Jeudi 9 mai 2024
1er Iyar 5784
Nº 1009 | Mensuel
DOSSIER SUR LES TRACES
DE THEODOR HERZL
GRAND ANGLE
LA VIE D'APRÈS
BOUILLON DE CULTURE
ANNE BEREST, AUTRICE DE LA CARTE POSTALE :
« ISRAËL EST LA TERRE DE MES ANCÊTRES »
HISTOIRE
ALFRED ROSSI – PARCOURS
D’UN JUIF COMBATTANT
OPINION
VOUS AVEZ DIT GÉNOCIDE ?
PHILIPPE LELLOUCHE
« JE NE FERAI PAS
PARTIE DES SILENCIEUX »
De sidération en sidération
La première sidération a eu lieu ce jour-là, ce shabbat-là, ce Sim'hat Torah-là.
Elle a été suivie par la sidération éprouvée lorsqu’on a su l’ampleur du massacre, des tortures et des souffrances, puis des enlèvements d’êtres humains en masse, femmes, enfants, bébés, vieillards, enchaînés, transportés, traînés, exhibés, morts ou vivants.
Nouvelle sidération face aux révélations des viols en masse perpétrés par les barbares terroristes du Hamas, et plus grande sidération encore face au silence du monde qui a hésité à les reconnaître.
Comme si le viol d’une femme juive ne comptait pas, car finalement, une femme juive israélienne, c’est une femme sioniste, donc…
Sidération encore face au nombre de soldats, jeunes fleurs ardentes, tués en combattant ces barbares animés par l’unique volonté d’anéantir le peuple juif.
Il y a eu la Haye, où les victimes ont été mises sur le banc des accusés. La fermeture arbitraire par les USA de comptes bancaires d’Israéliens trop colons selon les critères de cet État ami mais tout de même étranger.
L’attaque iranienne, les velléités de placer sous le coup d’un mandat d’arrêt international notre Premier ministre, et puis… ce venin antisémite nauséabond qui s’est infiltré dans les veines du monde universitaire, en Europe et aux USA, concocté en sous-main depuis longtemps et avec soin par les pays officiellement ennemis ou faux amis d’Israël, à coups de subventions mirobolantes versées innocemment depuis des années afin, le moment venu, de pouvoir bâillonner d’une manière ou d’une autre ceux qui sont au sommet et déclencher les échauffourées sur le terrain. Jamais les drapeaux du Hamas n’auront autant été brandis, jamais les drapeaux d’Israël autant piétinés, comme nos cœurs depuis sept mois maintenant.
J’ai mal à mon peuple victime de tant de d’humiliation et de haine. Alors, pour nous renforcer à la veille de Yom HaAtzmaout, nous avons voulu nous souvenir du rêve d’Herzl, devenu réalité alors que tout le monde prenait le visionnaire pour un fou. Nous avons donné la parole à des acteurs défenseurs d’Israël, des écrivaines qui ont fouillé leur mémoire familiale pour en extraire d’incroyables histoires de transmission intergénérationnelle, des résistants d’hier et des combattants d’aujourd’hui. Tout cela pour nous rappeler que notre peuple est un peuple de survivants qui depuis deux mille ans défie les pires Goliath avec de petits cailloux, les faisant tomber l’un après l’autre contre toute attente, contre toute logique, avec comme arme de résilience massive le Maître du monde. n
Anne-Caroll Azoulay
AJ MAG N° 1009 3
ÉDITORIAL
sommaire N° 1008
5 CARTES SUR TABLE
Herzl aurait-il révélé sa foi dans les derniers mots d'Altneuland ?
6 À L'AFFICHE
Philippe Lellouche : entretien exclusif avec cet ardent défenseur d'Israël à la veille de son prochain spectacle à Tel Aviv
28 DÉCOUVERTE D'ISRAËL
Le Néguev : centre d’innovation
30 SANTÉ
• L’allergie saisonnière
• Le pain
34 BOUILLON DE CULTURE
Anne Berest : « Israël est la terre de mes ancêtres »
LEADERSHIP
Gérez votre temps
39 OPINION
Daniel Saada, ancien ambassadeur d'Israël en France : « Vous avez dit génocide ? »
42 GRAND ANGLE
La vie d’après
46 HISTOIRE
Alfred Rossi – parcours d’un Juif combattant
9-27
DOSSIER
SUR LES TRACES DE THEODOR HERZL
l UNE BIOGRAPHIE COMME UN CARNET DE VOYAGE
l SE PERDRE DANS LES TRACES DE THEODOR HERZL
l RENCONTRE AVEC SHLOMIT SATLAR, DIRECTRICE DU MUSÉE HERZL
l À L’ÉCOLE COMME DANS LES ARTS, HERZL INSPIRE, SURPREND ET FÉDÈRE
l ROY CHEN : « HERZL ÉTAIT UN LEADER UNIQUE, DOTÉ D’UNE ÂME D’ARTISTE »
l LA SHOAH SUR LE DIVAN DE FREUD
l FREUD ET LE SIONISME
l RENCONTRE AVEC LE DOCTEUR ARIEL MUZICANT, PRÉSIDENT DU CONGRÈS JUIF EUROPÉEN
ET AUSSI...
Au nom de la loi (48), Le Kling du mois (50), Une année avec la Cabale (52), Recette (53), Jeux (54), Immobilier (57)...
4 AJ MAG N° 1009
Herzl aurait-il révélé sa foi dans les derniers mots d'Altneuland ?
PAR ARIEL KANDEL
Les rues de Paris sont à nouveau pleines d'intellos antisémites. Cette fois-ci, il s'agit d'étudiants qui, au lieu d'apprendre, restent dans l'ignorance et la violence. Ils nous rappellent ces parisiens qui, il y a plus de deux cents ans, avaient crié leur haine au Juif Dreyfus accusé de trahison envers la France. Ce jour-là, Herzl était présent et c'est dans la capitale française qu'il conçut le sionisme moderne. Il habitait une rue qui aujourd'hui porte le nom de Cambon, Pierre-Joseph de son prénom, ancien président du comité des Finances sous la Convention nationale. Le hasard de l'Histoire fait que son homonyme, Jules Cambon, ancien ministre français des Affaires étrangères, a été le 4 juin 1917, cinq mois avant le Britannique Balfour, le premier diplomate européen à prendre officiellement position en faveur du projet sioniste. Il avait écrit à Sokolov, haute figure de l'Organisation Sioniste Mondiale :
« Vous avez bien voulu m’exposer le projet auquel vous consacrez vos efforts et qui a pour objet de développer la colonisation israélite en Palestine. Vous estimez que si les circonstances le permettent […], ce serait faire œuvre de justice et de réparation que d’aider à la reconnaissance, par la protection des puissances alliées, de la nationalité juive sur cette terre dont le peuple d’Israël a été chassé il y a tant de siècles. Le gouvernement français […] qui poursuit la lutte pour assurer le triomphe du droit sur la force, ne peut éprouver que de la sympathie pour votre cause dont le triomphe est lié à celui des Alliés. Je suis heureux de vous en donner ici l’assurance. »
C'est dans la rue qui porte le nom de ce « Gentil » inconnu qu'Herzl devint un visionnaire. L'apothéose de son œuvre littéraire reste le roman Altneuland qui décrit l'État juif cinquante ans après sa création – livre qui fut d'ailleurs traduit en hébreu par le même Sokolov. À la fin du livre, les héros posent la question de savoir ce qui a fait le succès d'Israël. Et là, surprise ! Herzl se dévoile comme un leader qui allie l'homme à Dieu. Israël devient un projet où les deux collaborent afin que des miracles s'y produisent comme durant cette nuit lors de laquelle l'attaque iranienne a été déjouée, cette nuit où le miracle divin a été associé aux aux incroyables efforts développés par le peuple juif pour se défendre.
Herzl était croyant. À cet égard, le dernier mot de son livre est éloquent : « C'est en harmonie avec les pensées de tous que Frédéric Loewenberg posa une question à laquelle chacun répondit à son tour et chacun à sa manière. Voici quelle était la question posée : "Nous voyons ici une nouvelle, une plus heureuse forme de vie sociale. Qui donc l'a créée ?"
Le vieux Litwak dit : "La nécessité !"
L'architecte Steineck dit : "Le retour à l'unité du peuple !"
Kingscourt dit : "Les nouveaux moyens de transport !"
Le Dr Marcus dit : "La science !"
Joë Lévy dit : "La volonté !"
Le professeur Steineck dit : "Les forces de la nature !"
Le révérend Hopkins dit : "La tolérance mutuelle !"
Rachid Bey dit : "La confiance en soi !"
David Litvak dit : "L'amour et la souffrance !"
Mais le vieux rabbin Samuel se leva solennellement et dit : "Dieu !" » n
AJ MAG N° 1009 5 CARTES SUR TABLE
Philippe Lellouche :
« Le silence de certains est
assourdissant et
j’ai
décidé une fois pour toutes que je ne ferai pas partie des silencieux »
Il a été l’un des premiers, sinon le premier, à prendre la parole sur un plateau de télévision français, le 15 octobre précisément, pour appeler au réveil des consciences. Depuis, il ne cesse de dire tout haut ce qu’il pense, avec simplicité et intelligence. Philippe Lellouche est acteur et réalisateur. Né à Ramat Gan et frère aîné de l'acteur Gilles Lellouche, il présentera le 24 juin prochain son tout dernier one-man-show Alone, dans le cadre du Tel Aviv Comedy Festival. Dès les premières minutes de l’entretien, il annonce la couleur en prenant l’initiative des premières questions. Bienvenue dans le monde de Philippe Lellouche !
6 AJ MAG N° 1009 À L'AFFICHE
PROPOS RECUEILLIS PAR ANNE-CAROLL AZOULAY
© Arthur Unglik
À L'AFFICHE
Philippe Lellouche : Caroll, dites-moi, comment faites-vous pour m’appeler une fois d’Irlande, une fois de Tchéquie, alors que vous êtes censée vous trouver en Israël ?
AJ MAG (surprise) : Aucune idée, je vous confirme que je suis bien en Israël. On ne va pas se la jouer parano, mais peut-être y a-t-il des brouilleurs de réseaux ?
Philippe Lellouche : Bon. Comment ça va en Israël ?
AJ MAG : Comme en Israël : on s’attend chaque minute au pire et au meilleur ! [tentative de reprendre la situation en main] Vous allez venir en Israël dans le cadre du Tel Aviv Comedy Festival fin juin, mais vous étiez déjà là tout récemment, n’est-ce pas ?
P.L. : C’est exact. Je suis parrain du Keren HaYessod et je suis venu passer quelques jours en Israël pour visiter les kibboutzim qui ont été touchés, rencontrer des familles d’otages, assister à des conférences… Que des choses difficiles, mais que j’ai adoré faire.
Dans quel état d’esprit êtes-vous rentré ?
Avec la rage face à cette désinformation permanente. On revient en se demandant comment il est possible de mentir à ce point-là à l’opinion ! Ce n’est pas rassurant, il y a une mauvaise foi évidente de la part des mouvements propalestiniens qui tentent de nier l’ampleur de l’horreur.
Je ne comprends toujours pas comment un si petit pays, de la taille d’un département français, peut focaliser autant l’attention. Je pensais que l’antisémitisme, c’était de l’histoire ancienne – eh bien non, il faut se faire à cette idée, et accepter qu’au lieu d’être traité de sales Juifs, on nous dise « sales sionistes » ! Il va falloir apprendre à vivre avec cela. C’est difficile pour notre génération qui a porté un mouvement tel que « Touche pas à mon pote », en pensant que le racisme et l’antisémitisme n’existeraient plus.
Vous avez été l’un des premiers à dénoncer cela. En avez-vous payé les conséquences sur le plan professionnel ?
Il y a évidemment eu des menaces sur les réseaux sociaux. Mais aucunement du côté du public qui, lui, a continué d’affluer aux spectacles, Dieu merci – enfin, j’imagine que les étudiants de Science Po et de la Sorbonne ne viendront pas me voir, mais on ne peut pas plaire à tout le monde… Plus sérieusement : désormais, indéniablement, deux camps s’affrontent, entre lesquels il n’y a plus de discussion possible. Churchill disait : « Face à la mauvaise foi, la bonne foi ne sert à rien. » Si le silence de certains est
assourdissant, en ce qui me concerne j’ai décidé une fois pour toutes que je ne ferai pas partie des silencieux.
Jouer en Israël est-il selon vous un acte engagé ?
Mais pas du tout ! C’est même fou qu’on puisse l’imaginer ! Si l’on en était arrivé là, je trouverais cela dramatique ! Israël est un pays démocratique. J’ai affirmé haut et fort que j’étais sioniste, ce qui revient en fait à reconnaître l’État d’Israël. Celui qui n’est pas d’accord avec cela, tant pis pour lui !
Vous recourez beaucoup à l’autodérision dans vos spectacles. Les Israéliens, aux pires moments de la guerre, ont eux aussi décidé de rire de situations tragiques, notamment dans l’émission satirique
Eretz Nehederet : qu’en pensez-vous ?
C’est la force de ce peuple. C’est la marque de fabrique de l’humour juif. Un ami, ancien déporté, me disait qu’il faisait les pires blagues avec un ex-compagnon de camp. C’était leur oxygène. Je suis admiratif de voir comment les Israéliens, après ce qu’ils ont vécu le 7 octobre, continuent de vivre, de rire et de chanter, à l’instar de ces mille musiciens qui se sont réunis à Césarée pour interpréter la magnifique chanson « HaBaïta », comme un grand cri d’espoir.
Vous êtes optimiste ?
Très. C’est ma nature – peut-être parce que je suis né en Israël, même si je n’y ai grandi que quelques mois. Mon père est originaire d’Algérie, ma mère est bretonne. Mon père a emmené ma mère en Israël au début de leur histoire, et c’est là que je suis né. Je ne sais pas si c’est la raison pour laquelle, quand Israël est attaqué, je suis blessé dans ma chair.
Lorsque je vois que certains reprennent les arguments du Hamas pour en faire des arguments politiques et une cause électorale en France, je me dis qu’on est en plein délire. LFI n’a pas mieux à faire ?!
Cela dépasse les pires scénarios !
Vous serez en Israël le 24 juin pour votre oneman-show : Stand Alone. Qu’est-ce qui vous a donné l’envie, le courage de faire un seul en scène ?
Quand j’écris du théâtre, je prends un sujet qui m’énerve ou qui m’attriste, je le tourne dans ma tête pour en tirer quelque chose de drôle et je construis une structure, des personnages sur le thème en question. Depuis le 7 octobre, mais bien avant en fait, tant de choses m’énervent et m’attristent que j’aurais dû écrire mille pièces de théâtre !
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C’est la raison pour laquelle j’ai choisi de faire ce one-man-show pour m’adresser aux gens de ma génération et dénoncer l’absurdité de l’époque dans laquelle on vit. Nous étions beaucoup plus heureux il y a quarante ou cinquante ans.
Répéter que c’était mieux avant, n’est-ce pas tomber dans un cliché ?
Il faut l’assumer. Ceux qu’on désignait comme des « réacs » lorsque j’étais jeune, c’étaient les gens qui voulaient plus d’ordre et de sécurité.
À L'AFFICHE
Nous qui sommes traités de « nouveaux réacs’ » par les jeunes d’aujourd’hui, nous voulons juste plus de liberté. Je me définis comme un « anar » de droite et je l’assume. Au nom de la santé et de la sécurité, on a accepté une foule de petits interdits qui ont peu à peu, et presque à notre insu, grignoté notre liberté, La Liberté. Aujourd’hui, on a la sensation que tout est interdit, alors que nous avons grandi dans une époque où rien ne l’était. Dans mon spectacle, je me moque de tout cela avec beaucoup de second degré et les gens rient énormément. « On a eu l’impression de dîner avec un copain » : c’est le meilleur compliment que j’ai entendu à la fin d’un de mes spectacles.
Le politiquement correct nous empêche de penser ce que nous voulons. Pour en revenir à Israël, une certaine police de la pensée veut par exemple nous faire croire que les méchants ne sont pas ceux que l’on croit. Eh bien si : ce sont bien eux les méchants !
Comment voyez-vous l’avenir ?
On est dans une période d’extrêmes, mais on va obligatoirement revenir vers quelque chose de plus équilibré. Il ne peut pas en être autrement.
Que dites-vous à vos quatre enfants quand ils sortent le soir ?
N’oubliez pas d’être heureux ! n
Philippe Lellouche et Ary Abittan débarquent à Tel Aviv les 24 et 25 juin prochains, dans le cadre de la troisième édition du Tel Aviv Comedy Festival. Deux soirées de rire inoubliables avec des artistes exceptionnels ! Réservez vos places dès maintenant :
Philippe Lellouche : Stand Alone
Lundi 24 Juin à 21h
Théâtre Beit ha'Hayal, Tel Aviv
De 170 à 420 shekels
Ary Abittan : Authentique
Mardi 25 Juin à 21h
Théâtre Beit ha'Hayal, Tel Aviv
De 170 à 420 shekels
https://telavivcomedyfestival.com
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Sur les traces de Theodor Herzl
Une biographie comme un carnet de voyage
PAR ANNE-CAROLL AZOULAY
La vie de Theodor Herzl pourrait s’apparenter à un long carnet de voyage, dont nous avons choisi de retenir cinq lieux clés.
Tout commence à Budapest, capitale de la Hongrie, qui abrite une population juive si nombreuse qu’on la nomme « Judapest ». Scolarisé dès l'âge de six ans dans une école juive traditionnelle où il reçoit une instruction religieuse et où il apprend l'hébreu, le petit Benyamin Zeev Theodor Herzl, né le 2 mai 1860, grandit près de la Grande Synagogue de Budapest, située rue Tabak, dans une famille germanophone. Son grand-père est 'hazan de sa synagogue et proche du rabbin Yéhouda 'Hay Alkalay (1798-1878), illustre membre, dès ses débuts, des « Amants de Sion », le premier mouvement populaire de grande envergure à développer et mettre en application les idéaux sionistes. Après des études de droit à Vienne, Herzl écrit des pièces de théâtre. Il devient journaliste et part à Paris comme correspondant du journal Die Neue Freie Presse de 1891 à 1896. Si les fondements de son identité juive se sont construits à Budapest – bien que, comme la majorité des Juifs de sa génération, Herzl soit laïque –, c’est à Paris, où il assiste à la dégradation du capitaine Alfred Dreyfus (voir article pages 14 et 15), que son âme juive se réveille. Retour à Vienne, où naissent la vision et, le 14 février 1896,
Ci-dessus : Herzl lors du premier Congrès sioniste à Bâle
Ci-contre : Theodor Herzl (au centre) au café Luber de Vienne avec des sympathisants à la cause sioniste en 1896, un an avant création de l’Organisation Sioniste Mondiale
l'ouvrage de référence du mouvement sioniste politique : Der Judenstaat (L'État des Juifs). Moins de deux ans plus tard, cette vision se concrétise en Suisse où, du 29 au 31 août 1897, Herzl convoque le premier Congrès sioniste à Bâle, après avoir essuyé une fin de nonrecevoir de la part de rabbins qui ont refusé que cet événement se tienne à Munich : « À Bâle, j’ai créé l’État juif. Si je disais cela
publiquement aujourd’hui, tout le monde se moquerait de moi. Dans cinq ans peut-être, dans cinquante ans sûrement, tout le monde acquiescera », confie Herzl le 3 septembre 1897 au journal qu’il tient scrupuleusement.
