IWACU 574

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IWACU N°574 – Vendredi 13 mars 2020 – 2000 Fbu Quartier INSS, Avenue Mwaro n°18 Bujumbura - Burundi Tél. : 22258957

Présidentielle 2020

Les recalés de la Ceni

POLITIQUE

ÉCONOMIE

Un député du CNL brutalisé à Gisuru

P.4

Les petits commerçants transfrontaliers jettent l’éponge

AU COIN DU FEU P.8

Avec Fabien Banciryanino

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LA DEUX

Vendredi, 13 mars 2020 - n°574

Editorial

En hausse

Sur le vif

En coulisse

Un nageur burundais réalise 6 records nationaux Lors d’un championnat d’Afrique (zone 2) au Ghana du 5 au 8 mars, Belly Cresus Ganira a battu 6 nouveaux records nationaux sur les épreuves de 200m crawl, 100m Crawl, 200m papillon, 100m papillon, 50m papillon et 50m Crawl.

Une formation des comédiens au Burundi

Par Léandre Sikuyavuga Directeur des rédactions

A

u total, six candidatures à la course présidentielle ont été validées ce mardi 10 mars par la Commission électorale nationale indépendante (Ceni). Quatre autres ont été rejetées. Entre autres raisons avancées par le patron de la commission : déclaration de nationalité non conforme, dossiers de parrainage incomplets, signatures suspectes sur certains documents, manque d’identification ethnique pour les parrains, non-conformité entre le contenu de l’attestation de résidence et l’extrait du casier judiciaire pour les parrains. A ce jour, parmi les recalés, aucun n’a pu contrer légalement les raisons avancées par la CENI. Pour son président, Pierre-Claver Kazihise, les dossiers ont été soumis à une analyse approfondie sur la base principalement de la Constitution et du Code électoral. Des articles violés leur ont été précisés. Toutefois, ceux dont les candidatures sont refusées ont deux jours pour faire appel devant la Cour constitutionnelle. Certains des « aspirants » malheureux ont favorisé la voie du recours. D’autres ont tout simplement annoncé qu’ils quittent carrément la compétition en dénonçant l’injustice de « ceux qui sont contre la démocratie », avec des mots forts, voire choquants. La Ceni vient de montrer que la loi prime. Elle était sûre qu’elle allait être sous les feux des critiques, voire des menaces des politiques dont les candidatures ont été invalidées. Mais elle n’a pas cédé au chantage, elle a pris à bras-le-corps les dossiers en faisant prévaloir la loi. Un bon début, pourrait-on dire. La mise en garde, au nom de la loi, aux candidats provisoirement retenus pour la course à la présidentielle du 20 mai donne un peu de crédit à cet organe régulateur des élections. « La campagne électorale n’a pas encore débuté. Que personne ne passe outre la loi. Au cas contraire, il fera face à la rigueur de cette même loi», a déclaré M.Kazihise. Oui, il fallait recadrer, montrer son autorité, redorer le blason de l’institution, car des critiques commençaient à être de trop à son égard. Certains partis politiques commençaient à empiéter sur son autorité en violant sciemment le Code électoral. Toute la classe politique doit s’inscrire dans la logique de la légalité et du respect de la volonté du peuple. C’est ainsi qu’elle comprendra que l’on joue pour gagner mais que l’on doit accepter la défaite avec dignité.

Les comédiens Michel Gohou Michael Sengazi et Kigingi se sont associés pour former des jeunes comédiens au Burundi. La formation aura lieu à l’Institut français au Burundi(IFB) du 16 au 20 mars en vue de rechercher de nouveaux talents.

Autorisations d’immatriculation de véhicules disponibles en ligne Le ministère de la Sécurité publique met en ligne les autorisations d’immatriculation de véhicules pour les personnes physiques et morales. Elles peuvent être téléchargées sur http://securitepublique.gov.bi et remplies pour ensuite être présentées au commissariat général de la police judicaire.

Sorelle Ineza, basketteuse dans Hofstra Pride women’s basketball, au Canada, ©Droits réservés

La Ceni joue la légalité

Directeur des Rédactions : Léandre Sikuyavuga

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our avoir été nommée dans All-Rookie Team. Distinction remise aux meilleures révélations de l’année.

En baisse

Wisdom School de la mairie de Bujumbura,

P

our s’être classée dernière à l’Examen d’Etat, édition 2019, dans la section Economie sur 84 établissements.

Directeur adjoint des Rédactions : Abbas Mbazumutima Secrétaire de Rédaction : Guibert Mbonimpa Rédaction Politique : Agnès Ndirubusa Economie : Pierre-Claver Banyankiye Sécurité : Fabrice Manirakiza Edouard Nkurunziza Droits de l'Homme et Justice : Félix Haburiyakira Société: Clarisse Shaka Jérémie Misago Environnement : Rénovat Ndabashinze Sport et Santé : Hervé Mugisha Culture : Egide Nikiza

ANNONCE

Equipe technique: Danny Nzeyimana, Ernestine Akimana, Aubin Hicuburundi, Anaïs Hashazinka, Térence Mpozenzi

Un chiffre

AVIS DE RECRUTEMENT UNDP – un poste, BURUND (Un poste) Le Programme des Nations Unies pour le Développement au Burundi (PNUD) recrute pour le compte du bureau de la coordination des Nations Unies au Burundi . Titre

Development Coordination Officer — Data Management &Results Monitoring/ Reporting

Grade

NOC

Durée

Une année avec possibilité de renouvellement

Type de contrat FTA Local

Date limite de réception des candidatures Le 16 Mars 2020

Toutes les informations y afférentes se trouvent sur le site global du PNUD : http://jobs.undp.org/. La soumission des candidatures se fait uniquement en ligne via le site http://jobs.undp.org/ Les candidatures féminines qualifiées sont fortement encouragées.

100 millions de dollars est l’enveloppe débloquée par la Banque mondiale pour un projet d’énergie solaire.

Source : Banque Mondiale

Une pensée

« Être candidat à la présidence, c’est avoir un regard et un style. Aussi vrai qu’un écrivain a un regard et un style. » Emmanuel Macron

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L'ÉVÉNEMENT

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Quatre candidats obligés de revoir leur copie Ce mardi 10 mars, la Ceni a annoncé avoir rejeté quatre dossiers de candidature à la présidentielle. Les candidats concernés ont exprimé leur frustration et informé qu’ils allaient faire appel de ce refus auprès de la Cour constitutionnelle.

J

acques Bigirimana du parti Fnl, Anicet Niyonkuru du Cdp, Valentin Kavakure du Fpn-Imboneza et Donatien Ndayizeye de la coalition KiraBurundi sont les candidats à la présidentielle dont les dossiers ont été rejetés par la Ceni. L’annonce a été faite par PierreClaver Kazihise, président de la Ceni, dans une conférence de presse tenue, le mardi 10 mars. Il a indiqué que les dossiers non retenus ne remplissent pas les conditions exigées par la Constitution et le Code électoral. Il a précisé que tous les dossiers soumis ont été analysés sur base des dispositions de ces deux textes. Cependant, M. Kazihise a informé que les candidats dont les dossiers n’ont pas été acceptés au niveau de la Ceni ont droit de faire recours auprès de la Cour constitutionnelle endéans deux jours, comme le prévoit le Code électoral.

Choc et confusion chez les quatre recalés Déclaration de nationalité non conforme, nombre de parrainages inférieur au nombre exigé, dossiers de parrainages incom-

Pierre Claver Kazihise: "Tous les dossiers soumis ont été analysés sur base des dispositions du code électoral et de la constitution"

plets et signatures suspectes sur certains documents. Tels sont les reproches faits par la Ceni au candidat présenté par le FpnImboneza à la présidentielle de 2020. Valentin Kavakure, le candidat présenté par ce parti, a confié que c’est un choc pour lui d’entendre qu’il est loin d’être en règle alors que la Ceni lui avait remis un récépissé attestant que le dossier déposé était complet. D’après lui, ce rejet cacherait des mobiles politiques. « Malgré notre jeunesse, le parti Fpn-Imboneza est un sérieux prétendant parmi les partis politiques qui sont dans la course ». Et de déclarer que

son parti va effectuer un recours auprès de la Cour constitutionnelle. Cependant, Valentin Kavakure a indiqué que même si son dossier de candidature à la présidentielle a été rejeté, il n’a nullement l’intention de jeter l’éponge. « L’annonce tombe alors qu’on s’apprêtait à déposer les cautions de nos candidats pour les législatives », a-t-il ensuite ajouté. Pour sa part, Domitien Ndayizeye, ancien chef d’Etat et candidat de la Coalition Kira-Burundi à la présidentielle de mai prochain, s’est dit rt surpris par le verdict de la Ceni. D’après lui, celle-ci a invoqué des dossiers de parrain-

ages incomplets comme motif de refus. M. Ndayizeye a informé qu’avant de faire recours, il passera d’abord à la Ceni pour vérifier si les dossiers de parrainages qu’il a déposés n’ont pas été soit interchangés, soit enlevés. Écarté aussi pour ‘’dossiers de parrainage incomplets’’, Anicet Niyonkuru, candidat du Conseil des patriotes (Cdp), espère que la Cour constitutionnelle annulera la décision de la Ceni : « Nous avons deux mois de travail assidu sur le compteur depuis notre retour au pays ! Cela devrait être encouragé plutôt que découragé. Ce sont de minces vices de forme

qui ne devraient, en aucun cas, nous bloquer dans notre avancée politique. » Quant à Jacques Bigirimana du Fnl, il a avancé que les manquements soulevés par la Ceni pour ne pas approuver sa candidature ne sont pas fondés. « C’est une affaire de quelques attestations de résidence de parrains qui ne seraient pas conformes à leurs extraits du casier judiciaire, mais aussi l’ethnie des parrains qui n’est pas spécifiée sur la liste que nous avons remise à la Ceni ». S’agissant de la spécification de l’ethnie des parrains de son parti, Jacques Bigirimana a indiqué que cette règle n’est pas prévue par les dispositions de la Ceni présidée par Kazihise. « On n’allait quand même pas mentionner ce qui n’était pas recommandé par la Ceni sur les formulaires ! », s’est exclamé le président du parti fondé par Rémy Gahutu. Le candidat Bigirimana s’est aussi justifié sur l’ambiguïté des attestations de résidence obtenues par certains de ses parrains : « Nous n’avons eu de cesse de signaler au ministère de l’Intérieur que pas mal d’administrateurs communaux nous ont mis des bâtons dans les roues en vue d’avoir accès à certains documents. Ainsi, pour bénéficier de leurs attestations de résidence, certains de mes parrains se sont vus obliger d’avoir recours à des administratifs de communes autres que celles où ils résident. » D’après lui, quand bien même la Cour constitutionnelle trancherait en sa défaveur, son parti n’entend pas décrocher du processus électoral. Alphonse Yikeze

Des candidatures postiches Le candidat Valentin Kavakure a présenté un nombre de parrainages inférieur au nombre exigé par le code électoral (200). Dans ce cas, pourquoi la commission présidée par Pierre-Claver Kazihise a attendu sept jours pour invoquer un vice de forme - parmi des raisons de fond - qui aurait dû, en principe, entraîner l’irrecevabilité du dossier du candidat du Fpn-Imboneza ? A l’issue de la conférence de presse qu’il a tenue ce mercredi 11 mars, Jacques Bigirimana, candidat du Fnl, s’est plaint de ce que la Ceni ait retoqué son dossier de candidature sur base de la liste des parrainages ne faisant aucune mention du genre et de l’ethnie de ses soutiens de parrainage. Or, le code électoral est assez explicite sur ce point en son article 97. ‘Chaque candidature aux élections présidentielles doit être parrainée par un groupe de deux cents personnes formé en tenant compte des composantes ethniques et du genre. Ce groupe doit revêtir une dimension nationale.’ Mis au pied du mur face à cette règle de la commission électorale, le candidat Bigirimana a tenté une pantalonnade. « La Ceni invoque la diversité ethnique des soutiens de parrainage, mais nulle part, elle n’a précisé que l’appartenance ethnique des parrains doit

figurer sur la liste que nous lui avons remise ! » Sacré coup de génie ! Autre impair du candidat du Fnl : certains de ses appuis de parrainage ont obtenu leurs attestations de résidence en dehors des communes où ils ont élu domicile ! Cause de ce contresens : Certains administrateurs communaux qui auraient obstrué l’accès à certains documents aux parrains du candidat. Un sophisme attendu que les candidats d’autres partis en lice pour la présidentielle, dont des partis d’opposition comme le Cnl, n’ont visiblement pas eu ce problème, ce qui cache plutôt un défaut d’organisation du parti plutôt qu’une manœuvre administrative ayant visé ce dernier.

