IWACU 508

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IWACU N°508 – Vendredi 7 décembre 2018 – 2000 Fbu Quartier INSS, Avenue Mwaro n°18 Bujumbura - Burundi Tél. : 22258957

ECONOMIE Sosumo : Des employés dénoncent une « mauvaise gestion »

AU COIN DU FEU

SOCIÉTÉ P.4

Kayogoro : Des rapatriés désemparés

P.10

avec Déo Hakizimana alias « Kireko »

P.12


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LA DEUX Editorial

Vendredi, 7 décembre 2018 - n°508

En coulisse

Sur le vif

Football : Les représentants du Burundi éliminés Le dossier Ndadaye, que vous en semble ? Par Léandre Sikuyavuga Directeur des rédactions

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Parfait Gahama, journaliste économique du Groupe de presse« Iwacu »,

Messager Ngozi et Vital’o n’ont pas réussi à dépasser le tour préliminaire. En ligue des champions, le Messager s’est incliné face à Ismaïlia, un club égyptien sur un score de 2-1. Lors du match retour de la coupe de la CAF, Vital’o a été étrié par New Star de Douala sur un score de 4-1 au stade Prince Louis Rwagasore.

Bientôt, une campagne pour vaccination des animaux domestiques Déo Guide Rurema, ministre de l’Environnement, de l’Agriculture et de l’Elevage, a annoncé qu’une campagne de vaccination de chiens, de chats et de singes domestiques débutera du 13 au 14 décembre 2018.Cette activité sera gratuite. Elle va se dérouler au chef -lieu de chaque province. L’abattage des chiens errants se fera parallèlement sur tout le territoire national.

Le Burundi représenté dans un concours de plaidoirie régional 12 étudiants en droit issus de six universités vont représenter le Burundi à la 6è édition du concours régional de plaidoirie en droit international humanitaire. Il se déroulera du 10 au 14 décembre à Kigali. Il est organisé par l’ONG Initiative pour la paix et les droits humains, en collaboration avec le CICR. Ce concours met en lice les universités du Burundi, RDC et du Rwanda.

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our avoir remporté, mercredi 5 décembre, à Makamba, le prix du meilleur « JOURNALISTE-AMI DU FISC », décerné par l’OBR.

En baisse

Prime Nduwimana, un officier de police, © Droits réservés

e dossier semble diviser l’opinion. Après l’arrestation de certains anciens officiers et le lancement des mandats d’arrêt contre d’autres anciens hauts dignitaires du pays par le procureur général de la République, des réactions opposées dominent les discussions. Ceux qui sont contre la mesure parlent de « spéculation, manipulation politique, manœuvre de diversion, deux poids deux mesures »… D’autres saluent une décision qui met « enfin » un terme à l’impunité. Ce dossier est une affaire sérieuse. L’Histoire du pays a été bouleversée. Les esprits ont été déstabilisés. Les conséquences ont été nombreuses sur le pays et se poursuivent inéluctablement. Les réactions sont variables selon les différents acteurs politiques, la société civile et même la diaspora burundaise. Elles renvoient à la résurgence des sentiments ethniques. Tout le monde évoque l’intérêt de l’Accord d’Arusha finalement qui confortait les uns et les autres. Entendez Hutu -Tutsi. La question de la justice et de la vérité remonte à la surface malgré l’existence de la Commission Vérité et Réconciliation (CVR). C’est une remise en cause de la CVR et finalement, c’est la réclamation de la justice non encore rendue. Les Burundais ont besoin de connaître la vérité sur l’assassinat du premier président démocratiquement élu, ses proches collaborateurs ainsi que les massacres qui ont suivi. La justice doit combattre l’impunité, montrer que personne n’est au-dessus de la loi. Par ailleurs, il n’est pas nécessaire de choisir entre la paix et la justice. Les deux peuvent être associées pour punir les responsables d›exactions, de crimes odieux. Cependant, comme d’aucuns l’ont déjà exprimé, ces mandats d’arrêt ne risquent-ils pas de subir le même sort que ceux émis auparavant sur d’autres dossiers ? Une telle action ne sera-t-elle pas sentie comme un coup d’épée dans l’eau par la communauté internationale qui est sollicitée dans la mise en exécution de ces mandats ? La Justice vient de jouer son rôle. Mais ce n’est pas la première fois. Question : Que faut-il faire pour que les pays qui hébergent ces individus recherchés puissent les arrêter et les extrader ? L’autre question qui revient est celle de savoir si la justice ne serait pas « sélective », si vraiment tous les crimes et criminels sont visés… Mais une chose est sûre : les Burundais ont soif de justice.

En hausse

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our avoir tué sa femme et blessé grièvement sa fillette de 9 mois par balles, dans la nuit de mardi 4 novembre au quartier Kajiji, zone Kanyosha en mairie de Bujumbura.

Image de la semaine Un chiffre

2. 623 est le nombre de sites identifiés pour la vaccination en cours.

Source : Ministère de la Santé Une pensée

Parfait Gahama (à gauche), journaliste d’Iwacu, recevant des mains du commissaire général de l’OBR, le prix du meilleur journaliste-ami du fisc. Photo prise à Makamba, le 5 décembre, lors de la journée du contribuable. ©Chimène Manirakiza/Iwacu

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« La justice sans force est impuissante, la force sans la justice es tyrannique. » Blaise Pascal


L'ÉVÉNEMENT

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Buyoya dans le collimateur de la justice burundaise Un mandat d’arrêt a été lancé contre le président Buyoya et seize anciens hauts responsables militaires et civils. Ils seraient impliqués dans l’assassinat du président Ndadaye. Manœuvre politique, dénonce Buyoya.

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’affaire la plus commentée par les Burundais. Le procureur général de la République a surpris tout le monde en décidant la réouverture du dossier sur l’assassinat du président Melchior Ndadaye. Quatre anciens officiers supérieurs sont arrêtés. 17 mandats d’arrêt internationaux lancés. Et 25 ans après le meurtre du premier président démocratique-

ment élu, un nom est cité : celui du président Pierre Buyoya. Pour le procureur général de la République, des éléments de l’enquête déjà disponibles révèlent que ces personnes pourraient avoir été impliquées dans ce crime dans sa préparation, pendant son exécution et même après sa commission. « Ces mandats d’arrêt internationaux sont lancés pour que les

Et Buyoya enfonce le clou

pays qui les hébergent puissent les arrêter et les extrader au Burundi afin qu’ils s’expliquent sur les faits qui leur sont reprochés, » a indiqué Sylvestre Nyandwi. Des poursuites qui ont suscité une réaction du président de la Commission de l’Union africaine. Il fait tout de suite allusion à cette affaire dans une déclaration sortie le samedi, 1 er décembre. Moussa Faki presse l’ensemble des acteurs concernés de s’abstenir de toute mesure politique ou judiciaire qui serait de nature à compliquer la recherche d’une solution consensuelle conformément à l’esprit de réconciliation nationale. « Le dialogue est la seule voie de sortie de crise. »

L’affaire Ndadaye rouverte devant la justice.

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près quelques jours, le président Buyoya est sorti de son silence. Dans son communiqué de presse, il se dit stupéfait par ces accusations graves. Il parle de manipulation politique et d’une nouvelle manœuvre de diversion visant à faire oublier les questions douloureuses non résolues. Selon lui, le gouvernement a choisi de s’emmurer délibérément dans le refus du dialogue pour résoudre la crise qu’il a lui-même provoquée et qu’il alimente depuis 2015. « Il serait difficile d›imaginer que le régime soit à

même de mener une procédure judiciaire avec un minimum de garanties et de crédibilité. » A la radio BBC, l’ancien président va plus loin ce mercredi. Il parle de vengeance ethnique et d’une démarche dangereuse qui va briser toute la corde qui lie le peuple burundais. Pierre Buyoya balaie d’un revers de la main la demande d’extradition de Bujumbura. « Je ne suis pas le premier sous mandat d’arrêt et à ma connaissance, personne n’a déjà été extradé vers le Burundi. »

Un mandat d’arrêt international est lancé contre Pierre Buyoya.

Un tollé de Bujumbura

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es sorties médiatiques de Moussa Faki et de Pierre Buyoya provoquent de vives réactions de Bujumbura et sur les réseaux sociaux. L’ambassadeur du Burundi aux Nations unies, Albert Shingiro, demande à la communauté internationale de ne pas infantiliser le Burundi en s’ingérant dans ses affaires. Et selon lui, le président Buyoya se livre à du chantage. « En droit criminel, la responsabilité pénale est individuelle. C’est un principe consacré. Elle n’est ni familiale, ni ethnique ou régionale. Vouloir mêler la responsabilité pénale à sa famille, son ethnie ou sa région pour se soustraire de la justice s’appelle chantage » L’Assemblée nationale n’est pas en reste sur cette affaire. Elle rejette les arguments avancés par Moussa Faki qui estime que cette action de la justice serait de nature à compliquer la recherche d’une solution consensuelle. Le président de l’Assemblée nationale, Pascal Nyabenda demande de laisser la justice burundaise

Pascal Nyabenda:« Que la justice mène des investigations approfondies afin d’éradiquer l’impunité ».

faire son travail. « Que la justice burundaise continue à mener des investigations approfondies afin d’éradiquer l’impunité ». En tout cas, tout porte à croire que Bujumbura ne va pas lâcher et que le dossier judiciaire est rouvert. Un des proches collaborateurs du président assassiné,

Sylvestre Ntibantunganya quant à lui se dit favorable aux poursuites judiciaires. Il estime que les Burundais ont droit de connaître la vérité sur la préparation et l’exécution de l’assassinat du président Ndadaye. Pour le président Sylvestre Ntibantunganya, l’assassinat du

président Ndadaye est la cause de toutes les difficultés auxquelles le Burundi a été confronté depuis lors jusqu’à aujourd’hui. Il n’exclut pas l’hypothèse d’une volonté de récupération politique : «Il a toujours été dit que, d’une part, le dossier sera tiré des tiroirs en cas de besoin

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pour des intérêts politiques. Et que d’autres se serviront de la politique, d’autre part, pour étouffer l’instruction judiciaire du dossier.» Le président Melchior Ndadaye est le premier président démocratiquement élu au Burundi. Investi le 10 juillet 1993, il fut assassiné après 102 jours de pouvoir au cours d’un coup d’Etat sanglant, le 21 octobre 1993. Pontien Karibwami, président de l’Assemblée nationale, Gilles Bimazubute, vice-président de l’Assemblée nationale, et Juvénal Ndayikeza, ministre de l’Administration du territoire et du Développement communal, trouvèrent également la mort. Ce coup de force va déchaîner des violences inter-ethniques dans tout le pays, déclenchant une guerre civile, qui fera, selon les estimations, entre 50 000 (chiffre avancé par la Commission internationale d’enquête des ONG) et 100 000 morts (chiffre avancé par les délégués du Hautcommissariat aux Réfugiés). Agnès Ndirubusa


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ÉCONOMIE

Vendredi, 7 Décembre 2018 - n°508

Sosumo

Les cris des employés L’Assemblée nationale a adopté, le 19 novembre dernier, un projet de loi pour la restructuration de la Société sucrière du Moso(Sosumo) afin de booster sa production. Même si certains employés en dénoncent une mauvaise gestion, la direction par contre se félicite.