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Le 28 octobre 1898, Herzl se rend pour la première fois à Jérusalem où il a obtenu de rencontrer Wilhelm II, en visite historique en Palestine, alors sous contrôle de l’Empire ottoman. Objectif : réussir à ce que le Kaiser demande au sultan d’accorder aux Juifs le droit d’ouvrir une société à charte en Palestine, sous la supervision des Allemands. Sa requête échouera mais sa rencontre avec Jérusalem restera gravée dans l’esprit du grand homme : « Malgré mon épuisement, Jérusalem et ses contours éclairés par la lune m’ont fait une très forte impression. C’était magnifique de voir la forteresse de Sion, la Cité de David », écrit-il dans son journal. Mais il est terriblement attristé de l’insalubrité de la ville et de la pauvreté de ses habitants : « Si un jour Jérusalem est à nous, et si ce jour je suis encore capable d’agir, alors je commencerai par la nettoyer », confie-t-il à son journal. « Je construirai une ville aérée, agréable, avec un système d’égouts performant, une ville toute nouvelle autour des lieux saints. » Et de poursuivre : « Une glorieuse Jérusalem se développera peu à peu. Les soins apportés à la ville, empreints d’amour et de respect,
DOSSIER
la transformeront en un véritable bijou. »
Une fin prématurée
Depuis sa prise de conscience de l’urgence de créer un État pour les Juifs, Herzl voue sa vie à fédérer à sa cause le peuple juif et tout dirigeant capable de l’entendre. Il s’éreinte à voyager aux quatre coins du monde, dans des conditions souvent très difficiles. Il se rapproche des Rothschild, demande des lettres de soutien au pape Pie X qui le reçoit en 1904, au roi Victor-
Emmanuel III ou à Cecil Rhodes. Il se rend à Constantinople, à Sofia, à Londres, à SaintPétersbourg, au Caire, et il participe même à la première conférence de La Haye. Le 3 juillet 1904, épuisé, Herzl meurt prématurément à Edlach, village rattaché à la commune de Reichenau en Basse-Autriche, de faiblesse cardiaque aggravée par une pneumonie. Son épouse meurt en 1907. Ses enfants Pauline et Hans se suicident en 1930. Sa fille Margareth Gertrude, dite Trude, est assassinée avec son époux en 1943 dans le camp de concentration de Theresienstadt. Lorsqu’en 1967, après la guerre des Six Jours, les Juifs ont retrouvé leur souveraineté sur Jérusalem, la dépouille d’Herzl y a été transférée (conformément à son souhait) sur le mont éponyme, le lieu probablement le plus célèbre et le plus visité d’Israël. Son cercueil était recouvert d'un drap bleu et blanc orné d'une étoile de David entourant un lion de Juda, et de sept étoiles d'or rappelant la proposition originale faite en 1897 par Herzl d’un drapeau sur ce modèle, qui aurait pu être celui de de l'État juif. n
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A gauche : Herzl et ses enfants dans son bureau de Vienne Ci-dessus : son épouse, Julia Herzl
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La Jérusalem d'aujourd'hui, qui ressemble à celle rêvée par Herzl
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Se perdre dans les traces de Theodor Herzl
PAR EDEN LEVI-CAMPANA
La vie en Israël est rythmée par des « moments de mémoire ». Dans la perspective de Yom HaShoah, Yom HaZikaron et Yom HaAtzmaout, nous avons voulu mettre nos pas dans ceux du fondateur du mouvement sioniste, celui que l’on surnommait le « 'Hozé haMedina » (« le visionnaire de l’État ») : Theodor Herzl. Sur cette route, nous avons croisé nombre de personnages incroyables, à commencer par Sigmund Freud, le père de la psychanalyse, ainsi que de parfaits inconnus, de simples pierres, mais dont l’histoire et le parcours forment la mosaïque du peuple juif.
Aujourd’hui, j’ai entrepris un voyage initiatique sur le vieux continent, à la recherche de mes racines. L’aventure débute à Tel Aviv où ma vieille tante Golda me donne les dernières consignes de « survie », puis direction Paris, la Bibliothèque Nationale. Tante Golda connaît bien les dangers de la jungle parisienne, elle me téléphone dans l’après-midi pour s’assurer que je suis toujours vivant. À Paris, la pluie menace de noyer mon taxi, et dresse des
murs d’eau entre moi et Varsovie. Au bout du Champ de Mars, je distingue l’École Militaire, une institution qui tremble encore de honte d’avoir un jour prononcé ces mots : « Dreyfus Alfred, vous êtes indigne de porter les armes. De par la loi, nous vous dégradons. » En réalité, nous savons aujourd’hui qu’il fut condamné parce que Juif.
La scène se déroule le 5 janvier 1895 à 9 heures du matin. Le lendemain, Le Petit Parisien écrira : « Le temps, brumeux à l’aube, s’est
président
l'État
éclairci. Un soleil pâle se montre sur le fond clair de ce ciel d’hiver. » Cinq mille hommes sont là, de chaque côté de la cour Morland et sur les toits, militaires et simples citoyens, plutôt bourgeois. Sur le côté gauche sont parqués deux cents journalistes, dont un certain Theodor Herzl, correspondant à Paris du principal journal libéral européen, le très autrichien Die Neue Freie Presse Herzl a suivi toute l’affaire depuis le premier procès. Alfred Dreyfus, un officier diplômé de Polytechnique, aurait trahit sa patrie en livrant aux Allemands des informations confidentielles. Dans la cour militaire, les insultes fusent : « sale traître ! », « mort à Judas ! », « mort aux Juifs ! ». L’antisémitisme et l’antijudaïsme se délectent de la déchéance du Juif et puisent dans les références religieuses.
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L'ancien
de
d'Israël, feu Shimon Peres, accroche une gerbe devant la tombe de Theodor Herzl à Jérusalem.
DOSSIER
Theodor Herzl n’a pas attendu cette sinistre matinée de janvier pour être confronté à la violence de l’antisémitisme, mais le procès Dreyfus est incontestablement un déclencheur. Quatre ans plus tard, il écrira : « Le procès Dreyfus fit de moi un sioniste. »
Quelques recherches sur mes origines familiales plus tard, me voilà reparti vers un autre aéroport d'où je m'envolerai pour la Pologne.
Je ne peux pas me rendre en Pologne sans passer par Auschwitz, non par pulsion morbide mais parce que je me dis que ce site n’a pas fini de me parler.
Le lendemain, nous faisons de l’archéologie familiale dans le grenier de Jozef, un lointain cousin de Varsovie. C’est lui qui m’indique que près de mon hôtel, il y a « un bout du mur du ghetto ». Il essaie de me faire promettre de participer avec lui à la Marche des Vivants – entre Auschwitz et
Birkenau – qui se déroule le jour de Yom HaShoah. Je serai en Israël, donc je passe mon tour. L’après-midi, je me perds en cherchant les vestiges du mur du ghetto. Je passe et repasse une dizaine de fois sur la route que m’a indiquée Jozef ; mais pas la moindre brique rouge, que des tours et des immeubles. Puis soudain, dans une arrièrecour insalubre, je découvre un petit jardin, une plaque de Yad Vashem, des petits cailloux et un pan du fameux mur rouge brique, seul vestige de la souffrance des 400 000 Juifs qui étaient entassés dans le ghetto sur une superficie d'environ 300 hectares.
Je vais me perdre à nouveau – mais volontairement, cette foisci – deux jours plus tard à Vienne, dans cette grandiose cité classée à juste titre au patrimoine mondial de l’UNESCO.
Ma base est le quartier juif, un hôtel casher où l’on déguste au petit-déjeuner une chakchouka aussi bonne qu’à Tel Aviv. Après avoir visité les musées juifs de la Dorotheergasse, de la Judenplatz et le mémorial de la Shoah, je me dirige vers le « ShoahNamensmauern », le Mur des noms de la Shoah, à deux kilomètres, dans le parc Ostarrichi. Les deux kilomètres en deviennent six. Les boutiques de la Kärntner Straße me happent. Je slalome dans cette artère commerçante de Vienne, jusqu’à la rue Graben, ses échoppes et ses antiquaires. Dans un sous-sol obscur, un surplus militaire vend des armes, des insignes et des uniformes nazis. Un vieux monsieur m’assure de leur authenticité. Je sors aussitôt. Chemin faisant, j’ai prévu de m’arrêter au 6 rue Berggasse, où a vécu Theodor Herzl entre 1896 et 1898. Je sais que dans le cadre d’une visite d’État, le président
israélien Itzhak Herzog a dévoilé une plaque commémorative, je n’aurai pas de mal à trouver. En fait, si : je n’ai jamais trouvé le 6 rue Berggasse ! À force de chercher, j’ai bien trouvé la plaque, mais au numéro 9. À part cela, rien concernant Theodor Herzl ; les Autrichiens sont discrets sur cette question.
Je remonte la rue Berggasse en pensant à l’affaire Dreyfus. Après la dégradation du capitaine et les cris de haine, Theodor Herzl est persuadé de l’impérieuse nécessité de créer un refuge permanent pour le peuple juif. Cette conviction, il la consigne dans son ouvrage majeur, L’État des Juifs (Der Judenstaat), rédigé en 1896. Herzl y théorise les trois principes fondamentaux du sionisme : la spécificité de l’existence du peuple juif, son impossibilité d’assimilation par d’autres peuples, et la nécessité de créer un État distinct pour prendre en charge son destin. À ces trois piliers du sionisme, le premier Congrès sioniste qui se tient à Bâle en 1897 en ajoute un quatrième : le droit des Juifs à s’installer en Palestine.
En réalité, l’installation a déjà commencé. Dès 1883, le baron Edmond de Rothschild achète des terrains agricoles à de riches propriétaires terriens arabes. Ces derniers vivent à Beyrouth, Damas et Paris, et ils n’attachent aucune importance au fait de priver leurs métayers de leur outil de travail. Quand on pense « colonie juive », il est toujours bon de se rappeler que personne n’achète si personne ne vend.
En 1890 débute la deuxième vague d’immigration juive en provenance de Russie. Et en 1892, le chemin de fer de Jaffa à Jérusalem est inauguré.
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lll C’est à cette date-là que naît mon arrière-grand-mère, à Jaffa, en quelque sorte grâce au chemin de fer. Sa mère, Rachel, est née à Jérusalem la même année que Herzl. Elle fait partie de ces Ashkénazes de la Vieille Ville qui fuiront aux États-Unis après le pogrom de Nabi Moussa (dimanche 4 et mercredi 7 avril 1920 à Jérusalem).
Les émeutes de Nabi Moussa sont encore le résultat des brillantes stratégies des militaires britanniques voulant soutenir le souverain hachémite Fayçal ibn Hussein à la veille de la conférence de San Remo. Le peuple juif est et restera la variable d’ajustement de tous les apprentis-sorciers présidant aux destinées de cette planète.
« Cher docteur, Suite à une recommandation de votre collègue, l’éditeur M. M., je me suis permis de vous envoyer un exemplaire de mon livre publié en 1900, sur les interprétations des rêves, ainsi qu’une courte conférence sur le sujet. Je ne sais pas si vous serez d’accord avec Monsieur M., mais je vous en supplie, gardez-le comme signe de ma reconnaissance envers vous, que j’ai ressentie – comme beaucoup d’autres – pour le poète et le combattant pour les droits humains des personnes. Cordialement, Prof. Dr Freud »
Lettre de Sigmund Freud à Theodor Herzl du 28 septembre 1902
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Première page du journal antisémite La libre parole, dirigé par Édouard Drumont. À droite : cérémonie de dégradation d'Alfred Dreyfus
Rue Berggasse, je découvre des bâtiments de style baroque et d’autres de l’époque du Bauhaus. Comment ne pas penser à Tel Aviv, à ses façades blanches et à ses balcons arrondis caractéristiques de ce style architectural ? Si je ne trouve rien au 6 rue Berggasse concernant Herzl, au 19, en revanche, pratiquement en face, une large place est dédiée au Sigmund Freud Museum. Freud a en effet passé presque toute sa vie professionnelle, de 1891 à 1938, à cette adresse, jusqu’à sa fuite. Bien que voisin de Herzl, il ne l’a vraisemblablement jamais rencontré. Mais Freud connaissait le travail du père du sionisme. En 1902, il lui a adressé une lettre (photo ci-contre), ainsi que son ouvrage L’interprétation des rêves , paru deux ans plus tôt. Dans la missive, il exprime sa profonde estime pour Herzl, poète et défenseur des droits du peuple juif, et il lui demande de conserver son livre en témoignage de cette admiration. Des années plus tard, Freud sera le psychanalyste de Hans Herzl, le fils de Theodor, qui connaîtra une fin tragique, comme ses parents et ses deux sœurs. Ma visite autrichienne s’achève dans le même quartier, sur une création artistique : un opéra dirigé par une jeune cheffe d’orchestre israélienne. Keren Kagarlitsky a composé et dirige ce soir-là Lass uns die Welt vergessen – Volksoper 1938 (Oublions le monde – Volksoper 1938 ). Cette œuvre magistrale fait pénétrer dans le contexte de l’année 1938 à Vienne, peu avant l’accession au pouvoir des nazis. En une sorte de « the show must go on », on avance malgré les turpitudes de l’histoire et la menace barbare. lll
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Herzl
l’Africain
Theodor Herzl au centre lors du sixième Congrès sioniste. À ses côtés, Siegmund Werner, rédacteur en chef du journal sioniste Die Welt fondé par Herzl.
Être le peuple élu, ce n’est pas toujours reposant. Mais imaginez qu’à la place d’avoir à nos frontières le Liban, la Syrie, la Jordanie, l'Égypte et les territoires palestiniens, Israël soit bordé par le Kenya, la République démocratique du Congo, le Soudan du Sud, la Tanzanie et le Rwanda : aurions-nous été plus heureux ?
Complètement surréaliste, cette proposition fut cependant bel et bien envisagée par le sioniste de tous les sionistes : Theodor Herzl. En 1903, lors du sixième Congrès sioniste, Herzl enflamme les débats en proposant une solution alternative à la Palestine pour le peuple juif : l'installation temporaire en Ouganda, alors territoire du Kenya britannique. Cette idée émerge face au refus du pouvoir ottoman d'accueillir les Juifs en Palestine. Il s’agit aussi d’une réponse au désarroi grandissant des communautés juives d'Europe orientale. Bien entendu, certains doutent de sa viabilité, même temporaire. Herzl lui-même, lors de ce congrès, souligne que l'Ouganda ne pourra jamais être comparé à Sion, la terre sacrée des Juifs. Avec 292 voix pour, 177 voix contre et 132 abstentions, le Congrès sioniste décide de désigner trois délégués chargés d'évaluer sur place les possibilités. À leur retour, ils rejettent catégoriquement l'idée d'une implantation en Ouganda. Lors du septième Congrès sioniste, en 1905, le projet est définitivement enterré par une majorité écrasante, exprimant que toute tentative d'établissement en dehors de la Terre d'Israël va à l'encontre des principes établis à Bâle. Nous l’avons échappé belle !
Un proverbe ougandais dit : « Les défauts sont semblables à une colline, vous escaladez la vôtre et vous ne voyez que ceux des autres. » Finalement, nous pouvons convenir que ce n’est pas plus mal que le mont Herzl soit à Jérusalem plutôt qu’en lieu et place des collines d'Impala à Kampala – il ne nous aurait plus manqué qu’Amin Dada et consorts sur le dos ! E L-C
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Le président de l'État d'Israël, Itzhak Herzog (au centre), lors de l'innauguration de la plaque commémorative à la mémoire de Theodor Herzl au 9 rue Berggasse à Vienne (Autriche) ©
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La troupe répète l’opérette Gruß und Kuss aus der Wachau (Salutations et baisers de la Wachau) tandis qu’à l’extérieur le monde s’effondre – bien entendu, la plupart des artistes de la troupe sont juifs. Au fil des répétitions, la prise du pouvoir par les nazis entraîne de sérieux changements pour l’opéra Volksoper, fleuron de la culture autrichienne.
Pour son 125e anniversaire, le Volksoper a décidé de se confronter à une période
douloureuse de son histoire, de l’histoire de l’Autriche, de l’histoire de l’Europe, de l’histoire du monde. Cette pièce, par une sorte de mise en abyme, dénonce ceux qui ont laissé faire, ceux qui n’ont pas élevé la voix – oui, exactement comme après le chabbat noir du 7 octobre. L’histoire se répète encore et toujours. Keren Kagarlitsky déclare que sa vie est un enfer depuis le massacre en Israël. Pour elle comme pour beaucoup de Juifs en Israël et en Diaspora, Yom HaZikaron aura
cette année une signification très particulière. Issue d’une famille juive venue du Kirghizistan, Keren est née en Israël en 1991. Elle a fait son service militaire à Tel Aviv. Le lendemain de l’attaque du Hamas, elle a dû diriger La Cenerentola, un opéra exceptionnellement joyeux – une torture pour la jeune femme, fille d’Israël.
Je poursuis mes recherches personnelles un peu partout en Europe sur les traces de mes ancêtres, avant de rejoindre Ellis Island, à l’embouchure de l’Hudson, à New York, au pied de la statue de la Liberté. Pour ceux qui veulent avoir une idée de l’histoire d’Ellis Island, je vous suggère l’excellent film réalisé par Michaël Prazan en 2014, qui revient sur les destins des immigrants. Pour ma part, je n’éprouve qu’une grande tristesse dans ces locaux verdâtres et inhospitaliers.
J’imagine l’angoisse de mon aïeule, ma Rachel, attendant le sésame vers la liberté.
C’est pour elle que Theodor Herzl a lutté, pour elle et pour toutes celles et tous ceux qui n’aspiraient qu’à vivre sereinement, tranquillement, pas dans l’attente du prochain pogrom, sans une menace permanente.
À Ellis Island, je ne suis pas au bout de mes surprises. Je découvre sur le manifeste du Lapland, le bateau qui a amené Rachel depuis Anvers, qu’elle avait un fils qui est resté à Jérusalem. Me voici donc de retour à Yerouchalayim, à la recherche de nouveaux indices sur ma famille. C’est le risque que l’on court lorsqu’on met ses pas dans ceux d’un géant : on a de fortes chances de se perdre… pour mieux se retrouver. n
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« Si vous le voulez, ce n’est pas un rêve »
PAR EDEN LEVI-CAMPANA
Theodor Herzl, chantre du mouvement sioniste, est considéré comme un des pères fondateurs de l’État d’Israël. Quelle est son histoire et comment est-elle enseignée en Israël ? Rencontre avec Shlomit Satlar (ci-contre), directrice pédagogique du Centre Herzl et de son musée.
