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Monitoring du bâtiment
from Wunne n°74
by Luxedit
Monitoring du bâtiment BÂTIMENTS SOUS SURVEILLANCE
Le monitoring d’un bâtiment consiste à collecter des données et à les analyser afin d’optimiser l’usage de ce bâtiment et le confort des occupants.
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Le secteur de la construction a beaucoup évolué ces dernières années. Les progrès de la technologie combinés aux défis environnementaux et aux enjeux économiques ont amené les acteurs du bâtiment à s’engager toujours davantage sur le chemin de l’innovation. La digitalisation est l’un des outils qui ont impacté le plus les techniques de travail. L’avènement de la plateforme BIM amène un profond changement de paradigme dans la collaboration des corps de métier autour d’un même ouvrage, avec à la clé plus d’interaction, plus de transparence et plus d’efficacité. La numérisation de toutes les étapes
d’un projet (planifier – construire – exploiter) permet une mise en réseau continue de l’humain, des machines et des processus. Outre l’optimisation des phases de conception et d’exécution du chantier, la digitalisation permet de mieux gérer le cycle de vie complet du bâtiment, en assurant une plus grande efficacité opérationnelle, une maintenance plus aisée et une adaptabilité en fonction de l’évolution des demandes. Ce suivi va même englober la phase de déconstruction et de récupération, permettant d’identifier les matériaux de construction réutilisables et récupérables en fin de vie d’un bâtiment. C’est ainsi que se sont développés ces dernières années un ensemble de mesures, de contrôles et de pilotages du bâtiment que l’on regroupe sous l’appellation « monitoring ». Ce nouvel outil de gestion est devenu indispensable dans les bâtiments écoresponsables, dans le secteur industriel et tertiaire, mais aussi de plus en plus dans le cadre des bâtiments résidentiels en copropriété.
UN DOUBLE NUMÉRIQUE
On parle de maquette numérique du bâtiment, c’est-à-dire sa modélisation 3D intelligente, ce qui fait qu’un édifice est aujourd’hui plus que jamais cartographié, identifié, enregistré, jusque dans ses composants les plus infimes et intimes. Le jumeau numérique intègre des données dynamiques fournies par des capteurs tout au long de la vie du bâtiment – c’est une réplication virtuelle et vivante du bâtiment physique, qui permet de l’accompagner et de le piloter avec un maximum de précision et d’efficacité.
L’IMPORTANCE DE MESURER LA CONSOMMATION RÉELLE
Une fois les données recueillies, elles servent de base à un monitoring précis et fiable qui, non seulement établit les consommations réelles du bâtiment, mais qui permet aussi de détecter et diagnostiquer les dysfonctionnements de manière prédictive. Depuis plusieurs années déjà, les constructions sont soumises à des normes réglementaires de plus en plus strictes. Pour se voir délivrer les autorisations nécessaires et, dans certains cas, les certifications environnementales, les bâtiments sont conçus, construits et équipés en ayant comme objectifs l’optimisation énergétique et le respect de l’environnement. On constate cependant que les performances théoriques établies dans la fiche technique du bâtiment ne sont souvent pas les mêmes que les performances réelles mesurées après un certain nombre d’années d’utilisation. Plusieurs raisons expliquent le différentiel entre performances supposées et performances réelles. Des erreurs de chantier ont pu affecter la qualité de l’enveloppe. Les occupants peuvent ne pas utiliser le bâtiment selon les préconisations, notamment au niveau de la gestion du chauffage ou de la ventilation. Il peut y avoir des difficultés de pilotage des installations techniques. Par ailleurs, la réalité du terrain/de l’environnement joue un rôle primordial (exposition au vent, à la pluie, ombrage évolutif…), etc. Il est primordial de tenir compte des consommations réelles du bâtiment si on ne souhaite pas voir s’effondrer toutes les belles hypothèses de départ.
UN OUTIL POUR DÉTECTER LES ANOMALIES
Le monitoring énergétique permet de suivre le comportement énergétique et thermique du bâtiment, de constater des dysfonctionnements et de les corriger, soit sur le plan technique, soit en sensibilisant les utilisateurs sur l’utilisation correcte des installations. Les consommations énergétiques sont rassemblées dans un logiciel de supervision sous formes de graphiques, histogrammes… Ce logiciel permet de comprendre les données relevées, en fonction de la surface utile ou occupée, de la destination des bâtiments, ou encore des conditions météorologiques. On peut ainsi établir un tableau de bord précis, avec ses propres indicateurs de performance énergétique. De cette façon, le système offre une surveillance en continu des paramètres issus des consommations. Par exemple, lorsqu’un équipement est en surconsommation, parce qu’il a subi une fuite ou pour une autre raison, le responsable est alerté par SMS ou e-mail et il peut agir rapidement sur l’équipement en question. Ce système contribue à ne plus intervenir sur un équipement après l’anomalie, mais plutôt avant ou au moment où celle-ci arrive. Par ailleurs, le monitoring met en relation les systèmes domotiques avec les installations techniques : il peut intégrer des zones et des heures de fonctionnement pour recommander un nettoyage de filtre, par exemple, quand l’appareil en a réellement besoin, et non selon un critère purement périodique.