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rois des employés, rencontrés lundi 3 décembre dans la zone dite Sosumo, ne tarissent pas de plaintes. Ils se disent désemparés. Outre la peur de se voir virés à la porte dès que la privatisation sera consommée, ils avouent en avoir marre avec la gestion de la société par ses responsables actuels. Vers 11h, l’ambiance de la circonscription est calme à part des ronronnements au loin des moteurs de l’usine. En cette cité de la commune Bukemba, à près de 25 km de la province Rutana, il a plu tout l’avant-midi. Le paysage connaît plutôt un mauvais temps... A l’usine, bien que la société soit en pleine campagne, les mouvements des engins de récolte se font rares. On peut voir quelques camions bennes, tracteurs, garés près d’une grande salle de conservation de milliers de sacs du sucré fini. Quelques véhicules type Toyota Hilux font des allées et venues. Là, certains employés journaliers font des travaux d’entretien. De l’autre côté, des cadres vaquent à leurs activités dans leurs bureaux... Les entretiens auront lieu vers 13h, au moment de la pause. Ayant requis l’anonymat «pour leur sécurité», nous nommerons nos sources ici par Luc, Jean et Janvier, des noms d’emprunt.

«Si rien ne change, la Sosumo sera bientôt au bord de la ruine» ‘‘L’insuffisance’’ des moyens de production. C’est la raison principale qui sous-tend les reproches de ces employés. D’après M. Luc, uniquement quatre tracteurs sont en activité pour la campagne de récolte en cours. Un travail qui était abattu par 15 tracteurs auparavant. Cet employé évoque des pièces usées non remplacées. Depuis juin dernier, l’administration de la Sosumo s’est rabattue à des camions bennes, loués auprès des particuliers pour six mois. Ils sont à cinq. Les frais de location s’élèvent pour chacun et par jour à 550 mille BIF, même si c’est la société qui se charge du carburant. «Incompréhensible ! », s’exclame Luc, l'air fâché, dénonçant «une forme à peine voilée de détournement des fonds».

Au chapitre du travail de ces véhicules sous location, moult critiques sont émises. Outre qu’ils sont peu nombreux, leur capacité de transport, comparée à celles des tracteurs, reste limitée. En effet ces derniers sont munis de deux charrues, permettant le chargement d’une grande quantité de cannes. Jean, un employé du service de transport au sein de la société relève un autre défi, non des moindres. «Ces camions ne sont pas appropriés pour le déchargement». D’après lui, ils doivent déverser les cannes par terre. Elles seront rechargées par les tracteurs, les seuls qui peuvent les transférer grâce à un outil adapté vers la machine de broyage. «Le processus de transformation des cannes en sucre devient ainsi assez long, ce qui hypothèque la croissance de notre entreprise», estime Jean. Ce n’est pas tout. Ces travailleurs de la Sosumo s’indignent contre le gel des primes. Après chaque récolte, confie Janvier, les employés de cette société bénéficiaient des primes de bilan. Elles étaient accordées suivant le bénéfice réalisé. Il évalue sa moyenne annuelle à 12 milliards de BIF. Une pratique bafouée selon lui depuis la mise en place de nouveaux organes en 2016. Pour M. Janvier, cela est injuste vu que le bénéfice est rendu possible grâce à l’effort fourni par le personnel employé. «C’est décourageant», fait-t-il observer triste, ajoutant que «même les heures sup-

Des employés de la Sosumo au défilé lors de l’ouverture de la saison culturale en 2012.

plémentaires des weekends et jours fériés ne sont plus payées». Ces employés crient au changement du mode de gestion de leur société. «Nous avons besoin d’une bonne gestion. Sinon, notre société sera bientôt au bord de la ruine.» Ils nuancent cependant: «Ce changement ne requiert pas du tout une privatisation». Celle-ci aboutirait notamment au licenciement de pas mal d’employés. Ainsi, ce ne serait que déshabiller Saint Pierre pour habiller saint Paul. Pour eux, la réorientation des dépenses faites notamment sur la location pourrait faire l’affaire. «Si les sommes débloquées pour la location des camions de récolte servaient à l’achat de pièces de rechange

des tracteurs, le niveau de la production pourrait même passer du simple au double».

De faux reproches, juge l’ADG de la Sosumo Eric Nshimirimana, Administrateur directeur-général de la Sosumo, balaie du revers de la main toutes les accusations. Pour lui, ces propos ne sont que des rumeurs, véhiculées par des gens qui ont ‘‘leur’’ objectif. Ce serait en outre des informateurs désinformés ou sous-informés. «L’information que vous avez est fausse pour plusieurs raisons. Si elle n’est pas issue d’un directeur ou d’un directeur général, elle devra être fausse». Au sujet du remplacement des pièces vétustes, M. Nshimirimana soutient que celles-ci sont diffi-

Certains des tracteurs de la Sosumo sont tombés en panne, ce qui impactera la production selon les employés

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cilement importables car rares et chères. Notons que ces tracteurs, fabriqués par une société allemande, sont vieux de plus de trente ans. L’Administrateur directeurgénéral de la Sosumo n’est pas de l’avis d’un loyer cher. «Il est cher par rapport à quoi ?» Aux yeux de cette autorité, celui qui critique la location des camions bennes ignore, à part ces difficultés liées à l’importation, les procédures de passation des marchés publics. «Ils ne sont pas gérés dans l’air. Le mode de passation est clair, tout est justifié et les contrats sont sans équivoque », explique-t-il. Et d’ajouter : «Les services habilités de l’Etat font régulièrement l’audit». S’agissant de la production, Eric Nshimirimana apprécie positivement sa croissance. Du haut de ses trente ans d’existence, la Sosumo satisfait encore les 20 mille tonnes de sucre, et va parfois audelà. La capacité de production qu’elle devait atteindre à sa mise en place. «Même pour la campagne actuelle, nous sommes déjà à plus de 19 mille tonnes malgré les pannes de l’outil de production, le climat qui n’est pas toujours favorable, etc.», se réjouit-il La société sucrière du Moso compte actuellement autour de 500 employés contractuels. Entreprise publique avec 99% des actions de l’Etat, la Sosumo tend vers sa privatisation. Selon le projet de loi adopté le 19 novembre, ces actions devraient en effet se réduire à 46% au profit des privés. Edouard Nkurunziza


ÉCONOMIE

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Un journaliste d’Iwacu primé par l’OBR Un certificat d’honneur a été décerné ce mercredi par l’office burundais des recettes OBR au journaliste du journal Iwacu, Parfait Gahama, pour sa couverture des questions fiscales.

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’est sous un tonnerre d’applaudissement du président de la République, un parterre de ministres et autres dignitaires et une foule immense que le journaliste du journal

Iwacu reçoit des mains du commissaire général de l’OBR, Audace Niyonzima un certificat d’honneur. Parfait Gahama est primé « pour avoir été le meilleur journaliste-ami du fisc ». Ce journaliste chargé de la rubrique économie se félicite du prix accordé. « Le travail que nous menons à Iwacu selon les normes journalistiques sert la population. C’est un honneur pour moi et pour Iwacu que des institutions étatiques saluent la qualité de notre travail.» Un concours avait été lancé

par l’Office burundais des recettes, OBR. A l’issue de cette compétition, cinq journalistes sont sortis du lot. Ils ont donc été primés à l’occasion de la journée du contribuable qui a eu lieu au stade de Makamba. En plus du journaliste d’Iwacu, trois autres journalistes ont été primés. Selon le patron de l’OBR, ces journalistes se sont démarqués à travers leurs productions dans l’éducation fiscale de la population. Agnès Ndirubusa

Parfait Gahama, recevant le certificat d’honneur de l’OBR

Iwacu vu par … A l’occasion de cette distinction, le reporter a approché quelques hautes autorités avec une seule question : Quelle est votre appréciation par rapport au prix accordé au journaliste d'Iwacu. Quelques réponses ont fusé. • Domitien Ndihokubwayo, le ministre des Finances:

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ous félicitons le journal Iwacu pour son travail. Ce prix montre que nous travaillons en étroite collaboration et nous souhaitons que ça puisse continuer de la sorte. »

• Frédéric Nahimana, le ministre de la Communication et des Médias: «C’est un honneur pour le ministère de la Communication et un honneur pour les journalistes d’avoir été primés. J’encourage les autres d’atteindre le

• Emmanuel Ntahomvukiye, ministre de la Défense :

niveau de ceux qui ont été primés pour que l’année prochaine, il y ait plus de journalistes primés dans plusieurs secteurs.»

• Sabine Ntakarutimana, le chef de cabinet civil adjoint à la présidence de la République:

« Je lis Iwacu sur internet. Je vous félicite pour le prix que vous venez d’avoir et vous souhaite un franc succès pour la suite. »

• Audace Niyonzima, le commissaire général de l’OBR:

« Toutes mes félicitations au journal Iwacu pour ce prix. Nous vous souhaitons d’aller de l’avant ».

« Si l’un d’entre vous est primé c’est qu’il a fait du bon boulot et que nous en sommes satisfaits ». A.N.

Trois questions à Antoine Kaburahe

« Accompagner l’action gouvernementale, mais pas les yeux fermés » Interrogé, le fondateur d’Iwacu, le journaliste et écrivain Antoine Kaburahe, estime que ce prix est mérité et qu’Iwacu joue un grand rôle.