Jeu de dupes

Les candidats dont les dossiers ont été rejetés appartiennent à toutes les sensibilités, le camp pro-régime (Jacques Bigirimana) est autant représenté sur la liste des dossiers de candidature refusés que le camp de l’opposition. Idem pour les dossiers acceptés où figurent le Cnl et le Sahwanya-Frodebu (Opposants farouches au Cndd-Fdd). Ce constat ainsi fait, la commission électorale nationale indépendante ne peut être soupçonnée de favoritisme. Alors, pour-

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quoi certains candidats (Valentin Kavakure) dont les dossiers ont été refusés se sont hasardés à dénoncer des mobiles politiques derrière la décision de la Ceni ? La Ceni serait-t-elle à ce point maladroite pour exclure des partis politiques sans aucune assise populaire et admettre ceux incarnant un réel challenge électoral au parti présidentiel, à l’image du Cnl d’Agathon Rwasa ? La raison des boniments du candidat Kavakure se situe peut-être ailleurs : La crainte de concourir au fauteuil présidentiel avec une épine fondamentale : Une carence d’écus pour s’engager dans une bataille électorale qui exige des sommes colossales. En gros, déclarer sa candidature et ensuite avancer une machination de la part de la Ceni pour avoir le prétexte de retirer sa candidature, sachant bien sûr que la cour constitutionnelle n’irait à l’encontre du verdict de la commission électorale. Avoir marqué « Ancien candidat à la présidentielle » sur son Curriculum Vitae est fort avantageux et cela, certains l’ont compris, quitte à déposer des candidatures postiches et s’engager dans un jeu de dupes avec l’opinion.

A.Y.


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POLITIQUE

Vendredi, 13 mars 2020 - n°574

Ruyigi/Gisuru

Un député du CNL humilié par un chef collinaire Des militants du CNL ont été malmenés, tabassés dimanche 1er mars dans la province Ruyigi par des Imbonerakure, lors de l’inauguration de différentes permanences collinaires en commune Gisuru. A la colline Gacokwe, le chef de colline n’a pas épargné un député membre du CNL venu participer aux festivités. Récit. Par Edouard Nkurunziza et Rénovat Ndabashinze

C

ette date restera gravée dans les mémoires des habitants de Gisuru… « Le 1er mars 2020 a été une journée de troubles », commente un habitant du centre communal. Tout commence dans le calme, ce dimanche. C’est sous un soleil doux que s’ouvre, en grande pompe, la permanence de la colline Kabuyenge, peu avant 12 heures. Cependant, la veille, cette dernière avait été un peu vandalisée. La nuit, des inconnus étaient venus caillasser les vitres de ses fenêtres. Sur cette colline, la même nuit, la demeure de Donatien dit « Kibanda », un militant du CNL très actif avait aussi subi une attaque. Des fenêtres vitrées détruites, des pierres lancées sur les portes et sur la toiture, les attaquants restent toujours inconnus. La permanence s’inaugure donc dans un climat de calme, mais les participants sont un peu tendus, inquiets. «Nous pensions que ces actes de vandalisme à la veille de l’inauguration n’étaient qu’un avertissement. Nous nous attendions à une autre attaque», témoigne un Inyankamugayo de Kabuyenge.

La première perturbation… De Kabuyenge, les Inyankamugayo prennent le chemin de la colline Kavumwe. Selon la correspondance du parti transmise à l’administration communale et à la police, il est en effet question d’ouverture de 5 permanences collinaires. Celle de Kavumwe marquera le début d’une série de déconvenues. Déjà, chemin faisant, durant le trajet Kabuyenge-Kavumwe, certains Inyankamugayo se font tabasser, bloqués par des Imbonerakure. Mais déterminés, ils atteindront leur destination. Là-bas, en parallèle à la foule des militants du CNL, une équipe d’Imbonerakure se forme petit à petit, à 20m. «Au finish, une trentaine d’Imbonerakure au grand minimum », affirme un témoin oculaire.

Les militants d’Agathon Rwasa dansent, les tambours sont battus, différentes chansons agrémentent les cérémonies…De l’autre côté, l’équipe de la jeunesse du parti présidentiel commence son animation. Des chansons à la gloire du CNL ici, d’autres à celle du Cndd-Fdd là-bas, la cacophonie est à son comble, le désordre gagne ce terrain. Furieux, les jeunes Inyanka- Pascal Bizumuremyi, le député malmené par le chef de colline Gacokwe. mugayo qui assurent la sécurité Une discussion entre les de la place décident de repousser foule venue inaugurer la perma- colline Kavumwe, accusé d’être de force les Imbonerakure. «Nous nence. D’après les témoignages, l’instigateur de ces affronte- représentants du CNL et ces avons dit que trop c’est trop. C’était en réponse, certains des Inyanka- ments. Il va passer cette nuit au Imbonerakure est engagée. Ces derniers font notamment du mépris », commente un jeune mugayo se saisissent aussi des cachot de la commune Gisuru. montre de la limite du temps Inyankamugayo. Ces derniers pierres. Commence alors un Un néant sur le dos d’un d’exercice des activités polirésistent. Mais ils sont en inféri- combat de jeux de pierres. Cergéant tiques. Les autres rappellent que orité numérique. Dans la bouscu- tains sont blessés. Les vitres de la permanence sont Les CNL inaugurent donc la clôture des activités est fixée à lade, l’un d’eux, poussé vigou«Des chansons à cassées, le matériel finalement leur permanence à 18h. «C’était 17h15 minutes », se sonorisation Kavumwe, après ce contretemps, rappelle un responsable local du reusement, finit la gloire du Cnl ici, de endommagé, etc. et poursuivent leur tournée. CNL. Les Imbonerakure ajoutent par terre. Ce sera d'autres à celle du Il faudra atten- Direction : colline Gacokwe, non que cette permanence a été érigée la goutte qui va faire déborder le Cndd-fdd là-bas, la dre le secours de loin de Kavumwe. Ils y arrivent dans un endroit interdit. « Faux, l’administrateur en procession vers le soir, accom- nous avons la permission des vase. cacophonie était à et Les Imbonerdu commissaire pagnés par Pascal Bizumuremyi, autorités communales », ripostent son comble» akure se replient communaux pour le député élu dans la circonscrip- les Inyankamugayo. Mais ces et s’arment de ramener le calme. tion de Ruyigi et natif de Gisuru, jeunes du parti au pouvoir ne cailloux. Bientôt, malgré les pro- Après une petite enquête dans qui a rehaussé de sa présence ces veulent pas de ces explications. testations de Lin Nkoroka, le chef la foulée, ces derniers embar- cérémonies. Des Imbonerakure «Ils étaient déterminés à torpiller de colline Kavumwe, des dizaines queront Pascal Mateso, pré- armés de gourdins les y attendent nos activités », témoigne un jeune de pierres sont jetées dans la sident des Imbonerakure à la depuis quelques instants... du CNL à Gacokwe. Face à la résistance, le député Bizumuremyi recourt de plus belle à l’administrateur. Celuici lui conseille de se retirer avec tous les Inyankamugayo. Et la décision de rebrousser chemin est aussitôt prise. « Je leur ai dit de rentrer, que nous y reviendrons plus tard », affirme ce représentant du peuple. Mais le plus dur commençait. Selon les témoignages, l’ordre de les empêcher de bouger est soudain donné par Jean Louis Sebushahu, le chef de cette colline. Le début d’un véritable bras de fer. En personne, cet administratif se dirige vers le véhicule de type Hilux à bord duquel est venu le député Bizumuremyi pour le dégonfler. Sauf que le chauffeur l’en empêche vaillamment. Sebushahu se retourne, inflige une gifle à une fille assise dans la partie arrière du Hilux qui tombe aussitôt par terre. Un autre comer pagnon du député qui essaie Le dimanche 1 mars était le jour d’inauguration des permanences du CNL sur 5 collines de la commune Gisuru. d’intervenir reçoit un coup de

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POLITIQUE

Vendredi, 13 mars 2020 - n°574

bâton et s’écroule également. Vient alors le tour de Pascal Bizumuremyi. Ce député joue le sage, tente des conseils au chef de colline. En réponse, il reçoit un coup de gourdin avant d’être envoyé dans les airs. Il se retrouvera par terre entre un groupe d’Imbonerakure qui l’accueillent par une pluie de coups.

« Des mensonges » D’après les témoignages, son garde du corps tirera en l’air pour les disperser. Les CNL, pris en otage depuis peu, profitent et se sauvent. Sauf qu’après la débandade, les Imbonerakure se rassemblent et se mettent à leur poursuite. Le garde du corps de Pascal Bizumuremyi tirera en

l’air pour la deuxième fois… De retour, cet élu du peuple passera, avec les représentants communaux du CNL, voir l’administrateur communal pour le mettre au courant de la situation. Aloys Ngenzirabona leur conseillera de porter plainte. Ce lundi 9 mars, M. Bizumuremyi présente encore quelques enflures au niveau des bras. Il

déplore que les auteurs de ces bavures n’aient jamais été inquiétés. « Si un chef collinaire soidisant du parti au pouvoir peut malmener en toute impunité un représentant du peuple jouissant d’une immunité parlementaire, qu’en sera-t-il du petit paysan ? », s’interroge ce député. Interrogé, Jean Louis Sebushahu a rejeté en bloc ces accusations.

Ce chef de colline parle de mensonges qui n’auraient d’autres visées que d’entacher sa personnalité : « Ce député a été attaqué par les habitants de notre colline qui ne veulent pas du drapeau du CNL sur leur colline ». Il affirme mordicus avoir agi en administratif responsable en essayant de les empêcher.

Eclairage de l’administrateur communal

Aloys Ngenzirabona : « Le dossier est aujourd’hui entre les mains de la police et de la justice.»

« L’incident s’est passé dimanche. J’étais dans une prière. Les CNL nous avaient informés de leurs activités à Kabuyenge, Kavumwe, Gacokwe et à Tahe. A Kabuyenge, il n’y a pas eu de problèmes. La situation a dégénéré à Kavumwe », affirme Aloys Ngenzirabona, administrateur de la commune Gisuru. M. Ngenzirabona indique que c’est un membre du CNL qui a provoqué le conflit : « Quand il a vu des jeunes du parti Cndd-Fdd au marché, il a giflé un parmi eux. Des échauffourées ont alors éclaté, mais pas pour longtemps. » Et d’ajouter : « Même lors de l’interrogatoire à la police, tout le monde l’a confirmé. Même ce membre du CNL a envoyé quelqu’un pour demander pardon. » C’est d’ailleurs pourquoi le prévenu a été relâché après son arrestation. Le dossier est aujourd’hui dans les mains de la police et du parquet. Des enquêtes sont en cours. En fait, la faute est partagée.»

Concernant le passage à tabac d’un député, M. Ngenzirabona dit qu’il n’était pas là : « Il m’a raconté comme il te l’a dit. Je n’ai pas de précisions sur ce qui s’est passé. Mais les gens m’ont dit que cela n’a pas eu lieu. » A l’approche des élections, cet administratif rappelle qu’aucun parti n’a le droit d’empêcher un autre parti de travailler : « Si le parti est agréé, il faut seulement informer l’administration. Que les gens restent sereins et cohabitent pacifiquement. » Il conseille aux membres des partis politiques de se tenir loin de toute provocation : « Pas d’élections d’un seul parti. Il faut utiliser un langage non violent, sans injures. Aucun parti n’envoie sa jeunesse se chamailler avec d’autres jeunes. Ne pas partager des tendances politiques n’est pas un péché. »

Chronique sur les messages de haine

« S’attaquer aux concurrents au lieu des vrais problèmes peut provoquer des violences de masse » Les protagonistes devraient s'atteler à résoudre les vrais problèmes plutôt que de s'en prendre aux concurrents. Brigitte Nshimirimana, experte en transformation des conflits et consolidation de la paix par le dialogue, explique que ce comportement peut conduire à des violences de masse.

