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LES INÉGALABLES CHURROS DE LA MAÑUETA
le magazine
Depuis 145 ans, rue Mañueta, on confectionne les meilleurs churros de la Péninsule. Une histoire de famille. Aujourd'hui la 5e génération.
Mañueta karrikan, duela 145 urte, penintsulako txurro hoberenak egiten dira. Familiako historio bat, bostgarren belaunaldikoa.
SAVOIR-FAIRE ET PASSION La Mañueta ? Une incontournable séquence familiale pamplonaise qui perdure depuis 1872. Située au 8 de l’étroite rue Mañueta, la plus célèbre churrería de la péninsule – elle n’ouvre que durant les fêtes et les dimanches d’octobre – ne brille pourtant ni par sa vitrine, il n’y a en pas, ni par un décor particulier, seule la désigne une façade intensément corail que barre un frustre vantail de bois s’ouvrant sur un comptoir fonctionnel. Le reste ? L’avenance, le sourire toujours, la passion pour un vieil office et un
savoir-faire unique pour une pâtisserie simple mais, ici au goût incomparable. Elias, 68 ans, expert-comptable de son état, dans un français impeccable a bien voulu nous confier un secret qui n’existe pas. « Une affaire de famille dont les membres pratiquent tous d’autres métiers, et de passion surtout. Moi-même de la 4e génération avec mes enfants Elias, 41 ans, et Oihana, 37 ans, de la 5e génération, nous travaillons ensemble mais il y a aussi Mikel, Renata, Juan, Nicolas, Itsasoa, les neveux et les nièces. » Car enfin, le churro ce n’est jamais que de la farine, de l’eau, du sel et de l’huile. Mais à la Mañueta, la farine de blé et l’huile d’olive vierge sont rigoureusement sélectionnées : « nous ouvrons deux samedis avant les Sanfermines pour les tester », avait expliqué Elias. Quant à la cuisson, elle est unique, et pour en saisir toute la subtilité, il faut descendre dans les entrailles brûlantes de la Mañueta, espace crépusculaire léché par les flammes, à mi-chemin entre fonderie et athanor d’alchimiste. La confection des churros relève d’un incroyable ballet, d’une gestuelle à la précision chirurgicale. Dans les chaudrons, les mêmes depuis 145 ans, saturés d’huile bouillante chauffée exclusivement au bois de hêtre qui leur donnera ce fumet unique, les façonniers, à l’aide d’une énorme seringue et par de larges gestes en cercles concentriques, y projettent la pâte qui, instantanément, se transmue en goûteuses roscas, ces immenses spirales d’or aussitôt récupérées à l’aide d’une longue pince. Une fois découpées, elles équivaudront exactement à douze churros et demi. « Les churros sont préparés au fur et à mesure des commandes, ce qui explique les files d’attente », confiera Elias. La famille Elizalde ne consacre que peu de temps aux Sanfermines. La corrida tous les jours, un verre que l’on s’accorde après les taureaux, guère plus. Une nouvelle mâtinée de labeur va vite débouler comme se profile déjà la 6e génération, foi d’Elias : « Mes petits enfants raffolent des churros, un signe non ? »
MOTS CLÉS HITZ GAKOAK
Pâte : ore Chaudron : galdara Hêtre : pago Frire : frijit
PAMPELUNE AUX DEUX VISAGES
Errance
S’abandonner au hasard, pour plonger dans l’intimité de Pampelune et de ses habitants.
Txantrea
Ce n’est pas le plus beau quartier, ni le plus branché, mais il incarne une aventure collective unique.
Ville capitale
Se plonger dans l’histoire de Pampelune, c’est parcourir celle du royaume de Navarre, de ses conquêtes et de ses pertes…
L’envers du foulard
ibilka le magazine - PAMPELUNE - NUMÉRO HORS SÉRIE - UDAZKENA / AUTOMNE 2017
MAÑUETAKO TXURRO PAREGABEAK
Sanfermines, six heures moins le quart du matin. Quand certains occupent déjà le vallado (barrières) de l’encierro pour ne rien manquer du spectacle, d’autres préfèrent se joindre à l’impressionnante file s’étirant devant la churrería la Mañueta, laquelle ouvrira ses portes à six heures précises. La lente procession gourmande ; noctambules et frais levés s’y croisent joyeusement ; ne cessera plus jusqu’à onze heures, heure traditionnelle de fermeture du vénérable établissement. Les Géants et Cabezudos ne s’y trompent pas lesquels, durant les fêtes, lors du défilé matinal quotidien, s’y arrêtent. Gaiteros et porteurs marquent le pas et Elias Elizalde, de la 4e génération de la Mañueta, txistulari émérite, traditionnellement, leur présente un plateau des inégalables churros avec un petit verre de patxaka (liqueur navarraise de pomme parfumée à l’anis). Un succulent accompagnement.
Sait-on vraiment ce que les Sanfermines représentent pour les Pamploneses, comment ils les vivent ? Plongée dans l’envers du décor.
Rencontres
Des peñas aux célèbres churros, en passant par les mythiques xahako Z.Z.Z, rencontres.
Spécial Pampelune
PAMPELUNE sommaire
La capitale de la Navarre est surtout connue et fréquentée pendant la célèbre semaine de juillet, celle des Sanfermines. Découvrons-la les 51 autres semaines !
4-Coups de cœur Jorge Moreno est un reporter-photographe installé à Pampelune. Il a réalisé les reportages de ce numéro, et nous à ouvert ses archives pour nous offrir ses coups de cœur sur sa ville.
12-Histoire Fortement marquée par l'occupation romaine Pampelune fut, tour à tour, capitale des Vascons, puis du Royaume de Navarre.
18-Ezkaba Pas facile de vivre ensemble, lorsque ce sont les bourreaux qui ont pardonné aux victimes ! Pourtant, la forteresse d'Ezkaba fournit la preuve que cela peut devenir possible.
22-César Oroz Ses dessins, comme autant de coups de griffe, régalent, entre autres, les lecteurs du Diario de Navarra.
24-Libre parcours Célèbre dans le monde entier pour ses incomparables Fêtes, Pampelune n'en demeure pas moins une des villes les moins connues en dehors de l'inoubliable semaine de juillet. Alors, laissons libre cours à notre errance et partons à la rencontre de ses habitants.
36-Peñas On voit leurs banderoles pendant les Fêtes, mais toute l'année les peñas pamplonaises remplissent une vraie fonction sociale.
38- Z.Z.Z Elles sont mythiques les gourdes signées des trois Z, fabriquées à Pampelune depuis plus d'un siècle.
40-San Fermin Les célèbres Fêtes sont avant tout celles des Irundarrak. Elles obéissent à des règles bien précises. Petite initiation en compagnie de Miguel Izu qui nous enseigne les différentes façons de les célébrer.
52-El Drogas Enrique Villarreal Armendariz, El Drogas, est le créateur du groupe mythique Barricada. Il nous raconte son histoire.
54-Txantrea De prime abord le quartier n'a rien d'exceptionnel. Il serait même plutôt inintéressant. Mais dès que l'on plonge dans son histoire et celle des habitants, on découvre pourquoi Txantrea est bien davantage qu'un simple quartier.
60- Les churros Depuis 145 ans, la même famille fabrique les incomparables churros de la rue Mañueta.
ESPACES VERTS Comme dans un phalanstère des bouts de jardinets amoureusement cultivés.
RENCONTRES Les habitants entretiennent coquettement intérieurs et extérieurs de leurs maisons.
Pampelune sans Fermin
Société éditrice : BAMI Communication Rond-point de Maignon, Avenue du 8 mai 1945 BP 41 - 64183 Bayonne bami-communication@bami.fr Directeur de la publication : Jean-Paul Inchauspé Coordination : Jean-Paul Bobin bobinjeanpaul@gmail.com Textes : Txomin Laxalt Direction artistique : Sandrine Lucas Fabrication : Patrick Delprat Iru Errege Le Forum 64100 Bayonne N° ISSN 2267-6864 Crédit photos : Jorge Moreno, sauf p.20 (bas) : Éric Soulé de Lafont Photo couverture : Jorge Moreno
Pampelune est un paradoxe. Peu de villes sont, en effet, aussi célèbres tout en étant aussi mal connues ! Pourtant, libérée des bacchanales de juillet, la capitale navarraise - antonomase de la Fête - s'abandonne volontiers et découvre ses atours sans fard. La Plaza del Castillo se révèle en son quadrilatère imparfait. On y déambule, on y flâne, apercevant là un palais baroque surmonté d'une tour, ici des façades colorées du XVIIIe ; on contemple l'admirable élégance du Café Iruña ; et que dire d'Estafeta, vide comme une élision du souvenir… Des jardinières sont accrochées aux fenêtres, parfois des ikurriñas, ailleurs du linge pend, et comme partout des graffitis urbains… Une lumière dorée et complice s'y pose. Pampelune est habitée ! C'est cette ville-là, celle des Pamplonesas et des Pamploneses que nous avons voulu rencontrer, tous quartiers mêlés. Aux Archives de Navarre, une maquette favorise une première approche de la capitale navarraise ; elle se révèle enserrée entre ses murailles, dominée par les sommets montagneux, tapissée de parcs et jardins. Une ville à taille humaine ! C'est en compagnie du reporter-photographe Jorge Moreno, citoyen d'Iruña, qui nous a ouvert son carnet d'adresses et ses archives photographiques – qu'il en soit remercié – que nous avons débuté cette exploration dans l'histoire, grande et petite, à travers l'architecture, et surtout dans le quotidien de la ville. De rencontres en surprises, « on a tiré les rideaux de toutes les hypothèses », comme nous le conseillait Fernando Pessoa. Nous nous sommes abandonnés à ce voyage dans l'intimité de la ville et nous vous invitons à nous y rejoindre, en espérant que vous prendrez autant de plaisir à le lire que nous en avons pris à rencontrer cette Pampelune sans Fermin…
Jean-Paul Inchauspé, Directeur de la publication
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civilisation(s) Une exposition qui s'appuie sur les nouvelles technologies pour interroger les origines de l'Occident, plutôt des Occidents. À voir à la cathédrale.
arÈnes et tourisme On entend le souffle des taureaux, le bruit des sabots sur l'asphalte, dans cette évocation de l'encierro présentée aux arènes, parmi un parcours de visite très original.
