IWACU 522

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IWACU N°552 – Vendredi 11 octobre 2019 – 2000 Fbu Quartier INSS, Avenue Mwaro n°18 Bujumbura - Burundi Tél. : 22258957

CNARED

Mission accomplie?

ÉDUCATION 1ère année de l’école fondamentale : à quand les nouveaux manuels ?

AU COIN DU FEU P.8

Avec Teddy Mazina

SANTÉ P.10

Troubles mentaux : des chiffres inquiétants

P.11


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LA DEUX Editorial

Vendredi, 11 octobre 2019 - n°552

En coulisse

Bumenyi, un projet pour l’utilisation responsable des réseaux sociaux « Juger est un métier » Par Léandre Sikuyavuga Directeur des Rédactions

A

tort ou à raison, la justice burundaise a été vilipendée, diffamée, décriée surtout par ceux qui n’arrivent pas à avoir gain de cause. Des expressions défaitistes sont devenues monnaie courante : « deux poids deux mesures, une justice à deux vitesses, une justice à la solde de l’exécutif… » Avec l’intolérance politique qui commençait à prendre des allures inquiétantes, les « victimes » la qualifiaient de laxiste, d’absente, de complaisante. La décision du tribunal de grande instance (TGI) de Muyinga vient de redorer quelque peu le blason terni de cette institution, pilier de la démocratie. La sentence rendue ce 8 octobre par ce tribunal qui a condamné à perpétuité quatre personnes poursuivies pour « meurtre » d’un membre du parti CNL de la colline Kwitongo, en zone Rugari, a été saluée par le public .Entre autres commentaires : « Les juges viennent d›appliquer la loi et de dire le droit ; la magistrature vient de s’habiller l’indépendance, la neutralité et la compétence,… » La population estime qu’avec un tel verdict, les tensions et les violences politiques entre les militants des partis adverses vont sensiblement diminuer. « Il faudra penser à deux fois avant de faire du mal à son opposant politique qui n’est nullement un ennemi à abattre. » J’ai entendu ce genre de propos à plusieurs reprises. A l’aube des élections, l’exemple du Tribunal de grande instance de Muyinga devrait servir d’exemple à d’autres cours et tribunaux sur toute l’étendue de la République. Noël du Fail, juriste et écrivain français du XVIe siècle, donne sa définition du bon juge : « Il est d’abord un homme intègre, qui ne se laisse influencer ni par le statut social des parties, ni par le souci de l’opinion publique, ni même par l’appât du gain. » Pour cet écrivain, il doit rester neutre envers toutes personnes, de quelque grade, dignité, qualité et conditions qu’elles soient. Ainsi, les hommes et les femmes de la loi auront à résister aux sollicitations des politiques, à se séparer de l’Exécutif dont la tendance est de s’immiscer dans le fonctionnent de leur institution, empiéter sur son pouvoir. L’impunité sera découragée, l’expression « Je me sers du juge quand j’en ai besoin » bannie. Et surtout ils auront montré, comme le défend jalousement Robert Badinter, que « juger est un métier. »

En hausse

Sur le vif

Selon le ministre de la Jeunesse, des Postes, des Technologies de l’Information et de la Communication, ce projet, lancé lundi 7 octobre, vise le renforcement des capacités de plus de 10 mille jeunes et administratifs à la base sur l’utilisation responsable et avisée des réseaux sociaux.

Le Tribunal de Grande Instance de Muyinga,

P

our avoir condamné à la prison à perpétuité quatre personnes impliquées dans l’assassinat d’un membre du parti CNL, en août dernier, dans la zone Rugari, commune Muyinga.

Mandat d’arrêt pour Saido Berahino annulé Le mandat d’arrêt émis contre l’international footballeur burundais Saido Berahino a été annulé, mercredi, 9 octobre. Le tribunal de Willesden de Londres avait lancé, la veille, ce mandat pour le refus de comparaître devant cette cour. Il est poursuivi pour conduite en état d’ébriété.

Une commission pour restructurer la filière café Cette annonce a été faite par le ministre de l’Environnement, Agriculture et Elevage, lors d’une plénière à l’Assemble Nationale, mardi 8 octobre. Il a fait savoir que le gouvernement du Burundi veut se réengager dans la filière café pour redynamiser ce secteur, après 28 ans de privatisation.

Directeur des Rédactions : Léandre Sikuyavuga Directeur adjoint des Rédactions : Abbas Mbazumutima Secrétaire de Rédaction : Guibert Mbonimpa Rédaction Politique : Agnès Ndirubusa Economie : Pierre-Claver Banyankiye

En baisse

Les assassins de Jean-Marie Vianney Rugerinyange, ancien directeur au ministère du Sport et de la Culture,

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our l’avoir tué et enterré chez lui.

Sécurité : Fabrice Manirakiza, Edouard Nkurunziza Droits de l'Homme et Justice : Félix Haburiyakira Société : Clarisse Shaka, Jérémie Misago Environnement : Rénovat Ndabashinze Sport et Santé : Hervé Mugisha Culture : Egide Nikiza

ANNONCE

Equipe technique : Danny Nzeyimana, Ernestine Akimana, Aubin Hicuburundi, Anaïs Hashazinka, Térence Mpozenzi

NOTICE TO PROSPECTIVE BIDDERS REQUEST FOR PROPOSALS (RFP)

Karire Products Limited seeks to establish a pilot production facility, which will be gradually scaled up for processing and production of selected Traditional Medicinal plants. The center will be equipped with machinery and tools appropriate for modern Medicinal plants processing. The experts of the center will work on product development and share knowledge with community groups. The center will develop its services to become an Agro-Industrial Park aiding the Medicinal plants processing industry of Burundi. Request for Proposals (RFP) for the: Supply, delivery and installation of Complete Set of an Essential Oil Distillation Equipment for a project funded through icipe’sBioInnovate Africa Programme Phase II. Submissions must be deliveredat the Karire Products LimitedTender Box on or before 20th October 2019 at 11:00 hrs., East Africa Time. Physical address: Rohero 2, Avenue Mugamba No. 11, Bujumbura - Burundi Email Cariton.Kubwabo@rogers.com and karireproducts2016@yahoo.com Please go to the following website for more information, and for the application guidelines. Link: https://bioinnovate-africa.org/tender-for-supply-of-essential-oil-disstillation-equipment /

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Un chiffre

248 Est le nombre des réfugiés répartis dans 91 ménages rapatriés de la Tanzanie pour cette semaine, mardi 8 octobre

Source : Ministère de l’Intérieur Une pensée

« Persécuter un homme en politique, ce n’est pas seulement le grandir, c’est encore en innocenter le passé. » Honoré de Balzac


L'ÉVÉNEMENT

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Ils sont venus, ils ont vu, ils sont repartis « Veni, vidi… », « Je suis venu, j’ai vu… » Mais à l’instar de Jules César ils ne diront pas qu’ils ont « vaincu ».

Des discussions qui ne datent pas d’hier

S

amedi 5 octobre. Sous le soleil ardent de l’aéroport international Melchior Ndadaye, deux opposants en exil foulent le sol burundais après des années d’absence. Il s’agit du secrétaire exécutif du Cnared, Anicet Niyonkuru et Mamès Bansubiyeko. Les réseaux sociaux s’enflamment. Ils sont plusieurs à s’imaginer que les deux politiques rentrent au pays. Et de leur côté, ils entretiennent le flou, refusant de parler à la presse. Des bribes sorties de la bouche de M. Bansubiyeko, on apprendra que c’est une visite du pays comme tout Burundais peut le faire. Le président du parti FNL, Jacques Bigirimana les attend sur les lieux et les embarque à bord de son convoi sous bonne escorte policière. Ce n’est que lundi que la nouvelle tombe (par Iwacu). Les deux politiques ne sont pas juste « rentrés au pays ». L’affaire est plus complexe, les deux politiques sont des émissaires de la coalition de l’opposition en exil le Cnared. Ils ont pour mission de finaliser les tractations en vue de préparer le retour des autres membres de la plateforme. « Pour le moment, il s›agit juste de parler avec les dirigeants du pays pour préparer le retour du plus grand nombre de mes col-

Les émissaires du Cnared, à Bujumbura, pour organiser le retour de la plateforme.

lègues qui sont encore à l›extérieur. Il faut que je rentre avec tous mes collègues,» a annoncé le chef de la délégation, Anicet Niyonkuru. Une information confirmée par l’assistant du ministre de l’Intérieur. Tharcisse Niyongabo dit s’être entretenu avec les deux émissaires. Ils sont en mission de reconnaissance, pour s’enquérir de la situation qui prévaut dans le pays, visiter certains endroits, voir quelques dirigeants. « Nous les avons sensibilisés au retour ».

Les mandats d’arrêt posent problème Les deux politiques sont donc au pays jusqu’au 11 octobre, date de

la fin de leur mission. Ils comptent par la suite, retourner à Bruxelles pour rapporter à la coalition ce qui est ressorti de la mission. Jusque-là, les tractations en cours bloqueraient sur la question de la levée des mandats d’arrêt émis contre 32 opposants politiques, de figures de la société civile ainsi que de journalistes burundais. Les opposants poursuivis par la justice qui veulent rentrer au pays craignent d’être cueillis par la justice dès leur arrivée et finir dans la case prison. Ils exigent des garanties. Tharcisse Niyongabo tente de tranquilliser. « Cela ne veut pas dire que dès qu’ils arriveront au

Burundi, ils seront directement incarcérés. Cela dépend des crimes qu’ils ont commis. C’est la justice qui jugera après avoir entendu ces personnes ». En clair, Gitega campe sur sa position : ne pas amnistier ceux qui sont poursuivis par la justice et arrondir les angles. Une équation difficile, selon une source proche du dossier. Le « deal » serait de permettre à certains, considérés comme « inoffensifs », de rentrer et leur demander de répondre devant la justice qui serait prête à jouer le jeu. Déclarer qu’il n’y a pas matière à poursuite et lâcher l’affaire. Une parade qui est loin de les rassurer.