B

rigitte Nshimirimana, experte en transformation des conflits et consolidation de la paix par le dialogue, relève que le langage qui s’attaque aux individus au lieu d’un problème consiste à chercher un boucémissaire en cas d’une situation problématique. « C’est un phénomène qui met de côté le nœud du problème pour accuser des gens ou membres d’un groupe opposé. Pour elle, n’eût été la présence des membres concurrents, la situation serait meilleure. Ils continuent de se lancer des piques et critiques sans trouver et éprouver des modalités de résolution des vrais problèmes». Pour elle, l’une des raisons qui poussent les gens ou un groupe de gens à s’attaquer aux individus est la sauvegarde des intérêts sectaires. « L’utilisation de ce langage est toujours motivée

par la protection des intérêts d’un groupe. Parfois, les membres d’un groupe veulent rester accrochés à leurs intérêts. Et pour les conserver, ils s’attaquent aux membres qui ne sont pas de leur avis. Ils n’arrivent jamais à trouver des solutions». Cette experte fait savoir que cette situation se remarque sur le plan politique, social et familial. Elle donne l’exemple de personnes accusées de bloquer le développement. « Au lieu de proposer des actions concrètes, on continue d’accuser tel ou tel d’empêcher le développement. Ils ne précisent jamais des actions concrètes à mener pour redresser la situation ». Brigitte Nshimirimana ajoute qu’au niveau de la famille, si des problèmes surgissent, les acteurs se focalisent sur l’individu, évitant ainsi de regarder en face le nœud du problème. Pour toute

situation, conseille-t-elle, faudrait-il se poser la question pour savoir comment redresser la situation. Selon M me Nshimirimana, s’attaquer aux individus a des conséquences néfastes sur la société. Les membres du groupe indexés se sentent visés. « Leur dignité est mise en cause. Ils peuvent tout faire pour retrouver leur honneur. La tendance est de se retrouver dans des conflits interminable». Et de déplorer : « C’est vraiment une mauvaise pratique qui bloque les efforts de réconciliation, la recherche de terrain d’entente dans la société.» Pour empêche qu’une situation ne dégénère, elle préconise une analyse de la situation sans porter atteinte à la dignité d’autrui. « Devant toute situation problématique, il faut toujours essayer de proposer des solutions adéquates. Il ne sert à rien de responsabiliser un groupe quelconque. Proposer un changement dans le strict respect d’autrui est souvent sage », conclut l’experte Brigitte Nshimirimana. Jérémie Misago

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POLITIQUE

Vendredi, 13 mars 2020 - n°574

Interview exclusive

« Le manque de courant freine notre développement » Relations avec la Tanzanie, gestion des rapatriés, facteurs et freins au développement, etc. Aloys Ngenzirabona, administrateur de la commune Gisuru, province Ruyigi, fait le point.

V

otre commune est frontalière de la Tanzanie. Quelles sont les relations entre les Burundais et les Tanzaniens ? La cohabitation est bonne. Nous tenons des réunions entre nos populations respectives, des rencontres sportives sont aussi organisées. Des échanges commerciaux sont fructueux. Quels sont les produits échangés ? Les Burundais s’y approvisionnent en maïs, manioc, haricot surtout celui communément appelé ‘’jaune’’, arachides, éleusine, ciment et en jus. A leur tour, les Tanzaniens achètent les produits de la Brarudi. On y écoule aussi des avocats, des bananes, des savons, des ananas, etc. Que gagne la commune ? Ces échanges rapportent beaucoup d’argent à la caisse communale. Même l’Office Burundais des Recettes (OBR) en tire des recettes. Comme il n’y a pas de rivière à la frontière, c’est difficile de dire que nous avons réussi à gagner la lutte contre la fraude à 100%. Mais les gens ont été sensibilisés à payer la taxe. Certains le font volontairement, ce qui augmente les entrées à l’OBR. Son bureau local collecte à peu près 100 millions BIF par mois. Récemment, des cas de banditisme ont été signalés dans votre commune. Quelle est la situation actuelle ? Il y avait un groupe de bandits armés composé de Tanzaniens et de Burundais. Des cas de vol étaient fréquents. Après avoir commis un forfait au Burundi, ils se cachaient en Tanzanie. Pour le démanteler, l’administration et la police des deux pays ont collaboré. Des stratégies ont été élaborées. Ce groupe a été démantelé et les armes saisies. Les Burundais ont été remis à la police. Certains Burundais travaillant dans les champs tanzaniens ne sont pas payés ? Est-ce vrai ? Ces cas sont fréquents. On a dit à nos administrés qu’avant d’y aller, il faut chercher des documents d’identité. Mais comme la frontière est poreuse, cette consigne n’est pas toujours respec-

tée. Or, que ce soit en Tanzanie ou au Burundi, il est prohibé de circuler sans document. En Tanzanie, les coupables écopent d’une peine d’emprisonnement de plus d’une année. Quand un patron constate que son employé est un irrégulier, au lieu de le payer, il menace d’appeler la police. Et pour sauver leur peau, certains Burundais préfèrent abandonner l’argent et rentrer au pays. Ceux qui tentent de réclamer sont directement arrêtés par la police comme des irréguliers. Il est difficile de plaider pour de tels cas. Mais nous essayons de faire de notre mieux. Quels sont ces documents exigés ? Il y a un laissez-passer de 15 jours. Mais avec ce document, il est interdit d’aller au-delà de 10 km. Le mieux est de se munir d’un laissez-passer d’une année. Avec ce document, la sécurité est garantie. Est-ce facile de s’en procurer ? C’est là que se situe le grand défi. On doit aller à Gitega. Ce qui exige un ticket de 24 mille BIF pour un ticket aller-retour. Une somme très difficile à avoir pour nos populations. Nous demandons que ce bureau soit installé à Ruyigi. Les nécessiteux peuvent y aller à vélo.

Côté santé ? Nous avons construit le centre de santé de Mwiyogero. Les populations faisaient plus de 8 km pour se faire soigner à GisQu’en est-il du développement uru. Deux autres CDS sont en cours de finissage : Gakangaga et de votre commune ? Muvumo. Celui Gisuru est sur « Dans ma vision, de Nyabigozi est une bonne lancée. Beaucoup d’écoles il faut que chaque déjà opérationconstruites, la nel. Un autre route Rusengo- ménage ait au moins chantier est en une chèvre. » Rusaka a été cours sur la colréhabilitée. Malline Kabingo. Et heureusement, elle ne va pas l’hôpital de Gisuru a récemment résister longtemps car il y a des été équipé. Mais certains matéricamions qui l’empruntent. Nous els ont besoin d’électricité pour aimerions qu’elle soit goudronfonctionner. née pour rendre le trafic plus intense et le commerce florisGisuru n’est donc pas alimenté sant. . en électricité ? Non. Nous avons recours aux Avec la somme de 500 milplaques solaires qui ne produisent lions BIF, nous avons construit pas assez d’énergie, ce qui freine une huilerie moderne. Nous notre développement. Avec un avons aussi acheté 1350 chèvres. coût d’environ 1 milliard BIF, Chaque colline a reçu 19 têtes. nous avions construit un marché Dans ma vision, il faut que moderne qui ne fonctionne chaque ménage ait au moins une pas convenablement, suite au chèvre. Et les collines Kabingo, manque de courant. Une grande Gacokwe, Musha, Kavumwe et perte pour la commune. Ndemeka de la zone Ndemeka L’autre frein est l’inexistence ont reçu des vaches de la part d’une station-service. En cas de des bienfaiteurs.

besoin de carburant, on doit se rendre à Ruyigi. Et pour arriver, le ticket est de 6 mille BIF. Votre commune reçoit sans doute des rapatriés. Quelle est la situation ? Ils sont de deux ordres. Depuis 2016, des réfugiés ont commencé à rentrer à pied. Ceux-ci n’ont pas été assistés. Mais, par après, certains ont été enregistrés. Ils ont finalement eu une assistance alimentaire. Environs 100 familles ont reçu des tôles. Mais c’est toujours insuffisant. L’autre partie concerne ceux rapatriés par le gouvernement et le HCR. Ils reçoivent une aide alimentaire sur trois mois. Ils ont besoin que leurs maisons soient réhabilitées. On parle souvent de Burundais qui reprennent le chemin de l’exil. Qu’en dites-vous ? En fait, il s’agit d’une tricherie. Certains réfugiés ont deux ou trois cartes. Ils pensent qu’en retournant là-bas, ils pourront présenter la deuxième carte et être de nouveau rapatriés et assistés. Arrivés sur place, ils sont

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confiés à la police. Ils deviennent des irréguliers. Ils sont refoulés. Ils oublient que les données sont informatisées. Dans cette semaine, nous avons accueilli 100 personnes se trouvant dans cette situation. En Tanzanie, nous avons plus de 10 mille Burundais dans cet état. Une situation difficile à gérer. Comment ? Le gouvernement et le HCR ne le reconnaissent plus comme réfugiés. Ils les croient chez eux. Imaginez un natif de Bubanza, de Muyinga ou de Makamba qui vient ici nous demander une assistance pour regagner sa province. Or, nous n’avons pas de moyens alloués à cette opération. Mais en tant qu’administratif, impossible de fermer totalement les yeux. On les nourrit, on les soigne. Il faut que les services chargés du rapatriement vident cette question. Sinon, notre commune va être débordée. Propos recueillis par Edouard Nkurunziza & Rénovat Ndabashinze


POLITIQUE

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Du passé composé au futur simple

Missionnaires et colonisateurs, des alliés ?

Les missionnaires et les colonisateurs se sont succédé dans leur arrivée au Burundi. Des collaborateurs pour les uns, des non-alliés pour les autres. Les jeunes de Gitega débattent.

L

es missionnaires sont arrivés au Burundi au 19e siècle. Ils étaient venus préparer le terrain aux colonisateurs », tranche Ferdinand Ntisumbwa, enseignant de Gitega. Invité dans un débat autour du thème : « Pourquoi et comment les religions étrangères ont remplacé la religion burundaise ? », il signale que les premières missions catholiques ont été installées dans les régions, les zones où la religion traditionnelle (le culte de Kubandwa) était très pratiquée. Ce que confirme Jordin Irankunda, un autre jeune de Gitega. Il ne doute pas qu’ils avaient la mission de détruire la religion ancestrale. « Ils la qualifiaient de barbare. Ils disaient que les Burundais ne connaissaient pas Dieu, que leurs pratiques étaient païennes». Or, nuance Ildefonse Sindarubazwa, Imana (Dieu) avait une place importante dans la vie des Burundais. Ce qui transparaît dans les noms, les proverbes (Imanga ntimarira Imana, NyenImana avumbikisha irenga), les pratiques quotidiennes. « Un Dieu créateur, protecteur, etc », croyaient-ils. Par exemple, les mères laissaient un petit trou aux berceaux (en peau de chèvre ou de mouton). Elles étaient persuadées que c’est à travers cette ‘’vitrine’’ que Dieu veillait sur l’enfant. Une pratique observée même sur les maisons pour permettre à Dieu de veiller, de protéger les occupants. Pendant la nuit, poursuit-il, les Burundais ne pouvaient pas dormir dans une maison sans eau. « Imana yohava ihonyora mu ziko », disait-on.

Vue partielle des participants au débat de Gitega.

Et Jean-Marie Bigirimana, un autre jeune, d’ajouter que même la devise monarchique mettait Dieu en avant : « Imana, Umwami (Roi) et Uburundi (Burundi).» De son côté, Marius Nshimirimana affirme que les missionnaires n’ont rien amené de nouveau concernant la croyance en Dieu. « Ils avaient un agenda caché. Celui de préparer le terrain aux colonisateurs».

Des enquêteurs, des précurseurs de la colonisation « Les missionnaires étaient des enquêteurs. Ils étaient là pour étudier le terrain, se renseigner sur les coutumes, les mœurs des Africains afin de prévenir les colonisateurs », analyse Prosper Shurweryimana, un autre invité au débat. Prosper Ngabire abonde

dans le même sens : « Avec la pénitence, les missionnaires vont récolter des informations, se renseigner sur les comportements des Burundais, etc. Toutes ces données sont par après mentionnées dans les ‘’diaires’’, des sortes de rapports très consultés par les colonisateurs. » Des informations utiles pour élaborer des stratégies de pénétration. Ce jeune trouve aussi qu’avec les huit Béatitudes, les missionnaires vont parvenir à rendre dociles les Burundais, à les préparer à l’accueil pacifique des colonisateurs. Une idée qui ne convainc pas totalement Audace Ndayizeye : « Il ne faut pas généraliser. Parmi les missionnaires, certains ont bien joué un rôle d’évangélisation, ont construit des centres de santé, des écoles, etc. » Idem pour Ange Niyonzima qui ajoute que les

missionnaires ne sont pas à confondre avec les colonisateurs. Pour elle, même leurs pratiques étaient différentes. Pour Patient Carmel, au départ, pas de collaboration entre les deux. « Mais comme ils vont se rencontrer en terre étrangère, ils vont établir des relations pour survivre». Un autre participant doute du fait que la pénitence servait à chercher des informations. « Est-ce une pratique seulement appliquée dans les colonies ou était-elle aussi appliquée en Europe ? », s’interroge-t-il.

