IWACU 544

Page 1

Publicité

IWACU N°544 – Vendredi 16 août 2019 – 2000 Fbu Quartier INSS, Avenue Mwaro n°18 Bujumbura - Burundi Tél. : 22258957

© Droits réservés

Déplorable certes… mais préjudiciable ?

Des directeurs d’écoles menacent de ne pas délivrer des diplômes aux lycéens qui ont déchiré leurs uniformes.

DROITS DE L’HOMME Nyamurenza : justice populaire après un viol

AU COIN DU FEU

SANTÉ P.6

Hépatites B et C : des chiffres inquiétants

P.12

Avec Marie-Louise Sibazuri

P.13


2

LA DEUX Editorial

Par Léandre Sikuyavuga Directeur des Rédactions

C

ertains directeurs des écoles s’apprêteraient à « châtier » les lycéens coupables d’avoir déchiré leurs uniformes pour célébrer leur joie de sortir du secondaire et d’accéder à l’enseignement supérieur. Iwacu et de nombreux lecteurs se sont exprimés là-dessous. Parents, éducateurs, syndicalistes, autorités de l’Etat, à l’unissons, ont « condamné avec toute leur dernière énergie ce comportement indigne et dégradant affiché par ces élèves sur la place publique. » Pour eux, c’est une abomination, un affolement qui dépasse l’entendement. Cependant, si la mesure de ces directeurs devait être appliquée, ces lycéens n’auraient même plus droit à leurs diplômes. Ce qui les éjecterait du système éducatif ! C’est très grave. Une telle mesure est disproportionnée au regard des faits qui restent somme toute mineurs. En tout état de cause, ce qui s’est passé, aussi déplorable soit-il, ne justifie en aucune manière un tel châtiment. La ministre de l’Education doit veiller à ce que les droits (dont celui d’avoir leurs diplômes) de ces lycéens soient maintenus. Mais elle est avant tout un parent et se rappelle que lorsqu’un enfant commet un impair, il faut lui expliquer, le ramener dans le droit chemin. Bref, user de pédagogie. Par ailleurs, à l’échelle de nombreux problèmes auxquels est confronté le système éducatif, le geste posé par les enfants ne devrait pas être tellement prioritaire. Comme parents, citoyens, nous invitons madame la ministre à protéger ces enfants contre ces terribles châtiments. Madame la ministre, l’histoire oubliera les habits déchirés de ces lycéens, mais pas les vies brisées pour une fantaisie de jeunesse.

En coulisse

En hausse

Sur le vif

Bururi : 12 personnes détenues pour «réunion illégale» Neuf enseignants, deux juges et un avocat sont emprisonnés depuis lundi 12 août à la prison centrale de Bururi. Ils ont été arrêtés, dimanche 11 août, à Buta en commune et province Bururi, sur ordre du gouverneur de province. Ils sont accusés de tenir une réunion illégale.

Vaccination contre Ebola : plus de 4300 Burundais attendus Le ministère de la Santé publique a débuté, mardi 13 août, sur la poste frontière de Gatumba, une campagne de vaccination contre Ebola. Les bénéficiaires sont le personnel de première ligne contre cette maladie notamment des agents de l’OBR et des banques, des forces de l'ordre… en poste dans 21 districts prioritaires dans la préparation à la riposte contre Ebola.

Amissi Mohamed change de club Après sa prestation convaincante à la dernière CAN en Egypte, le très prometteur ailier des Intamba s’est engagé avec un nouveau club hollandais. Durant les deux prochaines années, il évoluera sous les couleurs d’Héraclès Almelo, un club de 1ère division hollandaise. Pour rappel, Mohamed Amissi portait les maillots de NAC Breda.

Directeur des Rédactions : Léandre Sikuyavuga

Jules Ulimwengu, international burundais de Rayon Sports, © Droits réservés

Un châtiment qui ne s’explique pas

Vendredi, 16 août 2019 - n°544

P

our avoir été élu meilleure révélation de l’année et meilleur buteur du Championnat Azam Premier League du Rwanda.

En baisse

Sophie Nijimbere de la commune Giharo (Rutana),

P

our avoir brûlé son fils à la bouche.

Image de la semaine

Directeur des Rédactions adjoint : Abbas Mbazumutima Secrétaire de Rédaction : Guibert Mbonimpa Rédaction Politique : Agnès Ndirubusa et Arnaud-Igor Giriteka Economie : Pierre-Claver Banyankiye Sécurité : Fabrice Manirakiza Droits de l'Homme et Justice : Félix Haburiyakira Société : Clarisse Shaka Environnement : Rénovat Ndabashinze Sport et Santé : Hervé Mugisha Culture : Egide Nikiza, Edouard Nkurunziza, Jérémie Misago Equipe technique: Danny Nzeyimana, Ernestine Akimana, Aubin Hicuburundi, Anaïs Hashazinka, Térence Mpozenzi Un chiffre

13.172% est le taux d’augmentation du nombre de sacs et sachets en plastique importés durant les derniers onze mois

Source : Ministère de l’Environnement

Une pensée

« Il y a un apaisement au fond de toute grande impuissance. » Lancement mardi 13 août, au poste frontière de Gatumba, de la campagne de vaccination contre la maladie à virus Ebola pour 21 districts sanitaires prioritaires.

www.iwacu-burundi.org – abakunzi@iwacu-burundi.org

Marguerite Yourcenar


L'ÉVÉNEMENT

Vendredi, 16 août 2019 - n°544

3

Uniformes lacérés : la chasse aux lycéens lancée Un responsable d’une école de Bubanza a décidé que des diplômes ne seront pas remis à 10 élèves finalistes. Il les accuse d’avoir lacéré leurs uniformes et de s’être mal comporté à la fin de l’examen d’Etat. Une décision qui a suscité beaucoup de réactions.

U

ne audio circule sur les réseaux sociaux. Le directeur de l’école secondaire EPM cite les noms des élèves qu’il accuse d’avoir affiché un comportement loin d’être exemplaire. Ils se sont dénudés et ont proféré des injures à l’encontre d’un préfet des études. « Manque d’éducation,» indique ce responsable. Il dit qu’une réunion a été tenue et les sanctions ont été prises : pas de diplôme pour 10 élèves de la section Maintenance qui sont allés à l’encontre du règlement scolaire. « Ils pourront redoubler ». Il assure qu’une note sera envoyée à la ministre, justifiant la prise de décision.

prises soient publiées «Notre accoutrement n’étaient pas indécent. Nous avons déchiré nos uniformes pour manifester notre joie à la fin des études qui n’étaient pas faciles. Maintenant que des photos circulent, je ne sais pas si les miennes vont sortir.»

L’explosion de vendredi

Effet boomerang Une décision qui suscite un tollé chez les élèves. Ce directeur n’est pas le seul à envisager des sanctions et la peur gagne des élèves finalistes. Ils craignent des mesures disproportionnées à la faute commise. La police serait à la poursuite

Des élèves lacèrent leurs uniformes à la fin de l’Examen d’Etat.

« des fauteurs de trouble. » « Je ne crois pas qu’il y ait eu faute. Nous avons fini nos études avec succès et nous avons passé l’examen d’État. Pourquoi penser au redoublement de quelqu’un

qui a réussi ? » S’étonne un finaliste d’une école de Bujumbura. Il dit avoir peur que plusieurs directeurs d’école prennent de telles mesures qu’il qualifie d’excès de zèle.

B., une élève d’une école publique de Bujumbura, dit avoir peur. Elle et ses camarades de classe sont allés à la plage pour fêter la fin de l’école secondaire. Elle s’inquiète que des photos

Vendredi 9 août. Quatre jours après d’examens ouvrant accès aux études universitaires. Les élèves se retrouvent pour célébrer la fin de leurs études secondaires. C’est un vendredi, le week-end s’annonce intense, surtout à Bujumbura. Des soirées sont prévues ici et là. Les élèves en profitent pour refaire à coups de ciseaux leurs uniformes en les déchirant. Une sorte de « rituel » ces dernières années pour célébrer la fin d’études au secondaire. Mais cette fois-ci, elle fait le buzz sur les réseaux sociaux et suscite de vives réactions. Agnès Ndirubusa

Réactions • Le ministère de l’Education : « le ministère en collaboration avec la police des mœurs a entamé des enquêtes.»

L

’inspecteur général de l’enseignement fondamental, Tharcisse Niyongabo estime prématurées les sanctions prises par les responsables des écoles. Il dit qu’il est encore très tôt pour prendre des mesures à l’encontre de ces élèves. Tharcisse Niyongabo indique que le ministère de l’Education en collaboration avec la police des mœurs a entamé des enquêtes sur tout élève qui a participé à la « détérioration des mœurs » par le fait de déchirer les habits. A la fin de l’enquête, il promet des sanctions en conformité avec la loi. Les directeurs d’école doivent attendre la décision du ministère avant de prendre des mesures selon le règlement scolaire.

• Association nationale des parents d’élèves et étudiants : « cela arrive quand on est jeune. »

Edouard Ndikumasabo, président de cette association déplore le comportement affiché par des élèves. Il signale toutefois que ce cas doit être mis dans un cadre de réjouissance des adolescents fait en dehors de l’école. « Ils ont quand même attendu la fin des études et de l’examen d’Etat, pour ça ils peuvent bénéficier de notre clémence à tous en tant que parents, enseignants et éducateurs. » Ce parent demande la tolérance envers ces élèves en plein adolescence qui parfois affichent un comportement troublant. « Même si c’est un comportement à déconseiller, il n’empêche que cela arrive quand on est jeune. »

• La coalition des syndicats des enseignants COSSESSONA : « un comportement regrettable. »

Pour Emmanuel Mashandari, le vice-président de cette coalition des syndicats Conapes, Synatef, Steb-Sleb-Sipesbu et Synapep, il s’agit d’un comportement inhabituel qui présage la remise en cause des bonnes habitudes qui ont toujours caractérisé le système éducatif burundais. « Il est regrettable qu’il y ait une génération d’élèves du post-fondamental qui au lieu de penser à leur avenir, s’investissent à déchirer publiquement les habits ». La coalition demande le respect du matériel scolaire, l’uniforme et de penser aux conditions de vie de certains ménages et développer des valeurs de bonnes relations. « Les responsables d’école doivent interroger la loi et le règlement scolaire avant de procéder aux sanctions ».

www.iwacu-burundi.org – abakunzi@iwacu-burundi.org

A.N.


4

L'ÉVÉNEMENT

Vendredi, 16 août 2019 - n°544

« Il ne faut pas s’acharner à sanctionner »

Jean Bosco Ndayishimiye : « Le comportement de ces élèves est une délinquance. »

Pour le psychosociologue Jean Bosco Ndayishimiye, ces élèves ont manifesté une joie, des émotions subites, mais exagérées. Un comportement qui peut se répercuter sur les futures générations, d’après lui. « Certes, ils ont le droit d’exprimer leurs émotions, mais ils l’ont fait d’une mauvaise manière, contraire aux valeurs et aux mœurs burundaises». Ce psychosociologue parle aussi d’un acte d’adolescence lié à la délinquance. Il estime que les émotions de ces élèves ne devraient pas aller jusqu’à « se déshabiller en plein air, sur la route peut-être. « C’est purement et simplement une délinquance », insiste-t-il. Selon lui, ce comportement peut-être normal pour ces élèves, mais il est anormal pour la société. Quant à la répression, Jean Bosco Ndayishimiye s’interroge sur la sanctionà réserver à des adolescents qui n’ont agi que par des émotions « exagérées

certes », mais en dehors de l’établissement. Pour lui, il faut que le règlement scolaire soit clair sur les faits qui se déroulent en dehors de l’école pour sanctionner ces élèves. Sinon, explique-t-il, la loi peut intervenir en matière de délinquance. « Mais la répression conditionne toujours une plainte. Et celui qui est lésé doit démontrer comment et pourquoi ce comportement des élèves lui porte atteinte. » M. Ndayishimiye trouve injuste de les priver de diplômes, car ils ont réussi en classe. « Ils méritent donc absolument leurs diplômes. » Il estime qu’au lieu de s’acharner sur eux pour les sanctionner, l’Etat devrait plutôt mettre en place un système de rééducation des élèves pour éviter la récidive pour les futures promotions.

Clarisse Shaka

«Rappelle-toi que ton fils n’est pas ton fils, mais le fils de son temps» «C’est de la folie! » ; «C’est révoltant! » ; «Quelle jeunesse ! » Des jugements d’adultes à l’emporte-pièce à la vue des uniformes lacérés au sortir de l’examen d’Etat édition 2018-2019. De quoi ce phénomène social boosté par l’effet amplificateur de la messagerie instantanée WhatsApp est-il le nom ? Quel est son ressort? L’année scolaire 2017-2018 a été marquée par une ordonnance interdisant d’arborer des cheveux longs, des mini-jupes, du maquillage, du vernis et des boucles d’oreilles. Et ce dans le sillage de la campagne de «moral-

isation de la société» lancée par le président Nkurunziza. «We are free at last! », semblent dire des élèves de terminale. Expression du ras-le-bol de la vie austère à l’école. Et au-delà une revanche sur l’idéologie dominante des Eglises évangéliques distillant le souffle de «la fin de l’histoire» tous azimuts sur la société burundaise. Et par là même édictant des mesures disciplinaires reflétant sa vision des bonnes moeurs faisant fi de l’air du temps. Cette « moralisation de la société » qui touche l’école semble passer mal auprès des jeunes de la génération Z (nés entre 1998 et 2016) qui suivent les dernières

tendances de la mode avec un brin d’esprit anticonformiste. C’est la catégorie de la population la plus réceptive à ce que Nietzsche appelle les 3M : le Milieu, le Moment et la Mode. Pour s’affranchir des grilles de lecture des générations X et Y qui empêchent toute lisibilité du phénomène - pardelà le jugement moral -, suivons ce conseil de Confucius : « Rappelle-toi que ton fils n’est pas ton fils, mais le fils de son temps».