Les échanges secrets entre les deux parties ont eu lieu à plusieurs reprises. La dernière en date est la réunion du 30 août au 2 septembre à Nairobi au Kenya. La délégation dirigée par l’ombudsman rencontre celle du Cnared pour étudier la même question : le retour de l’opposition en exil. La rencontre aboutira à un consensus sur les thématiques abordées. Une réunion est prévue à Bujumbura, le 18 septembre 2019. Objectif : aboutir à la signature d’un mémorandum. Entre temps les échanges de Nairobi sont dévoilés à la presse, Gitega fait marche arrière. L’ombudsman est obligé de sortir un communiqué pour annoncer qu’il n’a pas été mandaté par le pouvoir en place. La position du Cnared est très claire : cette coalition de l’opposition en exil veut rentrer au pays pour participer aux élections de 2020. Une décision mûrie au cours d’une rencontre du directoire de la plateforme du 2 au 4 août 2019. « Nos militants au pays ont décidé qu’ils iront voter malgré tout,» s’est justifié la plateforme de l’opposition en exil à cette occasion. Pour lui, il est hors de question de faire un autre cadeau au Cndd-Fdd avec un nouveau boycott. Il faut à tout prix essayer de récupérer son électorat laissé à lui-même. Agnès Ndirubusa

La CFOR s’en mêle L

a coalition des forces de l’opposition, CFOR a sorti un communiqué pour dénoncer les tractations entre Gitega et le Cnared. Il faut peut-être rappeler que cette nouvelle coalition a pour membres principaux ceux qui ont claqué la porte du Cnared. Elle est créée le 9 septembre 2019, et très vite, elle appelle au boycott du prochain scrutin. Dans le communiqué sorti 9 octobre, cette coalition insiste : les échanges qui se font à Bujumbura ne concernent pas toute l’opposition en exil. Pour la CFOR, le Cnared veut faire croire qu’il regroupe la majorité de l’opposition en exil. Il n’a pas été

mandaté pour négocier quoi que ce soit auprès du régime. « La CFOR considère cette approche comme une escroquerie politique. Elle ne sera pas liée par une compromission issue de ces négociations. Ils n’ont aucun mandat pour négocier l’annulation de ces mandats d’arrêt fantaisistes qui en aucun cas ne peuvent servir de monnaie d’échange pour l’abandon de la lutte pour le rétablissement de l’Accord d’Arusha». La nouvelle coalition demande plutôt des négociations inclusives. A.N.

Un rapprochement « significatif » Plusieurs observateurs parlent déjà d’un pas « significatif » entre les deux protagonistes. Gitega semblait frileux à admettre que des discussions avaient lieu avec l’opposition. L’ombudsman burundais s’est même fendu d’un communiqué lorsque la réunion secrète de Nairobi a été médiatisée. Il a nié avoir représenté le gouvernement, évoquant une initiative personnelle. La communication du porte-parole du ministère de l’Intérieur prouve que le gouvernement assume maintenant les échanges avec ses protagonistes.

Par ailleurs, que ces discussions n’aient pas lieu dans un terrain neutre, mais à Bujumbura semble conforter la certitude d’un rapprochement significatif. Sans l’aide de la médiation de la sous-région, restée lettre morte. Durant les deux ans du processus, les protagonistes ne se sont jamais parlé face à face à l’intérieur du Burundi pour débattre des vraies questions. Reste à savoir si les deux parties vont parvenir à un accord et, si accord il y a, s’il va être mis en application. Gitega est connu pour ses revirements.

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Néanmoins, les enjeux électoraux sont énormes. Par ailleurs, le pouvoir a besoin du retour des opposants pour mener à bien sa campagne du retour en masse des réfugiés burundais. Les chiffres de ceux qui rentrent sont loin de satisfaire. Le gouvernement tablait sur le retour de 2 mille réfugiés par semaine grâce à son accord bilatéral avec la Tanzanie. Pour que l’accord réussisse, Gitega est appelé à plus de flexibilité.

A.N.


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POLITIQUE

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Vision flou du ‘’visionnaire’’ en chef

T

el Zeus descendant de l’Olympe pour vivre un temps parmi les mortels, le secrétaire national des ligues affiliées au Cndd-Fdd a daigné aller à la rencontre des siens pour apporter sa pierre à l’édifice. Dimanche 29 septembre, trois jours après le bilan sur l’état actuel du climat politique au Burundi. Dans le sillage de la déclaration d’un cessez-le-feu à l’intolérance politique, jeudi 22 août. «Vous les jeunes, tenez-vous bien, il ne faut plus qu’il y ait de ces rapports que vous avez malmené des militants du CNL. Vous êtes des responsables dans ce pays. Vous êtes les maîtres de cette forêt, vous êtes des lions, des vaillants. Sachez alors qu’un lion ne mange pas un chat, un rat». Son discours est un cas d’école de mélange de genres. Rappel à l’ordre - un crédit implicite accordé aux rapports épinglant les Imbonerakure comme auteurs des violations graves des droits de l’Homme -, mobilisation de ses troupes en flattant l’ego. Et par la même occasion, il

affuble les jeunes opposants de noms d’animaux perçus comme inoffensifs. Pour mieux souligner leur infériorité. Sans pour autant franchir la ligne rouge (il n’a pas parlé de chien) de la connotation péjorative dans la culture burundaise. Cette quête d’apaisement - les autorités locales en première ligne - montre ses limites, le précepte évangélique ‘’si quelqu’un te frappe sur la joue droite, tends-lui aussi l’autre’’ n’étant pas à l’ordre du jour. «Il ne faut pas vous laisser marcher sur les pieds. Il faut parer à toute éventualité, montrer du muscle, au besoin, rugir comme le lion, les effrayer». Dès lors que l’on a le pouvoir de faire quelque chose, en l’occurrence créer « l’effroi », la tentation de le faire, dans certaines circonstances, devient irrépressible. Un calcul politique assumé. Sylvestre Ndayizeye demande aux Imbonerakure de ne plus s’en prendre aux opposants. « Il vous faut assurer leur sécurité pour qu’ils puissent vivre. Parce que si vous ne le faites pas, il vous

sera difficile de les convaincre à adhérer à notre parti». Gommer les aspérités qui entachent l’image du parti de l’Aigle est le maître mot à mesure que l’on s’approche de la dernière ligne droite, les premiers scrutins étant prévus le 20 mai 2020. Ce responsable du parti présidentiel prodiguera des conseils à ses ouailles : «Il faut être des pacificateurs, rassurez les membres du CNL, du Frodebu et de l’Uprona. Ce pays nous appartient à nous tous. Nous avons déraillé, il ne faut plus retomber dans les erreurs du passé.» Son mea culpa, cette hauteur de vue et ses interférences brouillent les cartes. Seule la leçon de morale de la fable du scorpion et de la grenouille donne de la cohérence à l’ensemble. Un scorpion supplie une grenouille de le transporter sur l’autre rive. Au milieu de la rivière, le scorpion lui porte le coup funeste. A peine le batracien demanda-t-il la raison de sa piqûre, que le scorpion rétorqua : « C’est dans ma nature. » Guibert Mbonimpa

Le secrétaire national des ligues affiliées au Cndd-Fdd sonne la fin de la récréation.

ÉCONOMIE

Quand le «made in Burundi» peine à s’écouler L’association des jeunes artistes, maquettistes et plasticiens du Burundi (Ajamap) a lancé, lundi 7 octobre, la 2e édition de l’exposition nationale des produits artisanaux. Plusieurs participants estiment que le secteur artisanal est confronté à de nombreux défis.

C

haussures en cuir, corbeilles, paniers, sacs, tableaux pour décors, … la liste n’est pas exhaustive, sont quelques-uns des produits qui seront vendus au cours de la 2ème édition de l’exposition nationale des produits artisanaux « made in au Burundi ». Sur les 150 stands prévus pour l’exposition, à peu près 95 sont fonctionnels. Aaron Hatungimana, indique le président de l’Ajamap. Certains des jeunes attendus n’ont pas trouvé de moyens pour y participer. « La plupart provient des provinces éloignées de la capitale». M. Hatungimana rappelle que le but de cette exposition est de rassembler tous les jeunes artistes et entrepreneurs afin de leur donner une plateforme de promotion de leurs produits. « Ça sera une occasion pour eux de collaborer et de partager des expériences afin

qu’ils puissent se développer et s’autofinancer». Et de déplorer : « La commercialisation des produits made in Burundi est peu développée par rapport aux autres pays de la région Est africaine ». Aaron Hatungimana, souligne qu’ailleurs, les artistes «sont plus instruits et développés ».

Les artistes appelés à travailler en association Cette faible commercialisation est due, selon lui, notamment au manque d’engouement des Burundais pour les produits au pays. En outre, regrette-t-il, la matière première nécessaire pour la fabrication est souvent coûteuse par rapport aux moyens des artistes. Entre autres solutions aux défis le président de l’Ajamap appelle le gouvernement à exonérer l’importation de la matière première que les artistes utilisent.

Un des stands des chaussures.

Aimable Nkunzumwami, Directeur général de la Culture et des arts au ministère de la Culture et des Sports salue cette activité. . «Cette exposition est une occasion importante pour faire écouler les produits fabriqués au Burundi ». Et il en profite pour inviter les s artistes à travailler en association.

Bernadette Nzokira, fabrique des colliers et des couverts de table. Elle estime que cette exposition sera une opportunité de faire connaître ses produits. De son côté, Isaïe Ndayihimbaze, artisan des vases à partir du plastique et du sisal, se dit désormais chanceux. Il espère accéder à un vaste marché pour

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l’écoulement de ses produits. La 2ème édition de l’exposition nationale des produits made in Burundi a été organisée par l’Ajamap en partenariat avec le conseil pour l’éducation et le développement (Coped). L’exposition se tiendra durant 12 jours, du 4 au 16 octobre. Mariette Rigumye


ÉCONOMIE

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« La quantité de devises a diminué de 90% dans les bureaux de change» Lors d’une rencontre d’échange sur la nouvelle réglementation de change, ce mercredi 9 octobre, les tenanciers des bureaux de change déplorent la diminution drastique des devises sur le marché depuis sa mise application.