D’abord gagner la confiance des chefs L’installation des missionnaires au Burundi ne va pas être facile et sans heurts, confie Ferdinand Ntisumbwa. Très attachés au roi, à leur religion ancestrale, les Burundais vont résister. Par exemple,

deux Pères Blancs, Deniaud et Dromaux, seront tués. Il fait allusion à la première tentative d’installation à Rumonge en 1879. D’après lui, c’est plus tard, en 1899, que la première mission de Muyaga sera établie, à l’Est du pays, commune et province Cankuzo actuelles. Puis vont suivre celles de Buhonga (1902), Kanyinya (1905), Rugari (1909) et Buhoro (1912). Les missionnaires vont alors adopter certaines stratégies. D’abord, explique Patient Carmel, un jeune étudiant, ils vont baptiser les chefs. « En gagnant leur confiance, leurs sujets suivront.» Ensuite des actions sociales vont être exécutées comme soigner les gens, enseigner, donner des cadeaux, du travail, etc. « Ce qui va leur attirer la sympathie des gens». Rénovat Ndabashinze

Eclairage

Eric Ndayisaba.

« Je ne pense pas que les missionnaires ont été envoyés par Léopold II. Les Pères Blancs étaient sous les ordres du cardinal Lavigerie », éclaire Eric Ndayisaba, historien. Selon lui, certaines informations disent que ce cardinal avait conclu un accord avec les colonisateurs, mais il n’y a pas de preuves réelles. Pour lui, leurs objectifs n’étaient pas les mêmes. Dans certains cas, leurs relations seront tendues, chacun voulant exploiter la main d’œuvre locale à son compte. L’historien signale que les missionnaires n’ont pas apprécié que des Burundais migrent vers les colonies britanniques pour fuir

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l’impôt. Il affirme que la collaboration n’a pas toujours été bonne entre les missionnaires et les colonisateurs. Pour pouvoir s’installer au Burundi, il affirme que les missionnaires vont payer leur tribut. Des morts seront enregistrés parmi eux. Pour lui, leur but était d’évangéliser les Burundais qualifiés de païens, tandis que les colonisateurs visaient l’occupation de l’Afrique. M.Ndayisaba rejette l’idée que les missionnaires avaient des armes. « Sinon, ils n’auraient pas perdu deux des leurs à Rumonge».

R.N.


SÉCURITÉ ÉCONOMIE

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Nouvelles mesures de change de devises

« La BRB détruit notre business » Depuis la fermeture des bureaux de change, les banques commerciales qui ont fait relais, achètent et vendent deux monnaies étrangères seulement. Le dollar et l’euro. Les conséquences inattendues commencent à se faire sentir. Les petits commerces transfrontaliers sont perturbés.

M

ardi 11 mars 2020, il est 11h. Nous sommes à l’Ouest, au poste frontalier de Gatumba. Les policiers contrôlent deux voitures de transport en commun. L’un d’eux, sous couvert d’anonymat, nous raconte que le trafic a été paralysé depuis lundi le 2 mars 2020. Ce denier fait savoir que les importateurs congolais ont suspendu leurs activités suite aux nouvelles mesures de change de devises de la BRB. A la frontière, explique ce policier, ces commerçants sortant du Burundi avec des marchandises doivent désormais présenter un bordereau de la banque dans laquelle ils ont échangé leurs devises. Samedi dernier, poursuit notre source, les autorités burundaises et celles de la RDC se sont rencontrées à la frontière pour autoriser les petits commerçants à reprendre les activités. Désormais, les commerçants congolais sont autorisés de quitter le Burundi avec des articles d’une valeur de 200.000 BIF sans le bordereau de la banque dans laquelle il a échangé ses devises. « Aujourd’hui matin, le commerce transfrontalier a timidement repris». Un commerçant congolais qui a suivi notre conversation nous interrompt. « Le prix proposé par cette agence de la Bancobu est moins attrayant que celui des cambistes congolais situés sur la frontière » fustige-t-il. Et d’enchaîner, ces cambistes assis sous cet arbre du côté de la RDC achètent le dol-

lar à 2700 BIF alors que le taux officiel est de 2100 BIF. D’après cet homme d’affaires, peu de commerçants continueront à acheter les marchandises au Burundi. En fait, avec les nouvelles mesures de change, les prix de devises ont fortement chuté. Car, un capital de 1000 dollar achetait des articles d’une valeur 270 000 BIF. Pour le moment, le commerçant se procure les marchandises de 210000 BIF. « En conséquence, sa marge bénéficiaire diminue. Car, les produits burundais sont devenus chers».

Au poste frontalier de Gatumba

Pour le moment, il ne sait à quel saint se vouer. Il ne peut pas remDes commerçants burundais bourser ses fournisseurs à temps. Ce qui l’expose à des pénalités font les frais de cette de retard. Il se retrouve dans mesure l’incapacité de payer son loyer. Assis devant son stand, les Mêmes lamentations chez yeux rivés sur son smartphone, Amina, commerçante des récipiJean (pseudo), un vendeur de ents en plastique et des ustensiles marmites et autres ustensiles de de cuisine. Cette dernière estime cuisine, est désespéré. Il est midi. avoir encaissé un manque à gagNous sommes au marché Bujum- ner de plus 1.000.000 BIF bura City Market communément Elle révèle, par exemple, que appelé « Kwa Siyoni ». deux de ses clients qui imporCet homme d’affaires déplore taient les produits plus de que depuis la semaine 1.500.000BIF par jour dernière son busi« D’ici peu, si ont acheté des biens ness soit plombé cette mesure de 200. 000 BIF chacun. « Regardez compar les nouvelles mesures de change persiste, nous ment la BRB détruit de la BRB : « Depuis serons obligés notre business. D’ici la semaine dernière, de fermer les peu, si cette mesure persiste, nous serons je suis désœuvré. Mon portes. » obligés de fermer les chiffre d’affaires a portes». diminué de 70%. Dans Sur la frontière burundo-tanune semaine, j’ai perdu 400.000 BIF.» Ce commerçant grossiste zanienne, la situation est plus fait savoir que la majorité de sa compliquée. Il n’y aucune banque clientèle vient de la République commerciale sur la frontière pour faciliter les changes. D’ailleurs Démocratique du Congo (RDC).

aucune banque commerciale n’accepte le shilling tanzanien. Niyonkuru Cyrille, commerçant de Gisuru, déplore avoir arrêté le commerce transfrontalier : « Je ne peux pas trouver le shilling pour aller m’approvisionner. » Il explique que les banques commerciales se trouvant à Ruyigi ne vendent ou n’achètent pas de shilling. D’après lui, il n’y pas de moyens d’accéder au franc tanzanien. Les bureaux de change sont fermés «Nous sommes obligés de jeter l’éponge». Avant cette mesure, précise-t-il, c’était facile d’acheter et de vendre les shillings. Les cambistes facilitaient les opérations de change à la frontière. La perte encaissée est énorme. Cet homme d’affaires estime qu’il réalisait un bénéfice variant entre 100 000 et 150 000 BIF par mois. Ce commerce était sa seule source de survie pour sa famille. Pour le moment, il consomme son capital. D’après cette même source, les commerçants tanzaniens ne

s’approvisionnent plus à Gisuru. Ces derniers importaient des pommes de terre et de haricots.

Centre de négocie de Kibago D’après G.T, un commerçant de Kayogoro indique que le marché de Kabande communément appelé « Kwa Buhinja » ne lui sert à rien pour le moment. Faute des francs tanzaniens, ce commerçant qui s’approvisionnait sur ce centre est angoissé. Lui et ses collègues ont abandonné ce business. Dans ce marché inondé par plusieurs produits tanzaniens, les échanges se font en shilling. D’après une source de la BRB, les banques commerciales ne peuvent ni acheter ou vendre d’autres monnaies étrangères. Car, la BRB ne les accepte pas. Notre source explique qu’il n’y a pas des conventions entre le Burundi et les pays utilisateurs de ces monnaies. Pierre Claver Banyankiye

Quel est le sort des petits commerçants transfrontaliers ? Suite aux nouvelles mesures de changes des devises, les petits commerces transfrontaliers sont impraticables à cause du problème de change de monnaie. Désormais, le shilling tanzanien, le franc congolais et le franc rwandais ne sont pas acceptés sur le territoire national. Les faits sont têtus. Les banques commerciales ne peuvent pas remplacer valablement les bureaux de change. Les conséquences sont inévitables. Les commerçants transfrontaliers ne peuvent pas exercer leur activité. Une question pertinente se pose. Est-ce que la BRB est consciente des conséquences de la fermeture des bureaux de change sur les petits commerçants transfrontaliers ? En tous cas, elle savait qu’il n’y avait pas de conventions entre le Burundi et les pays limitrophes en matière de change de la monnaie. Pour éviter d’éventuelles perturbations du commerce

transfrontalier, la BRB devrait négocier avec nos pays voisins la convertibilité de leur monnaie.

La principale source de revenus

Depuis des années, les économies des pays de Grands Lacs et de l’EAC sont nettement liées entre elles. Les petits commerçants traversent les frontières d’aujourd’hui pour échanger des biens et des services, donnant lieu à d’importants flux commerciaux. C’est indéniable, cette activité améliore les conditions de vie et crée des emplois, y compris pour certaines catégories de population burundaise marginalisées ou défavorisées. Par ailleurs, les échanges transfrontaliers sont dominés par les produits agro-pastoraux. Ils constituent par conséquent un facteur essentiel pour la sécurité alimentaire. À de multiples égards, les petits

commerces frontaliers jouent un rôle crucial pour la prospérité et la réduction de la pauvreté. En outre, les profits tirés de ces activités servent principalement à couvrir des besoins de première nécessité tels que l’alimentation, la santé ou la scolarisation. Les revenus tirés du commerce transfrontalier sont souvent la principale source de revenus des ménages des provinces frontalières. Pour le moment, les petits commerçants qui ont la volonté de développer leur activité se heurtent à des difficultés d’accéder aux devises. Des vies des milliers de familles sont en danger. Qu’on le veuille ou pas, le Burundi ne peut pas se passer du petit commerce transfrontalier. Et les petits commerçants de Gisuru ou Kayogo n'ont pas besoin des dollars et des euros pour s’approvisionner en Tanzanie. Il faut que le gouvernement prenne des mesures urgentes pour débloquer cette situation.

P.C.B.

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AU COIN DU FEU

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Avec Fabien Banciryanino Dans le Burundi traditionnel, le soir, au coin du feu, la famille réunie discutait librement. Tout le monde avait droit à la parole et chacun laissait parler son cœur. C’était l’heure des grandes et des petites histoires. Des vérités subtiles ou crues. L’occasion pour les anciens d’enseigner, l’air de rien, la sagesse ancestrale. Mais au coin du feu, les jeunes s’interrogeaient, contestaient, car tout le monde avait droit à la parole. Désormais, toutes les semaines, Iwacu renoue avec la tradition et transmettra, sans filtre, la parole longue ou lapidaire reçue au coin du feu. Cette semaine, au coin du feu, Fabien Banciryanino.

V

otre qualité principale ? Je n’ai pas peur de dire la vérité.

Votre rêve de bonheur ? La liberté et la sérénité des juges burundais. Parce que là où il n’ y a pas de vérité et de justice équitable, il ne peut pas y avoir de changement, voire le développement.

Votre défaut principal ? Je suis d’un caractère secondaire. Quand je prends une décision, il m’est difficile d’y revenir.

Votre plat préféré ? Les fruits et les légumes. Et surtout, l’avocat.

Le défaut que ne vous supportez pas chez les autres ? Je ne tolère pas le mensonge et la malhonnêteté.

Votre chanson préférée ? J’aime l’Hymne Nationale. A travers les paroles de cette chanson, l’on ressent l’amour patriotique du compositeur.

