deuxièmement, les sociétés actives dans l’économie de plateforme pratiquent souvent l’optimisation fiscale à l’instar des multinationales. Elles sont actives aux quatre coins du globe et cherchent à minimiser les taxes qui leur sont imputables. Ces entreprises génèrent d’importants profits dans de nombreux pays tout en étant soumises à une fiscalité dérisoire.

Le phénomène d’ubérisation est un mouvement ultralibéral qui utilise des outils novateurs pour alléger la fiscalité et contourner les règles en place sur le marché du travail. Il menace notre économie par une dérégulation accrue et la mise en péril de notre modèle social. Il concentre les richesses et augmente les inégalités car seule une poignée de dirigeants et d’actionnaires de multinationales récolte les profits tandis que les travailleurs voient leurs droits mis en danger et leur pouvoir d’achat diminuer.

3. Différents types d’économie collaborative

De manière générale, les activités collaboratives peuvent être divisées en quatre catégories : la consommation collaborative, la production collaborative, la connaissance collaborative et la finance participative.

3.1. La consommation collaborative

La consommation collaborative est la branche la plus large de l’économie collaborative. Elle inclut de nombreuses organisations actives dans une grande variété de secteurs allant de l’hébergement au transport en passant par restauration. Elle passe le plus souvent par une plateforme internet qui met les utilisateurs en relation directe afin qu’ils puissent vendre, échanger, troquer, louer ou prêter n’importe quel bien ou service. Cette activité permet donc à tout utilisateur de se débarrasser d’objets qu’il n’utilise plus et de bénéficier de l’usage de biens sans avoir à les acheter en première main. De la même manière, les individus peuvent prester un service en échange d’un autre bien ou service. L’innovation sur laquelle repose l’économie collaborative réside dans sa forme (l’activité n’est pas localisée en un point phy-

L’économie collaborative et l’économie de plateforme pour construire une société plus juste 7

sique mais centrée autour d’une plateforme internet) et dans son objectif (les organisations qui gèrent les plateformes n’ont pas pour objectif principal le profit mais une mission sociale et/ou environnementale). Elle crée des communautés d’internautes basées sur des liens de confiance et met en œuvre une vision solidaire de la société.

Les « ressourceries » sont un exemple pertinent d’organisations actives dans la consommation collaborative. Le concept est le suivant : les individus cherchant à se séparer de meubles, vêtements ou objets le signalent sur le site internet d’une ressourcerie, qui se charge de les collecter ces biens chez des particuliers. Ensuite, les meubles, vêtements ou objets en question sont triés et remis en état par des travailleurs en réinsertion professionnelle avant d’être revendus à bas prix via internet6.

Les ressourceries favorisent l’insertion sociale, pratiquent le recyclage et vendent des biens à bas prix pour les plus démunis, en utilisant une plateforme internet pour mettre en contact les différents acteurs. L’idée principale n’est pas de générer du profit mais d‘être bénéfique pour toutes les parties prenantes.

« La ruche qui dit oui ! » est une autre organisation active dans la consommation collaborative. Les utilisateurs commandent un panier de produits agricoles locaux. Les agriculteurs et les consommateurs se rencontrent chaque semaine dans l’un des 700 points de vente situés dans six pays différents. Les utilisateurs peuvent donc acheter leurs paniers directement aux producteurs sans autre intermédiaire que la plateforme collaborative.

3.2. La production collaborative

La production collaborative est un phénomène encore peu répandu qui semble pourtant avoir un avenir prometteur. Il s’agit d’une forme de production décentralisée, hors des grandes structures industrielles, par la coopération de citoyens qui contribuent au développement d’un projet commun. Ce modèle est facilité par les moyens de communication modernes tels que les réseaux sociaux qui permettent à toute personne compétente de découvrir un projet en développement et d’y contribuer où qu’elle soit dans le monde. L’imprimante 3D est une invention majeure qui participe au développement de la production collaborative. Cette nouvelle technologie utilise différents composants tels que des résines ou des métaux qui permettent d’imprimer couche par couche n’importe quelle figure tridimensionnelle. Cette technologie permet aux concepteurs de donner vie à un objet à bas coût sans avoir à le produire industriellement.

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6 Dhoquois, A., Recycler, réparer, revendre… et insérer, novembre 2015 Alternatives économiques.

