Extrait Le dernier jour d'un condamné

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LECTURES CLE EN FRANÇAIS FACILE

Le Dernier Jour d’un condamné V I C TO R H U G O

NIVEAU 3

B1 1200 mots



LECTURES CLE EN FRANÇAIS FACILE

Le Dernier Jour d’un condamné Victor Hugo

Adapté en français facile par Françoise Claustres


Crédits photographiques : Couverture : didiksaputra © Adobestock Page 3 : caifas © Adobestock

Direction éditoriale : Béatrice Rego Marketing : Thierry Lucas Édition : Marie-Charlotte Serio Couverture : Fernando San Martin Mise en page : Isabelle Vacher Illustrations : Conrado Giusti Enregistrement : Blynd © CLE International, 2023 ISBN : 978-209-035926-8

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L’auteur Victor Hugo est le plus célèbre des écrivains français du XIXe siècle et sans doute le plus célèbre écrivain français. Né en 1802, il a écrit dans tous les genres : poésie, roman, théâtre. Parmi ses romans les plus connus, des romans historiques (Notre-Dame de Paris, Quatre-vingttreize) et un grand roman social (Les Misérables). Victor Hugo est en effet un homme engagé qui a toujours défendu les pauvres, les misérables. Il était également contre la peine de mort (les condamnations à mort). Il a écrit deux livres sur ce sujet : Le dernier jour d’un condamné (1829) et Claude Gueux (1834). Il a aussi critiqué Napoléon III quand celui-ci s’est proclamé empereur en 1852. Suite à ces critiques, il a dû quitter la France. Il est revenu en France en 1870 quand Napoléon III a été chassé après la défaite de la France contre la Prusse. Quand Victor Hugo meurt, en 1885, une foule énorme suit son cercueil. Il a eu droit à des funérailles (un enterrement) nationales.

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Le livre Victor Hugo a vingt-sept ans quand il publie, sans nom d’auteur, Le dernier jour d’un condamné. Ce livre n’est pas vraiment un journal, pas vraiment des mémoires, pas vraiment un roman. Il raconte les derniers moments d’un condamné à mort : ses angoisses, ses pensées, ses souffrances physiques, ses rêves, ses souvenirs, ce qu’il voit de sa prison… Victor Hugo ne dit pas ce que l’homme a fait pour être condamné à mort, il ne dit pas qui il était. On comprend seulement que cet homme a fait quelque chose de grave et que c’est quelqu’un de cultivé, qui aime sa fille. Victor Hugo veut montrer dans ce livre que la condamnation à mort est inhumaine. En 1832, le livre est republié avec une préface dans laquelle Victor Hugo condamne la peine de mort. Ce livre est un grand livre. En France, la peine de mort a été supprimée en 1981…

Les mots ou expressions suivis d'un astérisque* dans le texte sont expliqués dans le Vocabulaire, page 52.

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1 CHAPITRE I La condamnation*

C

ondamné à mort1 !

Depuis cinq semaines, je vis avec cette pensée. Autrefois, j’étais un homme comme un autre homme. Je pouvais penser à ce que je voulais, j’étais libre. Maintenant, je suis prisonnier. Mon corps est attaché à des fers* dans un cachot*, mon esprit est emprisonné dans une idée. Une horrible, une sanglante, une terrible idée ! J’ai une seule pensée : je suis condamné à mort ! Cette pensée est toujours là, elle chasse toutes les autres idées et me secoue de ses deux mains glacées quand je veux tourner la tête ou fermer les yeux. Elle se colle avec moi aux grilles de mon cachot, m’obsède2 quand je suis éveillé, surveille mon sommeil agité, et revient dans mes rêves sous la forme d’un couteau. Je viens de m’éveiller, me disant : « Ah ! Ce n’est qu’un rêve ! » Eh bien, avant d’avoir pu ouvrir les yeux, j’ai entendu une voix qui a murmuré à mon oreille : « Condamné à mort ! »

*** C’était un beau matin d’août. Mon procès* avait commencé depuis trois jours. Depuis trois jours, une foule de gens venait écouter mon crime* ; des juges*, des témoins, des avocats*, des procureurs* passaient et repassaient devant 1. L’homme va mourir. 2. Tourmente.

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moi. Les deux premières nuits, je n’avais pas pu dormir car j’étais inquiet et terrifié ; la troisième nuit, j’avais dormi car j’étais fatigué. À minuit, les jurés* avaient commencé à délibérer*. On m’avait ramené dans mon cachot, et je m’étais endormi pour oublier. Je dormais encore quand on est venu me réveiller. Je dormais profondément et le geôlier* a dû me parler à l’oreille et me toucher le bras pour que je me réveille. – Levez-vous donc ! J’ai ouvert les yeux, je me suis assis. Par l’étroite et haute fenêtre de ma cellule*, j’ai vu le soleil. J’aime le soleil. – Il fait beau, ai-je dit au geôlier. – C’est possible. Je suis resté immobile, à moitié endormi, souriant, l’œil fixé sur le soleil. – Voilà une belle journée, ai-je dit. – Oui, a répondu l’homme. On vous attend. Ces quelques mots m’ont ramené à la réalité. J’ai tout à coup revu la sombre salle du procès, les juges, les témoins et leurs visages stupides, les deux gendarmes aux deux bouts de mon banc, les avocats, les têtes des spectateurs, et les douze jurés qui avaient délibéré pendant que je dormais ! Je me suis levé. Mes dents claquaient, mes mains tremblaient, mes jambes étaient faibles, mais j’ai suivi le geôlier. Les deux gendarmes m’attendaient à l’entrée de mon cachot. On m’a remis les menottes*. Je ne bougeais pas. Nous avons traversé une cour. L’air vif du matin m’a réveillé. J’ai levé la tête. Le ciel était bleu, le soleil était chaud. Il faisait beau. ­– 6 –