La femme que vous admirez le plus ? Celle avec qui je suis depuis 32 ans. L’homme que vous admirez le plus ? Le prince Louis Rwagasore. Malgré l’aisance matérielle de sa famille, le prince Rwagasore n’a jamais été un enfant pourri gâté comme certains enfants issus des familles royales. Votre plus beau souvenir ? La naissance de mon premier enfant .La raison est simple. Notre 1er enfant né le 28 septembre 1989 est mort tout petit .Heureusement, le 9 novembre 1991, Dieu nous a bénis avec un autre enfant. Un garçon. Vous savez, avoir un enfant, c’est un long chemin ! Depuis l’instant où tu fais la cour à celle qui sera ta femme, le mariage, jusqu’à avoir des enfants… C’est un miracle! Votre plus triste souvenir ? Les tueries de 1993 : lors de cette crise, beaucoup d’innocents ont été tués et surtout de pauvres enfants. La plupart ne savaient même pas leurs appartenances ethniques. Ce qui est paradoxal, c’est qu’au Burundi, on ne devrait même pas parler d’ethnies. Parce que par ethnie, l’on sous-entend la culture, les coutumes et les croyances sont différentes. Ce qui n’est le cas pour notre pays ! Quel serait votre plus grand malheur ? Le plus grand malheur de ma vie serait de mourir sans voir mon pays changer. Cela me ferait tellement mal de partir pour de

Votre passe-temps préféré ? Le sport. Certes, je ne fais plus des sports qui demandent beaucoup d’énergie, la marche me sufLa plus belle date de fit. Dans ma jeunesse, j’ai participé l’histoire ? Le 1er juillet 1962, le jour dans des compétitions de course. de l’indépendance. Malgré Malheureusement, je n’ai jamais l’assassinat du prince Louis Rwaété primé comme champion. gasore, la lutte pour L’essentiel était de l’indépendance a participer. « Il n’y aura continué. Aussi, jamais de paix, faut-il admettre Votre lieu préféré si les gens ne qu’après la mort du au Burundi ? Prince Rwagasore, s’engagent pas à Les provinces se libérer du joug Bubanza et Mwaro. dire la vérité. » colonial semblait Mwaro, parce que voué à l’échec. c’est ma province natale. Là-bas, tu peux y trouver La plus terrible ? des gens âgés d’environ 70 ans Le 13 octobre 1961, la mort du mais en très bonne santé, des gens prince Louis Rwagasore . Alors qui n’ont jamais pris de médicaqu’il a sacrifié sa vie pour le ments. De plus, l’on n’y boit de Burundi, avec sa mort, tous les l’eau naturelle qui provient des projets qu’il avait pour son pays sources. A Bubanza, j’y ai aménagé ont volé en éclat. adulte. Parmi les raisons qui m’ont poussé à m’ y installer, d’abord, elle Le métier que vous auriez est proche de Bujumbura. Mais aimé faire ? aussi, c’est une bonne province Le métier d’enseignant .C’est pour faire des affaires. Enfin, les un métier d’honneur. J’ai fait gens de Bubanza sont hospital15 ans dans l’enseignement, iers quoiqu’elles soient facilement dont 10 ans comme directeur. manipulables. Entendre mes anciens élèves m’appeler encore « directeur », Le pays je me sens tellement fier. Aussi, où vous aimeriez vivre ? voir ton ancien élève, devenir Le Burundi. Honnêtement, vivre une grande personnalité, c’est à l’étranger ne me tente pas où il merveilleux. est difficile de voir une parenté bon en laissant mon pays entre les mains d’un gouvernement qui n’est pas prêt à servir.

ou une connaissance… Dans un monde où tout le monde est affairé... Non, s’il m’arrive d’aller à l’étranger, ça sera pour des études ou le tourisme. Sinon, j’aimerais passer le reste de ma vie au Burundi. Le voyage que vous aimeriez faire ? Le voyage que je rêve de faire, c’est aller dans tous les camps des réfugiés burundais pour leur rendre visite. Je n’ai jamais été réfugié. Penser aux réfugiés me fait de la peine. Ils vivent dans de mauvaises conditions. Je reconnais que je n’ai pas assez de moyens pour les aider. Mais, je peux porter loin leurs voix. Je me rappelle le jour où le ministre de l’Intérieur s’était rendu dans le camp des réfugiés burundais en Ouganda. En plus de le huer, les réfugiés burundais ont commencé à lui jeter des pierres. Quelques jours après, au Parlement j’ai plaidé pour qu’on donne le feu vert à la commission de l’Assemblée nationale qui s’occupe des affaires sociales et dont je suis membre, pour qu’on aille visiter nos compatriotes dans les camps. Peine perdue. Je pense d’ailleurs que si c’étaient des parlementaires qui s’y étaient rendus à la place du ministre, la communication aurait été autre.

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Quelle radio écoutez-vous ? La Radio Isanganiro, parce que c’est l’une des radios qui émettent encore sur le sol burundais .Elle essaie de dire la vérité. Je ne peux pas oublier les radios comme la Rpa (Radio publique africaine). Malheureusement, je ne l’écoute pas souvent, parce qu’elle émet à l’étranger. Votre devise ? Dire la vérité. Il n’y aura jamais de paix, si les gens ne s’engagent pas à dire la vérité. Votre souvenir du 1er juin 1993 ? Contrairement aux autres Upronistes, la victoire du Frodebu ne m’a pas du tout dérangé. Je me souviens qu’après la proclamation des résultats, les membres de ce parti sont venus danser devant nos ménages. Profitant de l’occasion, je me suis mis à danser avec eux. Mes voisins ne me comprenaient pas. Votre définition de la Démocratie ? Pour moi, la démocratie, c’est la garantie des droits fondamentaux. On parle de démocratie, lorsque les gens ont le droit de s’exprimer librement sans avoir peur. Voir des radios comme BBC, VOA, la RPA, Bonesha Fm et la télé Renaissance, ne plus émettre sur le sol burundais, c’est la preuve que nous avons encore du pain sur la planche. Preuve que tout le monde à demi-mot désire leur réouverture. Malgré l’interdiction, je sais qu’il y a certains de mes collègues


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AU COIN DU FEU

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Si vous étiez ministre de la Justice, quelles seraient vos deux premières mesures ? Je redonnerai aux juges burundais toute l’indépendance qui leur est due. Grâce à cette indépendance, ils rendraient des jugements, selon la loi, sans être influencés par qui que ce soit.

qui écoutent la RPA ou Inzamba discrètement sur leurs Smartphones. Il faut savoir qu’ interdire à quelqu’un d’ écouter ou de suivre une telle radio, une telle émission, suscite plus de curiosité. La personne fera tout pour savoir ce qui se dit et qu’on lui empêche d’entendre. C’est humain. Et puis, admettons qu’avec internet, les réseaux sociaux et les smartphones, il est difficile de « coudre la langue du journaliste. » Votre définition de la justice ? La Justice est une notion complexe. On parle de justice, lorsqu’il y a un principe moral qui exige le droit et l’équité. Malheureusement, l’Etat actuel est tellement loin de la justice. Il n’y a plus d’indépendance ni de liberté d’expression. Toutes lois adoptées ne sont jamais appliquées. Aujourd’hui, tuer son prochain, c’est devenu quasi monnaie courante. Je ne sais pas si c’est à cause de l’abolition de la peine de mort, mais le constat est qu’il n’y a plus du respect d’autrui.

Pensez-vous à la mort? Évidemment, j’y pense. Nous devons tous mourir, un jour. Croyez-vous à la bonté humaine ? Bien sûr. Les gens bons existent encore. Et si après les élections 2020, vous n’est pas élu député, allezvous continuer de plaider pour les citoyens ? C’est vraiment difficile. Ce n’est pas facile de parler sans avoir une couverture. Mais, j’y pense encore. Tout dépendra de la situation après les élections. Si vous deveniez président de la République, quelles seraient vos deux premières mesures ? -Réduire le nombre de ministères :

le parlement compte huit commissions et toutes ces commissions élaborent les questions qui touchent le pays. Un petit pays, comme le nôtre, n’a pas besoin de beaucoup de ministères. Réduire le nombre des ministères réduirait les dépenses nationales. - J’établirai un Etat de droit et d’équité. Je ferai feu de tout bois pour redonner à la Justice ses lettres de noblesse. Parce que c’est grâce à une justice impartiale que l’on arrive au développement.

Si vous comparaissiez devant Dieu, que lui diriez-vous ? Ma seule prière sera de supplier le Tout-Puissant de donner au peuple burundais, un gouvernement qui l’ aime et qui est prêt à le servir. Comme je l’ai dit, j’implorerais l’Eternel de nous donner d’autres autorités. Je n’oserais jamais prier pour demander un gouvernement comme celui que nous avons aujourd’hui.

Bio express

N

atif de la province Mwaro, dans la commune Gisozi, Fabien Banciryanino est marié et père de sept enfants (six biologiques et une adoptive). Il est aussi tuteur de trois autres enfants (deux de ses sœurs mortes pendant l’accouchement et une fille, victime de la crise de 1993). Avant de devenir député indépendant en 2015, le député Banciryanino a fait 15 ans dans le métier d’enseignant où il a fait cinq ans en tant qu’enseignant et directeur pendant 10 ans de l’école primaire de Musenyi à Bubanza. Et depuis 1997, il a été mis en disponibilité. En plus d’être un député indépendant, député Fabien Banciryanino est aussi un homme d’affaires.

Propos recueillis par Mariette Rigumye

SOCIÉTÉ

Les hôpitaux privés de Bujumbura, eldorado médical des Congolais? Depuis peu, certains hôpitaux privés de Bujumbura sont la destination privilégiée des voisins congolais. Une aubaine pour ces structures sanitaires et les hôtels des environs qui les hébergent.

D

’Uvira en passant par Bukavu à Goma, ils sont des centaines par semaine à affluer sur le sol burundais. Eux, ce sont les Congolais à la quête de soins médicaux. Souffrant la plupart des fois de pathologies dont le traitement nécessite des examens médicaux approfondis, faute de médecins spécialistes, de laboratoires adaptés chez eux, ils préfèrent toquer à la porte d’à côté. D’après M.B, une personne travaillant au poste-frontière de Gatumba, une destination qui tend à devenir la piste privilégiée des patients congolais. « Il suffit de voir le motif de leur voyage. La plupart évoquent des raisons médicales ».Suite à leur nombre qui va croissant, confie-t-il, des personnes tierces organisent leur voyage vers Bujumbura. Et pour ceux qui ont déjà fait le voyage, peu le regrettent. « Une vraie fontaine de jouvence ».

L’hôpital Kira, une des destinations de ces patients congolais

A raison d’une cinquantaine par jour, selon, un médecin de l’hôpital Kira, beaucoup viennent pour l’imagerie médicale (scanner), les services de la cardiologie, celle de néphrologie, chirurgie, etc. Originaire de Goma, « mama Françoise », la soixantaine, est une de ceux-là. Souffrante du nerf sciatique, grâce au scanner, le neurologue a pu déceler son mal. Peu à peu, fait-elle savoir, je retrouve la sensibilité au niveau des membres supérieurs et je peux me lever toute seule. Une « possibilité », qu’elle était loin d’imaginer il y a un mois. Elle raconte avoir fait le tour des hôpitaux de Goma. « Faute de scanner, les médecins ont refusé de me prescrire des médicaments ». Au regard des tarifs pour la consultation en RDC, nuance-

t-elle, les prix sont quelque peu abordables à Bujumbura. « Avec 50 dollars américains, on m’a fait un scanner de la tête au cou. Chez moi, cet examen m’aurait coûté 200 voire 250 dollars américains ». Un avis partagé par Gad Mupendwa, organisateur de ces voyages. Il parle de « plus- value ». « Hormis, l’hospitalisation, les soins ambulatoires sont abordables ». Allusion faite aux 12.000 BIF d’honoraires pour être consulté.

Des facilités tous azimuts M. Mupendwa, explique que le manque de médecins spécialistes, un suivi médical quelque peu laxiste, absence de spécialités (cas de médicaments), manque de laboratoires, etc, sont entre autres les raisons à l’origine de leur afflux en grand nombre.

