Cumanana II - FRA

MAI 2021

NUMÉRO 2

Cumanana BULLETIN VIRTUEL DE CULTURE PERUVIENNE POUR L'AFRIQUE MINISTÈRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES DU PÉROU

PRÉSENTATION Message d'Alejandro Neyra, Ministre de la Culture du Pérou

UN REGARD SUR L'AFRIQUE SUBSAHARIENNE Présence péruvienne dans la région

ARCHITECTURE MUDÉJARE AU PÉROU Influence nord-africaine au Pérou durant l'epoque coloniale

RECETTE Saveurs péruviennes d'influence africaine

PAGE 1

PRÉSENTATION

Le Pérou est un pays multiculturel. L’un des axes culturels du Pérou est la composante africaine, dont, nous les Péruviens, sommes très fiers et heureux d’avoir dans notre identité culturelle. En tant que Ministre de la Culture du Pérou, je suis très heureux de présenter un nouveau numéro du bulletin Cumanana, car il représente un moyen de mettre en évidence le dialogue, la diversité et les points communs entre le Pérou et l’Afrique, à travers l’un de ses liens très forts : le plan culturel.

Le Pérou s’est engagé à promouvoir une citoyenneté interculturelle. Ainsi, l’État péruvien garantit et encourage le plein exercice des droits culturels de tous les citoyens, y compris les afro-péruviens. Dans cette optique, des efforts ont été faits pour élaborer une politique nationale spécifique à l’intention du peuple afro-péruvien. À cette fin, l’État péruvien dans son ensemble mène une action intégrée. Ces efforts visent également à atteindre les objectifs de développement durable et à contribuer concrètement au programme de travail de la Décennie internationale des personnes d'ascendance africaine (2015-2024) décrétée par les Nations Unies.

Le bulletin Cumanana du Ministère des Affaires Etrangères du Pérou est un exemple de ces travaux menés au Pérou.

C’est pourquoi je vous invite cordialement à le lire et à le partager avec quiconque pourrait être intéressé par notre culture afro-péruvienne.

ALEJANDRO NEYRA MINISTRE DE LA CULTURE DU PÉROU

PAGE 2

UN REGARD SUR L'AFRIQUE SUBSAHARIENNE M. L'AMB. JORGE FÉLIX RUBIO CORREA AMBASSADEUR DU PÉROU EN AFRIQUE DU SUD

Le continent africain connaît une croissance économique soutenue depuis 25 ans. La crise économique mondiale, liée à la pandémie que nous traversons, qui a fait chuter l'économie en 2020, pour la première fois en un quart de siècle.

Cependant, peu de gens doutent qu'une fois la pandémie vaincue, le continent reviendra sur la voie de la croissance grâce à ses solides bases acquises. L’Afrique dispose de ressources naturelles très importantes et, avant la pandémie, jouissait d'une croissance soutenue des classes moyennes et de la consommation privée. Plus de 400 entreprises africaines facturent plus de 1000 millions de dollars et le continent est en train de mettre en place la Zone de libreéchange continentale africaine (ZLECAF), qui générera plus de commerce et d'investissements dans la région, et créera un marché continental unique pour les biens et services, avec la libre circulation des personnes et des investissements.

En revanche, le rapport Perspectives de la population mondiale 2019 des Nations Unies indique que plus de la moitié de la croissance mondiale de la population jusqu'en 2050 se fera en Afrique. D'ici l’année 2100, 4,4 milliards de personnes vivront en Afrique, dépassée seulement par l'Asie, où 4,9 milliards de personnes y vivront. Dans ce contexte, ce n'est pas un hasard si les principales puissances mondiales telles que la Chine, la Russie, le Japon, l'Inde, les États-Unis et l'Union européenne, développent des forums de coopération avec l'Afrique afin d'accroître leurs activités et leur influence dans la région.