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lors que certains accusent Iwacu de « rouler pour l’opposition », comment avezvous vécu cette distinction accordée par une institution gouvernementale à un journaliste d’Iwacu ? Les critiques existent toujours et seul celui qui ne fait rien n’est pas critiqué. Iwacu a été « mangé à toutes les sauces » : pour les uns nous sommes dans « les bonnes grâces du pouvoir », pour d’autres nous sommes pour l’opposition. Certains affirment même que nous travaillons « pour les Blancs »…La réalité est plus prosaïque : nous

sommes un média qui travaille normalement, dans un contexte difficile, en essayant de respecter autant que faire se peut les règles du métier et en donnant la voix à tout le monde. « Iwacu, les voix du Burundi », c’est notre devise. Que les plus hautes autorités disent ouvertement lire Iwacu, est-ce que cela n’est pas paradoxal quand on voit aussi certaines attaques contre ce média ? Non, ce n’est pas paradoxal. Il y’a des médias qui sont là pour montrer le bon côté des choses, caresser dans le sens du poil. Au Burundi il y a une jolie formule,

on parle des médias qui « accompagnent l’action gouvernementale ». Mais ce phénomène n’est pas propre à notre pays, cela se fait ailleurs. Ces médias font de la communication et c’est tout à fait respectable. Mais faire de

l’information ou de la communication ce n’est pas tout à fait la même chose. Attention, je ne dis pas qu’Iwacu s’oppose « à l’action gouvernementale » ! Mais il reste dans son rôle de veilleur, de « chien de garde ». Oui,

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« accompagner l’action gouvernementale, mais pas les yeux fermés », il faut s’interroger, alerter, voire contester ! En général, les politiques intelligents tolèrent les médias indépendants, parfois par intérêt, car ils savent que c’est là où ils trouvent la vraie info, que c’est là où bat le vrai pouls de la population. Auriez-vous un conseil à donner aux journalistes d’Iwacu ? Je leur dis d’être toujours professionnels, équilibrés dans leur travail, d’être fidèles à notre devise : « Iwacu, les voix du Burundi » et donner la parole à tout le monde. Etre dans leur rôle de chiens de garde, toujours douter. Et de rester sereins aussi… Propos recueillis par A.N.


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DROITS DE L’HOMME

Vendredi, 7 Décembre 2018 - n°508

Rutana

Les VSBG, une réalité à Rutana Des cas de violences sexuelles et celles basées sur le genre(VSBG) sont une réalité dans la province de Rutana. Malgré les efforts fournis, le chemin est encore long pour éradiquer le fléau.

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u mois d’octobre, une fillette de 6 ans a été violée par le beau-frère de sa mère à Giharo. Quand la mère a entendu la mauvaise nouvelle, elle n’y a pas cru et ne l’a pas fait soigner. Elle a constaté la véracité de l’affaire quelques jours plus tard. L’enfant a été vite amené à l’hôpital. Heureusement, sa vie n’est pas menacée », témoigne Jean-Bède Manishaka, assistant social en commune de Giharo. L’auteur de cet acte ignoble, affirme-t-il, est pour le moment emprisonné. M.Manishaka assure que cette commune est emblématique des VSBG dans la province de Rutana. « Au mois de novembre, un homme de la colline Ngomane a violé une fille de 12 ans. Elle a été amenée à l’hôpital pour recevoir des soins. Aujourd’hui, elle est retournée à l’école, tandis que le violeur est emprisonné ». Outre des violences sexuelles, cette commune enregistre d’autres formes de violence avec de lourdes conséquences. A Mushindwi, une femme a déprimé parce son mari la battait, affirme cet assistant social. Ce dernier précise que ce mauvais traitement est un effet du concubinage. Face à des cas pareils, JeanBède Manishaka affirme que les victimes bénéficient d’un suivi psychologique. Dans cette commune frontalière avec la Tanzanie, les auteurs de ces forfaits sont appréhendés par la justice. Parfois, ils fuient vers la Tanzanie.

Une victime en train de parler de son cas à l’assistante sociale.

Elle semble une habituée des lieux. L’assistante sociale de la commune de Rutana la salue et lui parle affectueusement. « Mais tu ne t’es pas abritée ! Pourquoi tu viens sous cette pluie ? », lui demande-t-elle en l’appelant par son nom. Pendant ce temps, trois jeunes gens qui échangeaient avec l’assistante se sont tus. Mon Dieu, s’exclame l’un d’eux, elle va mourir de froid et je ne peux rien faire pour l’aider. Et la femme de tranquilliser : « Je vois que vous compatissez beaucoup pour moi, parce qu’il pleut beaucoup. Cette pluie ne me dit rien. C’est plutôt ce qui m’amène ici qui est plus important. Si mon mari pouvait changer de comportement, mon cœur retrouverait la paix. »

L’assistante lui demande si son mari n’a pas changé de comportement. La réponse est négative.

« Mon mari ne couche plus avec moi » Après 14 ans de mariage, le couple n’a pas encore eu d’enfant. Elle a 46 ans, mais elle en paraît 60. « Depuis trois ans, mon mari ne couche plus avec moi. Il ne fait que me gronder. J’entends qu’il travaille comme veilleur, mais il n’amène rien à la maison. Je suis sur le point de marcher nue, faute d’habit. Il vient manger à la maison alors qu’il ne m’aide pas à cultiver. Qu’il vienne passer la nuit avec moi parce qu’il me manque », se lamente-elle. Elle ajoute qu’elle est parfois

battue, affirmation confirmée par l’assistante sociale. N’ayant pas eu d’enfant, la victime subit des menaces de sa belle-sœur qui veut la chasser de la propriété foncière. Elle remercie les autorités administratives et judiciaires qui prennent, le cas échéant, des mesures contraignantes à l’endroit de sa belle-sœur et de son mari. « Nous remercions le CDFC, parce que en cas d’injustice, nous venons dénoncer les malheurs que nous subissons et ils nous viennent en aide. » Dans la commune de Rutana, le cas n’est pas isolé. La justice est à la recherche d’un homme qui a brûlé les habits de sa femme après l’avoir battue. Comme l’indique cette assistante sociale,

La commune de Rutana n’est pas épargnée Il est 9h34. La pluie est très intense, avec du brouillard, sans parler du froid. Alors que tout le monde s’abrite, une femme rurale brave la pluie et le mauvais temps. Toute trempée, maigrichonne, arborant un vieux pagne, M.N. entre dans le bureau du centre de développement familial et communautaire de Rutana (CDFC). C’est au chef-lieu de la commune de la province de Rutana, dans les enceintes de la direction provinciale de l’Agriculture et de l’Elevage.

Les femmes rurales sont sensibilisées au niveau des collines

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cet homme est en conflit avec sa femme en raison du concubinage. Chaque fois qu’il se sait poursuivi par la police, il fui vers la Tanzanie, et sa femme de 27ans, mère d’un enfant, se retrouve dans la misère.

Une mobilisation à tous les niveaux Même si des cas de VSBG persistent, différents intervenant travaillent en synergie pour lutter contre ce fléau social. Raphaël Nduwingoma, coordinateur du CDFC en province de Rutana, précise : « Dans la lutte contre les VSBG, une plateforme a été mise sur pied. Le gouverneur en assure la présidence, le CDFC se charge du secrétariat. La vice-présidence revient aux ONG, comme Cordaid et de l’IADH. Les autres membres de la plateforme sont le procureur, le médecin provincial, le directeur provincial de l’enseignement, et le Tribunal de Grande Instance. » M. Nduwingoma fait savoir que le CDFC a des leaders communautaires jusqu’aux sous-collines. « S’il y a violence dans une localité donnée, le fait est dénoncé via les leaders communautaires. La police se saisit alors de l’affaire. En cas de coups et blessures, c’est au médecin d’intervenir. » Si la victime est encore sur le banc de l’école, poursuit-il, elle doit y retourner après les soins. Et les auteurs des forfaits sont poursuivis en justice. L’association des femmes juristes du Burundi a enregistré 220 cas de VSBG, dans la province de Rutana, en octobre 2018. Onesphore Nibigira


DROITS DE L’HOMME

Vendredi, 7 Décembre 2018 - n°508

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Concours de plaidoirie

Le sacre de l’Université Lumière-Kinindo La grande finale du concours de plaidoirie des étudiants en droit a opposé l’Iscam et l’Université Lumière (Ulbu), campus Kinindo. Cette dernière sortira gagnante. Zoom sur ces talentueux juristes en herbe.

V

endredi 30 novembre, la Cour suprême abrite la finale du concours national de plaidoirie en Droit international humanitaire(DIH), organisé par le CICR. Il est 16h. Deux équipes, Iscam et Ulbu-Kinindo, vont s’affronter dans un procès fictif devant la cour mettant aux prises le parquet (Iscam) et les avocats de la défense (Ulbu-Kinindo). La salle d’audience est bondée. Etudiants, professeurs en droit, magistrats, délégués du CICR… sont venus assister à « l’audience ». 16h30, l’audience est ouverte. Le siège, présidé par le président de la Cour suprême, est composé de cinq experts: un avocat, un procureur général près le tribunal militaire, une déléguée du CICR et un professeur en droit. En confrontation, les deux équi-

pes (deux étudiants par équipe) doivent se prononcer sur un cas fictif de crime de guerre. L’Iscam représente le procureur et l’Ulbu l’avocat de l’accusé. Les étudiants en toge auront 20mn pour présenter leurs arguments avant de répondre aux questions du jury. Principaux critères d’évaluation : les connaissances juridiques, la force de persuasion, la cohérence de l’argumentation et l’esprit d’équipe.

