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le magazine

NUMÉRO 20-2019 NEGU/HIVER

Ustaritz masquée Le carnaval d'Ustaritz ne transige pas avec la date : c'est à Mardi Gras que musiciens, danseurs, kaskarot, zirtzil, et autres acteurs incontournables se retrouvent dans les rues.

Pêcheurs de sable

C'était un temps où pour vivre, des hommes n'hésitaient pas à rester, de très longues heures, immergés jusqu'à la taille, pour extraire le sable des rivières.

La ceinture de fer

Soucieux de réhabiliter la mémoire historique, à travers une reconstitution fidèle, ils ne laissent rien au hasard, bouton de guêtres, uniformes, armes… Le photographe Jorge Moreno est devenu le spécialiste de ces reconstitutions et ses photos relèvent d'un hyper réalisme très troublant.


L'AFFICHE AHAZTUTAKO KARTELA

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ès 1924, la Fédération française de pelote basque avait commandé directement à Ramiro Arrue (1892-1971) une affiche, pour la Grande semaine de sports basques, qui servit pendant quatre ans. Mais le 12 novembre 1927, elle décida d’organiser un concours pour la réalisation d’une nouvelle affiche. Les projets furent exposés au Musée Basque dans la deuxième quinzaine de février 1928. Ignace-François Bibal (1877-1944), Jean Gélos (1878-1945) et Pablo Tillac (1880-1969) participèrent. Le lauréat fut Bibal qui proposait deux maquettes. La première, trop conventionnelle fut refusée : au premier plan, le pelotari représenté à mi-corps laisse tomber la balle sur le butoir dans un geste assez mou, et en fond, devant le fronton, un joueur à chistéra attend et un autre est caché aux trois-quarts. En revanche, l’affiche primée, qui fut imprimée, concentre le regard sur un monumental pelotari esquissant un mouvement de recul sur fond de montagnes abstraites rouges, la tête à béret rouge du champion se détachant sur un cartel vert. Le visage concentré, le bras et la main gauche levés, le poing fermé, le champion s’apprête, du bras droit le long du corps, la main gantée, à réagir avec force à la prochaine arrivée de la balle. La maquette de Jean Gélos était la plus classique dans une veine descriptive traditionnelle assez figée : habillé de blanc avec béret et cinta bleus, le buteur tient la pelote d’une main, l’autre prise dans le gant de cuir ; il s’apprête lentement à lancer la balle sur le butoir de bois peint en bleu. Les couleurs sont ternes et l’ensemble est trop statique. Aujourd’hui nous pouvons regretter

Mots-clés/Hitz gakoak Mouvement : mugimendu Dessin : marrazki Affiche : kartel, afixa Expressionnisme : Espresionismoa

t e x t e Olivier Ribeton

1928an, Frantses Pilota Federazioak, kartel lehiaketa bat antolatu zuen. Nahiz eta Pablo Tillac finalista izan, ez zen onartua izan. Beharbada bere kartel espresionista sobera garaikidea zen.

OUBLIÉE que le jury n’ait pas choisi la maquette de Pablo Tillac qui était sans doute la plus originale, utilisant des couleurs très franches en grands aplats, mais dont le dessin forcé pouvait heurter les puristes malgré son dynamisme. Dans un raccourci saisissant, le joueur de joko-garbi est vu en contre-plongée en pleine action. Le fond de l’affiche est uniformément rouge, mais violemment heurté par la grande ombre bleutée du pelotari habillé de blanc. La force du joueur se répartit dans un mouvement qui part de l’espadrille blanche d’un pied fortement ancré dans le sol, qui parcourt le vêtement blanc coupé du bleu dur d’une cinta faisant écho au béret bleu, soulignant d’un épais cerne noir le profil du corps, en équilibre instable sur une jambe droite pliée et une jambe gauche allongée, et qui aboutit au geste de balancier du bras gauche levé répondant au droite retenant le chistera et la pelote à son extrémité. Les traits marqués du visage disent la concentration et la violence de l’effort. Les chairs (main, tête) sont d’un jaune orangé faisant écho aux lettrines citron des légendes. Les traits noirs, répétés en stries, soulignent la ligne du corps et mettent en valeur, avec des lavis bruns sur le blanc du costume, la puissance des muscles contenue dans la construction triangulaire du pelotari. La composition de l’affiche est claire et moderne, d’une simplification expressionniste. On peut y voir la leçon de Leonetto Cappiello (Livourne, 1875-Cannes, 1942) qui privilégie, dans ses affiches, les oppositions vives des couleurs et les effets saisissants. On y trouve la recherche du mouvement, de la ligne, de l’arabesque, la dynamique du personnage. La combinaison de couleurs violentes (ici le rouge et le bleu du fond sur lesquels s’inscrivent le blanc et le jaune de l’illustration) est destinée à « faire vibrer les murs comme autant de taches lumineuses. » 1 - R. Bargiel-Harry et C. Zagrodzki, Le livre de l’affiche, Le musée de la Publicité, Paris, 1985, p. 40. GRANDE SEMAINE DES SPORTS BASQUES / FÉDÉRATION FRANÇAISE DE PELOTE BASQUE, PROJET D’AFFICHE

Plume, encre, lavis et gouache, 102 x 79,5 cm. Musée Basque, Inv. E3504. Don de l’artiste en 1928


ÉDITORIAL

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Ensemble

Société éditrice : BAMI Communication Rond-point de Maignon, Avenue du 8 mai 1945 BP 41 - 64183 Bayonne bami-communication@bami.fr Directeur de la publication : Jean-Paul Inchauspé Coordination : Jean-Paul Bobin bobinjeanpaul@gmail.com

Textes : Txomin Laxalt, Jean-Paul Bobin Direction artistique : Sandrine Lucas atmosphere2@gmail.com

Fabrication : Patrick Delprat Iru Errege Le Forum 64100 Bayonne N° ISSN 2267-6864 Photos : Couverture : Cédric Pasquini P. 2. : Musée Basque et de l'histoire de Bayonne ; p.20. Musée Guggenheim ; p.21 (bas). : Santiago Yaniz Aramendia ; p.21 (haut-droite) : DR ; p.22 : A. Bachenis ; p.23 : DR. Ce numéro contient un encart jeté entre les pages 12-13.