Le Pérou et l'Afrique du Sud Notre pays a établi des relations diplomatiques avec l'Afrique du Sud une fois que le régime d'apartheid aura pris fin et qu'il eut gagné sa liberté et démocratie. Notre ambassade a été officiellement inaugurée le 7 mars 1994. Le Pérou et l'Afrique du Sud sont distants de plus de 10000 km et historiquement ils ont développé des cultures très différentes, malgré cela, nous partageons de nombreux points communs: Nous sommes tous les deux des pays multiculturels, multiraciaux, multilingues, très diversifiés et touchés par le changement climatique. Nous sommes également des pays miniers avec un fort potentiel en matière d’agro-exportation.

10e Journée de l'Amitié Pérou-Afrique, 2019 (C) Ministère des Affaires Étrangères

Ces affinités nous ont amenés à adopter des positions communes dans diverses enceintes internationales, comme les Nations Unies. Mais cela nous oblige aussi à développer nos affinités au niveau bilatéral, à apporter nos connaissances et à nous enrichir de nos expériences pour appliquer ce qui est adaptable à notre développement et au bien-être de nos populations. À cet égard, nous soulignons deux axes de travail: développer les liens entre nos sociétés et entre nos gouvernements. Nous considérons que la chose la plus importante dans les relations entre les différents pays est que leurs sociétés, dans toutes leurs dimensions, se connaissent et interagissent davantage. Une véritable relation entre deux pays se forge et se consolide lorsque les peuples des deux pays apprennent à se connaitre, se valorisent et se respectent. Ainsi, une bonne partie de notre gestion consister à créer des liens institutionnels entre nos universités, nos centres académiques, culturels, sportifs et d’entreprises. De ce fait, plusieurs de nos projets vont dans cette direction.

Sur le plan gouvernemental, avant la pandémie, le Mémorandum d’Entente pour l’établissement de consultations politiques a été signé. La crise sanitaire a entraîné le report de la première visite en Afrique du Sud de notre Vice-ministre des Affaires étrangères, dans le cadre dudit Mémorandum.

PAGE 3 Cependant, nous n'avons cessé de travailler sur des accords dans des domaines aussi importants que celui de la coopération en matière environnementale, judiciaire, prévention des catastrophes naturelles, sur les questions antarctiques, minières, touristiques, artistiques et culturelles. Les confinements obligatoires et la dureté de la pandémie ont retardé la mise en œuvre de ces projets, mais aucunement notre volonté de faire aboutir les négociations.

Le Pérou en Afrique Subsaharienne Le Pérou a l’objectif d’améliorer son positionnement dans la région. Alors que le Pérou dispose de deux ambassades: une en Afrique du Sud, avec Ambassadeur non-résident accrédité auprès du Mozambique, et une autre au Ghana, sur la côte ouest du continent, augmenter la présence péruvienne en Afrique de l'Est est en cours d'évaluation.

Dans cette zone du continent africaine, il existe des alternatives comme le Kenya, siège du Programme des Nations Unies pour l'Environnement (PNUE), et un pays où une ambassade du Pérou a fonctionné durant quelques temps à la fin des années 1980, ou l'Éthiopie, siège de l'Union Africaine.

De plus, il est primordial que les Ambassadeurs en Afrique du Sud et au Ghana puissent être accrédités comme Ambassadeurs non résidents auprès d’autres pays, au Nigéria, par exemple, l'une des plus grandes économies d'Afrique, avec l'Afrique du Sud et l'Égypte.

Ces alternatives permettront le développement d'une vision globale de l'Afrique Subsaharienne. En effet, nos entrepreneurs ont anticipé cette vision. Peu de personnes savent que Kitwe, en Zambie, abrite la plus grande communauté péruvienne du continent, travaillant dans 14 entreprises péruviennes de différentes tailles qui fournissent des services liés à l’exploitation minière.

Certaines de ses entreprises, en pleine bourre, ont l’ambition de s'établir dans les pays voisins, tandis que davantage d'entreprises péruviennes voit d’un bon œil les opportunités de commerces avec des acteurs économiques en Namibie.

