IWACU 507

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IWACU N°507 – Vendredi 30 novembre 2018 – 2000 Fbu Quartier INSS, Avenue Mwaro n°18 Bujumbura - Burundi Tél. : 22258957

Sommet de l’EAC

Brouille diplomatique

ÉCONOMIE La farine à bouillie à base de banane

AU COIN DU FEU

DROITS DE L’HOMME P.5

Concours de plaidoirie pour des juristes en herbe

P.6

Avec Alexandre Hatungimana

P.9


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LA DEUX Editorial

Vendredi, 30 novembre 2018 - n°507

En coulisse

Sur le vif

Carotte ou bâton ? Par Léandre Sikuyavuga Directeur des rédactions

L

e Sommet des chefs d’Etat de la Communauté de l’Afrique de l’Est, EAC, se tient ce 30 novembre. Jour de parution de l’hebdo d’Iwacu en français. Sans glisser vers des spéculations qui désorientent, il s’avère intéressant de se pencher sur les attentes. Surtout qu’il se tient malgré la demande de Bujumbura de le reporter. « Le Sommet se penchera sur de sérieux points à l’ordre du jour pendants depuis si longtemps », répondra le président en exercice de l’EAC. Devant cette situation, apparemment d’incompréhension procédurale au plus haut niveau, deux opinions semblent se dégager quant à l’issue de la rencontre, sur le Burundi. Pessimisme, indifférence, scepticisme, méfiance …, pour les uns. Pour les autres, c’est la carotte ou le bâton. Le Sommet se penchera notamment sur le rapport du facilitateur dans le dialogue inter burundais. Selon un politique, les rapports antérieurs ont été jetés à la poubelle. « Le dernier rapport du facilitateur risque de subir le même sort. Le seul point positif qu’il faudrait attendre de ce sommet, c’est la démission de Mkapa et le constat d’échec de l’EAC. » Pour lui, Bujumbura n’entend pas s’engager en signant quoi que ce soit avant les élections en 2020. Pour un autre, on peut s’attendre à deux choses : un gouvernement d’union nationale qui laisserait au pouvoir actuel de Bujumbura un champ libre de continuer à gérer le pays « comme il l’entend » ou un raidissement de la Communauté pour montrer son mécontentement de l’attitude de Bujumbura. Ce qui préparerait l’environnement aux véritables négociations. Le Burundi est qualifié de maillon faible au sein l’EAC suite à sa faible économie. Cette place est due à son histoire, notamment l’instabilité causée par les crises cycliques qu’il a vécues qui ont anéanti son économe. Son entrée dans l’EAC s’inscrit justement dans le but d’améliorer, d’élargir et de diversifier l’activité économique. Il a préféré ne pas faire cavalier seul. En vue d’assurer à sa population un niveau de vie satisfaisante, le bien-être social, le pays doit éviter tout ce qui peut le (re) plonger dans l’ « ancien ordre. » On ne le dira jamais assez, un Accord devrait être trouvé pour régler les problèmes burundais. La demande du facilitateur, mandaté par la Communauté, serait ainsi exaucée. Et tout le monde en tirerait profit.

Le ministère des Finances et les représentants de la Banque Arabe de Développement en Afrique (BADEA) ont signé deux accords de prêt, lundi 26 novembre. Le premier prêt de 15 million de dollars servira à la construction et l’élargissement de la route tronçon Rumonge-Nyanza-Lac. Le second prêt de 12 millions de dollars est relatif au financement du projet construction et d’équipement de l’Institut Supérieur de l’Enseignement Technique de la province Cibitoke.

« Sayana Press », nouveau contraceptif au Burundi

Fondation Femidejabat, © Droits réservés

La route RumongeNyanza-Lac bientôt réhabilitée

En hausse

P

our avoir payé une somme de 500 mille pour la libération de cinq patients insolvables, deux enfants, deux femmes et un homme, de l’hôpital de Bubanza, vendredi 23 novembre 2018.

En baisse

Le ministre de la Santé a introduit, mercredi 27 novembre, «Sayana Press », un nouveau contraceptif au Burundi, C’est une méthode à base de substance injectable, y compris à domicile, par l’intéressée elle-même. Cette nouvelle méthode est renouvelable tous les 3 mois.

Burundi classé 139è en football mondial masculin Selon le classement mondial FIFA/Coca-Cola effectué en novembre 2018, le Burundi est en 139è position. Il a gagné trois places comparativement au mois précédent dans le classement du football masculin sur 211 fédérations au niveau mondial.

Deux policiers,

P

our avoir battu violemment la cliente d’un taxi-vélo, mercredi 28 novembre 2018, qui a dépassé le pont Ntahangwa menant au centreville. Le bébé qu’elle portait au dos a également été touché.

Image de la semaine

Un chiffre

7.898.903 Est le nombre de Burundais, âgés de 1 à 29 ans, qui doivent être vaccinés contre la méningite.

Source : Ministère de la Santé Une pensée

« Un gouvernement ne peut se contenter de gérer l’opinion et d’esquiver les difficultés, il doit aussi régler les problèmes. » Lionel Jospin Plus de dix personnes qui ne se soucient pas du danger qui les menace sur la RN 1

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L'ÉVÉNEMENT

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Sommet de la CEA

La guerre épistolaire Vendredi, 30 novembre 2018, se tient à Arusha le 20 è Sommet ordinaire des chefs d’Etats de la communauté est-africaine. Bujumbura avait demandé un report pour « mieux se préparer ».

S

amedi 24 novembre 2018, le président Pierre Nkurunziza écrit à Yoweri Museveni que son pays n’est pas prêt pour le sommet. Dans cette correspondance, il fait savoir qu’il a demandé un report de deux semaines du conseil des ministres, rendez-vous précédant celle des chefs d’Etats de l’EAC. Le numéro un burundais explique sa requête par le retard pris par la lettre d’invitation pour parvenir sur son bureau. Conformément aux règlements intérieurs, il rappelle qu’il faut aviser un Etat quatre semaines auparavant. Le lendemain, dimanche 25 novembre 2018, la réponse du président en exercice de

la CEA ne se fait pas attendre. L’Ougandais clarifie sa position .Il n’est pas d’accord pour le report du sommet. Arguant que ce n’est pas dans l’intérêt de la communauté d’ajourner le Sommet. «Il se penchera sur de sérieux points à l’ordre du jour qui sont en suspens depuis si longtemps .Certaines questions à l’ordre du jour doivent être vidées sans tarder.». Il réfute les allégations de Bujumbura qu’il n’a pas été avisé à temps.

Une décision pas du tout nouvelle Le conseil des ministres de la CEA a approuvé le calendrier des activités pour la période allant de juin à décembre 2018. Et dans

Museveni estime que les autorités burundaise étaient bien au courant de la tenue du sommet

ces activités, le sommet ordinaire des chefs de l’Etat y figure. Ceci a été communiqué à tous les chefs d’Etats de l’organisation. Une preuve, selon le président ougandais, que les autorités burundaises étaient bien au courant. En outre, il soulève les pertes financières que ce report pourrait engendrer « Le secrétariat a déjà passé des contrats avec des prestataires de services

et leur annulation pourrait avoir de graves conséquences juridiques et financières qui pourraient être évitées ». Dans la foulée, M Museveni indique que sa décision de « non-report » n’est pas du tout nouvelle. En effet, en date du 22 novembre, il a accueilli des envoyés spéciaux du Président Nkurunziza. Une délégation composée par le ministre

des Affaires étrangères Ezéchiel Nibigira et le secrétaire du parti au pouvoir, Evariste Ndayishimiye. Il leur a clairement signifié que le Sommet se tient bel et bien le 30 novembre à ARUSHA. Le même jour, le président tanzanien, John Magufuli, confirmait sa participation à son homologue ougandais. Lundi 26 novembre 2018, c’est le tour du secrétaire de la CEA, Libérat Mpfumukeko, d’entrer dans la danse. Dans une lettre adressée au président du conseil des ministres de la CEA. Il se préoccupe de la demande du Burundi d’ajournement de la rencontre du conseil des ministres. M. Mpfumukeko appelle au respect du règlement intérieur. Sinon, il craint que le non-respect de la procédure ne se répercute sur les décisions issues de la réunion. Arnaud Igor Giriteka

Réactions • Phénias Nigaba : « Un sommet décisif pour la crise burundaise.»

L

e porte-parole du Frodebu pense que ce sommet peut être décisif sur la question de la crise burundaise. « Si le président ougandais a refusé de le reporter,

c’est qu’il est important. Par ailleurs, le secrétaire des Nations unies attend les conclusions qui seront prises sur la crise burundaise ».Pour M .Nigaba, il faut que ce Sommet arrive à convaincre le gouvernement du Burundi de rejoindre le dialogue. Cela permettra de préparer un

autre round de dialogue plus sérieux que le précédent qui a fait chou blanc. « Ça serait une humiliation si les présidents de la CEA échouaient à résoudre la question burundaise alors que le reste de la communauté internationale a placé son espoir en eux. »

• Tatien Sibomana : « Ce sommet a promis d’aider à trouver des solutions. »

«Nous nous attendons à ce que ce sommet prenne des mesures allant dans le sens de forcer le pouvoir

• Kefa Nibizi : « C’est un sommet ordinaire » Pour le président du parti Sahwanya Frodebu Nyakuri, il n’y a pas de crise au Burundi. « Au regard de la situation politico-sécuritaire prévalant dans notre pays, nous pensons qu’ils vont décider de clôturer le dialogue par une dernière session ». Elle pourrait

de Bujumbura à s’inscrire dans la voie de sortie de crise», fait savoir Tatien Sibomana, acteur politique. Il indique que la Communauté Est-africaine s’est engagée à vider la crise burundaise : «Ce sommet a promis aux Nations unies, à l’Union africaine et au peuple burundais d’aider de trouver des solutions». Tatien Sibomana espère

que les chefs d’Etat de l’EAC se prononceront sur le dialogue qu’ils ont confié au facilitateur Benjamin Mkapa. «Il a été terminé en queue de poisson suite à la mauvaise volonté de Bujumbura qui ne veut pas avancer vers une solution durable». Autrement, cet opposant trouve que le sommet aura «proclamé» son incapacité à aider à sortir les Burundais de la crise.

• Abel Gashatsi : « On ne s’attend pas à grand-chose.»

durer entre une et deux journées pour se conclure par un communiqué. M. Nibizi explique que les problèmes de 2015 ne sont plus d’actualité. Pour l’heure, ils ont fait place à la préparation des élections de 2020. Du reste, il trouve que c’est un sommet ordinaire.

Le président du parti Uprona n’y va pas par quatre chemins : « On ne s’attend pas à grandchose du fait que la demande du report du Sommet de notre pays n’a pas été exaucée.» A la question de savoir si cette demande n’est pas une façon élégante de

Bujumbura de ne pas y participer, il indique qu’il ne peut pas s’exprimer à la place du gouvernement. Cependant, M. Gashatsi estime que cette demande est une preuve que le gouvernement veut participer, mais après s’être bien préparé. A.I.G.

Le refus du report, un signal ? Avec cette demande de report, Bujumbura voulait encore une fois jouer aux maîtres des horloges. Sauf que cette fois ci, « Mzee M7 » semble vouloir freiner cette stratégie. Pourquoi le gouvernement tenait tant à ce report ? Est-ce lié au rapport du médiateur qui devra être présenté ? Difficile de savoir. Une chose est sûre. Même au plus fort de la crise, le gouvernement n’a jamais formulé cette demande. Certes, depuis le putsch avorté de 2015, le président de la République

n’a plus participé dans un quelconque Sommet. Mais, il se faisait quand même représenter par l’un des viceprésidents. Cela donne l’impression que quelque chose aurait changé pour Bujumbura. Cependant la stratégie du report semble savamment bien orchestrée. En effet, ce n’est pas pour rien que le secrétaire a fait un clin d’œil sur le respect des règlements. La CEA est une institution qui fonctionne par consensus. Le quorum des réunions est la présence de tous les Etats membres.

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Ce qui fait qu’un seul membre peut paralyser le fonctionnement de l’organisation. Si le Burundi boycotte le Sommet, il est en droit de contester les décisions qui en sont issues. La balle serait alors dans le camp du président ougandais. Qui, par ailleurs, a affirmé que les règles de procédure ne devraient pas prendre l’organisation en otage.

A.I.G.


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ÉCONOMIE

Vendredi, 30 novembre 2018 - n°507

Bubanza

Les chenilles dévastent les champs de maïs Les chenilles légionnaires ravagent les champs de maïs en province Bubanza. Les agriculteurs tirent la sonnette d’alarme. La direction provinciale de l’Agriculture les tranquillise.