AJ MAG : Quel sont les objectifs du centre Herzl et de son musée ?
Shlomit Satlar : Le but du centre et du musée Herzl est de sensibiliser le plus grand nombre de personnes à l'histoire de la vie et à la vision de Theodor Herzl, ainsi qu'à la manière dont il a contribué au mouvement sioniste et à la création de l'État d'Israël. Nous rappelons que l'histoire de Herzl est toujours aussi pertinente pour Israël et le monde juif aujourd'hui.
Quel est le bilan du musée depuis sa création ?
J'ai pu constater avec quelle efficacité, grâce à son format interactif semi-numérique, il remplit sa mission éducative aussi bien auprès des enfants que des adultes. Certains connaissent Herzl, d’autres en ont à peine entendu parler ; le musée s’adresse à tout type de public.
Qu'est-ce que « l'esprit Herzl » ?
Personnellement, je pense que « l'esprit Herzl » signifie continuer à avancer vers ses objectifs malgré l'adversité que l'on rencontrera inévitablement en cours de route. Tout au long de son itinéraire sioniste de neuf ans, Herzl a subi des revers et fait face à un certain nombre de problèmes, mais il a continué à faire tout ce qui était en son pouvoir afin de réaliser son rêve pour le peuple juif. Comme l’écrivait Herzl à la fin de son roman Altneuland (1902) : « Si vous le voulez, ce n’est pas un rêve. » (« Im tirtzou, ein zo agada. ») Je pense qu’il s’agit d’un message très puissant, aussi bien au niveau individuel qu’au niveau national. lll
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En 1895, Herzl publie L’État des Juifs (Der Judenstaat), dont les trois principes fondamentaux sont : l'existence spécifique du peuple juif, l'impossibilité pour la nation juive de s'assimiler aux autres peuples et la nécessité de créer un État qui prenne en charge le destin du peuple juif. Le message a-t-il été entendu ?
Après la Shoah, beaucoup plus de Juifs ont compris la nécessité de créer un État juif indépendant comme moyen d’autoprotection, de rétablissement de notre identité et d’unification en tant que nation, après que l’on a tenté de nous détruire. Cependant, être sioniste ne signifie pas exclusivement vivre en Israël. On peut soutenir l’idéal d’une identité unie en tant que nation bien au-delà de la vie sur le territoire physique luimême. Les principes de Der Judenstaat continuent de résonner de nos jours et de promouvoir la conviction que l'État d'Israël est essentiel à la survie et à la sécurité du peuple juif.
Que pouvez-vous nous dire des Congrès sionistes ?
Suite à la popularité explosive de Der Judenstaat au sein de la population juive en Europe et dans le monde juif, Herzl a organisé en 1897 le premier Congrès sioniste à Bâle (Suisse), comme une assemblée formelle pour débattre de la manière de mettre en œuvre les idées exposées dans Der Judenstaat. Ce congrès était le premier d’une longue série, puisque jusqu’à ce jour les Congrès sionistes continuent de se réunir. Lors du premier Congrès sioniste a été créée l'Organisation Sioniste Mondiale, composée de représentants juifs sionistes issus de congrégations et d'horizons divers, et dont l’objectif était de travailler ensemble pour créer un État juif souverain et officiel.
La jeunesse israélienne a-t-elle compris l’histoire de Theodor Herzl ?
La plupart des jeunes Israéliens connaissent les grands traits de l'histoire de Theodor Herzl, et ses liens avec le sionisme et l'État d'Israël. Cependant, de nombreux éléments leur échappent, et le musée Herzl leur permet de comprendre plus en profondeur les objectifs et les idéaux de Herzl. Herzl figure au programme des élèves israéliens du primaire et du secondaire, qui constituent une grande partie des visiteurs du musée.
Herzl est-il considéré comme une superstar ? À bien des égards, Herzl est en effet une superstar. Son profil barbu emblématique et la célèbre
photographie où on le voit appuyé à la balustrade de l’hôtel de Bâle surplomblant le Rhin, où il résidait lors du premier Congrès sioniste, sont même répandus dans la culture pop israélienne. On retrouve souvent des citations de Herzl ou des portraits graffés sur les murs de Tel Aviv, sans parler des nombreuses rues qui portent son nom dans presque toutes les villes d’Israël. « Si vous le voulez, ce n’est pas un rêve » est une phrase bien connue du public israélien et continue de perpétuer son héritage.
Que nous a légué Herzl ?
Le véritable héritage de Herzl est l’unification du peuple juif à une époque dominée par l’antisémitisme et où l’avenir des Juifs semblait très sombre. Herzl a réussi à rassembler un peuple dispersé et à l'inspirer par ses écrits, à travers d’importants messages sur l'identité juive et l'espoir de construire un avenir pour le peuple juif, des bases auxquelles les dirigeants israéliens de tout le spectre politique font encore référence aujourd’hui.
Est-ce que Yom HaAtzmaout est la victoire de Theodor Herzl ?
Yom HaAtzmaout (le Jour de l’Indépendance) signifie à bien des égards la réussite du rêve de Herzl d'un État juif. D’ailleurs, la cérémonie de transition entre le deuil de Yom HaZikaron (le Jour du Souvenir) et la joie de Yom HaAtzmaout se déroule devant sa tombe, pour rendre honneur à ses efforts. Cependant, la véritable victoire de Theodor Herzl réside dans la poursuite de la prospérité d’Israël grâce à un gouvernement démocratique juste et dans un État à la pointe de la technologie, qui concrétise les aspirations et les ambitions de Herzl. La véritable victoire de Herzl est sa capacité à nous rappeler, bien des générations plus tard, qu'il est possible de transformer un rêve en réalité – mais il faut le vouloir… n
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Le musée
Le musée Herzl a été ouvert au public en 2005 pour célébrer le centième anniversaire de la mort de Herzl et présenter sa vie, son œuvre, et son influence sur l'histoire du peuple juif et la création de l'État d’Israël. Le musée est situé sur le mont Herzl, à proximité de la tombe de Herzl et de celles de nombreuses figures de proue du pays, et également proche du cimetière national des soldats qui ont sacrifié leur vie pour la nation. Le musée se répartit en quatre zones d'exposition. Trois d'entre elles retracent différentes périodes de la vie de Herzl, depuis sa jeunesse à Vienne jusqu'à sa mort prématurée à l'âge de 44 ans, en passant par le procès Dreyfus et les Congrès sionistes de Bâle. L'apogée de la visite est dans la quatrième pièce, où les visiteurs pourront s'émerveiller devant la représentation des réalisations de l'État juif, envers et contre toutes les nombreuses difficultés rencontrées en chemin.
https://www.herzl.org.il/
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Photos : © Musée Herzl
À l’école comme dans les arts, Herzl inspire, surprend et fédère
PAR NATHALIE HAMOU
L’inventeur du sionisme occupe une place de choix dans
l’enseignement public israélien, une importance relayée par la scène culturelle dans un contexte de crise de leadership.
Où est Herzl ? » Lors d’un récent événement culturel qui a pris place dans l’enceinte du Heikhal haTarbout, la salle de spectacle située place Habima à Tel Aviv, la question a fusé dans un dialogue entre la scène et le public autour de l’actualité politique. Alors que le pays traverse une sérieuse crise de leadership, les personnages historiques qui ont porté le projet sioniste avant la création de l’État hébreu rassurent et servent plus que jamais de repères – en tout cas le journaliste et écrivain Theodor (Benyamin Zeev) Herzl, qui occupe une place de choix, non seulement dans les programmes scolaires, mais également dans la sphère artistique.
Fait remarquable : la loi Benyamin Zeev Herzl a été promulguée il y a tout juste vingt ans, pour perpétuer sa mémoire et son œuvre. Selon l'article 1 de cette loi initiée par le député du parti
Herzl fédère à l’heure où la tragédie du 7
octobre nous renvoie à la question : pourquoi l’État Israël ?
Chinouï (pour la laïcité) Ilan Shelgi, le jour de l’anniversaire de Herzl (à la date hébraïque du 10 Iyar) servira de « Yom Herzl », afin d’« inculquer la vision, l'héritage et l'œuvre d’Herzl » aux générations futures, en montrant quelle a été son influence sur les institutions, les objectifs et le caractère de
l’État juif qui a pu être façonné conformément à sa vision sioniste. Ce nouveau temps mémoriel reste nécessaire. Selon une enquête menée en octobre 2019 par le Centre Herzl auprès de 303 lycéens et de 306 enseignants, le niveau des connaissances des lycéens laisse à désirer sur certains sujets. Réalisée en amont de la première Conférence Herzl sur le sionisme contemporain organisée à Jérusalem, l’étude a révélé que 22 % des lycéens ne savaient pas que le 29 novembre 1947, les Nations Unies ont décidé de créer l'État d'Israël. La plupart des jeunes scolarisés ne savaient pas non plus où était née la vision de l’État de Benyamin Zeev Herzl ; environ 40 % des étudiants ignoraient qu'il avait écrit Altneuland ; la majorité d'entre eux ne connaissaient pas les premiers mots de la proclamation d’indépendance. Près de 11 % pensaient que la vision de l’État
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«
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Israël
Boaz Monczer
Mikvé
juif émanait du premier dirigeant du pays, David Ben Gourion, et la moitié que Herzl était né à Vienne et non à Budapest.
« Nous aimerions proposer de relire Herzl, et non de faire lire ce qui a été écrit sur lui », avait alors déclaré la docteure Aliza Lavi, présidente du Centre Herzl. Peu de temps auparavant, la Municipalité de Tel Aviv-Jaffa avait envisagé de ne plus distribuer le livre Altneuland aux classes de terminale, au profit du recueil d'articles Shalom laKanaïm (Comment guérir un fanatique, 2006) du regretté écrivain Amos Oz, pour « encourager la pensée critique ».
Mais l’organisation syndicale Histadrout l’avait convaincue de revenir sur sa décision.
« En tout état de cause, l’enseignement de Herzl au lycée a changé », estime Boaz Monczer, éducateur et professeur d’histoire à l’école franco-israélienne Mikvé Israël de Holon. « Pendant des années, on enseignait son histoire de
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manière factuelle, désormais on se sert d’autres matériaux – son journal, ses manuscrits, des chansons qui ont été écrites sur lui, comme celle du parolier et auteur Yoram Taharlev – pour transmettre son parcours et ses idées dans le cadre d’une pédagogie plus vivante. » En février, les élèves de première et terminale de cette école ont ainsi organisé, dans le cadre de leur cours d’histoire, un spectacle sous forme de « conférence de presse » avec Herzl : une façon de reconstituer le seul et unique voyage que le visionnaire de L’État des Juifs a effectué en Palestine ottomane, en 1898, cinquante ans avant la concrétisation de son utopie. À l’époque, il s’agissait pour lui de suivre la visite de l’empereur Guillaume II d’Allemagne. En chemin pour Jérusalem, le Kaiser s’est s’arrêté à l’école agricole de Mikvé Israël, et c’est là que le journaliste venu de Vienne l’a rencontré.
« Cette année, avec la guerre, le jour dédié à Herzl sera sans doute marqué plus sobrement, poursuit Boaz Monczer. Mais le célèbre auteur qui, durant sa brève existence, a accompli tant de choses et donné à penser sur une multitude de sujets clés – comme par exemple le rapport de l’État avec la religion –, fait incontestablement partie de la famille des personnages consensuels de notre pays, aux côtés de Trumpeldor, Ben Gourion, Navon, et Shimon Peres dans ses fonctions de président de l’État. Herzl fédère à l’heure où la tragédie du 7 octobre nous renvoie à la question : pourquoi l’État Israël ? » n
« Herzl était un leader unique, doté d’une âme d’artiste »
Roy Chen, auteur de théâtre et traducteur maison du célèbre Théâtre Gesher, situé dans le quartier de Yaffo à Tel Aviv, livre son regard sur sa pièce Herzl a dit, écrite et jouée sur cette scène en 2017.
AJ MAG : Dans quel état d’esprit avez-vous écrit la pièce Herzl a dit ?
Roy Chen : La pièce Herzl a dit (le nom hébreu du jeu « Jacques a dit ») a été écrite pour le soixante-dixième anniversaire de l'État d'Israël. Celui que l'on appelle « le visionnaire de l’État » fut l'un des grands « startupers » du rêve sioniste. Je voulais vérifier ce que nous avons pu réaliser grâce à sa vision, où nous avons commis une grosse erreur, et demander s'il était possible de la corriger. Herzl était un leader unique, doté d’une âme d’artiste. Est-il possible d’imaginer aujourd’hui un leader qui écrit un roman de sciencefiction ? Le livre Altneuland, dont je me suis inspiré pour le spectacle, est une utopie pleine d'humour et d'idées en avance sur leur temps : le droit de vote des femmes, l'égalité entre Arabes et Juifs, l'emploi équitable, les droits de tous les travailleurs – une
combinaison d’Est et d’Ouest. La pièce que j’ai écrite est une satire qui confronte ce rêve à la réalité, avec beaucoup de critiques. C’est à mon avis le rôle d’un artiste : critiquer durement par amour.
En tant que père de famille, vous avez des enfants scolarisés : comment sont enseignés l’œuvre et l’héritage de Herzl dans le système scolaire public ? Mieux vaut ne pas me poser de questions sur le système éducatif… Notre spectacle au Théâtre Gesher vise en tout cas à inciter les gens à redécouvrir le livre Altneuland, à le lire. Et qui sait ? Herzl, avec son innocence, pourra peut-être nous ramener à un terrain d'entente susceptible de nous conduire sur un nouveau chemin ? n
Propos recueillis par Nathalie Hamou
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© Mikvé Israël
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La Shoah sur le divan de Freud
PAR EDEN LEVI-CAMPANA
À Vienne, le cabinet de Sigmund Freud est devenu le musée du fondateur de la psychanalyse, mais également un lieu de commémoration de la Shoah. Entretien avec Daniela Finzi, directrice scientifique du Musée Sigmund Freud.
AJ MAG : Le Musée Sigmund Freud est à la fois le berceau de la psychanalyse et un lieu de commémoration de la Shoah : pourquoi ?
Daniela Finzi : Le 19 de la rue Berggasse, à Vienne, représente le lieu d'origine de la psychanalyse : Sigmund Freud a habité à cette adresse pendant quarante-sept ans, il y a loué trois appartements différents au fil des ans. C’est là qu’il a développé – en collaboration avec ses patients, mais aussi au cours de discussions avec ses collègues – une nouvelle méthode de traitement et une nouvelle science : la science de l'inconscient. Mais en fait, pour reprendre les termes de Freud lui-même, cette adresse est « surdéterminée », car c’est un lieu de mémoire multiple : par exemple, Victor Adler, médecin et fondateur du parti ouvrier social-démocrate en Autriche, y a travaillé. D’ailleurs, Freud et Adler se connaissaient et entretenaient des relations.
Comment se présente le musée depuis sa réouverture ?
Comme un lieu de mémoire à plusieurs échelles, qui part du fait que Freud a pu emporter son intérieur lorsqu’il a dû partir en exil à Londres. Le musée a ouvert ses portes en 1971, et tous nos prédécesseurs ont dû travailler avec le vide – le fait que nous ne puissions pas avoir accès à tous les meubles et les objets personnels de Freud : son canapé devenu célèbre, sa collection d'antiquités… Notre nouvelle exposition permanente est conçue de manière à ce que les visiteurs du musée déterminent eux-mêmes leur parcours, et elle se compose de deux volets. D'une part, les pièces laissées vides constituent elles-mêmes les véritables objets du musée ; des mises à nu choisies de plafonds et de murs – des « restes de mémoire » architecturaux –fournissent des informations sur l'utilisation de
ces pièces au cours du temps. D’autre part, des vitrines, dans lesquelles sont notamment exposées des œuvres de Freud, informent sur la biographie intellectuelle du père de la psychanalyse et sur son parcours : ce sont des livres magnifiquement conservés, avec des illustrations passionnantes, très modernes, des premières éditions et des exemplaires dédicacés. En outre, des traductions en langues étrangères, dont nous disposons aussi en grand nombre, renseignent sur la réception précoce de Freud à travers le monde.
Vous dites qu’on ne peut pas faire comme si l'Anschluss et la participation active de l'Autriche au Troisième Reich n'avaient pas eu lieu. Pouvez-vous préciser votre pensée ?
Cela fait référence à notre décision de ne pas reproduire les locaux du cabinet de Freud – où régnait une atmosphère très particulière, compte tenu des nombreuses antiquités, du tapis, du divan, etc. Tout a été photographié, les meubles et les objets se trouvent à Londres – une reconstitution fidèle aurait donc été possible et réalisable. Mais alors, nous aurions fait croire à nos visiteurs que l'Anschluss et la Shoah n'avaient pas existé, ce qui serait en quelque sorte une falsification de l'histoire.
Que dire de Freud et de l’humour ?
Freud était un homme qui pratiquait l'humour et l'ironie. En 1905, il a publié son livre Le mot d’esprit [« Witz », en allemand] et sa relation à l’inconscient , qui est un recueil de blagues (principalement) juives. On y trouve même quelques blagues tendancieuses, de grossières caricatures du Juif oriental mal dégrossi. Il est parfois difficile, aujourd'hui, de comprendre le plaisir que Freud prenait à ces blagues. Je pense qu’il s'intéressait
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surtout à la « technique » de la blague : Freud apprécie la blague parce qu'elle exprime de manière indirecte ce qui ne doit pas être dit.
Quelle vision Freud avait-il du projet sioniste ?
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L'attitude de Freud par rapport au sionisme est empreinte de beaucoup d'ambivalence. Il ne s'est pas exprimé publiquement à ce sujet, seulement dans sa correspondance privée. Freud était d'avis que les Juifs avaient certes besoin d'un foyer national, mais il estimait qu'il y avait de très nombreux obstacles ; il était conscient de la situation politique et sociale de la Palestine de l'époque, et tenait également compte de la population arabe locale. Il condamnait les sentiments et les revendications religieuses de certains Juifs à l'égard de la Palestine. D'un autre côté, il considérait le sionisme politique comme une nécessité historique ; et il était membre, bien que non actif, de deux organisations sionistes : Kadimah et le Keren HaYessod, et il soutenait financièrement des organisations sionistes.