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photographies Jorge Moreno
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Dans les années 60 la ville, trop à l'étroit dans son enceinte fortifiée, crée de nouveaux quartiers À l'architecture parfois futuriste
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avenue del ejército L'avenue del Ejército traverse Pampelune, de la place de la Paz à la place Juan XXIII. Elle relie le centre-ville au quartier San Juan, l'un des plus animés.
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El edificio singular Gratte-ciel le plus haut de Pampelune et de Navarre, il est le fruit de la politique municipale des années 1960, et culmine à près de 70 m.
vieux quartier Avec ses rues étroites et entrelacées le vieux quartier n'est plus le cœur de Pampelune. Aujourd'hui, la ville et la vie se développent ailleurs.
Citadelle et parc Une étoile à cinq branches symbole de l'architecture militaire de la Citadelle ; la Vuelta del Castillo qui l'entoure forme le poumon vert de Pampelune.
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280 000 m 2 D'espaces puBlics autour De la citaDelle, DestinĂŠs au sport, aux loisirs et Ă la culture
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Victor Hugo écrivait : dès que le soleil est couché, la ville s'éveille, la vie tressaille partout, la joie étincelle, c'est une ruche en rumeurs. »
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Corte Ingles 7 300 plaques d'aluminium de 30 kg chacune et d'1,80 m par 0,60 m pour cette façade, œuvre des architectes José Antonio Martinez Lapeña et Elías Torres, en 2005.
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Confluence La Plaza Príncipe de Viana, à la confluence de plusieurs grandes artères, dont l'Avenue de Navarre, est un endroit animé de jour comme de nuit.
iruña, arras Hiriburu ZaHar bat
iruña ez da bakarrik uztailaren hiri eroa. luzaz baskoien hirinagusia izan zen eta gero nafarroako erresumarena, dudarik gabe kapitulu garrantzitsu bat europako historian.
Histoire
pampelune, une très ancienne capitale Iruña n'est pas seulement la folle de juillet. Longtemps elle fut capitale des Vascons puis celle du royaume de Navarre. Un chapitre important de l'histoire de l'Europe.
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texte Txomin Laxalt / photographies Jorge Moreno
ne pas ouBlier 1936 Rue San Antón (ci-dessous), deux plaques posées par l'Association des Familles de fusillés de Navarre commémorent les victimes de 1936.
s
ait-on bien que quand elle n’est pas Pampelune ou Pamplona la folle de la deuxième semaine de juillet, Iruña existe ? Que son saint patron, n’en déplaise à la confrérie internationale du foulard rouge, ne fut jamais le Fermín mais le très toulousain Sernin, Saturnino en Navarre, lequel est célébré entre Iruñdarrak chaque 29 novembre avec géants, cabezudos, kilikis et gaitas mais sans plus d’Américains, ni hordes sauvages ? Le saint prélat, il fut évêque de Toulouse, avait quitté les terres occitanes au IIIe� siècle afin d’évangéliser les païens vascons installés sur les bords de la rivière Arga huit cents ans avant notre ère, en un lieu dénommé Iluña, Ilun désignant alors en protobasque une place forte, hiri aujourd’hui désignant la ville. Point n’est besoin d’être fin stratège pour se rendre compte, alors que l’on dévale le col de Belate, de la situation idéale de la capitale navarraise posée à 440 m d’altitude dominant la cuenca (plaine), un amphithéâtre fertile. Ceux qui ont bien entamé le demi-siècle se souviennent – San Fermín, encore ! - de l’entrée à Iruña ; passé la station-service, on quittait la campagne pour aussitôt pénétrer dans le quartier historique d’une paisible capitale de province hérissée de clochers et clochetons à carillons languides. Aujourd’hui, la vieille Iruña compte près de 200 000 habitants, une conjuration de périphériques entre lesquels s’intercalent le lacis de zones industrielles et commerciales aux enseignes ubiquitaires, les infinies séquences de giratoires. Quant aux villages environnants à églises forteresses et portes charretières, en rejoignant Iruñerria, la communauté d’agglomérations (360 000 habitants), ils ont perdu leur nonchalance paysanne pour se muer en communes dortoirs.
Ville roMaine Que l’on ne se trompe pas, Iruña/Pamplona se souvient plus que jamais d’un temps où les Basques eurent des rois – pas moins de 36 – qu’elle fut la capitale d’un grand royaume pyrénéen pour ne pas dire européen jusqu’à la fatidique année 1512. « Son histoire, l’enfance de Pamplona sont inscrites dans la sage disposition de ses pierres mais aussi dans l’outrage de ses murs démantelés », écrit l’historien de la Navarre, Tomas Urzainqui Mina. Cet infatigable chercheur travaille à réhabiliter une histoire navarraise tronquée par un gouvernement central qui, pour asseoir une obsessionnelle identité nationale, échafauda de très discutables mythes fondateurs. Sur ce point, le géographe grec Strabon est catégo-
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rique qui écrivit : « Iruña était considérée comme la ville principale des Vascons. » Ce à quoi Luis Villasante Kortabitarte, père franciscain, érudit et académicien à l’Euskaltzaindia, rajouta : « L’euskara est l’âme, la substance même de la Navarre. » Quant au chroniqueur musulman du Xe siècle, Al-Himyari, il dira des Vascons qu’on « les rencontre au milieu des montagnes et des vallées profondes… habitants pauvres, mangeant peu et pratiquant le brigandage. La majorité parle basque (al-baskhiya). » En 75 av. J.-C, le proconsul Pompeio (Pompée) est missionné par Rome pour, aux côtés de mercenaires vascons, mater une fronde menée par Quintus Sertorius, propréteur de la province d’Hispanie. Pompeio découvre Iruña, en apprécie sa position stratégique face aux Pyrénées d’où vient toujours le danger et s’y installe, transformant la localité vasconne en une urbs (cité) et, apanage des conquérants l’appelle Pompeio, reprenant cependant le suffixe basque ili ou ilun. Le processus de romanisation se met en marche. « Comme dans les autres cités romaines d’Europe, Pamplona participe d’un mouvement d’expansion et d’embellissement qu’anime à cette époque la politique active des habitants, une prospérité due à la Pax romana », rappelle Tomas Urzainqui. Preuve qu’à Iruña pour nourrir le quotidien, le passé est toujours présent, en 2003, le projet de réforme de la Plaza del Castillo (Gazteluko enparantza), épicentre de la capitale navarraise, entretint une polémique qui prit un tour politique et entraîna de violentes manifestations. Initialement, le chantier prévoyait un aménagement piétonnier en surface et un parking souterrain. Les premières excavations mirent à jour l’extraordinaire cité romaine avec de
l' é g l i s e À l'Œ u v r e l'opus dei, l'œuvre de dieu en latin, est créée en 1928 par Josemaría escrivá de balaguer, originaire de l'aragon. c'est aujourd'hui la seule prélature personnelle au sein de l'église catholique, à savoir qu'elle est régie par le droit canonique général et par ses propres statuts. dès le coup d'état franquiste, l'opus dei devient une active compagne de route du nouveau régime. dans le Monde diplomatique (2005), françois normand la qualifie ainsi : « Milice religieuse au comportement de secte, héritière d'un anticommunisme militant, puissance à la fois économique et politique, l'Œuvre exerce une influence multiforme sur l'église, mais aussi sur les pouvoirs temporels, qu'elle cherche à infiltrer. » c'est tout naturellement qu'elle s'est implantée en navarre aux sympathies franquistes affichées et particulièrement à pampelune. en 1952, elle y fonde l'université de navarre : « c’est une université d’inspiration chrétienne qui a pour mission la recherche et la transmission de la vérité », peut-on lire sur son site. d'autres parleraient de connaissance ! pluridisciplinaire, l'université de navarre, classée régulièrement parmi les meilleures universités de la péninsule, possède en son sein, notamment, une clinique et une école de communication qui a formé quelques-uns de journalistes espagnols les plus en vue, ce qui permet à « l' Œuvre » d'exercer une influence idéologique certaine et de s'opposer aux lois de progrès social, telle que celle, par exemple, qui autorise l'interruption volontaire de grossesse.
Histoire
Fouler le pavĂŠ de Pampelune, c'est parcourir 1 000 ans d'histoire
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tensions internes. Fouler aujourd’hui son pavé de la Navarreria à San Nicolas, de la Citadelle aux remparts, un guide à la main ou, de poteo, foulard rouge noué, c’est parcourir inlassablement 1 000 ans d’histoire. Les Navarrais de souche se fixèrent dans le vieux quartier Navarrería autour de la cathédrale Santa Maria où seront couronnés les souverains de Navarre. Les habitants ont une vocation agricole et à la Judería, vivent les Juifs de la ville. À partir de 1100, les nouveaux venus français, s’installent à l’ouest de la Navarrería, autour de leur église Saint-Cernin, laquelle donnera son nom au nouveau bourg. Ayant obtenu en 1129 des privilèges de la part du souverain, les Francs vivent en marge de la population. magnifiques thermes, de remarquables mosaïques, des piscines, un habile réseau d’égout, les traces de l’opus signinum ou technique aboutie d’étanchéité encore visible, le système pratiquement intact d’hypocauste ou chauffage par le sol typique des cités romaines, et même un menhir. Il fut aussi exhumé un cimetière musulman avec 190 squelettes tournés vers La Mecque, bref une ville sous la ville. Les vestiges découverts contraignirent à repenser les thèses historiques défendues jusqu’alors, en particulier autour des origines d’Iruñea et, par ricochet celles, volontairement occultées, de la domination maure et des alliances entre souverains navarrais et arabes contre la Castille. La gouvernance espagnoliste (UPN, Partido Popular, Partido Socialista) alors en place, préféra, vu le risque, continuer les travaux quand l’opposition, soutenue par une grande partie de la population criant à la spoliation, souhaitait une mise en valeur de cet exceptionnel patrimoine. Le béton l’emporta sur la mosaïque, la crypte archéologique fut engloutie et les précieux restes servirent de remblai au nouveau quartier de Lezcairu ! L’année 406 sonne la fin de l’empire romain quand les tribus dites barbares traversent le Rhin, jusqu’à parvenir aux pieds des Pyrénées. Romains et Vascons tentent bien d’en empêcher le franchissement, en vain. Suit une époque incertaine, une succession de rapines, de rezzous et de massacres. Iruña connaît une première destruction avant de passer sous la domination des Visigoths avec lesquels les Vascons entretiendront de détestables relations, d’autant plus qu’Iruña, christianisée dans la douleur, devient siège épiscopal de l’église visigothe.