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epuis six ans, nous avons le bonheur de vous adresser, plusieurs fois par an, le magazine IBILKA que nous avons imaginé spécialement pour vous. À travers chaque numéro, notre ambition est de vous faire partager notre passion et notre curiosité pour notre Pays basque. Au Sud comme au Nord, de villes en villages, de l'Océan à la montagne, de l'Histoire aux rencontres d'aujourd'hui, nous vous avons conviés à nos pérégrinations, espérant simplement que vous y avez pris autant de plaisir à les lire que nous à les écrire. Mais nous n’oublions pas que ce magazine est le vôtre et c’est pourquoi nous vous proposons aujourd’hui d’y participer activement en nous livrant votre opinion. Quels sont les sujets qui vous intéressent le plus, quelles sont les rubriques que vous aimeriez voir développer, qu’attendez-vous d’IBILKA pour que votre plaisir et votre intérêt soient décuplés à chaque numéro ? Nous vous proposons, dans ce numéro, un questionnaire que nous vous invitons à nous retourner par courrier ou à vous rendre sur le site www.bami.fr, à la rubrique Ibilka (en bas de la page d’accueil) où vous pourrez y répondre en ligne. N’hésitez pas à nous faire partager vos suggestions et vos envies, qu’elles concernent les numéros de la série ou les hors-séries. Dans un prochain rendez-vous avec IBILKA, nous dresserons un bilan de vos réflexions et nous tenterons de vous donner satisfaction à travers un magazine totalement en phase avec vos attentes. Ensemble, imaginons l’IBILKA de demain, celui qui saura combler notre amour commun pour le Pays basque et notre soif de le faire partager. En vous souhaitant à tous une très belle année 2019, je vous donne rendez-vous très prochainement. Jean-Paul Inchauspé, Directeur de la publication


PORTRAIT

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t e x t e Jean-Paul Bobin / p h o t o g r a p h i e Emmanuel Grimault

GABY

ETCHEBARNE


PORTRAIT

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1932 Naissance aux Aldudes.

1953

Entrée au Domaine de La Motte, le couvent des sœurs missionnaires, à Lamasquère.

1962

1975

En Argentine, elle travaille avec les sœurs Alice et Léonie, assassinées par la dictature militaire.

Elle quitte les ordres en compagnie de quinze autres religieuses.

ELLE MARCHE CONTRE LE VENT

HAIZEAREN AURKA DABIL Aldudarra sortzez, Gaby Etchebarnek kontinente guziak kurritu ditu lelo batekin : behartsuak lagundu, injustizien kontra borrokatu eta hitza berriz eman ez dutenei.

IL

nous appartient de veiller tous ensemble à ce que notre société reste une société dont nous soyons fiers : pas cette société des sans-papiers, des expulsions des soupçons à l'égard des immigrés, pas cette société où l'on met en cause les retraites, les acquis de la Sécurité sociale, pas cette société où les médias sont entre les mains des nantis… » (1) Ces mots de Stéphane Hessel, Gaby Etchebarne aurait pu les écrire, comme l'apophtegme de sa vie. Complice, elle nous sourit. Maitea, la chatte noire princesse des lieux, paresse sur la table du salon. Gaby la caresse tendrement. De son petit appartement, dans l'un des derniers quartiers populaires du centre de Toulouse, elle a fait une sorte d'oasis urbaine où très souvent se retrouvent amis et rencontres du moment. C'est d'ailleurs là, dans la petite cour - que l'on pourrait dire des Miracles - enguirlandée de verdure, que Robert Dumont, son éditeur chez Karthala, l'a rencontrée pour la première fois : « C'est une femme qui a une détermination et une passion intérieure pas possibles. » Les années qui passent ne les atténuent en rien. Au contraire. Et si elle accepte de parler d'elle, c'est uniquement >> pour évoquer ses combats. Sur sa jeunesse, elle reste laconique. Une naissance au petit village des Aldudes, à une époque où l'euskara était la langue de tous : « J'ai appris le français à l'école, à sept ans…», une adolescence écrasée par la vie « communautaire » : « Nous avions une existence “tribale”, nous étions trente-six cousins germains dans ce petit village ! Pour partir, il fallait choisir quelque chose qui plaise à la tribu. J'ai opté pour le couvent à Lamasquère, près de Toulouse. » Un souvenir douloureux. « J'ai pleuré huit jours dans ma cellule. J'y suis restée cinq ans. » Elle raconte les privations de nourriture, l'improbité des sœurs supérieures… « Il y aurait beaucoup à écrire sur la vie monacale », soupire-t-elle. En 1962, son monastère l'envoie à Mojón, près de Buenos Aires. Elle y restera six ans à travailler auprès des pauvres, en compagnie notamment d'Alice Domon et Léonie Duquet, deux sœurs assassinées ensuite par la junte militaire (2). Puis ce sera le Brésil, toujours auprès des plus démunis dans les bidonvilles, « nous avions fait une école dans un vieux wagon ». Plus tard, le Laos, jusqu'en 74 : « Je vivais dans une hutte, nous faisions davantage du social que de l'évangélisation, ils étaient animistes et nous respections leurs croyances. » 1975, marque un grand tournant. En compagnie de quinze autres sœurs du couvent, elle décide de quitter les ordres.

Croire, c'est être du côté des pauvres, lutter pour la justice…

Débute alors une vie de militante, pas très éloignée de celle de la religieuse. Installée à Toulouse « où étaient tous mes copains », elle exercera divers petits métiers, sera « virée » pour activité syndicale, « mais l'entraide était là. » Un mot référence qui aura donné le tempo à toute son existence, ici ou ailleurs. Gaby accompagnera les Motivé-e-s à Sarajevo pour réclamer la paix, elle ira même rencontrer Yasser Arafat en Palestine. Les murs du petit appartement en témoignent encore avec cette affiche de l'Intifada et une dédicace de Leila Shahid, alors déléguée générale de l'Autorité palestinienne en France : « À Gaby, en souvenir d'une belle soirée de solidarité avec la Palestine. » Ses combats, aujourd'hui plus sédentaires, n'en restent pas moins solidaires comme en témoigne son engagement auprès de CCFD-Terre Solidaire, une ONG catholique qui défend les populations des pays du Sud ou encore Alternatiba, mouvement écologiste né au Pays basque. Et lorsqu'on lui demande ce qui la pousse ainsi toujours vers les autres, elle sourit et nous renvoie à sa première vie : « Croire, c'est être du côté des pauvres, lutter pour la justice. Je suis toujours croyante, mais en désaccord avec les évêques et les curés. » À l'image de Stéphane Hessel, elle fait partie assurément partie de « Ceux qui marchent contre le vent » ! Maider Bedaxagar, qui l'a rencontrée à Toulouse et a eu envie de préparer un livre d'entretiens avec elle, témoigne : « Elle a passé sa vie à analyser la vie des autres et personne ne s'est intéressé à la sienne. » De passage à Toulouse pour des raisons professionnelles, la jeune femme allait régulièrement boire le café chez Gaby. Elle est tombée sous le charme. « Je la connaissais par ses livres, et on s'attache très vite à elle, on ne peut pas faire autrement. Elle est intemporelle, ouverte à tout. Elle a un côté éternel, on ne peut la classer nulle part. » Dans son dernier livre – le huitième – Gaby Etchebarne dresse les portraits d'artistes de cirque originaires d'Amérique latine, des exilés, comme ceux qu'elle avait rencontrés au Pays Basque (3). « J'ai longtemps vécu à l'étranger, et j'y ai vu tellement de misère que j'avais envie de parler de leur simplicité, leur chaleur…» Avant de nous quitter, Gaby nous informe malicieusement : « J'ai fait le test ADN et je suis basque à 100% ! » Qui en aurait douté ? (1) Stéphane Hessel, Indignez-vous, Indigène Éditions, collection « Ceux qui marchent contre le vent ». (2) Elle leur consacrera un livre, Sur les pas des Disparues d'Argentine (1976-1983), Karthala, 2015.