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es devises que nous vendons proviennent des touristes, de ceux qui viennent des missions ou reçoivent l’argent de l’étranger. Avec les nouveaux taux, ils sont désormais réticents et nous traitent d’escrocs. La quantité de devises a diminué de 90% », indique Alexandre Nsabimana, représentant de l’association des bureaux de change au Burundi (ABC). Il fait savoir que par le passé, la Banque de la République du Burundi (BRB) mettait à la disposition des bureaux de change une certaine somme de devises, mais pour le moment, aucun centime. « Nous ne nous contentons que des miettes qui viennent à compte-gouttes». Oscar Ndayikengurukiye, un tenancier du bureau de change, abonde dans le même sens. Il déplore que la plupart des cli-

ents rebroussent chemin après l’annonce du taux officiel. Je passe toute une journée sans même un seul dollar dans mon coffre. Rien n’est frustrant que de ne rien servir à son client. Il faut que cette situation change». Ces cambistes demandent au gouvernement et à la BRB de prendre des mesures d’accompagnement pour débloquer la situation. « Nous sommes prêts à respecter la loi. Il faut que la BRB fournisse des efforts pour les rendre disponibles. Cela permettra de combattre la spéculation, mais aussi de sauver le business de ceux qui sont sur le point de fermer ». Un spécialiste du secteur explique que le taux de change applicable doit répondre à la loi de l’offre et de la demande. Sinon, il ne reflète pas la réalité économique. « La carence de

Alexandre Nsabimana. « La BRB mettait à la disposition des bureaux de change une certaine somme de devises, mais pour le moment, aucun centime.»

devises entraîne l’augmentation du taux de change et empêche la Banque centrale d’intervenir efficacement, en cas de besoin. Pour contrôler le marché de change, la Banque centrale doit avoir des

devises en quantité suffisante. » Selon la nouvelle réglementation de la Banque centrale, tous les bureaux de change doivent appliquer le taux officiel et la marge bénéficiaire est de 15%.

Celui qui passe outre s’expose à des sanctions sévères allant de la confiscation de toutes les sommes dont il dispose à la fermeture. Jérémie Misago

DROITS DE L'HOMME

Atelier bilan des travaux du ministère des droits de l’Homme : «Le travail rendu est OK» Mardi 8 octobre, le ministre des Droits de la personne humaine, du genre et des affaires sociales s’est estimé satisfait du bilan trimestriel de la mise en œuvre du plan d’action gouvernemental en matière de respect des droits humains.

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ans une ambiance feutrée d’une salle de réunion, M. Nivyabandi a dressé un état des lieux positif quant au travail de collecte de données effectué par les Coordinateurs provinciaux des centres de développement familial et communautaire (CDFC). Cette activité de terrain dresse un aperçu général de la situation des droits de l’Homme dans le pays. Selon M. Nivyabandi, le taux de réussite de ce plan d’action avoisine les 95%.

En coulisse, des coordinateurs se plaignent L’autocongratulation du ministre sur le succès du projet n’est pas du goût d’un des coordinateurs provinciaux rencontré lors de la pause-café. Bernard* est un homme volubile qui, s’étant d’abord rassuré de l’anonymat de son témoignage, a confié qu’à l’instar du manque de moy-

Martin Nivyabandi, Ministre des droits de la personne humaine, du genre et des affaires sociales.

ens alloués aux CDFC (ce que le ministre a reconnu lui-même) un

problème de coordination existe entre le ministère et les CDFC qui

n’auraient accès à aucun plan d’action élaboré à leur endroit par les services du ministère. «Nous n’avons aucun plan d’action du ministère et cette déconnexion entre le sommet et la base bloque tout». Pour preuve, un certain nombre de rapports provinciaux ont été invalidés au cours de l’atelier par les services du ministère. Au moment de la reprise de la conférence, Lucien*, un coordinateur approché, a révélé que les acteurs et actrices sur terrain ont reçu pour consigne de ne pas communiquer sur leurs activités aux journalistes et a orienté Iwacu vers les services du ministère «pour avoir toutes les réponses». Interrogé lors de la séance de questions accordée aux journalistes, le ministre a défendu que le plan d’action de ces

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activités a été mis à la disposition du public par le ministère qu’il préside. Il a ajouté que «les coquilles» observées dans les données collectées et présentées dans bon nombre de rapports sont dues à un déficit de «capacités d’action» de coordinateurs affectés aux CDFC. A la fin de la rencontre, Iwacu a demandé l’accès aux rapports détaillés au niveau de chaque province qui n’ont pu lui être fournis par les services du ministère. En lieu et place, la rédaction s’est procurée auprès de ces services une synthèse générale des rapports provinciaux présentés. A la lire, elle épouse la bonne appréciation ministérielle du jour: «Tout est OK.» Alphonse Yikeze


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DROITS DE L'HOMME

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Torture d’Yvette Iradukunda

Interdit de compatir ? A la suite de la médiatisation du passage à tabac d’Yvette Iradukunda par l’administrateur de la commune Mugongomanga, deux hommes de la zone Ijenda se disent persécutés. Ses parents ont été également appréhendés. Ils seraient accusés d’avoir dénoncé cette torture. Iwacu s’est rendu à Ijenda.

L

a compassion. C’est le ‘‘crime de lèse-majesté’’ dont seraient victimes deux hommes d’Ijenda. Ils ont manifesté sans faux-fuyant ce sentiment à Yvette Iradukunda, la fille violentée, il y a deux semaines, par Diomède Ndabahinyuye, l’administrateur communal de Mugongomanga. D’abord, Aimable Nkurikiye. Ce sexagénaire n’a pas mâché ses mots, lundi 7 septembre, lors de la réunion communale de sécurité. Alors que des plaintes quant à cette torture étaient sur toutes les lèvres à Ijenda, la question s’est invitée dans cette réunion tenue par l’administrateur. Les différentes prises de parole à propos sont passées du simple démenti aux accusations de diffamation, de calomnie, de médisance envers l’autorité communale. Ceux qui avaient un avis contraire, la plupart des participants, se sont abstenus de s’exprimer, terrorisés, devant la personne de l’administrateur. L’intervention d’Aimable Nkurikiye, à l’issue de la réunion, sera une surprise totale. Comme pour parler au nom de la “masse silencieuse”, il s’est inscrit en faux contre les positions antérieures. Pourquoi ne m’accuse-t-on pas, ou le commissaire communal ou toute autre personne? Si ce sont des diffamations, avec toute votre autorité, pourquoi ne traduisez-vous pas les auteurs devant la justice? C’est qu’il y a anguille sous roche, a finalement conclu Nkurikiye, sous un tonnerre d’applaudissements dans la salle. Avec les applaudissements, il se sentait alors fier d’avoir dit la vérité. L’administrateur a alors dénoncé une ‘’imposture’’ de la part de son administré. «Celui qui relaie l’injure, injurie luimême », a-t-il lâché. Quatre jours plus tard, il paiera son impudence. Avant d’être libéré, il sera interrogé par les services de renseignement en province Bujumbura sur ses ‘’calomnies’’ envers l’administrateur. Et d’être mis en garde : «Monsieur, vous mourez de votre langue, de vos paroles. Vous laisserez orphelins vos enfants». Pour ce vieil homme, la vie de tout humain se trouve entre les mains de Dieu. «Je ne tairai jamais la vérité». Aimable Nkurikiye se dit confiant envers les services de renseignement. «Ce sont

Jean Claude Ndagijimana et Aimable Nkurikiye se disent pourchassés.

des hommes intègres. Je ne crois pas qu’ils puissent traiter injustement un innocent».

«Détenu pour être soupçonné d’avoir appelé les médias » Quant à Jean Claude Ndagijimana, il est également arrêté vendredi, alors en pleine réunion du mouvement Scout. Emmené manu-militari dans les cachots du SNR en mairie de Bujumbura, il est relâché, le lendemain, après être interrogé sur sa collaboration avec les médias, essentiellement Humura et Inzamba, visant à salir l’administrateur. Selon les témoignages à Ijenda, son dossier est aussi lié à l’affaire Yvette. Des sources concordantes rapportent que, lors de

l’arrestation de Ndagijimana, un après la torture, ce jeune homme chauffeur de l’administrateur, s’est rendu au chevet d’Yvette en même temps patron du Iradukunda alors à l’hôpital. SNR en commune Des membres de la «Il n’y a pas Mugongomanga, CNIDH sont arrivés aurait revendiqué un peu après lui. de raison de des reportavoir commans’acharner contre Ensuite, ers d’un médium dité l’arrestation. moi. Je suis local sont arrivés. «Il travaille avec Le chauffeur de les médias qui terapolitique» l’administrateur nissent l’image de notre commune en qui avait suivi s’attaquant à l’administrateur», le mouvement, selon ces aurait-il expliqué. Probable, con- témoignages, auraient alors fie Jean Claude Ndagijimana, cet mal interprété les visites. «Il a homme était dans le véhicule qui cru que c’est Jean Claude qui a m’a embarqué pour Bujumbura appelé les médias et le CNIDH mairie. dans le but de salir l’autorité de Ces sources confient que le l’administrateur». Or, confie Jean différend entre Ndagijimana et Claude Ndagijimana, je ne leur l’administrateur est né quelque ai jamais parlé. « Quand ils sont peu auparavant. D’après elles, arrivés, je suis d’ailleurs sorti ».

Yvette Iradukunda, la victime de l’administrateur communal, à l’hôpital après son passage à tabac.