Les fab labs font partie du mouvement de la production collaborative. Ce sont des ateliers de production ouverts au public, équipés d’imprimantes 3D et d’autres outils collaboratifs. Tout créateur peut ainsi matérialiser son projet quasiment gratuitement. Il existe aujourd’hui plus de 600 de ces laboratoires partout dans le monde dont 14 en Belgique7.

3.3. La finance participative

Le financement participatif rassemble de très nombreux investisseurs sans qu’un intermédiaire classique n’effectue lui-même l’investissement. Ces transactions se réalisent par l’intermédiaire de plateformes internet. Il existe deux grands types de financement collaboratif : les investissements et les prêts.

L’investissement collaboratif ou crowdfunding permet aux citoyens de financer des projets en tout genre via des micro-investissements. Il peut s’agir de micro-dons. Dans ce cas, les investisseurs recevront de petites contreparties sous des formes diverses et variées. Les micro-investissements peuvent également être à risque et donner accès à une part du capital de l’entreprise qui développe le projet. Ils peuvent dès lors être assimilés à de petits placements en bourse sans intermédiaire. Le financement participatif peut enfin prendre la forme de prêts collaboratifs qui sont consentis par les citoyens pour une organisation. Il peut s’agir de prêts commerciaux (avec intérêt) ou de gestes de solidarité (sans intérêt).

Par exemple, Babyloan est une plateforme de financement participatif. Elle répertorie sur son site une série de projets de micro-entrepreneurs en situation de précarité qui n’ont pas accès aux canaux classiques de financement, c’est-à-dire le financement bancaire. Les internautes leur prêtent de l’argent (10 euros minimum) sans intérêt pour qu’ils puissent réaliser leur projet. Après quelques mois, Babyloan rembourse les prêteurs indépendamment des résultats du micro-entrepreneur à qui l’argent a été prêté8

3.4. La connaissance collaborative

La connaissance collaborative propose une source d’information gratuite, accessible à tous et évolutive, via internet et des logiciels open source9. Tout individu peut bénéficier librement de ce savoir et y contribuer en ajoutant des informations sur internet. Cette méthode est utilisée pour tout type de connaissance allant de la science à l’actualité10.

8 Mouzon, C.,Babyloan, le mini-prêt solidaire et participatif, novembre 2015, Alternatives économiques.

9 Un logiciel est dit « open source » si son code source est librement accessible ce qui implique que le logiciel peut être lu modifié ou redistribué par tout utilisateur.

L’économie collaborative et l’économie de plateforme pour construire une société plus juste 9
7 Vanloqueren, G., Cinquante nuances de partage : Le potentiel transformateur de l’économie collaborative, 2014, SAW-B. 10 Vanloqueren, G., Cinquante nuances de partage : Le potentiel transformateur de l’économie collaborative, 2014, SAW-B.

Wikipédia est la plateforme la plus connue dans ce secteur. Cette encyclopédie participative est composée d’un nombre gigantesque d’articles sur des sujets variés, dans de nombreuses langues, tous accessibles gratuitement sur internet. N’importe quel internaute peut modifier ou compléter cette connaissance à tout moment, en notant qu’il existe différents outils pour garantir la qualité et la pertinence des articles11

4. Potentiel de l’économie collaborative

L’impact de l’économie collaborative sur notre société est difficilement mesurable à l’heure actuelle. Le phénomène est récent et ses frontières sont mal définies. Il n’existe pas encore d’étude concluante capable de mesurer l’incidence sociale, économique ou environnementale de l’économie collaborative.

L’économie collaborative se développe très rapidement et pourrait profondément transformer notre société : certains estiment que ce mouvement cohabitera avec le capitalisme ; d’autres considèrent qu’il le remplacera comme système économique dominant d’ici la fin du siècle12. Dans un cas comme dans l’autre, il est essentiel de prendre conscience du potentiel de l’économie collaborative pour savoir comment l’appréhender aujourd’hui, et en favoriser son développement.

L’essayiste américain Jeremy Rifkin a connu un succès remarquable en tentant d’appréhender le futur de notre société avec une approche économique et sociologique. Dans son livre La nouvelle société du coût marginal zero, il explique comment et pourquoi le collaboratif supplantera le capitalisme pour arriver à un modèle social qu’il appelle le commun collaboratif.