L

undi 26 novembre 2018. Il est 11h sur la colline Gahongore en commune et province Bubanza. La désolation et le désespoir se lisent sur les visages des agriculteurs de maïs. Leurs champs ont été attaqués par des chenilles légionnaires. Aujourd’hui, ils ne savent pas à quel saint se vouer. «Ces chenilles ravagent nos champs de maïs. Ils attaquent les tiges et les feuilles », témoigne un agriculteur rencontré sur les lieux. Désespéré, ce quadragénaire indique qu’il a investi plus de 2 millions de BIF dans la culture de maïs. La moitié de son capital il l’avait contracté auprès d’une microfinance locale. Il espérait rembourser cette dette après la récolte. «N’eût été ces chenilles, la culture de maïs est productive et rentable.» Et de préciser qu’il ne voit pas par quelle baguette magique il va rembourser son crédit. Cet agriculteur estime son manque à gagner à cinq millions de BIF au cours de cette saison. Pour le moment, il s’inquiète pour l’avenir de sa famille. «L’agriculture de maïs est mon seul gagne-pain ». Et il se demande comment sa famille va continuer à subvenir à ses besoins. Il témoigne, par ailleurs, que la majorité de la population

vit de l’agriculture du maïs et du riz. Jacques Nkengurutse, un autre agriculteur de la même colline, abonde dans le même sens : «Ces chenilles menacent la survie de nombreux habitants de cette localité.» La plupart d’entre eux vivent de l’agriculture du maïs. Elle est moins coûteuse comparativement à la culture de riz qui exige des moyens financiers énormes.

Manque de pesticides M. Nkengurutse s’inquiète de l’absence des pesticides efficaces pour la lutte contre ces chenilles. Ces dernières résistent à de nombreux pesticides recommandés par les autorités du secteur agricole. Il indique qu’il les a utilisés à maintes reprises sans effet. La seule lutte efficace est de chercher ces chenilles dans les feuilles de chaque plant de maïs. Mais, il est difficile de les éliminer. Ces chenilles sont des ovipares. Ils pondent plusieurs œufs dans un court laps de temps. Même si on tue les chenilles adultes, leurs œufs restent dans les feuilles et se transforment en chenilles en une semaine. Cet agriculteur demande aux responsables du secteur agricole de trouver d’autres pesticides plus puissants.

Un champ de maïs détruit par des chenilles légionnaires.

Il indique qu’il n’attend plus grand-chose de la récolte. Il indique qu’il avait investi 1 500 000 BIF dans la culture de maïs. Mais aujourd’hui, il est désespéré. J.K., un autre agriculteur, déplore l’inaction des autorités en charge de l’Agriculture. Elles ne s’impliquent pas dans la recherche des pesticides qui tuent ces chenilles. «Ça fait la troisième année de suite que ces chenilles ravagent nos champs de maïs ». Mains croisées, il témoigne qu’il ne reste rien de ses champs de maïs. « Il est incompréhensible que des chenilles détruisent des cultures pendant trois ans sans que les autorités puissent trouver une solution. Même les pesticides disponibles dans les pharmacies ne sont pas efficaces. » Il assure qu’il a pulvérisé son champ de maïs d’un

hectare avec cinq bouteilles de pesticides par semaine. Mais cela n’a produit aucun résultat. Cet agriculteur de maïs évalue son manque à gagner à 2 400 000 BIF au cours de cette saison. Lui aussi n’espère plus grand-chose de la récolte. Les épis de maïs attaqués ne contiennent pas de graines. La majorité des habitants de la colline Gahongore n’ont pas leurs propres terres agricoles. Ils louent des lopins de terre à des voisins à un prix très élevé. Un lopin de terre de 25 mètres sur 50 mètres se loue à 100 mille BIF pour une seule saison culturale.

L’administration locale mobilisée contre ce fléau L’administrateur de la commune Bubanza affirme qu’il est au courant du problème. Ces

chenilles légionnaires ont commencé à apparaître en 2016. Mais il assure que ces chenilles ne constituaient plus une menace comme il y a deux ans. Mais il se dit préoccupé par une autre maladie qui attaque également le maïs. Elle s’est déclarée en zone Buvyuko de la commune Bubanza. Toutefois, l’autorité communale se veut plutôt rassurante : «L’administration fait tout pour combattre cette maladie». Il a déjà informé la direction provinciale de l’Agriculture. Et il s’espère que les responsables du ministère prendront toutes les précautions nécessaires pour lutter contre cette nouvelle maladie. Parfait Gahama

Les autorités agricoles tranquillisent

W

illy Ndayikeza, directeur provincial de l’Agriculture et de l’Elevage à Bubanza, se veut rassurant : « Nous avons pris cette question en main.» Les pesticides sont disponibles pour anéantir ces chenilles.» Il évoque notamment la supermethrine 50 cc. Il explique que les chenilles légionnaires proviennent des papillons nocturnes qui ont une forte capacité de reproduction. En une seule nuit, un papillon peut pondre entre 1000 et 1500 œufs. La seule façon efficace de lutter contre ces chenilles est de les enlever dans les champs de maïs. Aucun pesticide ne peut les éradiquer complètement. Ils ont une forte résistance contre de nombreux pesticides. Comme solution, ce responsable agricole recommande aux agriculteurs de ramasser ces chenilles dans leurs champs de maïs.

Willy Ndayikeza : « Il n’y aura pas une baisse considérable de la production.»

M. Ndayikeza rassure qu’il n’y aura pas une baisse significative

de la production du maïs. Même si ces chenilles existent encore, ils

sont considérablement diminués comparativement aux années précédentes. Le directeur provincial de l’Agriculture et de l’Elevage à Bubanza indique que sa direction est au courant d’une autre maladie qui attaque les champs de maïs dans certains endroits. Elle attaque les racines la tige et les feuilles sèchent. Mais elle n’est pas généralisée comme celle de ces chenilles. Ce qui inquiète c’est que cette maladie est contagieuse. Ce responsable agricole conseille aux agriculteurs d’enlever les plants déjà attaqués. Cette maladie est due à la qualité de semence, du sol et la préparation du terrain. Certains agriculteurs utilisent encore des semences vieilles de plusieurs années ce qui favorise la multiplication des parasites. P.G.

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Evolution de la production de maïs en province de Bubanza de 2006 à 2016. Période

Quantité en tonnes

2006

4110

2007

4099

2008

3924

2009

3990

2010

4292

2011

4282

2012

6653

2013

7317

2014

4451

2015

7561

2016

7903


ÉCONOMIE

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Bubanza

La Farine à bouillie dérivée de la banane Le Centre d’innovation et de transformation agroalimentaire (CITA) de la province Bubanza transforme la banane en farine. Un produit apprécié par ses consommateurs. A la découverte des techniques de sa transformation.

R

évérien Niyonkuru, orphelin, interrompt ses études en nutrition pour monter un projet. Un centre d’innovation et de transformation agroalimentaire voit le jour en 2015, au chef-lieu de la province Bubanza (ouest du Burundi). Aujourd’hui, il est marié et a 28 printemps. L’idée lui est venue à la fin de ses études secondaires. « Après avoir constaté que le taux de chômage chez les jeunes diplômés ne cesse d’augmenter, j’ai alors pensé à monter un projet ». La transformation agro-alimentaire l’intéresse. « Etant donné que j’avais entamé mes études universitaires dans le domaine de la nutrition, mon objectif était d’améliorer la nutrition et la santé humaine ». Il se rend en Ouganda et au Kenya pour se ressourcer. Le début est difficile. Il démarre son projet avec un capital de 600 mille BIF.

Quid de la transformation de la banane ? Révérien Niyonkuru, représentant légal de CITA, fait savoir que le régime frais de banane douce est utilisé pour fabriquer de la farine à bouillie. Après avoir récolté le régime de banane, explique-t-il, on le coupe en petits morceaux sans enlever les épluchures. Par la suite, poursuit-il, ces morceaux sont étendus sur un séchoir solaire pendant 5 à 7 jours. Après quoi, ajoute-t-il, on moud ces morceaux séchés pour obtenir de la farine. Elle sera ensuite mélangée avec d’autres sortes de farine comme le maïs, le soja, le blé, d’arachide, le riz, le sorgho et le sésame. A propos des consommateurs, M. Niyonkuru indique que cette farine dénommée « Otaci porridge » est destinée aux enfants âgés de six mois et plus, aux femmes allaitantes et enceintes, sans oublier les autres catégories de personnes. Interrogé sur la production, le représentant légal de CITA fait savoir que le centre produit 21, 5 tonnes par mois. Un kg coûte 2200BIF. Il précise que la farine

Un séchoir solaire sur lequel sont étendus des morceaux de banane.

est vendue sur tout le territoire burundais. Il n’y a pas de mévente. Le stock est toujours écoulé. Selon lui, la production reste faible. Dans le but d’améliorer le rendement, il fait savoir qu’ils ont cultivé trois hectares de bananiers. La première récolte est projetée dans une année.

Il apprécie la qualité de la farine produite. Néanmoins, il déplore que la quantité fournie reste insuffisante. Et d’encourager le représentant légal du centre à augmenter le rendement.

Producteurs et consommateurs se réjouissent

M. Niyonkuru évoque le problème d’équipements. Les machines dont dispose Cita ne donnent pas le rendement souhaité. « Nous avons besoin de machines modernes, plus adaptées pour augmenter la production ». Selon lui, il y a un besoin pressant d’étendre et de varier la production. « Nous projetons de transformer d’autres produits telle que la patate douce. Faire une transformation d’autres aliments : biscuits ». Il indique aussi qu’il existe deux entreprises naissantes qui tentent d’imiter son projet. « Il faut qu’ils soient inventifs. Il faut que ma propriété intellectuelle et mes initiatives soient protégées. Le certificat tarde à me parvenir ». Par ailleurs, le représentant légal de CITA signale le problème de moyens financiers : «Les moyens sont limités. Les bâtiments sont loués. Nous travaillons avec un personnel de 39 personnes qui touchent 4500 000 BIF par mois ». Il n’a pas encore eu de financement. Et de souligner qu’il y a souvent manque de matière première, suite aux aléas climatiques. D’où quelques fois des ruptures de stock. Le problème de taxation n’est pas en reste. « Nous demandons qu’on taxe le produit fini et non la matière première. La double taxation affecte nos recettes», conclutil. Félix Haburiyakira

Les agriculteurs sont soulagés. « C’est une technique salutaire. Une innovation réconfortante», commente un agriculteur de bananiers. Ils écoulent facilement leurs productions et le prix offert les intéresse. Le prix variant, selon la taille du régime de banane. Josette Irankunda, une des employées du centre, apprécie la valeur nutritive de la farine : « Elle contient les éléments nutritifs dont le corps a besoin. Elle améliore la santé de nos enfants ». James Ndikumana est un bouti-

Les défis ne manquent pas

Révérien Niyonkuru : «Il faut que ma propriété intellectuelle et mes initiatives soient protégées.»

quier qui vend cette farine au marché de Musenyi. Il ne tarit pas d’éloges : « J’écoule rapidement cette farine. Elle est appréciée par les femmes allaitantes.»

Même appréciation du côté de Diomède Nakumuryango. Selon lui, la banane est une légumineuse très riche en glucides et donne beaucoup de kilos calories.

Les employés du CITA en train d'emballer de la farine dans de petis sachets

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DROITS DE L’HOMME

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Concours de plaidoirie

Joutes verbales d’étudiants en droit Entre compétences juridiques et talent oratoire… En lice, 20 étudiants finalistes en droit de dix universités dans un procès fictif. Le droit international humanitaire (DIH) à l’honneur.

L

undi 26 novembre. Dans les locaux de l’Université du Burundi, campus Mutanga, 48 étudiants issus de huit universités sont au rendez-vous du concours national de plaidoirie en DIH. Organisé par le Comité international de la croix rouge (CICR), du 26 au 30 novembre. Le concours s’ouvre sur des séances de formation sur le DIH et l’action du CICR. Mais seuls 20 étudiants, deux par université, sont candidats au concours proprement dit. Mardi 27 novembre, début des phases éliminatoires. Mise en situation, les étudiants doivent se pencher sur le cas fictif des confrontations armées entre les forces gouvernementales et un mouvement rebelle. Durant la 1ère phase, les candidats jouent le rôle de délégués du CICR pour assister les victimes des conflits armés. L’épreuve consiste à pouvoir traverser la barricade érigée par les rebelles pour atteindre les victimes. La technique étant de négocier avec ces « combattants », à la fois membres du jury, l’accès aux victimes. L’évaluation porte sur la maîtrise de la mission et les principes du CICR. Les étudiants ont 30 minutes pour préparer l’épreuve.