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La situation s’est alors aggravée avec la médiatisation de la torture. Jean Claude Ndagijimana dit craindre pour sa vie. Il demande que sa sécurité soit assurée. «Il n’y a pas de raison de s’acharner contre moi. Je suis apolitique». Et de demander au SNR qu’il lui remette sa carte d’identité. «Nous avons porté le dossier au ministère de la Justice…» L’acharnement contre les dénonciateurs de la torture d’Yvette Iradukunda ne fléchit pas. D’après des sources de la commune Rusaka en province Mwaro, sa commune natale, ses parents ont été arrêtés, jeudi 10 octobre vers 2h du matin, par des policiers de Mugongomanga. «Ils ont été emmenés on ne sait pas où. Sur place, ces agents de police les ont accusés de porter atteinte aux institutions». Iwacu a contacté Diomède Ndabahinyuye pour s’exprimer sur ses allégations. Au lieu de répondre, il a menacé : «Vous regretterez ce que vous avez fait. Vous avez relayé de fausses informations.» Sixte Vigny Nimuraba, président de la CNIDH, soutient avoir enquêté sur ledit acharnement. Il confie n’avoir pas trouvé de lien avec la torture d’Yvette Iradukunda. En revanche, les enquêtes de sa commission au sujet de cette torture se sont avérées vraies. «Nous avons porté la question au niveau du ministère de la Justice et du parquet général de la République », assure-t-il, avant d’ajouter : «Ils ont promis de trancher équitablement le dossier sans considération du statut de l’auteur du crime, pourvu que la famille de la victime porte plainte.» La commission nationale indépendante des droits de l’homme(CNIDH) se dit disposée à suivre de près l’interpellation des parents de la victime. Le dossier de la torture d’Yvette Iradukunda remonte au dimanche 22 septembre. Elle a été tabassée par l’administrateur Ndabahinyuye sans motif apparent. Iwacu a mené une enquête sur ce cas et s’est entretenu avec la victime et différentes autres sources. Parmi lesquelles, les parents de la victime qui demandaient que justice soit faite. Au moment où nous mettons sous presse, les parents de la victime viennent d’être incarcérés au cachot de la commune Mugongomanga. Édouard Nkurunziza


SOCIÉTÉ

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Kuwinterekwa : le relogement des sinistrés se fait toujours attendre…

Alors que tous les 7 octobre, le monde entier célèbre la journée dédiée à l’habitat, certains habitants du quartier Gihosha, à l’endroit communément appelé Kuwinterekwa risquent de se retrouver sans abris. Leurs maisons ont failli s’effondrer en février, le gouvernement avait promis de les reloger. Ils attendent toujours.

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ésespérés, lassés d’attendre, certains d’entre eux ont finalement décidé de braver les risques qu’ils encourent. Dieudonné est parmi ceux -là. Squattant depuis février, les maisons de ses voisins, il s’est résolu de reconstruire. « Bientôt plus de 8 mois que l’on nous chante qu’on va nous reloger, mais voilà où nous sommes », s’indigne-t-il. Avec ses cinq enfants, un voisin leur avait prêté un toit sous lequel dormir. « Mais, vous savez, parfois la patience a des limites ». Récemment il lui a signifié que dans un mois, ils doivent chercher où habiter, plus chez lui. Sans aucun autre choix, il doit trouver une alternative au plus vite. Et malgré l’insistance de la police de la protection civile d’évacuer l’endroit, il confie qu’avec l’aide de ses amis, il compte reconstruire de nouveau le terrain. « Juste une maisonnette d’une chambre et un salon, afin que mes enfants ne

dorment pas sous la belle étoile». Même cas de figure pour Nadine Nibitanga. Dans l’incapacité de louer une maison, cette mère de quatre enfants indique que malgré les risques, ils ont opté de rester : « Déjà on mange à peine, suite au crédit que l’on a contracté pour la construction de cette maison. Comment pourrions-nous aller louer ailleurs ? » Un choix risqué, depuis peu, leur maison ne cesse de se fissurer. « Si une fois le pire venait à arriver qu’ils ne disent qu’ils n’étaient pas avisés », prévient Antoine Ntemako, directeur de la protection civile. Il rappelle que le gouvernement n’a jamais donné de garantie pour leur relogement. « Avant tout, ils doivent évacuer les lieux .Quant à leurs autres doléances, ils pourront négocier après ». Avant de conclure : « D’ailleurs, l’urbanisme leur avait interdit de construire sur ces terrains. » Hervé Mugisha

Les maisons ne cessent pas de se fissurer.

Plaidoyer pour une législation rigoureuse sur l’alcool Maladies, violences, la consommation excessive d’alcool est pointée du doigt par BAPA (Burundi alcohol policy alliance), une coalition des associations qui réclament une législation plus rigoureuse, lors d’une conférence de presse, mardi 8 octobre.

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dopter un projet de loi régissant la production, commercialisation et consommation de l’alcool, instaurer dans l’urgence un système de suivi et d’étude de son impact sur la santé, conduire à haut niveau une campagne de sensibilisation », est une des recommandations de BAPA. Pour Séraphine Manirambona, représentante légale de BAPA, le règlement adéquat permettrait aux Burundais d’être conscients de la gravité des conséquences qui résultent de l’excès de l’alcool. « L’usage nocif de celui-ci a de graves répercussions sur la santé publique. Il est considéré comme l’un des principaux facteurs de risque de morbidité dans le monde», a-telle déclaré. D’après Mme Manirambona, l’étude réalisée par l’Association des guides et des scouts du Burundi en 2017 dans les provinces de Kayanza et Cankuzo, montre que la violence est l’une des plus grandes conséquences de cette consommation excessive. Au moins 38,3% des hommes reconnaissent avoir forcé leurs femmes à des rapports sexuels suite à l’alcool. Même s’il n’y a pas de statistiques, elle déplore que les boissons alcoolisées censées réservées aux adultes sont consommées en grande partie par les mineurs. Elle lance un appel aux parents d’être responsables et prévenir leurs enfants de moins de 18 ans contre ce fléau. Selon le rapport de l’OMS de 2014, sur la situation mondiale des maladies non transmissibles, en 2012, 5,9 % soit 3,3 millions des décès dans le monde étaient attribuables à la consommation d’alcool. Pour rappel, le 2 octobre de chaque année est dédié à la journée mondiale sans alcool. Séraphine Manirambona (à droite) : « L’usage nocif de celui-ci a de graves répercussions sur la santé publique.»

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Jérémie Misago


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ÉDUCATION

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1ère année de l’école fondamentale

A quand les manuels scolaires ?

A un mois après la rentrée scolaire, les manuels scolaires pour la 1ère année de l’Ecofo ne sont pas encore parvenus aux écoles en mairie de Bujumbura. Enseignants et parents accusent le ministère de traîner les pieds.

L

e manque de manuels scolaires du nouveau système dans les premières années entrave les activités scolaires», se lamentent les enseignants rencontrés dans certaines écoles de la mairie de Bujumbura. Ils éprouvent des difficultés liées au manque du matériel scolaire en rapport avec l’enseignement du nouveau système qui a débuté avec l’année scolaire en cours dans les premières années du cycle fondamental. Chacun se débrouille de sa façon pour occuper les écoliers. « Je fais recours aux photocopies de la matière à enseigner en attendant le matériel didactique adéquat », indique B.N. Un autre affirme qu’il tire les leçons à dispenser dans les notes prises lors de la formation sur les nouveaux programmes. Les enseignants ont un problème du respect du programme et de la répartition de la matière. Ils indiquent que la fourniture de manuels scolaires aux écoles a une influence positive sur le rendement scolaire. « Les manuels sont un outil de réussite scolaire », martèlent-ils. D’autres enseignants s’arrangent avec ce qu’ils ont appris pendant la formation en y ajoutant ce qu’ils ont dans les anciens fichiers. Mêmes lamentations du côté des parents. « Aujourd’hui si l’on parle de la baisse de niveau au Burundi, je pense que c’est ce manque de livres qui en est à l’origine », déplore un parent du quartier Gikungu. Il estime que la réforme est salutaire. Mais, il a des doutes que la méthodologie ne soit suivie et respectée, faute de guides. Il demande au ministère de l’Education de produire assez de livres et de les rendre disponibles dans les délais. Un autre parent salue la réforme mais considère ce retard des manuels comme l’origine des échecs pour les élèves. « Les enseignants vont courir avec le temps pour achever les programmes ».

Une des écoles visitées en mairie de Bujumbura.

Les responsables scolaires s’inquiètent « Il est vrai qu’on a subi une formation sur ces nouveaux programmes mais il s’avère indispensable que nous ayons des manuels écrits», indique Adèle Bareha, maîtresse responsable de l’Ecofo Gikungu. Elle a des inquiétudes à voir le temps qui vient de s’écouler. Les programmes risquent de connaître un retard. Elle demande au ministère de leur fournir les supports pédagogiques dans les meilleurs délais pour que les écoliers puissent apprendre tout ce qui a été prévu au cours du premier trimestre. De son côté, Annonciate Nsabimana, directrice de l’Ecofo « Jardins publiques » de Nyakabiga, se réjouit du contenu des nouveaux programmes. Ces derniers s’inscrivent dans le cadre des programmes enseignés au quatrième cycle. Pour elle, il y aura une continuité. Quant au retard des supports pédagogiques, la directrice indique que les enseignants se débrouillent en recourant aux photocopies des brochures utilisées dans la formation sur les nouveaux programmes. « Nous n’avons pas encore eu de supports pédagogiques en rapport avec les nouveaux programmes », confie Régine Cimpaye, maîtresse responsable de l’Ecofo Bassin 2. Les enseignants essaient d’occuper les écoliers en attendant les manuels tout en recourant aux notes prises lors de la formation.