Guibert Mbonimpa

ANNONCE

ANNONCE OFFRE POSTE D’ANIMATEUR(TRICE) CULTUREL Organisation

L’Institut Français du Burundi (IFB), - ex centre culturel français - situé dans le centre-ville de Bujumbura, est composé de trois grands pôles : un centre de cours (langues, informatique, musique), une médiathèque et un service d’action culturelle. 20 collaborateurs y travaillent à temps plein. Le service « action culturelle et communication » de l’IFB est en charge de la diffusion de la culture française au Burundi. Il est également un soutien à la culture burundaise en programmant les artistes locaux via différentes manifestations et activités culturelles tels que les spectacles, les rencontres littéraires, les expositions, les débats d’idées, les cinémas… ou en les accompagnant dans leur professionnalisation à travers des formations. Il joue un rôle important permettant à l’IFB de se positionner comme un lieu de dialogue entre les cultures françaises, francophones ou européennes et la culture burundaise. L’IFB est un espace culturel et artistique majeur au Burundi. L’animateur(trice) culturel est en charge de la programmation, de la mise en œuvre et du suivi des missions, actions et manifestations culturelles en collaboration avec le/la chargé(e) de mission action culturelle et communication. Sa mission

est transversale et ses tâches de gestion de projet se déclinent tant sur un volet artistique qu’administratif.

Missions

Placé(e) sous l’autorité du chargé de mission action culturelle et de communication, l’animateur(trice) culturel aura pour mission : • Le choix de programmation sur plusieurs disciplines (danse, théâtre, musique, exposition, etc.) en accord avec la direction • La recherche et le repérage de nouveaux artistes • La rédaction des contrats, associée à tous les aspects administratifs liés au bon déroulement des événements mis en place (demande de visa, lettre d’invitation, etc.) • La coordination entre les artistes et le service technique • La logistique afférente aux événements (feuilles de route, réservation d’hôtel et de transport) et l’accueil des artistes • Le suivi budgétaire annuel et la création ou la mise à jour d’outils de gestion du service (suivi de fréquentation, reporting,…) • La rédaction des bilans des manifestations

L’organisation d’activités hors les murs et des tournées à l’intérieur du pays avec l’aide des partenaires locaux • Le suivi des tournées régionales organisées avec l’IF Paris • L’aide et le conseil aux jeunes artistes Burundais dans un objectif de développement et de professionnalisation • Le suivi sur demande des parcours des artistes repérés L’animateur(trice) culturel est en contact régulier avec les services suivants : secrétariat général, comptabilité, technique, communication ainsi qu’avec la direction. Des missions de renfort en communication en fonction de l’activité ainsi que d’autres missions ponctuelles pourront être ajoutées à cette liste.

Profil

Les candidats devront justifier d’un niveau d’études supérieures niveau licence. Une expérience de 1 à 3 ans dans la gestion de projet. L’utilisation courante d’un ordinateur, des logiciels de bureautique, et de la navigation internet sont nécessaires à la bonne exécution des missions. La connaissance et l’utilisation des outils

www.iwacu-burundi.org – abakunzi@iwacu-burundi.org

d’édition de texte comme Indesign ou de graphisme comme Photoshop et Illustrator sont des atouts. La parfaite maîtrise du Kirundi et du Français à l’oral tout comme à l’écrit est obligatoire. La maîtrise courante de l’anglais et du Swahili sera appréciée. Autonomie, esprit d’initiative et polyvalence sont des atouts indéniables pour mener à bien les tâches confiées. La sensibilité culturelle justifiée par la pratique sérieuse d’une discipline artistique est cruciale afin de comprendre les enjeux du service d’action culturelle et, plus globalement, de l’Institut Français.

Durée :

Début au 7 octobre 2019 CDI en contrat de droit local – période d’essai de deux mois renouvelable une fois. Temps plein Poste catégorie 5, non cadre. Ce poste est susceptible, à terme, d’évoluer en statut cadre.

Procédure:

CV + lettre de motivation à envoyer au plus tard le 30/08 à sg@ifburundi.org Les candidats retenus seront convoqués à un entretien la semaine du 16/09.


ÉCONOMIE

Vendredi, 16 août 2019 - n°544

5

Fuite des capitaux

Hémorragie financière méconnue au Burundi Depuis plus d’une trentaine d’années, les capitaux se ruent illégalement dans les pays étrangers. C’est une véritable saignée, un manque à gagner inestimable pour l’économie burundaise. Deux éminents économistes burundais montrent comment juguler ce fléau.

L

e Burundi a perdu 5,1 milliards de dollars américains de fuite des capitaux depuis 1985 jusqu’en 2015. », révèle le Pr Léonce Ndikumana, Doyen du département d’économie à l’université de Massachusetts aux Etats Unis. Les chiffres sont stupéfiants. Cette saignée est estimée à 10,5% de son produit intérieur brut actuel et 149% de son investissement. Une colossale hémorragie de capitaux. C’était vendredi le 9 septembre dernier dans une conférencedébat qu’il a animée conjointement avec Docteur Janvier Désiré Nkurunziza, Chef de la section de recherche et d’analyse à la direction des produits de base de la CNUCED. Dans son exposé « fuite de capitaux : une entrave au développement économique et social en Afrique », Professeur Léonce Ndikumana a d’abord défini la fuite des capitaux. Ce sont des fonds qui ont été enregistrés entrant dans un pays, mais dont

l’utilisation ne peut pas être retracée dans les statistiques officielles. Bref, une différence entre les sources des devises et leur utilisation, telles qu’elles sont enregistrées dans la balance des paiements du pays.

Comment se fait la fuite des capitaux ? « Ce phénomène illicite se produit par plusieurs manières », souligne Professeur Léonce Ndikumana. Mais les principaux canaux de fuite de capitaux sont : détournement de la dette publique et des recettes d’exportation, la contrebande de billets en devise, la surfacturation des importations et la sous-facturation des exportations. En réalité, les décideurs publics corrompus sont responsables ce crime. Ils détournent des fonds publics. Lorsqu’ils contractent les emprunts, ils agissent dans leurs propres intérêts. Ils négocient les commissions sur les prêts publics et surfacturent les

Léonce Ndikumana : « Le Burundi a perdu 5,1 milliards de dollars américains de fuite des capitaux depuis 1985 jusqu’en 2015.»

marchés publics, etc. Ainsi, les fonds détournés sont transformés en avoirs privés puis transférés sur les comptes dans les banques étrangères.

Les décideurs corrompus en sont responsables Pr Ndikumana dénonce, par ailleurs, que ces dettes ont été, soit contractées sans consentement de la population, soit engagées par des gouvernements autocratiques sans représentation effective du peuple. Ce qui est déplorable, ces prêts n’ont pas été dépensés pour le bien-être de la

population, mais dans l’intérêt personnel des dirigeants. Pour y parvenir, renchérit cet éminent professeur, ces décideurs publics reçoivent un coup de main pour opérer les virements dans l’ombre de la législation sur le secret bancaire. Au Burundi, la falsification des factures de produits importés ou exportés, tant au niveau de la quantité que de la valeur, demeure le moyen le plus utilisé pour la fuite des capitaux au Burundi. Les entreprises fictives ou réelles font la surfacturation. Elles

gonflent la facture de leurs importations afin de bénéficier d’un virement maximal de devises au taux de change officiel. Cette technique frauduleuse consiste à majorer de la valeur en douane déclarée à l’importation. A i n s i , l ’e n t re p r i s e o u l’importateur émet une facture d’un montant supérieur au montant réel du produit. Ce qui lui permet surtout de dégager un excédent de devises, et donc de transférer de l’argent à l’étranger. Pour les exportations, les opérateurs malhonnêtes font aussi la sous-facturation. Ils transigent sur des quantités exportées, souvent à des prix en deçà de leur valeur réelle. Ce qui leur permet d’obtenir des plus-values intéressantes, mais sans contrepartie réelle pour l’économie nationale. Ces opérateurs rapatrient une partie des revenus. Une autre est dissimulée dans les banques étrangères. Et de souligner que les causes qui favorisent la fuite des capitaux au Burundi sont nombreuses. Mais les principales sont les suivantes : la mauvaise gouvernance économique, la mauvaise gestion des ressources naturelles et de la dette extérieure, le secret bancaire et paradis fiscaux sont les principales causes. Pierre Claver Banyankiye

Les conséquences sont désastreuses le développement économique et social. Après les exposés, l’un des participants ne s’est pas retenu. « C’est donc une véritable hémorragie pour notre économie déjà quasiment à l’arrêt », murmuret-il. Dans ce débat riche entre les représentants des banques, des professeurs des universités, des organismes internationaux et les représentants, comment éradiquer ce fléau? Cette question a été posée par la majorité des intervenants.

Sous thème : « Les effets de la fuite des capitaux sur la réduction de la pauvreté en Afrique.» Le consultant d’universités Janvier Désiré Nkurunziza, deuxième intervenant du jour a montré comment la fuite des capitaux a freiné la réduction de la pauvreté en Afrique et au Burundi en particulier.

L

a fuite des capitaux a considérablement sapé la croissance et le développement du Burundi en siphonnant le capital d’investissement potentiel hors du pays. Ce phénomène illicite entraîne les difficultés économiques. La fuite des capitaux accapare le financement des services sociaux. « Ce vol de ressources également amenuise l’épargne publique et privée». Ce pillage compromet

Que faire ? Janvier Désiré Nkurunziza : « Ce vol de ressources également amenuise l’épargne publique et privée. »

la mobilisation des ressources et l’efficacité du financement. Cet expert économiste a fait savoir que la fuite des capitaux affecte surtout la population pauvre. Par ricochet, elle creuse également un fossé entre les riches et les pauvres. Selon lui, si les capitaux qui ont fui en 2000 et 2010 avaient

été investis, le taux moyen annuel aurait augmenté de 1.9 à 2.5 points de % par an. Par conséquent, la réduction de la pauvreté s’accélérait. Pour le Burundi, la fuite des capitaux a réduit la constitution du capital entravant les efforts en faveur de la réduction de la pauvreté estimée à 84% en 2016. Ce qui a freiné

Selon ces deux éminents professeurs, comme on le dit, les problèmes complexes exigent des solutions complexes. C’est le cas de la lutte contre la fuite des capitaux. Pour juguler ce fléau, une meilleure stratégie pour renforcer la capacité de détection des détournements de fonds et la fraude. Et d’augmenter les peines pour les crimes financiers. En outre, une bonne gouvernance et des institutions solides

www.iwacu-burundi.org – abakunzi@iwacu-burundi.org

qui contrôlent la corruption dans les secteurs privé et public sont également incontournables. Particulièrement, il faut à tout prix casser le secret bancaire en appliquant une transparence sur toutes les opérations bancaires. Et mettre en place des mécanismes solides permettant de mesurer de façon rapide, transparente et précise le commerce international. Ce qui permettra de minimiser les fraudes. En attendant la mise en œuvre de ces stratégies émises ci-haut, le gouvernement burundais doit également penser à rapatrier les capitaux qui fuient le pays. Un seul moyen lui ouvert. Accorder une amnistie économique aux personnes qui ont dissimilé des fonds dans les paradis fiscaux en leur promettant qu’une fois leur argent est arrivé au Burundi, il ne sera pas saisi. Signalons que cette conférencedébat a été organisée par la Banque de la République du Burundi. P.C.B.


6

Droits de l'Homme

Vendredi, 16 août 2019 - n°544

Nyamurenza/Ngozi

Œil pour œil, dent pour dent? Après le viol, la mort d’une fillette et le lynchage du présumé violeur sur la colline Nyarusange, commune Nyamurenza en province Ngozi, les habitants sont traumatisés. La famille du présumé violeur est en exil par crainte de représailles. Elle demande protection. Du coup, nombre de personnes se posent des questions sur cette justice populaire.

D

ans la vallée de Gihama, le sang des victimes est toujours visible. La vie de Darlène a été fauchée dans la fleur de l’âge. Elle a été sauvagement tuée le 5 août dernier par un certain Jean Marie. Sa mère, Annonciate Manariyo, est entre la vie et la mort. Blessée à la tête par le même jeune homme. Un autre homme du nom de Bosco Hatungimana est aussi mal en point. Jean marie lui a assené des coups de houe à la tête, le même jour. A quelques kilomètres du cheflieu de la commune Nyamurenza, sur la colline Nyarusange, la population parle toujours de ce qui s’est passé ce jour-là. «Nous sommes toujours traumatisés. C’était la première fois qu’on voyait une chose pareille», raconte une femme, la cinquantaine, en train de puiser de l’eau dans la vallée de Kaburantwa. Chez Déo Rwasa, le père de Jean Marie, aucune âme qui vive. Ils se sont tous enfouis. «Cet incident alimente toujours les discussions sur la colline», ajoute une autre femme. M. Rwasa a déserté son foyer par peur de représailles. Régine Mpabonimana, la mère de la fillette violée, ne vit plus chez elle depuis ce jour tragique. Elle vit sur une autre colline avec sa fille, la victime. «J’ai peur à cause des paroles qui se disent». D’après elle, elle reçoit des menaces. «Le jour où ma fille a été violée, je n’étais pas là. Quand Jean Marie a été lynché, je n’étais pas là. Je ne sais pas pourquoi ils veulent s’en prendre à moi alors que ma fille a été violée». Aujourd’hui, sa fille est traumatisée. Elle est sous médicaments.