Une « manne », à l’instar de l’hôpital Kira dont savent profiter à bon escient certains hôpitaux privés de Bujumbura. « Certes, je ne dirais pas qu’ils sont les plus favorisés, mais, suite à la longueur de leur trajet, ils sont privilégiés quand vient le moment de prendre rendez-vous », indique un infirmier. Pour faciliter davantage leur séjour à l’hôpital, depuis 2017, certains hôpitaux leur permettent d’utiliser les devises. Et comme, des fois, certains viennent pour une batterie d’examens, ils sont obligés d’attendre. Un stand-by profitable aux hôtels des environs. De Remhotel en passant Kira Résidence Hotel à Royal Palace Hotel, tous rivalisent dans l’art de casser les prix. « Dorénavant, une chambre de 70 dollars américains peut se louer entre

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25000 -20000BIF avec une ribambelle de faveurs », révèle un patron d’un hôtel. Entre autres avantages, il cite les petits déjeuners inclus dans les frais de séjour, des menus spéciaux avec comme spécialité des nourritures aux origines congolaises (ugali, sombe, tilapia, etc.). « En tout cas, nous faisons tout pour rendre agréable leur séjour ».Après tout, poursuitil, c’est leur hospitalisation qui continue (rires). Depuis le début de cet afflux de patients congolais les caisses ne sont plus dans le rouge. « C’est une aubaine, car, sur une semaine, vous trouvez presque toutes les chambres déjà réservées ». Mieux, pour se faire un peu d’argent une source confie qu’il y a des ménages dans les environs des hôpitaux qui louent leurs maisons à ces « hôtes » de passage. «Un avantage incommensurable », explique Mupendwa. Hébergés près de l’hôpital, cela réduit les coûts des transports et le quartier est sûr. Cependant, il fait savoir que depuis la mise en oeuvre de cette mesure de fermer les bureaux de changes, l’affluence n’est plus la même. « Peu de Congolais veulent changer leur devise au taux officiel des banques ». Hervé Mugisha


ÉDUCATION

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Centres d’enseignement des métiers

Un secteur à un et mille défis Le manque d’enseignants qualifiés et en quantité suffisante, l’absence d’appui technique et financier, le manque de matériel didactique, le manque d’engouement des apprenants, tels sont quelques défis qui gangrènent les CEM ayant ouvert la filière d’agri-élevage.

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20 centres d’enseignement des métiers ont déjà ouverts les portes à travers tout le pays. La plupart ayant démarré les activités avec l’année scolaire 2017-2018. Ils ont été construits dans le cadre de réduire le chômage chez les jeunes. Très peu sont opérationnels. Nombreux sont émaillés de beaucoup d’embûches. Les centres visités de Kabezi, en province Bujumbura et celui de Muhuta, en province Rumonge, risquent de fermer. « Il n’y a pas d’engouement pour la section agri-élevage », déplore Léonard Minani, directeur du CEM Kabezi. Le nombre des élèves qui fréquentent ledit centre va decrescendo. Selon ce responsable scolaire, le CEM de Kabezi a débuté les activités, en décembre 2017, avec 31 élèves dont 20 garçons et 11 filles. La 2e promotion a accueilli un élève. Pour l’année scolaire en cours, le centre abrite trois élèves. « J’ai introduit la section couture pour attirer les apprenants. Pour l’année scolaire en cours, l’école compte 21 élèves », précise M. Minani. Et de proposer comme solution pérenne l’ouverture d’autres filières telles que la soudure et la maçonnerie. De nombreux défis restent à relever, reconnaît Léonard Minani. Le manque de formateurs en quantité et en qualité est le principal. Les cours sont dispensés par le directeur et un seul bénévole. Le problème de paiement de ce dernier se pose avec acuité. A ce sujet, fait savoir le directeur Minani, la direction exige à chaque élève 5000 BIF pour donner une prime d’encouragement à ce bénévole. Le matériel didactique fait aussi défaut. L’absence des équipements handicape les travaux pratiques. Au niveau de l’agriculture, tientil à préciser, il y a un manque d’intrants agricoles, des semences sélectionnées pour faire les travaux pratiques. Interrogé sur la genèse de ces défis, M. Minani évoque l’absence d’appuis techniques et financiers.

rentre toujours abattu ». Il épingle lui aussi le manque de matériel didactique pour la couture tels que les tables, les mètres ruban, les fers à repasser. L’électricité fait également défaut. Il évoque le manque de kit pour les lauréats qui achèvent leur formation. « Les lauréats retombent dans le chômage, faute de moyens pour acheter les machines à coudre ». Et d’expliquer qu’une machine à coudre simple coûte entre 300 et 400 mille BIF. Tandis qu’une machine électrique revient à 1million 200 mille BIF. Une somme que les lauréats ou leurs parents ne peuvent pas se procurer, renchérit-il. Il demande au gouvernement de leur venir en aide en leur octroyant le matériel de démarrage. Bien plus, il réclame un contrat et l’embauche d’autres formateurs.

Les élèves désemparés Alain Michel Nzitonda, lauréat des humanités, fréquente le centre de Kabezi. Il salue la création de ces centres, mais déplore l’absence du kit à la fin de la formation. « Nous avons opté pour cette formation pour devenir demain des créateurs d’’emploi. Mais faute de ce kit de démarrage, nous risquons de retomber dans le chômage ». Il réclame des formateurs qualifiés et en nombre suffisant. De son côté, N.B., élève au CEM de Muhuta, dénonce une

Bâtiment destiné aux travaux pratiques au CEM de Kabezi.

formation axée sur la théorie. La formation s’échelonne sur 9 mois et la pratique sur trois mois. Elle déplore le manque d’équipements pour les travaux pratiques. Et de préciser que les stages sont effectués sur les collines sous l’encadrement des moniteurs agricoles. « Nous effectuons ces stages sans le matériel ». N.B. déplore que les élèves savent très peu de choses quant à la pratique. Selon elle, les infrastructures sont disponibles, mais, il n’y a pas d’équipements. Pire encore, il y a le manque de produits vétérinaires pour les expériences. Pour le cas de l’élevage, explique-t-elle, il y a un manque de médicaments à utiliser pour faire une expérimentation sur les animaux. « Nous

nous débrouillons alors que nous n’avons pas de moyens. Nous restons dans les généralités. Qui plus est, les moniteurs nous exigent des frais d’encadrement alors que nous n’en avons pas ». N.B. observe, par ailleurs, un taux d’abandons qui ne cesse de grimper : « Certains élèves parcourent de longues distances pour arriver dans ces centres. Fatigués, ils finissent par abandonner.»

La direction se dit préoccupée Léonidas Ngendakumana, directeur général de l’enseignement technique et professionnel, au ministère de l’Education, reconnaît les difficultés auxquelles ces écoles font face. Selon lui, certains CEM sont

Les enseignants surchargés Donatien Mpawenayo, formateur au CEM de Kabezi, dans la section couture, se lamente. Il preste seul avec 32 heures par semaine. « Je suis au four et au moulin. Je

Une étable avec une seule vache au CEM de Kabezi.

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fonctionnels. La cause étant le manque d’appui, d’apprenants et de formateurs. Dès leur création, ces CEM devaient être gérés par les communes. Mais ces dernières n’ont pas été à la hauteur de leur mission. Interrogé sur cet échec, M. Ngendakumana fait savoir que des solutions sont envisagées pour lever certains défis. Notamment le recrutement des enseignants qualifiés qui seront soumis au statut général des fonctionnaires. En outre, il indique que ces CEM manquent de budget de fonctionnement. Et de rassurer : «Nous allons mobiliser nos partenaires techniques et financiers pour que ces centres bénéficient des appuis multiformes.» Quant au manque d’engouement des élèves envers ces écoles, Léonidas Ngendakumana invite les parents et l’administration communale à sensibiliser les jeunes sur le bienfondé de ces écoles. Il rappelle l’objectif visé par cette formation : « Face à une démographie galopante, l’espace cultivable et le pâturage se rétrécissent. D’où il faut apprendre à ces jeunes à produire plus sur un petit espace.». Nous visons, explique-t-il, une agriculture et un élevage professionnels. Ce cadre du ministère de l’Education reste préoccupé par le manque du kit de démarrage. Mais il promet d’y remédier : «Nous conseillons à ces lauréats de se regrouper en associations ou en coopératives. Nous ne pouvons pas appuyer un seul individu.» Félix Haburiyakira


AU CŒUR DU PAYS

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Région Ouest

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Cibitoke

Rugombo suspend les relations économiques avec la RDC Les échanges de produits commerciaux entre la commune Rugombo et la ville de Luvungi en République Démocratique du Congo sont suspendus depuis une semaine. Les commerçants s’insurgent contre cette mesure. De notre correspondant Jackson Bahati

A

la frontière de Rubenga commune Rugombo, entre la ville de Luvungi territoire d’Uvira province de Sud-Kivu, tout mouvement commercial a été suspendu. D’après les informations recueillies sur ce poste frontalier avec ces deux pays, les autorités administratives de la commune Rugombo ont pris la décision de suspendre le commerce transfrontalier vers la ville Luvungi. Les Burundais

Région Sud

Grogne des commerçants transfrontaliers de Rugombo et luvungi côté congo

comme les Congolais qui exercent ce commerce sont contre cette mesure qui a ralenti leurs activités. Et pour le moment, ils ne voient pas comment vivre si cette mesure n’est pas levée par cette administration communale. Par exemple, les femmes burundaises vendeuses des tomates au Congo passant à la frontière de Rubenga. Rencontrées, elles disent qu’elles ne font pas d’autres

activités car après avoir vendu des tomates au Congo, elles achetaient d’autres produits pour les vendre au Burundi.

Les autorités congolaises déplorent aussi la mesure Cette situation est semblable aux commerçants congolais exportateurs des pommes de terre à Rugombo. « Depuis la prise de cette mesure, nous avons perdu

beaucoup de choses», se lamente une maman. Les autorités de la ville de Luvungi déplorent aussi cette mesure. Joseph Mbabaro Ombeni Kimbumbu est le parlementaire provincial élu dans la circonscription du Sud-Kivu. Cet élu du peuple déclare que pendant longtemps, les relations sociales, économiques et sécuritaires entre les deux parties n’ont jamais été mauvaises. Mbabaro Ombeni indique qu’en

cas d’insécurité, les autorités des deux côtés travaillaient en synergie. Selon lui, il dit que cette mesure déstabilise les relations économiques entre les Burundais et les Congolais. « J’ai été surpris car la mesure a été prise sans signaler aux autorités congolaises », précise cet élu du peuple. Suite à cela, il envisage rencontrer les autorités de la commune Rugombo pour voir quoi faire. Béatrice Kaderi, l’administrateur de la commune Rugombo ne va pas sur quatre chemins. Pour elle, cette mesure a été prise afin d’éviter la famine dans les jours à venir car la grande partie de la production agricole est transportée en Rd Congo. « Cette mesure a été prise pour assurer la protection alimentaire», a-t-elle indiqué tout en appelant la population de cette commune à consommer et sauvegarder les produits alimentaires. Kaderi précise cependant qu’elle va entreprendre de rencontres avec les autorités administratives de Luvungi pour voir comment trouver la solution à ce problème.

Rumonge

De fortes pluies causent beaucoup de dégâts Pertes en vies humaines, maisons détruites étendues de hectares de cultures emportées, pistes impraticables, montée des eaux du lac, etc. La situation est préoccupante. De notre correspondant Félix Nzorubonanya

L

es rivières qui se jettent dans le lac Tanganyika dont Dama, Murembwe, Buzimba, Buhinda et Nyengwe ont quitté leurs lits et ont débordé emportant des dizaines d’hectares de cultures sur leur passage le week-end du 7 au 8 mars. Selon Ferdinand Niyokindi, conseiller technique de l’administrateur communal de Rumonge chargé du développement, trois personnes sont mortes dont un pêcheur suite aux vents violents et deux personnes sont mortes lorsqu’une une maison s’est effondrée, une vingtaine de maisons ont été détruites. Certaines pistes rurales sont aujourd’hui impraticables. Les fortes vagues des eaux du lac Tanganyika ont endommagé certaines maisons construites au bord du lac Tanganyika dans le quartier Kanyenkoko et

des champs de cultures dans d’autres endroits. Une montée des eaux du lac de quelques mètres est visible. Cela inquiète beaucoup de gens dans la mesure où des maisons ont été construites au bord du lac Tanganyika. Ce phénomène de montée des eaux n’est pas nouveau. Un vieux de plus de 80 ans résident dans le quartier Swahili de la ville de Rumonge indique qu’en 1964, les eaux du lac Tanganyika sont montées des centaines de mètres et ce phénomène peut se rééditer, selon des géographes. Suite aux vents violents qui balaient les eaux du lac Tanganyika, il s’observe beaucoup de dégâts dont des morts par noyade, des disparitions de pêcheurs et des destructions de pirogues et autres matériels de pêche. Ils déplorent le manque d’une unité de secours au niveau du port de pêche de Rumonge et réclament que

Le lac Tanganyika est monté de quelques mètres endommageant des constructions se trouvant sur le littoral du lac

cette dernière soit mise en place afin de limiter les dégâts.