SOLUTIONS IOT – CAPTEURS À TOUS LES NIVEAUX
Il convient ici de s’intéresser à l’IoT (Internet of Things ou Internet des objets), un concept courant quand on parle de monitoring énergétique. L’Internet des objets est l’interconnexion entre l’Internet et des objets, des lieux et des environnements physiques. Ces connexions permettent de rassembler des masses de données sur le réseau et de produire de nouvelles connaissances et formes de savoirs. (Définition Wikipedia) ➔
QUELLES SONT LES DONNÉES QUI PEUVENT ÊTRE COLLECTÉES ET COMMENT SONT-ELLES COLLECTÉES ?
L’objectif est de recueillir un maximum d’informations sur la structure bâtie et son mode de fonctionnement ; de les analyser ensuite, afin d’optimiser l’usage du bâtiment et d’améliorer le confort de l’usager. Des capteurs placés judicieusement à des endroits stratégiques permettent de rassembler des informations multiples liées à une infinité d’équipements et d’utilisations : confort thermique, hygrométrique, visuel, acoustique, etc. ; consommation de chauffage, de refroidissement, d’électricité générale, d’eau, etc. ; production d’énergies renouvelables - solaire thermique ou photovoltaïque, éolienne ou même hydraulique.
Dans la logique de l’IoT, tout objet naturel ou produit par l’être humain peut se voir attribuer une adresse IP et la capacité de transférer des données sur un réseau. Dotés chacun de sa propre identité numérique, ces objets physiques sont capables également de communiquer les uns avec les autres. L’interopérabilité, qui consiste à modifier le comportement d’un objet en fonction de celui d’autres objets, est l’une des principales caractéristiques de l’Internet des objets. En domotique, l’IoT recouvre tous les appareils électroménagers communicants, les capteurs (thermostat, détecteurs de fumée, de présence…), les compteurs intelligents et systèmes de sécurité connectés. Les dispositifs connectés à l’Internet des objets peuvent participer à un nouveau type d’écosystème numérique, dans lequel ils peuvent être gérés intelligemment pour économiser de l’énergie dans un bâtiment, voire dans une ville. Les informations collectées par ces compteurs, capteurs, systèmes de gestion des bâtiments et autres dispositifs connectés peuvent guider en temps réel les processus décisionnels et permettre de créer des smart buildings (bâtiments intelligents).
UN REPORTING CONTINU ET UNE GESTION À DISTANCE DES INSTALLATIONS
Grâce à la diversité des solutions IoT proposées sur le marché, les facility managers bénéficient d’un reporting instantané, récurrent et plus large des données du bâtiment. De multiples usages en découlent. La mesure et la régulation automatique du chauffage, de la climatisation, de la consommation d’eau et d’électricité, permettent de réduire les factures en dépenses énergétiques. Grâce aux données récoltées sur la qualité de l’air (température,
humidité, CO2, COV, détection de fumée…), il est possible d’ajuster les systèmes de régulation des bâtiments et de créer ainsi un environnement de travail sain pour les occupants. La mesure du taux d’occupation réel des espaces du bâtiment permet d’en comprendre l’usage et d’en optimiser l’occupation et les prestations de maintenance. La maintenance prédictive, grâce à une anticipation des pannes et une détection des anomalies de fonctionnement, permet d’allonger la durée de vie des équipements. La géolocalisation permet de tracer les équipements de valeurs sur le site, ou d’identifier les zones d’intervention de maintenance. Passer par un jumeau numérique, sous la forme d’une maquette BIM ou d’une navigation virtuelle, permet aujourd’hui aux facility managers, responsables maintenance ou responsables de site, de superviser différents bâtiments sans se rendre sur place.