Le viol Le crime est commis mardi 6 août, en toute fraîcheur matinale. Régine Mpabonimana est partie, depuis l’aube, à l’Hôpital de Buye pour des soins médicaux. A la maison, chez elle, sa fille D., 12 ans, et son neveu Jean Marie, 22ans. Depuis sous peu, Jean Marie vit chez sa tante… Régine est allée se faire soigner en toute tranquillité, convaincue que sa maison est bien gardée par des cousins. Des cousins naturellement en franche collaboration, s’accordent à dire les habitants de Gihama. «Jean Marie était un jeune homme, au caractère bon enfant, plutôt très sage. On ne contait pas de lui une probable criminalité».

colère sur elle. Un coup de houe sur la tête. De loin, sa mère qui assiste à la scène n’en croit pas ses yeux. La petite s’écroule par terre. Affolée, Annonciate Manariyo revient pour tirer sa fille des mains de l’assassin. Une occasion que ce dernier attendait. D’un autre coup de houe, Jean Marie blesse la mère au niveau de la tête. Elle s’évanouit aussitôt. Dans l’entretemps, suite aux cris, la population environnante a investi petit à petit les lieux. Alors qu’il tente un deuxième coup pour l’abattre définitivement, ces habitants se précipitent vers lui pour l’attraper. Il prend le large avec sa houe.

La vengeance

La tante du violeur et mère de la fillette violée se dit traumatisée.

L’habitation de Régine est mitoyenne de celle de son frère, Déo Rwasa, le père de Jean Marie. Cette matinée, Rwasa est à la maison, il n’est pas allé dans ses travaux champêtres. A un moment, il perçoit des hurlements, des cris assourdissants issus de la maison de sa sœur. «Il s’est dépêché tout d’un coup pour constater ce qui s’y passait», affirme un voisin de Rwasa. «Le viol était en pleine consommation, la mineure criait». Atroce. Ce vieil homme, en bon parent, en a eu un chat dans la gorge.

Le meurtre Déo Rwasa ne réfléchit pas de midi à 14h. Il faut faire vite. «Il a soudainement sauté sur son fils et a essayé de le tirer de la fillette». Et puis, un retournement de situation. Tandis que la fillette se sauve, Jean Marie se retourne vers son père. Un bras de fer pendant quelques minutes. Mais Rwasa n’allait pas tarder à être vaincu si Annonciate Manariyo, une femme de la localité, ne survenait, soulignent les habitants. Cette femme qui vient, en compagnie de sa fille Darlène, récolter la patate douce pour le dîner,

Déo Rwasa et sa sœur ont pris fuite, quittant leurs foyers de peur de représailles des familles éprouvées.

apporte vite secours à Rwasa qui commence à crier à son tour. Relâché, ce dernier se sauve à toutes jambes. Mme Manariyo également. Et puis, l’escalade… Pris de colère, Jean Marie s’empare d’une petite houe de la maison. Il va à la recherche de ceux qui viennent de l’interrompre dans son crime.

Mais ils sont déjà très loin. A proximité, dans le champ de patates douces de Mme Manariyo, Darlène, 7ans, n’est pas préoccupée par les événements. Quand sa mère a couru, elle ne s’est pas sentie concernée. Jean Marie la retrouve làbas, poursuivant la récolte de la patate. Et il déverse toute sa

www.iwacu-burundi.org – abakunzi@iwacu-burundi.org

Au bout de la fuite, il rencontre Jean Bosco Hatungimana, un jeune homme de Nyarusange, vivant avec handicap, qui se rend au chef-lieu communal. Ce dernier, alors qu’il l’avertit qu’une foule le poursuit de loin derrière, Jean Marie réplique : «Tu étais là toi ? Je ne t’avais pas vu ». Et il se tourne vers lui. Jean Bosco Hatungimana reçoit plusieurs coups au niveau de la tête et perd connaissance. «C’est comme si une folie s’était emparée de Jean Marie», analysent des femmes de Nyarusange. Des habitants de Gihama et Nyarusange, arrivés dans la foulée, l’attrapent et le lynchent avant qu’il n’assomme Hatungimana. Mme Manariyo et M. Hatungimana sont alors dépêchés au centre de santé de Ntega. Quant à Darlène, elle est déjà passée de vie à trépas. Pourquoi ces habitants ont-ils lynché le jeune homme alors qu’ils l’avaient déjà attrapé ? Des habitants de Nyarusange soutiennent qu’il n’y avait pas d’autre alternative. «Il fallait le mettre hors d’état de nuire. Sinon, il allait exterminer tout le monde». Et qui l’ont lynché ? Ces habitants répondent : «C’était toute une foule. On ne peut vraiment pas les identifier.» Interrogé, Dieudonné Niyonzima, administrateur de la commune Nyamurenza, assure que des enquêtes sont en cours : «Le dossier est aux mains de la police judiciaire pour des enquêtes. Attendons les conclusions, je ne puis en dire quoi que ce soit.» Edouard Nkurunziza et Fabrice Manirakiza


Droits de l'Homme

Vendredi, 16 août 2019 - n°544

7

Commune Bubanza

Les violences économiques, un mal qui ronge les ménages Les cas de violences économiques dans la commune Bubanza prennent une allure très inquiétante. Ce phénomène déstabilise les ménages. Les défenseurs des droits humains interpellent les victimes à sortir de leur silence.

P

lus de 20 cas de violences économiques ont été documentés pour le seul mois de juillet par le Réseau burundais des personnes vivant avec le VIH/SIDA (RBP+), antenne de Bubanza. Il s’agit de la dilapidation des ressources familiales dont l’un des conjoints est victime. Les femmes étant essentiellement les victimes. En effet, explique Antoine Icihagazeko, responsable de RBP+, certains hommes vendent les récoltes ou le bétail à l’insu de leurs épouses et profitent seuls de l’argent reçu. Selon lui, ce phénomène inquiète et entraîne des violences physiques et psychologiques. Les cas documentés sont loin de refléter la réalité sur le terrain. « Les femmes sont parfois battues, traumatisées quand elles réclament la gestion des fonds perçus », déplore cet activiste des VBG.

Certaines femmes, venues se confier au responsable de RPP+, ne cachent pas leur calvaire. « Quand j’ai demandé à mon mari le montant perçu après la vente de notre chèvre, je n’ai reçu que des coups et des insultes », témoigne, B.H. «Je ne voie pas comment exprimer ma douleur quand j’ai remarqué que mon mari a vendu tout le riz sans apporter le moindre sous », raconte N.B. en sanglots de la colline Shari I. Or, déplore-t-elle, il ne m’a jamais accompagné pendant le semis. « Tous mes efforts sont devenus vains ». Pour M. Icihagazeko, la dilapidation des biens familiaux présente une double frustration pour les victimes. D’une part, certains en profitent pour entretenir des concubines et désertent le toit conjugal. D’autre part,

d’autres trempent dans l’ivresse et oublient la consommation du mariage. B.N. 30 ans, mariée à un militaire, raconte son calvaire : « Après avoir consommé tout le salaire perçu à l’issue de sa mission en Somalie, mon mari a détruit le toit de la maison et vendu toutes les tôles. J’erre dans la rue avec mes trois enfants.» Ce n’est pas tout. Mme B.N. continue son récit douloureux : « Il a confisqué mon téléphone et l’a vendu aux enchères. Il a brûlé tous mes habits. Il m’accuse faussement d’être une prostituée. » G. H., quant à elle, est une fonctionnaire mariée à un enseignant. Elle utilise son maigre salaire pour subvenir à toutes les dépenses familiales. « Mon mari est devenu alcoolique. Il ne m’aide en rien. Je suis traumatisée et dépassée par les événements ».

Il faut briser le silence Julien Irakoze, point focal de l’association: Unissons-nous pour la promotion des vulnérables, explique la recrudes-

Antoine Icihagazeko : « Les femmes sont parfois battues, traumatisées quand elles réclament la gestion des fonds perçus.»

cence des violences économiques par plusieurs facteurs. Les victimes ont peur d’être stigmatisées par l’entourage. Il y a aussi des menaces de représailles par leurs maris qui pèsent sur les victimes empêchant ces dernières de porter plainte. La plupart des femmes ignorent les procédures judiciaires. D’autres ne sont pas sensibilisées sur les textes légaux. De son côté, Denise Bambarukontari, leader communautaire sur la colline Shari I, estime que

les violences économiques sont accentuées par l’inégalité de pouvoir entre l’homme et la femme. « Il faut des lois égalitaires entre l’homme et la femme ». Cette activiste déplore le silence de certaines femmes face aux violences qu’elles subissent. Et de les interpeller : « Il faut qu’elles sortent de leur silence et dénoncent les abus. Le tabou doit être brisé.» Félix Haburiyakira

ENVIRONNEMENT

Emballages plastiques, ses jours sont comptés Le ministère de l’Environnement, de l’Agriculture et de l’élevage a interdit toutes les importations des sacs et sachets en polymère d’éthylène (non biodégradable). Idem pour la matière première servant à leur fabrication.

L

e gouvernement passe à la vitesse supérieure. La mesure est applicable à partir du 22 août 2019, a annoncé Déo-Guide Rurema, ministre en charge de l’environnement. Toutes les autorisations de fabrication de sacs et sachets en plastique sont aussi annulées. S’exprimant lors d’une conférence de presse, mardi 14 août, il a déclaré que quiconque sera attrapé après le délai de grâce en possession d’un sac ou sachet en plastique sera puni conformément à la loi en vigueur. «Nous demandons à l’Office Burundais des recettes (OBR) et la police de nous prêter main forte pour que ces mesures soient appliquées à la lettre». Entretemps, le ministère en charge de l’environnement promet de procéder à la vérification de l’authenticité des autorisations utilisées dans les différentes importations. En ce qui est des substituants, M. Rurema tranquillise : «La population ne devra pas s’inquiéter des

Déo-Guide Rurema : «En vue d’encourager les promoteurs des produits de substitution, une ordonnance ministérielle conjointe a été élaborée.»

produits alternatifs. Ils existent déjà sur le marché.» D’ailleurs, en vue d’encourager les promoteurs des produits de substitution, il a précisé qu’une ordonnance ministérielle conjointe a été élaborée. « Elle sera bientôt mise en place pour définir les modalités d’encouragement». Et d’interpeler les importateurs et tous les fabricants de sacs et sachets en plastique à

commencer déjà à importer ou à fabriquer ces produits de substitution.

Résultat d’un constat amer A six mois de l’expiration du délai donné aux importateurs et aux utilisateurs des sachets en plastique, le ministre Rurema affirme que la situation est déplorable. «Les sachets sont

toujours utilisés comme avant et observés en grande quantité sur le marché. Même de nouvelles catégories de sachets ont été introduites après le décret», regrette le ministre Rurema. Par surprise, le ministère affirme avoir découvert que la majorité des sachets rencontrés sur le marché sont fabriqués au Burundi. «Il existe encore des stocks énormes dans les dépôts des usines de fabrication des sachets. Il y a même certains fabricants et importateurs qui disent qu’il reste des commandes non encore exécutées». Se référant aux données de l’OBR, il signale que les importations des sacs et sachets en plastique ont augmenté. Il évoque par exemple le cas d’un importateur dont ses importations sont passées de 700 colis avant le décret à plus de 55 millions colis. Idem pour la matière première. C’est le cas d’un importateur dont ses importations sont passées de 364.566 kg à plus de 997 tonnes. Une preuve, selon lui, de

www.iwacu-burundi.org – abakunzi@iwacu-burundi.org

l’existence en abondance de ces emballages sur le marché. Les défenseurs de l’environnement applaudissent. «C’est une bonne chose de passer à l’action car les outils juridiques sont disponibles. Nous félicitons le gouvernement via le ministère en charge de l’environnement», a réagi Tharcisse Ndayizeye, environnementaliste. Pour Albert Mbonerane, un autre environnementaliste, c’est une bonne nouvelle, une mesure encourageante. « Quand il y a la volonté politique, tout devient possible». Pour rappel, dans le but de préserver la santé humaine et protéger l’environnement, un décret interdisant l’importation, la fabrication, la commercialisation et l’utilisation des sachets et d’autres emballages en plastique a été signé le 8 août 2018. Un délai de 18 mois a été accordé pour écouler les stocks et les commandes passées. Rénovat Ndabashinze


ENVIRONNEMENT

8

Vendredi, 16 août 2019 - n°544

« En parlant de la biodiversité, parlons aussi de l’homme » Des feux de brousse ne cessent de dévaster plusieurs hectares de forêts. Riches en biodiversité, les aires protégées du Sud ne sont pas épargnées. Léonidas Nzigiyimpa, président de l’association ‘’Conservation et Communauté de Changement ‘’ (3C) fait le point.

Q

uel est l’état des lieux des feux de brousse au sud du pays ?