D'autre part, environ 250 péruviens font partie du contingent des Casques Bleus de l'Organisation des Nations Unies en République Centrafricaine, et nous avons des consultants péruviens qui travaillent dans différents pays d'Afrique Subsaharienne. L'Ambassade du Pérou en Afrique du Sud, par l'intermédiaire de sa Section Consulaire, fournit des services à tous les péruviens de la région.

La croissance et le développement d'un pays doivent s'accompagner d'une ambitieuse et cohérente projection internationale. L'entreprenariat péruvien a fait les premiers pas en Afrique, et l'Etat doit l'accompagner et consolider la présence péruvienne dans cette région importante.

PAGE 4

ARCHITECTURE MUDÉJARE AU PÉROU ILANA LUCIA ALARCÓN HISTORIENNE PÉRUVIENNE, SES PRINCIPAUX SUJETS DE RECHERCHE INCLUENT L'HISTOIRE SOCIALE COLONIALE, LES ÉTUDES DE GENRE ET LA LITTÉRATURE, L'ART MUDÉJAR ET L'HÉRITAGE CULTUREL DES ARABES EN HISPANO-AMÉRIQUE

La présence musulmane dans la Péninsule Ibérique a laissé une empreinte profonde dans des aspects vitaux des manières et des coutumes de cette région et par extension, dans les sociétés hispano-américaines (latinoaméricaines aujourd'hui). Ceci est le fruit d'une longue coexistence de plus de huit siècles avec le monde chrétien (depuis l'invasion arabo-berbère en 711 jusqu'à l'expulsion des Morisques d’Espagne en 1609).

Pour preuve, l'architecture mudéjare, est née dans un contexte de domination politique, quand l'art musulman s'adaptait aux exigences de la société chrétienne dominante après la Reconquête espagnole à partir du XIIIème siècle. Cependant, l'architecture mudéjare a conservé et récréé les principes essentiels de l'architecture arabe: un art à la beauté séductrice qui cherche à être un objet de plaisir pour les sens et, en même temps, une architecture dynamique qui résout les problèmes liés à la construction en employant des matériaux de grande plasticité et faciles à obtenir comme la céramique, le plâtre et le bois. L’emploi du bois (principalement le noyer, l'ébène et le cyprès) a été l'un des éléments les plus remarquables de l'architecture mudéjare en Amérique.

La plupart des églises coloniales de Lima ont des toitures en bois et des toits décorés (plafond à caissons, charpente à entrelacs, toit lambrissé). Certaines des plus belles toitures mudéjares qui existent encore à Lima se trouvent dans le Couvent et l’Eglise de Santo Domingo, la plus vieille de Lima, qui arbore dans sa porterie un magnifique toit mudéjar du XVIème siècle et dans sa bibliothèque un luxueux toit lambrissé mauresque.

Entrée principale du palais Torre Tagle, Ministère des Affaires Étrangères Photographie:: Daniel Giannoni

Le Couvent de San Francisco, l'un des plus beaux de Lima, possède aussi ces motifs dans la coupole de son escalier; dans sa porterie où lón peut observer trois embrasures de courbes mudéjares; dans l'église où les murs, les piliers et les voûtes sont décorés de grecques et d'entrelacs marocains; et dans le cloître qui compte une ample série d'arcs avec des azulejos et des toits lambrissés mudéjares.

PAGE 5 C'est l'impression qu'avec la distance ont causé les tours et les coupoles de la ville, ainsi que l'aspect morisque des maisons, des jalousies et des célèbres balcons «volants» de «rues dans l'air», dáprès la chronique du Père de la Calancha, dont la profusion donnait à la capitale une physionomie qui n’avait pas son pareil dans les autres villes américaines. Un autre élément arabe qui caractérisait les grandes maisons de l'é́poque était le vestibule de type «musulman» entre la porte déntrée et le patio intérieur.

Nous pouvons apprécier ces éléments caractéristiques des rues de Lima et spécialement de la maison musulmane connue sous le nom de Moucharaby dans les dessins du peintre allemand Johann Moritz Rugendas et surtout dans les délicats tracés du diplomate Français Léonce Angrand. Tous deux ont visité Lima, autrefois nommée la «Ville des Rois» pendant les premières décennies du Pérou indépendant.