1512, année fatidiQue Au XIIe� siècle, avec de nouveaux émigrants francs et surtout le passage des pèlerins de Saint-Jacques, naît une nouvelle paroisse dont le nom, San Nicolas – il sonne familièrement aux oreilles des habitués de la semaine de juillet ! – désignera aussi le quartier. Les trois entités vont s’enfermer chacune derrière des murailles. Les conflits seront incessants et sanglants, la noblesse de la Navarrería préférant une alliance avec la Castille quand les Francs de San Cernin et San Nicolas sont favorables au maintien de la couronne navarraise. En 1423, Carlos III de Navarre, en unissant les trois quartiers pour former une seule juridiction, met fin à cette guerre civile. Il fait ériger symboliquement, à la convergence des trois quartiers, le bâtiment que l’on connaît aujourd’hui comme la mairie, cœur battant d’Iruña le 6 juillet à midi. 1512 est une année fatidique pour la Navarre ; les troupes de Ferdinand de Castille, sous les ordres du duc d’Albe prennent la ville au souverain navarrais Jean d’Albret II sans coup férir. Le souverain castillan promet cependant aux Navarrais le maintien de leurs privilèges (fueros).
la Ville se transforMe Au VIIIe� siècle, les Musulmans occupent la ville mais les forces vasconnes unies aux Banu Qasi, une lignée d’origine wisigothe convertie à l’Islam, vont permettre en les chassant, l’installation sur le trône de Iñigo Arista, premier souverain navarrais (816-851) et comte de Bigorre. Entre-temps, l’empereur Charlemagne, dans une malheureuse équipée contre le Maure mettra à sac la ville. L’aventure se terminera comme l’on sait, au fond du ravin de Bentarte (Roncevaux, 778) dans le guet-apens ourdi en représailles par les Vascons alliés à une branche de l’Al-Andalus. L’arrivée depuis Toulouse des Francs va transformer la physionomie de la ville mais aussi alimenter des
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siÈge de pampelune Jorge Moreno effectue un travail de reconstitution historique, d'une extrême rigueur, à travers la photographie. Ici, l'infanterie française des troupes napoléoniennes, au pied des murailles de Pampelune, lors du siège de la ville, en 1813.
Histoire
Après la mort de Franco, en 1975, la question territoriale se posa à nouveau
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o u v r ag e s co n s u lté s : Historia de pamplona y de sus lenguas, José María Jimeno Jurió, éditions txalaparta. nabarralde, entrevue du 26-01-2010 avec tomás urzainqui Mina
C’en est cependant fini de la grande lignée des rois de Navarre. L’historien Tomas Urzainqui dira, dans une interview à Nabarralde, le 26 janvier 2010 : « Si l’on avait évité l’entrée du duc d’Albe, en 1512, en résistant au lieu de s’en retourner de l’autre côté des Pyrénées, l’Histoire en aurait été changée. Ferdinand le Catholique mort en 1516, nul ne se serait avisé de reprendre la conquête. » L’histoire d’Iruña n’est en fait que celle de la construction d’une immense caserne ; au XVIe�siècle, les murailles cernent la ville et les jacquaires y pénètrent comme aujourd’hui du reste, par la Porte de France. Les meilleurs architectes militaires de la péninsule s’efforceront de corseter la cité. L’œuvre maîtresse, un modèle européen du genre, reste sans conteste, la citadelle achevée en 1645, une étoile de pierre de 5 km de périmètre dont les poternes, aujourd’hui, n’invitent plus qu’aux seules patrouilles digestives, joggings du dimanche et les demi-lunes aux confidences amoureuses.
opposée À la républiQue En 1923, Iruña est une ville de 33 280 habitants et les murailles commencent à tomber pour lui permettre de s’accroître et surtout de respirer enfin à la modernité après un XIXe� marqué par l’invasion napoléonienne et trois guerres carlistes. La terrible ambiguïté va naître dans les décisives années trente. Les structures sociales navarraises sont rurales, conservatrices et fortement marquées par le catholicisme. L’industrie étant peu développée, il n’existe pas de tradition ouvrière. Alors que s’ouvre le débat du statut d’autonomie, seules la droite autonomiste (Parti Nationaliste Basque) et une certaine frange du carlisme y adhèrent. Après les élections nationales de février 1936 qui voient la victoire des gauches, la Navarre, opposée à la République, va être le creuset du soulèvement de juillet 1936. Le général Emilio Mola, l’un des cerveaux de l’insurrection – il s’était déjà illustré dans la répression contre les militants républicains – va être nommé, erreur du nouveau régime, gouverneur militaire d’Iruña où, en toute quiétude, il pourra comploter. Le 16 juillet 1936, la Navarre adhère au soulèvement mais la répression qui s’abat sur les opposants de la province est féroce : 3 500 exécutions dont 298 dans la seule Iruña. Avec la mort de Franco (1975) s’ouvre la période de la transition et à nouveau, la question territoriale se
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pose : la Navarre doit-elle se joindre au Pays basque en un unique statut d’autonomie ? Aujourd’hui Iruña/Pamplona est la capitale de la seule Communauté forale de Navarre pour les uns, celle du Pays basque pour les autres. La prestigieuse mais, pour ses options politico-métaphysiques, très critiquée Université de Navarre créée selon la volonté de José María Escrivá de Balaguer (1902-1975), fondateur de la sulfureuse et influente Opus Dei y est ancrée depuis 1952. Économiquement, la ville se partage entre industrie (Volkswagen) et services. Le palais des rois de Navarre n’abrite plus désormais que les archives de la province. Avec la nouvelle gouvernance (2015-2019) – une alliance des partis abertzale et la de la Gauche unie – une nouvelle approche territoriale se dessine sans pour autant régler les antagonismes identitaires. La Navarre cependant a renoué de fructueuses relations avec sa voisine, la Communauté autonome d’Euskadi, les provinces du nord des Pyrénées et l’ensemble de la région Aquitaine. « Pampelune a été fondamentalement capitale de la Navarre et la Navarre fut l’État dont au VIIIe� siècle se dotèrent les Basques pour survivre comme peuple. Pour cela, Pampelune a été capitale du Pays basque dans la mesure où elle a été capitale de la Navarre », confiait son maire Joseba Asirón dans une entrevue en septembre 2015. Aussi évident que le txupinazo d’un 6 juillet à midi !
une date décisive En 1522, la bataille d'Amaiur (Navarre), qui opposa les troupes franco-navarraises à l'armée espagnole, marque la fin du royaume de Navarre.
MOTS CLÉS HITZ GAKOAK Royaume : erresuma Capitale : hirinagusi Murailles : harresiak Fouilles : indusketak
MéMoire
texte Txomin Laxalt / photographies Jorge Moreno
eZKaBa l’ H i s t o i r e
et la mémoire Le vivre ensemble est l'objectif principal visé par la Direction générale des Droits de l'Homme et de la Paix du gouvernement de Navarre. Ezkaba en est un bon témoignage. .
d
eZkaba, Historia eta MeMoria nafarroako Gobernuko bakearen, bizikidetzaren eta Giza eskubideen Zuzendaritza nagusiaren programa helburu nagusia bizikidetza da. iruñean, ezkaba lekukotasun on bat da.
Depuis le mont Ezkaba (895 m) ou de San Cristobal, le panorama sur Pampelune et sa cuenca est de toute beauté. Vers le nord-est, les Pyrénées déploient leur fresque et plus près, la montagne navarraise se perd vers le Kintoa (Pays Quint) au nord, et les vagues pétrifiées de la sierra de Aralar à l’ouest. Un déferlement végétal s’interpose que mouchettent quelques villages, premiers voisins de la capitale navarraise : Unzu, Cildoz, Orrio, Maquirrain, Oriquain. Depuis Pampelune, les lacets d’une mauvaise route n’en finissent pas de ligoter les flancs à la végétation crépue de cette montagne au sommet arasé. D’en bas, rien ne désigne cette sierra, si ce ne sont de hideuses antennes. Ezkaba, c’est le sommet familier d’Iruña que l’on ne regarde même plus et que chacun s’entend à désigner pourtant comme endroit sinistre. Pour peu qu’il soit au fait de son histoire, le visiteur qui s’y rend pour la première fois ne peut s’empêcher de se projeter quatre-vingts ans en arrière, gommant d’un coup le paysage pour s’attacher au monstre de pierre tapi sous terre et dont seul le dos grisâtre affleure.
un fort transforMé en prison
aBsurde La vanité le partage à l'absurde dans cet univers digne d'un roman de Dino Buzzati. Malheureusement la forteresse d'Ezkaba est bien réelle.