Ils sont devenus récurrents, surtout pendant les mois de juillet, août et septembre. On les appelle des feux tardifs à l’opposé des feux précoces. Ces derniers s’observent en avril, mai et juin. Ce sont généralement des feux de gestion. C’est le cas des aires protégées dans la savane abritant des herbivores à l’instar du Parc National de la Ruvubu. D’une part, ce sont des feux volontaires qui permettent d’avoir de jeunes pâturages durant la saison sèche. D’autre part, c’est une technique utilisée pour créer des îlots servant de barrage en cas d’incendie criminelle ou accidentelle. Ce genre de feux permet de suivre l’évolution de différentes espèces d’arbres ou d’herbes dans un espace donné. Spécifiquement dans le sud du pays, quelle est la situation ? Cette année, plusieurs cas de feux de brousse tardifs y ont été déjà observés. D’après les agents de l’OBPE (Office Burundais pour la Protection de l’Environnement) affectés sur place, le bilan est de 20 ha dans la réserve naturelle forestière de Bururi (Gikokoma) ravagés par le feu, 63 ha dans la réserve naturelle de Vyanda (60 ha à Muzimu et 3 ha à Murongozi) et 200 ha dans les paysages protégés de Mukungu Rukambasi. Quelle est l’importance de cet espace? Au sud du Burundi, nous avons la réserve forestière de Bururi, celle de Vyanda, la réserve forestière de Rumonge, la petite réserve de Nkayamba aux portes de la sortie de la ville de Rumonge vers Bujumbura, et Kigwena. Cette dernière est une forêt impressionnante qui ressemble étrangement à la forêt équatoriale. Nous avons aussi les paysages protégés de Makamba. Tout cet espace géographique constitue un hotspot. C’est-à-dire ? Il s’agit d’un terme technique pour désigner une aire protégée ou un espace considéré comme très riche en biodiversité. Je donne l’exemple de quelques espèces emblématiques : les chimpanzés à Bururi et Vyanda

et les massifs montagneux de des brûlis dans les champs ou Mukungu-Rukambasi. viennent des ménages installés Ces aires sont aussi très riches à l’intérieur de ces aires protéen services éco-systémiques. Ce gées. Il y a aussi des collecteurs sont des sources d’eau, des châ- de bois de chauffe, des éleveurs teaux d’eau très importants. S’il à la recherche de pâturage. advenait que ces aires protégées disparaissent, ces sources tariNéanmoins, toutes ces aires raient. disposent des éco-gardes …. Toutes ces aires protégées sont dans le bassin du Congo. Les Oui. Face à cette situation, cours d’eau les services de la qui y pren- «Les communautés conservation sont nent source impuissants pour riveraines sont sont des affluplusieurs raisons. faiblement ents du lac Malgré leur voloimpliquées dans Tanganyika. nté et leur courage, Ce dernier ils sont numérila gestion et la doit en et qualiprotection desdites quement grande partie tativement insufaires protégées. » fisants. son existence à ces forêts Sont-ils les seuls perchées sur le prolongement sud de la Crête handicaps pour une préserCongo-Nil. vation effective de ces patriLa richesse biologique y est moines ? aussi immense. On trouve une espèce endémique de grenouille Les communautés riveraines à Bururi. Il s’agit de la petite gre- sont faiblement impliquées nouille bleue également trouvée dans la gestion et la protection récemment dans la région du lift desdites aires protégées. PlusAlbertin. ieurs conflits fonciers existent entre les services de leur gestion Quelles sont les causes de ces et les riverains. D’où un manque feux de brousse ? de collaboration. Ces aires n’ont pas de budget Quelques cas sont provoqués de propre, hormis les petits salaires manière accidentelle, mais beau- peu motivants des éco-gardes. coup de feux de brousse résultent Elles ont très peu de parte-

naires techniques et financiers. toujours des problèmes. Je suis Du coup, les communautés ne convaincu que la solution duravoient pas directement d’intérêt ble passera par là. pour la conservation de ces espaces. Elles les considèrent Comment les impliquer ? comme des espaces non-valorisés. Il faut engager un dialogue, N’y-a-t-il pas aussi un un cadre de collaboration perproblème de senmanente. Et ce, à «Il faut initier travers la mise en sibilisation et des mesures d’aménagement de place des comités territoire ? incitatives en locaux de gestion de la biodiversité. faveur de ces Mais il faut que Il existe un conflit entre le développe- communautés.» ces derniers soiment et la conservaent suffisamment tion. Plusieurs infrastructures formés. Il faut initier des mesures socio-économiques telles que incitatives en faveur de ces comdes écoles, des centres de santé… munautés. sont érigées dans les aires protégées à Vyanda, Kigwena et Lesquelles? Rukambasi. Très peu d’actions de sensibilisation des communauInitier des actions génératrices tés sur la prévention des feux de de revenus. Il a été constaté que brousse et sur ses conséquences la pauvreté est l’une des causes néfastes sur l’environnement majeures de la destruction de sont menées. la biodiversité. En s’y attaquant, Pour les administratifs à la base, nos forêts, nos aires protégées il y a ignorance des dangers que seront préservées. Pendant comportent ces feux de brousse longtemps, nous nous sommes sur les ressources naturelles. focalisés sur la biodiversité, sur Côté technicien de l’environnement. Nous avons l’environnement, le manque de oublié ces communautés qui ont moyens et de motivation est un toujours vécu dans ces espaces. handicap sérieux pour concevoir Maintenant, il faut changer de et appliquer un programme constratégie. En parlant de la bioditinu de sensibilisation. versité, parlons aussi de l’homme. Tant que les communautés ne Ainsi, nous gagnerons le pari. seront pas impliquées, il y aura Propos recueillis par Rénovat Ndabashinze

www.iwacu-burundi.org – abakunzi@iwacu-burundi.org


SOCIÉTÉ

Vendredi, 16 août 2019 - n°544

9

Bubanza : procès de la honte ? Emile Niragira, policier du commissariat de Gihanga, a été acquitté par le Tribunal de Grande Instance de Bubanza. Il était accusé du meurtre d’un habitant paisible de ladite commune. Retour sur une affaire qui a défrayé la chronique dans cette province.

N

ous sommes lundi 12 août, 16h30. La salle d’audience du Tribunal de Grande Instance est pleine à craquer. Faute de places, certains s’agglutinent sur les fenêtres pour ne rien rater du verdict. Toutes ces personnes attendent impatiemment l’issue du procès sur la mort de Jean Claude Nizigiyimana. Ce citoyen de la commune Gihanga est décédé mardi 6 août au centre médico-chirurgical de Kinindo. Il a succombé aux blessures lui infligées dans la soirée du samedi 3 août. Les avocats des prévenus et des plaignants transpirent. Angoisse du verdict ou effet de la chaleur ? Difficile de savoir. Après une brève attente, les juges font leur apparition dans la salle. Protocole oblige, l’auditoire se lève. Le président du siège invite le public à se rasseoir. Ça y est, le moment fatidique arrive. Fixant la feuille sur laquelle est inscrit le jugement, il prononce sa sentence : «Après délibération, nous déclarons que l’accusé Emile Niragira est acquitté et qu’il est exempté de toute réparation ». Aussitôt, l’accusé saute de joie dans les bras de son avocat. Quant à la partie plaignante, c’est la stupeur et la consternation totale. La veuve enceinte sort de l’audience en sanglotant. Même le public n’en croit pas ses oreilles. « Je ne m’attendais pas à un acquittement. J’étais plus ou moins convaincu qu’une peine, aussi petite soit-elle, serait prononcée à l’endroit de l’accusé.», lâche amèrement un passant à la sortie de l’audience. Et d’ajouter que le tribunal vient de se couvrir de honte. La déception se lit sur les visages des gens présents. Pourquoi sont-ils convaincus de l’iniquité du verdict ? Que s’est-il réellement passé ?

Le siège du Tribunal de Grande Instance de Bubanza.

time Claude Nizigiyimana. Puis, le policier a feint de le saluer et l’a mis KO par terre. Ensuite, il l’aurait piétiné violemment au niveau de l’abdomen. Les juges ont voulu savoir ce que le policier pouvait reprocher à la victime. Le ministère public a répliqué que c’est l’animus necandi (la volonté d’obtenir la mort d’autrui). M. Niragira a infligé des coups et blessures volontaires ayant entraîné la mort de Nizigiyimana. Par ailleurs, l’expertise médicale montre que la rate, le pancréas et les intestins ont été gravement endommagés. L’accusé a, quant

à lui, toujours clamé son innocence devant la barre. Il indique qu’il n’est jamais sorti sans autorisation et qu’il ne connaissait pas la victime. «Vous m’accusez d’avoir piétiné le défunt jusqu’à lui causer des traumatismes au niveau du ventre, c’est faux. Mes jambes sont faibles. Elles ont eu un accident au mois de janvier. Ils ne peuvent pas causer de tels dégâts », s’est-il justifié. Lors de la comparution, un pansement était enroulé sur sa jambe gauche. Côté plaignant, le déroulé de l’histoire est différent. Selon le témoignage de la veuve, son mari

est arrivé à son domicile dans un piteux état dans la nuit du 3 août. « Il m’a dit qu’un certain ‘‘de corps’’ et son agent de transmission l’ont tué ». Ici, la victime fait allusion à Benjamin Nzojiyobiri alias « de corps » et Emile Niragira l’accusé principal.

Des zones d’ombre Lors du procès, M. Nzojiyobiri s'est présenté à la barre comme celui qui est venu à la rescousse de la victime. Il l’aurait reconnu et demandé à Niragira d’arrêter de le passer à tabac. Un témoin à charge.

Selon le ministère public, le coupable n’est autre que le brigadier de première classe Emile Niragira. Le jour du drame, il serait sorti du camp sans autorisation et aurait rencontré la vic-

© Droits réservés

Emile Niragira, le présumé coupable

Jean Claude Nizigiyimana a succombé à ses blessures.

www.iwacu-burundi.org – abakunzi@iwacu-burundi.org

Or, il a été désigné avec l’accusé principal comme bourreaux par la victime sur son chevet à l’hôpital. Un enregistrement audiovisuel étayant ses affirmations est disponible. Il a été même présenté aux juges. Aurait-il été exploité ? Personne ne le saura. Présent au procès, un habitant de Gihanga, va donner une autre version sous anonymat : «Le malheur de Jean Claude Nizigiyamana est qu’il est passé au mauvais endroit au mauvais moment. » En rentrant, poursuit-il, la victime est passée près du véhicule de Benjamin Nzojiyobiri. Ce dernier était en galante compagnie. Entre temps, Emile Niragira montait la garde. Il surveillait les yeux indiscrets susceptibles de troubler l’ambiance des «tourtereaux» en voiture. C’est là que la victime s’est vue tabasser. D’où la question de savoir si ses affirmations ne sont pas gratuites. Et de répondre qu’Evelyne Ndayiragije, une fille appelée à la barre comme témoin des faits, a été accusée par le brigadier Niragira d’être la maîtresse de Nzojiyobiri. Il a demandé à la cour de ne pas prendre en considération son témoignage parce qu’elle est de connivence avec Benjamin Nzojiyobiri. «N’est-ce pas une preuve qui soutient mes allégations », sur ces mots, il s’en est allé en hochant la tête. Onesphore Nzeyimana, activiste des droits de l’Homme dans cette province, déplore aussi l’issue du procès. Néanmoins, il se réjouit que le ministère public ait promis d’interjeter appel. Arnaud Igor Giriteka


10

Vendredi, 16 août 2019 - n°544

FAIRE FONCTIONNER LES MARCHES POUR LES PAUVRES: CAS DE LA CHAINE DE VALEUR BANANE

L

e Burundi est un pays enclavé avec une superficie de 27 834 kmÇ. Il fait partie des cinq pays les plus pauvres de la planète. La pauvreté est principalement rurale et touché essentiellement les petits agriculteurs. L’économie burundaise est largement tributaire de l’agriculture, qui emploie 90 % de la population. Pour améliorer ce tableau non lumineux, s’appuyant sur le Plan National d'investissement agricole (PNIA), ICCO Coopération a utilisé l’approche Making Markets Work for the Poor /faire fonctionner les marchés pour les pauvres qui vise l’amélioration durable et effective des conditions de vie des pauvres, en comprenant et en agissant sur les systèmes de marché. Selon l’assistant technique chargé du développement des

marchés agricoles M. Euphrem Nduwimana, pour ce faire, le programme ICCO Coopération a apporté un appui aux organisations des producteurs (OPs) à travers des formations sur les techniques agricoles y compris les techniques post-récoltes, la facilitation de l’accès aux intrants de qualité, la mise en place des champs modèles pour développer et pérenniser le processus d’apprentissage. Un des bénéficiaires de ces formations, Majambere, membre et président de la Coopérative Duserukire Igitoke en témoigne: C’est grâce aux formations en techniques agricoles et en éducation financière que nous avons pu augmenter la qualité et la quantité de notre production. Quand ICCO Coopération nous a mis en contact avec Imena SPRL, une unité de transformation de

banane basée à Kayanza, un contrat a été signé entre notre coopérative et cette société. Dans les clauses du contrat, il était convenu qu’on fournisse en moyenne, chaque semaine, 4000 tonnes de régimes de bananes d’une même variété. Nous avons ouvert un compte bancaire pour la coopérative. Les paiements de l’entreprise Imena se faisaient dorénavant directement sur le compte. Cela nous a permis d’être éligible au crédit chaine de valeur. Je dois dire que les 4000 tonnes qu’on fournit chaque semaine ont été atteintes grâce à ce crédit. » Du coté de Imena SPRL, l’impact est aussi évident. « Avant, on s’approvisionnait dans les marchés de la place. Il nous fallait faire le tri parce que les commerçants vendaient plusieurs variétés de bananes. En plus de la qualité, les quantités atteignaient rarement ce qu’on souhaitait. Depuis le partenariat avec cette coopérative, nous avons chaque semaine la qualité et la quantité voulue. » Affirme Muvunyi Révérien, le Directeur Administratif et Financier. En plus de la mise en liaison de l’OP Duserugikire Igitoke et Imena SPRL, ICCO Coopération a également concentré ses interventions sur la promotion des initiatives innovantes visant la récupération et la valorisation des déchets issus de la transformation de la

banane en compost qui a été testé et homologué par l’Institut des Sciences Agronomiques du Burundi, ISABU et est utilisée actuellement comme fumure

organique par les multiplicateurs de semences de pomme de terre en province de Kayanza.