Une mise en scène parfaite 9h 30, l’heure de l’épreuve. C’est l’équipe de l’Iscam qui passe en premier. Sur un terrain vaste gazonné du campus Mutanga, la mise en scène parfaite. Deux « rebelles » (un agent du CICR et un officier de police, de leurs vraies identités) contrôlent la zone. Deux « parfaits inconnus » (les étudiants ou délégués du CICR) débarquent. Ils tombent sur des combattants armés et nerveux. Ces derniers ignorent ce qu’est le CICR. Les « inconnus » doivent donc convaincre pour avoir accès aux victimes de la guerre. Ces combattants ou le jury ne se montrent pas tendres. Tentative de confiscation de badges, soutirer de l’argent… des pièges auxquels les candidats ont du

Deux équipes d'étudiants en droit en pleine simulation de procès.

Une équipe de l’Université de Gitega (à genoux)passant la première épreuve.

mal à échapper. Dans la peau d’une rebelle, une jeune femme agent du CICR joue très bien son rôle au point de faire perdre leurs moyens aux candidats. Toutes les huit équipes seront soumises à la même épreuve avec des jurys différents. Après l’épreuve, tous les candidats sont unanimes : surprise totale, mais agréable expérience. Ils s’attendaient à la méthode simple de répondre aux questions du jury dans une salle. La 2ème phase du concours consistera à amener les candidats, toujours dans la peau de délégués du CICR, à négocier l’accès aux victimes avec les différentes autorités, notamment les directeurs de prison.

La phase cruciale… Mercredi 28 novembre. C’est le moment de la séance de plaidoirie, la phase primordiale du con-

cours (80% de l’évaluation). Dans cet exercice qui requiert compétence juridique et talent oratoire, les étudiants s’affrontent dans un procès fictif pour accuser ou défendre le présumé auteur de crimes de guerre devant la cour. 8h30, toujours dans les locaux du campus Mutanga, les étudiants s’activent. La panique se lit sur leurs visages. Plusieurs groupes se forment par université. Ils préparent leurs chefs d’accusation ou moyens de défense. Chaque équipe connaît déjà son rôle grâce au tirage au sort. 9h30, le procès est ouvert. Université du Burundi (partie accusatrice) contre Université Espoir d’Afrique (partie défenderesse). Les « juges de la cour » constituent le jury. Cinq experts en magistrature et DIH : un magistrat à la Cour suprême, un ancien procureur au tribunal militaire, un officier militaire et de police experts

en DIH et un délégué du CICR. La situation semble compliquée pour les équipes de la défense, « avocats du diable ». Principaux critères d’évaluation : connaissances

juridiques, la force de persuasion, la cohérence de l’argumentation et l’esprit d’équipe. D’après le chef du département communication au CICR, Oumarou Daddy Gaoh, l’objectif du concours est non seulement de renforcer les connaissances des étudiants en DIH, mais aussi de les mettre en situation réelle pour les préparer à leur vocation. « Le souci est de voir des étudiants prêts à s’investir dans des causes liées aux victimes des conflits armés ». 12 de ces candidats issus de six universités vont participer au concours de plaidoirie Grands lacs à Kigali du 9 au 15 décembre prochain. Les trois meilleurs plaideurs de ce concours national représenteront le Burundi au concours régional africain à Yaoundé en 2019. Clarisse Shaka

Résultats Demi-finale - Université Lumière de Bujumbura, campus Kinindo (68,5/80) - Institut Supérieur de Police (68/80) - Université du Lac Tanganyika (61/80) - Iscam (56/80) Finale - Université Lumière, campus Kinindo - Iscam Meilleurs plaideurs - Bellarmée Uma (Université Lumière, Kinindo) - Merveille Mugisha (Université du Lac Tanganyika) - Corine Kaneza (Université Lumière Kinindo) -Serges Niyongabo (Institut Supérieur de Police)

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SOCIÉTÉ

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Gitega, des indemnités en retard Les habitants des localités de Bwoga et Zege dont les parcelles et maisons ont été expropriées pour traçage de route réclament justice.

C

es habitants sont en colère. Champs, boisement, parcelles, les bulldozers de la Sogea Satom ont tout ratissé. Seules les maisons ont été épargnées, pour l’instant. Raison : la route Bwoga-Zege. 6 mois ont été donnés à l’entreprise pour tracer la route de 4 km de voirie asphaltée. Il faut dire que la voirie de la ville de Gitega date de l’époque coloniale. Cette ville ne cesse de s’agrandir et les routes doivent suivre. Problème, les indemnisations promises ne sont pas au rendez-vous. Elisabeth, mère de trois enfants habite à Kwibuka, une localité à quelques mètres du nouveau quartier chic de Bwoga. Son calvaire a commencé quand son champ de maïs a été rasé. « Et là on m’a annoncé qu’une partie de ma maison va suivre. Je vais donc perdre au total de 10×30 mètres de terrain et j’attends qu’on m’indemnise, en vain. » Pascal, la quarantaine est père de 5 enfants. Il ne décolère pas. Il montre sa parcelle de 20×15 mètres. « Vous voyez tout ça, ils ont dit que c’est une chance pour eux que je n’y ai mis ni maison ni

Les travaux de construction de la route Bwoga-Zege en cours.

champ. Ils m’ont dit que je ne ferais pas partie des gens à indemniser. »

« Des indemnisations pour bientôt » La ville Gitega se prépare à devenir la capitale politique du Burundi. Une stratégie de relance du développement de la province de Gitega à l’horizon 2030 a vu le jour. Elle parle de la naissance de nouveaux quartiers.

Et les routes doivent suivre le mouvement. D’où la nécessité de créer des voies pour faciliter la fluidité de la circulation entre les quartiers. Selon la direction de l’urbanisme, la création de cette voie de contournement Bwoga-Zege va désengorger le centre-ville. Cette route qui fera 4 kilomètres d’asphalte va permettre aux camions en transit de ne pas passer par le centre-ville.

La Sogea Satom a 6mois pour achever les travaux. Un jeune homme rencontré sur les lieux a néanmoins du mal à cacher sa frustration. « Qu’on ne vienne pas nous dire que nous sommes les ennemis de la nation et du développement. Je réclame justice pour le champ d’une superficie de 5×30 mètres que l’on m’a prise sans sourciller. » Interrogé, le directeur général

de l’Office des routes, Vincent Nibayubahe tranquillise. Le gouvernement a déjà procédé à l’identification de ceux qui vont être indemnisés. Il assure, sans donner plus de précision, que la distribution ou le paiement va bientôt se faire. « L’Etat ne peut pas se lancer dans un projet à milliards sans prévoir des indemnités.» Agnès Ndirubusa

Eclairage : « Le droit de propriété est garanti » Emery Nukuri, professeur à l’Université du Burundi et expert en droit foncier explique les droits et devoirs des citoyens en cas d’expropriation.

L

e droit prévoit une privation de propriété pour cause d’utilité publique ?

En effet. Je dois dire d’abord qu’à la fois le droit international et le droit national protègent la propriété foncière des individus. Il prévoit qu’exceptionnellement, une personne peut être privée de sa propriété foncière pour cause d’utilité publique moyennant une juste et préalable indemnité. L’article 14 de la Charte africaine des droits de l’Homme dispose que le droit de propriété est garanti. Il ne peut y être porté atteinte que par nécessité publique ou dans l’intérêt général de la collectivité, ce, conformément aux dispositions des lois appropriées. L’article 36 de la Constitution du Burundi du 7 juin 2018 quant à

non-indemnisation. Elle est néanmoins assortie de conditions. Il faut que ces servitudes soient établies avant dans un plan d’aménagement du territoire et portées à la connaissance du public. Il faut donc que quelqu’un qui achète une parcelle sache que celle-ci est grevée d’une route ou il sera réservé au lieu de transport d’électricité selon le code de l’urbanisme.

elle prévoit que nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d’utilité publique, dans les cas et de la manière établis par la loi et moyennant une juste et préalable indemnité. Juste veut dire qui doit couvrir la perte de la propriété, notamment par l’achat d’une propriété de même dimension et de même qualité. Préalable veut dire qu’avant qu’il ne soit jeté à la rue. Cela est également énoncé dans l’article 411 du code foncier. La construction d’une route est une expropriation ou une servitude ? Très bonne question. Le fait que la construction d’une route soit une expropriation ou une servitude influence sur le régime d’indemnisation. En tant

Exceptionnellement, l’on doit indemniser même en cas de servitude ? qu’expert, je pense que d’emblée, le traçage de routes n’est pas une expropriation à vrai dire. Il s’agit plus d’une servitude d’utilité publique. Ce régime conçoit qu’une personne a perdu une partie de son terrain, mais qui est nécessaire pour la route. L’article 108 du code foncier est clair. Elle dit que la construction

ou la réparation des routes, des chemins et autres usages publics sont des servitudes légales. Avec la servitude, pas d’indemnisation en principe ? Contrairement à l’expropriation, pour la servitude, le principe est la

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La loi p ré vo i t une indemnisation non pas en raison de la route, mais des dommages que cette route a causés. Lorsqu’une maison a été détruite, un champ arraché, les arbres coupés. La jurisprudence évoque une servitude assortie d’indemnisation préalable. A.N.


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SOCIÉTÉ

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Kibago

Des femmes leaders au service de la résolution pacifique des conflits Les associations AFRABU et APFB ont organisé un atelier de formation, du 27 au 30 novembre 2018, pour les femmes et hommes leaders de la commune Kibago en province Makamba. C’est en partenariat avec l’ONG Search For Common Ground.

U

ne quarantaine de femmes et hommes leaders s’étaient rassemblés au chef-lieu de la commune Kibago pour suivre une série de formations dans le cadre du projet de SFCG : «Soutenir les femmes leaders d’aujourd’hui et de demain pour faire avancer la paix au Burundi.» Dispensées par l’Association des Femmes Rapatriées du Burundi (AFRABU) et l’Association pour la Promotion de la Fille Burundaise (APFB), les partenaires d’exécution de ce projet, ces formations sont essentiellement axées sur les thèmes en rapport avec le leadership, la résolution pacifique des conflits et la masculinité positive. Financé par le Fonds des Nations Unies pour la Consolidation de la Paix (UNPBF), ce projet vise à renforcer les femmes leaders déjà établies ou en devenir (plus de 35 ans). Il concerne également les jeunes femmes pouvant jouer

Languide Uwihoreye

un rôle clé de leaders (18-35 ans), dans les efforts de consolidation de la paix et de cohésion sociale dans leurs communautés.

Des femmes résolues à faire avancer la paix Ces bénéficiaires du projet ont été choisis lors de la phase d’identification. Ils devaient provenir des différentes appartenances ethniques, socioéconomiques, politiques et culturelles. Le profil recherché chez les femmes et jeunes filles était des femmes leaders de plus de 35 ans à la tête des organisations, des jeunes femmes de 18 à 35 ans actives dans différents groupes ainsi que des jeunes filles et femmes marginalisées et vulnérables (handicapées, les albinos, les filles-mères, les Batwa, etc). Pour les hommes, les critères d’identification étaient des jeunes garçons de 18 à 35 ans, membres des clubs de paix, agents de

est une femme leader de la colline Jimbi en commune Kibago. Ses voisins ne tarissent pas d’éloges pour

Les participants proviennent des différentes appartenances ethniques, socio-économiques, politiques et culturelles

changement, membres des associations ou mouvements d’action chrétienne. Des hommes leaders locaux à savoir les élus locaux, les Bashingantahe, les membres des comités mixtes de sécurité, les agents de santé communautaire, les membres des comités collinaires de développement, les membres des comités communaux de développement commu-

cette jeune dame. «Elle est très active dans la résolution des conflits qui surgissent dans le voisinage. Nous demandons des conseils auprès d’elle chaque fois que des conflits éclatent dans nos ménages», témoigne Capitoline, une voisine. «Même des hommes la consultent», renchérit une autre voisine. «Ces nouvelles connaissances vont beaucoup m’aider. Souvent on fait appel à moi pour décanter une situation. Avec cette formation, je vais m’améliorer encore plus», assure Languide Uwihoreye. D’après elle, les femmes commencent à endosser l’habit de leader, un travail qui était jadis réservé aux hommes, leur chasse gardée. «Les choses commencent à changer. J’exhorte d’autres femmes à ne pas avoir peur. Ce que les hommes peuvent faire, elles aussi en sont capables».