Mots-clés/Hitz gakoak Injustice : injustizia Solidarité : elkartasun Éxilés : erbesteratuak Latinos : latinoak


TRADITION

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UZTARITZEKO IHAUTERIA, TRADIZIO ETA KREAZIO

Le

arnaval

Z T I R A T S U D’ tradition et création

ia uter a h i ko ako ritze tsuenet a. a t z d ,U tzi ralki ik garan azkarra u t l tu ir ku abe ertakar ere pun g k i b ar og Dud l herrik e inaute a rt Eusk a. Astea bat d


TRADITION

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t e x t e Txomin Laxalt / p h o t o g r a p h i e s Cédric Pasquini

Un carnaval exemplaire Le carnaval d'Ustaritz respecte les canons du genre, que ce soit pour la date ou pour ses personnages emblématiques dont les célèbres kaskarot.

L'

ethnographe Arnold Van Gennep (1873-1957) désignait joliment le temps du Carnaval comme brandon social. Il évoquait un temps où Mardi gras – aujourd’hui, bien qu’inscrit en… gras et majuscules sur le calendrier républicain, il n’en possède pas moins le statut de jour ouvrable – était chômé et dûment célébré. Désormais pour le bon peuple désireux de célébrer les masques il ne reste que des séquences de samedis, car il faut tenir compte des intentions des communes voisines. Il en résulte des carnavals aberrants, célébrés aux Rameaux (Erramu egun), niant ainsi toute la signification d’un événement à la forte puissance transgressive.

Il n’en est pas ainsi à Ustaritz (Uztaritze), 7 128 habitants, la capitale historique du Labourd (Lapurdi) dont les trésors architecturaux s’alignent au coude à coude au long de la rue principale. La ville aux sept frontons et cinq moulins, pas moins, possède une histoire particulièrement riche. Si elle fut la première bourgade européenne à cultiver le maïs ramené du Mexique, il échut à l’un des frères Garat, Uztariztarrak de naissance et députés aux États généraux, de lire sa sentence de mort au roi déchu Louis XVI. Plus réjouissant, Ustaritz possède un Ihauteri (carnaval) de haute volée, des plus singuliers et respectueux de l’usage, s’attachant au rigoureux écliptique fixant Mardi

gras (Astearte inaute) 40 jours avant Rameaux (Erramu eguna), soit la veille du Mercredi des Cendres (Hauste eguna) déterminant lui-même l’entrée en Carême (Garizuma). Pour en saisir toute la quintessence, il faut remonter la longue chaîne d’une tradition quasiment ininterrompue et s’arrêter sur le tableau d’Alexandre Casaubon (Uztaritze, 1855-année de décès inconnue) de l’école dite costumbrista et ancien danseur du village du reste – représentant le cortège du carnaval d’Ustaritz en 1905. On y reconnaît le personnage Kotilun gorri et surtout les incontournables Kaskarot dont les costumes colorés et la fonction sociale ont traversé le temps. Les traditions et


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Préparation minutieuse Si Carnaval est l'affaire de tous, certains s'y investissent pendant les longues semaines qui précèdent le jour dit : fabrication des costumes, des masques, répétition des danses, des musiques, des rituels, rien n'est laissé au hasard. Un long travail pour la plus belle des récompenses.

Cet éblouissant Mardi Gras inventif et fidèle à la tradition est le résultat d'un travail collectif

rites carnavalesques en Labourd sont attestés depuis le Moyen-Âge. Dans une remarquable étude, (Joaldun et kaskarot, des carnavals en Pays basque , 2005, Ed. Elkar) Thierry Truffaut évoque la première étude importante sur le carnaval labourdin d’Ustaritz, en 1927, sous la plume de Louis Dassance, – il fut maire de la commune de 1939 à 1959 une demande du Musée basque de Bayonne : « Quoi qu’il en soit, il semble que leurs costumes soient une très vieille tradition que nous devrions nous efforcer de conserver ; peut-être ces modestes lignes… inspireront-elles aux jeunes gens de notre pays le désir de remettre en honneur les costumes traditionnels d’autrefois. » Près d’un siècle après, les commentaires de Pierre Haira, gaitero, txistulari, acteur majeur de la vie culturelle de la commune et

aussi éveilleur du carnaval d’Ustaritz, tombé en somnolence après la guerre, viennent dans le droit fil : « Par bonheur des anciens comme Simon Telleria, connaissaient le rituel, les musiques, les danses et la tradition avaient survécu grâce aux conscrits de l’année et surtout au travers des Kaskarot. Le groupe de danse Izartxo reprit le flambeau dans les années 70. » Ces années sont celles du renouveau trad. frayant avec une prise de conscience identitaire. Ustaritz, comme Baigorri ou Garazi du reste, s’apparente à ce titre à un cœur battant. L’euskara est ici présent au quotidien et la vie culturelle particulièrement active ; outre l’Institut Culturel Basque, pas moins de sept associations, chœurs, musiques, danses, bertsolaris… y sont basées pour le meilleur.

S E U Q S A M

Cet éblouissant Mardi-gras que l’on connaît aujourd’hui, à la fois inventif et fidèle à la tradition n’est que le point d’orgue d’un long travail en amont, d’un minutieux tissage social dont le festival Hartzaro (littéralement, la saison de l’ours) – en référence au réveil du plantigrade – est l’aboutissement. Hartzaro, soit une semaine de festivités mais aussi de conférences, de musique populaire emmenée avec maestria par Herri soinu. Cette chaleureuse association gigogne réunit en son sein huit autres entités associant gaiteroak, txistulariak, albokariak, mais aussi défenseurs du patrimoine. « Cette tradition est une part de notre identité. Chaque année une partie des acteurs se renouvelle ce qui permet d’entretenir la transmission, d’autant plus que les écoles participent à l’événement », rappelle Pierre Haira.


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Temps forts Les danseurs ont pris possession de la place devant le fronton tandis que le sort de San Pantzar est scellĂŠ. La crĂŠmation sonne la fin du Carnaval.

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La sentence est connue de tous et, elle est nécessaire, San Pantzar finira au bûcher, telle est la rude loi de Carnaval

Parmi les personnages incontournables de l’Ihauteri, les Kaskarot se taillent, sinon de l’ours, la part du lion. Redoutés pour leur impertinence mais attendus par la population, ils vont, sur trois fins de semaine, quêter gaillardement, musique en tête, de quartier en quartier (auzoz auzo), de maison en maison (etxez etxe), une magistrale façon de maintenir le lien social. « Pour une commune comme la nôtre dont la population a doublé en 30 ans, les tournées des Kaskarot ont permis aux nouveaux arrivants de s’intégrer et de participer davantage leurs enfants étant scolarisés dans la commune. » Quand la nuit étend sa cape, la mobilité des visages familiers laisse place à l’inquiétante, anonyme et glabre impassibilité des masques. Le couvercle du chaudron de la mémoire collective est soulevé.