Au Burundi depuis 2014, ICCO Coopération a garanti la connexion en facilitant des partenariats entre les organisations de producteurs avec les marchés agricoles au niveau des chaînes de valeur riz, banane, pommes de terre et manioc en leur fournissant des circuits de commercialisation fiables pour leurs produits et en les connectant aux services financiers appropriés.

ICCO MAVC Triangle

www.iwacu-burundi.org – abakunzi@iwacu-burundi.org


11

ICCO Coopération, partenaire incontournable dans la finance rurale Icco Coopération en collaboration avec le réseau des institutions de microfinances au Burundi, RIM, appuie l’organisation de la semaine de la microfinance à Bujumbura du 5 au 9 août en vue de mener une profonde réflexion sur les pratiques et les orientations de la finance rurale innovantes visant une inclusion financière effective.

P

our relever ce défi d’accès à la finance rurale inclusive au Burundi, appuyée par le Royaume des Pays Bas, l‘organisation Icco Coopération contribue depuis 4 ans, à assouplir les contraintes qui entravent le développement des services financiers à l’intention des familles de petits agriculteurs, dont les femmes et les jeunes, et des petites entreprises agroalimentaires. Elle soutient et encourage les secteurs financiers à développer des approches innovantes. C’est dans ce cadre qu’Icco Coopération au Burundi en collaboration avec le réseau des institutions de microfinance au Burundi, RIM, a appuyé l’organisation de la semaine de la microfinance à Bujumbura du 5 au 9 août en vue de mener une profonde réflexion sur les pratiques et les orientations de la finance rurale innovante visant une inclusion financière effective. Pendant ses quatre ans d’activités, cette organisation d’origine néerlandaise a mené des initiatives visant à soutenir Institutions de Microfinance (IMFs) et accompagner ces groupes cibles notamment les femmes et les jeunes en vue de relever le niveau d’inclusion financière. « Les femmes et les jeunes ont été choisi parce qu’ils constituent une catégorie exclue du circuit financier. Les jeunes constituent 60% de la population et ne parviennent pas à trouver de l’emploi dans le secteur public et privé. Ils sont défavorisés par rapport à l’accès aux ressources naturelles, intrants agricoles et aux financements. Et les femmes aussi n’ont pas accès aux ressources financières », a fait savoir Netlyn Bernard, directrice régionale des opérations d’ICCO Coopération.

de nombreux partenaires incluant 13 instititutions des microfinances et le Réseau des Institutions des Microfinances. « Je suis fière d’être présente pendant la semaine de la microfinance pour appuyer et avoir une discussion profonde sur la problématique de la finance rurale » a-t-elle ajouté. D’après les statistiques, 73% de la population sont exclus financièrement. Raison pour laquelle ICCO Copération a utilisé des outils et ceux qu’elle aimerait amener pour pouvoir travailler sur cette problématique de manière innovante et pratique. « Comme nous travaillons dans le monde rural et il a fallu qu’Icco Coopération développe des outils adaptés au monde rural», explique Willy Hatungimana, Directeur Pays d’ICCO Coopération. Il cite notamment le crédit Warrantage qui est un financement pour les producteurs et agriculteurs réunis dans une organisation paysanne ou la garantie est matérialisée par les stocks de récolte dans un hangar . Un Crédit solidaire pour des personnes pauvres mais économiquement actives qui n’ont pas accès au service financier. « Il y a des conditions préalables. Ils doivent se connaître et accepter de se cautionner mutuellement. Ils se mettent ensemble et essaient de collecter des épargnes et par après, ils reçoivent de l’IMF un crédit à montant évolutif ». En plus, il y a un Crédit agricole délivré en utilisant un outil appelé A-CAT. Il s’agit d’un outil d’analyse de crédit. Il permet

Domitien Ndihokubwayo, ministre des Finances (à droite) discutant avec la directrice régionale des opérations dans le stand d’ICCO Coopération

aux IMFs de réduire les risques et le crédit est rapide. Il y a aussi un financement des chaînes de valeur pour les cultures de manioc, du riz, pomme de terre et la banane. Pour Willy Hatangimana, ICCO Coopération a développé aussi le produit qui consiste à créer la connexion entre les petits groupes informels d’épargne et de crédits et les IMFs formelles. Les VSLA sont des petites associations villageoises d’épargne et de crédit autogérées par les pauvres dans les zones rurales. Chaque groupe est composé de 15- 30 qui s’organisent avec les régulations internes sur les épargnes, crédit et leurs autres règles d’organisation. Les IMFs peuvent collecter les épargnes des groupes qui sont en surliquidités et octroyer des prêts à ceux qui en manquent. Le compte est ouvert

Une inclusion financière effective D’après elle, ils ont commencé un programme sur la Microfinance, l’Agrifinance, et le développement des Chaines de Valeur appelé MAVC financé par l’Ambassade du Royaume de Pays-Bas au Burundi. Dans ce programme, renchérit-elle, ils ont

De gauche à droite, le directeur Pays, Directrice Régionale des Operations, le Président du Conseil d’Administration du RIM, lors d’un point de presse

au nom du VSLA et bénéficie du crédit de l’IMF. Un autre produit appelé créditbail pour aider les agriculteurs d’acheter ce dont ils ont besoin tandis que le mobile banking et le micro assurance sont en cours d’étude.

Des réalisations salutaires Bernard Kinyata, President du RIM et Directeur General du RECECA INKINGI salue l’appui apporté par ICCO Coopération dans le secteur des microfinances. Les statistiques montrent que le niveau de pénétration des services financiers en milieu rural a sensiblement augmenté. Le partenariat entre ICCO Coopération et le secteur des microfinances a permis aux Institutions de Microfinance(IMFs) de renforcer leur présence en milieu rural mais également de renforcer le financement agricole étant donné que beaucoup de personnes pensent que financer l’agriculture est risqué », s’est réjoui Bernard Kinyata. Pour lui, ICCO Coopération aide dans le renforcement de capacité par des formations et des moyens. « Elle a contribué également à l’éducation financière et le niveau d’inclusion financière est passé de 12.5 en 2012 à 25% » Egide Nsavyimana, un jeune

www.iwacu-burundi.org – abakunzi@iwacu-burundi.org

orphelin de la province Bubanza, bénéficiaire du soutien d’ICCO Coopération ne tarit pas d’éloges. « A travers le programme de MAVC, les agents de la coopérative d’épargne et de crédit Mutuel CECM sont souvent venus vers notre association Abanyamwete. Je suis le seul garçon dans cette association constituée de femmes. Nous avons bénéficié et profité des formations organisées grâce à ICCO Coopération. Elles ont porté sur les techniques agricoles et sur l’éducation financière. Grâce aux connaissances acquises, j’ai ouvert un compte à la CECM. Je vous assure que cela m’a beaucoup aidé à planifier mes dépenses et quelques mois après, grâce à un outil appelé A-CAT, j’ai bénéficié d’un crédit de 2 millions de nos francs ». Elle se réjouit que les retombées soient énormes. En plus de l’augmentation de la productivité agricole, Nsavyimana a acheté une vache qui lui donne actuellement 9 litres de lait par jour. « Une partie de ce lait est consommée à la maison par les membres de ma famille et le reste vendu chez mes voisins. J’avoue que je suis comblé ». Notons qu’une foire financière a été organisée au terrain dit « Tempête » et les acteurs du secteur des microfinances ont exposé leurs produits financiers à la population.


12

SANTÉ

Vendredi, 16 août 2019 - n°544

Hépatite, cette maladie sournoise 5 à 10% est la séroprévalence des hépatites virales B et C au Burundi. Zoom sur cette affection du foie qui tue plus de 200 mille personnes chaque année, en Afrique.

L

a séroprévalence de l’hépatite B varie de 5 à 10%, au Burundi. Celle de l’hépatite C est proche de 10% et augmente avec l’âge. 13% de personnes âgées de plus de 55 ans sont touchées par l’hépatite C, dont le traitement coûte plus de 2 millions BIF. Un état des lieux livré par le ministère de la Santé au moment où le Burundi célèbre la journée mondiale contre l’hépatite, lundi 12 août, normalement célébrée chaque 28 juillet au monde entier. Dr Freddy Nyabenda, point focal Hépatite au ministère de la Santé, précise que l’hépatite est une inflammation du foie, le plus souvent causée par une infection à un virus. Parfois par l’alcool ou une intoxication à un médicament ou un produit chimique. Ce médecin souligne que

Dépistage gratuit de l’hépatite dans la zone Buyenzi en mairie.

l’hépatite B se transmet par contact avec le sang ou lors de rapports sexuels. Elle est chronique, le traitement est à vie. Tandis que l’hépatite C est traitable pendant trois mois et guérissable si elle est diagnostiquée à temps. Ces infections peuvent entraîner des affections graves du foie et mortelles comme la cirrhose ou le cancer du foie. D’après le ministère de la Santé, une étude effectuée au CHUK (Hôpital Roi Khaled) en 2011 montre que 80% des cirrhoses sont dues aux hépatites B et C.

Elles sont plus fréquentes chez les personnes vivant en communauté (camps, internat, campus universitaire, etc.) et chez le personnel soignant. Le représentant de l’OMS au Burundi, Dr Walter Kazadi Mulombo, a affirmé, lors de cette journée, que dans la région africaine de l’OMS (46 pays) près de 71 millions de personnes sont affectées par les hépatites B et C. « Plus de 200 mille d’entre elles meurent chaque année des suites de la destruction du foie, véritable usine de développement et de

maintien des fonctions essentiels de l’organisme. »

Une maladie non prioritaire au Burundi La prise en charge de l’hépatite laisse à désirer au Burundi, d’après Dr Nyabenda. « Elle reçoit moins de soutien que les autres maladies ». Le ministre de la Santé, Dr Thaddée Ndikumana, indique que de par l’importance du nombre de Burundais qui en souffrent et la gravité de l’infection, les hépatites virales constituent un nouvel

enjeu de santé publique à l’échelle nationale. Le point focal Hépatite au ministère de la Santé assure qu’un vaccin contre l’hépatite B est disponible dans les pharmacies privées. Les enfants de moins de 5 ans en reçoivent dès leur premier mois et demi. « Une vaccination qui devrait toutefois être administrée à la naissance pour éviter la contamination mère-enfant». D’autres défis à relever : l’insuffisance de données actualisées sur cette maladie, l’absence de structures organisées de lutte contre les hépatites au niveau décentralisé, le manque de stratégie de communication dans la lutte contre les hépatites, etc. D’après l’OMS, l’hépatite tue environ 1,34 millions de personnes par an. Seuls 9% des malades de l’hépatite B et 20% de l’hépatite C sont au courant de leur état. Dans le cadre de cette journée mondiale contre l’hépatite, une campagne de dépistage gratuit a été organisée pendant deux jours dans six provinces du pays. 8.200 moyens de dépistage ont été rendus disponibles par Rotary international. Clarisse Shaka

Ebola /prévention : des contrastes

Depuis qu’a surgie la 10e épidémie d’Ebola dans la RDC voisine, le ministère de la Santé publique, en collaboration avec ses partenaires, a renforcé son plan de vigilance. Tous les hôpitaux sont astreints à un système de prévention-contrôle des infections. Toutefois, des disparités existent.

B

ien qu’aucun cas n’est encore déclaré au Burundi, force est de constater que les mesures de préventioncontrôle des infections, dont le lavage des mains, ne sont pas observées de la même manière. Des contrastes existent au sein des hôpitaux publics. Le CHUK et l’Hôpital militaire de Kamenge(HMK) font figure de bons élèves. A l’entrée du Centre hospitalo-universitaire de Kamenge(CHUK), cinq robinets, sur place, des savons liquides. En ce lundi 12 août, une matinée particulière. Aucune personne ne semble réticente au désormais « stop ». « Depuis que l’hôpital a installé le dernier point de stop pour ceux qui refusent de se laver les mains, l’on voit que les personnes commencent à s’en imprégner », témoigne Désiré, chargé de la sécurité. Pour accroître la vigilance, il indique qu’une barrière a été érigée. Pour une meilleure sensibilisation, Sylvestre Ndayiragije, chef du service hygiène au CHUK indique qu’ils projettent d’installer des mégaphones à

Capitoline, agent de sécurité à l’hôpital Prince Régent Charles, avoue qu’ils sont débordés. « A certaines heures, il nous est impossible de faire quoi que ce soit». Une situation ajoutée au délestage intempestif de l’eau, poursuitelle, fait qu’on abandonne la surveillance. A l’instar du CHUK, elle demande qu’un mégaphone soit installé à toutes les entrées. Hormis l’hôpital Kira qui utilisent de l’eau chlorée, les autres

hôpitaux visités utilisent de l’eau avec du savon. « C’est une méthode efficace à mesure même de tuer le virus d’Ebola », assure M.H., agent d’hygiène à l’hôpital Kira. Agissant comme détergent, il indique que le savon enlève les bactéries. Et de conclure : « Le problème, c’est la manière et le temps que les gens prennent pour se laver les mains.» Hervé Mugisha

Technique de lavage des mains : • • •

Dans certains hôpitaux, le protocole de prévention-contrôle des infections n’est pas observé.

l’entrée. « Ainsi, il n’y aura pas de motif pour ceux qui veulent aller à l’encontre de la règle ». Même son de cloche qu’à l’Hôpital militaire(HMK). Outre les robinets installés sur toutes les entrées de l’hôpital, à l’entrée des différents services, des solutions savonneuses avec de l’eau. Kana

(pseudonyme d’un soldat en charge de la sécurité) s’en réjouit. Il soutient que c’est presque devenu une habitude.