Comment Freud a-t-il réussi à échapper à la Shoah ? Freud a pu émigrer, avec tous ses biens, en raison de sa célébrité internationale. Ses sœurs, en revanche, sont restées à Vienne, comme beaucoup d'autres Juifs, et elles ont été déportées et assassinées dans des camps d'extermination. Des logements collectifs ont été aménagés dans le bâtiment de Berggasse 19 ; il est attesté que 76 Juifs et Juives viennois, principalement des femmes âgées, y ont été logés jusqu'à leur déportation. Dès avril 1938, il a été demandé aux locataires juifs de quitter leurs logements dans les plus brefs délais. En nous basant sur les travaux de la précédente directrice scientifique du musée, Lydia Marinelli, qui avait organisé en 2003 l'exposition Les voisins disparus de Freud (Freuds verschwundene Nachbarn), nous avons voulu présenter l'histoire de l'immeuble dans la nouvelle cage d’escalier (l’escalier de secours), en mettant particulièrement l'accent sur les années 1939 à 1942 : on peut y voir, appartement par appartement, le nom, la date de naissance, la date de déportation et le dernier lieu de résidence connu de ceux qui y ont vécu. n
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Haut gauche : entrée du Musée Sigmund Freud au 19 de la rue Berggasse Haut droite : la salle d'attente du praticien Centre : le salon de Sigmund Freud
© Stephanie Letofsky, fondation Sigmund Freud
© Hertha Hurnaus, fondation Sigmund Freud
© Hertha Hurnaus, fondation Sigmund Freud
Freud et le sionisme
En août 1929, deux ans après la publication en langue arabe des Protocoles des Sages de Sion qui ont généré une flambée d'antisémitisme dans le monde arabe, des émeutes ont eu lieu à 'Hevron, au cours desquelles des Palestiniens ont massacré l’une des plus anciennes communautés juives du Yichouv. C’est dans ce contexte que Chaïm Koffler, membre viennois du Keren HaYessod, s’est adressé à Freud pour lui demander, comme à d’autres intellectuels de la Diaspora, de soutenir la cause sioniste en Palestine et le principe de l’accès des Juifs au Mur occidental. En réponse, il a reçu de Freud la lettre suivante :
« Vienne, 19 Berggasse, 26/2/1930
Monsieur le docteur, Je ne peux pas faire ce que vous souhaitez. Ma réticence à intéresser le public à ma personnalité est insurmontable et les circonstances critiques actuelles ne me semblent pas du tout y inciter. Qui veut influencer le grand nombre doit avoir quelque chose de retentissant et d’enthousiaste à lui dire, et cela, mon jugement réservé sur le sionisme ne le permet pas. J’ai assurément les meilleurs sentiments de sympathie pour des efforts librement consentis, je suis fier de notre université de Jérusalem et je me réjouis de la prospérité des établissements de nos colons. […]. Mais, d’un autre côté, je ne crois pas que la Palestine puisse jamais devenir un État juif ni que le monde chrétien, comme le monde islamique, puissent un jour être prêts à confier leurs lieux saints à la garde des Juifs. Il m’aurait semblé plus avisé de fonder une patrie juive sur un sol historiquement non chargé ; certes, je sais que, pour un dessein aussi rationnel, jamais on n’aurait pu susciter l’exaltation des masses ni la coopération des riches. Je concède aussi, avec regret, que le fanatisme peu réaliste de nos compatriotes […] porte sa part de responsabilité dans l’éveil de la méfiance des Arabes. Je ne
Sigmund Freud en 1921. Compatriotes de l'empire austro-hongrois, Sigmund Freud (18561939) et Theodor Herzl (1860-1904), le fondateur du sionisme, ne se sont jamais rencontrés, bien qu'ils aient habité pendant quelques années dans la même rue de Vienne, la fameuse Berggasse. © Photo Max Halberstadt - Droits Sigmund Freud
peux éprouver la moindre sympathie pour une piété mal interprétée qui fait d’un morceau de mur d’Hérode une relique nationale et, à cause d’elle, défie les sentiments des habitants du pays.
Jugez vous-même si, avec un point de vue aussi critique, je suis la personne qu’il faut pour jouer le rôle de consolateur d’un peuple ébranlé par un espoir injustifié.
Prof. Dr Freud » E L-C
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Docteur Ariel Muzicant, président du Congrès Juif Européen :
PAR EDEN LEVI-CAMPANA
Après le chabbat noir du 7 octobre, le docteur Ariel
Muzicant, président du Congrès Juif Européen (CJE), avoue que son organisation a été dans l’obligation de revoir ses objectifs pour faire face à une vague d’antisémitisme inédite et croissante partout en Europe. Rencontre à Vienne, ville symbolique dans la vie d’Herzl, avec un homme engagé depuis plus d’un quart de siècle au service de la communauté juive.
Face aux menaces constantes, le projet sioniste est vital pour le peuple juif.
AJ MAG : Quel est l’héritage de Theodor Herzl ?
Docteur Ariel Muzicant : L’héritage de Theodor Herzl, le père du sionisme, est marqué par sa vision d’un État juif, son activisme et son fort impact sur l’identité juive. Il a fondé le mouvement sioniste et inspiré des générations de Juifs. Bien qu’il n’ait pas vécu jusqu’à la création de l’État d’Israël, son travail y a mené. Herzl reste un symbole du leadership juif, et son héritage perdure dans la culture et la mémoire collective. Aujourd’hui, à la lumière des menaces constantes auxquelles sont confrontés les Juifs de la Diaspora et en Israël, nous voyons encore plus clairement à quel point le projet sioniste était vital pour le peuple juif. La vision de Herzl de la Terre promise comme rempart contre l'antisémitisme reste plus que jamais pertinente dans le monde contemporain.
Si je vous dis : « Si vous le voulez, ce n’est pas un rêve », qu’est-ce que cela vous inspire ?
Cela m’évoque le désir historique de rétablir un foyer juif sur la Terre d’Israël. lll
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Début avril 2024, une délégation autrichienne dirigée par Wolfgang Sobotka (à droite), président du Conseil national, la chambre basse du Parlement autrichien, s'est rendue en Israël afin de renforcer les liens d'amitié qui unissent les deux pays. Elle a été reçue par le président de l'État, Itzhak Herzog, et par le président de la Knesset, Amir Ohana, et était accompagnée par le Dr Ariel Muzicant, président du Congrès Juif Européen.
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À Pessa'h, nous exprimons le souhait ou le rêve sacré : « L'an prochain à Jérusalem ». Ce rêve est devenu réalité grâce à la détermination et à l'entêtement de ceux qui ont été témoins de la vulnérabilité des Juifs sans patrie. L’histoire nous a appris que les Juifs devaient construire un pays où trouver refuge et créer un foyer. La réalisation de ce rêve a demandé du courage, de la volonté, de la résilience et beaucoup de sacrifices.
Vous n’avez jamais cessé de vous engager pour la communauté : quelle est votre motivation ?
Nous avons une responsabilité les uns envers les autres.
En qualité d’Austro-Israélien, que représente Yom HaAtzmaout pour vous ?
Comme je l’ai dit récemment lors d’un événement au Parlement autrichien, je suis un fier Autrichien et un fier Juif. Je n'ai cessé de lutter pour préserver et promouvoir la vie juive en Autriche. Aujourd’hui, je suis reconnaissant du soutien que nous recevons du gouvernement autrichien ; c’est presque unique en Europe. En même temps, je suis né en Israël, qui est mon foyer spirituel. Israël est un miracle et chaque Yom HaAtzmaout je célèbre avec un grand bonheur la continuation de ce miracle. Malheureusement, Israël est confronté à de constantes menaces. Pour exprimer notre entière solidarité avec le peuple israélien après les attaques ignobles et cruelles
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DOSSIER
du Hamas le 7 octobre, je suis déjà venu trois fois avec des délégations de membres du Congrès Juif Européen, des journalistes et des hommes politiques européens, afin de leur montrer la dévastation dans les kibboutzim et les villes du Sud, et pour rencontrer les familles des victimes et des otages. Notre mission est d’être aux côtés d’Israël et d’entretenir un dialogue constant et honnête avec les politiciens israéliens. Le prochain Yom HaAtzmaout aura un goût amer car nous attendons le retour des otages israéliens et le démantèlement du Hamas pour mettre fin à la guerre. Nous pleurons toutes les victimes innocentes des deux côtés.
Notre mission est d’être aux côtés d’Israël et d’entretenir un dialogue constant et honnête avec les politiciens israéliens.
Quels sont vos objectifs en qualité de Président du Congrès juif Européen ? Mes objectifs ont dû changer après le 7 octobre. La vague d'antisémitisme à laquelle sont actuellement confrontées les communautés juives est sans précédent et nécessite notre plus grand dévouement pour relever les défis sécuritaires que cela implique, à travers les activités du SACC [Security And Crisis Center : le Centre de sécurité et de crise – ndlr] by EJC [EJC : European Jewish Congress – ndlr]. Pour y parvenir, les communautés ont avant tout besoin d’un financement accru. Simultanément, mon objectif est de sensibiliser l’opinion publique pour contrer la diabolisation et la diffamation d’Israël, et la négation de son droit à se défendre, notamment en faisant la lumière sur les vérités révélées le 7 octobre. Il est également crucial de ne pas laisser le conflit à Gaza entraver la mise en œuvre de la stratégie de l'Union européenne visant à lutter contre l'antisémitisme et à promouvoir la vie juive dans certains pays européens. Au milieu des turbulences des événements actuels, nous ne devons pas négliger la préservation de l’identité juive sur le continent grâce à de solides initiatives en matière d’éducation juive, pour garantir la continuité et le dynamisme de la culture et du patrimoine juifs en Europe.
Comment les événements du 7 octobre en Israël impactent-ils la communauté juive en Europe ? Le massacre perpétré par le Hamas le 7 octobre, l’attaque la plus meurtrière contre le peuple juif depuis la Shoah, a alimenté l’antisémitisme en
Europe où il a atteint des niveaux sans précédent. Le nombre d’incidents antisémites, en ligne et hors ligne, est choquant, semant la peur et le désespoir chez les Juifs européens à travers le continent. Selon le CRIF, il y a eu plus de 1700 incidents antisémites en France depuis le début de la guerre entre Israël et le Hamas. Plus de la moitié des incidents sont des agressions contre des personnes, notamment des violences physiques et des propos menaçants. Les mesures de sécurité ont dû être renforcées face à la montée en flèche des menaces à la bombe, du vandalisme contre les institutions juives, du harcèlement et de la violence contre des personnes juives. Cela a affecté les Juifs dans leur vie quotidienne ; beaucoup ont peur de dévoiler leur identité en public, mais aussi d’envoyer leurs enfants à l’école et à l’université, devenues peu accueillantes, voire dangereuses pour les élèves et les étudiants juifs. Les récents incidents visant des étudiants juifs à Sciences Po et à l’Université Sorbonne Nouvelle nous préoccupent profondément, car les universités sont censées offrir un environnement sûr aux jeunes.
Le mur de la Shoah, dans le parc Ostarrichi, est particulièrement impressionnant. Quelle vision les Autrichiens ont-ils de la Shoah ? Pendant des années après la Shoah, les Autrichiens n’ont pas voulu reconnaître leur implication dans la période la plus sombre de notre histoire contemporaine. Ils ne voulaient pas parler de la responsabilité de l’Autriche dans la déportation et le meurtre de centaines de milliers de Juifs. Tout cela a changé après le chancelier Vranitzky et continue de s'améliorer avec Kurz, Sobotka et d'autres. Ce changement d’attitude a un impact positif sur la société et, espérons-le, incitera les autres à regarder honnêtement leur passé et à assumer la responsabilité de leurs crimes. n
Le Congrès Juif Européen (CJE) a été fondé en 1986. Il succède à la section européenne du Congrès Juif Mondial (CJM), qui était basée à Paris. Son siège est situé à Bruxelles, avec des bureaux à Paris, Strasbourg, Berlin et Budapest. C'est une organisation représentative des communautés juives européennes, affiliée au Congrès Juif Mondial.
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DÉCOUVERTE D'ISRAËL
Le Néguev : centre d’innovation
PAR EDITH LEVY-NEUMAND
Les défis géopolitiques et les ressources limitées ont poussé Israël à développer des solutions novatrices dans des domaines tels que la technologie et la sécurité, mais aussi l’agriculture. Gros plan sur les innovations mises en œuvre dans le Néguev.
Le Néguev est une région désertique située dans le sud d'Israël, couvrant environ la moitié de la superficie totale du pays. Historiquement, le Néguev a été habité depuis des millénaires ; des sites archéologiques tels que Tel Beer-Sheva et Tel Arad témoignent de la présence humaine dans cette région dès l'âge du bronze. La région a été conquise par de nombreuses civilisations au fil des siècles mais elle a ensuite été abandonnée jusqu'au milieu du XXe siècle. Aujourd'hui, le Néguev est une région dynamique qui abrite des villes modernes telles que BeerSheva, la capitale du Néguev, ainsi que des kibboutzim et des mochavim qui pratiquent une agriculture
innovante dans des conditions difficiles. La région est devenue un véritable laboratoire, propice au développement de nouvelles technologies, où l'ingéniosité humaine se mesure aux défis extrêmes de l’environnement désertique.
« Dans le Néguev, on testera la créativité de l’individu et sa capacité à développer ses compétences de pionnier », disait Ben Gourion.
Il a fallu adapter des cultures, trouver différentes variétés de légumes capables de se développer sur des terres salées, en n’utilisant que peu d'eau.
Les chercheurs ont étudié la végétation naturelle du désert pour comprendre ce qui lui
permet de subsister dans un milieu si difficile ; et c’est forts de cette compréhension qu’ils ont adapté les cultures aux conditions naturelles, et réussi à faire refleurir le désert.
C’est dans le Néguev que dans les années 1960, le professeur Blas a découvert de manière assez fortuite le système d'irrigation au goutte-àgoutte. Alors qu'il travaillait dans le Néguev, il a remarqué que certaines plantes poussaient mieux près des fuites d'eau. En testant différentes méthodes d'irrigation, le professeur Blas a constaté que le goutte-àgoutte permettait non seulement d'économiser de l'eau, mais aussi d'améliorer la croissance des plantes et les rendements agricoles. Grâce à ce système d'irrigation,
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DÉCOUVERTE D'ISRAËL
on peut non seulement optimiser l'apport en eau, mais aussi contrôler la quantité d'engrais nécessaire à chaque plante. Cette invention a révolutionné l'agriculture dans les zones arides.
Le système d’irrigation au goutte-à-goutte fonctionne en délivrant de petites quantités d'eau directement aux racines des plantes, réduisant ainsi les pertes par évaporation. Cette technique a permis de cultiver une plus grande variété de cultures dans des régions auparavant considérées comme trop arides pour l'agriculture intensive.
À Hatzerim, un kibboutz situé près de Beer-Sheva, à l’orée du Néguev, et renommé pour ses recherches pionnières, on continue de développer et de commercialiser à l'échelle mondiale ce système d'irrigation au goutte-à-goutte, dont les implications vont bien audelà de l'agriculture.
Le Néguev est devenu un exemple de développement agricole durable dans des environnements difficiles. n
Haut : centrale électro-solaire d'Eshelim dans le désert du Néguev
Milieu : système d'irrigation au goutte-à-goutte
Bas : agriculture dans la vallée de la Arava
Rejoignez-nous les 7 et 8 mai pour une visite guidée en français, en minibus, des fermes et des installations agricoles innovantes de la région. Tous nos programmes d’excursion : www.voirisrael.com
Edith Levy-Neumand Guide diplômée du ministère du Tourisme israélien
Tél. : 972-54-2307474
Mail : edith@voirisrael.com
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L’allergie saisonnière
PAR SARAH SZNABEL
L’allergie saisonnière résulte d’une réaction immunitaire. Elle est déclenchée par le pollen des arbres, des plantes ou des mauvaises herbes. Également appelée « rhume des foins », ses symptômes apparaissent généralement au printemps et en automne, au moment de la floraison des plantes.
Les parties du corps les plus touchées sont le nez, les yeux, les sinus et les voies respiratoires (dyspnée et asthme). Le printemps et l’automne sont les saisons les plus difficiles pour les personnes souffrant de ce type d’allergies. Au printemps, le pollen des fleurs est transporté dans l'air et inhalé par le nez et la bouche. En automne, les plantes spécifiques qui fleurissent et déclenchent des allergies sont l’estragon et les cyprès.
Ce trouble touche environ 30 % de la population. Il peut apparaître à tout âge, mais généralement les premiers symptômes se manifestent entre 4 et 15 ans. Ce type d’allergie connaît des périodes d'exacerbation dont la durée varie d'une personne à l'autre pendant la saison de floraison des plantes auxquelles l'individu est sensible. Entre les périodes d'exacerbation, il y a des « périodes de répit » (sans symptômes), contrairement aux allergies perannuelles (causées, par exemple, par l'exposition aux chats ou aux acariens) dont les symptômes surviennent généralement tout au long de l'année.
Quels sont symptômes d’une allergie saisonnière ?
Les symptômes les plus courants sont le nez bouché ou qui coule, les éternuements, la respiration nasale difficile, les démangeaisons du palais et du pharynx, des troubles du sommeil avec de nombreux réveils pendant la nuit, qui peuvent altérer la vigilance. Les autres symptômes se manifestent couramment au niveau des yeux, par des démangeaisons, des écoulements et une sensation de brûlure. Le symptôme le plus gênant et le plus dangereux est l’asthme. Environ 90 % de tous les enfants et 70 % de tous les adultes souffrant d’asthme important sont en réalité victimes d’asthme allergique.
Comment faire le diagnostic ?
Dans certains cas, il est possible d'identifier un allergène spécifique à l'origine du problème. Le diagnostic est fait par un allergologue au moyen de tests cutanés : des gouttes de diverses substances allergènes sont versées goutte à goutte sur l'avant-bras du patient. Les réactions sont visibles dans les 15 à 25 minutes,
indiquant si le patient a une ou des allergies à l’un des allergènes testés. Les allergologues préconisent rarement une analyse de sang pour connaître les niveaux d'anticorps IgE spécifiques aux différents allergènes respiratoires. Il est difficile d’éviter les allergènes car ils sont dans l’air ; mais pour limiter l’exposition, il est recommandé d'éviter autant que possible la proximité avec l’allergène pendant la période de dissémination du pollen, de garder une maison propre et d’utiliser la climatisation pour réduire les quantités d’allergènes dans l’air ambiant. Un traitement peut être prescrit par le médecin de famille ou l’allergologue pour réduire considérablement les symptômes (médicaments antihistaminiques et/ou spray nasal). Une désensibilisation peut également être pratiquée, uniquement dans des cliniques spécialisées dans la réduction de la sensibilité allergique (immunothérapie). Cette désensibilisation se fait par injections vaccinales. Ces « vaccinations » comprennent l’injection progressive de doses croissantes d’allergènes déclencheurs d’allergies. Il s'agit d'un traitement administré sur
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SANTÉ
plusieurs années, qui diminue la sensibilité du patient. Le traitement a des taux de réussite très élevés (80 à 90 %) et constitue le seul traitement capable de réduire la « sensibilité allergique » en affrontant la maladie ellemême et en réduisant la nécessité de traitements médicaux continus.
