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Profil des clients
Sophistication accrue La clientèle du private banking connaît depuis quelques années – et plus encore depuis le début de la crise financière – une mutation. Etablir un profil est un exercice de style délicat, mais nécessaire au banquier privé pour mieux répondre à ses attentes. Jean-Marc Streit (texte), Eric Chenal/Blitz (photo)
En matière de private banking, la clientèle est assez typique. Il s’agit, en effet, essentiellement d’entrepreneurs qui, soit ont bien réussi dans leurs affaires et continuent à les faire prospérer, soit ont vendu – récemment ou non – leur entreprise et n’ont pas immédiatement réemployé leurs ressources. Au travers de la banque privée, cette clientèle recherche avant tout un mode efficace de gestion de son argent. Pourtant, depuis quelques années, un autre type de clientèle commence à poindre: l’héritier, autrement dit la génération suivante qui, soit jouit du patrimoine légué, soit travaille dans l’entreprise et poursuit donc les affaires. Entre la nouvelle et l’ancienne génération, des divergences significatives sont constatées par les acteurs du private banking. «Depuis une demi-douzaine d’années, nous avons remarqué que les clients sont devenus plus sophistiqués et qu’ils ont, à la base, davantage de connaissances des produits financiers, explique Claude Marx, directeur d’HSBC Private Bank à Luxembourg. Ceci est dû au fait qu’aujourd’hui, d’une part on apprend, lors de ses études, à mieux maîtriser les produits financiers et que, d’autre part, l’activité des banques bénéficie
d’une plus grande transparence. Mais le point essentiel est certainement qu’il y a beaucoup plus d’informations librement disponibles sur les produits financiers, notamment sur Internet, ce qui n’était pas le cas il y a une dizaine d’années». Parallèlement, les produits financiers ont atteint un tel degré de complexité que beaucoup de clients ne les comprennent pas nécessairement dans leur intégralité et il arrive même que certains banquiers ne les maîtrisent plus entièrement non plus.
Au gré de l’actualité Traditionnellement, il y a deux raisons pour lesquelles le client intègre la banque privée: la préservation de ce qui a été généré par le travail ou l’héritage et la volonté d’accroître les actifs financiers et de développer de nouveaux revenus. Toutefois, et tout récemment, s’est ajoutée une considération qui n’existait pas auparavant, en l’occurrence la solidité de la banque choisie. «Depuis quelques mois, concrètement, nous devons démontrer à certains clients que nous sommes solides, constate M. Marx. Les clients prennent ainsi en considération une éventuelle faillite de la banque, sa taille, son ratio de solvabilité ou de liquidité et sa capitalisation avant de déposer leurs avoirs.
C’est d’autant plus vrai depuis la faillite de Lehman Brothers». «Nous savons que le client du private banking est multi-bancaire. Un client fortuné a, en moyenne, deux à trois banques dépositaires», rapporte François-Régis Montazel, directeur délégué d’EFG Bank. En plus de ne pas mettre tous les œufs dans le même panier, il a également tendance à lorgner ailleurs. Si des études régulières chiffrent la relation client/banque privée entre sept et dix ans, cette durée tend régulièrement à se réduire, et cela, pour plusieurs autres raisons. Le premier facteur est celui de la transparence: «Avant la directive Mifid (Markets in financial instruments directive, ndlr.), nous avons connu la directive ‘Service d’Investissement’ qui a exigé, pour la première fois, une certaine transparence par rapport aux clients, notamment en matière de frais bancaires», explique Claude Marx. Cette directive a, de ce fait, permis aux clients de comparer les banques, ce qui était très difficile auparavant. Le deuxième facteur est que le client est passé par une crise d’une grande ampleur suite à l’éclatement de la bulle Internet après 2000, crise qui a modifié sensiblement son comportement. «Traditionnellement, il comparait la performance de son portefeuille à un benchmark, explique le
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