• Vestine Bigirimana est une jeune femme albinos de 19 ans. Elle habite sur la colline Kiyange. Elle témoigne : «Nous sommes seulement deux albinos sur ma colline. Nous sommes marginalisées. Nous vivons dans la pauvreté. Mais avec cette formation, j’ai l’intime conviction que je peux être une femme leader malgré mon handicap». Selon cette jeune femme albinos, cette formation lui a ouvert les yeux. Vestine Bigirimana appelle d’autres albinos à ne pas se terrer dans leurs maisons mais de sortir au grand jour. « Nous sommes capables de beaucoup de choses».

nautaire, les leaders religieux, les leaders des partis politiques et des organisations de la société civile. Pour Jean Bosco Nizigiyimana, conseiller de l’administrateur chargé des questions politiques et sociales, ce projet est d’une importance capitale car il vient renforcer les capacités des femmes leaders de la commune Kibago à résoudre pacifiquement

• Dévote Ntisumbwa est elle aussi une femme leader de Kibago. Elle est membre du comité communal de l’Association Umuhivu w’Imboneza. «Chaque fois qu’un conflit surgit dans notre association, c’est à elle qu’on s’adresse.

les conflits sur leurs collines. «Dans le passé, les femmes et jeunes filles avaient été oubliées mais comme vous le savez, aucun développement n’est possible sans la femme.» Il a exhorté les participants à bien utiliser ces nouvelles connaissances pour le bien-être de la commune et du pays.

C’est une femme leader qui n’hésite pas à voler au secours de ses voisins. Elle est toujours là pour apporter son aide», confie un membre de cette association interrogé. Pour la concernée, ce projet va changer beaucoup de choses. «J’utilisais mes capacités pour résoudre tel conflit mais ce n’était pas bien affiné, j’improvisais. Pour le moment, je viens d’acquérir d’autres connaissances et mon travail de femme leader sera facile.» Elle demande aux autres participants à cette formation d’être des ambassadeurs et de transmettre ces nouvelles connaissances sur leurs collines respectives. Elle exhorte les autorités administratives à leur faciliter la tâche.

Ercane Nyabenda,

un jeune homme de 23 ans, originaire de la colline Kiyange se dit étonné de voir les femmes sortir de l’ombre : «Je ne savais pas qu’une femme pouvant être un leader. Je pensais que c’était dévolu aux hommes et uniquement aux hommes». Ce membre de la Coopérative Sangwe de Kibago trouve que ces enseignements sur le leadership et la résolution pacifique des conflits incitent les gens à changer de men-

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talités. «Lorsqu’une femme devient leader, c’est toute la communauté qui en tire bénéfice. Qu’on ne s’y trompe pas, les femmes connaissent les problèmes qui surgissent dans la cité.» Il lance un appel aux autres hommes à soutenir les femmes afin qu’elles deviennent des leaders : «C’est pour l’intérêt de leurs communautés respectives et de tout le pays». Fabrice Manirakiza


AU COIN DU FEU

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Avec Alexandre Hatungimana Dans le Burundi traditionnel, le soir, au coin du feu, la famille réunie discutait librement. Tout le monde avait droit à la parole et chacun laissait parler son cœur. C’était l’heure des grandes et des petites histoires. Des vérités subtiles ou crues. L’occasion pour les anciens d’enseigner, l’air de rien, la sagesse ancestrale. Mais au coin du feu, les jeunes s’interrogeaient, contestaient, car tout le monde avait droit à la parole. Désormais, toutes les semaines, Iwacu renoue avec la tradition et transmettra, sans filtre, la parole longue ou lapidaire reçue au coin du feu. Cette semaine, au coin du feu, Alexandre Hatungimana.

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otre qualité principale ? Difficile de se juger soimême et de trouver justement ce qui est bon dans son être, mais je dirais avec modestie la franchise. Votre défaut principal ? Ici j’ai l’impression que l’exercice est facile par rapport au précédent. Je désigne sans hésiter l’impatience. La qualité que vous préférez chez les autres ? L’honnêteté. Le défaut que vous ne supportez pas chez les autres ? L’hypocrisie. La femme que vous admirez le plus ? Marie-Olympe de Gouges chantre des « Droits inaliénables et sacrés de la femme et de la citoyenne » en France révolutionnaire, guillotinée le 2 novembre 1793 pour son combat pour l’égalité des sexes. L’homme que vous admirez le plus ? Si le monde est aujourd’hui mal gouverné et envahi par tous les maux, cela ne signifie pas qu’il n’a eu que des enfoirés. Croyez-moi, des hommes de valeur comme Gandhi, Samori Touré, Mandela, Kennedy, etc. inspireraient bien les nouvelles élites politiques d’Afrique ou d’ailleurs. Votre plus beau souvenir ? Il y en a beaucoup, mais je retiens ma réussite au concours national et l’entrée à l’internat loin des longs et harassants trajets vers l’école primaire. Votre plus triste souvenir ? Disparition tragique de mon vieux père en 1993 alors que je débutais mes études doctorales en France (Paris). Souvenir d’autant plus triste qu’il n’a pas eu droit à la sépulture. Je n’ignore pas que je partage ce sentiment d’amertume avec beaucoup de

Burundais d’âges et de conditions différents, mais c’est l’un des pires souvenirs de ma vie. Quel serait votre plus grand malheur ? Le déshonneur. Le plus haut fait de l’histoire burundaise ? Reconnaissance solennelle de Mwezi Gisabo par l’autorité allemande comme Mwami (roi) du pays réunifié lors d’une réunion tenue à Bukeye le 8 octobre 1905 après la neutralisation des différents rebelles comme Maconco (arrêté et abattu à Usumbura en mai 1905) et Kilima (déporté à Neu-Langenburg, sur le lac Nyassa, en avril 1906). La plus belle date de l’histoire burundaise ? Le 1er juillet 1962, date à laquelle le pays retrouve sa souveraineté perdue à l’issue de la signature du traité de Kiganda le 6 juin 1903. Souvenez-vous que Mwezi Gisabo avait, accepté, à l’occasion de ce diktat, l’autorité allemande sur le Burundi.

et écrire, dans mon domaine de formation qu’est l’histoire contemporaine.

La plus terrible ? Avril- juillet 1972 : c’est la plus grave crise que le Burundi contemporain ait connue avant la guerre civile qui l’a déchiré à partir de 1993. Sa particularité est d’avoir mis en avant la logique d’un racisme interne, tout en marquant le début de l’officialisation de la discrimination politico-culturelle, voire l’instrumentalisation de l’ethnisme local dont on ne sait pas encore aujourd’hui mesurer les conséquences.

Votre lieu préféré au Burundi ? J’hésite à en désigner un. Pour moi tout le Burundi est beau. J’ai toutefois un petit faible pour le Mugamba sud pour son paysage pittoresque qui me rappelle l’Auvergne (Côté Clermont-Ferrand) pour ceux qui connaissent le centre de la France.

Le métier que vous auriez aimé faire ? Celui que j’exerce aujourd’hui, à savoir l’enseignement et la recherche universitaires. Je ne pouvais pas avoir mieux.

Le voyage que vous aimeriez faire ? Les Bahamas pour découvrir une partie de l’Océan Atlantique après avoir visité deux fois l’Océan Indien.

Votre passe-temps préféré ? Plus qu’un passe-temps, mon métier m’amène à beaucoup lire

Votre rêve de bonheur ? Voir mon pays renouer avec la paix et la concorde nationale, sources de tout progrès matériel.

Le pays où vous aimeriez vivre ? Je suis heureux de vivre dans mon pays le Burundi.

Votre plat préféré ? J’ai la chance d’être un « manger-tout ». Sinon, mon plat préféré est celui qui fait le plus plaisir à mes convives quand j’en ai. Votre chanson préférée ? Nabucco de Verdi (Opéra en 4 actes) Quelle radio écoutez-vous ? RFI Avez-vous une devise ? Etre à l’écoute et au service de mes semblables. Votre souvenir du 1er juin 1993 ? Aucun souvenir particulier parce qu’absent du pays (aux études en France). Juste que j’ai posé mon bulletin de vote à l’ambassade du Burundi à Paris et que j’ai appris par après la victoire du Frodebu comme tout citoyen de ce pays peu fasciné par l’appartenance à des formations politiques.

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Votre définition de l’indépendance ? En politique, je la conçois comme la fin de toute domination étrangère, matérialisée par le retour à la liberté et à l’autonomie de l’entité concernée. Pour ne pas tomber dans le piège de ce que Nyerere appelait l’ « indépendance des drapeaux », il est important que l’autonomie politique soit suivie par l’indépendance économique (à ne pas confondre avec une économie autarcique !). Votre définition de la démocratie ? Forme de gouvernement qui reconnaît à la majorité des citoyens le droit d’être dirigée par les personnes de son choix. Elle suppose l’existence d’une société fondée sur les valeurs d’égalité et de liberté. Votre définition de la justice ? Permettre à tout citoyen de jouir de tous les droits que la nature lui confère en tant qu’Homme au sens générique du mot.


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AU COIN DU FEU

Si vous étiez ministre de la Culture, quelles seraient vos deux premières mesures ? Lutter contre la dépravation des mœurs, surtout à l’endroit des mineurs, pour garantir à tout enfant le droit de grandir dans la dignité. Afin de sauver les jeunes, souvent en butte avec les affres de la société moderne (drogue, alcool, prostitution, etc.), mettre en place des centres de création artistiques (musique, danse, jeux divers) et des bibliothèques ambulantes susceptibles d’aiguiser leur goût de lecture, donc d’écriture. Si vous étiez ministre de l’Environnement, quelles seraient vos deux premières mesures ? Gestion responsable des immondices, surtout dans les grandes agglomérations du pays, et lutte contre le déboisement et la déforestation sur l’ensemble du territoire national. Croyez-vous à la bonté humaine ? L’existence de la violence chez l’homme dans certaines situations

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paraît en contradiction avec ce qui pourrait être la bonté humaine. Toutefois, l’homme altruiste, généreux, empathique a, à mon sens, toutes les chances de conquérir cette valeur d’esprit. Pensez-vous à la mort ? Absolument. Sauf qu’il ne faut pas en faire une obsession, d’autant plus elle est l’affaire de tous et surtout inévitable. Si vous comparaissez devant Dieu, que lui direz-vous ? De me récompenser à la hauteur du bien que j’aurais fait de mon vivant et absoudre mes péchés que je n’aurais pas voulu commettre. Après ce moment de repentance, j’aurais aussi une doléance qui me tient à cœur : je lui demanderais de reprendre le monde actuel en main, en tant qu’autorité suprême, et le rendre moins haineux et violent.

Bio express

A

lexandre Hatungimana est né à Ntaho (Commune et province actuelles de Ngozi), le 25 avril 1963. Il a fait ses études primaires à Mugomera et à Muhanga, avant d’entrer au Petit Séminaire de Mureke, puis au Séminaire Moyen de Burasira à la section Lettres Modernes. Entre 1986 et 1990, il prépare sa Licence au Département d’Histoire de l’Université du Burundi. Il est titulaire d’un doctorat en Histoire de l’Université de Paris I, Panthéon-Sorbonne depuis janvier 1999. Professeur ordinaire de son grade académique, il enseigne l’Histoire contemporaine à l’Université du Burundi. Parallèlement à sa carrière d’enseignant-chercheur, il a occupé plusieurs fonctions au sein de cette Institution : Recteur de l’Université du Burundi (de 2005 à 2007) ; Doyen de la Faculté des Lettres et Sciences Humaines (2001- 2005) ; Chef du Département d’Histoire (2000-2001). Alexandre Hatungimana dirige aujourd’hui le Master Complémentaire en Journalisme et enseigne au Master en Droits de l’Homme et résolution pacifique des conflits. Il est également vice-président du Conseil d’administration de l’Université de Ngozi.