4.1. De l’économie de la possession vers l’économie d’usage

Dans une telle société dominée par l’économie collaborative, l’usage remplacerait en grande partie la possession. Beaucoup de biens seraient loués ou prêtés plutôt qu’achetés. Cette évolution présenterait de nombreux avantages :

- Premièrement, elle permettrait de consommer plus efficacement, c’est-à-dire de diminuer la production sans impacter le niveau de vie. Il deviendrait inutile de produire un bien pour chaque utilisateur.

11 D’abord, certains comptes utilisateur sont utilisés par des logiciels robot pour corriger l’orthographe et la tournure des phrases. Ensuite, les modifications des articles sont soumises à une série de contrôles à posteriori. Enfin les administrateurs ont le pouvoir de supprimer un article ou une partie d’article et de bloquer les utilisateurs qui entravent le bon fonctionnement du site.

12 Rifkin, J., The Zero Marginal Cost Society: The Internet of things, the collaborative commons, and the eclipse of capitalism, 2014 Palgrave Macmillan.

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Par exemple, une perceuse est utilisée en moyenne 12 minutes tout au long de sa vie. Il est donc envisageable de partager une même perceuse entre plusieurs dizaines voire centaines d’individus sans empêcher personne d’en faire usage13. Par conséquent, il serait aisé de diminuer la production sans nuire aux consommateurs. In fine, cette réduction aurait un impact positif sur l’environnement par une baisse des émissions de gaz à effet de serre et de l’exploitation des ressources naturelles.

- Deuxièmement, passer de la possession à l’usage - transformer un produit en service – devrait diminuer son prix. Moins le ménage est riche, plus cette baisse de prix aura un effet important sur son niveau de vie. La transformation du produit en service présente toutefois certains risques (cf. infra).

- Troisièmement, s’ils louaient leurs biens plutôt que de les vendre, les producteurs n’auraient plus aucun intérêt à pratiquer l’obsolescence programmée. Les biens deviendraient de plus en plus résistants avec une durée de vie plus longue. Par conséquent, il serait possible de réduire davantage la production, avec ici aussi un impact positif sur l’environnement.

L’économie collaborative permettrait, grâce aux techniques et moyens de communication modernes, de passer d’une utilisation de ressource linéaire (extraction, transformation, consommation, déchet) à une utilisation circulaire des ressources (transformation, consommation, réutilisation). Davantage de déchets pourraient être récupérés et recyclés, ce qui permettrait de ralentir l’exploitation des ressources naturelles jusqu’à un niveau durable voire régénérateur. Cela pourrait entrouvrir la voie à l’arrêt de la déforestation, l’appauvrissement des terres cultivables, voire même de régénérer notre planète.

Cependant, la mise en avant de l’usage peut être à double tranchant. Contrairement à Jeremy Rifkin, nous pensons que rien ne garantit que les propriétaires ne louent pas davantage de biens à des fins lucratives, comme c’est déjà le cas pour Airbnb et d’autres acteurs de l’économie de plateforme. Ces activités pourraient accroitre l’écart de richesse entre les propriétaires et les locataires car ces premiers pourront tirer des rentes additionnelles de leurs avoirs.

13 Portais, E., #ConsoCollab : Consommation collaborative et Capitalisme : entre guerre et paix, novembre 2014, Maddyness, http://www.maddyness.com/prospective/2014/11/25/consommation-collaborative-capitalisme/

L’économie collaborative et l’économie de plateforme pour construire une société plus juste 11

4.2. Vers un coût marginal zéro

Selon Jeremy Rifkin, une autre conséquence majeure du développement de l’économie collaborative est la réduction des coûts marginaux pour les producteurs. Le coût marginal pour un producteur de biens est le coût qu’il devrait payer pour produire une unité supplémentaire. Grâce aux procédés de production industrielle, ces coûts sont généralement décroissants avec les quantités produites : il est ainsi moins cher de produire 1.000 vélos à la chaine dans un seul atelier que d’avoir 1.000 ateliers qui ne produise qu’un seul vélo. Or, grâce à la production collaborative et aux imprimantes 3D, les coûts marginaux devraient devenir très faibles dès la première unité et rester constants, ce qui signifie que beaucoup de biens pourraient devenir quasi-gratuits et qu’il ne sera plus nécessairement moins cher de produire 1.000 vélos à la chaine que 1.000 vélos dans 1.000 petits ateliers équipés d’imprimantes 3D. Par conséquent, les petits producteurs collaboratifs pourraient concurrencer et remplacer en partie les grandes entreprises. Les citoyens pourront donc produire eux-mêmes leurs propres objets ou choisir d’aller chez l’imprimeur 3D du coin. Les consommateurs, plus proches des producteurs, deviendraient davantage des consom’acteurs. L’horizontalité du travail serait favorisée et le pouvoir du patronat et des multinationales diminué14