« Il y a un manque de planification » Rémy Nsengiyumva, président du Syndicat des travailleurs de

l’enseignement du Burundi (Steb), affirme être au courant de la situation dans ces classes. « Nous avons tenu une réunion avec nos syndiqués. Des doléances ont été formulées ». Ce qui est étonnant c’est que le problème est répétitif. La même situation s’est produite au moment où l’on a introduit les programmes de l’Ecofo. « Nous déplorons le manque de planification. Former les enseignants et les envoyer au travail sans manuels est incom-

préhensible ». Et de s’indigner que le ministère sachant qu’il y aura cette réforme aurait dû confectionner à temps ces manuels. Pour lui, demander aux enseignants de s’arranger avec les photocopies ou se débrouiller avec l’internet est aberrant. « C’est trop demander à nos enseignants qui n’arrivent même pas à joindre les deux bouts du mois. Malheureusement, ils sont devant le fait accompli ». Il demande au gouvernement

Edouard Ndikumasabo : « Des essais n’ont pas été faits pour se rassurer que le contenu des programmes va répondre aux résultats escomptés.»

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de faire tout ce qui est en son pouvoir pour remédier à la situation pour l’intérêt des écoliers. Même constat du côté d’Edouard Ndikumasabo, président du comité des parents. Pour lui, ce ne sont pas seulement les manuels scolaires qui manquent, d’autres supports pédagogiques font défaut. D’emblée, il estime que la réforme est bonne mais regrette qu’elle n’ait pas été bien préparée. « Des essais n’ont pas été faits pour se rassurer que le contenu des programmes va répondre aux résultats escomptés ». Par ailleurs, la formation des enseignants n’a pas été suffisante. « Deux semaines ne suffisent pas pour assimiler tout un programme ». Pour M. Ndikumasabo, le retard dans la fourniture des manuels a des conséquences négatives sur le déroulement des activités scolaires. En outre, M. Ndikumasabo déplore que les autorités éducatives n’aient pas associé tous les intervenants dans la conception de ces manuels. « Normalement, les outils d’enseignement sont conçus et rédigés par des spécialistes de la discipline, enseignants de terrain, parents et cadres du ministère de l’Éducation ». Edouard Juma, porte-parole du ministère de l’Education, tranquillise : « Tel que le programme est conçu, on va d’abord insister sur l’oral dans les premiers mois.» Et de rassurer que les supports pédagogiques seront incessamment fournis. Félix Haburiyakira


ÉDUCATION

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Lycée du Lac Tanganyika

Deux lycées, un même établissement ! Le Lycée du Lac Tanganyika vient d’être scindé en deux établissements. Motif : un effectif pléthorique d’élèves. Quelques enseignants se disent déstabilisés.

L

ycée du Lac Tanganyika I (LLT I) et Lycée du lac Tanganyika II (LLT II). Deux écoles, deux directions, un même établissement. La décision tombe du ministère de l’Education, il y a plus de deux semaines, dans une ordonnance de nomination du « directeur II ». 10h, lundi 7 octobre. C’est l’heure de la pause. L’énorme cours intérieure est bondée d’élèves en noir-blanc. Même uniforme, mêmes vieux locaux, aucune nouvelle classe ou nouveau bureau… Le changement ne saute pas aux yeux. C’est en s’approchant des élèves que la différence se remarque. Une ou deux lignes noires sur la poche de la chemise différencient

SANTÉ

Même les robinets ont été divisés au Lycée du Lac Tanganyika.

les élèves du LLT I ou LLT II. Sur le dos de la chemise, c’est le même vieux cachet « Lycée du lac Tanganyika » pour tout le monde. Le bloc qui donne directement sur l’entrée du lycée constitue le LLT I. L’autre bloc, de l’autre côté de la cour, est le LLT II. Chaque lycée a sa propre direction. Le directeur I, l’ancien, et le nouveau directeur II. Leurs bureaux se succèdent. Même les robinets, distants d’un mètre, sont divisés. Avec

la craie, il est marqué LLT I sur un robinet et LLT II sur l’autre. D’après le directeur I, Aloys Nimbona, presque tout a été scindé en deux. Le matériel didactique, les locaux, les enseignants, les encadreurs... « Mais aucun enseignant ni matériel de plus », déplore ce directeur. L’affectation des élèves dans le I ou II est un pur hasard, assure-t-il. « Nous avons regardé la numérotation des noms sur les listes établies par ordre alphabétique.

Les numéros impairs sont dans le LLT I, les pairs dans le LLT II. »

Des enseignants désemparés… Obligés de recommencer à zéro certaines matières, de perdre des heures parce que l’enseignant II a déjà pris le matériel… ou d’enseigner des heures supplémentaires… quelques enseignants n’ont pas encore « digéré » cette division « subite». Pour un professeur de fran-

çais, cette division n’a fait que diminuer le nombre de classes, pas les effectifs dans les classes. Par exemple, explique-t-il, la 7e année comptait six classes (7è A, B, C, D, E, F). Avec une centaine d’élèves dans chaque classe. Aujourd’hui, trois classes de 7e dans le LLT I et trois autres dans le LLT II. Ces enseignants indiquent qu’ils sont parfois obligés de recommencer la matière à zéro. Les élèves, issus des classes différentes, n’étant pas au même niveau. Un professeur de physique affirme qu’il perd parfois des heures à attendre le matériel pris par le professeur II. Ces enseignants parlent d’une division insensée, la première dans l’histoire de l’éducation. « Une école scindée en deux établissements… c’est très bizarre », observe un professeur vieux de 10 ans dans ce lycée. Pour lui, il fallait au moins séparer par un mur ou chercher un autre établissement. Cette division semble être un non-évènement pour les élèves. « Rien n’a changé pour nous », lanceront quelques-uns, moins intéressés par la question. Clarisse Shaka

Mutimbuzi

Le choléra fait rage à Rukaramu Quatorze personnes de la zone Rukaramu en commune Mutimbuzi de la province Bujumbura ont attrapé le choléra depuis la semaine dernière. Deux d’entre elles en sont succombé. Pour les habitants de cette localité, un fléau qui fait rage suite à la pénurie d’eau potable depuis plus d’un mois.

L

es collines Kigwati I et Kigwati II sont plongées dans la misère. Plus d’eau potable depuis bientôt deux mois. Les canaux d’irrigation issus de la rivière Mpanda constituent ce qui reste de l’hydrographie de cette contrée. Ce mardi, plus d'une dizaine d’enfants nagent, indifférents, dans le caniveau de la partie ouest du Kigwati I. Ils sourient aux passants, plongent dans l’eau souillée, refont surface puis reprennent le mouvement. Au loin, au bout du canal, trois autres puisent cette eau, couleur argile. A l’intérieur du village, des restaurants, des cafétérias, des cabarets. Et un petit centre de négoce où s’étalent fruits, légumes, beignets, etc. Devant une maisonnette, une femme fait la propreté des ustensiles avec l’eau de la Mpanda. «Je n’y peux plus rien»,

se désole-t-elle écœurée. Depuis que la pénurie d’eau potable s’est prononcée, mi-août dernier, les habitants des Kigwati ont appris à faire avec. L’eau potable, accessible uniquement entre 23h et 4h du matin, ne sert que de boisson. «Pour la cuisson, la lessive (y compris des ustensiles de cuisine), la toilette, nous devons nous rabattre sur cette eau de Mpanda», déplore Elisabeth Kangoye, une habitante. Debout devant un robinet qui a tari, Jeannette ne trouve plus de mots pour exprimer sa désolation : «Nous sommes tout simplement déboussolés.» Cette nuit, les robinets ont été encore plus avares. «Aucune goutte d’eau n’est venue. Nous attendons depuis l’aube». Avec elle, près d’une dizaine d’autres femmes munies de bidons font la queue, mine renfrognée, depuis 3h du matin.

A Rukaramu, la plupart des habitants utilisent l’eau de la Mpanda pour la propreté.

Pour ces habitants, une situation à l’origine du choléra qui a envahi Rukaramu. «Au vu de ce manque d’hygiène, c’était vraiment inévitable», observe un jeune homme. Et de demander aux âmes charitables de voler à leur secours.

Un manque à gagner énorme pour certains… Mise à part l’incidence sanitaire, la pénurie d’eau plombe les activités commerciales de la localité. «L’affluence de la clientèle s’est considérablement amoindrie depuis la déclaration du choléra »,

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assure Chantal Minani, une restauratrice. Outre la diminution des clients, cette jeune femme évoque un autre défi : «Avec cette carence d’eau, les coûts par bidon ont exponentiellement augmenté. Mes dépenses pour me procurer de l’eau propre sont passées de mille BIF à 6 mille BIF.» Un laitier des lieux abonde dans le même sens : «Notre commerce exige de la propreté. Nous devons tout faire pour nous procurer de l’eau propre, parfois faire de longues distances. Et ce faisant, nous travaillons à perte. » Jean Damascène Nzeyimana, chef de la colline Kigwati I, regrette que l’eau qui servait sa colline ait été bloquée. «Normalement, on recevait l’eau venant de Rugazi. Elle aurait été retenue au niveau des étables de Maramvya d’’où la pénurie et le choléra». Cet administratif demande à la Regideso de venir à la rescousse de ces habitants. Contacté, le directeur du département de l’eau à la Regideso a promis de s’exprimer ultérieurement. Edouard Nkurunziza


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AU COIN DU FEU

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Avec Teddy Mazina Dans le Burundi traditionnel, le soir, au coin du feu, la famille réunie discutait librement. Tout le monde avait droit à la parole et chacun laissait parler son cœur. C’était l’heure des grandes et des petites histoires. Des vérités subtiles ou crues. L’occasion pour les anciens d’enseigner, l’air de rien, la sagesse ancestrale. Mais au coin du feu, les jeunes s’interrogeaient, contestaient, car tout le monde avait droit à la parole. Désormais, toutes les semaines, Iwacu renoue avec la tradition et transmettra, sans filtre, la parole longue ou lapidaire reçue au coin du feu. Cette semaine, au coin du feu, Teddy Mazina.

V

otre qualité principale ? Peut-être, mon engagement sans concessions, mais ce n’est pas à moi d’en juger.

Votre définition de l’indépendance ? Le monde est interdépendant ... on vit à l'époque des intégrations, mais soyons LIBRES seul ou avec les nôtres.

Votre défaut principal ? Mon besoin permanent de liberté et de découvrir.