Propos recueillis par Égide Nikiza

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ANNONCES

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OUI c’est possible d’éradiquer les Violences basées sur le genre au Burundi… MUYANGE relève le défi ! A la découverte d’une communauté où les femmes éprouvent la joie de vivre…

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aisant suite aux échos sur l’ampleur du changement dans l’éradication des violences basées sur le genre-VBG, sur la colline Muyange, commune Mutaho, Province Gitega au Nord-est du pays, une équipe de 8 personnes de CARE a visité la zone, ce vendredi 10/08/2018. Ce que nous avons trouvé nous a laissé sans voix. « Prenez-nous en photo, comme cela vous garderez avec vous cette joie dont vous êtes témoins aujourd’hui… il y a un an, tout ce que vous aurez trouvé serait des visages tristes. » introduisait le chef de la colline MUYANGE, Mr Ntiranyuhura Jean. Selon les habitants interviewés sur cette colline (propos confirmés par le chef de colline), il y a un an, chaque soir, ce n’était que des pleurs d’une famille à une autre, telles des chèvres livrées à l’abattoir. Les femmes et les enfants étaient frappés et quelques hommes s’en vantaient. « Ma femme s’était surnommée BWI-

RENGANYE (Celle qui se plaint à la tombée de la nuit) maintenant, c’est elle qui passent dans toutes les rues s’appellant BWIRENTWENGE (Celle qui rit la nuit) Domitille NTACOBAKIMVUNA, chef de projet TWUZUZANYE (un projet de recherche sur le genre et l’agriculture) a suivi de près chaque étape de ce changement sur cette colline. Elle nous partage son expérience. « Au tout début, le projet a ciblé les hommes les plus durs et auteurs des violences basées sur le genre. Nous n’étions même pas sûr si ces derniers répondront à notre invitation et ignorions complètement le sort qui sera réservé à leurs femmes. Un des hommes ciblés par le projet avait même été emprisonné plusieurs fois pour cause des violences à sa première épouse et commençait à frapper la deuxième. » La trentaine des personnes qui ont participé à un entretien spontané, nous ont

témoigné d’une chose : AUCUN CRI d’une femme battue au cours des 12 derniers mois. Un homme nous a répondu, la tête haute, en souriant : « Si un homme s’aventurait à être violent auprès d’une

femme ou des enfants, je suis sûr qu’il n’attendra même pas que cela se sache, il se livrerait lui-même et choisirait sa punition, tellement ce problème a été éradiqué. »

Une image, à l’origine de ce changement En un an, le changement dépasse de loin toute attente. CARE International utilise le modèle EKATA. Il teste la valeur ajoutée de l’intégration du genre dans l’agriculture. Dans toutes les zones d’intervention, l’impact est fabuleux en termes de l’optimisation des ressources (de 10 à 1kg de

semences de riz par exemple), du temps (réduit de 3 à 1 jour) et de la productivité (augmentée 10 fois plus). Une question a orienté les débats : « dans vos souvenirs, quelle serait l’élément déclencheur du changement, comment se fait-il que vous avez si réussi là où d’autres collines piétinent ? »

« L’image de la femme modèle » s’émerveille la communauté, les femmes surtout ! Cette image n’est pas prédéfinie. Chaque femme participante au projet fait son propre dessin de la femme modèle. En quoi cette image est-elle si spéciale ? Domitille nous répond : « Quand quelqu’un sait où il va, le voyage devient rassurant. Les femmes l’admirent et se laissent transformer pour ressembler à cette image. Quand elles s’en approchent, les hommes commencent à aimer et soutenir cette transformation, et ainsi tout le monde est transformé. » Selon les habitants de cette colline. Cette colline devrait servir de communauté modèle dans la lutte contre les violences basées sur le genre. « Tout le monde nous demande ce que nous avons fait », nous a confié le chef de colline de MUYANGE. « Notre réponse est clair et ne cache pas l’effort consenti. Le fait que je sois moi-même participant et adhérant au programme a aussi beaucoup aidé, par exemple, j’ai convaincu mon superviseur hiérarchique à mettre de la rigueur à la directive de ne ouvrir les cabarets et servir de boissons alcoolisées durant la journée, pendant les heures de travail. Ainsi, les hommes appuieront aussi les femmes, cela améliorera la répartition des rôles dans les ménages et résultera à l’épanouissement de la femme » ajoutera-t-il. Nous sommes convaincus que Muyange est effectivement une colline modèle. Nous croyons fort qu’elle n’est

pas la seule. Nous avons déjà des invitations collines de Muremera et Mwumba des communes respectives de Giheta et Mutaho, dans la province de GITEGA. CARE est engagé dans la promotion de l’autonomisation des femmes et jeunes et dans la lutte contre les Violences basées sur le genre. Nous estimons que nous sommes sur la bonne voie du changement quand les formes les plus pervers de violences contre les femmes, cessent complètement, et quand la pratique de VBG est rejetée que ce soit au sein de la famille intime, dans la famille élargie, et dans la communauté en général. Nous visons à éradiquer les VBG en influençant le changement social mené par les acteurs les plus directement concernés : femmes, hommes, familles, communautés, les leaders et dirigeants, les religieux ainsi que les organisations sociales du pays. Le récit de la colline Muyange nous rassure que ce modèle d’influence du changement profond est très porteur. Ce modèle inclue cinq éléments : (1) l’autonomisation économique des femmes et filles en particulier à travers les associations autogérées d’épargne et prêt Nawe Nuze et

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l’amélioration de la productivité agricole (Avec l’appui de CERDA), (2) le renforcement du dialogue communautaire avec la facilitation des organisations locale innovantes (GLID, R2000), (3) l’engagement des hommes et garçons (Abatangamuco), (4) renforcement de l’implication des leaders et autorités locales et des décideurs de haut niveau. Pour CARE International, ce changement dans la lutte contre les violences basées sur le genre au Burundi est actuellement appuyé financièrement par les pays comme : Norvège, Pays-Bas, Autriche, la Fondation Bill et Melinda Gates et Banque Mondiale.


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Mettre un terme aux violences faites aux femmes : un pari du ministère du Genre Le deuxième vice-président de la République a lancé, mardi 27 novembre, une campagne de 16 jours d’activisme contre les violences faites aux femmes et filles, dans la commune Bugabira de la province Kirundo. Organisées par le Ministère des Droits de la Personne Humaine, des Affaires Sociales et du Genre en partenariat avec des agences du système des Nations Unies, les cérémonies ont vu la participation de plusieurs personnalités de marque. Tous les intervenants se disaient déterminés à mettre un terme à ce genre de violences.

A

vec des allures d’une grande fête, les cérémonies de lancement de cette Campagne se sont déroulées au stade de la colline Ruhehe, . Un long défilé ouvre les festivités vers 9 heures, en tête les délégués du Ministère des Droits de la Personne Humaine, des Affaires Sociales et du Genre. Des femmes natives de la province aux ONG internationales comme le Care en passant par des associations locales ou nationales, les différentes équipes qui se succèdent au défilé portent chacune un message particulier. Elles appellent qui au dialogue familial pour la prévention des violences basées sur le genre, qui à la répartition équitable des biens familiaux entre les enfants sans distinction de leur sexe, qui à la traduction devant la justice des auteurs de ces bavures, etc. Toute joie, sous un soleil de plomb de la crête de Ruhehe en ce mardi, les femmes et les hommes au défilé scandent des chansons à la gloire du Ministère des Droits de la Personne Humaine, des Affaires Sociales et du Genre, de la Deuxième vice-présidence, du gouvernement. Ils passeront gaiement, parfois sur un pas cadencé, devant des dignitaires issus de ces institutions, assistant avec un air intéressé le rythme et la participation masculine importante dans cet événement. Ces hommes et ces femmes, à l’unanimité, apprécient à juste valeur l’implication des institutions auxquelles ils font des éloges dans la lutte contre les violences faites aux femmes et filles.

Une réduction notable desdites violences, conséquente à la sensibilisation Le gouverneur de la province Kirundo ne manquera pas de souligner les fruits de cette implication. Le mot d’accueil d’Alain Tribert Mutabazi se marquera en effet par un bref aperçu rétrospectif, plutôt positif. Il se rappelle : Kirundo a été caractérisée ces dernières années par moult actes de violences basées sur le genre, allant des violences sexuelles aux assassinats des épouses par leurs conjoints. Les différents programmes nationaux impliqués dans la

«Ce n’est pas l’importance des chiffres qui compte»

Un parterre de personnes ont répondu au lancement de la campagne de lutte contre les violences faites aux femmes

lutte contre lesdites violences ont porté un grand fruit. Ainsi souligne-t-il à titre exemplatif, les jeunes filles élèves mises enceintes sont passées de 105 au cours de l’année scolaire 20162017 à 70 en 2017-2018. Ce n’est pas tout. Les campagnes de sensibilisation ont mis un terme aux unions libres. D’après le gouverneur Mutabazi, plus de 26 mille couples en union libre se sont mariées légalement au cours

de cette année. Aussi se trouvet-il que 70 cas de violences faites aux femmes et filles ont été traités et jugés au niveau de cette province. Cette autorité se réjouit de la réduction considérable de ces violences. Alain Tribert Mutabazi promet néanmoins de ne ménager aucun effort pour l’éradication définitive de ce fléau. Car, bien que réduit, sa persistance reste une réalité. Il tient

Les différentes personnalités qui ont pris la parole rappellent l’importance de la femme dans le développement intégral

Jennet KEM: «Si nous n’arrêtons pas ce phénomène de violences, les objectifs de développement durable ne pourront nullement être atteints»

à appeler différentes organisations à s’investir notamment par le biais des activités en faveur de l’autonomisation de la femme. Martin Nivyabandi, Ministre des Droits de l’Homme, des Affaires Sociales et du Genre, abonde dans le même sens. Selon lui, la croissance nationale passe par le développement de la femme. Il salue la réussite de telles campagnes d’activisme depuis 2016. Elles auront été une occasion notamment pour les victimes d’oser dénoncer les auteurs, les traduire devant la justice. «L’enquête que nous avons menée montre une large évolution de la réduction des violences faites aux femmes et filles», indique le ministre Nivyabandi, tout en exhortant les administratifs à la base à s’investir davantage. Car, dit-il, nombre des violences se commettent au niveau des ménages. Ainsi, il leur revient de trancher en bon pères de famille. Ce membre du gouvernement déplore qu’il y ait des cas de corruption au niveau de l’administration à la base, plombant l’aboutissement des procédures de répression des auteurs des violences faites aux femmes. «Nous les mettons en garde, qu’ils se ressaisissent». Dans le cadre de plus d’efficience de cette politique contre lesdites violences, M. Nivyabandi demande au gouvernement de permettre le recrutement de plusieurs assistants sociaux. Chaque commune n’en compte actuellement qu’un seul. «Son travail est pénible car il reçoit beaucoup de monde qui se confie à lui ».

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Prenant la parole, Jennet Kem, représentante de l’ONU-Femmes au Burundi n’y ira pas du dos de la cuillère. «Si nous n’arrêtons pas ce phénomène de violences, les objectifs de développement durable ne pourront nullement être atteints». Pour cette autorité du système des Nations Unies, si les droits des femmes sont bafoués, c’est toute la société qui en pâtit. «Ces violences constituent un frein au développement», note-t-elle, précisant qu’ «elles empêchent les femmes de faire valoir pleinement leurs droits économiques, socioculturels et politiques». Jennet Kem nuance : ce n’est pas le nombre des victimes qui compte. Elle affirme que « tant qu’une seule femme souffre de ces violences, tout le monde doit être interpellé. Car on ne peut pas comptabiliser exactement les victimes». Mme Kem soutient qu’il y a des millions qui préfèrent garder le silence craignant des stigmatisations, des représailles, etc. D’un rôle grandiose de la femme dans le take-off de toute société à la mise en garde des corrompus en cas d’actes de violence, le discours de circonstance de Joseph Butore, deuxième vice-président de la République, aura plusieurs points d’intersection avec ceux de ses prédécesseurs à la tribune. Dr Butore s’attardera en plus sur l’attention portée particulièrement à ces violences faites aux femmes et filles. Ces bavures constituent plus de 85% de toutes les violences basées sur le genre. En outre, M. Butore insiste sur la majorité des femmes dans la population burundaise. Selon cette personnalité de marque, le choix de Kirundo pour le lancement n’est pas aussi gratuit. Cette province est la 3e parmi les provinces les plus touchées par les violences faites aux femmes et filles, après celles de Gitega et de Muyinga. Ouverte le 25 novembre à la journée internationale de l’élimination de la violence à l’égard des femmes, la campagne des 16 jours se clôturera le lundi 10 décembre prochain, a la journée mondiale des droits de l’homme. La campagne a pour thème : «La lutte contre les violences faites aux femmes et filles nous concerne tous.»


SOCIÉTÉ

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Contribution aux élections de 2020

Quand le reçu devient un laissez-passer Plusieurs habitants de la commune Giheta en province Gitega rencontrés, se disent malmenés. L’administration a pris des mesures pour que chaque citoyen s’acquitte du ’’devoir civique’’ de financer les élections de 2020. Sans récépissé, impossible d’accéder à certains services publics.