Le fort Alfonso XII, d’une surface de 180 000 m², destiné à protéger Iruña, fut bâti entre 1878 et 1908 et, paradoxalement, ne servit jamais, l’avènement de l’aviation ayant modifié les techniques militaires. Dès 1934, il devint prison destinée aux politiques et, en 1936, l’amnistie républicaine permit d’en dénoncer les conditions désastreuses de détention. Dès juillet 1936 - et jusqu’en 1945 - il retrouve sa vocation pénitentiaire. En 1937, ce sont quelque 3 000 prisonniers républicains et gudaris (soldats de l’armée basque), syndicalistes et politiques qui, littéralement y croupissent. Il n’est que d’errer dans ce lugubre labyrinthe souterrain fait d’escarpes et contre escarpes, couturé d’interminables tunnels, d’escaliers chronophages, de salles humides devenus cachots d’où, sous formes de graffitis, nous parviennent les mots des damnés. On y mourait de tuberculose, de faim, de mauvais traitements et les seuls échos qui parvenaient à la ville étaient ceux des exécutions. Le soir du 22 mai 1938 a lieu l’évasion de 795 prisonniers - la fuite la plus massive de l’histoire européenne. S’ensuivirent alors une fuite éperdue vers la frontière et une épouvantable chasse à l’homme menée par les requetes, certes, mais aussi par les
MéMoire À l'a B a n d o n L'entrée du fort, close comme une bouche mutique. Seuls les graffeurs et les mauvaises herbes investissent le lieu.
Hommage Au milieu, le monument érigé en mémoire des 795 prisonniers qui s'évadèrent le 22 mai 1938.
vue aérienne En bas, cette photographie aérienne d'Éric Soulé de Lafont montre bien l'importance de la forteresse d'Ezkaba.
dédale Tunnels, grilles qui résistent…, Ezkaba est un dédale dans lequel la mémoire refuse obstinément de se perdre.
habitants des villages alentour. Sur les 795 fugitifs, 585 furent repris, 207 exécutés, souvent là-même où ils furent repris,trois parvinrent à gagner Iparralde. Quatorze autres seront fusillés plus tard pour être les cerveaux de l’évasion. Entre 1942 et 1945, 131 prisonniers politiques y moururent, inhumés dans un périmètre malaisé sur les flancs d’Ezkaba, récemment mis à jour, dénommé « le cimetière des bouteilles », parce que des bouteilles contenant le nom des défunts et placées entre leurs jambes, permirent leur identification. Le fort d’Ezkaba, est un monument bien encombrant pour la Navarre tant pour la somme astronomique que demanderait la réhabilitation et l’entretien d’un bâtiment, modèle d’architecture militaire, que pour son poids sur les consciences. Ezkaba résume l’un des drames majeurs de la province.
3 500 eXécutions « La Navarre était une terre carliste, farouchement conservatrice, aux mains de grands propriétaires c’est pour cette raison qu’elle adhéra au premier jour à la rébellion militaire », nous explique José Miguel Gastón Aguas, professeur d’Histoire à l’Université publique d’Iruña et responsable de Memoría histórica. « La province paya pourtant le prix fort de la répression, 3 500 exécutions. Les racines du conflit étaient économiques et les principales victimes furent les partisans des mouvements de récupération juste et équitable des terres, les syndicalistes de l’UGT (Union Générale des Travailleurs) et les anarchistes, essentiellement dans la Ribera et la zone médiane (zone sud et centre de la Navarre). » La Loi Forale 33 du 26 novembre 2013 dite : De reconnaissance et réparation morale des citoyennes et citoyens navarrais assassinés et victimes de la répression en conséquence du coup d’état militaire de 1936, va mettre fin à 80 ans d’omerta, grâce au travail obstiné des collectifs de Memoría histórica. Pour ce faire, un programme a été mis en place par la Direction Générale pour la Paix, la Coexistence et les Droits de l’Homme qui les fédère. « Un projet ambitieux qui, sans rancœur aucune, permettra d’affermir les bases d’une société plurielle, démocratique et sans violence. Aujourd’hui 85 % du projet ont été réalisés et je sens autour de moi la tranquillité, l’apaisement quand nous y travaillons après tant d’années de silence et de peur. », nous rappelle José Miguel. « Il s’agit d’un long travail en amont, réalisé avec la collaboration de tous pour clarifier un passé souvent accablant, en cherchant la vérité et la justice afin de réparer les dommages causés, normaliser la vie sociale et politique et promouvoir une culture de la paix. » Une gageure en Navarre où deux mémoires,
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EN NAVARRE, LES MÉMOIRES DES VAINQUEURS ET DES VAINCUS ONT DÛ COHABITER
honteuses autant que mutiques, celle des vainqueurs et celle des vaincus, ont dû, pour le meilleur comme pour le pire, se côtoyer. Il ne se passe de mois sans que, sous la houlette de la société de sciences Aranzadi, ne soit mise à jour une fosse commune. Ainsi à Burutain, sur les indications précises de Martin Laguardia - 87 ans, sept ans au jour des faits - en avril 2017 sont exhumés six corps de fugitifs d’Ezkaba. « Nous sommes descendus de l’école avec le curé du village et nous avons tout vu, ils les fusillèrent devant nos yeux. » témoignera-t-il. « Cet homme n’avait rien oublié, au premier coup de pelle, les corps sont apparus », confie José Miguel. L’identification des corps répond à un cahier des charges précis. Une banque ADN a été créée pour, à la demande des familles, récupérer les traces ADN des personnes victimes de la violence du coup d’état. « La collaboration des familles est essentielle pour obtenir le maximum de renseignements. L’identification est un processus complexe qui se mène en comparant les éléments qu’apportent les familles avec l’information que les équipes de professionnels experts en identification des victimes, médecins, anthropologues, odontologues, obtiennent des corps récupérés dans le programme d’exhumations. »
distinGuer MéMoire et Histoire Un programme éducatif a été mis en place qui, grâce à des parcours didactiques, sur les lieux de mémoire, Ezkaba en l’occurrence, permet dans les écoles, de mener une réflexion autour de l’importance de la mémoire historique. Avec toutes les précautions d’usage, les classes assistent à des exhumations. « L’impact est considérable, à l’inquiétude se mêle un formidable intérêt. » Enfin, la loi forale 33/2013, citée plus haut, a imposé aux administrations publiques et entités privées, l’obligation de procéder au retrait des symboles, légendes et mentions franquistes (448 en Navarre) et l’annulation des distinctions, titres et honneurs liés au régime dictatorial. À Iruña, ce fut sans nul doute le retrait du pharaonique Monument aux Caídos (ceux qui sont tombés), des restes des généraux Mola et Sanjurjo - cerveaux de la rébellion avec Franco - qui eut le plus de retentissement. « Il est indispensable de distinguer histoire et mémoire. La mémoire ne nie pas l’histoire, elle observe le passé de manière critique pour un consensus démocratique. Il s’agit en définitive de récupérer une mémoire démocratique en Navarre en retirant de notre espace public des symboles représentant une agression aux valeurs de paix, de liberté et de démocratie. », avait conclu Juan Miguel. Le juste prix de l’inestimable vivre ensemble.
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MOTS CLÉS HITZ GAKOAK Fosse commune : hobi komun Exécution : hiltze Évasion : ihesaldi Reconnaissance : ezagupen
caricaturiste
l
a fenêtre de son studio fait pratiquement face au Gouvernement de Navarre, « une bonne façon d’être au courant de l’actualité » nous avaitil confié, une manière de démontrer que la rue reste un bon indicateur quand on est dessinateur de presse. César Oroz (Iruñea, 1970) aime la Navarre, Pampelune sa ville, et surtout ses gens. César Oroz – ou Oroz, c’est ainsi qu’il signe ses tiras, entendez, scuds – vit et se nourrit de la rue, de ses rumeurs, de ses conversations. Comme tout vrai Pamplones, il fait partie d’une peña (Irrintzi) et demeure aux abonnés absents durant les neuf jours de juillet. Les 356 autres jours de l’année, à l’heure du petit noir du ou du poteo, depuis le fauteuil du salon familial ou depuis le siège d’un transport public, le Navarrais a rendez-vous avec l’incontournable et attendu Punto final, (le point final), sa vignette qui clôt la dernière page du quotidien El Diario de Navarra. Le studio révèle le personnage et, sans jeu de mots, son quotidien : un maillot de l’Osasuna au mur, la croquignolesque statue grandeur nature d’un mozo, façon bande dessinée, fait de papier mâché, en tenue blanche et rouge, journal à la main, contre le bois de l’encierro ; et tout autour de lui, les planches de ses cibles préférées : des Sanz, des Zapatero, des Rajoy, du roi, du député, du maire, du sportif, et la foule des anonymes dont il fait son moût. Ne nous y trompons pas, cet homme courtois, amène et tout sourire, quand il dégaine, cartonne dans tous les sens et a l’œil qui pétille quand il fait mouche. « Personne ne saurait me mettre d’étiquette, ce qui m’importe c’est d’être honnête avec moi-même, d’avoir une cohérence », se défend-il quand on lui rappelle que, depuis 1991, il collabore avec le Diario de Navarra, journal conservateur s’il en est. « J’ai quitté l’hebdomadaire monarchiste ABC avec lequel j’ai collaboré occasionnellement, car entre autres, ses idées nationalistes espagnoles ne me convenaient pas » affirme-t-il soudainement sérieux
césar oroZ o u l’a r t d e la déMesure Le crayon de César Oroz dessine les contours d'un théâtre social. Les Sanfermines mais aussi la politique, le sport, tout l'inspire, dans la démesure.
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texte Txomin Laxalt / photographie Jorge Moreno
césar oroZ edo neurriGabekeriaren artea césar orozen arkatzak marrazten ditu gizarteko antzoki baten inguruak. sanferminak, baita ere politika, kirola, historia, denak inspiratzen du… neurrigabekerian.