Dans l’hypothèse où l’économie collaborative deviendrait la norme, le capitalisme régresserait et notre société serait plus durable, démocratique et égalitaire. Il s’agit d’un scenario optimiste et spéculatif : nous traversons en effet une période de profonds changements avec un avenir incertain. L’économie collaborative émergeante est menacée par l’ubérisation qui accroît le pouvoir du capital. Si l’ubérisation l’emporte, on risque au contraire d’assister à un renforcement du pouvoir des multinationales au détriment de notre modèle de protection sociale. Les pouvoirs publics ont un rôle essentiel à jouer pour faire pencher la balance du bon côté.

5. Comment réguler l’économie collaborative  et l’ubérisation ?

L’économie collaborative et l’économie de plateforme ont toutes deux un potentiel de croissance important. En plus d’être source d’emplois, elles peuvent transformer notre mode de production et de consommation. Malheureusement, l’économie de plateforme, si elle est mal régulée, constitue aussi une menace non négligeable pour les travailleurs, les consommateurs et la prospérité au sens large. Le rôle qui incombe aux pouvoirs publics est donc d’inciter la nouvelle économie à se développer tout en renforçant notre mo-

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14 Rifkin, J., The Zero Marginal Cost Society: The Internet of things, the collaborative commons, and the eclipse of capitalism, 2014 Palgrave Macmillan.

dèle de protection sociale. De manière générale, deux grands types d’actions devraient être entreprises. Premièrement, il faut stimuler l’économie collaborative et l’économie de plateforme dans le sens d’une société plus durable, plus prospère et plus juste. Deuxièmement, il est indispensable de réguler l’économie de plateforme pour éviter une ubérisation de notre économie : la vision de l’économie de plateforme doit être en phase avec la réalité du droit social, de la fiscalité et de la protection des consommateurs.

5.1. Stimuler l’économie collaborative

L’économie collaborative propose un nouveau système de gestion des ressources, plus efficace et plus démocratique. Par conséquent, il peut être intéressant pour les pouvoirs publics de s’inspirer de ce modèle innovant pour le développement des politiques et des services publics. Dans cette optique, plusieurs actions peuvent être entreprises pour améliorer le fonctionnement du secteur public :

- Accélérer la digitalisation des services publics afin de les rendre plus efficaces et accessibles pour les citoyens ;

- Rendre la gestion des pouvoirs publics plus horizontale grâce à un système décisionnel plus ouvert et démocratique notamment en permettant aux citoyens de réagir et participer aux décisions politiques ;

- Mettre à disposition des actifs sous-utilisés (les bâtiments inoccupés, véhicules inutilisés, etc.) et mutualiser les ressources pour l’intérêt commun.

Les organisations actives dans l’économie collaborative poursuivent des objectifs communs à ceux des pouvoirs publics tels que la création d’emplois de qualité, la lutte contre la pauvreté et la protection de l’environnement. Il est dès lors utile pour les gouvernements de coopérer avec les acteurs de l’économie de partage. Un exemple de partenariat à l’échelle locale est la mise en place de villes collaboratives, les sharing cities, soit les villes collaboratives.

Les sharing cities naissent d’une initiative citoyenne lancée pour créer des communautés d’individus prêts à partager logement, nourriture, transport, outillage, éducation et finance au sein de leur ville. A l’heure actuelle, 54 villes situées sur cinq continents ont déjà rejoint le mouvement. Parmi elles, la ville de Séoul se démarque des autres par l’ampleur de leur initiative. En effet, en 2012, le maire et le bureau d’innovation de la capitale coréenne ont lancé le plan Sharing City Seoul. Il s’agit d’un partenariat entre le public et le privé destiné à créer de l’emploi, résoudre les problèmes environnementaux, réduire le gaspillage et tisser des liens sociaux entre les citoyens grâce au développement de l’économie collaborative15. Cette initiative se démarque