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armi les mesures les plus décriées, mais discrètement, il y a l’exigence de présenter le reçu attestant le versement de sa contribution aux prochaines élections, avant d’entrer au dispensaire ou toute autre structure pour les soins de santé. «Même pour aller au marché afin d’acheter du sel, il faut montrer ce bout de papier aux jeunes gens postés à l’entrée», marmonne un habitant interrogé avant de s’éloigner. «L’administration à la base s’en lave les mains et parle d’une décision prises par les autorités communales», lance-t-il tout en refusant d’aborder ce sujet. «Je ne veux pas m’attirer des problèmes». Tout commence le 12 novembre de cette année. Après la publication, commune par commune, des montants déjà collectés dans la province de Gitega. La commune de Giheta s’est classée avant dernière avec une somme de 8.387.000 francs alors que l’administration avait promis de collecter plus de 55 millions de francs, soit un taux de 15,09% par rapport à ces prévisions. «Remontée, l’administration communale a vite organisé des réunions avec les chefs collinaires et certains jeunes du parti au pouvoir et comme mot d’ordre de changer de stratégie pour plus de collectes», a révélé un administratif à la base sous anonymat. «On nous a accusé d’avoir négligé ce travail». Selon des sources dignes de foi contactées à Giheta, il a été décidé que l’accès au marché de Nyarusange se trouvant au chef-lieu de la commune sera conditionné par la présentation du reçu. Ce n’est pas tout comme mesures : pour les jours du marché à savoir le mercredi, vendredi et dimanche, les quatre entrées sont gardées par les administratifs et certains jeunes. P.M., vendeur d’habits originaire du quartier Magarama au centreville de Gitega, affirme avoir été malmené par les responsables de ce marché. Bien qu’il ait exhibé son récépissé attestant qu’il a versé sa contribution à Gitega, il lui a été demandé de verser une autre contribution afin de pouvoir vendre sa friperie. « J’ai expliqué, pièces à l’appui, que j’ai déjà contribué à Gitega mais ils n’ont rien voulu entendre. Je me

demande si je dois contribuer dans tous les marchés des communes limitrophes où je fournis les habits». N.K., une jeune femme de la colline Gisuru, affirme que depuis cette décision, le marché est à moitié vide, les gens ne se bousculent plus. «Avant, les habitants des communes Ndava et Nyabihanga de la province Mwaro amenaient leurs marchandises surtout des vivres pour les vendre au marché de Nyarusange. Aujourd’hui, ils ne viennent plus».

Au centre de santé, il faut aussi montrer patte blanche Jean-Berchmans Nduwimana, natif de la colline Korane, assure que son fils n’a pas bénéficié des soins au Centre de santé de Gisuru parce qu’il avait oublié le reçu à la maison. «J’ai été obligé de retourner à mon domicile pour récupérer ce sésame. Personne ne peut être accueilli sans montrer son reçu. Si par malheur, on ne l’a pas, il faut payer la somme demandée avant d’être soigné». Mêmes lamentations de la part des boutiquiers des différentes collines qui doivent aller s’approvisionner en marchan-

Vue partielle du marché de Nyarusange au chef-lieu de la commune Giheta, les gens ne se bousculent plus.

dises dans la ville de Gitega. Ils font savoir qu’il y a des jeunes gens qui les empêchent de traverser le marais de Nyambeho séparant les communes Giheta et Gitega sans le petit bout de papier attestant sa contribution pour les élections de 2020.

De plus, sans ce reçu, il est quasiment impensable de demander des documents administratifs comme l’extrait d’acte de naissance, l’attestation de résidence ou la carte nationale d’identité. Françoise Rumundike, chef de colline Ruhanza, indique qu’elle

Alexis Manirakiza, administrateur de la commune Giheta

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est au courant de ces lamentations. Elle parle d’une décision de l’administrateur. «Il nous a signifié, dans une réunion avec tous les chefs de colline, que nous devons travailler d’arrache-pied pour collecter plus d’argent afin que notre commune ne porte plus le bonnet d’âne». Elle ajoute qu’elle a organisé des réunions pour sensibiliser les commerçants du marché de Nyarusange. «On a constaté que ceux qui s’acquittent de ce devoir civique sont moins nombreux. Par après, nous nous sommes dirigés vers les détenteurs de kiosques et les habitations afin de leur présenter des quittances afin qu’ils donnent leur contribution». Pour des gens qui ne sont pas natifs de Giheta mais qui viennent au marché avec leurs marchandises, Mme Rumundike est claire : «S’il a contribué par exemple à Gitega, il doit également contribuer ici car s’il lui arrive des problèmes, c’est nous qui allons l’aider en premier lieu». Iwacu a essayé de contacter l’administrateur communal en vain. Le gouverneur de la province Gitega, Venant Manirambona, indique qu’il n’est pas au courant de ces mesures prises par l’administration de la commune Giheta. Toutefois, il a promis d’entrer en contact avec les concernés avant de s’exprimer. Désiré Sindihebura


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SOCIÉTÉ

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Muyinga

Toute une zone sans eau potable Avec plus de 35 mille personnes, la zone Masaka, de la commune Giteranyi, province Muyinga ne compte qu’une seule fontaine. Un danger pour sa population contrainte à consommer l’eau du lac Rweru au risque de sa vie.

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’eau potable manque cruellement dans notre zone », raconte Célestin Ngendakumana, le chef de zone Masaka, une localité dépourvue de cours d’eau. Il précise que six de ses sept collines de recensement sont frontalières avec le Rwanda. Le lac Rweru occupe toute sa partie orientale. Pour avoir de l’eau potable, cet administratif indique que la population fait recours à une seule fontaine, sinon elle est obligée de faire des déplacements vers d’autres zones telles que Ruzo et Tura. Pire encore, cette fontaine encore fonctionnelle est vieille et se situe sur la colline Ngomo. « Une situation très déplorable et difficile à gérer pour une zone comptant actuellement 35.500 habitants ». Pour sa part, Abdul Karim Bimenyimana, chef de colline Cagakori, ne trouve pas les mots pour qualifier cette situation : « C’est vraiment intenable. Il n’y a aucune source d’eau potable sur notre colline. Pas de fontaine, pas de robinet. » Sa colline compte plus de 5500 personnes. Malgré la présence d’une fontaine sur sa colline, Nestor Habonimana, le chef de colline Ngomo, se lamente aussi: « Elle est insignifiante pour ma population. Par ailleurs, elle est très obsolète et tarit souvent.» De son côté, la population ne sait plus à quel saint se vouer. « Nous sommes dépassés, oubliés. Nous n’avons aucun robinet d’eau potable sur notre colline », se lamente Espérance Mashengero, une habitante de la colline Cagakori, riveraine de Rweru, exaspérée. Assise devant sa maisonnette bâtie à moins de 10 mètres de ce lac, cette mère raconte que pour trouver de l’eau potable, il faut se rendre à Nzove, dans une autre zone de la même commune. Ce qui nécessite un coût de déplacement à bord d’une pirogue. En outre, pour avoir un petit bidon d’eau, on doit débourser entre 300 BIF et 500 BIF. Ce qui est, selon elle, un luxe pour les riches.

« Les pauvres ne peuvent pas s’y aventurer. Une fois qu’on a cette somme, notre priorité n’est pas d’acheter de l’eau mais de trouver quelque chose à mettre sous la dent », glisse-t-elle.

« Nous n’avons pas de choix » « Vaut mieux vivoter que de mourir », lâche Mme Mashengero. Ce qui justifie, selon elle, le recours de la population de Masaka aux eaux du Lac Rweru. « Malgré cette odeur, des déchets de toute sorte qui s’y déversent, nous n’avons pas de choix.» Une autre maman croisée sur place est très remontée : « Nous avons crié pour avoir d’eau de robinet, en vain. » Elle signale que même à l’œil nu, on voit des vers se déplacer dans cette eau, des asticots, etc. Ce qui ne les empêche pas de la consommer et de l’utiliser pour la vaisselle. Ce Lac est devenu selon elle une sorte de poubelle. « On y voit même, ces derniers temps, des cadavres humains en décomposition, des chiens, charriés par la Kagera en provenance de l’autre côté ». Elle affirme en outre que l’érosion contribue à sa pollution : « En cas de fortes pluies, des quantités importantes des terres, polluées par des produits phytosanitaires finissent par là. » Et toutes ces terres, des sédiments … donnent une coloration jaunâtre à ce lac. Néanmoins, se souvient-elle, avant les années 2013, l’eau du Rweru était visiblement propre. M. Ngendakumana, chef de zone Masaka abonde dans le même sens. « Notre lac est en grande partie pollué par la Kagera. Depuis 2013, cette rivière a dévié. Elle a changé sa trajectoire et se déverse désormais dans le Rweru ». Ce qui a fait, par ailleurs, qu’une

L’eau du lac Rweru est très polluée.

grande partie de ce lac soit envahie par la jacinthe d’eau. Une preuve de sa forte pollution. Cependant, il reconnaît que même les pêcheurs ont une part de responsabilité. « Ils n’ont pas de toilettes. Ils font tous leurs besoins là ».

Un danger sanitaire A Masaka, tous sont conscients que l’inexistence d’eau de robinet et la consommation de l’eau sale du lac Rweru est dangereuse pour leur santé. « Regardez comment ces enfants ont des ventres ballonnés. Pensezvous que c’est la bonne santé ? Loin de là. Ils souffrent des vers intestinaux ». Néanmoins, malgré la puanteur qui envahit cet endroit, des enfants, des pêcheurs, … y

grouillent. A bord des vélos, des jeunes garçons viennent puiser l’eau dans des bidons de 20 litres. D’autres y nagent sans aucun complexe. Les données du Centre de Santé de Ngomo sont très révélatrices. « Sur 50 patients accueillis par jour, des examens montrent que plus de 30 ont des problèmes des vers intestinaux comme l’amibiase, ankylostome, etc », révèle Sylvère Uwitonze, son responsable. Des cas de diarrhées et d’autres maladies de mains sales y sont également répertoriés. D’après lui, malgré les appels à bouillir l’eau avant son utilisation les cas de telles maladies sont plus nombreux. Ce responsable sanitaire réaffirme que cette zone manque atrocement d’eau potable.

Par ailleurs, Espérance Mashengero évoque un problème de manque de bois de chauffage pour faire bouillir l’eau.

L’administration et la population crient au secours « Que l’Etat, les bienfaiteurs nous aident à avoir de l’eau potable. Sinon, la population court un grand risque », alerte AbdulKarim Bimenyimana, chef de colline Cagakori. Il explique que sans eau potable, il sera très difficile d’avoir une bonne santé. Même son de cloche chez Nestor Habonimana, chef de colline Ngomo. « Nous avons besoin des robinets publics. » Avec l’existence du lac Rweru dans cette région, il estime d’ailleurs que ce travail ne devrait pas traîner. « Ils peuvent l’utiliser pour nous alimenter en eau potable ». De son côté, Célestin Ngendakumana, chef de zone Masaka, propose aux bienfaiteurs ou au gouvernement de les aider à installer des puits d’eau. « Une autre urgence est de résoudre la question de la déviation de la Kagera pour mettre fin à la pollution de Rweru ». Il demande lui aussi l’installation des robinets comme c’est le cas dans d’autres coins du pays. « La question d’eau potable est cruciale car la bonne vie de la population en dépend. Notre zone devrait attirer plus d’attention des bienfaiteurs, de l’Etat ». Rénovat Ndabashinze

Abdul-Karim Bimenyimana : « Que l’Etat, les bienfaiteurs nous aident à avoir de l’eau potable. »

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SANTÉ

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Bubanza

Des adeptes d’Eusébie farouchement opposés à la vaccination Onze adeptes de la « prophétesse » Eusébie de la zone Kivyuka en commune Musigati sont détenus au cachot communal. Motif : Refus de faire vacciner leurs enfants.

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es sources médicales du centre de santé Kivyuka indiquent que les adeptes de la « prophétesse » Eusébie ont refusé que leurs enfants soient vaccinés, lors de la campagne de vaccination, organisée du 20 au 23 novembre 2018. La campagne concernait les enfants de moins de 14 ans et les femmes enceintes au deuxième et troisième trimestre de leur grossesse pour lutter contre les vers intestinaux. « Certains parents ont retiré leurs enfants de l’école pour qu’ils n’y soient pas vaccinés », raconte Jacqueline Mbonihankuye, une habitante de Kivyuka rencontrée au centre de santé. Elle déplore qu’un jeune adepte d’Eusébie soit récemment décédé de la malaria parce qu’il a refusé de se faire soigner. « Nos convictions religieuses et les enseignements reçus sur la sainte colline de Businde s’opposent aux vaccins », indique N.K., un adepte d’Eusébie rencontré au bureau de la commune Musigati. Toutes les personnes doivent mourir, explique-t-il, il est donc inutile de se faire vacciner. Il assimile la vaccination à la sorcellerie : « Les gens se font vacciner pour se prévenir des maladies comme ceux qui consultent les sorciers afin qu’il les protège contre des maladies, des malédictions et autres problèmes sociaux. » Il condamne les autorités locales qui les forcent à se faire vacciner. « Pourquoi nous obligent-ils à nous faire vacciner alors qu’ils ne s’inquiètent pas de la pauvreté dans laquelle nous vivons ? » Depuis fin 2010, Eusébie Ngendakumana est à la tête d’une secte vouant un culte à la Sainte Vierge Marie. Chaque douzième jour du mois, ses fidèles se rendaient à Businde, dans la province Kayanza pour prier la Vierge Marie. En 2015, des milliers de fidèles d’Eusébie ont fui vers la République Démocratique du Congo, puis au Rwanda. En avril 2018, plus de 1600 Burundais, adeptes d’Eusébie, sont rentrés au Burundi en provenance du Rwanda. Ils ont été refoulés après avoir refusé un enregistrement biométrique et de se faire vacciner. Jean Bosco

Onze adeptes d’Eusébie détenus au cachot de la commune Musigati pour avoir refusé que leurs enfants soient vaccinés.