Les Uztaritzarrak se sont mués en zirtzil ou, parmi quelques jeunes dûment choisis, en quelque animal fantastique – la participation à la danse des animaux qui emprunte de la création et de la tradition est particulièrement convoitée pour la puissance qu’elle libère – ou en Maia enjouée malgré le masque atone. Tandis que l’ours à la longe est à peine maîtrisé, les échos de musiques ébouriffantes, les résonances effilées des gaitas, les scansions ensorcelantes des tambours, la frénésie de tribus dépenaillées semble solliciter la transe chez les acteurs soucieux de leurs rôles. Entrés en bacchanale, ils louvoient, trépignant d’envie de forcer un programme imposant des règles strictes, celles qui ont permis à un très vieil ihauteri de traverser le temps. Sans plus de cahiers de doléances, c’est en place publique

que le notable sera raillé, des décisions revisitées, les projets reconsidérés, le reste du monde sarclé et l’euskara vivifié. Le masque a beau n’être qu’apparence et la sentence qui frappera Sanpantzar – victime désignée d’avance – que simulacre, le mannequin n’en finira pas moins au bûcher, car telle est la rude loi de l’envers du monde.

Mots-clés/Hitz gakoak Carnaval : ihauteri Masque : mozorro Railler : trufatu Ours : hartza


RECONSTITUTION HISTORIQUE

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Bilboko Burdin hesia eraikia izan zen Bizkaiko hiriburua babesteko. Maleruski traizioarengatik, nahiz eta gudariak iharduki, frankistek hesia bortxatu zuten.

LA CEINTURE DE FER

ET LES PASSEURS DE MÉMOIRE


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t e x t e Txomin Laxalt / photographies Jorge Moreno & Santiago Yaniz Aramendia

BURDIN HESIA ETA OROIMENAREN PASATZAILEAK


RECONSTITUTION HISTORIQUE

I

l régnait un silence aussi lourd que le béton délité des casemates et des parapets. Il en sourdait une de ces langueurs qui seules prévalent au spectacle d’épaves abandonnées. Au fil d’une flânerie qui tenait plus, dans son atmosphère de délaissement, d’un voyage dans l’histoire, nous avancions « comme roulés dans le rêve de chagrin de ce colosse perclus », si l’on nous permet d’emprunter à Julien Gracq. Dans sa béance, et les outrages de tags ici inappropriés, la Ceinture de fer s’apparentait à une autopsie ou à un Stalingrad qui n’aurait pas croisé son destin. Sous des tombées de nuages, enserrée dans sa gangue de verdure et son demi-cercle de montagnes, Bilbao ronronnait dans des proches lointains. Les hampes de régiments de pins mêlés aux bonnets pointus de sapins vénérables déversaient leurs fragrances résineuses. De robustes baserris (fermes) mouchetaient des garennes de verdure et, ci et là, comme des îles éparses, quelques villages rompaient la houle obstinée de collines et coteaux. Pareils à l’empreinte d’un cheval, les vestiges de la Ceinture de fer, une saignée défensive de 80 km , s’inscrivent en creux dans la terre, autour de la capitale biscayenne pour tisonner un passé qui n’en finit pas de s’imposer, souvent pour le pire, dans la mémoire d’Hegoalde. Aujourd’hui, ce parcours patrimonial ravira le randonneur que l’histoire passionne, le féru de fortifications se repaîtra de cette double ligne de défense inspirée des lignes, Maginot française, Siegfried allemande et Metaxas grecque. Pourtant, la Ceinture de fer ou Cinturón de hierro ou encore Burdin hesia en euskara, c’est bien autre chose que ce surréaliste ouvrage militaire ourlé de bastions, redoutes, tranchées et nids de mitrailleuses. Elle fut le dernier espoir d’un peuple qui serait bientôt privé de sa première et éphémère expérience d’une autonomie (8 octobre 1936) réduite comme peau de chagrin. Après l’offense de Gernika (1937), ce bouclier ne sera qu’une illusoire garantie contre l’effarante promesse d’Emilio Mola, l’un des trois généraux félons : « Je ferai du Pays basque un cimetière. » Nous allions sur les hauts de Larrabetzu et, comme surgis d’une brusque faille dans l’espace-temps, la section de gudaris (soldats de l’Armée basque) avait investi la tranchée que protégeait un empilement de sacs de sable. Le pourpre satiné de l’ikurriña tranchait dans le vert d’une végétation touffue. Beti aurrera Lagundia (Compagnie Toujours en avant) portait-il brodé en élégantes lettrines, celui-là même qui, en 1960, recouvrit le cercueil du lehendakari (président) José Antonio de Aguirre lors de ses

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obsèques célébrées à Saint-Jean-de-Luz. Il ne leur manquait pas un bouton de guêtre, qui en mono [salopette de travail adoptée par les miliciens républicains], qui de velours côtelé, qui coiffé de l’emblématique casque républicain, de l’inoubliable calot isabelino, immortalisé par la célèbre photo de Robert Capa ou du béret marqué de l’écusson des trois provinces du jeune gouvernement d’Euzkadi [avec z selon l’écriture sabinienne qui avait cours] ou des lettres JEL, Jaungoikoak Eta Lege zaharrak (Dieu et les vieilles Lois) sur fond de l’arbre de Gernika. Pénétrés de leur rôle, armes au pied, ils s’agenouillèrent pour recevoir la bénédiction de l’aumônier avant de rejoindre leur poste, car l’attaque franquiste était imminente… La reconstitution historique ne s’apparente pas à un jeu de rôles, une tocade d’adultes se plaisant à jouer à la guerre. Ritxi Zárate Casado, membre de l’association Frentes de Euzkadi, commerçant les jours ouvrables, y fait office d’aumônier : « Un personnage particulier qui n’existait pas dans l’armée républicaine mais essentiel dans les régiments de gudaris. Les milices, communistes, socialistes et anarchistes les considérèrent avec surprise et incrédulité », nous explique-t-il. Ces reconstitutions ne sont absolument pas un jeu de guerre mais un acte éducatif, respectueux et d’une certaine manière d’un hommage en forme d’évocation rendu à nos parents. »

Les motivations des participants sont multiples. À chacun de trouver la sienne

Un travail de mémoire C’est à la fin du XXe�siècle que la reconstitution historique se développe dans l’État espagnol, répondant à un légitime besoin de récupération de la mémoire historique. « La guerre civile est la plus jeune des disciplines, seulement une quinzaine d’années, elle ne réunit qu’une vingtaine de groupes dans tout l’état pour moins de 300 participants. Le conflit est encore proche et les blessures familiales ne sont pas toutes cicatrisées », nous confiait Ritxi. Quant aux motivations des participants elles sont multiples. Il s’agit pour certains de combler un énorme vide historique entretenu durant quarante ans, pour d’autres d’exorciser de douloureux héritages familiaux comme nous pûmes le constater en discutant avec quelquesuns des participants dont un grand-père ou un vieil oncle combattit sur le front de Biscaye. La plupart des participants sont férus d’histoire mais aussi d’archéologie ; ils participent, outre à de minutieuses études de terrain, à la récupération d’objets voire de corps ensevelis durant le conflit. Du reste, on ne se réunit pas n’importe quand ou à la demande de n’importe

Davantage qu'un jeu Revivre une bataille grandeur nature, faire comme si…, en ne laissant aucun détail au hasard, du plus petit bouton de guêtre au choix des armes, est davantage qu'un jeu, une vraie passion pour certains.


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RECONSTITUTION HISTORIQUE


RECONSTITUTION HISTORIQUE

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Rien ne manque Pour que la reconstitution soit parfaite, et le plaisir total, rien ne doit manquer. Le travail des historiens, en amont de l'événement, est donc essentiel… ainsi que celui des costumiers !