Votre définition de la démocratie ? Grosse confusion et parfois mensonges et illusions en Afrique. Une énorme « Gueule de bois » après le discours de Mitterrand au sommet de La Baule en 1990.

La qualité que vous préférez chez les autres ? La culture, le savoir et les valeurs morales et la tolérance. Le défaut que vous ne supportez pas chez les autres ? L’obscurantisme et l'idéologie du génocide et les incitations a la haine dans notre région. La femme que vous admirez le plus ? Maman, ma fille, Winnie Mandela, Angela Davis, Maggy Barankitse… et aujourd'hui pour parler d’actualité des filles comme Carola Rackete, la « capitana » du SeaWatch3 qui défie la haine et le racisme ...et les amours de ma vie... Elles se reconnaîtront. L’homme que vous admirez le plus ? Mon Père, le Prince Rwagasore, Paul Kagame, Nelson Mandela, Malcolm X,… La liste est longue heureusement. Qui aimeriez-vous être ? Moi, je n’ai pas le choix. Votre plus beau souvenir ? Les naissances de mes enfants. Votre plus triste souvenir ? La maladie d'êtres chers et le départ de Papa. Quel serait votre plus grand malheur ? Joker Le plus haut fait de l’histoire burundaise ? Le traité de Kiganda. Après une dizaine d’années de résistance et de guérilla contre l'Allemagne de Bismarck, Bijoga Mwezi Gisabo signe un traité qui va

Votre définition de la justice ? « Ne pas tuer les criminels, mais les juger ».

éviter à jamais au Burundi d'être une colonie. Les dirigeants actuels qui parlent de colons (à tout va) aujourd’hui trahissent le sens de la lutte des Barundi et de Bijoga. Lutte qui nous a évités par la résistance, d'être une colonie, mais un territoire (libre), sous tutelle des Nations Unies. La plus belle date de l’histoire burundaise ? Quand une personnalité dont je tais le nom sera jugée. La plus terrible ? Je ne veux pas la dire pour ne pas vous attirer des ennuis. Le métier que vous auriez aimé faire ? Ecrivain, musicien, mais je suis auteur photographe et joue un peu de la guitare ... tout va bien. Votre passe-temps préféré ? Faire des photos, même si c’est un travail pour moi.

Le voyage que vous aimeriez faire ? New York, c'est urgent. Harlem, Soho, Cuba… Votre rêve de bonheur ? La famille Votre plat préféré ? Soit un gros Bugali accompagné d’un Mukeke en sauce, ou d’un gros poulet Moambe partagé à plusieurs bien entendu, ou alors un filet de boeuf en croûte de sel du pays Basque (Biarritz). Terrible! Votre chanson préférée ? Une ou des Albums ? tout l’album Songs in the Key of life de Stevie Wonder 1976, à mettre d’urgence dans les programmes d’éducation national, Free, Pastime Paradise, As…,We and Them, Bad Card, crazy Balheads, War, de Bob Marley, « Dust in the Wind »de Kansas… Quelle radio écoutez-vous ? Elles ont été brûlées.

Votre lieu préféré au Burundi ? Le cercle Nautique de Bujumbura avant …

Avez-vous une devise ? “Même sans espoir, la lutte est encore un espoir.”

Le pays où vous aimeriez vivre ? Tous les bords de lacs mais ... préférence pour le Tanganyika ou le Kivu

Votre souvenir du 1er juin 1993 ? Des gens qui déchiraient leurs cartes d'électeurs, ça ne présageait rien de bon.

Si vous étiez ministre de l’Information, quelles seraient vos deux premières mesures ? Rétablir la liberté de la presse,

indemniser et rouvrir les medias fermés et brûlés. Si vous étiez ministre des Affaires Etrangères, quelles seraient vos deux premières mesures ? Si c'est du Burundi actuel, je démissionnerais immédiatement. Croyez-vous à la bonté humaine ? OUI. Je l'ai déjà vu. Pensez-vous à la mort ? Elle est partout. Si vous comparaissez devant Dieu, que lui direz-vous ? #MBO, Enfin je sais… et où sont mes copains ? Pour que je puisse les rejoindre pour l’éternité hehehe. Propos recueillis par Antoine Kaburahe

Bio express

N

aissance 1972 au Burundi .Teddy Mazina photojournaliste Burundais, est aujourd’hui exilé d’Opinion entre la Belgique et le Rwanda .Il se définit comme «Activiste photographe». En 1993, année de l’assassinat de Melchior Ndadaye, il fonde avec d’autres camarades de l’université une association nommée Organisation. Jeunesse. Futur. Ce groupe “s’inscrivait en porte-à-faux face aux extrémistes et aux manipulations de tous bords” en prônant la non-violence, mais le poussera à l’exil politique. En 2007, il revient au Burundi. “Malheureusement, je me suis rendu compte que nous étions en face des mêmes problèmes que par le passé”. Il se lance dans la photographie et crée également MD communication qui produit des reportages et des documentaires sur la société burundaise. Pendant les élections de 2010, il décide de fonder avec une collègue PIGA PICHA (mouvement pour l’image indépendante au Burundi) afin de créer une banque d’images électorales et une démarche de construction

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d’une société plus juste et plus libre, qu’il poursuit aujourd’hui à travers le Studio Clan-Destin. En février 2012, il expose pour la première fois ses photographies au Burundi à l’Institut Français de Bujumbura avec Objectifs Amnésie / Devoir de mémoire 2007-2011. Il dit lutter à travers ses photos contre l’oubli et contre les violences que subit l’homme au quotidien. Pour la Mémoire. “Photographier les événements de l’actualité sociale et politique burundaise est un choix presque vital pour moi et pour l’histoire du Burundi.” En 2015, les éditions Africalia publient un premier ouvrage qui lui est Consacré « Des Tambours sur l’oreille d’un sourd ». A travers le «Studio Clan-destin» il photographie les manifestations de l’année 2015 contre le 3eme Mandat du président Pierre Nkurunziza, avant d’être obligé de rentrer en clandestinité pendant 15 mois. En 2017 il reçoit le prix Martine Anstett pour son engagement pour les droits Humains au Burundi, en marge du festival du film des droits Humains à Genève.


SANTÉ

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Troubles mentaux : des chiffres alarmants ! Plus de 4 personnes sur dix présentent des troubles psychologiques, selon une enquête réalisée dans quatre provinces, il y a deux mois. Une réalité dévoilée dans le cadre de la journée mondiale de la santé mentale.

Le secrétaire permanent au ministère de la Santé affirme que plus de 4 personnes sur 10 sont affectées par des problèmes mentaux dans quatre provinces.

les quatre provinces ci-haut citées montre que plus de 6% de la population ont déclaré avoir sérieusement pensé au suicide et 4% auraient tenté de se suicider. Dr Niyonzima indique que les causes de ces troubles mentaux sont multiples : la pauvreté, la malnutrition, les violences sexuelles et basées sur le genre, la crise sociopolitique, la perte des biens et des personnes chères, etc. Un psychologue prévient sur les premièrs signes pour lesquels il faut s’inquiéter et consulter : l’insomnie continuelle, l’oubli exagéré, un problème de concentration, l’isolement ou tout autre comportement anormal. « Il ne faut pas attendre d’être complètement malade pour consulter».

maladies chroniques non transmissibles, Etienne Niyonzima. Selon les données de l’OMS, les troubles mentaux touchent presque 12% de la population mondiale. Chaque année, environ 800 mille personnes se suicident, suite à ces troubles mentaux. Le suicide se présente donc

La plateforme des intervenants psychosociaux évoque l’ignorance de la population et le traitement cher comme principaux défis dans la santé mentale. La coordinatrice de cette plateforme parle d’un traite-

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ur 3.000 ménages des provinces Ngozi, Gitega, Bujumbura-mairie et Rumonge, plus de 64% manifestent une difficulté psychologique parmi lesquels plus de 47% connaissent un épisode de trouble plus sévère. Des chiffres révélés par le ministère de la Santé, mardi 8 octobre, à la veille de la journée mondiale de la santé mentale. De 2015 à 2017, plus de 22 mille cas ont été enregistrés dans les trois centres psychiatriques publics de Bujumbura, Gitega et Ngozi. Une autre enquête réalisée de 2010-2015 a donné 2500 cas de troubles mentaux, d’après le directeur du programme des

comme la 2e cause de mortalité chez les sujets de troubles mentaux âgés de 15 à 29 ans. « C’est pourquoi la journée mondiale de la santé mentale est dédiée, cette année, à la prévention du suicide », précise ce directeur. D’après le ministère de la Santé, l’enquête réalisée au Burundi dans

Un traitement onéreux, principal défi

ment à long terme qui coûte au minimum 30 mille BIF par mois. Le ministère de la Santé ajoute le manque de financement : « La santé mentale n’est pas encore une priorité alors que les maladies mentales constituent un problème de santé publique. » Le manque de données de base, les contraintes socioculturelles, entre autres défis auxquels fait face le pays. Pour lutter contre ce fléau, le ministère de la Santé affirme qu’en plus de la mise en place des politiques nationales de lutte contre ces troubles, notamment la politique nationale quinquennale de santé mentale (20162020), des services de prise en charge des troubles mentaux ont été mis en place dans les hôpitaux de Buye, Kiremba, Muyinga et Gihofi. Le ministère de la Santé évoque comme perspective d’avenir la décentralisation et l’intégration des soins de santé mentale à tous les niveaux de soins. La journée mondiale de la santé mentale a été célébrée, jeudi 10 octobre, au Centre neuropsychiatrique de Kamenge (CNPK). Clarisse Shaka

ACP Région Sud

Rumonge

Appel à une coalition des partis pour le changement Le parti Rassemblement national pour le changement ( Ranac) en sigle a lancé ce dimanche 6 octobre à Kigwena un appel aux partis politiques à une coalition forte pour le changement en 2020 . De notre correspondant Félix Nzorubonanya

A

loys Baricako, le président du parti Ranac a appelé tous les partis qui aspirent au changement à se coaliser en vue de remporter haut la main les élections de 2020. Ce parti avait rassemblé ses membres de la province de Rumonge dans une réunion en zone de Kigwena pour les informer des axes du programme du parti. Léopold Ndayisaba, représentant du parti Ranac en province de Rumonge a indiqué que la population est confrontée à la pauvreté, le niveau de l’enseignement qui a baissé, la corruption qui gangrène les différents services de l’Etat. Selon lui, même si la situation n’est pas très déplorable, l’exercice des lib-

ertés politiques n’est pas totalement assurées car selon lui les autorités leur ont refusé d’ouvrir une permanence au niveau de la zone de Kigwena. Le vol des drapeaux politiques ainsi que des arrestations arbitraires s’observe encore. Toutefois, il salue des réunions qui se tiennent avec les autorités administratives, policières et judiciaires en vue d’évaluer ensemble le processus électoral en cours.