Quelle prise en charge des allergies saisonnières en Israël ?
Il existe un site national des allergies, dont une page est consacrée aux allergies saisonnières : https://allergy.org.il/תיתנוע-היגרלא/
Les koupot 'holim s’intéressent aussi au sujet : - La Maccabi vous propose une liste de sept produits naturels pouvant aider les personnes
souffrant d’allergies saisonnières : https://www.maccabi4u. co.il/new/maccabi_ circles/allergies/spring_allergy/ - À la Clalit, le professeur Menahem Rotem vous explique la prise en charge et les tests diagnostiques en détail : https://www.clalit.co.il/he/ medical/ medical_diagnosis/Pages/allergy.aspx
Enfin, sur notre site, Santé Israël, vous pouvez trouver des allergologues francophones sur notre page https://www.sante.org.il/ trouver-un-medecin/. n
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058-461 62 62 contactisrael@actualitejuive.com POUR PUBLIER UNE ANNONCE IMMOBILIÈRE, OFFRE D'EMPLOI OU UNE BONNE ADRESSE
Le pain
PAR ORLIE NABET
Le pain, bien ancré dans les habitudes alimentaires de chacun, est considéré comme un élément de base de notre alimentation occidentale, avec différents types de pains selon les cultures. Il est souvent consommé le matin au petitdéjeuner, en toast, en sandwich ou en accompagnement des repas.
Fabriqué à partir de farine, le pain est une source importante de glucides fournissant de l’énergie à l’organisme. Il contient aussi des protéines d’origine végétale : le gluten, ainsi que des fibres alimentaires, des vitamines du groupe B et des minéraux. Il existe une grande variété de pains : pain complet ou blanc, pain de seigle ou pain à l’épeautre, pain sans gluten… Chaque variété a sa saveur et sa valeur nutritionnelle, qui varient en fonction des ingrédients. Le choix du pain dépend de nos préférences personnelles, mais aussi des propriétés nutritionnelles de chacun d’eux. Cependant, étant donné l’énorme variété qui s’offre à nous, on s’y perd un peu. Voici donc un petit topo sur certaines variétés de pain.
Il est fabriqué à partir de farine complète, qui utilise le grain de blé entier – le son, le germe, l’endosperme. Il contient des vitamines du groupe B, du magnésium et beaucoup de fibres alimentaires. Les fibres du pain complet favorisent une meilleure digestion et contribuent à une sensation de satiété prolongée ; de plus, elles favorisent un meilleur transit intestinal.
Le pain blanc –
Il est fabriqué à partir de farine de blé raffinée, obtenue en retirant le son et le germe, ne laissant principalement que l’endosperme (qui contient essentiellement de l’amidon). Il est beaucoup moins riche en fibres, en vitamines B
et en minéraux, car le processus de raffinage du blé élimine certaines parties du grain riches en nutriments. Il ne reste pour ainsi dire que les glucides. Le pain blanc a donc moins de valeur nutritionnelle que le pain complet.
Le pain au levain –
Contrairement au pain ordinaire, fabriqué avec de la levure de boulanger, le pain au levain est un type de pain préparé en utilisant, pour faire lever la pâte, une méthode de fermentation naturelle : le levain, qui est un mélange d’eau et de farine qu’on laisse fermenter pour produire une levure naturelle. Le pain au levain contient moins de gluten que les autres car les bactéries du levain décomposent une partie du gluten présent dans la farine,
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םחל
Le pain complet – אלמ
ןבל םחל
תצמחמ םחל
ce qui rend le pain plus digeste. De plus, le levain abaisse l’indice glycémique du pain et augmente ses apports en fibres alimentaires, en vitamines et en minéraux, notamment en vitamine B1, en sélénium et en acide folique. Attention : cela ne signifie pas que le pain au levain est sans gluten.
Le pain de seigle – ןופיש םחל
Le seigle est une céréale riche en minéraux – fer, calcium, magnésium – et pauvre en gluten. Du fait qu’il y a très peu de gluten dans le seigle, lors de la fabrication du pain on rajoute très souvent 40 % de farine de blé pour rendre le pain de seigle un peu plus élastique, aéré, et plus facile à travailler.
Le pain Pumpernickel לקינרפמופ םחל
On l’appelle aussi le pain de seigle noir. Il est fait à partir de farine de seigle et de grains de seigle complets, mais sans ajout d’autres farines. Riche en fibres et en minéraux, il est cuit à basse température pendant longtemps et subit une longue fermentation. Il a une texture très dense, une couleur sombre et un goût acidulé très prononcé.
Le pain à l’épeautre ןימסוכ םחל
Le pain à l’épeautre est fabriqué à partir de farine d’épeautre, une ancienne variété de blé riche en fibres alimentaires, en vitamines B, en fer, en zinc, en calcium et en acides aminés essentiels. La farine d’épeautre est plus riche en fibres alimentaires que la farine de blé, ce qui augmente la sensation de satiété et favorise un meilleur transit intestinal.
QU’EST-CE QUE LE GLUTEN ?
Le gluten est une protéine présente naturellement dans le blé, le seigle, l’orge… C’est le gluten qui donne l’élasticité, la souplesse, le moelleux et la bonne tenue au pain ainsi qu’aux autres produits de boulangerie.
Il faut noter que certaines personnes qui ont une légère intolérance – ballonnements, etc. –à la farine de blé ne ressentent par contre pas de désagréments avec le pain à l’épeautre, alors que les deux céréales contiennent du gluten.
Les pains sans gluten
Les pains sans gluten viennent répondre aux besoins des personnes ayant une allergie, ou même seulement une forte intolérance au gluten. Ils sont fabriqués à partir de céréales naturellement dépourvues de gluten, telles que le riz, le sarrasin, le quinoa, le teff (plante éthiopienne que l'on trouve en Israël sous forme de farine). Très souvent, les pains sans gluten sont confectionnés avec un mélange de plusieurs farines sans gluten. Les pains sans gluten sont en général emballés dans des sachets bien fermés ; on les trouve dans les magasins bio/spécialisés, rarement en boulangerie, par précaution, pour éviter la contamination du fournil par des éléments contenant du gluten.
On trouve encore d’autres sortes de pain sur le marché, avec différents ingrédients et divers goûts. L’essentiel est de savoir quel pain nous convient le mieux du point de vue nutritionnel, pour nous maintenir en bonne santé, et d’en consommer toujours avec modération. n
Connaissez-vous le pain d’Ézéchiel ? לאיקזחי םחל
C’est un type de pain fabriqué à partir de grains entiers et de légumineuses germées : blé, millet, orge, épeautre, lentilles et fèves, sans ajout de sucre. C’est un pain très riche en nutriments et d’une grande valeur nutritionnelle. Il est commercialisé surtout aux États-Unis et un peu en France. La recette de ce pain a été donnée au prophète Ézéchiel par Dieu qui lui a ordonné de manger ce pain durant 390 jours (Ézéchiel IV, 9).
Orlie Nabet, naturopathe
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Consultations Zoom
Ateliers détox/nutrition santé/perte de poids
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SANTÉ
ןטולג אלל םחל
BOUILLON DE CULTURE
Anne Berest : « Israël est la terre de mes ancêtres »
PROPOS RECUEILLIS PAR ANNE-CAROLL AZOULAY
Le 30 mai, l’Institut Français d’Israël organise une rencontre avec l’autrice Anne Berest qui donnera une conférence autour de son roman autobiographique La carte postale. L’occasion pour AJ MAG de s’entretenir avec la romancière, metteuse en scène et scénariste, dont l’œuvre s’attache à interroger la filiation, la transmission et le statut des femmes. Une femme authentique dont chaque parole est porteuse de valeurs et de sincérité.
AJ MAG : Comment expliquez-vous le succès de La carte postale, dû bien sûr en premier lieu à votre talent, mais qui est aussi un signe d’espoir pour la transmission ?
Anne Berest : Un succès est une chose inexplicable et toujours étonnante. On ne s’y attend jamais. D’autant que dans ce cas particulier, La carte postale a rencontré un succès dans plusieurs pays (USA, Italie, Espagne) qui ont des histoires et des rapports différents avec la Seconde Guerre mondiale. On peut, après-coup, essayer de comprendre ce miracle. La Seconde Guerre mondiale est un sujet vivant et vibrant, qui nous concerne encore beaucoup. Un nombre incroyable d’ouvrages paraissent chaque année sur ce sujet. Cela veut dire que ce n’est pas encore réglé.
Trois générations plus tard, les gens ont encore un appétit de savoir et un besoin de lire pour guérir ce traumatisme. Mais la question reste ouverte en ce qui concerne la prochaine génération. Comme le disait Simone Veil : « Il n’y pas de devoir de mémoire, il y a un travail de transmission. » Notre travail à nous, troisième génération, est d’assurer cette transmission à la quatrième génération qui aura un rapport différent – presque « biologiquement » différent, pourrait-on dire – à cette guerre. C’est pour cette quatrième génération que j’ai écrit La carte postale
L’enquête sur vos origines a duré presque quatre ans. Était-ce une manière de réparer, de manière pédagogique, le silence qui a entouré votre histoire familiale ?
Le silence a régné dans toutes les familles, quelles que soient leurs origines et quelles qu’aient été leurs places dans cette guerre : Juifs, résistants, collabos, personne n’a parlé. Ce silence a provoqué son retour de balancier, et quatre-vingts ans plus tard nous ressentons un grand besoin de parole, qui s’exprime par différents moyens. J’observe ce besoin chez mes camarades écrivains. Ce n’est pas une mode. Nous
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© Marie Marot
BOUILLON DE CULTURE
En 2003, Lélia, la mère d’Anne Berest, reçoit avec perplexité une étrange carte postale anonyme qui ne comporte que les prénoms de quatre membres de la famille, morts à Auschwitz en 1942. Près de vingt ans plus tard, Anne Berest se met en tête de découvrir qui a bien pu envoyer ce message énigmatique. Son enquête va lui faire exhumer un siècle d’histoire
familiale, depuis la fuite de Russie des Rabinovitch, en passant par la Lettonie et par la Palestine, jusqu’à leur installation à Paris et l’horreur qui s’est abattue sur eux pendant la Seconde Guerre mondiale. La grandmère de l’autrice, Myriam, fut la seule à échapper au funeste destin de la famille entière. Elle a laissé à sa fille et à ses deux petites-filles le terrible poids d’un silence assourdissant…
sommes comme des brodeurs qui viennent réparer une grande tapisserie qui a été endommagée. J’ai écrit pour les jeunes, avec une forme simple, limpide, et des explications historiques claires, afin qu’ils puissent s’emparer du récit. J’ai rencontré énormément de succès auprès des jeunes, avec des prix jeunesse en France et aux USA, et j’ai fait de très nombreuses présentations du livre dans les écoles.
Vous évoquez les liens invisibles mais très forts qui relient les membres d’une famille et qui s’expriment d’une génération à l’autre. C’est ce qu’explique notamment la psychogénéalogie. Sommes-nous les instruments d’un destin ?
Je pense que l’on naît avec une valise de transmissions généalogiques. Ensuite, on en fait ce que l’on veut – ou ce que que l’on peut. Il n’y a pas de déterminisme. Travailler sur soi, c’est choisir ce que l’on fera du contenu de ces transmissions invisibles, même si l’on n'en est pas forcément conscient de prime abord. Dans mon livre, je donne des exemples très précis de coïncidences hallucinantes entre mes ancêtres et moi. En tant que romancière, je n’ai pas suffisamment d’imagination pour inventer ce que la vie m’a offert avec ce livre !
Vous venez prochainement présenter La carte postale à Tel Aviv : quel lien avez-vous avec Israël ? Présenter La carte postale en Israël est très important pour moi. Israël est un pays auquel je suis attachée. Mes aïeux y sont enterrés ; Jacques, l’oncle cadet de ma grand-mère, est né à Haïfa en 1925 – il a malheureusement été déporté. Israël est la terre de mes ancêtres. J’y suis venue très jeune, car ma mère a travaillé en Israël où je venais régulièrement la
La carte postale remonte le fil d’une destinée tant personnelle que collective à travers le temps et l’espace, tel un voyage identitaire chargé de réparer l’arbre généalogique mutilé et de ressaisir le souvenir fuyant des disparus. Lumineux et captivant jusqu’à la dernière page, c’est une enquête passionnante sur les secrets de famille, une histoire poignante de mères et de filles, et un portrait vivant de la vie intellectuelle et artistique parisienne du vingtième siècle.
rejoindre pendant les vacances. Des membres de ma famille y vivent encore. Je me suis rendue en Israël en janvier dernier. Il était important pour moi d’y être après les événements du 7 octobre.
Vous évoquez la question de l’identité juive, souvent réveillée, dans votre famille, et ce, depuis votre arrièregrand-père, par des événements antisémites, même pour les laïques d’entre les laïques. Depuis 1948, quel rôle Israël joue-t-il dans l’identité juive, selon vous ?
Pour beaucoup de Juifs à travers le monde, il y avait quelque part l’idée que « si ça tourne mal, on ira en Israël ». Israël est le pays du repli, c’est l’endroitrefuge. Évidemment qu’Israël est un élément fondateur de l’identité juive.
Le 7 octobre a-t-il mis à mal cette idée ?
Bien sûr. Le 7 octobre a bouleversé beaucoup de choses pour les Israéliens, mais aussi pour les Juifs du monde entier. Cela a touché chacun d’entre nous d’une façon particulière et pour des raisons différentes. Le 7 octobre a changé notre vie à tous.
Êtes-vous croyante ?
Je ne crois pas en Dieu mais j’aime pratiquer les rites culturels du judaïsme. Pour moi, il y a du sacré dans les gestes du judaïsme, et les êtres ont besoin de sacré. Je crois en un rapport avec des choses invisibles à l’œil nu. n
Institut Français de Tel Aviv - 7 Sderot Rothschild
Jeudi 30 mai à 19h30
Réservation obligatoire : https://institutfrancais-israel.com/ Infos : 03-7968000 - s.souffir@ambfr-il.org
Vente de livres et séance de dédicaces à l’issue de la rencontre
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36 AJ MAG N° 1009 Rejoignez-nous dès maintenant pour être informé de la situation sécuritaire en Israël ! 2021 Fondateur Benattar 1622 Culture Monde Le film de BHL primé à Jérusalem p. 46 Avraham Elhadad, l'âme de Sarcelles 36 Israël, l'indocile allié des États-Unis p. 32 La genèse d’un projet exceptionnel Tunisie, Algérie, Égypte : ces pays qui se réapproprient leur mémoire juive Entretiens avec Jack Lang et Benjamin Stora Le Maroc à la redécouverte de son judaïsme plurimillénaire, par Salomon Malka Séfaradim, Mizrahim Israël face nouvelle question orientale Avec les témoignages de Haïm Bittan, Denis Charbit, Pierre Mamou, Didier Nebot et Sergio Della Pergola exposition événement de l’IMA La saga des Juifs d’Orient ןיעידומ םלוש P.P. 6782 10 הריסמ יא לש הרקמב 10 ןגא ברה בוחרל ריזחהל 9422505 םילשורי décembre Tevet Fondateur Serge Benattar Une « cinquième vague » intense et préoccupante Comment Israël veut freiner diffusion du variant Omicron Vaccination et traitements le point sur les instruments les plus efficaces Entretiens avec le Pr Gilbert Deray et le Gérald Kierzek La guerre des nerfs Covid-19 Monde À l'ONU, le vote indigne de la France p. 21 p. 15 Patrick Haddad, le visage de Sarcelles entretien 10 idées Pascal Ory dissèque l'antisémitisme p. 36 décembre 12 Fondateur Serge Benattar SCIENCES Jacques Lewiner et le modèle du Technion p. 48-49 L’assaut violent du nationalisme de l’antisémitisme contre la République La solitude des premiers dreyfusards Un Musée pour honorer la mémoire du capitaine et de ses défenseurs Comment Theodor Herzl a couvert l’affaire à Paris et conçu le sionisme politique Avec les témoignages de Anne-Cécile Lévy-Ouazana, Yaël Perl-Ruiz, Louis Gautier et Philippe Oriol L'honneur retrouvé d'un innocent Alfred dreyfus
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SOCIÉTÉ
Yad Sarah, pilier social incontournable en Israël
PAR AMBRE BENDAYAN
Yad Sarah est la plus importante ONG en Israël. Incontournable pour les Israéliens, elle souhaite se faire mieux connaître en France.
Gilles Debache, directeur Europe du Département des relations internationales de l'organisation, nous présente cette association spécialisée dans la fourniture gratuite d’équipements médicaux et paramédicaux, mais pas seulement…
AJ MAG : Quels sont les domaines d’action de Yad Sarah ?
Gilles Debache : L’hospitalisation à domicile, la réhabilitation postopératoire, l’assistance des handicapés et des blessés, et l’aide aux jeunes couples dans le cadre du projet « Maman et nouveau-né ». Yad Sarah offre ses services gratuits au travers de ses 126 centres et grâce à 7000 bénévoles dans tout le pays.
Difficile d’imaginer que Yad Sarah reçoit 0 shekel des pouvoirs publics !
Effectivement. Quand on sort de l’hôpital avec des difficultés de mobilité, on fait appel sans réfléchir à Yad Sarah, présente dans tout le pays et dans chaque hôpital. Si l’on a besoin d’aménager son appartement dans le cadre d’une hospitalisation à domicile, on fait appel à Yad Sarah. Si l’on a besoin d’un berceau, d’une paire de béquilles, d’une canne ou d’un inhalateur, on va chez Yad Sarah comme on irait chez une personne de notre famille. Le quotidien Israël HaYom a bien résumé cela en titrant : « Que feraient les Israéliens sans Yad Sarah ?! »
Quelles ont été les actions de Yad Sarah durant cette période de guerre ?
Yad Sarah a assisté plus de 14 000 blessés. Les handicapés, les personnes âgées et les survivants de la Shoah qui ont été évacués n'ont pas toujours eu le temps ou la possibilité d’emporter leurs équipements (lits médicalisés, bouteilles d’oxygène, etc.) ; Yad Sarah leur a donc fourni les équipements dont ils avaient besoin. 500 volontaires livraient gratuitement des médicaments à des centaines de
personnes évacuées. La résidence de réhabilitation postopératoire de Yad Sarah à Jérusalem a accueilli plus de 300 personnes âgées et survivants de la Shoah évacués qui rencontraient des difficultés d’accès et de mobilité dans les hôtels non aménagés pour les recevoir. Cet hébergement a été rendu possible notamment grâce au soutien financier de la Fondation pour la Mémoire de la Shoah et la Fondation Rothschild. Yad Sarah a affrété des dizaines de containers remplis de matériel médical, et des équipes professionnelles de médecins, de psychologues et d’assistants sociaux ont été mobilisés pour répondre aux appels de la population.