MOTS CLÉS HITZ GAKOAK
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Crayon : arkatz Trait : marra Impertinence : ahalkegabekeria Dessin : marrazki
pour conclure avec malice : « Je suis Navarrais et le Diario est nationaliste navarrais, je m’y retrouve donc ; comme dans l’euskara qui fait partie de notre histoire. » Pour balayer toute forme de doute faut-il rappeler que l’un de ses livres majeurs, une référence historique génialement illustrée mais revisitée avec un humour dévastateur s’intitule : Porqué lo llaman anexión cuando quieren decir conquista, 1512-2002 ? (Pourquoi ils appellent annexion quand ils veulent dire conquête). Un ouvrage qui rappelle la douloureuse histoire de la Navarre. Une forme d’esprit libertaire l’animant, César collabora aussi à l’hebdomadaire El Jueves (Le jeudi) – hebdo satirique, paraissant le… mercredi –dont l’impertinence n’est pas sans rappeler Charlie Hebdo. L’œuvre de César Oroz – elle a été récompensée au niveau national par des Prix majeurs tel le Mingote et le Mas copas que una cebolla – c’est un style reconnaissable entre tous, couturé d’outrances, « Il y a Astérix et Tintin, moi c’est Astérix, j’aime la graphie exagérée ». Oroz, c’est hénaurme ! Du Reiser sans cruauté, du Dubout dans la démesure, mâtiné de Gottlib pour le sens du détail. Lui, confie aimer Sempé, Christophe Blain, Brétécher. Son Todo San Fermín, ou 25 ans de fêtes et d’humour, est une espèce de bible charivaresque de l’univers sanferminesque ; taureaux couillus autant que désabusés, mozos en perdition au sortir de la nuit mais toujours philosophes. Il en épluche les coutumes, en traque les travers, avec tendresse il brosse cette comédie humaine jouée sur ce formidable théâtre de rue que devient la capitale navarraise entre le 6 et le 14 juillet. Il s’y reconnaît pour en être l’un des acteurs et le définit, n’en déplaise aux censeurs, comme la manifestation d’un savoir se tenir. César Oroz dessine depuis l’enfance et tout l’inspire : l’Opus, l’histoire, la politique l’Osasuna, même le sensible thème identitaire ; comme tous, il a respiré au changement de gouvernance navarraise : « La Navarre c’est la pluralité, c’est un creuset, tous les changements sont bons, c’est le plus de la démocratie. » Si sa signature est connue, son visage l’est moins et rien ne l’enchante plus que d’entendre au détour d’un comptoir un commentaire sur l’une de ses tiras, la reconnaissance de la rue, le plus jubilatoire des prix.
errance
Iruña, oso ibilbide aske bat Ez ezagutua, Iruña-k noraezea merezi du. Ezinbestekoa da pestetatik kanpo egitea, hiri aske batez profitatzeko baina batez ere, bere biztanleen bidera joateko.
Pa m pe lu n e un très libre parcours
Mal connue, Iruña mérite une errance. Il est indispensable de s'y abandonner en dehors des fêtes, pour profiter d'une ville libérée mais surtout pour aller à la rencontre de ses habitants.
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texte Txomin Laxalt / photographies Jorge Moreno
Ville verte Pampelune compte plus d'une dizaine des parcs et de très nombreux jardins, dont certains sont remarquables.
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ĂŠtape 5
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Oublier les Sanfermines pour découvrir l'intimité d'une ville qui conjugue sa mémoire au présent toros et euros Les arènes proposent un circuit de visite permettant de se mettre dans la peau du matador !
coHaBitation Comme un voyage dans le temps, accepté par tous, à chacun son élixir de bonheur, sans déranger l'autre.
juevintxo Les jeudis soir de Pampelune n'ont rien à envier aux chaudes soirées de la deuxième semaine de juillet.
réservoir La Plaza de Toros Monumental - nom des arènes - livre l'envers du décor, entre autres, un stupéfiant film sur l'encierro.
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occidents Sur 4 500 m2, à l'intérieur du musée diocésain, l'exposition Occidens revient sur l'origine des Occidents et leurs valeurs.
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Les Petits jeudis rassemblent dans la vieille ville, à l'heure apéritive, femmes et hommes de tous âges miniature Réalisée en 1902, cette maquette en bois de la ville, sise au Palais des Rois de Navarre, est une bonne introduction à toute visite.
media luna El parque de la media luna, créé en 1935 par l'architecte Victor Eusa, dessine la forme de la lune, dans sa phase descendante.
velas Au mois d'août, la cérémonie des velas, consiste à allumer des bougies, dès 21h, devant les murailles.
territoire mental Un monumental escalier colimaçon pour découvrir autant le bâtiment que cette passionnante exposition sur les Occidents.
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Il serait comme la feuille d’un calendrier oublié mais visible de tous et dont la date, arrêtée à 1512, irriterait pareille à la cicatrice d’une vieille blessure. Depuis le plus haut de la ville, l’ancien Palais des Rois de Navarre (1189-1512) se dresse de toute l’opalescence grenue de ses murs revisités par l‘architecte tudelano Rafael Moneo. Pour le visiteur, il pourrait être le kilomètre zéro, le seuil d’un libre parcours à travers Iruña, la plus mal connue des plus connues villes du monde. De la résidence royale, nous en avions aimé les chicots de ses ruines vers lesquelles nous conduisaient les fins d’aprèsmidi cuisantes de la deuxième semaine de juillet de nos jeunesses. Nous abandonnions le chaudron pour de plus paisibles et ombreuses séquences. C’est à peine si la rumeur sourde de la ville évoquait dans nos engourdissements, l’écho des antiques guerres entre les communes de la Navarrería, San Nicolas et San Cernín qu’un ravin, une zone neutre et non constructible alors séparaient. Depuis 2003, enfin rénovée, l’ancienne demeure régalienne abrite les archives de la province et, à ce titre, demeure l’introduction idéale pour pénétrer les arcanes de la cité. Réalisée en 1902, une maquette en bois de la ville occupe le vaste propylée. Comme la lumière d’un astre nous parvient après des années-lumière, s’y révèle la capitale totalement corsetée dans ses remparts millénaires et la parfaite étoile à cinq branches de sa citadelle dont la construction fut ordonnée en 1571 par Felipe II. Un chefd’œuvre d’ébénisterie qui abrège deux mille ans d’histoire, jusqu’à cette implosion d’un XXe�siècle architecturalement vorace qui, en pratiquant une large brèche dans la cuirasse, permit l’extension de la capitale navarraise, mettant fin à une vocation martiale dont elle se serait passée.
ne pas ManQuer les JueVintXo Les hauts de la Navarrería sont étrangement paisibles, peutêtre le meilleur endroit pour se délecter de cette lumière fruitée, caractéristique de la ville. Ils exhortent à s’abandonner à son pavé, ses remparts et ses bastions, à sa placette retirée de San José, à se heurter aux murs aveugles d’un couvent de nonnes cloîtrées au bout de l’étrange rue en trompe l’œil Salsipuedes (Sors si tu peux), la bien nommée. Le parvis de la cathédrale Santa María ou dernier interstice avant immersion urbaine, un espace qui renvoie au couloir compostellien : de paisibles pelotons de pèlerins courbés sous le sac, fraîchement arrivés dans la vieille ville par la Porte de France y marquent le pas et composent ce bouquet cosmopolite qui fut toujours une heureuse composante de la cité. Nous n’avions pas résisté au plaisir de la visite du clocher, un exceptionnel belvédère sur l’échine des maisons, le déferlement rubicond des toits de la vieille ville, les sillons ténébreux qu’y creusent ses rues emblématiques, sur l’exubérance
palette ocre et jaune Le vieux quartier et l'église San Cernin, vus depuis la cathédrale de Pampelune. L'horizon dévoile la montagne, si proche.
de clochers, d’archanges abandonnés à leur solitude de pierre au-dessus du mascaret citadin. Sur les lointains filetés de soleil, la cuenca jouait des ocres et de verts absinthe. L’étroit campanile enveloppe la cloche Maria, le verbe d’airain qui, 40 fois l’an, notifie à l’Irundar ses célébrations carillonnées. Un larynx de 11 tonnes fondu en Cantabrie en 1584, d’un diamètre de 2,59 mètres et dont le battant de 248 kg est manipulé à la main par Juanma Urtasun, 74 ans. « Je ne sais plus exactement depuis quand je sonne parce qu’enfant, je venais déjà y jouer », nous avait-il confié. Son secret ? « Lancer le battant avec la même intensité et se protéger les oreilles pour encaisser les 130 décibels. » L’édifice sacré, une merveille romane mais maintes fois revisitée au cours de son histoire, abrite en ses entrailles et autour de son cloître, Occidens, une passionnante exposition permanente. Sa muséographie s’apparente non seulement à une réaliste remontée du temps de la ville – les vestiges archéologiques en inventorient ses strates en autant de précieux témoignages migratoires ou invasifs – mais surtout à une esthétique réflexion sur le sens du progrès et de l’histoire, la place de la contemporanéité et des valeurs transcendantes dont l’universalité ne fut jamais l’apanage de l’Occident chrétien. « L’Occident n’est ni une civilisation, ni une géographie, c’est un territoire mental », est-il d’ailleurs annoncé en exergue de la visite. Fort de ces discernements, il n’est que de se laisser glisser par la Navarrería vers le cœur battant d’Iruña que le monde entier ne connaît qu’à l’heure des matins blêmes, quand toute une ville suspendue au temple (rythme) de six toros lancés, tremble pour ses enfants. Si, toute l’année, le foulard rouge et San Fermín sont obsessionnellement présents entre la calle Santo Domingo et la Estafeta, rien ne distingue la vieille ville – les touristes en mal d’évocation sont contraints de ne photographier dans la perspective des rues légendaires que des conteneurs d’ordures ménagères ! – si ce n’est la coalition de bars qui ponctuent ses rues étroites semblant s’entrecouper sans fin. Ils ont la faveur des Juevintxo (petits jeudis) qui, toute l’année, rassemblent dans la vieille ville à l’heure apéritive, presque autant de monde que durant les Sanfermines. Pour le visiteur l’imprévisible s’embusque jusqu’à ce que s’offre l’aubaine d’aborder
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L'imprévisble s'embusque, jusqu'à ce que s'offre la rencontre avec l'Irundar, maître chez lui page 33
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l’Irundar, maître chez lui. Entre deux rosés d’Olite, il vous parlera de ses fêtes, d’un climat bien peu clément, le ferment, avec un long enfermement derrière les murailles, d’un caractère plutôt réservé. On en sourit poliment ! Au fil de la nuit, il plaidera son navarrisme ou son basco-navarrisme, voire son abertzalisme. Il vouera aux gémonies l’ikurriña, lui préférant les chaînes de Navarre, voire le séditieux aigle noir sur fond jaune ou acceptera toutes les représentations de ce qu’il admettra, parfois avec mauvaise grâce comme le berceau d’Euskal herri. Les murs parlent dans la vieille ville et si l’euskara s’affiche en capitales sur les murs, il est peu présent dans les conversations ; si le royaume de Navarre est évoqué partout, le drapeau rouge, jaune et violet de la République n’est pas de reste. Étranges discordances, formidables divergences, inquiétantes antinomies, douloureuses tensions. D’auberges aux planchers bancals et basses de plafond où l’on sert un rugueux vin de Navarre pour accompagner des chilindrones d’anthologie, en splendides palais restaurés et convertis – tel le Guendulain (XVIIIe) de la rue Zapatería – en monuments gastronomiques, le bien vivre est patent et c’est bonheur. Soudaine éclaircie dans cette radieuse palpitation, épicentre de la ville, la Place del Castillo ralentit le tempo. Ses terrasses amarrées bord à bord, permettent de satisfaire à un rendez-vous ou simplement au seul plaisir de s’asseoir enfin. Elle est la scène d’un admirable et vaste théâtre de rue dont le décor déploie des architectures improbables, les façades diaprées côtoyant de bien austères arêtes. En une citadine et libre géométrie, ses arcades autorisent une déambulation en boucle quand l’esplanade que couronne le kiosque de nos mémorables bailables, autorise de plus expéditives diagonales.