LA MAINTENANCE PRÉDICTIVE
Aujourd’hui, les interventions sur les équipements d’un bâtiment ont lieu, soit lorsqu’il est défaillant (maintenance corrective), soit de manière régulière et programmée (maintenance préventive) en fonction de l’état supposé de l’équipement (et ce quel que soit son état réel de fonctionnement ou d’usure). Les principes de la maintenance préventive permettent de limiter les conséquences des pannes, mais il est probable que l’équipement aurait pu continuer à fonctionner un certain temps sans dysfonctionnement ou que la pièce changée durant l’intervention aurait pu être utilisée quelques semaines ou quelques mois avant de présenter des signes d’usure. La maintenance prédictive repose sur une approche radicalement différente puisqu’elle vise, de par l’analyse de données fournies en continu par les capteurs sur les conditions réelles d’utilisation des équipements, à anticiper les pannes ou défaillances. Il s’agira ensuite d’intervenir avant que la panne ne se produise. Les modèles d’analyse prédictifs se basent à la fois sur : la définition des critères objectifs de bon fonctionnement (consommation électrique, niveau vibratoire, température, niveau d’eau…) l’historique des données et notamment des pannes, l’analyse des dérives qui permet de les affecter à des dysfonctionnements. L’objectif du modèle de prédiction est donc de définir des seuils de valeurs ou des dérives qui vont déclencher une alerte pour intervention de maintenance. Dans le cas d’une opération de maintenance prédictive, les personnels chargés de la maintenance voient
ACCOMPAGNER LA MUTATION DES MÉTIERS DE LA MAINTENANCE
Le fait que les bâtiments soient de plus en plus connectés et intelligents représente un véritable défi pour les métiers de l’exploitation comme ceux de la maintenance. Il ne s’agit plus seulement de maîtriser les équipements et leur environnement, mais aussi de connaître et comprendre le fonctionnement des systèmes de monitoring, traiter les données et les exploiter. C’est pourquoi l’ergonomie et la facilité d’utilisation des applications de monitoring - que ce soit sur un ordinateur, sur un smartphone ou une tablette - sont des éléments cruciaux pour favoriser l’adoption de ces nouvelles technologies par les personnels de maintenance.

leur temps d’intervention optimisé, car ils ont accès à l’historique complet des caractéristiques techniques du produit et à ses conditions d’utilisation. Ils savent précisément quel type de problème ils doivent résoudre sur place et ils s’y rendent donc avec le matériel et les pièces de rechange adéquates.
UNE NOUVELLE COMMODITÉ
Dans notre monde hautement technologique et connecté, la surveillance de consommation énergétique est devenue une « commodité » : le client s’attend à en bénéficier, sans coût supplémentaire, un peu comme il utilise désormais une appli pour ses besoins bancaires… Les bâtiments d’une certaine envergure intègrent d’office cette couche « smart », qui permet une gestion plus efficace et des usages optimisés. Les solutions de monitoring énergétique ont une incidence favorable sur la sécurité des biens et des personnes, sur la maintenance des équipements, dont on maximise la durée de vie, et, plus généralement, sur la fiabilité et l’efficacité des bâtiments, en repérant les premiers signes de pannes ou les incohérences et les dérives qui mériteraient des mesures correctrices. Le monitoring simplifie aussi la mise en conformité aux normes imposées par la législation. Il faut cependant relever certains risques inhérents à la mise en œuvre du monitoring : Risque d’échec de la symbiose avec les occupants : si le projet va trop loin dans l’automatisation, l’optimisation et la prédiction, tout en réduisant les possibilités de déroger et d’interagir avec les systèmes, alors l’occupant peut avoir un sentiment d’oppression dans le bâtiment. Il pourrait ne plus comprendre pourquoi en plein hiver les stores se ferment au premier rayon de soleil alors que lui est à la recherche de vitamine D ! Risque de faille informatique, cybersécurité : la connectivité croissante des bâtiments les expose également aux risques liés la cybersécurité. Les systèmes de gestion des bâtiments d’entreprises dont les processus dépendent de serveurs (tels que les banques, les
réseaux sociaux et autres plateformes en ligne) constituent des cibles de choix pour les cyberpirates qui veulent détruire des données, endommager des infrastructures critiques ou provoquer défaillances et autres interruptions de service. Risque de surcoût économique et environnemental : l’investissement environnemental supplémentaire doit être compensé par la réduction des coûts d’utilisation du bâtiment. Dans cette optique, il ne faut pas oublier que les nombreuses sondes, équipements, puissances de calcul,… sont sous tension et communiquent 24h/24, 7j/7, ce qui représente une consommation d’électricité non négligeable. Ces équipements supplémentaires ont également une empreinte en énergie grise liée à leur fabrication dont il faut tenir compte.