Un changement à travers les urnes Le président du parti a demandé d’impulser un changement par les urnes lors des prochaines élections et a demandé aux autres partis de former une coalition pour atteindre l’objectif ultime qui est le changement. Il a profité de cette réunion pour montrer aux militants

Les militants du RANAC avaient répondu à l'appel de leur président

deux nouveaux membres du parti qui ont exercé de hautes fonctions dans ce pays dont Issa Ngendakumana qui fut ministre lors du pouvoir du parti Sahwanya Frodebu et Liboire Ngendahayo qui fût ministre

de l’Education dans le gouvernement de Melchior Ndadaye. Lors d’un point de presse qu’il a tenu sur place, il a indiqué que le Ranac n’a pas encore son candidat à l’élection présidentielle mais attend la formation d’une

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coalition des partis politiques pour le changement en vue d’une large concertation. Signalons que le parti Ranac dit vouloir un changement radical et non un changement dans la continuité.


AU CŒUR DU PAYS

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Région Centre

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Gitega

Une mère brûle son fils pour vol Elle a brûlé les deux mains de son enfant de 8 ans l’accusant d’avoir volé son argent. Les organisations qui militent pour le droit des enfants demandent l’application stricte de la loi. De notre correspondant Jean-Noël Manirakiza

C

’est au quartier Mushasha que vivent Don Divin Ikoribikomeye et ses parents. Ce lundi 7 octobre, il ne bougeait pas ses doigts. Ses mains étaient toutes noires à cause des brûlures. Selon les témoignages des voisins, sa mère les lui a brûlées avec des braises ardentes. Motif : Don Divin lui a piqué un billet de 10 000fBU. Aujourd’hui, cet enfant ne va plus à l’école, ses doigts ne peuvent pas tenir un stylo. Rencontré le lendemain de sa punition, il n’avait pas encore eu des soins. N’eût-été l’intervention des voisins qui ont entendu des cris de détresse, les brûlures auraient été plus graves. « C’était comme des cris d’un cochon écorché vif. Elle tenait

Région Ouest

mariage par ses actes dignes d’un enfant de la rue. « J’ai remarqué que c’est grave après. Sinon, je regrette mes actes, c’est mon enfant chéri il ne manque rien de moi », s’est-elle justifiée Diane Nduwayezu. Interviewé, le mari de la mère de Don Divin reste muet comme une carpe. Tout ce qu’il a pu laisser entendre c’est que ce garçon est devenu incorrigible.« Si un enfant de 8ans se permet de voler, dormir dehors sans être chassé de la maison, c’est qu’il est irrécupérable. Il est déjà devenu voyou », avance Janvier Niyongabo D’après la Solidarité de la Jeunesse chrétienne pour la paix et leEnfance (Sojpae-Burundi) à Gitega, les parents ne doivent en aucun cas se dérober à la protection des droits de l’enfant. Pour cette association, les châtiments corporels infligés aux enfants sont punis par la loi burundaise. Les punitions de ce genre sur les enfants ne doivent pas faire partie des méthodes éducatives. « Nous avons d’abord aidé à soigner ce garçon qui venait de passer deux jours sans traitement», assure Ladislas Niyongabo, coordinateur régional de Sojpae à Gitega. Il ajoute que son association a déjà porté plainte à la justice contre ces parents de Don Divin.

fortement ses deux bras audessus du feu », raconte une dame voisine. La plupart des parents de ce quartier semblent faire bloc contre les parents de Don Divin. Ils font savoir que cette famille a failli à sa mission d’éduquer. Selon eux, ils n’apprécient pas le comportement de cet enfant mais ils rejettent tout le tort à sa famille car elle ne ferait pas d’effort pour bien l’éduquer. « Le comble de malheur, c’est que son mari n’intervient jamais quand elle le frappe. Nous pensons qu’il laisse sa femme faire car ce n’est pas son propre fils», déplore Charlotte. « Ce n’est pas une mère. Nous aussi nous avons des enfants turbulents mais nous ne pouvons pas les punir de cette façon », s’insurge Capitoline qui affirme écœurée par le comportement de cette femme. Selon elle, cette femme devrait être jugée et punie.

« Ses droits doivent être respectés ! » Les parents de Don Divin ne semblent pas être troublés par ce qu’ils ont fait subir à ce garçon. Seulement, sa mère a indiqué que c’était un accident sinon elle aime son fils même s’il risque de gâcher son

Don Divin le lendemain de la punition

Cibitoke/Rugombo

Satisfaits du nouveau poste-Pafe Il y a trois semaines, un poste de Police de l’Air, des frontières et des étrangers (Pafe) été créé à la frontière de Rubenga commune Rugombo. Les voyageurs saluent cette initiative qui vient raccourcir le trajet entre le Burundi et la RD Congo. De notre correspondant Jackson Bahati

A

la frontière de Rubenga, séparant le Burundi et la RD Congo, un mouvement intense de personnes des deux pays s’observe. Les Burundais et les Congolais traversant la frontière saluent la police qui facilite leur voyage en ne demandant que des documents. Ces voyageurs rencontrés sur place indiquent qu’avant, pour traverser, ils devraient contourner la frontière de Ruhwa et le Rwanda. Ce parcours demandait beaucoup d’argent et surtout les coûts de transport. Les Congolais devraient passer par Kamanyola

et le Rwanda pour entrer au Burundi.

D’autres nouveaux postes envisagés Grâce à ce nouveau poste de police, les relations entre les Burundais et les Congolais vont encore s’améliorer en particulier lors des diverses cérémonies familiales. « Comme le parcours est réduit, nous avons actuellement la possibilité d’aller à des cérémonies au Congo et viceversa », estime la population rencontrée près de la rivière Rusizi qui sépare les deux pays. Le gouverneur de la province Cibitoke salue le gouvernement burundais pour la mise en place de ce poste de police. Joseph Iter-

Des burundais traversent le poste de la PAFE pour la RD Congo

iteka demande à la population d’utiliser cette frontière à bon escient en portant des documents au lieu de passer dans la brousse ou les routes inconnues souvent à

l’origine d’insécurité et de danger pour les passants. Il rappelle que la frontière de Rubenga a été créée après la frontière de la transversale 6 de la

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commune Buganda. Cette autorité envisage également créer d’autres postes de police pour faciliter la tâche aux voyageurs vers le grand voisin.


SPORT

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Basketball

Tournoi de Zone 5: le Burundi sera bien présent © Droits réservés

Dynamo et les Gazelles prendront part à cette compétition. Elle est réservée aux clubs champions de leurs pays. Pour les amoureux du ballon orange, une bonne nouvelle. Ils redoutaient une enième absence.

C

ette fois, si l’on en croit, Jean Paul Ruberintore, président des Gazelles, il a suffi qu’ils fassent part de leur proposition au ministère des Sports pour qu’il accepte d’appuyer financièrement les équipes qualifiées pour le tournoi. Pour les Gazelles, c’est un ouf de soulagement. Car la dernière participation d’un club féminin à ce tournoi remonte en 2014. D’après M. Ruberintore, le ministère a promis de prendre en charge leurs billets d’avion, leur séjour (hébergement, restauration), argent de poche y compris. « Peu importe les déconvenues qui peuvent surgir à tout moment. C’est un soutien qui devrait nous per-

Les clubs burundais devront batailler dur.

mettre d’être de la partie ». Même cas de figure pour les verts et blancs de Dynamo. Selon Joe Dassin Rukundo, président du club, ils sont quasi assurés de prendre part au tournoi. « Certes, nous continuons à frapper à gauche à droite pour voir s’il y aurait des sponsors qui répondent positivement, mais dans l’ensemble, nous considérons comme acquise notre participation » Autour de 20.000 dollars américains, l’enveloppe nécessaire

pour le voyage, il estime qu’avec l’appui du ministère de tutelle, ils devraient pouvoir réussir à rassembler la somme.

Pour un tournoi attractif Sur le terrain, c’est une bataille qui promet. Pour augmenter l’audience, Augustin Kararuza, président de la fédération burundaise de basketball (Febabu), fait savoir que la fédération internationale (FIBA) a dû changer le format du

tournoi. Chez les hommes, dorénavant, les clubs sont séparés en 4 divisions (est, ouest, nord, sud). Hormis les Kényans, remplacés par les Malawites, les autres pays de la communauté est-africaine évolueront dans la même poule que Dynamo. « Au regard du parterre des adversaires, ’on peut s’extraire de la phase des poules », assure Olivier Ndayiragije, coach. Idem pour les Gazelles. Cinq ans après leur dernière participation, Alain Batungwanayo, entraîneur,

donne le ton: « Les filles sont ultra motivées, plus que tout désireuses de montrer qu’elles peuvent mieux faire même au-delà des frontières » Pour ce faire, il indique qu’ils ont fait appel à leurs anciennes joueuses expatriées au Rwanda et en Ouganda. « Nous avons déjà envoyé les lettres de sortie à leurs différents clubs, nous attendons que leurs clubs respectifs donnent leur accord ».Une chance que n’a pas eue Dynamo. Suite au tournoi des Héros qui débute ce week-end, le champion national partira sans renforts. Pour rappel, ce tournoi de la Zone 5 se déroulera à Dar-esSalaam. Chez les hommes, les deux premières équipes de chaque division valideront leurs billets pour le tournoi continental, tandis que pour les filles, seule l’équipe victorieuse sera qualifiée pour l’Afro Basket. Pour les hommes, le tournoi se déroulera du 15-20 octobre. Chez les filles, il se tiendra du 21-26 octobre.