Une brillante plaidoirie et un vainqueur Pendant la plaidoirie qui requiert compétence juridique et talent oratoire, l’Ulbu-Kinindo se démarque. Elle sera proclamée championne et remportera cette première édition du concours national de plaidoirie avec la

note de 16.5/20 contre 14/20 de l’Iscam. L’équipe gagnante a été primée d’un trophée et d’un chèque d’un million BIF. La seconde recevra un trophée et un chèque de 750 mille BIF. Qui sont les lauréats ? Bellarmée Uma, 26 ans, vient de terminer son cursus en droit à l’UlbuKinindo. Il a fréquenté l’Ecole primaire Kanyosha II est lauréat des humanités générales au Lycée de la convivialité, section lettres modernes. Il poursuivra la faculté de droit à l’Université du Burundi pendant quelques mois, avant de décider de continuer son cursus à l’Ulbu. Son ambition : être expert en droit international public. La lecture et les films documentaires sont ses passions. Son ancien professeur à l’université parle d’un jeune homme travailleur, qui aime bosser. « Il fait des recherches ». Bellarmée sera jugé meilleur plaideur, lors du concours avec comme prix un trophée et un chèque de 300 mille BIF.

Le président de la Cour suprême (à droite) remet le trophée à l’équipe gagnante de l’Ulbu-Kinindo.

Corine Kaneza, 24 ans, a fait l’école primaire Stella Matutina. Elle obtient son diplôme des humanités générales au Lycée du Lac Tanganyika. Cette citadine rêve de faire carrière dans la magistrature comme juge. « Percutante, une plume exceptionnelle », dira un de ses professeurs. Corine sera aussi parmi les trois

meilleurs plaideurs du concours. Ces trois meilleurs plaideurs représenteront le Burundi au concours régional africain de plaidoirie à Yaoundé en 2019. Au départ, 20 étudiants issus de dix universités étaient en lice pour ce concours. Clarisse Shaka

SANTÉ

Prolapsus utérin: l’utérus entre les jambes ! Certaines femmes retrouvent leur utérus hors de l’orifice vaginal. A la découverte de cette maladie gynécologique qui pourrit la vie de plus d’une.

C

e sont des femmes affolées, désespérées… rencontrées à l’hôpital de Gitega, lundi 3 décembre. Jacqueline, 33 ans, a du mal à tenir debout. Elle marche difficilement. Elle vient de se faire opérer. Cette mère de trois enfants venait de passer un an avec un utérus au niveau de la vulve. To u t commence ave c l’accouchement de son troisième enfant. Elle accouche à l’hôpital par voie basse. Quelques jours après, elle sent un « truc anormal » entre ses jambes. « A travers un miroir, je découvre une chose courbée, affreuse, qui sort légèrement de mon vagin. » Elle en parle à sa mère qui n’est pas surprise. Cette dernière lui parle d’une anomalie fréquente chez les femmes âgées, « igikoko » (bestiole). C’est ainsi que l’on nomme le prolapsus utérin en milieu rural. « Quand je travaillais pendant plus de deux heures, l’utérus descendait davantage ». Scolastique, 57 ans, une autre patiente qui a vécu 20 ans d’enfer. Cette mère de six enfants a dével-

oppé le prolapsus utérin, depuis l’accouchement de son premier enfant, il y a plus de 20 ans. Après chaque accouchement, « la bestiole » se développait davantage, atteignant la « longueur de la main ». « Je ne pouvais pas m’asseoir. Au fil des années, l’utérus dégageait une mauvaise odeur. Mon mari me maltraitait. J’étais rejetée dans la communauté ». Deux autres femmes âgées de 69 et 73 ans débarquent à l’hôpital de Gitega. Elles ont le même problème. Elles affichent une mine désespérée. Bien qu’extrêmement taboues, ces « descentes d’organes » sont loin d’être exceptionnelles. Ces patientes de la commune Mutaho, en province Gitega, affirment que plusieurs femmes de leur localité présentent cette anomalie. Mais elles n’osent pas en parler.

Loin d’être une fatalité D’après Dr Jean de Dieu Manirambona, médecin à l’hôpital de Gitega, le prolapsus utérin correspond à la descente de l’utérus

Des patientes du prolapsus utérin qui viennent d’être opérées à l’hôpital de Gitega.

dans la cavité vaginale, pouvant à l’extrême être extériorisé hors de l’orifice vulvaire. Selon lui, les organes pelviens (du bassin) de la femme sont maintenus grâce à un ensemble de muscles. « L’on parle de prolapsus, lorsqu’il y a relâchement de ces muscles. L’utérus et parfois

aussi la vessie et le rectum ne sont plus soutenus et s’effondrent ». Dr Li Wen Youan, gynécologue chinois opérant actuellement cette maladie à l’hôpital de Gitega, évoque les principales causes du prolapsus utérin : plusieurs accouchements et dans de mauvaises conditions. Des

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accouchements mal soignés, la reprise hâtive des activités après l’accouchement, le problème naturel de musculation (les muscles qui soutiennent les organes pelviens ne sont pas bien développés)… sont d’autres causes du prolapsus. L’âge avancé et la ménopause sont également un facteur de risque, d’après ce gynécologue. En raison de la baisse des œstrogènes, explique-t-il, les tissus perdent leur élasticité et ne soutiennent plus efficacement les organes. Dr Li indique que les méthodes de traitement sont déterminées en fonction de l’âge, des besoins liés à la reproduction, etc. Pour les femmes moins âgées, souligne Dr Fréderic Irambona, directeur adjoint de cet hôpital, la meilleure solution est l’ablation de l’utérus (hystérectomie). Si elles sont sexuellement actives, prévientil, il y a risque de récidive. Pour les femmes âgées, la méthode la plus couramment pratiquée est la fixation de l’utérus et des muscles qui le soutiennent. Dr Irambona indique que ces cas de prolapsus ne sont pas nouveaux. Depuis trois ans, l’hôpital reçoit en moyenne une dizaine de cas chaque mois. Clarisse Shaka


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SANTÉ

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Vaccination contre la méningite

Plus de sept millions de personnes attendus Seule la tranche d’âge d’une année à 29 ans est attendue à la vaccination contre la méningite à méningocoque. Une campagne débutée mardi 4 décembre pour une durée dix jours.

N

ous attendons 7.893.903 personnes pour cette campagne de dix jours », a confié Dr Olivier Nijimbere, directeur du Programme chargé de vaccination. Au niveau national, 2.623 sites ont été identifiés pour cette tâche. L’effectif du personnel y affecté est de 13.115. « A chaque centre de vaccination, on y a déployé cinq personnes, dont trois vaccinateurs qualifiés ». « Nous avons entendu que seuls ceux qui ont entre 1 an et 29 ans sont autorisés à prendre part à cette campagne. Sommes-nous à l’abri ? Pourquoi eux seulement ? », s’interroge Simon, un taxi-vélo, croisé à proximité de la zone Buyenzi, en commune Mukaza. Ce quadragénaire a été vacciné en 1992. Depuis lors, aucune autre campagne de vaccination n’a eu lieu. « Or, j’ai entendu que ce vaccin a une validité de 10 ans ». Mêmes inquiétudes chez Agnès

Ntawe, une habitante de Nyakabiga. « Pourquoi protéger une seule partie de la population ? Je pense que tout le monde devrait être vacciné ». Tout en appréciant cet effort du gouvernement, elle reste très inquiète sur le sort des moins d’une année ou ceux ayant plus de 29 ans. Idem pour Kabura, un habitant de la zone Kamenge, en commune Ntahangwa. Il estime que tous les Burundais ou étrangers résidant au pays devraient bénéficier de ce vaccin. D’après lui, au moins deux campagnes de vaccination auraient dû avoir eu lieu depuis 1992. « Supposons que cette maladie soit contagieuse, une seule personne pourrait contaminer beaucoup de gens ». Si cette limitation est liée au manque de moyens financiers, il propose des campagnes par phases. Cet homme doute du professionnalisme de tous les

Un des sites de vaccination à Bujumbura.

vaccinateurs : « Nous avons entendu que parmi les personnes engagées pour cette tâche, il y en aurait qui n’auraient pas suivi une formation dans une école paramédicale. » Il appelle l’administration, les églises, la population à s’impliquer pour la réussite de cette campagne.

Le gouvernement tranquillise En ce qui concerne la tranche d’âge, Dr Jean-Bosco Sindayigaya, porte-parole du ministère de la Santé, indique que des études ont montré que la tranche d’âge d’une année à 29 ans est à grand risque d’attraper cette maladie. Il est vraiment très difficile, ajoutet-il, de vacciner tout le pays.

Il signale que cette campagne fait suite à une étude menée en 2004-2005 révélant des cas isolés de méningite. « Ainsi, le gouvernement veut prévenir ». Pour la réussite de cette opération, Dr Olivier Nijimbere appelle toutes les personnes concernées, nationaux ou étrangers, à répondre à cet appel. Au moment où l’on enregistre des cas de boycott, surtout en commune Musigati, en province Bubanza, il sollicite, entre autres le concours de l’administration, des journalistes, des églises dans la sensibilisation. « C’est pour l’intérêt de la population et du pays ». Le directeur du Programme chargé de vaccination fait savoir que la méningite est une inflammation des méninges, des membranes qui entourent le cerveau et la moelle épinière. « La température élevée, la raideur de la nuque, les céphalées, des vomissements en sont des symptômes.» Et le diagnostic se fait par une ponction lombaire. Rénovat Ndabashinze

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Non à la discrimination des personnes handicapées ! Dans le souci de relever les vrais défis qui minent les personnes handicapées au Burundi, l’UPHB en collaboration avec l’OHCDH ont organisé ce mercredi 5 décembre une réunion des parties prenantes.