L’économie collaborative et l’économie de plateforme pour construire une société plus juste 13
15 Jonhson, C., Is seoul the next great sharing city ?, juillet 2013, Sharable, http://www.shareable.net/blog/is-seoulthe-next-great-sharing-city

des partenariats public-privé traditionnels dans lequel les autorités publiques délèguent, à un acteur privé, le financement et la gestion d’un ouvrage contribuant au service public. En effet, il s’agit d’une étroite collaboration entre les différents acteurs – notamment entre les entreprises innovantes et le gouvernement – pour avancer ensemble dans l’accomplissement d’un projet commun.

Quatre types d’actions ont notamment été entrepris :

- La ville de Séoul a mis en place des services collaboratifs publics avec un système de partage de nombreux véhicules, parkings et bâtiments publics.

- La ville de Séoul a créé un comité de promotion du collaboratif (Seoul Sharing promotion Committee) pour s’assurer que la législation facilite le développement des entreprises de l’économie collaborative.

- Un nombre important d’organisations collaboratives d’utilité publique reçoivent diverses formes de soutien des pouvoirs locaux tels que des subsides, des espaces de travail non utilisés, des services de conseil et de promotion gratuite.

- Les citoyens sont incités à recourir à l’économie collaborative notamment via des formations, des campagnes d’information et un accès gratuit au wifi.

Dans le cas de Séoul, une mégalopole de plus de 10 millions d’habitants, l’économie collaborative s’est avérée être un outil efficace pour gérer de nombreux problèmes notamment en matière de surpopulation, de logement, d’emploi et de mobilité. La deuxième vague de projets du l’initiative sharing city de Séoul a permis de dégager près de 900 millions d’euros à la ville pour le lancement de nouvelles politiques Le programme a créé 1.280 emplois et évité le rejet de prêt de 30.000 tonnes de CO2 dans l’atmosphère. La ville de Séoul a reçu une reconnaissance internationale pour ce projet et a ainsi gagné le Metropolis award en 201516.

L’idée des sharing cities peut être adaptée et mise en place dans les villes belges et européennes. L’exemple de Séoul démontre qu’il est possible d’avoir un impact positif sur le plan social, économique et environnemental grâce au développement de l’économie collaborative. Pour ce faire, les pouvoirs publics gagnent à s’adapter au modèle collaboratif et à coopérer avec les nouveaux acteurs pour poursuivre des objectifs d’intérêt général. Les gouvernements locaux, nationaux et européens peuvent s’allier aux acteurs

ETAT DE LA QUESTION - Décembre 2016 - Institut Emile Vandervelde - www.iev.be - iev@iev.be 14
16 Sharehub, Seoul Sharing City Executive Summary in 2015, 2015, http://english.sharehub.kr/wp-content/uploads/ reports/executive_summary_report_2015.pdf

de l’économie collaborative pour atteindre leurs objectifs en termes d’emploi, de développement durable et de lutte contre la pauvreté.

5.2. Réguler l’économie de plateforme pour éviter l’ubérisation de l’économie

Lorsque les acteurs de l’économie de plateforme exercent de nouveaux types d’activités, le cadre régulatoire s’avère parfois inadapté. Certaines activités de l’économie de plateforme tombent ainsi dans des zones grises des régulations actuelles.

Il parait parfois difficile de définir le statut des travailleurs (salarié ou indépendant), le secteur d’activité (digital ou transport, hébergement, etc.) et le type d’activité (commerciale ou non). Certains acteurs de l’ubérisation profitent de cette confusion pour contourner les législations en matière de droit social, de fiscalité et de protection des consommateurs. Ils en tirent un avantage déloyal envers les acteurs classiques, mettent en péril notre modèle de protection sociale et précarisent les travailleurs.

5.2.1 L’avènement des mini-jobs

Les plateformes internet mettent l’offre et la demande de biens et de services en relation directe. Grâce à ces nouvelles technologies, des biens et services peuvent être fournis contre rémunération directement de personne à personne. Ces moyens de communication contribuent fortement au développement d’une nouvelle forme de travail, généralement plus flexible, plus ponctuelle et plus précaire. Le caractère ponctuel pousse les acteurs de l’économie de plateforme à privilégier le statut d’indépendant à celui de salarié, voire à ne pas déclarer le travail. Il s’agit, dans ce dernier cas, d’une forme de dumping social et d’exploitation des travailleurs : l’ubérisation de l’économie promeut un modèle sans protection sociale. D’importants bénéfices sont ainsi réalisés sur le dos des travailleurs.