passaGe obliGé par les arènes Paradoxalement, la Plaza del Castillo est centre mais aussi lisière. Elle marque l’entrée dans l’ensanche, la ville neuve. À moins que nos pas ne nous mènent vers les rives de l’Arga au charme impressionniste – des ponts médiévaux y font le dos rond – nous aurons le choix entre un dégagement vers le théâtre Julían Gayarre ou, au sortir de la Estafeta, vers l’estomac des arènes. Sous les ors du premier, le célèbre et adulé ténor Gayarre dont le théâtre porte le nom y fut, durant les Sanfermines 1882, accompagné par son ami, le non moins célèbre violoniste Pablo Sarasate, enfant terrible de la San Nicolas. L’arrivée annuelle de Sarasate pour les Sanfermines « était plus populaire et plus tumultueuse que la procession du 7 juillet », affirme la chronique et le ténor, depuis la fenêtre de sa chambre n° 210 (aujourd’hui la 207) de l’hôtel La Perla, ouvrant sur la Estafeta, offrait de bon cœur un récital à la foule. Que l’on soit aficionado ou pas, les arènes de Pampelune constituent un passage obligé. Elles ne sont pas un temple
L'euskara s'affiche souvent sur les murs, mais est peu présent dans les conversations
de l’afición – les seules corridas sont celles des fêtes – mais enkysté dans les hauts murs, le frustre portail d’entrée enclôt tout le mystère de l’encierro, cette communion populaire, le sel des Sanfermines. Une réaliste scénographie plonge désormais le visiteur qui le souhaite dans la solitude du tunnel. Une hallucinante vidéo terriblement sonore, grandeur nature et en 3D, le précipitera dans les ultimes secondes du drame, cornes dans les reins, entre l’estoc des coudes ou, au sol, sous le piétinement d’indifférentes semelles. Émotion garantie ! Il sera difficile de s’arracher à l’étoile de la citadelle, aujourd’hui un déambulatoire enchanteur d’un périmètre de 5 km. Le pentagone stratégique dessiné au XVIe� par le meilleur ingénieur militaire de l’époque, l’italien Giacomo Palearo, El Fratín, à la demande du souverain castillan Felipe II, tomba comme un fruit mûr entre les mains des troupes napoléoniennes le 16 février 1808, après un cocasse remake de Troie. Lors du siège de la ville, une escouade française entreprit de simuler une bataille de boules de neige sous les regards amusés des défenseurs. Une fois près des murailles, la soldatesque sortit vivement les armes dissimulées sous les harnachements et s’empara de la ville sans coup férir. L’armée céda, en 1964, le monument aux autorités civiles lesquelles, après la dictature, dans une heureuse mutation, convertirent escarpes et autres courtines en déambulatoires, bastions, poudrières et armureries en autant d’avenants auditoriums ou opportunes salles d’exposition et les terrains de manœuvres en enchanteurs champs de baguenaude. Désormais, les Irundarrak viennent y faire leurs premiers pas… non plus cadencés, y apprennent à faire du vélo, pratiquent le jogging, s’y enlacent à l’occasion, bref s’y abandonnent en une légitime réappropriation. Depuis 2012, Porte du Secours, apposée par la Municipalité, une plaque rédigée en castillan et euskara, rend hommage aux 298 personnes fusillées en 1936 dans cette enceinte, « pour
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avoir défendu la liberté et la justice sociale ». Quant à la ville moderne, elle mérite une flânerie le nez en l’air. Propice à une approche plus architecturale, elle fait la part belle à Victor Eusa Razquín, architecte officiel de la ville qui donna à la capitale navarraise des édifices pour le moins étonnants. Sans conteste, Victor Eusa introduisit une nouvelle approche urbanistique. Adepte du béton et de la brique, influencé par l’Art déco mais aussi sensible aux délires dictatoriaux, il privilégia la démesure, les espaces inoccupés et les angles vifs. La ville lui doit, entre autres, outre le Monument de los Caídos, aujourd’hui vide des sépultures des généraux félons Mola et Sanjurjo, l’emblématique Casa de la Misericordía mais aussi l’imposant séminaire, Los Escolapios, l’hôpital San Juan de Dios. Cet homme du régime aux conceptions rigoristes, gratifia pourtant la cité de chalets enluminés que l’on peut croiser enchâssés entre deux immeubles, d’un bar, El Casino, l’incontournable de la place du Castillo. Dans une veine romantique il conçut surtout le lieu le plus bucolique de Pampelune. Le parc de la Media luna – il dessine la forme de l’astre nocturne dans sa phase descendante – est une ode à la nature préservée, se révèle oasis dans la géhenne de juillet, le ciel de lit de générations de viveurs du monde. Mais voilà que nous touchons déjà à un autre chapitre du grand livre de la ville.
plaZa del castillo On y revient toujours mû par quelque envie de s'amarrer en terrasse, juste le temps de reprendre la route. santa maria La cloche Maria, d'un diamètre de 2,5 m, pèse quelque 11 tonnes, actionnée par Juanma Urtasun, 74 ans !
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MOTS CLÉS HITZ GAKOAK Quartier : auzo Citadelle : gotorleku Errance : noraeze Imprévisible : aurretik jakin ezin
peñas
une expression populaire de plein Vent Durant l'année les peñas d'Iruña sont un phénomène social. Pendant les fêtes, leurs banderoles expriment, toujours avec humour, leurs coups de cœur et leurs colères.