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RECONSTITUTION HISTORIQUE

HISTOIRE D’UNE TRAHISON Après les terribles combats de 1936 et la chute du Gipuzkoa, les troupes franquistes ont pénétré en Biscaye et menacent la capitale où s’est réfugié le premier gouvernement d’Euskadi dirigé par le lehendakari (président) José Antonio de Agirre. 14 000 personnes, hommes non mobilisés mais aussi femmes et enfants vont s’atteler à construire cette ligne défensive de la dernière chance. En fait, deux lignes défensives séparées de quelque deux cents mètres vont épouser le tortueux relief orographique, hérissées de quelque 180 bunkers d’un mètre d’épaisseur. L’ingénieur qui a imaginé ce système déjà obsolète, ne serait-ce qu’à cause de l’intervention de l’aviation italienne et allemande, est Alejandro Goicoechea. Ce dernier, pressentant l’inéluctable défaite, sans passer à l’ennemi pour jouer de l’effet de surprise, communique, dès février 1937, tous les plans à l’état-major franquiste. Après la guerre, il fut cet ingénieur ferroviaire célèbre qui mettra au point l’ancêtre du TGV, le TALGO (Tren Articulado Ligero Goicoechea Oriol), Oriol étant un carliste putschiste qui finança son projet.


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JORDI BRU, LE PHOTOGRAPHE À REMONTER LE TEMPS

Travail d'équipe Jorge Moreno, alias Jordi Bru, emmagasine les images des acteurs de la reconstitution. La création intervient ensuite, à la manière d'un peintre hyper réaliste.

Quand il ne vogue plus dans le XXIe siècle, Jorge Moreno (Pampelune, 1967) devient Jordi Bru, la version catalane de son nom, histoire de revendiquer des origines. Il est sans doute le seul photographe à pratiquer cette technique, à mi-chemin entre photographie et fresque. Un genre qui convient parfaitement à l’illustration des reconstitutions historiques. « L’Histoire me passionne. Mon premier contact avec le genre fut en 2013, à Pampelune, au cours d’une reconstitution de la guerre d’Indépendance espagnole (1808-1814). Les uniformes m’enchantèrent et je décidai alors d’utiliser la photo pour imiter les grands peintres de guerre du XIXe siècle : Josep Cusachs, Vasily Vereshchagin, Victor Morelli, Lady Butler. » La technique relève quelque part de la peinture, un vrai travail de photographe mais aussi d’enlumineur. « D’abord il faut que j’aille sur place lorsqu’une bataille est reconstituée, pour vivre une situation. Ensuite j’ai besoin des soldats, de leur armement, leurs uniformes, leurs drapeaux, étudier leurs attitudes, celles des hommes comme celle des chevaux. Pour cela en costume d’époque, tel un correspondant de guerre, je me place au cœur de l’action. Je dois reconstituer le site, recréer à partir d’archives, des murailles détruites ou, si intervient la marine, il me faut photographier des vaisseaux d’époque. » 100 % de ce qui apparaît sont photographiés par Jordi. La création intervient dans la manière dont il ordonne la composition finale, « comme un peintre je me confronte à un écran blanc et je dois arriver à ce que la composition fonctionne et possède une unité. » Jordi Bru, orfèvre de Photoshop, recréera digitalement une ambiance de guerre : la fumée, les explosions, les déflagrations, le sang sur les uniformes… Jordi Bru avoue avoir une préférence pour les XVIe et XVIIe siècles, les guerres carlistes et napoléoniennes. Il y a peu il a découvert la guerre civile espagnole (1936-1939) : « Un univers passionnant, douloureux et poignant. Les sentiments des uns comme des autres sont à fleur de peau. Mon grand-père est mort à la bataille de l’Èbre, dans le camp républicain et du côté de ma mère tous étaient requetes. »


RECONSTITUTION HISTORIQUE

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qui. Le Cinturón de hierro, est protégé par la loi et considéré comme un monument historique concernant 25 communes pour 300 vestiges. Une reconstitution coûtant cher, un calendrier bien strict est établi. En Euskadi, les différents groupes, Frentes de Euzkadi mais aussi Lubakikoak, le Museo memorial del Cinturón de hierro, ce dernier dirigé par Aitor Miñambres, une autorité dans l’étude de l’Euzkadi’ko Gudarostea (Armée d’Euskadi) et, en l’occurrence, sergent du petit groupe présent dans la tranchée – groupe de mitrailleurs du Batallón Saseta du Parti Nationaliste Basque, nous précisera Ritxi – sont seuls aptes à opérer sur ces lieux de mémoire. Encadrés par des institutions aussi prestigieuses que la Société de Sciences Aranzadi, Intxorta Kultur Elkartea 1937, Burdin Hesia Ugaon et Euskal Propekzio, ils œuvrent à l’investigation historique par le biais de cette réaliste évocation théâtrale mais aussi par des conférences et l’édition de publications. Nous étions vraiment sur Gaztelumendi au matin de ce funeste 12 juin 1937 quand après un bombardement intensif de 144 pièces d’artillerie

Une reconstitution coûtant cher, un calendrier très strict est établi. Seuls certains groupes opérent

– la plus importante concentration d’artillerie à ce moment de la guerre, nous confiera Ritxi – trois brigades de Navarre (12 000 hommes) s’engouffrèrent dans ce couloir de deux kilomètres, appuyées par 110 avions de la Légion Condor nazie. Les combats furent d’une rare férocité. En contrebas, des ombres furtives s’immiscèrent entre les pins dans un pétillis de brindilles écrasées. Kepa Ganuza, dégaina son pistolet et brandit l’ikurriña, le sergent Aitor Miñambres demanda du renfort depuis son téléphone de campagne, Alberto J. Sampedro, arma sa mitrailleuse, Mario Luque, son serveur, ajusta les bandes, le gudari Jon Etxezarraga, mortellement touché recevait les derniers sacrements de la main du Père Ritxi Zárate… La journée fut longue, la résistance acharnée mais la Ceinture de fer céda au soir. Le 20 juin, les troupes franquistes investissaient Bilbao. Euzkadi entrait en agonie.

Mots-clés/Hitz gakoak Fortification : hesi Reconstitution : berreraikitze Attaque : eraso Soldat de l’armée basque : gudari


CULTURE

Expo

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GUGGENHEIM QUESTIONNE L'ARCHITECTURE architecture peut-elle changer l'histoire d'un lieu ? Ce fut le cas avec le Musée Guggenheim de Bilbao, construit en 1997 et qui a placé la ville eu centre du tourisme mondial. Depuis toujours, on s'interroge sur l'impact et les effets de l'architecture. Architecture Effects est une exposition sur l’architecture, l’art et la création. Elle explore les effets qui imprègnent le quotidien, à travers des questions liées à l’identité, à la conscience et au rituel. Trois territoires reliés entre eux constituent l’exposition : Airlock, Jardin et une dimension numérique baptisée Bulle, disponible pour le visiteur à travers une application gratuite. L’ exposition est conçue comme un va-et-vient incessant entre la spéculation historique et la conjecture futuriste, en permettant aux visiteurs de se sentir connectés dans l’espace et le temps. À partir des œuvres et des objets présentés, elle fournit un cadre destiné à stimuler aussi bien la réflexion du spectateur que son interaction avec les pièces. Au Jardin, principal espace de l’exposition, les œuvres d’art et d’architecture contemporaine se déploient entre images en mouvement, sculptures, prototypes, animations, vidéos en temps réel et maquettes. L’exposition s'interroge sur cette question intemporelle : qu’est-ce qui fait de l’architecture bien plus qu’une simple construction ?