Le call center de Yad Sarah (plus de 30 opérateurs) répondait 24 h/24 aux appels d’urgence.
Entretenez-vous des relations avec d'autres organisations ?
Le président Rivlin a déclaré : « Il y a trois organismes qui servent la nation tout entière : Tsahal, Magen David Adom et Yad Sarah, fleuron national prodiguant son assistance sans discrimination d’origine, de religion ni de race. » À cette liste, je me permettrai d’ajouter Latet. Yad Sarah, Magen David Adom et Latet, chacune dans son domaine, sont des maillons sociaux et humanitaires indispensables. n
Chaque année, un million d’Israéliens font appel à Yad Sarah, et parmi eux de nombreux francophones ! Rejoignez notre action en faisant un don ou en devenant bénévole ! https://www.allodons.fr/yad-sarah-france2024?locale=fr https://yadsarah.org/contact-us/
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Gérez votre temps
PAR ANDRÉ DAN
Le
temps s’écoule, identique pour chacun d’entre nous.
Il est gratuit, non stockable,
non rattrapable.
Il est tellement précieux... et pourtant personne ne peut en acheter !
Il est donc indispensable de bien gérer son temps !
Cet impératif s’impose encore davantage au leader qui doit prendre des décisions claires et les mettre en œuvre avec détermination.
Je vais donc vous initier aux outils de gestion du temps (ou vous les rappeler), afin que vous utilisiez votre temps avec plus de sagacité et d’efficacité.
Le premier outil, qui est le plus utilisé au monde, permet de savoir si l’on doit accomplir une tâche et quelle priorité lui accorder dans notre emploi du temps : c’est la « matrice d’Eisenhower », à la fois simple et riche. Elle repose sur deux critères : l’importance et l’urgence.
Cette matrice se présente sous forme d’une répartition des tâches en quatre catégories, assortie d’une recommandation très claire pour chacune des catégories :
l Non urgent et non important éliminer (sauf exception)
l Non urgent et important planifier dans son agenda pour faire plus tard
l Urgent et non important déléguer à quelqu’un pour qui c’est important, ou qui est disponible
l Urgent et important à faire immédiatement ou dans la journée
Grâce à cette matrice, chacun peut décider de ses priorités dans les tâches à exécuter. Je conseille de s’y tenir.
Deux autres outils me paraissent intéressants à exposer : la routine et le rythme.
Concernant la routine, il est intéressant de savoir que notre efficacité augmente quand on établit des routines. La routine est une tâche qui est bien programmée et se renouvelle, par exemple à une heure précise : se lever, prendre son petit-déjeuner... Au travail : réunion journalière ou hebdomadaire, fête annuelle... Ces routines sont des rites que nous avons établis ou qui nous ont été imposés. Elles font partie de nos habitudes et sont des moments bien maîtrisées dans notre vie. Dès lors qu’elles sont clairement établies, les routines personnelles et collectives sont un accélérateur de performance. Le rythme de travail fait l’objet d’études scientifiques poussées. La méthode Pomodoro est la plus connue. L’idée originale de cette
technique est qu’elle découpe trois heures de travail de la façon suivante : 25 minutes de travail, puis 5 minutes de pause, puis trois fois 25 minutes entrecoupées par 5 minutes de pause, puis 30 à 60 minutes de pause. Nous ne sommes pas des robots ! Sans rythme bien établi, comme nous le propose la méthode Pomodoro, on risque d’être confronté à des problèmes de concentration, de fatigue, de surmenage, voire de dépression. Alors, dans votre travail et vos loisirs, comment allez-vous améliorer votre emploi du temps grâce à la matrice Eisenhower ?
Comment allez-vous créer des routines pour simplifier votre vie ?
Comment adopterez-vous des rythmes d’activité pour rester en forme et être plus efficace ?
La gestion du temps est une vraie discipline, personnelle et collective, qui en fin de compte nous permet de faire plus de choses et de les faire mieux ! n
André Dan Coach en leadership a@andredan.com
38 AJ MAG N° 1009 LEADERSHIP
OPINION
Vous avez dit génocide ?
PAR DANIEL SAADA, ANCIEN AMBASSADEUR D'ISRAËL EN FRANCE
Depuis le 7 octobre, nous assistons à un déferlement de haine et de condamnations contre Israël, qui est aussi à l'origine de l'explosion des actes antisémites à travers le monde. Une accusation récurrente ne cesse d'être exprimée : celle de « génocide »…
L’accusation de génocide est récurrente et se trouve au cœur de la stratégie de nos ennemis. C'est d'ailleurs sur cette base que l'Afrique du Sud a déposé une plainte contre Israël devant la Cour Internationale de Justice (CIJ) qui, depuis plusieurs mois, s'évertue – au sens littéral du terme c’est-à-dire : perd sa vertu, perd ses valeurs, se déshonore –à tenter par tous les moyens de prouver ce qui n'existe pas, à tenter de trouver des éléments à charge contre Israël pour l'accabler de la pire des infamies. Cette accusation n'est pas fortuite. Imaginons un instant que l'on prouve que l'État du peuple juif, le peuple qui a subi le premier génocide de l'ère moderne, ce crime abominable qui a donné naissance en droit international à la définition du « crime de génocide », soit aujourd'hui reconnu coupable de ce même crime : peut-être, alors, que tout cela n'est pas innocent, peut-être que le peuple juif n'était pas si victime que ça s’il est aujourd'hui capable d'être lui aussi bourreau… Et peut-être donc également que les bourreaux d'hier n'étaient pas si coupables…
Bref : un jeu d'enchaînement d’immondes perversités auquel se prêtent les grandes nations et les institutions internationales
pour accabler Israël mais, en même temps, pour faire taire un autre génocide, un autre nettoyage ethnique qui a eu lieu au ProcheOrient.
De quel génocide parle-t-on ?
Il n'y a pas de génocide ! Il n'y a pas de nettoyage ethnique du peuple palestinien ! Je vais le prouver. En revanche, depuis le début du conflit israélo-arabe, un véritable nettoyage ethnique a eu lieu dans les pays arabes. Des chiffres simples et bruts nous disent cette vérité.
En 1948, un peu moins d'un million de Juifs vivaient dans neuf pays arabes du Proche et Moyen-Orient. Combien en reste-t-il aujourd'hui ? 237 ! Oui, vous avez bien lu : 237, quelques dizaines, là où, comme en Irak ou au Yémen, vivaient des dizaines de milliers de Juifs. Et dans certains pays comme la Syrie, l'Algérie ou la Lybie, il n’en reste plus aucun.
99,83 % des Juifs de ces pays arabes ont disparu. C'est le nettoyage ethnique le plus impressionnant de l'ère moderne. Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, il n'y en a aucun autre exemple comparable, de cette sorte et de cette ampleur.
Qu'en est-il du peuple palestinien, en revanche ? 156 000 Arabes vivaient en Israël en 1948, c’està-dire 156 000 Palestiniens qui, à la création de l'État hébreu, sont devenus des Arabes israéliens. Combien sont-ils aujourd'hui ?
2 178 000 lors du dernier recensement. Il s'agit d'une augmentation de 1296 %.
630 000 Palestiniens vivaient en Judée-Samarie en 1967 ; ils sont aujourd'hui 3 100 000, soit une augmentation de 392 %.
La bande de Gaza comptait 350 000 habitants en 1967, contre… 2 150 000 aujourd'hui, soit une augmentation de 514 %. Je vais même aller plus loin : la population de la bande de Gaza était de 1 200 000 en 2005, au moment du désengagement israélien ; aujourd’hui, après toutes ces années de soi-disant « blocus » qu'Israël est censé infliger à la bande de Gaza, elle a doublé…
En résumé : 99 % de Juifs qui disparaissent, et une population palestinienne qui explose avec un taux de natalité quasiment inégalé dans le monde.
Avouez que ces chiffres donnent le vertige ; sauf à nos ennemis et à nos détracteurs, qui s’acharnent à tenter de prouver l'improuvable. Au nom de la haine d'Israël, tout est possible aujourd'hui. n
AJ MAG N° 1009 39
Mars et Vénus se rencontrent
Combien de fois êtes-vous passé à côté de votre mazal parce que vous n’avez pas bien su mener votre rendez-vous ?
Afin que le parcours amoureux, de la rencontre au mariage, atteigne sa fin espérée, il est vivement recommandé de ne brûler aucune des cinq étapes énumérées par John Gray dans son livre Mars et Vénus se rencontrent.
Pour trouver sa moitié, il ne suffit pas d’être authentique, il est également nécessaire de bien connaître la psychologie du sexe opposé. En effet, non seulement les hommes et les femmes communiquent différemment, mais ils pensent, ressentent, perçoivent, réagissent, se conduisent, aiment, apprécient différemment.
Trop de belles histoires tournent court après le premier rendez-vous, à cause de malentendus prévisibles. Pourquoi ne me rappelle-t-il pas ?
Pourquoi pose-t-elle tant de questions ? Savoir interpréter les réactions (ou le manque de réactions) de votre partenaire vous évitera de saboter une relation qui aurait pu évoluer dans le bon sens et aboutir au mariage.
Les cinq étapes exposées ci-dessous sont indispensables pour trouver l'âme sœur et bâtir une relation passionnée, durable et harmonieuse.
Première étape : l’attirance
L’attirance est en premier lieu instinctive : ou l’on est charmé ou l’on ne l’est pas. Il n’y a là rien de logique ni de rationnel, mais c’est une base nécessaire. Ce sentiment se renforce si l’on pense et ressent que nos attentes et nos besoins seront comblés en compagnie d’un partenaire potentiel. Pour qu’une relation perdure, l’attirance ne suffit pas car, surtout au début, le défi est de bien interpréter les comportements et les réactions du partenaire. Même si chacun fait des efforts pour plaire, souvent ces efforts ne vont malheureusement pas dans la
bonne direction, et le manque de compréhension du sexe opposé ne fait qu’éloigner l’autre. Les hommes ont de bonnes intentions et veulent impressionner les femmes : ils parlent d’eux-mêmes et de leurs théories sur l’existence, alors qu’une femme ne demande qu’à être écoutée. Cela l’ennuie, elle se sent négligée et son intérêt se refroidit. De leur côté, les femmes sont sûres et certaines que l’homme de leur vie doit être capable de deviner tous leurs désirs et leurs besoins, et si monsieur n’y parvient pas, c’est le signe qu’il ne s’agit pas de l’homme qui les rendra heureuses. Ces exemples témoignent des immenses divergences entre les deux sexes. Finalement, chacun est déçu car aucune vraie communication n’a été établie. Mais savoir cela peut tout changer.
Deuxième étape : l’incertitude
Lorsque naît l’envie de mieux connaître l’autre et que la question d’envisager une relation de couple avec lui se pose, il apparaît toujours des doutes,
40 AJ MAG N° 1009 ATOUT CŒUR
ATOUT CŒUR
d’intensité variable. Malheureusement, ce stade n’est pas connu des célibataires qui en concluent à tort que s’il y a un doute, alors c’est qu’il n’y a pas de doute : leur partenaire ne leur convient pas. Les hommes continuent à poursuivre le fantasme qu’ils ont en tête, de sorte qu’ils n’établissent jamais de véritables liens solides avec une femme et qu’ils restent indéfiniment dans la phase d’incertitude. À ce moment-là, la femme, de son côté, sent que son partenaire se fait distant, alors elle se met à paniquer et le harcèle, chose qu’il ne supporte pas. Bref, soyez patientes, et surtout retenez-vous, Mesdames ! « L’absence stimule l’amour » !
Troisième étape : l’exclusivité
Vous arrivez au stade où vous éprouvez le besoin de bâtir une véritable relation à deux et vous stoppez vos recherches. Mais lorsque vous arrivez à cette étape, vous vous détendez et vous avez tendance à faire moins d’efforts, comme si vous aviez atteint votre but. C’est l’erreur que beaucoup commettent et qui gâche une relation ayant pourtant bien débuté. Donc consacrez à présent l’énergie que vous avez investie à trouver l’âme sœur à poursuivre les petites attentions romantiques : Messieurs, continuez à courtiser, et vous, Mesdames, n’attendez pas trop de lui !
Quatrième étape : l’intimité
À ce stade, vous vous sentez suffisamment à l’aise pour partager vos pensées et vos sentiments les plus profonds. Si jusqu’à présent il valait mieux vous présenter sous votre meilleur jour et éviter de parler de vos défauts, vous êtes maintenant assez intimes pour partager des sujets délicats sans craindre d’être mal jugé(e). Lorsque les cœurs s’ouvrent, vous êtes capable de soutenir votre partenaire, même s’il vous paraît moins parfait que ce que vous pensiez. Durant cette période, les femmes peuvent avoir des humeurs très variables, ce qui déstabilise les hommes. Les hommes, eux, sont plutôt comme des élastiques : ils s’éloignent pour mieux revenir. Mesdames, toujours le même conseil : patience et encore patience, il vous reviendra ! Surtout, n’en concluez pas qu’il vous délaisse ; il a seulement besoin de s’isoler un peu.
Cinquième étape : les fiançailles et le mariage
Ce sentiment de certitude concernant l’être de votre vie doit être ancré dans la réalité. Votre amour se traduit alors par un engagement total, que vous avez tant attendu. Mais le travail sur vous-même pour construire un foyer ou règnent la paix et la joie ne fait que commencer ... n Mazal tov !
Hagit Bialistoky
Coach de mariage
Programme spécial célibataires : « En robe de mariée cette année »
Tél. : 050-7524670
AJ MAG N° 1009 41
GRAND ANGLE
La vie d’après
PAR ANNE DA COSTA
Six mois après le 7 octobre, la vie continue mais
pas de la même façon pour les habitants de la bordure de la bande de Gaza. Rencontre avec Baruch Cohen, responsable de l'équipe d’urgence du kibboutz Magen, en rééducation, et avec Imri Horowitz, père de famille du kibboutz Kfar Aza, évacué à Shefayim.
Baruch Cohen : héros d’Israël
Baruch Cohen (ci-contre), 72 ans, responsable de la sécurité du kibboutz Magen, nous a donné rendez-vous à 20h au centre de rééducation Beit Loewenstein, après un après-midi chargé de visites. Nous attendons la fin d’un spectacle improvisé donné en son honneur ; mais dès sa conclusion, Baruch est accaparé par un petit groupe de « milouïmnikim » (réservistes) responsables de la sécurité de leurs localités, venus prendre conseil auprès de lui. Dans cette pièce de l’hôpital transformée en salon réservé aux soldats et aux rescapés de la guerre, Baruch, depuis son fauteuil roulant, donne des conseils aux officiers sur la gestion de leurs « kitot konenout » (équipes d’urgence). Ils l’écoutent sans broncher, comme on écoute un général.
Baruch est une célébrité ici, tout le monde connaît son histoire. Grâce à son expérience, sa vigilance et son commandement exemplaire, des centaines de vies ont été épargnées. Mais Baruch a perdu deux hommes et une jambe lorsqu’une roquette a été tirée sur sa voiture.
AJ MAG : La nuit précédant les attaques, les services du renseignement israélien ont reçu des informations cruciales, mais les responsables ont choisi d’attendre le matin pour décider de la marche à suivre. Qu’auriez-vous fait à leur place ?
Baruch Cohen : J’aurais immédiatement rappelé toutes les troupes ! Le problème est que chaque information doit être vérifiée. Le procédé est long, il ne permet pas de réagir instantanément.
Il y a aussi eu un document transmis aux services du renseignement, qui date de plus d’un an auparavant et dans lequel le plan des terroristes est écrit étape par étape… Quand votre commandant dit qu’il n’y a plus de risque, vous lui faites confiance. Nous étions en état d’alerte depuis un mois et demi. Trois jours avant l’attaque, l’état d’alerte a été suspendu. Les terroristes
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GRAND ANGLE
ont fait du « désordre » pendant une longue période, cela faisait partie de leur plan ; ils savaient que dès qu’ils arrêteraient nous suspendrions l’état d’alerte. Nous nous sommes vraiment fait avoir ! Ils nous ont fait le même coup qu’en 1948 !
Que s’est-il passé, ce matin du 7 octobre ?
Quand les sirènes se sont déclenchées, je suis allé voir ce qu’il se passait du haut de la colline la plus élevée du secteur – mais je n’ai rien réussi à voir. Dès que j’ai entendu, à la radio interne, qu’ils avaient tué le gardien d’une zone industrielle dans le coin, j’ai compris qu’ils étaient déjà là et j’ai donné l’ordre à toute mon équipe de se positionner à l’entrée du kibboutz.
Kfar Aza se trouve sur la même route que Beeri et Réïm, et juste à côté de Nir Oz. Comment expliquezvous que votre kibboutz ait été épargné ?
Ils n’ont pas réussi à rentrer dans le kibboutz parce qu’ils ne nous ont pas surpris, nous les attendions.
Vous avez perdu une jambe…
Je ne regarde pas en arrière. J’ai nommé ma prothèse « Milady »… Cet endroit est le meilleur au monde.
Dès mon arrivée, ils m’ont dit que je ressortirais en marchant ; c’est l’attitude qui règne ici et c’est aussi la mienne. Le personnel qui travaille, les visiteurs et les bénévoles qui nous entourent, l’état d’esprit, tout cela, c’est 70 % de la guérison. Le reste, c’est technique. J’ai la chance d’avoir beaucoup de force, suffisamment pour en donner aux jeunes soldats qui arrivent ici ; alors j’essaie de les aider.
Après la guerre, les habitants de la bordure de Gaza vont rentrer chez eux. Est-on sûr que ce qui s’est passé ne se reproduira jamais ?
Non, on ne peut pas le promettre. Si l’on pense que cela ne se reproduira jamais, alors on ne se prépare pas – or il faut toujours être prêt ! Mais à présent, nous avons l’expérience du 7 octobre. Le problème, c’est que notre armée se prépare toujours à la guerre précédente, alors qu’il faut aussi qu’elle se prépare à la guerre à venir. Les Palestiniens ne sont pas seuls. Quelqu’un les entraîne, les arme et met au point leurs tactiques. Ce ne sont pas des choses qui se font en un jour ; c’est un programme d’au moins deux ans – deux ans durant lesquels ils nous ont bernés.
Quel avenir imaginez-vous pour vos petits-enfants ?
Jamais je ne leur dirai : « J’espère que vous ne serez pas en guerre. » Nous vivons dans une telle
Baruch, depuis son fauteuil roulant, donne des conseils aux officiers sur la gestion de leurs « kitot konenout » (équipes d’urgence). Ils l’écoutent sans broncher, comme on écoute un général.
réalité que nous ne pouvons pas dire ces choses-là… Mais si, après la guerre de 1948, on m’avait dit que Tsadal viendrait se réfugier en Israël et que nous signerions la paix avec l’Égypte, j’aurais répondu que cela ne pourrait jamais arriver. Rêver est un devoir, essayer de tout mettre en œuvre pour que nos rêves s'accomplissent est une mitzva, mais les rêves ne se réalisent pas toujours. À mon avis, il faudra au moins encore deux générations pour changer la vision du monde des Palestiniens.