L

’inclusion des personnes handicapées dans les Objectifs de Développement Durable (ODD). La problématique de la personne handicapée au Burundi. Les avancées et perspectives en matière des droits de la personne handicapée. Ce sont les trois points essentiels à l’ordre du jour de cette réunion organisée par l’Union des Personnes Handicapées du Burundi (UPHB) en collaboration avec l’organisation des Nations Unies au Burundi. Cette réunion verra la participation de différents représentants des organisations œuvrant dans le domaine des personnes handicapées, de la jeunesse, des cadres du ministère des droits de l’Homme, des fonctionnaires de l’ONU oeuvrant dans le secteur des Droits humains au Burundi ainsi que les représentants de l’UPHB. Plusieurs défis à l’égard des personnes handicapées sont relevés : les barrières socio – culturelles. D’après Siméon Barumwete, membre de l’UPHB, la naissance d’un enfant handicapé est considérée comme une fatalité et parfois même comme une malédiction pour la famille. La faiblesse des statistiques et d’intégration du handicap dans les politiques sectorielles, les projets et programmes de développement constitue un autre défi important, à en croire la représentante légale de l’UPHB, Adélaïde Nyiginya. Pire, souligne-t-elle, la représentation des personnes handicapées dans les institutions politiques est médiocre. « Pourtant, c’est dans ces institutions que se joue l’avenir des pays et des hommes. » Par rapport aux pays de l’EAC, le Burundi est le dernier pays en matière de représentativité politique des personnes handicapées, d’après M. Barumwete. Pourtant, il existe plusieurs instruments nationaux et internationaux reconnaissant les droits des personnes handicapées. Il cite notamment la loi n°1/03 du 10 janvier 2018 portant promotion et protection des droits des personnes vivant avec un handicap. « Mais la mise en application effective de ces instruments pose de sérieux problèmes souvent liés à

De gauche à droite, le représentant de l’Union Européenne, du ministère des droits de l’Homme et la représentante légale de l’UPHB ouvrant la réunion.

l’insuffisance de ressources et aux blocages socioculturels. » Le représentant du ministre ayant les droits de l’Homme dans ses attributions, Godefroid Nyawakira, affirme dans son discours que l’accès des personnes handicapées aux divers services est au cœur des préoccupations du gouvernement pour favoriser leur inclusion socioéconomique. « Car

l’efficacité d’une société se manifeste par la façon dont elle traite les plus vulnérables de ses membres. »

Des ODD non discriminatoires L’inclusion des groupes vulnérables dont notamment les personnes handicapées dans les ODD est le principal axe prioritaire dans l’appui des Nations unies au gouvernement burun-

dais. En effet, la plateforme stratégique que constitue les ODD vise à matérialiser le développement intégral en “ne laissant personne de côté.” C’est-à-dire inclure toutes les catégories de personnes vulnérables y compris les personnes handicapées, clarifie, lors de sa présentation, Jean Richard Bigirimana, fonctionnaire des Nations Unies au Burundi.

M. Bigirimana évoque quelques propositions visant à inclure la question du handicap dans les ODD: donner les moyens d’actions aux groupes vulnérables pour éradiquer la pauvreté liée au handicap. Exiger des Etats et des bailleurs les mécanismes de collecte, de centralisation et de suivi des données sur le handicap. S’assurer par une vigilance constante que les groupes les plus discriminés comme les femmes handicapées, les personnes avec un handicap intellectuel soient inclus dans les politiques et programmes de développement.

Un débat riche et mille et une recommandations

Les participants à la réunion ont recommandé d’inclure les personnes handicapées dans tous les organes de la vie du pays.

Le fonctionnaire des Nations Unies explique l’inclusion des personnes handicapées aux ODD.

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Dans les travaux de groupe, les participants ont été amenés à apporter leur contribution pour une meilleure promotion des droits des personnes handicapées. Plusieurs recommandations en ont émané. Entre autres : inclure les personnes handicapées dans les organes de prise de décision. Mettre en place une base de données statistiques qui peuvent contribuer dans la prise en compte de leurs besoins spécifiques. Promouvoir leur intégration dans tous les domaines (politique, économique et social). Mettre en place un comité de protection des droits des personnes handicapées pour éliminer toutes les formes de discrimination. Mener une étude en vue d’inventorier les besoins spécifiques pour chaque type d’handicap. Aux organisations œuvrant pour les personnes handicapées et ministères sectoriels, les participants recommandent de suivre la mise en vigueur des lois promulguées. Prévoir des formations sur le handicap pour les personnels des services divers.


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SOCIÉTÉ

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Kayogoro

Des rapatriés dans le désarroi

ont été bien gardées durant leur absence ». Cet administrateur communal fait savoir que pour plus de 3000 réfugiés qui sont déjà rentrés, la plupart proviennent des collines frontalières de la Tanzanie, notamment Bigina, Gatabo et Mugina. « Ils cohabitent bien avec les résidents, aucun problème n’a encore été soulevé ». Le HCR, en collaboration avec le gouvernement, leur a donné le paquet retour. Le ministère de l’Intérieur et celui des Affaires sociales leur ont octroyé des assistances en vivres. M. Misago fait aussi savoir que des associations locales interviennent dans la réinsertion socioéconomique afin de les aider à sortir de la pauvreté. « Les gens de la commune Kayogoro essaient de faire tout pour sortir de la pauvreté. Si untel vend des légumes, un autre vend des arachides, des habits… ils se débrouillent bien. Je pense qu’ils vont s’en sortir».

Le manque d’abris appropriés, de semences, une pauvreté extrême… entre autres défis rencontrés par les habitants de la province Makamba récemment rapatriés de la Tanzanie. Toutefois, l’administration tranquillise.

Q

uelques maisonnettes délabrées couvertes d’herbes et de tentes habillent la colline Muyaga de la zone Kayogoro. C’est à 16 km du cheflieu de la commune Kayogoro, en province Makamba. Ces maisonnettes sont occupées par plus d’une vingtaine de familles récemment rapatriées de la Tanzanie. Frédéric Nkurunziza, père de six enfants, habite sur cette colline dans une maison de 7m sur 3, couverte d’herbes. « Je l’ai empruntée à mon frère qui est descendu sur Bujumbura pour y vivre. La mienne est complètement détruite ». Il fait savoir que, dans cette localité, peu de maisons des rapatriés sont en bon état : « Si elles ne sont pas complètement détruites, la pluie ne facilite pas la tâche. Pendant la nuit, nous devons nous déplacer, sinon nous nous couchons dans l’eau». Pour ce, M. Nkurunziza demande au gouvernement d’honorer ses engagements : « Quand nous avons regagné le pays, nous avons eu la promesse d’avoir des tôles pour couvrir nos maisons. Mais ceux qui vivent près du chef-lieu de la commune bénéficient, en premier lieu, de l’assistance de l’administration. Ceux des coins les plus éloignés sont parfois oubliés.» Gilbert Nitereka, un autre rapatrié de cette même colline et père de huit enfants, déplore qu’à leur retour de Tanzanie, en juin dernier, leurs terres arables étaient occupées par les membres de leurs familles. « Ils se sont accaparés de nos terres. Non seulement ils ne nous ont pas remis nos récoltes, mais aussi ils refusent de nous céder nos terres ». Ce n’est même pas facile, poursuit-il, d’avoir des semences. Suite à la pauvreté qui sévit dans cette localité, les élèves aussi deviennent victimes. « Si nos enfants ont eu la chance d’intégrer l’école, ils n’ont pas eu le kit scolaire nécessaire », s’indigne-t-il. Selon lui, les uns vont à l’école sans même porter d’uniforme.

«Pas de mur en construction, pas de tôles » Les rapatriés reçoivent un paquet retour quand ils reviennent au pays.

« La promesse est une dette » Situation similaire pour les rapatriés de la colline Butare de la même commune. Christine Nyandwi, mère de 4 enfants, fait savoir que le gouvernement avait promis une assistance pour six mois : « Nous avons reçu une assistance qui couvre seulement trois mois, il y a plus d’une année. Nous attendons l’autre tranche.» Outre le paquet retour distribué dans le centre de transit à Mabanda, province Makamba, ces rapatriés ont également reçu 10 kg de riz. Le paquet retour est composé d’argent (60 dollar pour un adulte et 40 dollar pour enfant de moins de 18 ans), de vivres, de non-vivres, d’ustensiles de cuisine, de houes…. « Nous n’avons pas eu d’autre soutien et la récolte n’est pas du tout bonne suite au soleil accablant observé durant la saison culturale passée. » Pour elle, le gouvernement devrait honorer ses engagements. « Nous voulons sortir de cette pauvreté et avoir des maisons bien couvertes. » Collette Nzeyimana, veuve et mère de quatre enfants, de la colline Butare, abonde aussi dans le même sens. Réfugiée en Tanzanie en 2016, elle est retournée au Burundi en septembre 2017. Arrivée chez elle, elle a trouvé que tous ses champs ont été récoltés par les voisins. « Malheureusement, je n’ai pas encore pu retravailler dans mes champs, suite à une longue maladie. Mes enfants

risquent de mourir de faim ». Et elle assure que l’administration avait promis de leur donner des tôles et de continuer à les assister. « Nous avons attendu, en vain. Les tentes qui couvrent nos maisons sont en piteux état ». Zachée Misago, administra-

teur de la commune Kayogoro, indique que l’administration a identifié les 18 familles les plus vulnérables qui ont récemment reçu des tôles. L’enquête se poursuit, rassure-t-il, les autres vont être servis. « Mais ils sont peu nombreux, car leurs maisons

Mme Gloriose Berahino : « C’est un processus continue, les autres vont en recevoir incessamment. »

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Gad Niyukuri, gouverneur de la province Makamba, fait savoir que ceux qui avaient vendu leurs toitures ou dont les tôles ont été emportées par le vent ou la pluie ont bénéficié d’une assistance de la part du gouvernement et du HCR. Concernant les plus de 57 mille réfugiés déjà retournés au pays, ils n’ont pas de problème particulier. Gloriose Berahino, directrice générale en charge du rapatriement au ministère de l’intérieur, affirme que tous les rapatriés vulnérables déjà identifiés ont bénéficié de tôles pour couvrir leurs maisons. « Si les murs d’une maison sont en cours de construction, les bénéficiaires sont enregistrés automatiquement pour recevoir des tôles. Sinon, ils les vendront sans doute, » explique-t-elle. Elle souligne qu’à peu près 20 familles identifiées comme vulnérables de la commune Kayogoro ont même reçu des tôles la semaine passée. « C’est un processus continue. Les autres vont en recevoir incessamment. » Selon elle, ceux qui n’ont pas encore eu de tôles, ce sont ceux qui sont retournés par leurs moyens. Pour l’assistance évoquée de six mois, Mme Berahino révèle que sa direction avait fait un lobbying pour une période de six mois. Cependant, elle n’en a obtenu que pour trois mois. « Il faut donc qu’ils se contentent de ce qu’ils ont eu, pas d’autre choix », conclut-elle. Diane Uwimana


SOCIÉTÉ

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Makamba, un centre pour handicapé en difficulté Le 3 décembre de chaque année, le monde célèbre la journée internationale des handicapés. Iwacu s’est rendu dans un centre de rééducation et d'appareillage (Cereap) saint Bernard de Makamba. Un centre qui fait face à des soucis pécuniaires.