L'

Architecture effects, Musée Guggenheim, jusqu'au 28 avril.

L’HEURE DE NOUS RÉVEILLER ENSEMBLE L'AMOUR DE LA MONTAGNE Un petit ouvrage tout en délicatesse, comme un sourire complice, dans lequel l'auteur de La Modification, Michel Butor, évoque son amour de la montagne. Figure de proue du Nouveau Roman, Michel Butor a sillonné le monde et, chaque fois qu'il en eut l'occasion, dans les Alpes japonaises, autour de Nice ou de Genève, au Nouveau Mexique…, il résida en montagne. Promeneur, davantage que randonneur, il communie avec la montagne : « La montagne est un lieu privilégié d'apprentissage sur soi et sur le monde… ». Un petit livre d'amour ciselé comme une ode à la montagne. Son premier souvenir de montagne, ses premiers étonnements Butor les doit aux Pyrénées : « J'avais onze ans… nous sommes allés avec mes cousins à La Mongie…, j'ai ressenti de l'émerveillement… » La Mémoire des sentiers, Michel Butor. Arthaud, 12,50 €

Traduit dans de nombreuses langues, le roman de Kirmen Uribe est désormais disponible en français, au Castor Astral. Une histoire poignante dans laquelle l'auteur de l'incontournable Bilbao, New York, Bilbao, raconte l'histoire de Karmele Urresti, qui au sortir de la guerre civile, rencontre à Paris, son futur mari, un musicien Txomin Letamendi. À travers un projet artistique commun, ils militent pour la cause basque dans

Bruno Loth

Corentin Loth

toute l'Europe jusqu'au jour où Paris tombe sous la coupe allemande. Ils partent alors au Venezuela et travaillent avec le gouvernement basque en exil avant de retrouver le Pays basque pendant la dictature franquiste… Un roman poignant mettant en scène des personnages, à travers plusieurs générations, qui vivent pour leurs idéaux et leur combat, un livre qui pose de manière universelle la question de l'identité et de l'âme des peuples. L'heure de nous réveiller ensemble, Kirmen Uribe. Traduit du basque par Miren Edurne. Alegria Aierdi. Éd. Castor Astral. 22 €.

GUERNICA

Les faits sont malheureusement connus de tous et le 26 avril 1937 demeure comme l'une des grandes dates noires de l'histoire de l'Humanité. Ce jour-là GernikaLumo était bombardée par l'aviation allemande. C'est avec une grande pudeur que Bruno et Corentin Loth nous plongent dans l'intimité des habitants, dressant un curieux, voire insolite, parallèle avec le cheminement artistique de Picasso. Guernica, Bruno et Corentin Loth, La Boîte à bulles, 19 €.


CULTURE

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Le moins que l'on puisse dire, c'est que Santiago Yaniz est un marcheur curieux de tout. En effet, chez lui aucune exclusive et lorsqu'il nous propose « ses » plus belles excursions, du Labourd à la Soule, il y en a pour tous les goûts, des forêts côtières aux gorges de Kakueta en passant par les sentiers chargés d'histoire ou les découvertes « écologiques ». Cette trentaine de propositions a le mérite de faire découvrir le Pays basque Nord au travers des certaines de ses unités et nous propose un petit guide de balades très original et diablement séduisant. Une très belle invitation à la marche. Les Plus belles excursions du Pays basque : Labourd, Basse-Navarre, Soule. Santiago Yaniz Aramendia, SUA Edizioak.

Expo

L'édition 2019 du célèbre Guide Michelin a livré son verdict en Hegoalde, comme en Iparralde. La vedette est incontestablement Martín Berasategui qui ajoute deux restaurants à sa liste spectaculaire d'établissements étoilés, et atteint ainsi un total de10 étoiles, qui fait de lui le chef le plus étoilé d'Espagne ! Ailleurs, en Navarre, El Molino de Urdániz à Urdaitz est récompensé d'une deuxième étoile qui met en valeur la cuisine de David Yárnoz qui exalte les produits de proximité. À Bilbao, Etxanobe Atelier et sa cuisine « high tech » des plus surprenantes est distingué également par une étoile. En Iparralde, une seule nouvelle étoile, attribuée au Brouillarta à Saint-Jean-de-Luz, elle récompense la cuisine inventive de Guillaume Roget. Pour le reste signalons la disparition du guide de L'Atelier de Gaztelur à Biarritz et du Moulin d'Alotz, à Arcangues.

BALADES EN IPARRALDE

FONDATION CHILLIDA-LEKU

F

ermée au public depuis 2011, la magnifique Fondation Chillida-Leku qui abrite de très nombreuses œuvres d'Eduardo Chillida (Donostia 1924-2002) dans un très vaste parc de 13 hectares, à Hernani, devrait prochainement rouvrir ses portes aux grand public, à la suite d'une accord conclu entre la famille et la galerie suisse Hause & Wirth, chargée de représenter l'artiste basque à travers le monde. Des travaux de rénovation ont été réalisés sous la direction de l'architecte argentin Luis Laplace et le parc a été repensé par l’architecte paysagiste Piet Oudolf. La fondation, dont la direction a été confiée à Mireia Massagué, ancienne directrice du Gaudi Exhibition Center à Barcelone, souhaite proposer des expositions d’art contemporain en dialogue avec l'œuvre de Chillida.

EN BREF >>>

BERASATEGUI AU FIRMAMENT

BAFA BILINGUE

Le lycée Frantsesenia de SaintJean-Pied-de-Port (Garazi) propose une session de formation bilingue, basque-français, au Brevet d'Aptitude aux Fonctions d'Animateur (BAFA). La formation se déroulera du 13 au 20 avril 2019. Renseignements : http:// frantsesenia.com/. Inscription avant le 30 mars.

ARTIUM NE DÉCOLLE PAS

Le musée d'art moderne de VitoriaGasteiz a enregistré une fréquentation de 96 372 visiteurs en 2018, soit à peine 15% de progression par rapport à l'année précédente. Les visiteurs étrangers ne représentent que 25% de ce total.

MINTZOAK

L'Ethnopole basque a mis en ligne Mintzoak, un ensemble de documents audiovisuels et sonores relatifs au patrimoine oral du Pays basque Nord. Ils sont consultables, en version numérisée, au sein de l'Institut culturel basque à Ustaritz. Cet espace est ouvert à tous sur rendez-vous (05 59 93 25 25) ou par courriel : konsulta@eke.eus. La liste des documents constituant ces fonds est à découvrir sur le portail Mintzoak : https://www.mintzoak.eus/fr/

MASCARADE

La mascarade 2019 jouée par les jeunes d'Ordiarp, sera représentée à Idaux-Mendy (10 mars), à Garindein (17 mars), à Larrau (24 mars), à Alos (30 mars), à Hoquy (7 avril), à Musculdy (14 avril) et à Ordiarp (21 avril).