Suffit-il de se laver les mains ?

se mouiller les mains et les avant-bras sous un filet d’eau, appliquer le savon (un seul coup de pompe), se savonner et se frotter les mains et les poignets (face interne, face externe, les poignets, les pouces…) et insister sur les ongles et espaces interdigitaux, • se rincer soigneusement à l’eau courante pour éliminer toute trace de savon, éviter que l’eau des avant-bras ne coule sur les mains, en gardant les mains au-dessus des coudes. Ce temps de rinçage doit être égal ou supérieur au temps de lavage, • se sécher par tamponnement avec une serviette à usage unique, *Remarque : La durée du savonnage dépend de la résistance des souillures. Il faut donc frotter jusqu’à ce que tu sois rassuré qu’il n’y a plus de souillure. Source : OMS

Contraint de gérer un flux massif des gens qui entrent et sortent,

www.iwacu-burundi.org – abakunzi@iwacu-burundi.org

H.M.


AU COIN DU FEU

Vendredi, 16 août 2019 - n°544

13

Avec Marie-Louise Sibazuri Dans le Burundi traditionnel, le soir, au coin du feu, la famille réunie discutait librement. Tout le monde avait droit à la parole et chacun laissait parler son cœur. C’était l’heure des grandes et des petites histoires. Des vérités subtiles ou crues. L’occasion pour les anciens d’enseigner, l’air de rien, la sagesse ancestrale. Mais au coin du feu, les jeunes s’interrogeaient, contestaient, car tout le monde avait droit à la parole. Désormais, toutes les semaines, Iwacu renoue avec la tradition et transmettra, sans filtre, la parole longue ou lapidaire reçue au coin du feu. Cette semaine, au coin du feu, Marie-Louise Sibazuri.

V

otre qualité principale ? Je n’en sais rien ! Mes proches disent que c’est la générosité. J’ai grandi dans une famille où le partage était notre crédo. Du coup, quand j’ai, j’éprouve toujours une grande joie à donner. Votre défaut principal ? Ma difficulté à dire non. Parfois, je dis oui juste pour ne pas blesser ou décevoir et, en définitive, ça me mène dans des situations fort inconfortables ! La qualité que vous préférez chez les autres ? L’honnêteté. J’ai du mal à composer avec quelqu’un qui n’est pas clean. J’éprouve une certaine insécurité morale à être avec une personne en qui je ne peux pas avoir confiance. Le défaut que vous ne supportez pas chez les autres ? Forcément le contraire : la duplicité. Les opportunistes qui retournent leur veste toujours du bon côté me révoltent. Les gens qui ne savent pas regarder l’interlocuteur en face et assumer leurs opinions sont facilement traîtres ! Je déteste ça ! Mais je ne supporte pas non plus l’injustice, ni la cruauté envers plus faible que soi, particulièrement les femmes, les enfants et les personnes âgées ! La femme que vous admirez le plus ? Il y en a eu beaucoup dans ma longue vie mais particulièrement deux qui sortent du lot. D’abord, ma mère. Elle est devenue veuve quand j’avais deux ans. Très jeune encore, elle aurait pu refaire sa vie. Mais pour nous éviter un ménage conflictuel, elle nous a élevés seule, dans l’adversité. 52 ans de veuvage, c’est long ! Mais elle a fait de nous ce que nous sommes. Et ma gratitude envers elle est infinie ! Puis, il y a eu mon amie Sabine Mihasha. Grande sœur de cœur,

elle m’a construite de l’intérieur. Malgré la distance physique qui nous a longtemps séparées, elle a été mon phare pour passer de l’adolescence à l’âge adulte, et pour retrouver mon chemin à travers les ténèbres. Qu’elle repose en paix !

la musique douce. Ou boire un verre avec des ami(e)s !

L’homme que vous admirez le plus ? Vous allez sans doute me trouver égocentrique mais, si je veux vraiment être honnête, je dirais que c’est Hilaire, mon mari. Grâce à lui, j’aime la vie ; j’ai envie de me dépasser, d’aller plus loin. Il stimule ce que j’ai de meilleur en moi ! A côté de lui, j’ai respect et admiration pour Martin Luther King, le pacifique rêveur visionnaire. Et, évidemment, pour Nelson Mandela, ma figure emblématique de l’Afrique qui se cherche dans la bienveillance. Je rêve que tous les chefs d’Etat le prennent pour modèle !

Le pays où vous aimeriez vivre ? Il ne faut même pas poser la question puisque la réponse est évidente : c’est dans un Burundi, en paix ! Même si j’ai plaisir à découvrir le vaste monde, mon cœur est ancré au Burundi, à jamais ! Le voyage que vous aimeriez faire ? J’aimerais visiter les îles Hawaï, Zanzibar et l’île Maurice.

Votre plus beau souvenir ? J’ai de multiples beaux souvenirs ! Seulement, je veux prendre le plus récent. Quand l’année dernière, après l’opération de mes yeux, j’ai revu le monde avec une clarté telle que j’en étais éblouie. Cela m’a donné la même émotion reconnaissante que lors des naissances de mes enfants. Moments magiques ! Votre plus triste souvenir ? Lorsqu’en 1993 les voisins, en bons termes jusqu’alors, se sont mis à s’entre-tuer sur base ethnique ou partisane. J’aurais tellement voulu éviter ces atroces dérapages mais j’étais impuissante. J’en ai encore des cauchemars aujourd’hui ! Quel serait votre plus grand malheur ? Voir un de mes enfants mourir avant moi. Ce n’est pas dans l’ordre des choses et je sais que j’en serais anéantie.

Votre lieu préféré au Burundi ? Difficile d’en déterminer un. Le Burundi est si beau dans sa diversité. J’aime passer d’un lieu à un autre.

Votre rêve de bonheur ? Une famille unie et en bonne santé, dans un Burundi en sécurité pour tous !

Le plus haut fait de l’histoire burundaise ? En réalité j’en ai deux. D’abord la résistance contre l’esclavagiste Rumaliza. La bravoure des défenseurs de la patrie, à l’époque, a épargné à la jeunesse burundaise les affres de l’esclavage. J’éprouve fierté et reconnaissance quand je pense à ces héros ! Puis, l’acquisition de l’indépendance nationale. Recouvrer la souveraineté est un haut fait sans équivalent ! La plus belle date de l’histoire burundaise ? Encore une fois, pas une date mais deux ! D’abord le 18 Septembre 1961, la victoire d’un peuple uni pour sortir de l’asservissement et recouvrer son indépendance. Pour moi, cette date devrait être un rappel constant que, unis, rien ne nous serait impossible. Et, évidemment ensuite, le 1er juillet 1962. Le jour heureux où notre drapeau a flotté dans le concert des nations !

La plus terrible ? Il y a malheureusement beaucoup de dates terribles dans l’histoire de notre beau petit pays. Sans que ce soit exhaustif, je focalise sur avril-mai 1972. Même s’il y avait déjà des fissures dans le tissu social, cela a marqué le début d’une rupture profonde dont les effets néfastes continuent de nous pourrir la vie plus de 45 ans plus tard. Le métier que vous auriez aimé faire ? Adolescente, j’ai rêvé d’être anthropologue pour découvrir le monde, ou bibliothécaire pour m’occuper des livres et surtout les lire. Mais en définitive, je trouve que le métier que j’aime vraiment est celui que je fais. Une grande chance dont je suis consciente ! Votre passe-temps préféré ? La lecture, l’écriture et les promenades dans la nature. Mais j’adore aussi écouter de

www.iwacu-burundi.org – abakunzi@iwacu-burundi.org

Votre plat préféré ? Question vraiment embarrassante ! J’adore le mukeke frais en sauce, avec intore et de la pâte ou le mukeke frit ou grillé avec des bananes vertes. Avec, si possible, un bon verre d’insongo en accompagnement! Mais j’aime aussi le bon haricot brun ou jaune aux lengalenga (amarante), le mélangé y’umwumbati (manioc), la bonne banane verte aux petits ndagala… Bref, la nourriture burundaise est tellement bonne, saine et succulente que ce serait injuste d’opter pour un seul plat ! Votre chanson préférée ? J’ai plusieurs artistes, surtout Burundais et Rwandais, dont j’adore les chansons traditionnelles. Ils m’ont inspirée à en composer moi-même, que je vais bientôt mettre au grand jour. Je serai donc en peine d’en choisir une. Mais il y a une chanson religieuse que j’aime depuis ma profession de foi à l’école primaire, c’est « Umukama ni we nkinzo yanje » (Traduction libre : le Sei-


14

AU COIN DU FEU

Vendredi, 16 août 2019 - n°544

gneur, c’est lui mon bouclier). C’est celle que je voudrais qu’elle m’accompagne au moment de mon départ de cette terre.

un jour un moment pareil, où le peuple pourra s’exprimer librement et être respecté dans ses choix !

Quelle radio écoutez-vous ? Comme je vis hors de mon pays, avide d’informations, j’écoute toutes les radios que j’arrive à capter dans une des langues que je comprends. Je préfère me faire une idée sur les infos écoutées ; du coup, les sources contradictoires me conviennent mieux.

Votre définition de l’indépendance ? Le fait d’être libre de toute sujétion, d’être à même de se prendre en charge et de s’assumer, au moins en ce qui concerne les besoins fondamentaux.

Avez-vous une devise ? J’en ai même deux. La mienne propre qui est « N’attends pas de bon moment, prends celui que tu vis et fais-en le meilleur ». Et celle qui était chère à ma mère et qui a fini par m’imprégner entièrement « Le pire ce n’est pas de tomber, c’est de ne pouvoir se relever ». Ma mère était une battante ! J’essaie de pratiquer les deux. Votre souvenir du 1er juin 1993 ? Des élections attendues dans l’appréhension mais réalisées dans la sérénité. Une démonstration de vraie démocratie qui attend et respecte le verdict des urnes. Je sais que les choses ont dérapé après, mais si je ne me limite qu’à ce 1er juin, j’avoue que je suis dans la nostalgie de revivre

Votre définition de la démocratie ? Etre à l’écoute des aspirations profondes du peuple et mettre tout en œuvre pour les respecter. Faire « avec » le peuple et non « pour » le peuple. Votre définition de la justice ? La reconnaissance et le respect des droits de chacun, dans sa personne et dans ses biens. Si vous étiez ministre de la Culture, quelles seraient vos deux premières mesures ? La reconnaissance du statut de l’artiste, comme un métier à part entière. Pour cela, je mettrais en place un Conseil national de la Culture dont les représentants seraient issus du choix des artistes eux-mêmes, secteur par secteur ; et qui seraient libres et indépendants pour octroyer

chaque année un prix d’au moins 20 millions de Fbu, destiné à lancer chaque année un artiste dans chacun des différents secteurs de l’art ! J’instaurerais, ensuite, un service minutieux de recueil et de sauvegarde de tout le patrimoine culturel détenu par les artistes et tous les détenteurs de la culture burundaise ! Si vous étiez ministre de l’Education, quelles seraient vos deux premières mesures? D’abord ordonner que tout enseignant qui serait reconnu coupable de viol sur un ou une de ses élèves sera non seulement traduit en justice, mais automatiquement révoqué. La révocation concernerait également tous les directeurs et enseignants qui monnayent des questions des examens aux élèves. Ensuite, revaloriser le statut de l’enseignant pour qu’il représente réellement le beau métier qu’il est censé exercer, puisque c’est par lui que passent tous les autres métiers. Croyez-vous à la bonté humaine ? J’y crois profondément. Même si la réalité sociale de certains est parfois autre, je ne doute pas que l’homme naît bon.

Pensez-vous à la mort ? Forcément. Surtout avec tous les décès qui surviennent ici et là. Mais je ne m’en préoccupe pas particulièrement. Je sais qu’au finish, le moment venu, elle sera là comme pour tout un chacun. Mais, en attendant, elle ne m’empêche pas de trouver le sommeil ou de faire des projets. Je mourrai certainement un jour. Mon vœu est de partir dans la dignité. Mais je remets tout cela entre les mains de celui qui m’a mis sur cette terre !