Nous avons monté un escalier, traversé un couloir, puis un autre, puis un troisième ; puis une porte basse s’est ouverte. Je suis entré dans la salle. Quand je suis entré, les gendarmes ont bougé, les spectateurs ont parlé. Puis il y a eu un grand silence. J’étais arrivé à ma place. J’ai alors compris que le moment était arrivé : j’allais entendre la condamnation. Je ne sais pas pourquoi, mais je n’ai pas eu peur. Les fenêtres étaient ouvertes ; l’air et le bruit de la ville arrivaient de dehors ; la salle était claire comme pour un mariage ; le soleil brillait. Les juges, au fond de la salle, semblaient contents, sans doute parce que c’était bientôt fini. Le président semblait calme, et un jeune juge discutait avec une jolie dame en chapeau rose. Les jurés, eux, semblaient fatigués, ils avaient délibéré toute la nuit. Quelques-uns bâillaient. En les regardant, on ne pouvait pas deviner qu’ils avaient condamné un homme à mort. En face de moi, une fenêtre était grande ouverte. J’entendais rire dehors ; et, au bord de la fenêtre, une jolie petite fleur jaune jouait avec le vent. Rempli d’air et de soleil, je pensais à la liberté ; confiant, j’attendais. Mon avocat est arrivé. On l’attendait. Il venait de finir son petit-déjeuner. Il s’est penché vers moi avec un sourire. – J’espère, me dit-il. Ils auront sans doute écarté la préméditation3, et alors ce sera les travaux forcés* à perpétuité4. – Ah non, ai-je crié. Je préfère cent fois la mort ! Oui, la mort ! Et d’ailleurs, me disais-je, qu’est-ce que je risque à dire cela ? On condamne quelqu’un à mort à 3. Un crime avec préméditation, c’est un crime qui a été prévu, préparé. 4. Pour toujours, jusqu’à la mort.

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minuit, dans une salle sombre et noire, une nuit de pluie et d’hiver. On ne condamne pas quelqu’un à mort au mois d’août, à huit heures du matin, quand il fait beau ! C’est impossible ! Et je regardais à nouveau la jolie fleur jaune au soleil. Tout à coup, le président m’a demandé de me lever. Tout le monde s’est levé en même temps. Le greffier* a lu la condamnation. Tout à coup, j’ai eu peur ; je me suis appuyé au mur pour ne pas tomber. – Avocat, avez-vous quelque chose à dire ? a demandé le président. J’aurais eu, moi, beaucoup à dire, mais rien n’est venu. L’avocat s’est levé. Il essayait de me faire condamner aux travaux forcés. J’ai voulu répéter à haute voix ce que je lui avais déjà dit : « Plutôt cent fois la mort ! » Mais je n’ai pas pu parler, alors je l’ai arrêté avec les bras et j’ai crié : « Non ! » Le procureur* s’est opposé à l’avocat, les juges sont sortis, puis ils sont rentrés, et le président a lu ma condamnation. « Condamné à mort ! » a crié la foule. Moi, je marchais, ivre et stupéfait. Jusqu’à la condamnation à mort, je respirais, je vivais dans le monde des autres hommes ; maintenant, je voyais une barrière entre le monde et moi. Je ne voyais plus rien comme avant. Le beau soleil, le ciel clair, la jolie fleur, tout était blanc et pâle. Les hommes, les femmes, les enfants qui me regardaient passer ressemblaient à des fantômes. Au bas de l’escalier, une voiture noire et sale m’attendait. Avant de monter, j’ai regardé la place. « Un condamné à mort ! », criaient les gens en courant vers la voiture. J’ai aperçu deux jeunes filles qui me regardaient. – Bon, a dit la plus jeune, ce sera dans six semaines ! ­– 9 –


*** Condamné à mort ! Eh bien, pourquoi pas ? Je me rappelle avoir lu dans un livre que les hommes sont tous condamnés à mort avec des sursis5 indéfinis. C’est la même chose pour moi ! Depuis que je suis condamné à mort, combien d’hommes qui pensaient vivre longtemps sont morts ! Combien d’hommes jeunes qui pensaient venir me voir mourir sont morts ! Combien d’hommes qui marchent et respirent mourront avant moi ! Et puis, pourquoi regretter la vie ? Le pain noir du cachot, la soupe, la brutalité6 des gardiens, avoir toujours peur et personne à qui parler : voilà ce que peut m’enlever le bourreau*. Et pourtant, c’est horrible !

5. Un délai indéfini. Nous sommes tous condamnés à mourir un jour mais nous ne savons pas quand cela arrivera. 6. Dureté, méchanceté.

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LECTURES CLE EN FRANÇAIS FACILE

LE DERNIER JOUR D’UN CONDAMNÉ Victor Hugo Dans Le Dernier Jour d’un condamné de Victor Hugo, nous vivons les 24 heures précédant l’exécution d’un homme condamné à mort. Le récit explore ses pensées et émotions tout en critiquant la peine de mort et le système judiciaire. Le livre pousse à réfléchir sur la justice et la dignité humaine.

MOTS

400 À 700

700 À 1200

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GRANDS ADOS ET ADULTES Audio disponible sur https://lectures-cle-francais-facile.cle-international.com

ISBN 978-209-035926-8

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