En réponse à cette problématique, le gouvernement Michel a instauré un nouveau cadre fiscal qui prévoit la création d’un statut pour les mini-jobs de l’économie de plateforme. Les travailleurs qui gagnent moins de 5.000 euros par an via les plateformes internet se verront imposer un taux réel de 10%. Cette mesure relative aux « mini-jobs », pouvant paraître à première vue avantageuse vu le faible taux de taxation, est problématique.

Le privilège fiscal accordé à ces mini-jobs crée une concurrence déloyale envers les autres travailleurs qui exercent des activités similaires. Ces mini-jobs risquent de remplacer des emplois de qualité et donc de créer du chômage. Les mini-jobs ne donnent aucun droit à la Sécurité sociale (chômage, pension ou soins de santé) et ne sont pas soumis aux protections du travail usuelles (salaire minimum, congé payés, congés de maternité, préavis, etc.).

L’économie collaborative et l’économie de plateforme pour construire une société plus juste 15

Pourtant, des solutions plus justes existent pour protéger les travailleurs de l’ubérisation de l’économie. Au lieu d’instaurer une concurrence déloyale entre travailleurs, il convient de garantir à chacun un même niveau élevé de protection des travailleurs17

5.2.3 La lutte contre les faux indépendants

Autre problématique liée à l’économie de plateforme : les faux-indépendants18. Le travailleur salarié se distingue du travailleur indépendant par l’existence d’un lien de subordination dans l’exercice de sa profession19. Or les plateformes internet actives dans le secteur des services exercent généralement un pouvoir de surveillance et une certaine autorité sur leurs travailleurs. Ils travaillent souvent pour une seule organisation. Il s’agira donc souvent d’un travail salarié et non d’un travail d’indépendant.

Il est important de lutter contre les faux-indépendants afin d’éviter que les entreprises de l’économie de plateforme ne mettent à mal notre modèle social par une précarisation des travailleurs et une concurrence déloyale. Dans cette optique, il conviendrait de renforcer la législation20 en matière de lutte contre les faux-indépendants à l’aune de ce nouveau phénomène qu’est l’économie de plateforme.

Privilégier le statut de salarié peut s’avérer utile pour soutenir les droits des travailleurs et la sécurité sociale. C’est un point important de la régulation de l’économie de plateforme. Toutefois, la résolution de la problématique de l’ubérisation du travail ne passe pas que par des mesures de protection du salariat. Il convient également d’améliorer les droits des petits indépendants et des indépendants complémentaires, dont le nombre pourrait augmenter du fait de la digitalisation de notre économie et de l’émergence de l’économie de plateforme21.

5.2.4 L’extension des droits des indépendants

Pour ce faire, il conviendrait d’étendre une partie des droits des travailleurs salariés à ceux des indépendants. C’est le cas par exemple du salaire minimum. Pour éviter la création des mini-jobs payés quelques euros de

17 http://www.levif.be/actualite/belgique/deux-modeles-de-l-economie-de-plateforme-dumping-social-vs-protection-sociale/article-opinion-500477.html

18 Travailleurs qui effectuent un travail de salariés sous un statut d’indépendant

19 Service public fédéral Emploi, travail et sécurité sociale, Cotisation sociale, 2015, http://www.emploi.belgique.be/ defaultTab.aspx?id=42058

20 Il s’agit de la loi du 25 août 2012, qui modifie le titre XIII de la loi-programme du 23 décembre 2006.

21 Le nombre de salariés en augmentation jusqu’à la crise a depuis quelque peu diminué (prévisions économiques du Bureau fédéral du plan de juillet 2015). Cette tendance pourrait s’accélérer avec la digitalisation de notre économie. Le travail se dématérialise, surtout dans les pays développés. Nous vivons de plus en plus dans une société de services. Les services deviennent de plus en plus informatisés ce qui pourrait favoriser l’économie de plateforme. De plus, les carrières sont de plus en plus horizontales, les travailleurs changent de plus en plus souvent d’employeur plutôt que de gravir les échelons au sein d’une même entreprise.