Cour principale du palais Torre Tagle, Ministère des Affaires Étrangères Photographie:: Daniel Giannoni

L'un des dérivés les plus remarquables de la technique musulmane en bois sont les balcons fermés par des jalousies appelés en al-Andalus ajmeces (de lárabe ashshamis: ce qui est exposé au soleil) car ils avaient pour fonction de protéger contre léxcès de luminosité solaire, sont l’un des exemples les plus remarquables du travail musulman en bois. Les «balcons de tiroirs» ont été employés aussi dans dáutres villes comme Cusco et Trujillo mais pas avec la même profusion que l’on observe à Lima. Des exemples typiques de cet art mudéjar et de la technique musulmane en bois connue comme mashrabiyya sont les balcons du Palais de l'Archevêché et du Palais liménien de Torre Tagle, siège du Ministère des Affaires Etrangères du Pérou.

Ces détails des intérieurs et cette variété de balcons en bois en saillis suspendus aux façades des rues de Lima, au rythme de la tapada liménienne, ont donné à la ville un air arabe et ont captivé étrangers et locaux jusqu’aux premières années du XIXème siècle.

Détail de treillis du balcon, Ministère des Affaires Étrangères Photographie:: Daniel Giannoni

PAGE 6

RECETTE: TACU TACU L'humble origine du Tacu Tacu est une démonstration claire de l'inventivité qui caractérise les Péruviens: ils disposaient de restes de riz et haricots, ils les utilisaient le lendemain pour servir un copieux petit-déjeuner.

L'expert Hirka Roca-Rey considère que ce plat est originaire de la communauté afro-péruvienne, où le piment et l'oignon moulus ont été ajoutés au riz et aux haricots jusqu'à l'obtention d'une pâte, qui doit ensuite frire dans du beurre. D’autre part, John Santa Cruz évoque les variétés de cette notion culinaire et son origine dans la diaspora africaine: «Au Nicaragua il y a le Gallopinto, en République Dominicaine l'Arroz Moro, le Congrí de Cuba et le Casamiento du Salvador, la Feijoada brésilienne et le Hoppin John du sud des États-Unis, tous ces plats à base de riz et de haricots ». Néanmoins, son étymologie n'a pas été confirmée: tacuni est un mot quechua qui signifie "mélanger une chose avec une autre", tandis que d'autres versions considèrent que le nom du plat vient du mot swahili Taka-Za-Chakula, qui signifie «restes de nourriture».

INGRÉDIENTS 3 tasses de haricot commun (frijol canario) 120 gr de bacon haché 2 cuillères à soupe d'ail moulu 1/4 tasse de poivron jaune moulu 1/2 cuillère à soupe d'origan séché 4 tasses de riz cuit 6 bananes 6 œufs au plat Huile, quantité requise Sel et poivre

PRÉPARATION Faites tremper (réhydrater) les haricots la veille dans un récipient rempli d'eau froide. Égouttez-les et mettez-les dans une casserole avec le bacon et couvrez d'eau.

Porter à feu moyen et cuire pendant 1 heure.

Remuer avec une cuillère en bois et retirer du feu.

Laisser refroidir.

Faites chauffer une cuillère à soupe d'huile dans une poêle à feu moyen et faites revenir l'oignon, l'ail et le poivron jaune pendant 10 minutes.

Assaisonner avec de l'origan, du sel et du poivre. Mélanger.

Ajouter les haricots, remuer et retirer les du feu. Ajoutez le riz et mélangez.

Dans une poêle, à feu moyen, chauffer le reste de l'huile.

Ajouter deux tasses du mélange et laisser dorer pendant huit minutes.

Retourner et cuire encore cinq minutes.

Retirer de la poêle et mettre de côté 6 portions.

Servir les portions de Tacu Tacu avec des plantains frits et des œufs au plat.