BEST PINTXOS & GASTRO

C'est le nom d'un nouveau guide gastronomique qui rencence le meilleurs endroits pour déguster des pintxos en Navarre et en Euskadi.

21e KORRIKA

La grande course relai organisée par AEK, en faveur de l'euskara se déroulera du 4 au 14 avril.


INTERVIEW

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LA MARCHE EST ESSENTIELLE ne trouverez pas grand monde ; et à basse altitude, l'intensité des canyons dans les Pyrénées aragonaises ou basques notamment sont d'autres lieux sauvages.

Naturaliste et universitaire, Claude Dendaletche est l'un des meilleurs connaisseurs des Pyrénées. Son nouveau livre, Pyrénées - Frontière Sauvage, chez Glénat, témoigne, une fois de plus, de sa passion.

Vous évoquez la place historique tenue par le pastoralisme ; la figure du berger, n'est-elle pas une sorte de métonymie pyrénéenne ? C.D. : L'écosystème pastoral est assez spécifique des Pyrénées. Il est vrai que le berger a été à la fois un grand transformateur de l'espace montagnard pour le réduire à un outil, supprimer la forêt pour faire pousser l'herbe, c'est quelque chose de très anthropique mais, en même temps, la concentration d'animaux domestiques, donc potentiellement de nourriture, a entraîné l'arrivée d'animaux sauvages comme, par exemple, les vautours fauves qui sont plutôt une espèce des pays chauds. On pourrait penser que cette présence des bergers a aussi entraîné la disparition d'une certaine faune : ours, loups, bouquetin… C.D. : Oui, pour le bouquetin, ce sont surtout les chasseurs essentiellement britanniques qui l'ont éliminé, avec la complicité, il est vrai, des guides de Gavarnie et d'Ordessa ; la disparition de l'ours est plus compliquée, il y a les bergers, la chasse… Il ne reste plus d'ours autochtones dans les Pyrénées mais que des ours réintroduits, ce qui est différent. L'ours est un cas particulier, il est certes un animal sauvage, mais très implanté dans l'imaginaire pyrénéen. >>

CLAUDE DENDALETCHE Universitaire, naturaliste et biologiste, Claude Dendaletche est un spécialiste des Pyrénées auxquelles il a consacré de nombreux livres. Citons, parmi d'autres : Guide du naturaliste dans les Pyrénées occidentales, Delachaux et Niestlé, 1973 Montagne et civilisation basques, Paris, Denoël, 1978 L’homme et la nature dans les Pyrénées, Paris, Berger-Levrault, 1982. La cause de l’ours, Paris, Sang de la Terre , 1993. Pyrénées-Frontière Sauvage, Glénat 2018. 39,50 €.

Vous nous conviez à une découverte naturaliste de la chaîne, quelle place la géologie tient-elle dans la connaissance des Pyrénées ? C.D. : Dans toutes les montagnes, la connaissance géologique est essentielle. La plupart des gens n'imaginent guère que lorsqu'ils sont au sommet du Mont Perdu, ils marchent sur des fonds marins anciens ! La géologie donne une perception du temps philosophiquement importante. Ce livre est une commande des éditions Glénat et ce qui m'a intéressé, c'est qu'il figure dans une collection qui a débuté en Patagonie, puis en Nouvelle-Zélande, dans les Alpes… Cela m'a fait plaisir de situer les Pyrénées à l'échelle planétaire

Situer les Pyrénées à l'échelle planétaire

Dans votre introduction, vous citez Ramond de Carbonnières qui écrit que « chaque montagne est singulière » ; quelle est la singularité des Pyrénées ? Claude Dendaletche : Par rapport aux Alpes, elles sont à taille humaine ; dans une vie on peut avoir l'ambition de les parcourir, d'en avoir la géographie et les principaux caractères en tête. Dans les Alpes, c'est impossible, c'est très beau, mais c'est immense et l'autre différence, c'est, que si le monde glaciaire pyrénéen est beaucoup plus réduit, la contrepartie positive, c'est qu'il y a davantage de lacs, donc les glaciers dans les Alpes et les lacs dans les Pyrénées. Et par rapport à la diversité linguistique, nous avons ici le basque, une langue pré-indo-européenne. Vous insistez sur les espaces sauvages, pourtant les Pyrénées sont anthropisées depuis longtemps. C.D. : Certes, les Pyrénées sont très anthropisées, cela est vrai, sauf en très haute montagne, entre les stations de ski, il y a des immensités où vous

Au fil de la lecture, on comprend que la découverte en marchant est pour vous importante. C.D. : La marche, c'est essentiel ! Personnellement, philosophiquement, physiologiquement. Moi j'ai découvert les Pyrénées pédestrement, ce qui m'a permis de les comprendre, de les étudier scientifiquement. La marche est essentielle dans la compréhension d'un paysage.


HISTOIRE

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t e x t e Txomin Laxalt

HONDARTZAILEA DE SABLE ET DE SUEUR HONDARTZAZ ETA IZERDIAZ Hondartzaile ofizioak, luzaz bizia eman zien Gipuzkoako ibaiei. Hirurogeiko hamarkadako bukaera arte, hondartza bildu zuten Urumea eta Oriako ureetan.

était un temps où travail ne signifiait pas emploi dans le sens d’une tâche tarifée selon des critères de besoins, de temps et de rendement, où l’on ne parlait pas d’un marché du travail auquel il faut se soumettre si l’on veut exister socialement. C’était un temps où l’on était reconnu pour un savoir-faire, une qualification conservés à vie et qui, généralement, se transmettaient. C’était le temps de ce que l’on appelle aujourd’hui, non sans nostalgie, les vieux offices. Ils se distinguaient par leur pénibilité souvent mais aussi par leur originalité. C’est en Gipuzkoa que, jusqu’à la fin des années 60, les hondartzaileak ou areneros (sabliers) se singularisèrent dans l’art de, littéralement, cueillir le sable au fond des rivières. On pouvait les voir à l’œuvre, leurs gabarres suivant la respiration des marées dont l’Urumea mais aussi l’Oria étaient tributaires. Il nous souvient enfant, depuis le pont du vieux Kursaal de Donostia, d’avoir vu évoluer les dernières longues gabarres, une batellerie caractéristique dédiée à cette éprouvante activité. Quelle que soit la saison, parfois entre des lambeaux de brume hivernale, elles allaient au ras de l’eau, une fois chargées à franc-bord, avec cette silhouette solitaire poussant obstinément sur la perche.