C

’est une initiative de Mgr Bernard Bududira, ancien évêque du diocèse de Bururi. Frappé par le manque d’assistance des personnes handicapées, le prélat décide de créer ce centre en 1977. A l’époque les personnes handicapées se terrent dans leurs maisons, Les enfants sont les plus touchés. Les écoles sont loin et pour y arriver il faut parcourir de longues distances, traverser des rivières, monter des collines. Pire, ils ne reçoivent pas de soins en rapport avec leurs handicaps. C’est pour leur permettre d’étudier et de se faire soigner que le Cereap voit le jour. Quatre décennies plus tard, l’aventure dure toujours. C’est une congrégation des sœurs de l’Institut des disciples du Christ qui veille à son fonctionnement. Situé à quelques mètres de l’hôpital de Makamba et de l’Ecofo Makamba I, le Cereap est un mini complexe de bâtiments qui abrite plusieurs activités. On y trouve un Internat pour les écoliers et élèves, et un service d’hospitalisation. Ce dernier comprend deux spécialités : la kinésithérapie et l’orthopédie. Il y a des unités de production de prothèses, d’orthèses et de chaussures pour handicapés, notamment les chaussures destinées aux enfants qui souffrent des pieds bots, une malformation des pieds touchant les petits à leur naissance. Le loisir des pensionnaires du centre n’a pas été oublié. Un terrain de jeux y a été construit .On y joue le sitting volleyball. Une discipline paralympique dans laquelle, cet établissement semble se distinguer. L’équipe féminine en particulier est la plus redoutée. Elle a déjà remporté deux coupes lors des divers championnats nationaux. Divine Niyonkuru, habitant de la Zone Rugarama, commune Makamba, ne tarit pas d’éloges pour ce centre. « Mon fils Daniel, âgé de près deux ans, est né avec une malformation des pieds. Cultivatrice, je ne pouvais pas le faire soigner. Les séances de kinésithérapie sont chères r .J’étais désespérée que mon enfant finisse sa vie avec

Unité de production de prothèses.

ce handicap », raconte -t- elle. C’est une amie qui lui a parlé d’un centre traitant des problèmes de pied. Hésitante, Mme Niyonkuru s’y rend en se disant qu’elle n’avait rien à perdre. A l’arrivée, une belle surprise l’attend. Elle ne va payer que la modique somme de 1500 BIF. Un montant alloué pour l’achat d’une fiche de suivi. « Ça fait deux mois que mon fils reçoit le traitement et il commence à marcher normalement », se réjouit la mère du petit Daniel.

Les temps qui sont durs Depuis deux ans, sœur Joselyne Mbonimpa dirige le Cereap. Elle admet que ce n’est pas une tâche facile mais s’y donne le cœur joyeux. Actuellement,

l’établissement loge un total de deux cents personnes. Selon la religieuse, avec le temps le centre a évolué tout en ne s’écartant pas des objectifs initiaux. «Nous accueillons des enfants qui ne sont pas en mesure d’aller à l’école. Nous essayons de les former à de petits métiers qui peuvent assurer leur survie après avoir quitté le centre », fait savoir sœur Mbonimpa. Il ya des formations de couture, de vannerie et autres. A la fin, ces patients reçoivent du matériel pour un nouveau départ. « Ceux qui ont suivi la couture, nous leur donnons des machines à coudre et nous payons le loyer de leur atelier pendant 6 mois. Pour d’autres désirant faire le commerce, nous leur ouvrons des boutiques », affirme la directrice. Toutefois, la directrice indique

Un patient en pleine séance de kiné.

qu’ils font face à de graves soucis financiers. La décision de suspendre des ONG y est aussi pour quelque chose. « Nous bénéficions du soutien de l’ONG Handicap International. Il paraît qu’elle risque de fermer pour du bon au Burundi. Elle nous fournissait des équipements que nous ne pouvions pas nous permettre faute de moyens », déplore la religieuse. Des personnes y étaient soignées et cette ONG leur procurait des prothèses. Ces dernières étaient achetées dans le Cereap, ce qui renflouait ses caisses. S’il advenait que Handicap international quitte le Burundi, les opérations chirurgicales dont bénéficiait le centre saint Bernard vont cesser. Une grande perte pour les patients dont la plupart viennent

des milieux pauvres. Peu avant la mesure de fermeture des ONG, une autre nouvelle est venue ébranler le fonctionnement de la maison de sœur Mbonimpa. Le PAM a coupé son ravitaillement en nourriture. Malgré toutes ces tempêtes, Sœur Mbonimpa essaie de maintenir le gouvernail de son navire en perdition. Pour l’heure, la directrice essaie de s’adapter face aux différents changements. Un bar avec une salle de réception et une boutique sont, pour l’heure, les solutions pour pouvoir tenir. Mais pour combien de temps ? En bonne chrétienne, elle espère que les choses vont finir par s’arranger. Arnaud Igor Giriteka

Sœur Joselyne Mbonimpa : « Handicap International nous fournissait des équipements que nous ne pouvions pas nous permettre, faute de moyens. »

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Au coin du feu

Vendredi, 7 décembre 2018 - n°508

Avec

Déo Hakizimana alias « Kireko » Dans le Burundi traditionnel, le soir, au coin du feu, la famille réunie discutait librement. Tout le monde avait droit à la parole et chacun laissait parler son cœur. C’était l’heure des grandes et des petites histoires. Des vérités subtiles ou crues. L’occasion pour les anciens d’enseigner, l’air de rien, la sagesse ancestrale. Mais au coin du feu, les jeunes s’interrogeaient, contestaient, car tout le monde avait droit à la parole. Désormais, toutes les semaines, Iwacu renoue avec la tradition et transmettra, sans filtre, la parole longue ou lapidaire reçue au coin du feu. Cette semaine, au coin du feu, Déo Hakizimana alias « Kireko ».

V

otre plus beau souvenir ? C’est le jour où j’ai fondé le mouvement Chiro à la paroisse Murayi dans ma commune natale de Giheta. C’était en 1967. L’autre beau souvenir se situe en janvier 1981. C’est le jour où j’ai produit ma première émission « Ninde » à la Radiotélévision nationale (RTNB).

ment. Les numéros Ninde ou d’autres pièces de théâtre

Votre plus triste souvenir ? Il y a trop de tristes souvenirs qu’on ne peut pas énumérer ici. Mais la mort de ma mère en 1963 m’a énormément affecté.

Le pays où vous aimeriez vivre ? Pourquoi ? Aucun autre pays à part le Burundi. C’est le pays que j’aime beaucoup.

Quel serait votre plus grand malheur ? Mourir dans le péché, partir sans se confesser devant un prêtre.

Le voyage que vous aimeriez faire ? Je ne peux pas parler d’un pays quelconque car je n’ai jamais voyagé. Toutefois, j’ai entendu que l’Australie et le Canada hébergent beaucoup de Burundais. Un jour, j’aimerais y aller.

Le plus haut fait de l’histoire burundaise ? C’est l’indépendance du Burundi. Je pense que ce jour-là a marqué tous les Burundais. La plus belle date de l’histoire burundaise ? C’est le 1er juillet 1962. Je me rappelle beaucoup de choses. Depuis ce jour, le peuple burundais est devenu libre. Le colon ne nous demandait plus les œufs et le beurre. Sans oublier les coups de chicotes. La plus terrible ? C’est le 13 octobre 1961, le jour de l’assassinat du Prince Louis Rwagasore. La date qui marque le début d'autres évènements tragiques qu’a connus le Burundi. Le métier que vous auriez aimé faire ? Pourquoi ? Je suis satisfait du métier que j’exerce. Cela fait des années que je joue des pièces de théâtres et Ninde pour informer, donner des conseils à la population et je fais rire mes compatriotes. Votre passe-temps préféré ? C’est le moment de réfléchir à ce que je vais faire ultérieure-

Si vous étiez ministre de la Culture, quelles seraient vos deux premières mesures ? Ma première mesure serait d’inciter les jeunes à revenir aux anciennes traditions car on constate que ces jours-ci la culture burundaise est menacée. Dans le temps, les parents prenaient le temps, surtout le soir, pour les contes, les chants traditionnels avec leurs enfants. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas. La seconde décision sera de construire une maison de formation pour encadrer les jeunes talentueux pour les théâtres, les sketches et autres jeux.

Votre lieu préféré au Burundi ? Le Burundi est beau. Pour dire qu’il y a plusieurs lieux qu’on peut préférer. Par exemple, j’adore les chutes de Mwishanga en province Rutana et la source du Nil en province Bururi.

Votre plat préféré ? J’aime manger les aliments naturels qu’on cultive chez nous à Giheta. Les patates douces, les haricots, les ignames, la pâte du manioc, les choux et les amarantes. Votre chanson préférée ? Il y a plusieurs chansons qui contiennent des messages qui me touchent au cœur. La chanson intitulée « Indero y’umwana iva hasi » (l’éducation de l’enfant commence depuis son bas âge) reste la première pour moi car j’ai même composé un scénario «Ninde» portant le même titre. Quelle radio écoutez-vous ? J’écoute deux radios seulement. La RTNB et la Radio Rema FM. Avez-vous une devise ? Non. Votre souvenir du 1er juin 1993 ? Sans mentir je n’ai aucun souvenir. Mais si vous m’accordez du temps, je pourrai faire des recherches.

Croyez-vous à la bonté naturelle de l’homme ? Bien sûr. Quand je vois un homme, je pense directement à l’image de Dieu qui nous a créés en tant que croyants.

Votre définition de l’indépendance ? L’indépendance, c’est être libre. Avoir le droit de penser par soi-même. Je me rappelle qu’à l’époque on nous parlait de Rugereka, des Belges et des Allemands. Pour rester libres, nos ancêtres ont bravé tous les dangers et les ont combattus avec des lances alors que ces envahisseurs avaient des fusils.

Votre définition de la démocratie ? C’est le fait d’avoir des dirigeants élus en toute transparence, qui garantissent le développement du pays et qui respectent les droits de l’Homme. Votre définition de la justice ? Je ne peux pas en dire beaucoup de choses mais c’est le respect de tous les citoyens sans violer la loi.