Nduwimana, administrateur de la commune Musigati, signale que sa commune a accueilli plus de 400 fidèles d’Eusébie.

Une administration mobilisée contre les récalcitrants L’administrateur de la commune Musigati fait savoir que les adeptes d’Eusébie se sont opposés à la récente campagne de

vaccination. 20 élèves de l’Ecole Fondamentale de Masare, issus de familles dont les membres sont des adeptes de cette secte, se sont absentés en classe pendant toute la période de la campagne de vaccination, pensant ainsi échapper à cette obligation. L’administration s’est impliquée dans la lutte contre cette résistance à la vaccination. « Onze hommes sont actuellement déte-

nus au cachot de la commune. Nous voulons leur faire comprendre qu’ils ne doivent pas s’opposer à la politique du gouvernement.» M. Nduwimana estime que la résistance aux vaccinations est un défi de santé publique qui a un impact énorme sur la société. « Outre la santé de leurs enfants, ce choix a de lourdes conséquences pour la société. En refusant de faire vacciner leurs enfants, ils sont hors

Jean Bosco Nduwimana : « Nous voulons leur faire comprendre qu’ils ne doivent s’opposer à la politique du gouvernement.»

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la loi et s’exposent à des maladies et contribuent à la propagation des maladies ».

« Ils vivent en isolement social » Ce responsable administratif de Musigati s’inquiète que les fidèles d’Eusébie aient reçu des enseignements contraires à la loi burundaise. Il fait savoir qu’ils ne fréquentent pas les Eglises agréées, ils organisent des prières dans leurs ménages. L’administrateur, en collaboration avec les chefs de zone et de collines, planifie d’organiser des réunions avec ces adeptes. Il espère qu’ils vont se ressaisir et se conformer à la loi burundaise, sinon il promet de recourir à des mesures contraignantes. Il déplore aussi que ces fidèles d’Eusébie ne vivent pas en harmonie avec les autres : « Ils considèrent leurs voisins comme leurs ennemis, ils vivent en isolement social. C’est pourquoi il nous est difficile de les gérer.» Et d’ajouter qu’ils ne participent pas aux réunions organisées par les autorités locales. Ces adeptes d’Eusébie accusent l’administration locale de les maltraiter. « Je comprends mal comment un chef de zone m’oblige à faire vacciner mon enfant. Ce n’est pas son affaire, » dit N.K. Il indique que les autorités devraient plutôt leur procurer des aides, car leurs biens ont été volés quand ils ont fui en RDC. Lorraine Josiane Manishatse


AU CŒUR DU PAYS

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Région Centre

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Gitega :Giheta

Gitega remporte la 2ème édition du festival du tambour Le rideau est tombé sur la deuxième édition de la semaine dédiée au tambour du Burundi à Gitega ce 26 novembre dans la cour du Musée National. Les tambourinaires du sanctuaire de Gishora qui ont représenté la province de Gitega ont récidivé en signant un deuxième succès parmi les 17 provinces représentées. De notre correspondant Jean-Noël Manirakiza

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ix-sept groupes de tambourinaires venus de tout le pays avaient pris part à la compétition et les tambourinaires de Gishora en sont sortis vainqueurs. Rencontrés à Gitega sur la cour du musée national au quartier Magarama, ils se sont rivalisés dans les danses et le battement du tambour, symbole de la royauté du Burundi. D’après Pélate Niyonkuru, ministre de la Culture et des sports, ce festival est rempli de sens pour le pays après 4 ans que le tambour du Burundi est classé au patrimoine culturel immatériel de l’Humanité. Le ministère de la Culture et des sports ne ménagera aucun effort pour soutenir les tambourinaires. « C’est notre culture léguée par nos ancêtres et enviée par le monde entier. A voir comment des groupes venus de tous les coins du pays dansent comme un seul homme, cela montre que nous avons fait un pas en avant

Région Sud

Le groupe de Gishora se prêtant à jouer leur numéro

pour préserver cette culture !» Ce Festival-concours du tambour du Burundi du 26 novembre à Gitega est la 2ème édition après l’enregistrement du tambour burundais sur la liste représentatif du patrimoine culturel immatériel de l’Humanité, le 26 novembre 2014 à Paris en France. La ministre Pélate Niyon-

kuru a précisé que le Festivalconcours s’inscrit dans ce cadre pour perpétuer les coutumes qui sont autour du tambour. Il s’agit de multiplier l’arbre à partir duquel le tambour est fabriqué, « Umuvugangoma », de soutenir l’activité des tambourinaires des chefs-lieux des provinces jusque sur toutes les collines du pays, etc.

Promouvoir le tambour burundais Joseph Butore 2ème vice-président de la République du Burundi a souhaité que chaque année, les Burundais en général et les tambourinaires en particulier se souviennent de feu Antime Baransakaje comme l’homme qui a tout fait pour donner au tambour du

Burundi une place aux concerts des nations. « C’est cet homme qui par sa bravoure a fait montrer au monde entier que le tambour du Burundi mérite d’être le patrimoine culturel immatériel de l’Humanité », a déclaré le 2ème vice-président de la république tout en demandant une minute de silence en son honneur. Selon lui, le festival du tambour est l’un des programmes du gouvernement pour redynamiser notre culture, redonner une place de choix au kirundi comme moteur de véhiculer la paix et l’unité entre les Burundais. Et d’ajouter que Gitega, sanctuaire du tambour, a été choisi pour y ériger une maison de culture qui sera le miroir de notre culture et des coutumes qui ont toujours symbolisé notre patrie. Notons que la province de Gitega grâce à ses tambourinaires de Gishora a gardé sa place de l’année passée, c’est-à -dire la première et a obtenu 90% des points tandis que la dernière place a été occupée par la province de Bururi avec 47,4%.

Nyanza-lac

Vers le démantèlement d’un réseau de voleurs de motos Trois personnes dont un officier de police judiciaire ont été arrêtées à fin de la semaine passée pour faire partie d’un réseau de voleur de motos. La population se réjouit et certains retrouvent leurs motos volées. De notre correspondant Félix Nzorubonanya

L

es sources policières en commune de Nyanza-lac indiquent avoir arrêté le chef de ce réseau de voleur. Il s’agit d’un mécanicien qui était chargé de démonter les motos volées afin de ne plus les retrouver ainsi qu’un officier de police judiciaire prestant au poste de police de Nyanza-Lac. Les mêmes sources indiquent qu’elles détenaient des informations faisant état des vols de motos dans d’autres provinces qui seraient vendues en commune de Nyanza-lac. Ces voleurs opéraient en réseau à travers différents coins du pays mais le noyau de ce réseau se trouvait à Nyanza-lac. Après enquête et en collaboration avec la population, la police

a pu mettre la main sur le chef de ce réseau, un officier de policier judiciaire du nom de Karenzo alias Kitoko et un mécanicien. Ils sont pour le moment détenus au cachot du commissariat de police en province de Makamba où les enquêtes se poursuivent pour retrouver d’autres personnes membres de ce réseau.

Des victimes de ces cas de vol se bousculent Ceux dont les motos ont été volées viennent à Nyanza-lac pour voir s’ils peuvent les trouver. Ils proviennent de Gitega, Karusi, Bururi, Rutana, Bujumbura-rural, Muramvya et Mwaro. Un ressortissant de la province de Rutana du nom de Ndayizeye a pu retrouver sa moto au début de cette semaine volée il y a 2 mois. Cette moto a été saisie sur la colline de Rangi dans la zone de Muyange dans

cette commune de Nyanza-lac. Le propriétaire de cette moto qui est en même temps président de l’association des motards de la province de Rutana demande à la police ainsi qu’au parquet de mener des enquêtes fouillées afin de démanteler ce réseau de voleurs. Des activistes des droits de l’homme dénoncent certaines motos sans document qui font le transport des personnes dans cette commune. Elles font souvent des accidents et emportent des vies humaines ou rendent infirmes des gens. Ces activistes demandent à la police de saisir toutes les motos qui font le transport des personnes et qui ne sont pas en ordre. « Même ces voleurs profitent de cette anarchie pour amener dans cette commune des motos volées. » Signalons que la commune de Nyanza-lac compte un plus grand nombre de motos par rapport à d’autres communes de la province de Makamba et sa situation géographique profitent aux voleurs qui peuvent se volatiliser facilement vers la Tanzanie.

Le mécanicien qui démonterait les motos volées

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SPORT

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Rallye du Burundi

Les pilotes automobiles sont de retour sur les pistes… © Droits réservés

Samedi 1er décembre, Gitega vrombira au son des bolides du Club automobile du Burundi(CAB). La compétition se poursuivra le lendemain dans la province Ngozi.

D

u spectacle à couper le souffle », promettent les pilotes. Sur piste, à commencer par Rudy Cantanhede, récent vainqueur du Gorilla Mountain Rallye 2018, tous les grands noms du circuit ont déjà confirmé leur participation. Etablis près du Musée National le Gitega, le point de lancement de la 1ère étape de la journée, samedi 1er décembre, les pilotes joindront la commune Bugendana. Ultime étape, où est prévu un circuit de 14,47km entre Kabundungu et Masenga. Ainsi de la piste principale

avec des rambardes pour prévenir d’éventuels accidents. Les secteurs de liaison entre l’arrivée et le départ de véhicules sont séparés des zones des chronométreurs et des ambulanciers par des grillages. « Un vrai parcours sportif, digne des circuits internationaux », ne tarit pas d’éloges Fabrice, un amateur. Les pilotes devront boucler cinq fois un circuit de 4,68 kms entre Bugendana et la zone de Bitare. La 2ème journée se déroulera à Ngozi entre Ntunda et la Ruvubu aux confins de Mubuga et Ishanga, endroits où est prévu le Super stage de la cette journée.

Un sport qui gagne en notoriété

Au regard du parterre de pilotes, la compétition s'annonce disputée

où s’effectueront les décapants slaloms, les bordures du parc

d’assistance ont été entièrement aménagées, renforcées

Ayant raflé nombre de prix des championnats africains, les pilotes burundais inscrivent petit à petit leur nom dans le gratin du sport automobile continental. Un triomphe certes, résultant d’une bonne organisation du

CAB, mais aussi et surtout de l’engouement de plus en plus grandissant des jeunes pour cette discipline. « Dorénavant, les stéréotypes faisant du sport automobile un sport des gens des quartiers huppés tendent à se dissiper », estime Adon Negamiye, secrétaire exécutif du CAB. Pour preuve, poursuit-il, les jeunes pilotes qui sont en train de faire leur preuve, beaucoup sont issus de Buyenzi, Bwiza, etc. Toutefois, il appelle le ministère des Sports à s’investir davantage pour la promotion de ce sport. « Maintenant que les résultats parlent d’eux-mêmes, l’exonération des frais de dédouanement pour les pièces de rechange serait un coup de pouce important.» Les pilotes qui en découdront sont: Bukera Valery, Davite, Giancarlo,Rudy,Momo, Remezo Christian, Zafar, Nizerte, Awan Illias,Mayaka,Bianca Njeneza, Massoud Fahd,Mayaka Julien Hervé Mugisha

ANNONCE Comité international de la Croix-Rouge Délégation de Bujumbura – Burundi Rte de l’Aéroport - Parcelle n° 3513 - B.P. 3257 Tél.: 22212908 / 22212865 - Fax: 22229837

AVIS DE RECRUTEMENT Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) désire recruter pour sa délégation de Bujumbura un(e) ASSITANT(E) RESSOURCES HUMAINES qui assurera les tâches suivantes : •

Sous la supervision du Responsable RH, assume avec autonomie des tâches classiques de la gestion des Ressources Humaines

Assure un bon flux d’information et de communication concernant les politiques et les procédures RH

S’assure que tous les employés comprennent le système de gestion de performance du CICR et fait le suivi

Élabore un plan de formation et organise des formations internes et externes conformément aux règles et procédure CICR,

Suit l’évolution des projets RH et fournit un reporting régulier

En collaboration avec le Responsable RH, organise de sessions d’information et de formation du staff

Fait un suivi administratif des Relations Sociales (organisation des élections et réunion des représentants du personnel, suivi de leurs demandes auprès du management)

Exécute sur demande d’autres responsabilités liées au département RH

Connaissances, expérience minimum requis : •

et

Aptitude à gérer des projets, prendre des responsabilités et des initiatives

critères •

Très bonnes connaissances des outils informatiques

Excellentes connaissances du français écrit et parlé, connaissance de l’anglais serait un atout fort

Diplôme universitaire supérieur (niveau licence / A0 minimum) en GRH ou équivalent, spécialisation dans RH Management ou Business Administration (Gestion d’entreprises)

De préférence 2-4 ans d’expérience professionnelle dans un domaine connexe

Très bonnes connaissances de la législation locale du travail

Connaissance des Systèmes d’Information de Gestion des Ressources Humaines (SIRH)

Aisance dans la gestion d’information électronique, communication, sens de l’organisation et de l’analyse

Sens de la discrétion et de la confidentialité, rigueur, qualités relationnelles, qualités rédactionnelles, aptitude au travail en équipe et polyvalence

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Les personnes intéressées peuvent envoyer à l’adresse électronique suivante : buj_hrrecruitment_services@ icrc.org avec la mention «Candidature au poste d’Assistant Ressources Humaines» comme titre. Le dossier doit comprendre un CV (max 2 pages), une lettre de motivation adressée au Chef de délégation (max 1 page), une copies certifiées conforme des diplômes. La date limite de dépôt des candidatures est fixée au 06 décembre 2018 à 16h00’. Organisation impartiale, neutre et indépendante, le CICR a la mission exclusivement humanitaire de protéger la vie et la dignité des victimes de la guerre et de la violence interne, et de leur apporter assistance. Il s’efforce également de prévenir la souffrance par la promotion et le renforcement du droit international humanitaire et des principes humanitaires universels.