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Rêver est un devoir,
essayer de tout mettre
en œuvre pour que nos
rêves s'accomplissent est une mitzva,
mais les rêves ne se
réalisent pas toujours.
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Mais il ne faut pas arrêter de rêver, et il faut trouver des moyens de concrétiser ces rêves.
La semaine prochaine, Baruch doit subir une intervention sur sa jambe valide, ce qui devrait lui permettre de se tenir debout : « Je vais rentrer au kibboutz. Je ne pourrai plus être le chef de la sécurité, un remplaçant a déjà été choisi par le kibboutz, mais je vais aider comme je pourrai. L’expérience ne s’achète pas mais elle se transmet. »
La rencontre tire à sa fin. Baruch va se coucher. Il remarque que son compagnon de chambre a laissé la lumière allumée. Je lui propose de l’éteindre mais Baruch n’a pas besoin d’aide : il s’empare du drapeau qui trône sur son lit et se sert du manche pour éteindre la lumière.
Imri Horowitz, Kfar Aza
Il y a quelques mois, nous avons rencontré Imri Horowitz, père de trois enfants, à l’hôtel du kibboutz Shefayim où la majorité des 1000 habitants de la communauté du kibboutz Kfar
Aza ont été évacués. Ce qui nous avait marqués à l’époque était son optimisme à toute épreuve. Imri nous avait reçus avec un grand sourire et nous avait raconté comment lui et d’autres membres du kibboutz avaient, en quelques semaines seulement, récupéré un entrepôt désaffecté de l’hôtel et l’avaient transformé en un atelier, réplique de celui qui avait originellement été créé à proximité de Kfar Aza pour toutes les communautés des alentours par Livnat Kutz, assassinée le 7 octobre avec son mari et ses trois enfants. La menuiserie, la poterie et d’autres travaux manuels permettaient aux membres du kibboutz d’avoir une activité et de s’aérer l’esprit, ce qui les aidait à reprendre espoir.
C’est un tout autre Imri qui nous attend devant la barrière de sécurité de l’hôtel. Cette fois, ses traits sont tirés, le sourire a disparu de son visage et ses yeux bleus ont perdu de leur éclat. Lorsque nous lui posons des questions sur les différents lieux par lesquels ils sont passés avant d’arriver à Shefayim, il a du mal à se souvenir des dates :
« Tout se mélange. Au début, certains membres du kibboutz ont été évacués à Eilat, j’ai même un couple d’amis dont la femme a accouché là-bas, puis ils ont été rapatriés. Nous avons fait un passage à Guivatayim parce que j’ai de la famille là-bas, mais nous avons vite compris que nous voulions rester avec notre communauté. Nous ne pouvons pas retourner vivre à Kfar Aza pour le moment, car il faut au préalable effectuer de gros travaux. Par ailleurs, beaucoup de familles ne veulent pas y retourner, pour des raisons de sécurité. Certains membres du kibboutz veulent créer des monuments à la mémoire de ceux qui ont été massacrés et d’autres s’y opposent car ils ne veulent pas vivre au milieu d’un site de mémoire… » Selon Imri, la reconstruction du kibboutz prendra entre deux et trois ans. En attendant, des « caravilot » (préfabriqués) ont été construites à côté de l’hôtel pour permettre aux « chanceux » qui en ont bénéficié d’essayer de retrouver un semblant de vie familiale. « La construction des caravilot est rapide, mais la connexion aux infrastructures a pris du temps. De plus, il n’y a que 52 caravilot, donc cela ne suffit pas », précise-t-il.
Le kibboutz a mis en place un système de points et tout s’est décidé « comme au procès de Salomon » : « Le nombre d’enfants, les familles en deuil, les familles des otages, les blessés : chaque critère équivaut à un nombre de points. Nous avons deux enfants mais j’ai un troisième enfant de mon précédent mariage ; et bien qu’il soit mineur,
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Haut gauche : dans les hôtels, les familles évacuées vivent dans une seule chambre.
Haut centre : « caravilot »
Haut droite : « agaloulim », parcs roulants pour les bébés
Ci-contre : Imri Horowitz
comme sa mère en a la garde et que son kibboutz a été évacué à Herzliya, je n’ai pas eu droit à une chambre supplémentaire pour lui car ils ne l’ont pas calculé comme mon enfant. C’est très frustrant et j’ai essayé de me battre. Finalement, ils lui ont donné une chambre à l’hôtel ; mais il a vécu un traumatisme et il doit être auprès de moi. » Pour Imri, le principal défi auquel il a fallu faire face en tant que père de famille depuis l’évacuation est le manque d’intimité : « Quand on dort tous dans une chambre d’hôtel commune, il n’y a pas d’intimité, pas de limites. »
Nous accompagnons Imri qui va chercher ses enfants à la crèche improvisée dans une des salles de conférence de l’hôtel, puis dans le lobby où le bus scolaire ramène les enfants de l’école. Les chemins que nous empruntons révèlent le quotidien de ces personnes déplacées : les « agaloulim », parcs roulants pour bébés, symbole des kibboutzim, peuplent les allées, alors que les couloirs de l’hôtel sont encombrés de chaussures, de vélos, de poussettes… Imri explique que la « caravila » est un point de chute temporaire car le gouvernement est en train de préparer leur relogement au kibboutz Rouhama (qui se trouve à 22 km de Kfar Aza). Eilat, Shefayim, Rouhama… Tant d’étapes avant de pouvoir, enfin, rentrer chez eux… Et Imri de conclure : « Beaucoup resteront à Rouhama et ne retourneront pas à kfar Aza. En ce qui nous concerne, nous ne savons pas encore. Cela semble tellement loin… » n
AJ MAG N° 1009 45
HISTOIRE
Alfred Rossi – parcours d’un Juif combattant
Je n’avais jamais entendu parler d’Alfred Rossi, jusqu’à ce que je tombe par hasard sur un article du journal 'Herout, de la droite israélienne, datant du 27 avril 1964, il y a tout juste soixante ans. Son titre : « Alfred Rossi, commandant du Betar à Tunis, repose désormais à BeerSheva ». Le sous-titre rapporte la déclaration du consul de France en Israël, selon lequel « c’est uniquement grâce à des héros comme lui que nous avons pu vaincre la bête nazie ».
J’apprends que des députés et d’autres personnalités israéliennes ont assisté à sa réinhumation aux côtés de représentants de la diplomatie française, et que Menahem Begin en personne a prononcé une oraison funèbre à son chevet, à la tête duquel on a déposé un portrait de Zeev Jabotinsky.
C’est à travers cet article que j’ai découvert ce personnage. Alfred Rossi est né le 8 janvier 1908 à Beyrouth. En 1912, ses parents émigrent vers l’Afrique du Nord. Après une scolarité à l’Alliance, il termine en 1931 un diplôme de droit à l’Université d’Alger à Tunis. Engagé dans l’HaChomer HaTzaïr, il découvre avec quelques amis la pensée révisionniste de Zeev Jabotinsky par l’intermédiaire de différents médias et réseaux de cette mouvance, présente aussi sur le sol tunisien. Cette jeunesse retrouve dans ce mouvement et ses idées les échos de la tradition dans laquelle ils ont été élevés. À l’hôtel
PAR YOËL HADDAD
Ariana, de jeunes Juifs sionistes se rencontrent une fois par semaine pour débattre de leurs idéaux. Alfred y est très actif et défend brillamment les idées de Jabotinsky. Devenu avocat, Alfred épouse Rahel en 1932. Le couple déménage à Sfax où les activités d’Alfred en tant qu’avocat prennent de l’ampleur, tandis qu’il poursuit son action en faveur du sionisme. Il obtient des autorités tunisiennes la reconnaissance du Betar comme mouvement de jeunesse, ainsi que des subventions. En 1934, Alfred Rossi est nommé chef du Betar en Tunisie, poste auquel il succède à Félix Allouche. À ce poste, il investit beaucoup d’énergie dans l’organisation de l’autodéfense juive. En 1935, il obtient le droit d’entraîner des troupes de jeunes du Betar dans les installations des garnisons françaises présentes en Tunisie. Quand la guerre éclate, il est enrôlé dans l’armée française à l’État-
major de Gabès, puis se porte volontaire pour être combattant. Après la débâcle et la montée de Pétain au pouvoir, il est libéré de son service militaire. C’est alors qu’il s’engage dans la Résistance. Sa plus importante opération est la subtilisation de dossiers ultrasecrets sur un destroyer italien coulé aux abords des plages des Kerkennah. Après cette opération, il quitte son épouse et ses deux filles pour d’autres actions, sans donner de nouvelles. Quelques mois plus tard, Rahel reçoit un télégramme l’informant qu’il va bien et qu’il se trouve en Palestine. Mais en vérité, Alfred était parti à Gibraltar remettre les documents secrets à l’armée britannique. Il est ensuite enrôlé officiellement dans cette armée et participera aux combats contre Rommel. Après avoir fourni des informations qui ont permis la destruction de 17 avions allemands à l’est de Tunis, il est envoyé en Sicile pour une nouvelle mission de collecte d’informations. C’est là-bas qu’il sera dénoncé par un Tunisien, ce qui mènera à son arrestation par les autorités italiennes. Interrogé quotidiennement sur ses actions, il profite d’un bombardement britannique pour demander à ses gardiens la permission de descendre de la voiture dans laquelle ils se trouvent pour faire ses besoins. Il tente une évasion ; ses gardiens lui tirent dessus et le tuent. C’était le 18 avril 1943. Dans son testament, Alfred Rossi a écrit : « J’ai le devoir de réaliser cette mission dangereuse de laquelle il n’y a aucune chance de
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Alfred Rossi © Institut Jabotinsky
sortir en vie. Je transmets à mes proches mes derniers sentiments. Malgré l’amour et la sympathie que j’ai pour eux, malgré la douleur que je ressens quand je pense que je ne les verrai plus, je n’ai de remord pour aucune de mes actions. » Il laisse sa femme Rahel et deux filles de 7 et 3 ans. À titre posthume, le grade de sergent a été attribué à Alfred Rossi et il a été décoré de la Croix de guerre ainsi que de la Légion d’honneur par l’armée française. Ses camarades ont retrouvé le lieu de sa première sépulture en Sicile et ses ossements ont été transférés en Tunisie en décembre 1946, avec tous les honneurs dus à un résistant de son rang. Il repose finalement à Beer-Sheva, sur la terre qu’il a tant aimée mais qu’il n’a jamais foulée. n
HISTOIRE
AJ MAG N° 1009 47
Source principale : Pirké Beri'ha, Haïm Lazar, 1985
© DR
Yoël Haddad est chercheur au Centre Begin à Jérusalem
'Hag HaAtzmaout samea'h ! AU NOM DE LA LOI
Le Rav Dray répond à deux questions, posées par des lecteurs, qui portent sur ce qui est autorisé à Yom HaAtzmaout
Première question :
À l'approche de Yom HaAtzmaout, je me demandais si, pour célébrer comme il se doit la renaissance de l'État juif sur sa terre, il était autorisé d'enfreindre les lois du Omer ? Concrètement : peut-on se raser ? Peut-on organiser des réjouissances (chants, danses, musique, repas festifs…) ? A-t-on le droit de porter des habits neufs le jour de Yom HaAtzmaout ?
Il s'agit là d'une question où l'on est obligé de prendre position dans des controverses qui divisent le monde rabbinique. Vous savez sans doute que le fait même de fêter Yom HaAtzmaout est discuté avec véhémence. Pour certains, la création de l'État d'Israël ne représente rien sur le plan religieux, étant donné que l'État ne suit pas la loi de la Torah. Pour d'autres, et c'est ma conviction profonde, Yom HaAtzmaout présente une double dimension.
La première, c'est le miracle du salut du peuple juif : après deux mille ans de persécutions, non seulement ce peuple n’a pas disparu, mais il a créé son État sur la terre de ses ancêtres. Pour ne parler que des temps les plus récents, le peuple juif a subi les persécutions des nazis qui ont voulu l'exterminer et des Arabes qui ont voulu apporter la touche finale à cette tragédie en éliminant les rescapés. Avoir réussi à se sortir de cette double épreuve et à créer l’État d’Israël est un véritable miracle, et remercier Dieu pour ces prodiges est un devoir sacré.
La seconde dimension, c'est l'accomplissement des prophéties millénaires dont nous sommes témoins : Dieu a promis que Son peuple reviendrait sur sa terre et voici qu'il revient sur sa terre ! C'est l'aube de la délivrance, la « preuve » de la vérité de la Torah. Sur le plan de la Halakha, nous nous basons sur les décisions des grands-rabbins d'Israël (les premiers étaient le Gaon haRav Herzog, zatzal, et le rav Ouziel, zatzal) qui, au fil des ans, ont tous considéré ce jour comme un jour de fête et de remerciements à HaChem. Ils ont permis sans ambiguïté aucune d'en faire un jour de prières, de chants et de danses. Ils
ont aussi bien pris soin de marquer la dimension religieuse de l'événement et ont institué que les rabbins devaient parler de la signification profonde de cet événement à leurs communautés dans les synagogues.
Je dois vous dire que j'avais l'embarras du choix quant aux sources à vous présenter pour montrer que l'on peut se raser à Yom HaAtzmaout. Je n'en citerai que quelques-unes :
Le Choul'han Aroukh écrit (Or ha'Haïm, 493) : « On a l'habitude de ne pas se raser jusqu'au 33e jour du Omer, on attendra jusqu'au 34e au matin. »
Le Rema rajoute : Celui qui a une brit mila (le mohel, le sandak ou le père) pourra se raser pendant le Omer
Tout d’abord, le minhag cité dans le Choul'han Aroukh ne figure pas dans le Talmud. Ensuite, d'après les paroles du Rema, on voit que dès qu'il y a une fête personnelle, on peut se raser.
Autre exemple : dans son livre Moed LeKol 'Haï (chap. 6), le Gaon rav Haïm Palagi raconte que dans sa ville, plusieurs familles ayant été témoins d’un miracle, qui le 8 Iyar et qui le 11 Iyar, ont fixé respectivement ces dates comme un Pourim personnel, et les hommes de ces familles se rasent pour célébrer ce jour-là, alors que l'on est au milieu du Omer. Si nos sages ont permis à un homme qui vit un miracle individuel de se raser ce jour-là, à plus forte raison pour le peuple entier… On remarquera donc avec quelle facilité nos sages permettent de se raser pendant les jours du Omer si l’on en ressent le besoin ou même le devoir. Ceci est dû, entre autres, au fait que cette halakha ne figure pas dans le Talmud.
De nombreux rabbanim ont explicitement permis de se raser à Yom HaAtzmaout – notamment : – le rav Yitzhak Nissim, zatzal, ancien grand-rabbin d'Israël – le rav Unterman, zatzal, ancien grand-rabbin d'Israël
48 AJ MAG N° 1009
AU NOM DE LA LOI
– le rav Shlomo Goren, zatzal, ancien grand-rabbin d'Israël.
– le rav Tzvi Pessa'h Frank, zatzal, ancien grandrabbin de Jérusalem.
Deuxième question :
Le devoir de réciter le Hallel en l'honneur de Yom HaAtzmaout dépend-il d'après vous du degré de dépendance ou d'indépendance de l'État d'Israël par rapport aux nations ? Cela voudrait donc dire que depuis la création de l'État d'Israël, notre indépendance par rapport au bon vouloir des peuples serait acquise. Laissez-moi en douter ! Comment, dans la situation géopolitique qui est celle d’Israël, pouvons-nous nous considérer comme un État Indépendant, particulièrement dans la conjoncture actuelle, alors que le monde entier condamne la guerre que nous menons ?!
Il est bien évident que l’économie israélienne, voire même la survie d’Israël, dépend aujourd’hui encore en grande partie de la coopération commerciale avec les autres nations, de l’aide américaine ainsi que des bonnes dispositions des pays arabes à notre égard… La question est donc de savoir ce qu’on appelle une nation souverainement indépendante. Existe-t-il une nation au monde qui ne dépende pas, économiquement au moins, militairement parfois, d’autres puissances ? Si les pays arabes décidaient demain de cesser de vendre du pétrole aux pays européens, qu’adviendrait-il de leur économie ? Le royaume d’Israël et celui de Juda étaient-ils indépendants à l’époque biblique ? Un État indépendant ne se doit-il pas de gérer sa politique en fonction de ses intérêts, parmi lesquels la création d’une interdépendance avec les autres États ? Et peut-
on dire que ce faisant, il perd son indépendance ?
Le fait qu’aujourd’hui, aucun pays ne puisse vivre en autarcie, replié sur lui-même, signifie-t-il qu’aucun pays n’est indépendant ?
Depuis le 5 Iyar 5708, nous sommes indépendants, même si le gouvernement souverain de l’État juif doit tout faire pour accroître sa marge de manœuvre par rapport aux autres nations, comme n'importe quel autre État indépendant du monde, en dotant le pays d’une force économique et militaire conséquente. D’ailleurs, l’aide américaine elle-même répond (pour l’instant, en tout cas) aux intérêts bien compris des Américains qui, en contrepartie, profitent, à différents niveaux, de la présence d’Israël dans cette partie du monde. n
Kol touv et 'Hag HaAtzmaout samea'h !
Rav Avraham Dray
Rabbin de communauté à Ashdod - Fondateur de Chadarim
Directeur du Desk France du Mizra'hi mondial
Pour contacter le rav Dray : avdery7@gmail.com
AJ MAG N° 1009 49
Mais de quelle Indépendance parlez-vous ?