Si vous comparaissiez devant Dieu, que lui diriez-vous ? Merci, merci et merci encore pour toutes les merveilles que tu as mises sur terre : le jour, la nuit, le ciel, le soleil, la lune, la pluie, l’air, les oiseaux, la terre, l’eau... et les femmes et les hommes et les enfants ! Et merci infiniment pour la vie que tu m’as permise de vivre ! Propos recueillis par Egide Nikiza

Bio express

M

arie-Louise Sibazuri est une artiste plurielle. En effet, auteur-dramaturge avec à son actif 82 pièces de théâtre jouées ici et là, dont quatre portées à la télévision burundaise. Elle raffole tout autant de feuilletons radiophoniques. Elle en a écrit quatre, dont un avec 901 épisodes, qui a servi de modèle pour des feuilletons similaires en RDC, en Tanzanie… et a donné lieu à deux documentaires vidéo et audio. Elle a en outre produit des vidéos éducatives sur des thèmes divers, un roman, des recueils de contes non encore publiés… Avec ça, elle est passionnée par la poésie, la danse et les chants traditionnels. Animatrice engagée dans la sauvegarde de la paix et dans la défense des droits de la femme et de l’enfant, Marie-Louise est également engagée dans la transmission de la mémoire car convaincue que « qui ne sait pas d’où il vient risque de mal assumer où il va ». Marie-Louise est formatrice certifiée en Communication non Violente depuis presque quinze ans, elle a même été Ambassadeur déléguée à la Francophonie.

www.iwacu-burundi.org – abakunzi@iwacu-burundi.org


AU CŒUR DU PAYS

Vendredi, 16 août 2019 - n°544

Région Nord

15

Ngozi

Sotavebu: Quand l’adhésion à la coopérative Sangwe divise

Les membres de la société de taxi-vélo du Burundi (Sotavebu), branche de Ngozi, ne s’entendent pas sur le projet de leurs dirigeants de virer vers la coopérative Sangwe. Ils arguent n’avoir pas assez de confiance en leurs représentants et n’être pas à mesure de faire partie de deux coopératives en même temps. De notre correspondant Apollinaire Nkurunziza

A

u sortir du marché central de Ngozi se trouve un parking de taxi-vélo. Mardi 13 août, regroupés à plus de cinq, les coudes déposés sur la selle, les chauffeurs discutent. Ils se lamentent. « Combien de cercueils as-tu vus ? », l’un d’eux pose la question alors que son prochain parle ironiquement de l’aide dont ils bénéficient de leur association. Selon eux, leur contribution est de cent francs chaque jour. Et s’il arrive un cas de décès parmi eux, les responsables se chargent des funérailles. Encore épargnés de la mort, ils se demandent à quoi sert l’argent qu’ils versent chaque jour : « Quand nous demandons, ils nous disent qu’ils paient le loyer, l’achat des stylos, … des choses incompréhensibles»,

Région Ouest

raconte Majambere, indigné de la situation. A les entendre, ils se sont habitués à cet état de choses. Mais une nouvelle interpellation soulève leur mécontentement : virer vers la coopérative Sangwe. « Dernièrement, ils nous ont invités à une réunion. Ils ont parlé de l’intention d’entrer dans la coopérative Sangwe. Pour se faire enrôler, chaque membre devra payer deux mille francs pour l’achat d’un cahier de membre et cinq cent francs chaque semaine», fait savoir Oswald qui, très inquiet, pense que l’argent sera « bouffé » par les chefs. Les mêmes jeunes retrouvés au parking fustigent également le prix du carnet de membre : « A vrai dire, c’est un cahier de cinq cents francs. Mais voilà qu’ils nous obligent de l’acheter à deux mille francs. Où vont les mille cinq cents qui restent ? » Un autre argument présenté pour ne pas se faire enregistrer

Les membres de SOTAVEBU- Ngozi dans un défilé le1er mai.

dans la coopérative, c’est leur appartenance à d’autres coopératives à leurs collines d’origine. D’après eux, ils sont enregistrés chez eux et où ils contribuent régulièrement. Alors ils se demandent comment ils peuvent contribuer partout. « Du taxivélo, nous ne pouvons pas trouver l’argent pour contribuer ici et là.» Par ailleurs, confiance réduite, ils doutent du projet que leurs chefs avancent une fois reçu l’argent promis par les communes aux coopératives Sangwe : l’ouverture d’une boutique de quincaillerie. « On a posé la ques-

tion de savoir si quand la boutique sera disponible les membres auront droit à des crédits. Ils ont refusé en indiquant que s’approvisionner de la boutique sera gagner deux fois, et l’objet matériel, et l’argent. »

Le conformisme exige « C’est un programme de l’Etat, que toute la population soit réunie au sein des coopératives. Alors, partout dans le pays où s’exerce le taxivélo, ils sont obligés d’appartenir à une coopérative sangwe. Qu’ils le veuillent ou pas », explique M. Niyonzima l’un des responsables

de Sotavebu-Ngozi. Il affirme avoir suffisamment explicité le nouveau programme aux membres. « Nous avons tenu plus de quatre réunions. A part deux mille francs d’inscription, ils vont continuer à donner les cent francs qu’ils cotisaient chaque jour, mais cette fois-ci après une semaine. Donc, sera cinq cents francs par semaine. » Pour Mr. Niyonzima, afin de gagner la confiance, les 500 francs seront régulièrement mentionnés dans le cahier du membre pour faciliter la vérification de la somme contribuée.

Cibitoke/Rugombo

Manque criant d’eau potable

Les habitants des trois collines de la commune Rugombo viennent de passer deux mois sans voir aucune goutte d’eau dans les robinets. Craignant les maladies des mains sales, ils demandent à l’administration et au service en charge de l’eau de trouver la solution à ce problème. Ces derniers tranquillisent. De notre correspondant Jackson Bahati

C

es trois collines sont Rukana I, Rukana II et Rusiga de la commune Rugombo province Cibitoke. En arrivant sur ces collines, nous voyons des gens avec des bidons à la main et vélos courir à gauche à droite à la recherche d’eau potable dans la commune Mugina. Certains habitants rencontrés sur la colline Rukana I affirment boire de l’eau puisée dans les caniveaux et des ruisseaux qui sert à l’irrigation des champs de culture. Et pour avoir cette eau, être très matinal avant de l’utiliser pour irrigation. Joseph Nkengurutse, un habitant de la colline Rusiga dit qu’il est obligé de consommer de l’eau de la rivière Nyamagana. Ce père de six enfants souligne que cette eau contient des microbes. D’après lui s’il a de l’argent, il doit

Les habitants des collines Rusiga et Rukana I et II craignent des maladies contagieuses

faire recours à des taxis-vélos qui font au moins dix kilomètres et chaque bidon de 20 litres coûte plus de mille francs burundais. Rose Nizigama, mère de 5 enfants de la colline Rukana II indique que la majorité des familles qui vivent à cet endroit connaissent souvent des mala-

dies des mains sales comme la dysenterie, la bilharziose et le choléra. « Et surtout les enfants de moins de cinq ans », a-t-elle clarifié.

Des promesses non tenues Les habitants affirment qu’en

2015, les représentants du peuple avaient promis de leur fournir de l’eau potable lors des propagandes mais jusque-là, rien n’a encore été fait. En pleine période électorale de 2020, ces personnes attendent la réaction de ceux qui leur ont promis l’eau potable. Ils demandent à l’administration et

www.iwacu-burundi.org – abakunzi@iwacu-burundi.org

au service en charge de l’eau en province Cibitoke de faire tout leur possible pour que l’eau soit disponible sur ces collines. Béatrice Kaderi, administrateur communal de Rugombo est consciente de ce problème. Elle demande à la population d’être patiente car « l’administration pense toujours à elle, même si c’est un problème jusqu’à présent très difficile à résoudre. » En attendant, elle demande à la population de boire de l’eau bouillie pour prévenir les maladies. Le responsable chargé de l’eau dans cette province explique que le manque d’eau potable est lié à l’extension de la ville, tout en soulignant que des études sont en cours pour voir comment rendre l’eau potable disponible sur ces 3 collines et autres villages qui en ont besoin.


AU CŒUR DU PAYS

16

Région Centre

Vendredi, 16 août 2019 - n°544

Gitega

Hépatite : Une maladie oubliée La journée mondiale contre les hépatites ce lundi 12 août à Gitega, a été l’occasion d’organiser une vaste campagne des tests de dépistage. Pour plusieurs personnes, les hépatites B et C sont presque inconnues, le diagnostic et le traitement sont encore réservés à un petit groupe de gens qui ont des moyens financiers. De notre correspondant Jean-Noël Manirakiza

L

e ministère de la Santé et de lutte contre le sida en collaboration avec Rotary District 1950 a permis aux 480 hommes et femmes âgés de 40 ans révolus à faire le dépistage gratuit. Une chance pour la population citadine qui avait 3 centres de dépistage à leur disposition ainsi qu’à la prison centrale de Gitega. Et pourtant beaucoup d’autres ont dû rebrousser chemin à cause du nombre des centres très réduit. Dans tout ce monde dépisté, les ruraux représentent une infime partie. Interrogés, ils restent ignorants des hépatites B et C. Plusieurs ont indiqué qu’ils ne connaissent pas cette maladie. Pour eux, ils se préoccupent seulement de la malaria et du virus du sida. « J’ai entendu que l’hépatite est une maladie du foie mais il n’y a pas de médicaments à l’hôpital qui puissent la guérir. Sur notre colline, il y a des médicaments, il suffit de boire une bouteille remplie et elle disparaît », a déclaré Judith, une femme paysanne rencontrée devant la Clinique Vision Santé

Région Sud

de Gitega. Pour elle, rien ne sert à se diagnostiquer à l’hôpital, les yeux jaunes et la douleur dans le côté droit sont des signes qui ne trompent pas. A entendre ses propos, nul doute qu’elle ne distingue pas les hépatites. Judith n’est pas la seule à ne pas s’inquiéter des hépatites B et C. Gabriel, est un septuagénaire. Quand il a aperçu les files d’attente de ceux qui viennent se diagnostiquer, il a souligné que cette maladie attaque beaucoup les riches qui mangent beaucoup de repas copieux. « Chez nous à la campagne, cette maladie n’existe pas. Ce sont des personnes de la ville. Elles portent toutes des souliers et bien habillées. Elles sont victimes de ce qu’ils mangent !».

Le coût du dépistage reste un frein majeur Contrairement aux campagnards, les citadins reconnaissent que cette maladie existe bel et bien mais ne songent pas à faire le dépistage. Un simple diagnostic peut coûter autour de 13 000 Fbu. Selon eux, le coût du dépistage reste un frein. Lorsque Bernard évoque cette maladie, sa voix change et devient presque

Opération de dépistage gratuite, lundi 12 août 2019

inaudible. Son petit frère mort récemment avait de la cirrhose. « Il était bien portant, il est décédé en juillet de cette année. Avant, aucun symptôme ne montrait qu’il avait l’hépatite. C’est seulement trois semaines avant sa mort que nous avons vu que son ventre se gonflait anormalement et malgré les efforts des médecins, il n’a pas survécu », a-t-il précisé en se dirigeant vers la salle de dépistage. Quant à Raphaël, il évoque la mort de son vieil ami. « Pascal est tombé malade. Petit à petit, il finit par être terrassé par la maladie et dépensait beaucoup

d’argent en allant en Inde pour se soigner.» « Malgré tout ce que les médecins lui disaient, il ne guérissait pas. Je ne connaissais même pas cette maladie et j’ai découvert qu’elle est non seulement dangereuse, mais aussi très cher », a-t-il poursuivi. D’après Spés-Caritas Nsavyimana, président fondateur de Rotary Club Rukinzo, les hépatites B et C sont des maladies virales qui s’attaquent au foie, où elles peuvent causer une infection chronique. « Le virus de l’hépatite B a un vaccin et des médicaments sont dis-

ponibles. Pour l’hépatite C qui se transmet le plus souvent par voie sanguine. Le dépistage est la seule solution possible pour savoir l’état de santé sinon beaucoup se croient en bonne santé», a-t-elle souligné tout en précisant que pour le moment le traitement n’est pas à la portée de tout le monde. D’après cette professionnelle de la santé, en l’absence de traitement, le malade développe une cirrhose ou un cancer du foie. D’où elle appelle le gouvernement et ses partenaires à renforcer la sensibilisation et le dépistage gratuit sur tout le territoire.

Rumonge

La découverte des corps sans vie inquiète Un regain de criminalité s’observe ces dernières semaines où trois corps sans vie ont été trouvés et ont été identifiés. Il s’agit de deux pêcheurs et un conducteur de taxi moto. De notre correspondant Félix Nzorubonanya

S

elon des sources administratives dans la zone Kizuka, commune Rumonge, vers la fin du mois de juillet, un corps d’une personne a été découvert sur la colline et a été vite identifié. Louis Kamwenubusa, chef de zone Kizuka a indiqué que ce corps était celui d’un pêcheur du nom d’Augustin Barakamfitiye résidant sur la colline Gatwe de cette même zone. Les mêmes

Photo archive

sources administratives précisent que cette personne est morte égorgée dans un autre endroit et son corps a été jeté sur cette colline de Kizuka. La police a arrêté trois pêcheurs avec qui travaillait la victime pour des raisons d’enquêtes. Samedi 10 août, un corps sans

vie a été découvert très tôt le matin près du quartier Mugomere dans la ville de Rumonge et ce corps a été identifié comme étant celui d’un conducteur de taxi moto. Les circonstances de sa mort ne sont pas encore connues mais certaines avancent une piste d’un acte des bandits

qui lui ont volé la moto qu’il conduisait.La police dit avoir ouvert une enquête pour identifier les auteurs, les circonstances et le mobile de ce meurtre. Mardi 13 août, un autre corps sans vie a été découvert au bord du lac Tanganyika. C’était un pêcheur résidant dans le village de Karonda colline Gashasha, mais il était originaire de la commune de Buganda en province de Cibitoke. Les circonstances de sa mort ne sont pas encore connues. La police indique avoir ouvert une enquête. Cette découverte de corps sans vie inquiète beaucoup la population. Celle-ci demande à la police, aux autorités administratives de mener des enquêtes plus fouillées afin d’identifier les auteurs et les coauteurs de ces actes ignobles.

Pêcheurs et motards sont plus ciblés Les associations de défense des droits humains précisent que ces

www.iwacu-burundi.org – abakunzi@iwacu-burundi.org

derniers mois deux corps des conducteurs de taxi moto ont été découverts dans la réserve naturelle de Kigwena. Souvent des corps sans vie des pêcheurs sont découverts dans les eaux du lac Tanganyika ou sur la rive du lac. Une certaine opinion indique que des pêcheurs sont tués pour des fins de sorcellerie afin que les pêcheurs puissent avoir une grande prise de poisson et ces motards sont tués par des voleurs qui récupèrent les motos. Une enquête plus fouillée devrait être menée dans le secteur de la pêche pour savoir pourquoi les pêcheurs sont souvent tués dans des circonstances non élucidées. Signalons que suite à cette montée de criminalité, le gouverneur a ordonné qu’aucune moto ne soit autorisée à circuler et assurer le transport des personnes audelà de 18 heures.