Hervé Mugisha

Football

Eliminatoires/CHAN 2020 : une remontada est-elle possible pour le Burundi ?

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ne sacrée tâche voire impossible », opinent déjà nombre d’analystes. Et les pronostics sont loin d’être tendres pour les poulains de Joslin Bipfubusa. Si l’on en croit A.N., journaliste sportif, si l’on joue à l’extérieur, les chances de remonter les trois buts sont inférieurs à 15%. D’ores et déjà une manche retour qui s’annonce incertaine. A la peine toute la rencontre, les Intamba ont été l’ombre d’euxmêmes, ratant l’occasion de profiter de l’avantage du terrain et d’engranger les précieux trois points qui leur auraient permis d’aborder le match retour en parfaite confiance. En cause : un manque de concentration et l’incapacité du coach à trouver un onze de départ idéal. « S’il veut se prémunir des foudres des fans burundais, Joslin et son

staff doivent remanier leur onze de départ», préviennent bon nombre d’observateurs. Allusion faite à leur réticence de faire jouer Juma Mohamed, le milieu de Flambeau du Centre, très en verve en début de saison de la Primus ligue. « Il faut qu’ils donnent une chance à tout le monde. Sinon, ils seront taxés de favoritisme ». D’après eux, une attaque remodelée est plus qu’idoine. « A défaut d’un Olivier Dusabe (il est blessé, ndlr) tranchant par ses balles en profondeur, ils doivent trouver plus d’ailiers percutants, histoire d’apporter plus de tonus à une attaque moribonde ».

Presser très haut Pour les supporters, un but précoce permettrait aux Burundais de s’installer dans le match. Et ainsi imposer le rythme du match. « Mais aussi faut-il qu’ils

© Droits réservés

Etrillée à domicile par l’Ouganda (3-0), samedi 21 septembre (3-0), la sélection nationale joue son destin le 19 octobre. Pour franchir le tour suivant, elle doit remonter les trois buts sans en prendre un.

Un défi attend les Intamba.

fassent le jeu et ne se barricadent pas derrière ». Pour ce faire, tranche A.M., journaliste sportif, un milieu de terrain dense avec deux sentinelles est nécessaire. Il assure que cette stratégie permettrait de contraindre les latéraux adverses à peu monter et à protéger une défense parfois mise à mal à cause

d’un milieu de terrain poreux. Quant à Joslin, il tranquillise : « La balle est dans notre camp, à nous d’être plus agressifs et réalistes devant le but.» Aux doutes des uns et des autres concernant la concentration des joueurs, il tempère : « En plus qu’ils soient des compétiteurs, ce sont des patriotes,

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et une remontada leur permettrait d’entrer dans l’histoire. » En cas de victoire, le Burundi validerait son ticket pour la 2e participation au Championnat d’Afrique des Nations(CHAN). Sa dernière participation remonte à 2013.

H.M.


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SPORT

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ANNONCES

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AVIS DE RECRUTEMENT

UNITED NATIONS DEVELOPPEMENT PROGRAMME - UNDP Le Programme des Nations Unies pour le Développement au Burundi (PNUD) vous invite par la présente à soumettre votre offre technique et financière relatives à l’objet sous-référencé.

Titre

Toutes les informations y afférentes se trouvent sur le site global du Procurement du PNUD :

Recrutement d’un Consultant National (Chef de mission) chargé de conduire une étude de faisabilité d’installation d’une usine de transformation des fruits en jus, province de Rumonge.

h t t p : // p r o c u r e m e n t notices.undp.org/ view_notice.cfm?notice_ id=59773

Date limite de réception des candidatures

Le 16 2019

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De la vulnérabilité à la création d’emploi KIYO, l’ONG des droits de l’enfant, en collaboration avec ses partenaires FVS-AMIS DES ENFANTS et JJB, a organisé vendredi 4 octobre une table ronde dans le cadre du projet « Empowerment social et économique des jeunes au service de la paix et de la cohésion sociale ». L’objectif était de permettre aux jeunes bénéficiaires du projet, formés dans différents métiers, d’échanger avec leurs aînés artisans entrepreneurs sur leurs expériences professionnelles.

C

es jeunes réunis à la table ronde ont appris chacun un métier de son choix : la mécanique automobile, la soudure, l’art culinaire et le service de table, la savonnerie, la vannerie et l’électricité domestique. Au cours de cette table ronde, les bénéficiaires ont manifesté leur enthousiasme. Les visites organisées en amont le lundi 30 septembre dans des ateliers d’artisans ont été riches. Francine Kaneza, qui a bénéficié d’une formation en art culinaire se félicite d’être allée à la rencontre de Sébastien, un entrepreneur qui tient un petit restaurant très fréquenté essentiellement par des conducteurs de taxi-vélo et moto. « Sébastien nous a raconté comment son commerce prospère. Il nous a livré quelques astuces pour attirer la clientèle. La propreté des lieux, l’étude des désirs de la clientèle cible, la comptabilité au quotidien et surtout la patience qui nous a manqué à nos débuts». Samuel Ndayishimiye, apprenti électricien, quant à lui, ne tarit pas d’éloges sur l’ONG KIYO qui avec l’appui financier de l’Union européenne lui a permis de bénéficier de la formation et de rencontrer M. Gaëtan Bizimana, électricien. Des questions étaient centrées sur l’organisation de son travail, la gestion de la clientèle, les gains liés à son métier, etc. « Il m’a été d’une grande aide. J’aimerais faire un stage chez lui pour en apprendre davantage sur mon métier, » soutient-il.

Table ronde organisée par l’ONG KIYO, échange d’expérience entre les jeunes et leurs ainés artisans entrepreneurs sur leurs expériences professionnelles.

Quelques résultats atteints Financé par l’Union européenne, ce projet a ciblé 480 jeunes de 16 à 24 ans dans une situation de vulnérabilité dont 35 % de filles et 15 % en situation de handicap. Ils ont bénéficié d’une formation accélérée dans l’apprentissage de métiers de leur choix. L’objectif étant de les orienter vers des métiers porteurs, innovants et durables permettant ainsi leur intégration socio-économique et le développement des activités de cohésion sociale qui contribuent à la consolidation de la paix dans leurs quartiers respectifs. A la fin des formations pratiques, les jeunes ont reçu une formation sur l’entreprenariat et sur la comptabilité simplifiée pour les aider à démarrer leurs projets. Bien plus, en marge de la formation pratique, les jeunes ont été constitués en groupe de soli-

Les apprentis à la mécanique automobile en visite dans un garage pour apprendre de leur aîné dans le métier

darité au sein de chaque quartier cible. Au total 16 groupes de 333 membres ont été formés, dont 192 jeunes bénéficiaires du projet et 141 ne faisant pas partis du projet. Cela a permis de développer des stratégies d’épargne et de crédit au sein des communautés.

Solange, une jeune apprentie en savonnerie dit avoir été impres-

sionnée par la visite chez M. Nyabenda qui tient une entreprise de

Capitalisation des bonnes pratiques issues des visites d’échanges Organisée en étroite collaboration avec CHASAA (Chambre sectorielle d’art et d’artisanat), la table ronde du 4 octobre a permis aux jeunes apprentis des métiers de tirer des leçons pour la suite de leurs initiatives génératrices de revenus.

Mme Rwasa qui se spécialise dans la vannerie échange son expérience avec deux jeunes bénéficiaires

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fabrication de savon. « Chez lui, j’ai compris que je devais encore apprendre avant de me lancer. Il sait faire du savon en poudre, du savon liquide avec une gamme riche en parfum divers et varié. Il me faut améliorer mes techniques de dosage de produit, » a-t-elle aspiré. Les jeunes ont acquis des connaissances sur les erreurs à éviter, ainsi que des astuces pour développer leurs initiatives génératrices de revenus. Tous les professionnels présents à cette réunion sont revenus sur l’entretien d’une bonne réputation, la gestion et la fidélisation de la clientèle, la publicité ainsi que la recherche de marché. Mme Rwasa, femme entrepreneure engagée dans la vannerie a également insisté sur l’amour du métier. « Il faut aimer ce que l’on fait. Ce n’est que par passion qu’on peut évoluer, s’améliorer ». Rencontrer les aînés a été capital, selon Francine, une autre bénéficiaire du projet. Son activité génératrice de revenus démarré en collaboration avec 3 autres jeunes bénéficiaires a mal tourné au début par manque d’expérience. « Nous pensions au bénéfice avant tout autre chose. M. Sébastien nous a appris qu’il fallait au départ travailler pour se construire une réputation, cibler sa clientèle et développer une stratégie marketing, avant de commencer vraiment à gagner de l’argent». Les jeunes ont été encouragés d’adhérer à la chambre sectorielle d’art et d’artisanat pour palier le défi lié à l’écoulement des produits. CHASAA qui met à l’honneur les artisans et leurs produits à travers l’organisation des foires, des expositions-ventes. Elle permet également de développer les réseaux de l’artisanat, au Burundi et dans les autres pays de la sous-région, tant en partage d’expérience qu’en écoulement des produits. Au sortir de la rencontre, Joseph Bazikwankana, chargé du projet au sein de l’ONG KIYO se félicite de l’enthousiasme des jeunes et de leurs accompagnateurs. « Les jeunes apprentis ont échangé avec leurs aînés dans la profession. Nous espérons que les bonnes pratiques apprises vont être implémentées dans leurs activités génératrices de revenus et que ces jeunes vont restituer auprès des autres jeunes qui n’étaient pas présents ».


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