e
lles sont au nombre de seize et rassemblent 5 500 elkarkide ou membres. Les célèbres peñas de Iruña qui participent de l’exceptionnelle ambiance des Sanfermines sont connues pour leur esprit déjanté, version gargantuesque quand elles ouvrent la bonde au tendido 6 (gradins soleil), à elles expressément réservé. Mais la peña, c’est autre chose car elle existe toute l’année et fait partie de la vie sociale, sportive, culturelle et politique de la ville. La peña, désormais mixte, est une école d’apprentissage ; on y apprend le vivre ensemble, l’art du débat, s’y déploie la solidarité. On y travaille en interne pour mieux s’impliquer dans la cité. Ainsi, entre chaque célébration mensuelle de La escalera, respectant ainsi la célèbre chanson : uno de enero, dos de febrero, tres de marzo… siete de julio San Fermín ! on fait vivre sa section de montagne, de théâtre, ses cours d’euskara, ses œuvres sociales. On organise des conférences, voire des universités populaires et surtout on veille à la bonne tenue des fêtes. Ces dernières années, elles mènent un combat sans merci contre les agressions sexistes. Nous avions rencontré Endika Lacuey (photo ci-contre) l’ancien président de la très influente Fédération des Peñas et membre de La Alegria de Iruña en son Saint des Saints, sis comme sept autres à la Jarauta, la rue mythique sur laquelle le soleil ne se couche pas du 6 au 14 juillet. Un local dont les murs affichent les rôles précis dévolus à chacun. 400 membres et 120 txikis et rien n’a changé depuis 1952, date de sa fondation. « Nous ne pouvons nier l’esprit contestataire des peñas comme nous revendiquons leur caractère social et mettons en avant leur fonctionnement démocratique » avait confié Endika. Il a porté jusqu’au bout le projet ambitieux consistant à éditer l’extraordinaire histoire des peñas d’Iruña (Iruñeko peñak, historia bizia – Iruñeko Peñen Federazioa) depuis la naissance officielle de la plus ancienne dans sa forme actuelle, La Unica (1903), avec un détour vers les premières bandes de copains du XIXe siècle et l’évocation émue de La Veleta (1902). Elle fut la première à adopter la tenue blanche mais la plupart de ses membres, syndicalistes, furent fusillés en juillet 1936. « Les premières références datent de 1900 et l’on voit com-
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texte Txomin Laxalt / photographie Jorge Moreno
ment les cuadrillas s’organisent ; il est curieux de constater que lors des premières assemblées, la police armée était présente pour faire le compte rendu au Gouverneur ! » rappelle Endika, évoquant un esprit déjà frondeur. Les peñas sont le baromètre politico-social de la ville, de la Navarre, et leurs sorties, banderoles déployées, sont toujours un moment redouté par la gouvernance en place. Les banderoles - 5 m x 2,5 m - ne sont pas seulement les attributs des seize associations mais l’expression de l’air du temps. On s’y colle dans la discrétion cinq mois avant le chupinazo et l’on confie le thème retenu, après appel d’offres, à un dessinateur de la ville qui touchera entre 500 et 700 euros. « Il y en a de célèbres dont le dévastateur Txema Esteban qui a dessiné les banderoles de huit peñas la même année, ou César Oroz qui lui, ne dessine que pour une seule. » Oroz (lire p.22-23), membre de l’Irrintzi remporta le prix en 2012 avec le fameux éléphant du safari au Bostwana du roi Juan Carlos. On pourrait citer aussi Asisko Urmeneta, Peio Zabalza, Labayen, Balda, Roberto Flores, Patxi Marcilla et bien d’autres. Les banderoles sont présentées une semaine avant les fêtes et les journaux les publient. Si au début du XXe�siècle, elles sont sobres, les années d’après guerre civile vont brocarder façon light – franquisme oblige – le policier municipal, les problèmes municipaux et… conjugaux mais avec toujours le taureau, l’encierro, et les débordements festifs en toile de fond. Vers les années soixante, les femmes apparaissent, on se plaint des impôts lourds, les difficultés quotidiennes sont ironiquement mises en scène. Ce n’est qu’à la fin du franquisme que la politique prend le dessus avec un humour dévastateur, les élus de tous bords y apparaissent, pas toujours sous leur meilleur jour. L’année 1978 est marquée par les dramatiques incidents du 8 juillet qui se soldèrent par la mort de Germán Rodriguez (militant tué par la Guardia Civil, Ndlr) et un boycott assumé des fêtes. Les peñas, seront à l’initiative de la commission d’enquête. Depuis, elles ne sortent pas les instruments de musique ce jour-là. Dans les années quatre-vingt, l’euskera entre en force sur la toile et désormais les pancartes sont bilingues mais, dans un savoureux argot, les dialogues de ces merveilleux dazibaos, restent souvent hermétiques au visiteur. Quand, en 2009, la municipalité refuse d’accorder la subvention à deux peñas pour impertinence caractérisée, lors des Sanfermines suivantes, les banderoles des seize associations réclament la liberté d’expression sur un sinistre fond noir ! La municipalité UPN mortifiée – les télés du monde sont présentes – ne s’avisera plus de manier les ciseaux de la censure. Dans un édito de Guk, la revue de la Fédération des peñas, Mikel Donio, leur nouveau président résumait leur rôle : « Maintenir et renforcer l’influence des peñas pour maximiser l’objectif clé : obtenir des fêtes populaires, paritaires, participatives et respectueuses tant durant les Sanfermines que pendant le reste de l’année. » Un vrai programme.
MOTS CLÉS HITZ GAKOAK
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Membre : elkarkide Dérision : iseka Gradins : harmailak Arènes : zezenplaza
HaiZean daGoen adieraZpen Herrikoi bat iruñeko peñak, urtean zehar, fenomeno sozial bat dirak. pestetan, beren pankartek adierazten dituzte, beti umorez, urteko haserre eta grinak.
tradition
le x aHaKo, de a À Z.Z.Z
Q
Depuis plus d'un siècle, les ateliers des Z.Z.Z d'Iruña fabriquent des xahako. Au fil de la tradition, la manière de travailler n'a pas changé.
XaHakoa, a — tik Z. Z. Zraino duela mende bat baino gehiago, iruñeko Z.Z.Z tallerak, xahakoak egiten ditu. tradizioaren haritik, lan egiteko manera ez da aldatu.
Qui n’a pas un jour renversé la tête en arrière pour donner un coup au xahako (gourde), car le xahako contraint à contempler le ciel pour accueillir de façon idoine le trait incisif de vin. Tout le corps participe, il faut jouer en souplesse des bras, des mains et de la glotte que l’on utilise comme clapet. Car pour profiter pleinement du goût, il ne s’agit pas d’être en apnée ; la meilleure façon de faire contrexilo (avaler de travers ; catastrophique autant que déshonorant !) mais de pratiquer une forme de respiration continue. Enfin, comme il serait malvenu d’éparpiller le nectar quand on en a fini avec la gourde, on se doit de couper net le jet en redressant d’un coup le xahako tout en avalant la dernière gorgée. La goutte sur le menton est admise. On a connu des artistes qui s’envoyaient le jet entre les deux yeux pour habilement récupérer un ru, à peine sinueux, après qu’il s’est écoulé le long de l’aile du nez ! On boit rarement seul au xahako, généralement, comble de la convivialité, on le fait passer et on ne le refuse pas. Voilà pour la technique. Quant à l’objet, il ne viendrait jamais en Euskal herri et sans doute au long de nos chères Pyrénées, de n’utiliser un autre xahako qu’un Z. Z. Z. Une institution pour une désignation énigmatique.
dans un quartier un peu excentré de Pampelune mais la technique n’a pas changé. Sept personnes y travaillent et, à la main, perpétuent la tradition depuis la réception des peaux de chèvres. Longuement humidifiées, les futures outres sont découpées en deux faces avant d’être cousues à l’envers. De nouveau humidifiées et enfilées sur une longue tige métallique, elles seront retournées d’un geste précis de la main – façon condom évoquera le préposé à l’opération –- puis tapissées intérieurement de résine naturelle que les poils de chèvre retiendront. Enfin suspendues tels des jambons, elles seront mises à sécher. Enfin, le bouchon, autrefois en corne de vache, aujourd’hui en bakélite, ainsi que les cordons rouges seront ajustés. Depuis les interdictions d’alcool au travail, le xahako n’accompagne plus traditionnellement le casse-croûte ou la gamelle de la méridienne. « Rien que pour les Sanfermines, nous en produisons 2 000. Notre marché s’étend à l’Amérique latine, le monde de l’afición taurine en est friand, nous ne sommes que trois boteros dans toute l’Espagne, il y a encore du travail ! », nous avait confié Miguel García Ruiz, l’actuel directeur. Quant au N de Pamplona frappé à l’envers sur la gourde, ne cherchez pas, il s’agit d’une erreur typographique du XIXe siècle qui désormais fait partie de la marque de fabrique. Zure osagarriari ! À votre santé !
MOTS CLÉS HITZ GAKOAK
Gourde, outre : xahako Chèvre : ahuntz Résine : erretxina À la régalade : zorrotadan
des triplées et un XaHako C’est en 1873 que cette outre – bota dans sa version castillane – vit le jour à Iruña. Gregorio Pérez, directeur de la fabrique et maître artisan botero, venait d’être père de ravissantes triplées – elles survécurent, chose rare à l’époque. Il prit la tendre habitude de les appeler mis tres zagalas (mes trois jeunes filles), d’où les trois Z empruntés au terme familier pour les appliquer à la marque. Longtemps l’atelier des Z. Z. Z fut sis à la rue Comedia, dans le centre ancien. Aujourd’hui, il se trouve
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texte Txomin Laxalt / photographies Jorge Moreno
u n s a v o i r - f a i r e u n i q u e Des gestes répétés depuis plus d'un siècle dans l'atelier de Pampelune.
SEPT PERSONNES TRAVAILLENT À LA MAIN POUR PERPÉTUER LA TRADITION
c o m m e d e s j a m B o n s Fabriquées en peau de chèvre, les gourdes sèchent, suspendues au plafond.
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l'essence de la fĂŞte
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Sa n f e r m i n e s l’ e n v e r s d u f o u l a r d Avant tout, ce sont celles des Irundarrak. Les fêtes obéissent à des règles bien précises et possèdent leurs clés. Le reste relève des mythes.
renaissance des géants En 1860, la Mairie demande au sculpteur Tadeo Amorena de fabriquer huit géants représentant quatre continents. page 41
L'encierro reste le moment fort des FĂŞtes. Mais on le voit rarement depuis le clocher de l'ĂŠglise San Cernin !
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Chez les Pamplonais, les rites et les règles de la Fête se transmettent de génération en génération
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l'essence de la fête texte Txomin Laxalt / photographies Jorge Moreno
sanferMinak, Zapiaren ifrentZua lehenik eta behin, iruñeako pestak irundarrenak dira. pestek arau zorrotzei obeditzen diete eta gakoak dauzkate. Gainerakoa mitoen menpean da.
Elles sont sans conteste parmi les plus belles fêtes sur la peau du monde. Cette folle parenthèse festive de neuf jours ou 204 heures, est intimement liée à Iruña et aux seuls Irundarrak, n’en déplaise aux éléments allogènes qui ont cru, pour yerrioxa avoir participé durant plusieurs décennies, se l’être ez bakarrik bere ardoengatik, arabako appropriée, arguant d’une espèce de droit du sol. On sait famatua da ere bere sotoen arkitektuarengatik. des non Pamplonais qui ont passé la barre du demi-siècle de fréquentation sans pour autant bénéficier d’un plus de légitimité. Pour un Pamplonais, la question de cette minable comptabilité calendaire ne se pose même pas et, en amont de premières participations depuis le landau, il vous parlera un brin condescendant d’une affaire d’ADN. Miguel Izu (Iruña, 1960) est de ceux-là. Docteur en droit, licencié en Sciences politiques et sociologie, membre du Tribunal administratif de Navarre, élu d’Izquierda Unida, fonctionnaire au Gouvernement de Navarre, écrivain, il se défait de toutes ces spécifications quand il noue le foulard rouge, le 6 juillet à midi, pour les récupérer le 14 à minuit quand il le dénoue. Nous l’avons rencontré une radieuse fin d’après-midi d’un jour ouvrable d’avril, à la terrasse de l’Iruña et il nous avait confié que, pas fêtard pour un sou, les Sanfermines constituaient le seul (grand) écart qu’il s’accordait dans l’année. Ce qui nous parut incroyable pour cet Irundar MOTS peto petoa (pur jus) qui s’illustra, au-delà d’une brillante carCLÉS rière politique, comme fin chroniqueur de la semaine sanferHITZ minera (Sexo en Sanfermines y otros mitos festivos) et comme GAKOAK auteur d’un savoureux roman policier, El asesinato de Caravinagre (bien que le plus laid, le plus populaire des grosses Foulard : zapi têtes de la Comparsa des gigantes y cabezudos N.D.L.R.), Règle : arau lequel se déroule durant les célèbres fêtes. Programme : egitarau « Il s’agit d’une semaine de déconnexion, même avec nousMythe : mito
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txupinaZo C'est une fusée (chupinazo) qui sonne le début des fêtes. Il est l'heure de nouer le foulard rouge.