SPORT

Vendredi, 16 août 2019 - n°544

17

Basketball

Championnat national : en attendant le dénouement Samedi 17 et dimanche 18 août débutent les quarts et demies de finale du championnat national. A l’instar d’Imbeya, il y a trois ans, les clubs de l’intérieur tenteront de surprendre.

D

ernière ligne droite avant le sacre suprême, toutes les équipes en lice n’ont qu’une envie : remporter ce trophée majeur de la saison, synonyme de qualification pour le tournoi régional de la Zone 5. Autant dire que le ton est déjà donné. Et parmi les affiches qui font saliver plus d’un : Gymkhana vs Target Intamenwa de Ngozi. « Un choc de titans », convergent à dire tous les amoureux du ballon orange. Fraîchement sacré au tournoi interprovincial, le champion de Ngozi ne peut qu’afficher cette ambition : terrasser le vainqueur de la Coupe de l’association de Bujumbura (ACBAB) à domicile. « Un sacré défi, mais, possible », laisse entendre Roger, président de Target. Solides dans les jeux de transition, durant cette saison, la formation de Ngozi, malgré les

New Star tentera de conserver son titre.

départs de certains de ses cadres, a montré qu’elle possède encore des ressources. En témoigne leur bon parcours pour la conquête de ce récent sacre. « Une bataille qui risque de se corser, au regard de l’ambition de leur hôte », opine déjà Alain, fan. Victorieuse de toutes les Coupes en jeu cette saison, le champion de l’ACBAB n’a qu’une obsession : accrocher enfin ce titre qui lui manque à son palmarès.

Et depuis la fin du championnat, le constat est qu’ils se sont donné les moyens pour remporter le trophée. « On essaie de se préparer du mieux que l’on peut. Sinon, la consigne reste la même pour les joueurs : rester concentrés », fait savoir Jeannot, coach. Idem pour Urunani. Bientôt 3 ans sans rien gagné de « grand », le club le plus titré du pays rêve grand. Mais pour y arriver, il doit se sortir du piège d’Imbeya. Un

adversaire qu’il connaît, puisqu’il l’avait éliminé 2016.

Dynamo, New Star … en embuscade A la peine cette saison, les verts et blancs de Dynamo veulent rectifier le tir. Opposés à Young Eagles de Gitega, sur papier, les protégés d’Olivier Ndayiragije partent favoris. Toutefois, ce statut, prévient Moussa, un fan, ne doit pas nous faire oublier

que nous serons sur leur propre terrain. Même cas de figure pour New Star. Opposé à New-look de Bururi ,le champion en titre sortant, sauf surprise, est quasi assuré de passer ce tour. Néanmoins, des interrogations persistent sur sa capacité de conserver son titre. Chez les filles, les formations Berco Star et les Gazelles partent largement favorites. Toutefois, elles doivent se méfier de Messager BBC. Fraîchement sacrée championne interprovinciale, la formation de Ngozi aborde le tournoi avec de grandes ambitions. « A tout prix, accrocher au moins la place qualificative en zone », laisse entendre son coach. New Face, Christ Roi, respectivement en provenance de Bururi et Ngozi, essaieront de lui emboîter le pas. Berco Star vs Christ Roi de Gitega est l’autre rencontre au sommet. « Un match capital puisque le vainqueur sera assuré de terminer sur le podium », indique Nadège Mahoro de la commission communication. Rappelons que les finales se jouent le 24 août. Provisoirement, c’est Gitega, la capitale politique, qui accueillera l’évènement. Hervé Mugisha

Jeux miliaires de l’EAC : Muzinga, l’heure de la revanche... Depuis mardi 13 août, la formation militaire participera à la 13e édition de cette compétition. Elle rassemble les équipes militaires de la communauté est-africaine. Le tournoi se déroulera à Nairobi.

C

’est avec un esprit revanchard que Muzinga aborde ce tournoi. Classé avant dernier l’année passée, l’objectif, indique Lt Col Raphael Mutunge, chef du bureau EPS à l’Etat-Major de l’armée, c’est d’au moins figurer sur le podium. Au total plus de 1500 athlètes attendus. Ils sont répartis dans 5 disciplines sportives, à savoir le basketball homme, le netball, le volleyball féminin, le football homme et le cross-country. Très en jambes, durant cette saison, Muzinga Basketball constitue le fer de lance de la délégation burundaise. Souvent médaillée, M .Mutunge ne cache pas qu’ils ont mis la barre très haute. La preuve, pour cette édition, ils n’ont pas lésiné sur les moyens. Dans le groupe en partance pour Nairobi, un effectif bien

rôdé. Outre les habituels cadres de l’équipe, le club s’est renforcé avec de nouvelles recrues. Parmi lesquels Guibert Nijimbere, le tonitruant meneur d’IPRC South qui évolue au Rwanda, le revenant Mando, etc. « Une équipe, certes jeune, mais capable de surprendre son adversaire par sa fougue et rapidité », se targue Adrien Ngoyagoye, coach. Alternant le bon et le moins bon la majeure partie de la saison, à l’instar des netballeuses, Muzinga football est le maillon faible de cette délégation. « Une occasion qui leur servira à préparer la prochaine saison de Primus ligue B », souligne M .Mutunge. Pour le cross-country, quoi qu’elle reste une discipline de prédilection des Kenyans et des Ougandais, ce responsable laisse entendre que leurs athlètes

La délégation burundaise est attendue au tournant.

auront leur mot à dire. «Ils se sont bien préparés. Qui sait, ils peuvent surprendre… » Au-delà des enjeux sportifs, M .Mutunge indique que

l’événement aura un cachet culturel. Pour la première fois, le Soudan du Sud est en lice. Aussi, faut-il

souligner que, depuis 4 ans, tous les pays de la communauté estafricaine prendront part à cet évènement. H.M.

www.iwacu-burundi.org – abakunzi@iwacu-burundi.org


18

18

ANNONCES

Vendredi, 16 août 2019 - n°544

www.iwacu-burundi.org – abakunzi@iwacu-burundi.org


19

Vendredi, 16 août 2019 - n°544

Trust between police and youth restored thanks to Search for Common Ground’s “Duteramire Umutekano” project Participants who have received training organized by Search for Common Ground Burundi through its “Duteramire Umutekano” project say trust between the youth and the police has been restored. They demand that such activities aimed at promoting peace continue.

T

he second phase of “Duteramire Umutekano” project which started in August 2018 brought together the youth and police officers from Mukike and Mugongomanga communes of Bujumbura province and those from Musaga, Kanyosha, Ngagara, Kamenge, Nyakabiga and Bwiza neighborhoods of Bujumbura, members of mixed security committees, the Bujumbura Mayor delegate, a senior police official representing the Ministry of Public Security and an official from Bujumbura province. Floride Ahitungiye, Country Director of Search for Common Ground has called on the Burun-

dian youth to look at their common interests first, instead of accepting to be manipulated by politicians. For her, the training that participants received should be expanded and the youth and police trainees should be supported in popularizing what they learned to other beneficiaries. The small-scale peace initiatives initiated between the police and youth during the project, especially sports’ events, should be encouraged and supported to strengthen social cohesion in the country. Dismas Ntakibirora, Legal Advisor at Burundi Police General Inspection has called on each and everyone to get together to

Family photo of participants in the meeting concluding the project

avoid the worst especially during and after the upcoming 2020 elections. Prosper Nduwayezu, a member of the mixed security committee in Nyakabiga neighborhood, who participated in the project, appeals to the youth to live together despite their differences and put into practice what they were taught

to build a better Burundi. The results of the project show that the relations between the police and youth have improved as participants confirm that themselves. The two groups which used to be at loggerheads are now friends. They work together and even hang out together, while discussing a wide range of issues.

www.iwacu-burundi.org – abakunzi@iwacu-burundi.org

Some participants say security has improved thanks to improved communication between all the groups which benefited from the training organized by Search for Common Ground Burundi. The project’s results were shared officially this wednesday, August 14, at La Détente, in the presence of 50 participants.


20

Vendredi, 16 août 2019 - n°544

La CIRGL engagée dans les stratégies de réinsertion socioéconomique des jeunes et des femmes La complexité du chômage des jeunes rend difficile l’atteinte d’une paix durable dans la Région des Grands Lacs.Cela a été signalé lors de l’ouverture d’une première réunion du Comité de pilotage d’une étude sur la jeunesse et la reconstruction post-conflit dans la Région des Grands Lacs ce jeudi le 8 août 2019. L’étude s’inscrit dans la mise en œuvre du projet d’appui à la réinsertion socio-économique des jeunes et femmes initié par la CIRGL avec l’appui de la Banque Africaine de Développement.

P

arek Maduot, Directeur du Programme « Développement Economique et Intégration régionale » au sein de la Conférence Internationale sur la Région des Grands Lacs (CIRGL) fait savoir que son organisation reconnaît que les effets des conflits violents et des dynamiques sociales, politiques et économiques asymétriques varient entre les hommes,les femmes et les jeunes de divers groupes d’âges. Pour lui, cela s’explique par des violations des droits de l’homme, des déplacements de populations et des crises liées aux réfugiés. M. Maduot fait savoir que le pacte de la CIRGL prend en considération le rôle central de la jeunesse dans les états fragiles et touchés par les conflits dans la prévention des conflits et la consolidation de la paix. « En RDC, au Burundi et en Photo de famille des membres du Comité de pilotage, de l’Unité de gestion du projet et des République Centrafricaine, la représentants de l’équipe de consultants complexité du chômage des jeunes rend difficile l’atteinte d’une paix œuvre de ce projet créera un cadre moyens de subsistance, la sexos- tudes personnelles requises sur le durable », dit-il. fédérateur pour pécificité et les stratégies du marché du travail. Le taux élevé du « Cette étude identifie aussi des «La complexité l ’ e n g a g e m e n t secteur privé pour les jeunes. chômage chez les Il signale également que l’étude systèmes d’emploi et de déveldes jeunes dans du chômage jeunes adultes est la reconstruction analyse la synergie entre les oppement des compétences afin des jeunes rend post conflits pour interventions sectorielles spéci- d’adopter des pratiques de haute une question cruciale qui exige une difficile l’atteinte les prochaines fiques et multisectorielles dans performance qui créent une innoanalyse plus approannées. le but d’accroître l’accès à des vation progressive au sein des d’une paix fondie de la mesure Il ajoute que la moyens de subsistance durables économies locales, » fait-il savoir. durable. » dans laquelle le phécaractéristique pour les jeunes ciblés à travers la Et de conclure : « L’intégration nomène des jeunes particulière de facilitation des formations aux de mécanismes de politiques déconnectés accroît le risque cette étude est qu’elle décrit les compétences techniques et apti- adaptatives cherchant à stimuler d’une multitude d’effets néfastes à savoir la pauvreté, le comportement criminel et la toxicomanie au sein des jeunes adultes, ajoutet-il. Selon ce cadre de la CIRGL, le projet d’appui à la réinsertion socio-économique des jeunes et femmes dans ces pays ci-haut cités examine la façon dont les stratégies d’emploi ciblées pourraient stimuler les compétences et la création d’emploi et susciter, de manière transversale, la participation des différents acteurs dans les domaines d’emploi, la formation, le développement économique et le bien être familial.

Un projet visant l'engagement des jeunes... Le Directeur du Programme « Développement Economique et Intégration Régionale » au sein de la CIRGL explique que la mise en

Parek Maduot : «La mise en œuvre de ce projet créera un cadre fédérateur pour l’engagement des jeunes dans la reconstruction post conflits pour les prochaines années.»

www.iwacu-burundi.org – abakunzi@iwacu-burundi.org

la création d’emploi par le biais de l’appui au développement des micro, petites et moyennes entreprises et des partenariats avec des intervenants tels que les acteurs du secteur privé est aussi l’objectif de cette étude.» Pascal Firmin Ndimira, Consultant international Chef de mission du consortium ADA & AGV qui est en train de mener cette étude fait savoir que cette dernière met en avant un cadre propice au développement en mettant en place des stratégies nationales et une stratégie régionale coordonnée permettant de calibrer l’appui global au développement des entreprises et activités génératrices de revenus. « Ainsi qu’une gestion efficace de la situation post-conflit, en vue de permettre de manière durable l’accès équitable des jeunes au travail décent et à un épanouissement intégral. » ajoute-t-il. La Conférence Internationale sur la Région des Grands Lacs (CIRGL) a été créée en 2006 avec l’appui de l’union Africaine, de l’organisation des Nations Unies et des bailleurs de fonds bilatéraux. Elle s’est fondée sur une vision de l’égalité axée sur des travaux de développement inclusifs, en vue de l’élimination des conflits dans la Région des Grands Lacs ainsi que la réalisation d’une paix et d’une stabilité durables dans ses 12 Etats membres. Ils’agit del’Angola, le Burundi, la République Centrafricaine, la République du Congo, la République Démocratique du Congo, le Kenya, l’Ouganda, le Rwanda, la République du Sud Soudan, le Soudan, la Tanzanie et la Zambie. LA CIRGL vise fondamentalement à mettre en œuvre le pacte sur la Sécurité, la Stabilité et le Développement dont l’objectif est la promotion de la paix et le développement dans toute la région, grâce à une action concertée entre les Etats membres et toutes les parties prenantes. En ce qui concerne l’étendue de l’étude, une attention particulière a été mise dans un premier temps sur le Burundi, la République Centrafricaine et la République Démocratique du Congo en tant qu’études de cas. Les résultats de l’étude sont attendus d’ici décembre 2019.


Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.