« Une province à haut risque » Les participants à un débat organisé par l’association des blogueurs « Yaga Burundi » sur les formes de menaces des catastrophes naturelles à Rumonge ont indiqué que cette province est à haut risque compte tenu de son emplacement géographique. Ils ont indiqué que les hautes montagnes qui surplombent certaines

communes de cette province dont Muhuta, Bugarama et Rumonge sont nues et une forte érosion dévastent ces communes. Les berges des rivières qui se jettent dans le lac Tanganyika ont cédé occasionnant des débordements de ces rivières aboutissant sur des inondations. Les participants à ce débat ont pris connaissance qu’un plan de contingence a été élaboré par la plate forme provinciale de gestion des catastrophes naturelles et ont recommandé à cette dernière

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d’agir avant qu’il ne soit tard. Ils ont recommandé que ce plan de contingence soit vulgarisé et que la lutte contre les catastrophes naturelles soit une priorité pour tout le monde. Le gouverneur de la province de Rumonge demande à la population de faire sienne la protection de l’environnement surtout de respecter la zone tampon. Certains analystes indiquent que cette plate forme provinciale manque de moyens techniques et financiers pour accomplir sa mission.


AU CŒUR DU PAYS

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Région Centre

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Gitega

Droit des femmes, plus cher aux citadins qu’aux villageois La plupart des femmes et filles qui pratiquent la prostitution indiquent que le droit de la femme est souvent bafoué par les femmes elles-mêmes surtout dans la campagne. Elles disent qu’elles le font parce que leurs parents leur ont refusé d’étudier pour travailler comme domestiques en villes. De notre correspondant Jean Noël Manirakiza

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lles sont visibles dans les bistrots et les bars des quartiers populaires de la ville de Gitega surtout le soir. A la première vue, ces sont des clientes comme les autres mais au fur et à mesure que les heures avancent, elles tombent leurs masques et commencent à chercher des hommes. Si les unes s’habillent en décolleté moulant le corps, laissant entrevoir leurs seins et leurs parties intimes, les autres se mettent en petites jupes, laissant également entrevoir leurs formes, question de séduire les potentiels clients. Difficilement, quelques-unes ont donné leurs raisons ou leurs motivations. Selon elles, pour certaines filles et femmes qui se livrent au com-

merce charnel, leur situation remonte à leur jeune âge. Elles sont devenues accros au sexe, tout simplement à cause de la pauvreté qui ronge leurs familles. Parmi ces prostituées figurent des mères célibataires, des filles tant adultes qu’adolescentes à la quête d’un peu d’argent. C. B.est une jeune maman de 22ans que nous avons trouvée en pleine négociation avec un inconnu. Elle raconte les étapes de sa vie. « je n’ai pas étudié, j’ai quitté ma colline natale, il y a dix ans. Je vis avec mes trois amies .Pour manger et payer le loyer , nous devons nous prostituer.» Une autre femme dit que c’est sa propre mère qui l’ a arrachée du banc de l’école pour aller faire le travail de ménage dans une famille riche à Gitega , elle avait que 15 ans. « Comme nous étions une famille nombreuse, mes

Célébration de la journée internationale des droits des femmes à Gitega ce 9 mars 2020

parents ont jugé bon de m’envoyer chez une de leurs parentés travailler comme nounou. Un garçon avec qui nous vivions ensemble m’a engrossée et n’a pas reconnu par la suite l’enfant. Revenir à la campagne est devenu impossible à cause de l’hostilité de mes frères. » Elle dit qu’elle fait cela pour nourrir son enfant et payer le loyer.

Tout le monde est coupable Certaines personnes interrogées dans les quartiers crient à la dégradation des mœurs. Un chauffeur de taxi sous couvert d'anonymat, plaide pour une solution efficace: «Tous ces enfants qu’elles portent seront à leur tour des prostituées ou des bandits. Il faut que nous soyons

tous impliqués pour trouver une solution» Pour les autres, c’est la vie dure de la campagne qui pousse certains parents à envoyer leurs enfants chercher du travail afin de subvenir aux besoins de la famille. Ils proposent surtout d’appliquer des sanctions strictes envers les familles qui utilisent les enfants pour gagner de l’argent ainsi que leurs employeurs. « Les droits des enfants sont pour les riches ou des gens instruits. Dans la campagne un enfant est un capital dont il faut à tout prix profiter. Parfois on nous accuse de faire travailler les mineurs mais la responsabilité première revient à leurs parents qui les empêchent d’étudier», assure une dame qui a une domestique de 16 ans. Entre temps, ces prostituées sont exposées aux infections sexuellement transmissibles et autres maladies. Même en étant conscientes de cela certaines se prostituent sans protection, mais d’autres n’y vont jamais sans protection au préalable. Selon leurs propos, elles ont tout perdu depuis qu’elles ont été arrachées de l’école.

ANNONCE

ANNONCE DE RECRUTEMENT : EXPERT NATIONAL EN ECOLOGIE APPLIQUEE ET LIMNOLOGIE

Dans le cadre de la mise en œuvre du Projet « Lake Tanganyika Water Management (LATAWAMA) », BDI BDI180971T, financé par l'Union Européenne et dont la zone d’intervention est constituée des villes de Bujumbura (Burundi), Uvira (RD Congo), Rusizi (Rwanda), Kigoma (Tanzanie) et Mpulungu (Zambie) ; l'Agence Belge de Développement au Burundi (Enabel) souhaite recruter un Assistant Technique National- Expert en écologie appliquée et limnologie. Le projet a pour objectif d’améliorer durablement la gestion et le contrôle de la qualité des eaux transfrontalières du bassin du Lac Tanganyika. Le projet vise ainsi à appuyer l’Autorité du Lac Tanganyika (ALT), structure régionale regroupant le Burundi, la République Démocratique du Congo, la Tanzanie et la Zambie, dans son mandat et ses fonctions visant à promouvoir la protection et la bonne gestion des ressources en eaux du lac et de ses affluents. Le projet sera basé au Burundi, à Bujumbura, siège du Secrétariat de l’ALT, mais concernera, via des projets pilotes, une ville riveraine du lac dans chacun des quatre pays concernés. Le Rwanda est aussi impliqué dans ce projet via l’Autorité du bassin du Lac

Kivu et de la rivière Rusizi (ABAKIR) en raison de l’importance de l’affluent la Rusizi qui se jette dans le lac Tanganyika.

capacités des laboratoires partenaires, à analyser et résoudre des problèmes, à prendre des décisions et des initiatives.

Les candidats doivent remplir les conditions suivantes : Être de nationalité burundaise (Les ressortissants des pays d’intervention jouissant du statut de résident et ayant le permis de travail sur le territoire burundais, intéressés par ces postes et qui sont prêts à accepter les conditions de travail locales peuvent postuler) ; avoir un diplôme de master en Ecologie appliquée, limnologie, gestion ressources halieutiques, sciences de la vie ; une maîtrise du français et de l’anglais, une connaissance des langues locales des zones d’intervention constitue un atout ; une expérience de 3 ans minimum comme assistant technique en suivi écologique des eaux douces lacustres ; une connaissance spécifique du lac Tanganyika et de ses enjeux environnementaux constitue un atout ; avoir des compétences dans le suivi qualitatif des eaux douces, des capacités en termes de validation, d’interprétation des résultats et de rédaction des rapports techniques et scientifiques ; une maîtrise des méthodes et techniques analytiques ; des aptitudes à former et renforcer les

Les termes de références pour ce poste peuvent être téléchargés sur le site : www.enabel.be

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Les dossiers de candidature (CV, copies certifiées des diplômes, lettre de motivation, attestations de services rendus auprès des employeurs précédents, trois personnes de référence professionnelle, copie de permis de travail pour les candidats étrangers résidant au Burundi) seront adressés à Monsieur le Représentant Résident d’Enabel au Burundi et déposés en ligne via le site www.enabel.be ou envoyés à l'adresse électronique : recrutement. enabel.bdi@gmail.com, au plus tard le mercredi 25/03/2020 à 17h00 ; délais de rigueur. NB. Seuls les candidats remplissant les critères décrits dans les termes de référence seront invités au test. Pour toute question, veuillez contacter le Service des Ressources Humaines au 22 22 39 31.


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PUBLIREPORTAGE

Vendredi, 13 mars 2020 - n°574

Les femmes dans des métiers « d’hommes », mission possible

La culture, toujours une barrière ?

Soucieuse de l’intégration des femmes dans l’ingénierie et d’autres sciences appliquées, l’association des Femmes ingénieures actives pour le développement inclusif (FIADI) a organisé un atelier de sensibilisation.

V

endredi 6 mars, à l’Institut français du Burundi (IFB), de jeunes femmes activistes ou victimes d’exclusion, élèves, cadres du ministère de l’Education, chefs d’entreprises… ont répondu nombreux à cette séance de sensibilisation des femmes sur l’importance des métiers dits « d’hommes » et d’incitation des jeunes filles à embrasser les sciences appliquées. Une activité financée par l'ambassade de France au Burundi, représentée par Agnès Faure, attachée de coopération et ingénieure de formation. Organisé sous le thème « Ingénierie et genre au Burundi : des femmes dans des métiers d’hommes », dans le cadre de la journée internationale de la femme, cet atelier a été l’occasion d’écouter les témoignages des femmes ingénieures qui ont réussi, non sans difficultés, à intégrer le monde des sciences. Selon Jeannette Kaneza, représentante légale de l’association FIADI qui a organisé l’activité, l’objectif est d’accroître l’effectif des femmes dans des facultés d’ingénierie et d’autres sciences appliquées. Car le constat est que les filles sont très réticentes à embrasser ce domaine. L’effectif est très bas dans les universités. Il ne dépasse guère 8% sur un effectif d’environ 500 étudiants, d’après Mme Kaneza. Cet atelier vise aussi à encourager les femmes déjà ingénieures de persévérer, de rester fortes et de percer dans cette carrière « pleine d’opportunités ». Le grand défi pour l’ingénieure Jeannette Kaneza, les femmes ingénieures ne trouvent pas facilement de l’emploi. Les entreprises ou les particuliers ont peur de confier les chantiers à une femme, soi-disant qu’elle est incapable. « Mais c’est à nous de prouver que nous sommes capables. »

De gauche à droite, une femme ingénieure, une professeure d’université, le directeur exécutif de BBIN et le DG de Sogea Satom faisaient le panel de l’atelier.

professionnelle. Son déclic pour se lancer dans les sciences, le mot « énergie » qui la fascinait depuis son année terminale au secondaire. Elle obtient une chance de poursuivre ses études à l’étranger. « Là, je n’ai aucun doute, je dois faire le domaine des énergies renouvelables. » Elle embrasse alors le génie-mécanique. Une aventure loin d’être facile pour elle. A 18 ans, elle devait toucher un moteur, etc. « D’autres burundaises de mon âge ne savaient à peine qu’utiliser un tourne-vice… » Aujourd’hui, elle travaille dans une entreprise qui transforme les déchets en énergie combustible pour la cuisson. Elle doit toquer sur toutes les portes administratives pour demander du soutien et des autorisations d’exploitation, à la grande surprise de ceux qui l’accueillent. « Ils sont agréablement surpris d’accueillir une jeune femme pour ce genre de domaine. » Cette jeune ingénieure salue l’initiative des entreprises qui embauchent les femmes en priorité, comme Sogea Satom. « Les entreprises qui ne le font pas ratent un grand potentiel de profil et de croissance de leur entreprise », assure cette jeune entrepreneure. Claudette Ngendandumwe, l’une des panelistes dans cet

atelier, est une de ces réussites dans la carrière d’ingénierie en génie-civil. Alors seule fille dans sa faculté, elle a mené un combat difficile pour terminer son cursus académique et s’intégrer dans le monde professionnel. Mariée à un ingénieur aussi en génie-civil, elle a dû se cacher derrière son mari pour gagner sa vie. « Les clients changeaient

de mine quand ils apprenaient que c’est moi qui vais faire le plan, le suivi… Ce n’était vraiment pas facile. » Mme Ngendandumwe encourage les jeunes filles à se lancer dans les sciences. Surtout dans ce moment opportun où le monde entier parle de « genre ». C’est le moment propice pour les femmes de saisir cette opportunité.

Leila Kateferi, jeune ingénieure membre de FIADI, affirme que le chemin a été long pour y arriver.

La persévérance, la clé de la réussite Leila Kateferi est une jeune femme ingénieure en Géniemécanique et détentrice de master en énergie renouvelable. Membre de FIADI, elle partage son expérience estudiantine et

Femmes ingénieures, élèves, cadres du ministère de l’Education…ont participé à l’atelier.