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PUBLIREPORTAGE

Vendredi, 30 novembre 2018 - n°507

La diffusion des informations et le dialogue entre administration fiscale et contribuable, facteurs de la promotion du civisme fiscal A la veille de la célébration de la journée nationale du contribuable, l’Observatoire de l’Action Gouvernementale, à travers une « analyse du Cadre légal des impôts», donne la lumière sur les stratégies de booster le secteur fiscal.

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rincipale source de financement des dépenses publiques pour chaque gouvernement, l’impôt est incontournable dans la vie de tout pays. Il permet en effet de réaliser divers programmes de développement économique et social. Dans un pays comme le Burundi où le système fiscal déclaratif est bâti sur la présomption de fiabilité des déclarations des impôts établies par le contribuable luimême, l’accent doit être mis sur les bonnes relations de confiance entre les contribuables et l’administration fiscale pour la promotion du secteur privé et de l’investissement. Cependant, « l’Analyse du Cadre Légal des impôts » récemment publiée par l’OAG lève un coin du voile sur bien de lacunes, notamment la lourdeur de la réglementation, la complexité et la longueur des procédures, l’imprévisibilité et l’instabilité des réformes engendrent la frustration du contribuable, et des fois, le poussent à développer un incivisme fiscal. Cette situation finit par générer un climat de tension entre le contribuable et l’administration et fait le lit, à la longue, de la fraude fiscale. « Se sentant constamment acculé, le contribuable aura tendance à échapper à l’impôt en demeurant dans le secteur

informe », fait remarquer l’OAG dans cette étude. Dans un contexte pareil, l’incivisme fiscal se développe au profit du secteur informel au grand dam du secteur formel et du trésor public. Ce climat tendu entre le contribuable et l’Administration fiscale est l’un des facteurs qui justifient la fraude fiscale si bien que de nombreux contribuables continuent à échapper à l’impôt en demeurant dans le secteur informel.

Plusieurs facteurs à l’origine Cette étude de l’OAG explique plusieurs facteurs pouvant justifier la fâcheuse tendance à se dérober au devoir fiscal, notamment certaines lacunes ou insuffisances des différentes normes législatives et réglementaires qui régissent le système fiscal burundais. Pour redresser la situation, l’OAG demande une implication de tous les acteurs ,et ce, dans une stricte transparence. « La nécessité de maintenir l’équilibre entre l’objectif de mobilisation des recettes et l’équité fiscale implique le consentement aux diverses contributions fiscales collectées auprès des contribuables ». En effet, en dépit des avancées significatives enregistrées par le système fiscal burundais depuis

2013, l’OAG fait remarquer « qu’il subsiste quelques insuffisances à travers les différents textes législatifs et réglementaires, les notes administratives et guides dont l’interprétation soulève des ambiguïtés et des discordances qui sont souvent à l’origine des litiges fiscaux. ». Cela étant, il faudrait mener un diagnostic du système fiscal burundais dans tout son ensemble. Ce dernier aborderait aussi bien l’aspect institutionnel que législatif des réformes fiscales mises en œuvre au cours de ces dix dernières années. En outre, le même diagnostic s’intéresserait « aux lacunes et aux ambigüités identifiées à travers le système fiscal en général et

la fiscalité intérieure en particulier en mettant l’accent sur l’aspect législatif et aux difficultés d’ordre pratique qui se matérialisent souvent par les litiges fiscaux liés aux divergences d’interprétation de la norme fiscale ». Une donne, dans une certaine manière, qui pourrait contribuer à améliorer la relation entre administration fiscale et contribuables, souvent conflictuelle.

Des contribuables constamment informés Pour optimiser ce partenariat, l’OAG demande à l’administration de mettre en place un mécanisme permettant au contribuable de rester constamment informé du système

fiscal en vigueur, des différents impôts et taxes auquel il est assujetti ainsi que des garanties qui le protègent contre d’éventuels abus du pouvoir public. « Tout au moins, une des solutions, tel que l’explique l’OAG qui permettrait une compréhension commune (contribuable y compris) de la norme fiscale ». Cela, permettrait de combler les lacunes et de vider les contradictions qui apparaissent dans les textes fiscaux afin de faciliter sa mise en œuvre. Quant au contribuable, il est appelé à s’intéresser tout aussi constamment au régime fiscal qui le régit, de fournir un effort pour sa compréhension.

La modernisation des textes en vigueur, une nécessité Il faut une modernisation des réformes fiscales. « Car, certaines tendent à tomber en désuétude ». Quant à la fiscalité à l’intérieur du pays, l’administration et le contribuable devraient avoir une interprétation commune des textes fiscaux. Une des clés qui devraient amener tous les intervenants à comprendre l’intérêt d’une action concertée pour la mobilisation des recettes, mais aussi le respect des droits et garanties du contribuable pour promouvoir le secteur privé en général et les investissements en particulier.

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De façon spécifique, l’OAG recommande aussi de réviser la loi relative à l’impôt sur les revenus, à la TVA et aux procédures fiscales en vue de combler les lacunes ; d’initier et adopter la codification générale de tous les impôts et taxes ; de veiller au respect de la loi en matière fiscale et de capitaliser les bonnes pratiques des autres pays en matière fiscale.


ANNONCES

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La résilience des jeunes, une préoccupation pour le Burundi et ses partenaires Le Ministère de la Jeunesse, des Postes et des Technologies de l’information en partenariat avec le Fonds des Nations Unies pour la population (UNFPA), l’Unicef et l’Unesco a lancé le projet «Appui à la résilience des jeunes aux conflits sociopolitiques au Burundi». C’était ce vendredi 23 novembre au Centre jeunes Kamenge.

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ans son discours, Dr Richmond Tiemoko, Représentant Résident de l’UNFPA qui a parlé au nom du Coordonnateur Résident du Système des Nations Unies, a souligné que le Système des Nations Unies œuvrant au Burundi s’est engagé résolument à soutenir les initiatives de développement. D’après lui, ledit projet traduit cet engagement qui accorde une grande place à la jeunesse, pour lui assurer santé, éducation, formation professionnelle et emploi avec, en toile de fond, qu’aucun jeune ne soit laissé pour compte. Par ailleurs, ajoute-il, cette vision des Nations Unies est en lien étroit avec les documents stratégiques du pays. En l’occurrence la Politique nationale de jeunesse, la Vision 2025 dont la finalité commune est le développement holistique des jeunes, en vue de leur pleine et

Dr Richmond Tiemoko (à droite) « Le projet vient pour appuyer le gouvernement dans la mobilisation des jeunes pour le développement du pays. »

entière participation au développement de ce pays. Ne laisser aucun jeune derrière, explique Dr Richmond Tiemoko, signifie que nous évoluons avec eux, en intensifiant les efforts d’investissement en eux dans le cadre de la recherche de la paix et de leur participation au développement. Pour cela, poursuitil, ce projet «Appui à la résilience des jeunes aux conflits sociopolitiques au Burundi» permet aux jeunes de faire une transition bien négociée entre le passé douloureux, le présent et l’avenir auxquels ils devront eux-mêmes contribuer dans la construction. «Et cela est une impérieuse nécessité pour nous tous.» Pour y arriver, a déclaré Dr Richmond Tiemoko, ce projet

Les participants en train de suivre le discours du représentant résident de l’UNFPA parlant au nom du Coordonnateur Résident du SNU au Burundi.

se fixe des objectifs à atteindre. Il contribue à rompre les cycles des violences qu’a vécues le Burundi depuis son accession à l’indépendance, à donner à la jeunesse une perception constructive du passé douloureux du pays et à réduire les cas de frustrations et de mécontentements. En outre, il permettra de briser le cycle de transfert des douleurs aux nouvelles générations, et à promouvoir la réconciliation, la gestion pacifique de l’héritage du passé et la résilience des jeunes, face à de potentielles incitations à la haine. Tout cela, a soutenu Dr Richmond Tiemoko, devrait permettre de renforcer les capacités de résilience de nos jeunes et aussi de les accompagner dans

ce processus, pour leur permettre de se tourner résolument vers un futur plein d’espoir.

Un projet au moment opportun Ce représentant du Coordonnateur Résident du Système des Nations Unies rassure que ce projet contribuera au renforcement de la capacité de résilience des jeunes filles et garçons. Et cela à travers la construction d’une image et d’une perception positive de l’histoire de ce pays. Il crée également un environnement favorable à l’émergence de cette résilience à travers le plaidoyer. «Le projet vient pour appuyer le gouvernement dans la mobilisation des jeunes pour le développement du pays», a mar-

Les jeunes présentent leur sketch devant les participants.

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telé Dr Richmond Tiemoko. Quant au ministère de la Jeunesse, des Postes et des Technologies de l’information, Honorable Evelyne Butoyi a exprimé sa profonde gratitude pour ce projet qui vient consolider et promouvoir la paix par l’éducation à la paix. «Le pays se prépare bientôt aux élections de 2020, nous espérons qu’elles seront paisibles et libres, grâce à la contribution des jeunes. » Mme Evelyne Butoyi a fait savoir que ce projet s’inscrit également dans le cadre des politiques et des plans nationaux mis en place pour la formation et la protection holistique des jeunes en vue de leur pleine et entière participation au développement national. Elle cite notamment la Politique nationale de la jeunesse, le Plan national de développement 2018-2027, la vision 2025. « Ces politiques tiennent compte des considérations des jeunes, des préoccupations des jeunes par rapport à leur mobilisation face à la paix, à la sécurité et au développement durable de tout un chacun », a-t-elle souligné. D’après Mme Butoyi, l’éducation à la paix des jeunes est la tâche qui incombe à tout le monde y compris la jeunesse elle-même parce qu’elle doit être mobilisée pour pallier aux différents défis qui la hantent mais également pour prendre en mains son avenir. Ce projet s’est doté d’un budget de plus de 2 millions dollars américains, équivalent de plus de 3 milliards de BIF. Il est mis en œuvre sur une période de 18 mois. Il a démarré le 25 octobre 2017 et se terminera 18 mars 2019. Ledit projet couvrira les provinces de Bujumbura, Ngozi, Kirundo, Makamba, Rumonge, Mwaro et la Mairie. Il cible les jeunes filles et garcons, les réseaux et les mouvements des jeunes et les leaders. « L’activité phare du projet est la mobilisation de tous les jeunes de ces provinces dans lesquelles il va être exécuté.», a révèle Mme Butoyi. De ricochet, elle ajoute qu’une réunion sera bientôt organisée où l’on va convier tous les partenaires afin de mettre en place une feuille de route qui devra guider l’exécution dudit projet. Cette activité a été clôturée par des jeux de jeunes regroupés dans les différentes associations. Ils ont appelé les jeunes à ne pas se laisser manipuler par les politiques d’une part. Et de ne pas se donner à la drogue et à l’alcool d’autre part, mais plutôt à s’atteler aux activités de développement.


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