C'

Immergé jusquà la taille L’hondartzaile utilisait une embarcation à fond plat – un faible tirant d’eau s’imposant pour récolter le sable – généralement d’une longueur de 7 m. La polaiña, une sommaire rame pourvue d’une longue pelle, logée à l’arrière de la gabarre, était manipulée pour la navigation selon l’exigeante technique de la godille. Pourvu d’une autorisation de la Comandancia Marítima – elle percevait un pourcentage sur la collecte – l’hondartzaile travaillait au rythme des marées – souvent deux par jour, c’est-à-dire, de l’aube au couchant – et selon les caprices de la rivière, soit jusqu’à neuf heures par jour, descendant vers les embouchures

MARCHAND DE SABLE

Immergé jusqu'à la taille pendant plusieurs heures, contraint de pelleter à la main ; on a du mal, aujourd'hui, à imaginer la pénibilité d'un tel métier.

pour une collecte optimum. Dans ce cas, « il marquait à l’aide d’une pelle un cercle d’environ dix mètres de diamètre pour signaler que cette parcelle de sable lui appartenait. Dès que le sable était sec, il approchait son chariot pour le remplir », ainsi que le raconte Antxon Aguirre Sorondo (Pays basque, terre et gens, Elkar, 2004), sans doute le meilleur connaisseur de cet office. Pourtant, le plus souvent, l’hondartzaile était contraint de s’immerger jusqu’à la taille, chaussé d’espadrilles, revêtu de vieux habits et d’un sac de toile grossière, la combinaison néoprène n’étant pas à l’ordre du jour en ces années d’avant surf et autres activités sous-marines. Il s’agissait de se changer aussitôt après l’immersion qui pouvait durer deux heures. Après avoir chargé son fruste butin à la pelle, quelque 15 tonnes (1 300 k par mètre cube) aux deux extrémités de l’embarcation, il fallait, profitant de la marée montante, s’en retourner en amont, pour à nouveau charger des camions. Un hondartzaile gagnait 50 pesetas par mètre cube (compte tenu de l’érosion monétaire, une moyenne aujourd’hui de 125 euros par voyage, N.D.L.R.) une rétribution supérieure à celle d’un ouvrier spécialisé du Gipuzkoa, rappelle Antxon Aguirre Sorondo, (Los areneros gipuzcoanos), lequel précise que nombre d’entre eux étaient d’anciens rameurs de trainières qui, l’hiver, pêchaient aussi l’angula (civelle). Le sable était utilisé dans la construction pour la fabrication du mortier, dans les vergers, pour la litière du bétail. Un travail épuisant dont la rentabilité idéale se situait entre les mois de novembre et avril, c’est-à-dire les plus rudes quant aux températures et aux taux d’humidité. Un office qui n’était pas sans séquelles ; la plupart des hondartzaile étaient perclus de rhumatismes et rongés par des arthroses précoces. Parmi les plus célèbres d’entre eux, il faut citer sans doute Florentino Goikoechea Beobide (1890-1980), natif de Hernani. Il commença le métier à 18 ans – il le mène parallèlement à la contrebande – puis en 1936, fuyant le franquisme, se réfugie à Ciboure. Durant le deuxième conflit, il s’illustra entre 1942 et 1944 au sein du réseau Comète en faisant passer la frontière à 227 personnes. Il fut un temps où les rivières, en participant au quotidien des hommes, ne se contentaient pas de couler.

Mots-clés/Hitz gakoak : Sablier : hondartzaile Marée : mare, itsasaldi Collecte : bilketa Humidité : hezetasun


LIEU

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XEMEIN Markina-Xemeinen, Bizkaiko bihotzean, Arretxinago San Migel baselizan harri meta izigarri bat, kokatzen da. Sincretismoaren adibide interresgari bat.

t e x t e Txomin Laxalt / photographie Santiago Yaniz Aramendia

usqu’en 1952, Xemein fut une commune à part entière avant qu’elle ne partage sa destinée avec Markina, sa première voisine. Fondée en 1355, Markina-Xemein est la première Villa - désignation juridique pour une bourgade ayant bénéficié de privilèges au long de son histoire - biscayenne que traverse le Chemin de Saint-Jacques dit du Nord ou de la Côte. Seul le jacquaire pourra vraiment profiter d’un centre-ville émaillé de palais baroques du plus bel effet et qui, à la faveur de ses murailles, entretient une ambiance médiévale. Le visiteur véhiculé n’y sentira pas le besoin de l’étape et passera à côté de l’une des singularités d’Euskal herria. Arrimé entre une colline boisée et le béton qui s’avance inexorablement, le lieu ne paye pas de

HARRIEN SEKRETUA

tracter un énorme cube de pierre. Deux d’entre eux, anachroniques dans un environnement par trop urbain, entament une éternité minérale, enserrés dans un fourreau moussu. Que ce soit au travers du marbre de ses carrières, du divertissement ou de la religion, MarkinaXemein, au long de son histoire, a partie liée avec la pierre. La curieuse configuration du sanctuaire laisse entendre une volonté d’étouffer, sans l’occulter tout à fait cependant, un pan de la mémoire collective. Au lieu de l’espace souhaité libérateur, s’ouvrant généralement à l’entrée de tout lieu sacré, c’est une déroutante impression à la fois de confinement et de gigantisme qui étreint le visiteur alors qu’il se heurte au monstre minéral envahissant la presque totalité du sanctuaire gigogne d’Arretxinaga (arri, la pierre, eutsi soutenir, aga, le lieu). Trois rochers démesurés empilés et solidaires entre eux, abritent un autel, voire l’ensevelissent presque, formant une chapelle dans la chapelle. Illustration saisissante de syncrétisme, l’église a bien été édifiée autour des bétyles pour célébrer un culte tardif à Saint Michel lequel, de toute évidence en supplante un plus ancien. Chaque année, au 29 septembre, la légende de celui qui terrassa le dragon infernal rallume ses feux sans pour autant empêcher le réveil de cultes païens maintenus à distance sur le parvis. Ce jour-là ils sont nombreux à venir se serrer autour des mégalithes et de la statue de l’archange, en chantant : Mikel dugu, guk zaindari, gorde, gorde Euskal herria, Arretxinagako harkaitz artean, hor daukazu zure toki maitea (Nous avons Michel, notre gardien, garde, garde Euskal herria, entre les pierres d’Arretxinaga, tu as là ton abri aimé), célébrant ainsi les noces arrangées des pierres magiques avec un saint très chrétien. Des textes datés de 1451 font remonter l’édification de l’ermitage entre les XIe et XIIe siècles. Le XVIIe siècle consacra définitivement l’ermitage au culte de Saint Michel, un saint ubiquitaire en Euskal herri où les pierres levées, grottes et autres demeures légendaires, le disputent aux Jentilak, selon la tradition, les premiers habitants d’avant une christianisation tardive. La mémoire collective rappelle que les pierres géantes d’Arretxinaga possèdent des propriétés particulières dont celle qui permet à un homme de trouver l’âme sœur avant un an pour peu qu’il se glisse par trois fois sous les rochers du sanctuaire. Entre deux mythes il est bon de choisir le plus avantageux… ou jouer de l’accommodement.

LE SECRET DES PIERRES

Mots-clés/Hitz gakoak : Pierre : harri Culte : kultu Sacré : sakratu Géant : erraldoi

mine. Rustaud, curieusement hexagonal, coiffé d’un campanile à embrasure destinée à la cloche, dérisoire de taille par rapport à l’ensemble, haut de toit et d’une austérité déconcertante, le sanctuaire de Arretxinagako San Miguel (Saint Michel de Arretxinaga) sommeille à l’ombre de hêtres hâves. Le calcaire des pierres de taille confère néanmoins puissance à ce lieu consacré. Sur le parvis, une mauvaise herbe perce entre les pavés disjoints, délimitant une aire de traînage destinée à cette discipline de jeux agraires consistant, pour un attelage de bœufs, à


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