ETAT DE LA QUESTION - Décembre 2016 - Institut Emile Vandervelde - www.iev.be - iev@iev.be 16

l’heure, il doit être envisagé d’inclure le nombre d’heures à prester dans les contrats prestés par des indépendants. Cela permettrait d’imposer un seuil de rémunération horaire minimum pour les indépendants ainsi qu’un nombre d’heures maximum par jour et des périodes de repos minimum. La principale difficulté pour instaurer cette rémunération minimum est l’évaluation du nombre d’heures de travail effectivement prestées par les travailleurs indépendants. Aujourd’hui toutefois, la plupart des plateformes internet actives dans les services (comme Uber, Taskrabbit ou ListMinut), les tâches et les horaires de chaque travailleur sont renseignés sur l’application et peuvent donc être aisément enregistrés. Il est dès lors possible de faire bénéficier les travailleurs indépendants, en particulier ceux de l’économie de plateforme, d’une protection supplémentaire importante.22

6. Conclusion

L’économie collaborative et l’économie de plateforme sont en plein essor. Elles pourraient profondément changer la société de demain. D’une part, l’économie collaborative peut rendre notre société plus durable, plus égalitaire et plus démocratique. Pour ce faire, les pouvoirs publics peuvent influencer positivement ce mouvement, ce qui suppose de :

- Coopérer directement avec les organisations de l’économie collaborative comme c’est le cas dans les projets existants de villes collaboratives (par exemple, le Seoul sharing city) ;

- S’inspirer de l’économie collaborative pour améliorer le fonctionnement du secteur public, par exemple via une accélération de la digitalisation des services publics ou la mise en place d’un système gouvernance plus démocratique.

D’autre part, l’économie de plateforme présente un risque d’ubérisation de l’économie. Cette dernière est une menace pour notre modèle social et tend de surcroît à précariser les travailleurs et à accroitre les inégalités. Par conséquent, il convient de mieux réguler cette économie, notamment par :

- Une fiscalité plus équitable applicable à l’économie de plateforme ;

- La lutte contre les faux-indépendants ;

- L’extension des droits et protections des indépendants.

22 Dans l’économie de plateforme, les rémunérations des travailleurs sont facilement calculables et déjà définis au moment des payements des clients. Comme toutes les transactions sont effectuées par carte de crédit, il est envisageable d’envoyer à chaque payement un certain pourcentage de la rémunération des travailleurs indépendants directement à leur caisse d’assurances sociales. Il est important de ne pas créer de taux de cotisations privilégiés pour l’économie de plateforme afin de ne pas créer une concurrence déloyale, néfaste pour les travailleurs et le financement de la sécurité sociale.

L’économie collaborative et l’économie de plateforme pour construire une société plus juste 17

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Dhoquois, A., Recycler, réparer, revendre… et insérer, novembre 2015 Alternatives économiques.

Galbraith, R., Uber vaut désormais 50 milliards de dollars ! A quand l’entrée en bourse ?, aout 2015, La tribune.

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ETAT DE LA QUESTION - Décembre 2016 - Institut Emile Vandervelde - www.iev.be - iev@iev.be 20
L’économie collaborative et l’économie de plateforme pour construire une société plus juste 21

L’économie collaborative et l’économie de plateforme sont en pleine expansion. Toutes deux prennent appui sur le développement des nouvelles technologies et suppriment les intermédiaires classiques.

Cet Etat de la question de l’IEV, rédigé par Nathan Lallemand, analyse ces phénomènes et leurs conséquences sociales et environnementales. L’économie collaborative porte l’espoir de rendre notre société plus durable, plus égalitaire et plus démocratique. Cette nouvelle économie mise sur les liens sociaux et rééquilibre les relations de pouvoir au profit des travailleurs et des consommateurs. A l’inverse, l’économie de plateforme présente un risque important d’ubérisation et met ainsi en danger notre modèle social.

L’analyse livre plusieurs pistes de propositions progressistes pour stimuler l’économie collaborative et éviter l’ubérisation de l’économie : le développement des sharing cities, la lutte contre les mini-jobs et contre les faux indépendants, et l’extension des droits et protections sociales des indépendants.

Téléphone : +32 (0)2 548 32 11

Fax : + 32 (02) 513 20 19

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