Pensez-vous à la mort ? J’y pense. Depuis ma naissance, on me parle de mes grandsparents qui ne sont plus de ce monde. Je ne les ai jamais connus. Par après, nos parents ont pris le même chemin. C’est pourquoi je sais qu’un jour je mourrai. Si vous comparaissez devant Dieu, que lui direz-vous ? Je le remercierai de m’avoir créé et de m’avoir donné une famille vaste. Propos recueillis par Désiré Sindihebura

Bio express

D

éo Hakizimana alias Kireko ou Sakubu est né en décembre 1949 sur la colline Muyange de la commune Giheta en province de Gitega. À l’âge de 7 ans, il a commencé ses études à l’Ecole primaire de Murayi. Faute de moyens, Kireko a abandonné l’école en 6ème année primaire. En 1967, il a créé le mouvement d’action catholique Chiro à la paroisse Murayi. En collaboration avec d’autres jeunes de sa génération, Déo Hakizimana organisait des pièces théâtrales en commune

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Giheta. C’est le début de la création de la célèbre émission « Ninde » à la RTNB en janvier 1981. Dans sa carrière, il a obtenu le certificat de la meilleure pièce de théâtre en 2002. En 2012, il a reçu le certificat d’honneur donné par le Président de la République du Burundi lors du 50ème anniversaire de l’Indépendance du Burundi. En 2016, Déo Hakizimana a reçu le certificat d’honneur donné par la commune Giheta lors de la fête communale.


AU CŒUR DU PAYS

Vendredi, 7 décembre 2018 - n°508

Région Centre

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Gitega

La culture du café en danger En plus du délaissement de cette culture par les paysans, les perturbations climatiques amènent des maladies nouvelles comme l’anthracnose, la rouille et les borers du tronc. De notre correspondant Jean-Noël Manirakiza

D

ans plusieurs coins du pays, les paysans tentent de remplacer des plantations des caféiers au profit d’autres spéculations agricoles », a averti Eustache Cimpaye du département de la protection des végétaux. Pour les personnes qui œuvrent dans la filière café, ces dernières années, la récolte a été mauvaise suite aux mauvaises pratiques culturales favorables au développement des organismes nuisibles. La conséquence a été la baisse drastique de la production et la dépréciation de la qualité du café du Burundi. « Le café est une culture de rente de grande importance et contribue à 4% du PIB et fournit environ 80% des recettes d’exportation . Une intervention phytosanitaire, au niveau de tout le pays, contre l’anthracnose s’avère indispens-

Région Ouest

Macaire Ntirandekura : « Le peu de pesticides qui est disponible dans les stocks devrait être donné aux cultivateurs à temps! »

able !» D’après cet enquêteur, le pourcentage moyen du taux d’infection au niveau national est de 13,09%. Il a en outre indiqué que ces maladies ne sont pas difficiles à repérer. Pour l’anthracnose, des petites taches brunes foncées sur les drupes vertes. Et ce qui est de la rouille, elle est caractérisée par l’apparition de petites taches circulaires jaunâtres à la face inférieure des feuilles et s’agrandissent en se recouvrant d’une poussière orange. Quant au Borers, c’est une larve qui se nourrit tout d’abord des tissus situés entre l’écorce et le bois de la base des

caféiers et en général la galerie ceinture l’arbre. La larve pénètre ensuite dans le bois et creuse des galeries qui descendent dans le pivot et les grosses racines. Les caféiers fortement attaqués peuvent dépérir, leur feuillage jaunit et ils perdent leur fixité dans le sol. La production est réduite. « Toutes ces maladies entraînent une diminution de la récolte et l’anéantissement progressif des caféiers », rappelle Eustache Cimpaye. D’après Macaire Ntirandekura, président de l’Intercafé, l’intervention devrait être rapide à travers des recherches-action.

« Le peu de pesticides disponible dans les stocks devait être donné aux cultivateurs à temps. Sinon, le caféiculteur pourrait se désintéresser du café. Ce qui occasionnerait des pertes incalculables dans la filière café. »

Les agriculteurs demandent un juste prix Pour les cultivateurs de Gitega interviewés, la culture du café n’est plus rentable comme aux temps de leurs pères. Ils font savoir que la période où le paysan construisait une maison en tôles, s’achetait des vaches à la récolte du café est révolue.

« J’ai hérité d’une plantation de mon père. Mais pour le moment, j’ai réalisé que c’est une perte de temps pour l’entretenir, il ne donne que quelques kilos de graines à la taille de l’éleusine », déplore Bukuru de Rutegama. D’après Bukuru, à part l’absence des plants de caféiers pour renouveler les plantations vieilles, les agriculteurs sont laissés à eux-mêmes. «La taille collective et la pulvérisation des pesticides ne s’appliquent plus comme il y a des années », regrette Claver son voisin. Selon les caféiculteurs, l’entretien des caféiers exige beaucoup d’attention mais les dividendes ne sont pas satisfaisants. « Le prix sur le kilo est trop bas. Il faudrait rehausser le prix de vente pour encourager l’agriculteur, sinon le café disparaîtra de nos champs au profit des cultures saisonnières qui rapportent gros et vite », prévient Dominique. Quelle que soit l’ampleur de ces maladies sur tout le territoire national, des sources provenant du département de la protection des végétaux affirment que la lutte chimique contre les Borers du tronc s’avère difficile dans la mesure où le produit qui était dans le temps recommandé (Dieldrine) est interdit au Burundi depuis l’an 200. En plus, la pulvérisation collective des autres pesticides est programmée pour septembre 2019.

Cibitoke/Buganda

Des pluies diluviennes causent des dégâts Plus de 160 maisons ont été démolies ces derniers jours sur la colline et zone Ndava commune Buganda par les pluies torrentielles. Elles ont également détruit les champs de culture. La population demande une assistance. De notre correspondant Jackson Bahati

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Ndava et sur presque toutes les collines de la commune Buganda province Cibitoke, la population est dans la désolation. Ces pluies qui ont commencé à causer des dégâts la semaine dernière n’ont rien laissé sur leur chemin. Les victimes estiment déjà plus de 168 maisons détruites. D’autres risquent de s’écrouler bientôt si elles ne sont pas retapées. Les habitants rencontrés sur place précisent que les murs de ces maisons portent des fissures et les propriétaires ont jugé bon

de les quitter craignant pour leur sécurité. En plus de ces maisons, beaucoup de champs de cultures ont également été emportés. C’est notamment les rizicultures du marais de Kagunuzi, les champs de haricots, de maïs et de bananiers. Cette population craint une famine dans les jours à venir. Ces pluies ont saccagé les matériels scolaires notamment les cahiers des élèves des écoles fondamentales.

Des écoles également touchées Un grand nombre d’élèves et parents font actuellement face

Des maisons démolies par les pluies torrentielles

aux moyens financiers pour acheter d’autres matériels scolaires. Certains élèves prévoient même abandonner l’école par manque de moyens. Suite à cette situation désastreuse, les victimes de ces pluies crient au secours en demandant aux administratifs de leur venir

en aide. Les administratifs à la base disent que ces pluies ont détruit bien de choses et surtout à la colline Ndava. Par manque de moyens certains habitants sont devenus des nomades, d’autres des sans-abris. Emmanuel Bigirimana, administrateur de cette commune dit

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que pour le moment, on est à l’étape d’inventaire des objets détruits. Il demande à la population de faire preuve de patience en attendant la main des bons samaritains car la commune seule ne peut pas s’en sortir. Cette autorité communale affirme avoir dressé une liste des objets détruits par cette pluie.


AU CŒUR DU PAYS

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Région Sud

Vendredi, 7 décembre 2018 - n°508

Rumonge

Sida : 1,02% comme taux de séroprévalence La province sanitaire enregistre un taux de séroprévalence élevé au niveau national. Les malades demandent qu’il n’y ait plus de rupture de stock de médicaments. De notre correspondant Félix Nzorubonanya

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es sources recueillies auprès de la province sanitaire de Rumonge indiquent que le taux de séroprévalence du VIH/ sida en province de Rumonge est aujourd’hui de 1,02% alors que le taux au niveau national est 0,9%. Les raisons sont multiples : relâchement de la population à se faire dépister afin de connaître leur statut sérologique, situation géographique de la province qui se situe sur la frontière, avec beaucoup de mouvements transfrontaliers des personnes dont des Congolais, des Tanzaniens et des Burundais. La présence de beaucoup de femmes à partenaires multiples dans cette ville et un relâchement des mesures de prévention par certaines catégories de personnes qui ne fréquentent pas souvent les structures sanitaires pour y recevoir des conseils et des informations y relatives. Les mêmes sources précisent

Région Nord

que pour cette année, un peu plus de 18% de la population s’est fait dépister afin de connaître son statut sérologique. Elles précisent que tous les centres de santé font le dépistage du VIH/sida et qu’il est conseillé que chaque personne et chaque année puisse faire le test Les autorités administratives et sanitaires doivent travailler en synergie pour sensibiliser la population surtout certaines catégories à se faire dépister. Surtout que des jeunes voyagent dans d’autres pays à la recherche du travail et peuvent être contaminés. Les médicaments dont les ARV Sont disponibles et accessibles pour les malades, qui sont estimés à plus de 1 600 personnes. Des clubs « stop sida » ont été mis en place dans certaines écoles et sont opérationnelles.

Un centre de dépistage sur le port de Rumonge Certains malades vivant avec le VIH /sida rencontrés demandent aux structures de soins qui font la prise en charge médicale

Les autorités appellent la population à se faire dépister afin de connaître son statut sérologique.

des malades d’éviter qu’il y ait des ruptures de stock de certains médicaments. Ils indiquent que de temps en temps des ruptures de stock s’observent surtout la rupture de la bactrim. Certains malades déplorent aussi le manque de nourriture suffisante en quantité et en qualité pour certains malades qui développent quelques fois des effets secondaires lors de la prise des médicaments. Ils demandent d’être regroupés en association pour développer des activités génératrices de revenus suite à leur vulnérabilité. Ils félicitent la province sani-

taire pour la multiplication des centres de dépistage car les personnes qui veulent se faire dépister ne parcourent plus de longues distances mais souhaiteraient aussi multiplier les centres de prise en charge. Ils indiquent que des comportement de stigmatisation des malades vivant avec le VIH/ sida sont réduits grâce aux campagnes de sensibilisation. Certaines personnes rencontrées au port de Rumonge demandent un centre de dépistage au port de Rumonge. Elles indiquent que le choléra a été dépisté pour la première fois au Burundi sur une personne venue de Répub-

lique démocratique du Congo en 1978 en entrant par le port de Rumonge.B.N , une personne qui fait des affaires commerciales au port dit qu’un intense mouvement transfrontalier entre le Burundi et la R.D.C s’observe et au Sud Kivu dans le territoire de Fizi. Les Burundais qui rentrent et les Congolais qui arrivent devraient être dépistés pour savoir leur état sérologique pour ne pas contaminer les autres ou se faire contaminer. Il est à noter que la région Sud compte le seul centre intégré de prise en charge des violences basées sur le genre est au chef-lieu de la province de Makamba.