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La paneliste Michelle Mukeshimana, professeure d’Université dans le domaine des sciences, explique que la principale cause de la réticence des femmes à embrasser les sciences, surtout l’ingénierie, est la façon dont ce domaine est conçu dans la société. Il est qualifié de masculin. Mais là n’est pas le grand problème pour cette informaticienne. Le grand défi est que la plupart de filles ne veulent pas s’engager, se battre et continuer. Elles abandonnent facilement. « Elles se disent que faire les sciences veut dire faire beaucoup d’études et perdre l’opportunité de se marier et avoir des enfants. » Mais l’on peut étudier après le mariage, témoigne-telle. Elle dit avoir laissé un bébé de 8 mois pour aller faire le doctorat à l’étranger. Cette enseignante en informatique parle de 4 femmes sur un effectif d’une trentaine dans sa classe, presque chaque année. Quant au Directeur Général de Sogea Satom, Diallo Alhassane, il affirme que son entreprise ne reçoit malheureusement pas beaucoup de demandes d’emploi de femmes. Son entreprise emploie 16% de femmes sur un effectif d’à peu près 600. Il fait savoir que l’objectif principal 2021-2025 de Sogea est de passer à 40 voire 50% de femmes dans l’entreprise. « Elles sont performantes. C’est plus fiable de confier une tâche à une femme. Car notre domaine demande beaucoup de responsabilité et beaucoup de qualité », reconnaît ce DG de Sogea Satom. Côté entreprenariat, Pierre Claver Nduwimana, directeur exécutif de la BBIN, se félicite d’un grand pas déjà franchi par les femmes dans l’entreprenariat. Sur 7 gagnants du premier prix du concours « Shika » sur l’entreprenariat organisé par la BBIN, trois sont des femmes. « Non, la culture ne constitue plus un obstacle pour les femmes à pratiquer l’ingénierie », rassure le conservateur de la culture burundaise, l’Abbé Adrien Ntabona. Il est vrai que dans le temps, il était interdit aux femmes de construire, de monter sur les toits des maisons, etc. Mais plus aujourd’hui, assure Abbé Ntabona. Il évoque un cas de chez lui, à Kiganda, où toutes les maisons ont été construites par une sœur religieuse. Née en 2018, l’association FIADI regroupe 16 jeunes femmes qui ont au moins un diplôme en ingénierie. Sa mission est de sensibiliser aussi les jeunes au banc du secondaire à embrasser les facultés de leur choix indépendamment de leurs parents.


ANNONCES

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AVIS D’APPEL D’OFFRES

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COMMUNIQUE DE RECRUTEMENT

La Représentation du Bureau de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) au Burundi lance, pour le compte des Agences du Système des Nations au Burundi, une invitation à soumissionner pour les services de Location salle à Bujumbura.

Dans le cadre de la mise en œuvre de ses projets, la Commission Episcopale Justice et Paix du Burundi (CEJP) voudrait recruter un Directeur des Programmes pour son Secrétariat Exécutif Permanent, sis à Bujumbura.

La date limite de dépôt des soumissions est fixée au vendredi 13 Mars 2020 à 12H00.

Le profil du candidat recherché peut être consulté au bureau du Secrétariat Exécutif Permanent de la CEJP sis à Rohero I, Rue de la Mission, Building de la Coordination de l’Action Catholique (communément appelé Journal Ndongozi).

Les sociétés et hôtels intéressés sont priés de se présenter au Bureau de la Représentation de l’OMS sis Boulevard de l’UPRONA (Tél : 22231247 & 22533400) pour retirer les dossiers complets relatifs au présent avis d’appel d’offres. Ces dossiers sont également disponibles sur le lien :

La date limite de dépôt des candidatures est fixée le 27 Mars 2020 à 16 heures au Secrétariat de la CEJP. Le candidat retenu devra être immédiatement disponible.

http://www.bi.undp.org/Annonces d’Achat - Référence: RFP/LTA/ SNU/001/2020 – OMS.

PROGRAMME DES NATIONS UNIES POUR LE DEVELOPPEMENT

AVIS D’APPEL DEMANDE DE COTATION N° RFQ/FM-BDI/05NM/2020 Dans le cadre de la mise en œuvre des Subventions du Fonds Mondial au Burundi, le PNUD lance une demande de prix pour les travaux de réhabilitation des magasins M3B, M4A et M4B de la CAMEBU, tels que décrits en détails dans les cahiers de charges. La présente demande de cotation est ouverte aux Entreprises établies au Burundi, spécialisées dans la construction/ réhabilitation d’ouvrages de Génie Civil et ayant au moins 3 ans d’expérience dans le domaine. Les offres en trois (3) lots distincts et indivisibles sont constituées comme suit : Lot I : Réhabilitation du Magasin M3B Lot II : Réhabilitation du Magasin M4A Lot III : Réhabilitation du Magasin M4B Les offres de prix devront être soumises jusqu’au Vendredi 20 mars 2020 à 10h l’adresse physique suivante : Coordonnateur de l’Unité de Gestion du Programme du Fonds Mondial (UGP/FM) Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD), Avenue des Patriotes, Quartier INSS, BP 1490 Bujumbura, Burundi Tel: (257) 22 30 11 00 Bujumbura Burundi

Ou à l’adresse électronique suivante : procurement.bi@undp.org Avec la mention en objet : « Offre pour la réhabilitation des magasins M3B, M4A et M4B de la CAMEBU - RFQ/ FM-BDI/05NM/2019 » Lot n°………. Les visites de site auront lieu du Lundi 9 au Mardi 17 mars 2020 aux horaires suivants : • Du Lundi au Jeudi : de 10h à 13h • Le vendredi : de 9h à 11h Pour les visites de site, veuillez contacter la CAMEBU aux numéros de téléphone suivants : 1. Tél : +257 79668497 (Demander George) 2. Tél : +257 79962495 (Demander Faustin) Le cahiers de charges et le dossier complet de la demande de cotation sont disponibles et peuvent être retirés (sans frais) au Secrétariat de l’Unité de Gestion du Programme Fonds Mondial (UGP-F) au PNUD (Bâtiment G). Pour tout renseignement complémentaire, veuillez envoyer un email aux adresses suivantes : A : abdou-latif.imam@unpd.org avec copie à : fatoumata.wangara@undp.org; nguessan.clement.kouakou@undp.org; christella.biraronderwa@undp.org

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Vendredi, 13 mars 2020 - n°574

L’Afrique et l’Union européenne: un partenariat pour l’avenir Par Josep Borrell et Jutta Urpilainen

L

e regard de l’Europe est de plus en plus tourné vers l’Afrique – mais c’est un regard nouveau, empli de l’ambition de hisser notre partenariat à un niveau supérieur. Nous voulons collaborer avec la jeunesse africaine, qui est déterminée à se construire son propre avenir, idéalement en partenariat avec d’autres. L’Union européenne veut s’assurer que les deux parties le feront ensemble: non pour, mais avec l’Afrique. C’est également l’approche que nous préconisons dans notre proposition de nouvelle stratégie globale avec l’Afrique. Cette stratégie se veut le point de départ d’un dialogue approfondi sur les priorités que nous partageons, dialogue dont la conclusion est fixée au sommet Union européenne-Union africaine qui se tiendra en octobre prochain. Lors de ce sommet, nous devrions nous accorder sur des résultats concrets à obtenir susceptibles d’améliorer l’existence des citoyens des deux continents. Le sommet devrait servir de catalyseur. Les nouveaux dirigeants de l’UE ont placé l’Afrique parmi leurs toutes premières priorités. Mme Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne, et M. Charles Michel, président du Conseil européen, sont allés en Afrique dans les semaines qui ont suivi leur entrée en fonction. La semaine dernière, nous nous sommes rendus en Mauritanie, au Burkina Faso, en Éthiopie et au Soudan.

Josep Borrell est haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité et vice-président de la Commission européenne.

– sont en train de transformer les deux continents. C’est pourquoi l’Afrique et l’Europe devraient défendre un modèle de coopération internationale basé sur un multilatéralisme fondé sur des règles, sur la liberté politique, sur la solidarité et sur la dignité humaine. L’inclusivité nous permettra d’exploiter tout le potentiel de nos citoyens, y compris les jeunes et les femmes. D’autres acteurs renforcent actuellement leur présence sur le continent africain. Ce qui distingue l’UE, toutefois, c’est sa volonté de placer le développement humain et la durabilité au cœur de sa vision, en défendant

le droit de chacun de façonner librement sa propre existence et de voir ses droits protégés. Les progrès en Afrique sont réels, mais de nombreux problèmes demeurent, qu’il s’agisse de la persistance de la pauvreté, de conflits ou du fait que les droits démocratiques sont menacés. Le doublement attendu de la population africaine offre de réelles perspectives, mais impose aussi d’agir. Nous devons faire preuve d’ambition, mais également de réalisme, en nous concentrant sur ce qui fonctionne. Le facteur clé qui nous incite à remodeler notre partenar-

iat n’est pas notre proximité géographique, notre passé commun ou les liens personnels que nous avons tissés. Les véritables moteurs de notre partenariat, ce sont notre avenir commun et les intérêts que nous partageons. Quelle est l’essence d’un partenariat UE-Afrique tourné vers l’avenir? Le 9 mars 2020, la Commission européenne a présenté sa proposition de stratégie de partenariat avec l’Afrique. Celleci se fonde sur les éléments constitutifs suivants: 1. La transition verte et l’accès à l’énergie. La crise climatique rend impérative une action ambitieuse en faveur du climat.

De son côté, l’Afrique change elle aussi, portée par son dynamisme économique et par la population la plus jeune au monde. L’intégration régionale progresse également: avec la zone de libreéchange continentale africaine, le continent ambitionne de créer la plus vaste zone d’échanges commerciaux depuis la fondation de l’Organisation mondiale du commerce. Notre continent cousin est en effet, à bien des égards, le continent de l’avenir: qu’il s’agisse de changement climatique, de révolution numérique, de croissance durable, d’économie équitable ou de sécurité, c’est en Afrique que seront prises les décisions importantes pour le monde. Hélas, le multilatéralisme se trouve mis à mal à l’heure même où nous en avons le plus besoin. Les deux plus grandes évolutions qui façonnent aujourd’hui notre monde – le changement climatique et la révolution numérique

Mais la transition verte est aussi une nouvelle stratégie de croissance. Œuvrons ensemble à la création d’emplois verts dans les énergies renouvelables et l’urbanisation durable. 2. La transformation numérique. L’Afrique adhère déjà pleinement à la révolution numérique. Il suffit de voir les changements générés par les systèmes de paiement en ligne. Donnons à l’Afrique la possibilité de brûler les étapes et d’utiliser l’économie numérique comme un vecteur de croissance économique. 3. Croissance durable et emplois. Le dynamisme économique africain est une réalité. En travaillant main dans la main, nous pouvons libérer le potentiel humain, en particulier des jeunes et des femmes. La zone de libreéchange continentale africaine peut changer la donne. 4. La paix et la gouvernance. Le dernier sommet de l’UA avait pour objectif de faire taire les armes. Sensible aux efforts déployés par l’UA, l’UE est disposée à en faire davantage. La nouvelle facilité européenne pour la paix nous permettra de progresser encore ensemble. Pour qu’une paix soit durable, elle doit être ancrée dans les dynamiques politiques locales. 5. Migration et mobilité. Nul ne saurait contester que la migration a pris des proportions inédites, surtout au sein du continent africain. Les évolutions démographiques et économiques donnent à penser qu’elle continuera d’occuper une place considérable dans les relations entre l’Europe et l’Afrique. Nous avons besoin d’une approche globale et équilibrée, fondée sur le partenariat et la responsabilité conjointe. Il y a lieu, avant tout, que l’Afrique et l’UE soient des partenaires pour le multilatéralisme, défendant une vision durable de la manière d’organiser les sociétés et l’ordre international, sur la base des droits de l’homme et des objectifs de développement durable, et mobilisant la jeunesse. Et ce d’autant plus que ces principes sont aujourd’hui ouvertement remis en question.

Jutta Urpilainen est commissaire européenne aux partenariats internationaux.

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Nous sommes prêts à faire un bond en avant dans les relations entre l’Europe et l’Afrique. Les deux parties devront investir en ce sens. Du côté européen, nous sommes ambitieux et très désireux d’examiner avec nos partenaires africains la manière dont nous pouvons façonner ensemble notre avenir commun.


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