PAR ELIE KLING
Il y a juste un mois, j'écrivais dans ces colonnes un plaidoyer pour célébrer comme il se doit les fêtes auxquelles le calendrier juif nous convie : « La célébration de Pourim ou de Yom HaAtzmaout fait partie de l'effort de guerre et marque notre amour de la vie, notre résilience et notre victoire sur les forces du mal », concluais-je. Je reçus quelques commentaires ; certains partageaient mon point de vue, d'autres le critiquaient, trouvant indécent de festoyer lorsque tant des nôtres étaient en deuil ou en captivité. Le message d'un de mes amis disait également autre chose : « Et même en admettant que tu aies raison, m'écrivait-il, encore faut-il m'expliquer s’il reste de quoi se réjouir le jour de notre prétendue indépendance. Ne vois-tu donc pas que l'Oncle Sam nous dicte jusqu’à notre stratégie militaire sous prétexte de nous soutenir financièrement ? Et le pogrom du 7 octobre ne vientil pas de pulvériser jusqu’à la justification première de notre État : assurer que plus jamais on ne pourra tuer des Juifs aussi facilement et en si grand nombre ? Quelle indépendance exactement célébreras-tu le 5 Iyar ? Que reste-t-il à célébrer ? »
Je me suis alors demandé ce que lui aurait répondu le rav Yossef Kahaneman. Cet élève du 'Hafetz 'Hayim avait pris l'habitude de placer chaque année le drapeau juif sur le toit de la fameuse Yechiva de Poniowitz à Bnei Brak, dont il était à la fois le fondateur et le dirigeant, au grand dam de certains de ses collègues et élèves qui ne comprenaient pas cette marque de solidarité envers un État dirigé par des Juifs qui n'avaient pas tous obligatoirement la même perception du judaïsme que lui. Il leur répondait que c’était une question de « hakarat haTov », de reconnaissance. En effet, cette capacité de gratitude n'est pas seulement le fondement élémentaire de tout comportement moral. Elle constitue également l'une des bases même de notre emouna, ainsi que l'indiquent de nombreux versets, tel celui-ci, tiré de Devarim, chapitre 8 : « De peur que tu ne manges à en
être rassasié, que tu construises des maisons et que tu y résides, que tu développes ton cheptel, ton or, ton argent et tes biens, puis, le cœur hautain, que tu oublies l'Éternel ton Dieu, qui t'a pourtant fait sortir d'Égypte, ce foyer d'esclavage. »
Oui, comment oublier qu’hier encore l’Europe se transformait pour nos parents et nos grandsparents en un gigantesque foyer d'esclavage dans lequel ils furent enfermés, avant que ne leur soit appliqué ce qui était censé être la solution finale, conçue par des Égyptiens modernes qui parlaient allemand et dont les complices parlaient l'ukrainien, le russe, le polonais, le français ou l'anglais ?
Comment ne pas remercier Dieu d'avoir donné aux rescapés la volonté de puiser en eux la force de nous relever littéralement de nos cendres, et d'avoir donné à leurs petits-enfants le courage de se battre comme des lions pour que plus jamais il ne soit dit que le sang juif peut être versé impunément ?
Comment ne pas Le remercier de nous avoir permis de bâtir des maisons, des villages et des villes que nous envient aujourd'hui nos voisins, jaloux de ne pas avoir réussi en six siècles à obtenir de cette terre le millième de ce que nous avons su réaliser en six décennies ?
Comment ne pas réciter pour lui le Hallel alors que ce petit État, si petit que la simple inscription sur la carte du globe des six lettres qui composent son nom déborde largement les limites de ses frontières, est entouré de centaines de millions d'ennemis qui, depuis que le monde assista à sa miraculeuse résurrection par un beau jour de printemps de l'an 5708, ne rêvent que de sa destruction et ont tenté dix fois de le rayer de la carte ?
Comment ne pas voir l'incroyable rassemblement de ces millions d'exilés revenus de 70 pays et parlant 70 langues, attirés vers cette terre comme par un aimant, sans même un Moïse pour leur indiquer le chemin ?
Que dirait mon grand-père, revenant à la vie, si je lui apprenais que mon fils, qui porte son nom, a épousé la fille d'exilés revenus d'Angleterre, que ma fille a épousé l'enfant d'exilés revenus du Maroc, qu'une autre de mes filles s'est mariée avec le fils d'un Juif de retour du Yémen, et que tous habitent sur la terre du
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LE KLING DU MOIS
LE KLING DU MOIS
roi David et de Rabbi Akiba, et parlent admirablement bien leur langue ?
Comment comprendre ceux parmi nous qui, manquant de la plus élémentaire des gratitudes, se refusent toujours à remercier le Ciel, vexés sans doute que Dieu ait décidé de rassembler Son peuple et de faire revivre sa terre sans leur avoir au préalable demandé de quelle manière Il devait selon eux s'y prendre ? Qui oserait dicter à Celui qui dirige l'Univers comment enclencher le processus de la Rédemption d'Israël ?
Comment rester indifférent devant la réalisation quotidienne des plus audacieuses des prophéties bibliques ? Comment ne pas pleurer d'émotion en relisant les versets d'Ézéchiel : « Je repeuplerai les villes et les ruines seront rebâties, ce sol dévasté sera cultivé et n'offrira plus l'image de la désolation aux yeux des passants. On dira : regardez, cette terre dévastée est devenue un paradis ! Ces villes ruinées, dépeuplées, écroulées, les voici fortifiées et habitées ! Et les nations reconnaîtront que c'est Moi, l'Éternel, qui ai rebâti les décombres, replanté le sol dévasté, Moi qui l'avais annoncé et Moi qui l'ai accompli ! » (Ézéchiel 36, 33 à 36)
Comment ne pas se frotter les yeux, à l'heure de la balade chabbatique à Jérusalem, en se souvenant des antiques paroles de Zakharie (8, 4 et 5) : « Ainsi parle Dieu Tsevaot : les vieillards et les femmes âgées s'assiéront à nouveau dans les rues de Jérusalem, leur canne à la main, et les rues se rempliront des
Horaires de chabbat
Chabbat Kedochim 10 mai 2024-2 Iyar 5784
Jérusalem 18h45 20h07
Tel Aviv 19h06 20h09
Netanya 19h06 20h09
Yom HaZikaron 13 mai 2024-5 Iyar 5784
Yom HaAtzmaout 14 mai 2024-6 Iyar 5784
Chabbat Emor 17 mai 2024-9 Iyar 5784
Jérusalem 18h50 20h12
Tel Aviv 19h10 20h15
Netanya 19h11 20h15
Chabbat BeHar 24 mai 2024-16 Iyar 5784
Jérusalem 18h55 20h17
Tel Aviv 19h15 20h20
Netanya 19h15 20h20
Lag baOmer 26 mai 2024-18 Iyar 5784
Chabbat Be'Houkotaï 31 mai 2024-23 Iyar 5784
Jérusalem 18h59 20h22
Tel Aviv 19h19 20h25
Netanya 19h20 20h25
Chabbat BaMidbar – Roch 'hodech 7 juin 2024-1er Sivan 5784
Jérusalem 19h02 20h26
Tel Aviv 19h23 20h29
Netanya 19h23 20h29
« Vous êtes maître de votre vie, et qu’importe votre prison, vous en avez les clefs. »
(Rabbi Na'hman de Breslev)
cris des petits garçons et des petites filles jouant devant eux ! »
Le 5 Iyar, mon ami, je n'oublierai pas que la route est encore longue et que, comme tu le dis, notre indépendance est encore loin d'être parfaite. Mais je célèbrerai avant tout la fête de la fidélité. Fidélité d'un peuple qui n'a jamais renoncé à sa terre, résistant à la tentation de l'oubli comme à celle du désespoir. Fidélité d'une terre qui, attendant patiemment le retour de ses enfants, lui a toujours réservé ses arbres, ses fleurs et ses fruits. Enfin, fidélité d'un Dieu qui jamais n'oublia Sa promesse, ainsi résumée par nos sages dans le traité talmudique de Sanhedrin (98a) : « Il n'existe pas de signe plus évident que la fin de l'Exil a sonné que lorsque vous verrez la terre d'Israël redonner ses fruits, ainsi qu'il est écrit : "Et vous, montagnes d'Israël, donnez vos branches et portez vos fruits pour mon peuple Israël sur la route du Retour !" » Béni soit le Nom de Celui qui nous a fait vivre, qui nous a maintenus et nous a fait atteindre ce moment ! Arrêtez-moi si je dis des bêtises… n
klingelie@gmail.com
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UNE ANNÉE AVEC LA CABALE
Secrets du Temps
Le Juif compte tout le temps
PAR ARIELA CHETBOUN
Le Juif compte tout le temps. Les secondes et les minutes sont calculées par le temps que l’on met à faire une chose, à parcourir une distance, à dire quelques mots, comme l’illustre cette drôle d’histoire rapportée par le Meam Loez : « Un hérétique habitait dans le voisinage de Rabbi Yehochoua ben Levi. Chaque jour, il tourmentait le Sage en le questionnant sur la Torah. Le rav devait s'évertuer à trouver les réponses qui le satisferaient. Un jour, il décida de maudire cet importun pour s’en débarrasser. Le rabbi prit un coq et le plaça au pied de son lit : “Je saurai ainsi le moment où Dieu est courroucé et je maudirai cet homme à cette seconde.” En effet, il est dit que pendant les trois premières heures de la journée, Dieu est en colère à un moment précis, mais il ne dure que le temps qu'il faut pour prononcer un mot. Si un homme connaît cet instant, sa malédiction se réalise. Finalement, le rabbi renonça – cette fraction du temps où Dieu est courroucé étant trop difficile à saisir. » Comme quoi, maudire son prochain n’est jamais une bonne idée !
Le Juif compte les heures depuis le lever du soleil pour ne pas dépasser le moment où il faut avoir fait ses prières. Par exemple, la première heure pour mettre les téfilines est le moment où il fait assez jour pour reconnaître à une
Pardès – le Verger – ce sont les quatre niveaux d’étude de la Torah. Ariela Chetboun met par écrit l’enseignement oral reçu de ses maîtres en Kabbala et 'Hassidout. Que cet éclairage vienne דייסב compléter ce que nous savions jusqu'ici.
distance de quatre coudées une personne que l’on connaît un peu. Le Juif compte les jours qui le séparent de sa femme qui lui est interdite pendant qu’elle se remet de la mort symbolique d’une fécondation qui n’a pas eu lieu. Il compte les semaines qui jalonnent le temps d’une fête à l’autre, comme de Pessa'h à Chavouot, car ces semaines sont utiles au développement personnel. Le Juif compte les mois : ceux-ci ne se ressemblent pas et le Juif doit investir son temps, son argent et son énergie à honorer chaque événement que chacun des mois comporte. Au début, nous comptions les mois à partir de Tichri – mois où Adam fut créé, anniversaire de la naissance de l'humanité –mais après l'Alliance entre les morceaux, les descendants d'Abraham comptèrent les années à partir de cet événement. Bien que l’oppression n'eût pas encore débuté, la période de 400 ans d’asservissement des Hébreux est comptabilisée à partir de la naissance d’Isaac. Or voici qu'en Nissan les Hébreux retrouvèrent leur liberté ! Dieu leur ordonna de considérer désormais Nissan comme le premier mois de l'année, mois où toute l'humanité était rachetée puisque Dieu avait choisi Jacob et ses descendants comme Son peuple. Pessa'h est le Roch haChana des malakhim, le nouvel an des anges, porteurs des
messages divins, car on dit que Dieu « change d’anges » à cette période de l’année.
Le Juif compte les années selon un calendrier luni-solaire qui lui est propre – et ses jubilés tous les cinquante ans. Les Hébreux comptèrent d’abord les années à partir de leur sortie d’Égypte, et ce, pendant mille ans. Plus tard, on compta les années à partir de la création d'Adam.
Et le Juif compte les millénaires qui l’ont séparé des temps messianiques. n
52 AJ MAG N° 1009
Extrait de Une année avec la Cabale. Secrets du Temps et des Fêtes juives En vente sur Amazon
Gâteau au fromage
PRÉPARATION
INGRÉDIENTS
Pour 8 personnes
Pour la base
• 310 ml (1¼ tasse) de chapelure de biscuits
• 30 ml (2 c. à soupe) de sucre
• 60 ml (1/4 de tasse) de beurre non salé fondu
Pour la garniture
• 310 ml (1¼ tasse) de sucre
• 30 ml (2 c. à soupe) de farine
• 1 kg de fromage blanc
• 4 œufs
• 2 jaunes d'œufs
• 5 ml (1 c. à café) d'extrait de vanille
Préparation de la base
l Placer la grille au centre du four. Préchauffer le four à 180 °C.
l Tapisser de papier sulfurisé le fond d'un moule à charnière de 20 cm de diamètre.
l Dans un bol, mélanger tous les ingrédients. Presser légèrement la pâte au fond du moule.
l Enfourner environ 12 minutes.
l Laisser refroidir complètement.
l Beurrer généreusement les parois intérieures du moule.
l Bien envelopper de papier d'aluminium le fond et la face extérieurs du moule, en laissant dépasser le papier aluminium vers le haut. Doubler le papier aluminium.
l Réduire la température du four à 170 °C.
Préparation de la garniture
l Au robot culinaire, mélanger le sucre et la farine. Ajouter le reste des ingrédients et mélanger jusqu'à ce que la préparation soit lisse et homogène, puis la verser sur la base.
l Préparer un bain-marie : déposer le gâteau dans un grand plat de cuisson et verser de l'eau bouillante dans le plat jusqu'à mi-hauteur du moule. Faire cuire au four environ 1h50.
l Retirer le gâteau du bain-marie ainsi que le papier aluminium. Laisser tiédir environ une heure.
l Couvrir et réfrigérer six à huit heures.
l Passer une lame de couteau entre le moule et le gâteau pour démouler.
Bon appétit !
AJ MAG N° 1009 53 RECETTE
AGITATION REMONTÉE DU NIVEAU
POUR STATIONNER INTERJECTION
PLANÈTE ROUGE FILET D’EAU ROI DU PÉTROLE APPORTAS
UNITÉ DE MESURE PETITES CERISES
CHAMPION FATIGUERA
JEUX
RÉSOLUTION PRISE FLUIDE VÉGÉTAL
RELÈVE LE PLAT VILLE DE BELGIQUE
VIEUX DO ÉVALUÉE DEMIPORTION
DÉSERT SANS MOTIF ÉTOILES VIEILLE
PARTICULE RICHESSE
VERT EN POLITIQUE
RÉCIPIENT PRÉSAGEA
CACHER VIEILLE COLÈRE
ARBRE À ROUES HABILLÉE
APPROUVA POSSESSIF TRAMA ZONE PAYS DU MAGHREB
DIEU SOLAIRE APRÈS LA SIGNATURE
DÉSIR D’AVENIR
CROCHET DE BOUCHER
DESSERT TOUS LES ÉTAGES
EXPERT CRI DE DOULEUR
RÉCIPIENT
HUMOUR MORDANT SANS DOUBLAGE RAPPORT
IDIOT SUR UNE BORNE
APRÈS VOUS
Solutions des jeux page 54
AU LABO
56 AJ MAG N° 1009
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Solutions des mots fléchés de la page 51
Un mendiant frappe à la porte du vieux couple Rosenthal. Il a l’air affamé et implore l’hospitalité. Le mari demande à sa femme :
- Qu’est-ce qu’il nous reste à manger ?
- Rien, lui répond son épouse.
- Il doit bien nous rester du poulet de chabbat !
- Mais mon chéri, on est déjà jeudi. Je ne pense pas que le poulet soit encore comestible. Crois-tu que ce soit prudent de lui servir ça ?
- Écoute, il mangera ce qu’on lui donnera, on n’est pas au restaurant ici. Déjà qu’on lui offre l’hospitalité… Malheureusement, le pauvre mendiant tombe malade et le vieux couple le conduit à l’hôpital. Le lendemain, ils viennent lui rendre visite et le réconfortent :
- Vous verrez, ça va aller. Vous allez vous remettre en deux temps trois mouvements. C’est d’ailleurs la première fois que quelqu’un tombe malade avec la cuisine de ma femme !
Mais le mendiant meurt et les deux vieux se rendent à son enterrement. Sur le retour du cimetière, l’homme dit à sa femme :
- Regarde comme la Torah est magnifique ! Avec un simple morceau de poulet, on a accompli trois des principaux commandements du judaïsme : l’hospitalité, visiter les malades et suivre un enterrement !
Un Juif religieux se demande si les relations sexuelles sont compatibles avec le chabbat. Est-ce un jeu ou un travail ? Car dans le deuxième cas, cette pratique serait interdite le chabbat. Pour en avoir le cœur net, il décide d’aller poser la question à son voisin, un prêtre catholique. Ce dernier s’absente un long moment pour aller consulter plusieurs ouvrages théologiques et revient vers le Juif avec sa réponse :
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BLAGUES À PART
- C’est très simple, mon fils. Si c’était un travail, ma femme demanderait à la bonne de s’en occuper !
Une riche Juive new-yorkaise se rend au comptoir d’El Al pour acheter un billet à destination d’Israël. Elle porte un chien dans un sac.
- Je veux que mon chien voyage avec moi.
- Impossible, Madame, lui répond l’employé de la compagnie.
- Je veux mon chien avec moi, insiste-t-elle
- Madame, c’est interdit par la loi. Nous avons un compartiment spécial pour les animaux et il y sera tout à fait en sécurité et à l’aise. C’est l’unique solution, sinon vous ne pourrez pas embarquer dans l’avion.
- Tout ce que j’ai trouvé, c’est que l’acte de chair étant un devoir, il est assimilé à un travail. J’ai donc bien peur que cela vous soit interdit pendant le chabbat. Refroidi mais peu convaincu par la réponse du prêtre, le Juif va consulter un pasteur protestant. Après tout, le pasteur est marié et il en sait certainement davantage sur la question que le prêtre, voué au célibat. Après mûre réflexion, le pasteur lui répond : - Malgré quelques références contradictoires, je crains que ce type de relations ne relève du travail, les rendant par là même incompatibles avec le chabbat. De plus en plus agité et en proie au doute le plus total, le Juif décide de faire ce par quoi il aurait dû commencer : aller voir son rabbin. Car finalement, qui mieux que lui connaît les règles du chabbat ? Il va donc poser la question au rabbin de la ville, qui lui répond du tac au tac :
- Sois tranquille, il n’y a aucun doute : les relations sexuelles sont un jeu, pas un travail. Soulagé mais pas rassuré, le Juif insiste :
- Comment pouvez-vous être aussi affirmatif alors que la plupart disent le contraire ?
Bien malgré elle, la femme consent et le chien est placé dans la soute. À l’arrivée à l’aéroport Ben Gourion, le steward se rend compte que le chien est mort. Il ne sait pas quoi faire et appelle un assistant :
- Regarde bien ce chien : c’est un cocker doré. Tu vas foncer à Tel Aviv, tu m’achètes le même et tu reviens ici illico presto. Elle n’y verra que du feu !
L’assistant s’exécute et le steward, de son côté, retient la maîtresse de l’animal, prétextant des retards pour faire passer le toutou à la douane – les règles vétérinaires sont très strictes en Israël.
Ayant fait l’échange avec le chien ramené par l’assistant, le steward remet l’animal à sa propriétaire. Celle-ci manque de s’évanouir et s’écrie :
- Ce n’est pas mon chien !
- Mais enfin, Madame, bien sûr que c’est votre chien !
- Non, non ! s’écrie-t-elle, hystérique.
- Je ne comprends pas… dit l’employé d’El Al.
- Mon chien était mort ! Je venais pour le faire enterrer en Terre sainte !
Les blagues sont issues du livre de Josy Eisenberg, Ma plus belle histoire d'humour. Avec l'aimable autorisation de la famille.
58 AJ MAG N° 1009
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