Ngozi

Formation achevée, on ne sait pas la suite. Des personnes adultes de la province ont reçu une formation en alphabétisation. Ils s’interrogent sur où va mener ce projet de la Prodefi, réalisé par le Centre de développement familial et communautaire (CDFC). De notre correspondant Apollinaire Nkurunziza

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l y a quatre ans que l’alphabétisation a commencé dans des communes de Gashikanwa, Mwumba, Marangara et Ruhororo. Les groupes cibles sont les adultes qui n’ont pas eu la chance d’être à l’école. La formation dure six mois. Ils apprennent à lire et à écrire. Ils sont formés au niveau des collines ciblées par des enseignants identifiés par le Centre de développement familial et communautaire (CDFC). Selon le responsable de ce centre, toutes les collines ne bénéficient pas de cet avantage des suites de peu de moyens financiers. D’après Matilde Zirikunama, formatrice à la colline Nyaruntana, zone Mubuga de la com-

mune Ngozi, la tâche n’est pas facile. « Ça fait 4 ans que je leur apprends à lire et à écrire. Chaque fois, j’ai un groupe de 25 personnes, hommes et femmes. Il y en a qui suivent avec du sérieux et d’autres sans courage ». Ils ne savent pas, elle y compris, le bien fondé de ce programme. « Après la formation, ils rentrent chez eux et c’est fini. L’essentiel est qu’ils sachent s’orienter devant une pancarte. » précise-t-elle. Face à cet avenir opaque, certains hommes refusent à leurs femmes de poursuivre la formation. Aline Ndereyimana, 30 ans, témoigne qu’il y a des femmes parmi ses camarades de classe qui ont dû abandonner à cause du désaccord de leurs maris. « Ils leur disent de rester à la maison, arguant que cette formation est informelle et ne délivre pas de diplôme ». Toutefois, la jeune

Les adultes qui terminent la formation en alphabétisation

femme reconnaît que son mari n’a pas été une barrière pour elle. Elle signale qu’après la formation, elle a été choisie par l’Eglise anglicane pour former les autres, et par conséquent a bénéficié d’un vélo.

Objectif : Bénéficier des crédits Quant à Samuel Niyonkuru, 56 ans, il fait savoir qu’ils ont

suivi la formation à deux hommes contre 23 femmes. « Il y en a qui négligent les choses», lâchet-il, avant de demander au CDFC une aide en bétail pour l’élevage. Malgré cette opacité devant leur sort, le programme de développement des filières, Prodefi, a un plan clair pour eux: leur apprendre l’agriculture, l’élevage et le commerce. Charles Ndihokubwayo, coordinateur du centre

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de développement familial, fait savoir que Prodefi, dans son approche genre inclusif, leur a confié d’apprendre aux vulnérables l’écriture et la lecture. C’est dans le but de les rassembler en association et puis les connecter à la microfinance UCODE pour des crédits. « Pour l’élevage, il faut un terrain, un champ des herbes fourragères. Mais une famille vulnérable n’est pas à mesure de trouver ce terrain. De même que les riziculteurs, il faut une terre. D’où l’idée de les aider à s’organiser en association et bénéficier des crédits afin de s’acheter des terrains », a-t-il expliqué. Ce responsable du centre de développement familial déplore néanmoins la capacité de rétention faible des apprenants et l’absentéisme qui se remarque chez eux surtout les femmes. Il aimerait également que les moyens alloués à ce projet soient majorés pour étendre l’activité sur toutes les collines de la province Ngozi.


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Pourquoi la KCB reste en cas de crise ? Joshua Oigara : Une partie de cela concerne votre ADN. Et votre ADN est autour de ce que vous croyez en tant qu’institution. Et je voudrais dire pourquoi nous sommes restés. Mais il est également bon de démystifier la croyance concernant les sortants. Il n›y a pas d›endroit où aller. Les Africains ne peuvent tirer profit ni se développer en partant. Il suffit de regarder d›un point de vue global. Et cela est important pour nous au Burundi aujourd›hui. Aucun pays n’est construit par des étrangers. Que ce soit la France, l’Amérique du Nord ou la Chine. Chaque pays est construit par son propre peuple. Donc, en disparaissant, il n’y aura aucune empreinte de développement dans votre pays. C’est une chose. Les sortants ne se développent donc jamais, mais vous devriez vous concentrer sur ceux qui restent dans le pays. Et je sais que des situations difficiles se présentent. Mais nous avons été dans les affaires en tant que pays. Nous avons construit le premier chemin de fer il y a plus de cent ans, nous en connaissons un rayon. Et cette croyance a dû être difficile, surtout lorsque vous parlez aux jeunes populations de cette découverte instantanée de la richesse et ce en ne faisant rien. Vous n›investissez pas; vous ne faites qu’exister. Et vous savez, c’est le problème du monde d’aujourd’hui, vous voulez être comme les gens que vous avez vu à Tokyo, à Londres ou à San Francisco. Vous voulez être !!! Mais vous ne voulez pas investir, vous ne voulez pas mettre des efforts, de l’argent ou des investissements. Donc, une chose que je voulais dire, c›est que nous allons passer par des obstacles. En fait, le monde d’aujourd’hui est construit à partir de la plate-forme pour laquelle vous avez été laissé. C’est ainsi qu’Uber a été construit, Facebook, Google, et je dirais même que c’est comme ça qu’Alibaba a

été construit. Nous parlons maintenant du développement chinois. C›est important de le voir. Nous ne pouvons pas être des Africains qui progressent en utilisant les plateformes des autres. Pourquoi n’avonsnous pas notre propre Facebook ou WhatsApp? Ces applications ont été construites par des gens d’une vingtaine d’années, non? Ils sont prêts à essayer. Je suis un grand partisan d’encourager les jeunes, mais une partie du progrès consiste à faire des erreurs. Et les pays font des erreurs. Je ne connais pas de pays qui n’a pas de difficultés. La France, les Etats-Unis ou le Canada, tous ont des défis à relever. Il s’agit donc d’investir collectivement et pour nous, nous avons tendance à regarder à long terme. Nous voyons le potentiel de la jeunesse dans ce pays, le Burundi. Ceci est important à retenir car si vous regardez où nous sommes stratégiquement positionnés en tant que pays, nous voyons les opportunités dans la région dans laquelle nous opérons, l’intégration qui se produit et se répète là où un pays membre a une chance et maintenant que la paix est de retour au Burundi, c’est une occasion fantastique pour nous de rester et de tirer parti des avantages du grand programme pour nos pays. Qu›il s›agisse de tourisme, de fabrication, de zones maritimes, de transport ou d›aviation. C›est important pour nous. Enfin, nous investissons dans les communautés où nous exerçons nos activités. Notre conviction naturelle est de donner les moyens aux communautés où nos clients, nos partenaires devraient s’améliorer demain, de ne pas sombrer dans la pauvreté, d’augmenter leurs revenus. Et je pense que s’il y a un pays avec le plus grand potentiel aujourd’hui, c’est le Burundi, c’est pourquoi je suis ici pour cette visite.

Quel est votre message pour les jeunes ? Joshua Oigara : Une chose que je dirai à propos de la jeune génération, non seulement burundaise mais aussi régionale est que souvent nous commençons et nous

nous arrêtons, alors nous ne parvenons pas à atteindre certains de nos objectifs et les gens abandonnent, et je pense que vous ne serez jamais une entreprise si vous ne

commencez pas et ne vous arrêtez pas; cela fait toujours partie des affaires, le plus grand risque que nous courons est d’abandonner complètement.

Importance et rôle de la KCB dans la sous-région et au Burundi en particulier Joshua Oigara : Dans notre métier, il s’agit de créer des possibilités pour nos clients. Nous devons donc créer de nouveaux horizons en réinventant ce qui est possible pour une entreprise. C’est ce que nous constatons aujourd’hui. Beaucoup de jeunes gens qui se lancent dans l’entreprise ont déjà voulu terminer leur université, aller au lycée, aller à l’université pour finir et aller chercher un emploi… mais à ce que nous voyons, il y a plus de conviction à

propos des affaires et ce que nous avons comme banque, c’est que nous sommes assez grands, avec beaucoup de souffle, pour pouvoir soutenir toute entreprise aujourd’hui en termes de son propre financement, son propre développement et sa propre connexion. Et naturellement, il s’agit également de la façon dont vous construisez votre entreprise pour commencer modestement. Nous rêvons tous de créer de grandes

entreprises. Vous savez ce qu’ils disent de Microsoft ou de Google par exemple de Facebook mais ils ont tous commencé à créer de petites entreprises et il y a une humilité de départ modeste et ce que nous devons tous apprendre en tant que jeunes entrepreneurs. Ou si je parle à ceux qui ont entre 50 et 60 ans, ils diront que nous avons commencé là-bas et que nous progressons. KCB a donc la chance de donner plus de pouvoir à votre entreprise. Nous avons

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assez de ponts au-delà d’un pont mondial pour être connectés à trois cents banques à travers le monde. Et être parmi les 20 plus grandes banques du monde vous donne la possibilité de défier le secteur agroalimentaire. Il n’y a plus d’excuses pour les jeunes entrepreneurs au Burundi. Je souhaite connecter mes clients et partenaires à travers le monde à l’aide d’une plate-forme et de ce que KCB fournit.


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ANNONCES

Vendredi, 7 décembre 2018 - n°508

2019

17, Place de l’Independance BP 99, Bujumbura, BURUNDI Tel: +257- 22- 223177 Email: bonauto@bonautoburundi.com

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