mêmes ! Tout ferme, l’usine Volkswagen, la mairie et le Gouvernement. Les seuls qui travaillent sont les policiers, les employés de l’hôpital et… les bistros. » À Iruña, les étrangers, d’où qu’ils viennent, sont désignés par le peu amène terme de guiri. « Ils sont les bienvenus tant qu’ils n’empiètent pas sur cette fête de famille, en fait ils sont un peu comme le mobilier urbain, ils font partie du paysage. » Pourtant Miguel avait écrit : « Les Pamplonais d’aujourd’hui nous nous demandons si cela n’aurait pas été mieux sans une telle résonance internationale. En fin de compte, l’essence même de la fête que nous représentons, était déjà assurée. » Les Sanfermines ont leurs codes - Miguel préfère le terme de clés - que le guiri ignore. Miguel Izu s’est attaché d’ailleurs à démonter tous les mythes de cette exceptionnelle célébration bacchique dont celui faisant accroire que les Sanfermines font de la ville une cité sans loi. « Les Sanfermines sont une des fêtes les plus ordonnées et prévisibles du monde ; elles correspondent aux Pamplonais, des gens assez distants durant le reste de l’année, pétris de traditions et conservateurs comme peu. L’apparent désordre de la fête procède de sa massification et de son bruit. » Aux heures les plus débridées, la fête pratique une forme d’auto contrôle, le secret de sa pérennité sans doute : « Jour et nuit les rues sont pleines d’yeux ; où que tu ailles, tu tomberas sur des gens connus : voisins, collègues, parents, amis comme ennemis, tous bien disposés à te saluer, t’inviter à boire un verre, s’intéresser à comment tu passes les fêtes. Bousculer le constant ordre social et chercher un espace discret pour une éventuelle fredaine, relève de l’improbable. »
pas de MélanGe des classes Celui que Miguel appelle le PTV (Pamplonais de Toute la Vie) est celui qui a le moins de chance de déraper, simplement pour l’enchaînement de rituels auxquels il se soumet naturellement : « Si tu veux être au chupinazo, à la procession, au vermouth, à la corrida, à la sortie des peñas, si tu veux participer à l’encierro, au Struendo, te taper un sorbete (glace pilée, citron, vodka ou cava. N.D.L.R.) au Gazteluleku, être présent aux Géants, aux barracas, à l’apartado ou à l’encierillo, tenir le coup jusqu’aux Dianas (aubade), pour peu que tu sois membre d’une peña tu seras tenu à des contraintes de présence au bar, si tu veux assurer un minimum avec la famille, repasser un blanc, jeter un œil distrait au journal, dormir un peu, il reste peu de temps pour la bagatelle, et si tu le trouves, il faut que le corps suive ! » Enfin, lucide, Miguel Izu sourit quand on lui parle avec enthousiasme de la tenue blanche et d’un heureux mélange de classes : « Tous la même tenue mais pas du même faiseur ; tous dans la rue et les bars mais pas tous dans les mêmes rues et les mêmes bars ; des nuances que seuls nous, pouvons noter ! » Autant de bonnes raisons qui font que chaque année nous y acourrons !
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Les Sanfermines sont une des fêtes les plus ordonnées et les plus prévisibles du monde !
l'essence de la fête
Jour et nuit les rues sont pleines d'yeux. Où que tu ailles, tu tomberas sur des gens connus, amis ou pas… visages Du bal de la Plaza del Castillo, aux commodités intérimaires, plusieurs visages de la Fête.
encierillo En haut, à doite, à 23h, la sortie des taureaux du corral del Gas, conduits jusqu'à l'enclos de départ de l'encierro du lendemain.
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le mYtHe H e m i n gWaY, produit marKeting
l’affaire est entendue. l’écrivain ernest Hemingway (1899-1961) s’est rendu neuf fois (1923, 1924, 1925, 1926, 1927, 1929, 1931, 1953 et 1959) aux sanfermines et les a fait connaître au travers de son roman publié en 1926, le soleil se lève aussi. en fait, un guiri comme les autres dont les frasques alcoolisées n’ont pas laissé un souvenir impérissable chez ceux qui l’ont fréquenté entre arènes et estafeta. d’autant plus que le romancier n’a pas la primeur de la découverte des fêtes que dès le XiXe siècle, la bonne société européenne en villégiature à biarritz, avait pris l’habitude de fréquenter. au départ, un américain fauché et anonyme débarqué avec la bohème littéraire américaine parisienne, dite de la génération perdue (après le premier conflit mondial). ce ne sera qu’à partir de ses deux derniers séjours (1953 et 1959) que, célèbre, il deviendra l’icône dont certains - marketing oblige – aujourd’hui entretiennent la lampe, les irundarrak avec tout le respect dû à l’écrivain, ayant des référents d’une toute autre portée quant à leur séquence festive. comme ils connaissent son parcours durant la semaine festive, les spécialistes navarrais de l’écrivain américain en ont aussi détaillé son coucher. ainsi, en1923 il loge au n° 5 de la rue eslava. entre 1924 et 1931 à l’hôtel de son ami Juan Quintana (l’hôtel Montoya du roman), plaza del castillo. en 1953, à l’hôtel ayestarán de lekunberri à 30 km de pampelune. enfin, en 1959, au n° 7 de la calle san fermín à iruñea. ernest Hemingway s’est suicidé le 2 juillet 1961. il sera enterré le 6 juillet, jour du txupinazo.
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conseils
miguel iZu, les 1000 proGraMMes des sanferMines Miguel Izu nous confie les différentes façons de célébrer les Sanfermines
MiGuel iZu, sanferMinetako 1000 eGirarauak Miguel izu-k sanferminetak ospatzeko forma desberdinak eman dizkigu6
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l y a longtemps que la Mairie de Pampelune édite un programme officiel des fêtes illustré de superbes photos. Beaucoup de Pamplonais entretiennent le rituel de son achat voire de sa collection mais tout le monde sait qu’il ne sert pas pour organiser les Sanfermines. Beaucoup d’événements n’y figurent pas et chaque participant possède ses propres habitudes festives. C’est un lieu commun de dire que chacun se fait son programme. Il est évident que les autochtones et les étrangers n’ont pas le même. Beaucoup de ceux qui arrivent d’ailleurs ont l’image simpliste, souvent renvoyée par la télévision, que la fête n’est prétexte qu’à la bringue et aux taureaux, à boire à n’en plus pouvoir et à regarder ou courir l’encierro. D’autres visiteurs, plus assidus, savent que les Sanfermines sont autre chose, ainsi certains ont créé leurs propres peñas, coutumes et moments forts. Quant aux Pamplonais, ils ne vivent pas tous les mêmes fêtes. Bon nombre d’entre eux les fuient au profit de la plage ou de leurs villages d’origine, ils abominent cette massification, le bruit, la saleté et la bringue effrénée. Les plus traditionnels ne conçoivent pas les Sanfermines sans accourir ponctuellement aux actes religieux qui ont peu changé au cours des siècles, aux spectacles taurins ou au défilé des géants et grosses têtes, lesquels existent depuis 157 ans. Il y a ceux qui passent les fêtes en défilant derrière les banderoles et charangas de leurs peñas, au soleil ou des deux côtés du comptoir de leurs locaux. D’autres vivent des Sanfermines essentiellement gastronomiques entre petit déjeuner et déjeuner, en passant par le casse-croûte et l’apéritif et depuis le casse-croûte aux arènes jusqu’au dîner
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texte Miguel Izu / photographie Jorge Moreno
sans compter le souper, écumant surtout bars, restaurants et sociétés. Il y a ceux qui basent leur programme sur les concerts et choisissent entre la jota, le txistu, la musique symphonique, le jazz ou le rock. Quelques-uns vivent centrés sur le monde du taureau, accourant à l’encierro, l’apartado, aux corridas, encierillo, assistant même aux tertulias avec d’autres aficionados, journalistes, éleveurs ou toreros. Ils sont nombreux qui picorent dans toutes ces ambiances, selon les jours. Il y a ceux qui profitent de deux jours de fête avant de partir en vacances, d’autres qui supportent les neuf jours sans en exlure un seul. Il y a ceux qui se lèvent avec le soleil pour débuter chaque journée avec l’encierro et ceux qui se couchent précisément quand ils voyent le soleil se lever. Sans compter ceux qui profitent peu des fêtes parce qu’ils travaillent. Bien que d’une année sur l’autre ceux qui vivent les Sanfermines tendent à rééditer leurs manières de les vivre, les transformant en tradition sacrée, les coutumes de chaque Pamplonais vont évoluer au cours de la vie. L’enfance se passe avec les parents afin de connaître les moments plus traditionnels, on court devant les kilikis et on admire les feux d’artifice. Durant la jeunesse on profite davantage des heures nocturnes et des ambiances débridées. À l’âge mûr on s’en retourne lentement vers la vie diurne, on passe plus de temps dans les restaurants que dans les bars et on accompagne les enfants pour qu’ils se pénètrent de la tradition. Selon le poids des ans, il est plus probable qu’on se décide à arpenter des terres plus paisibles, partir en vacances ou rester dans son quartier éloigné du centre de la fête. Â chaque âge, pour les Pamplonais comme pour les visiteurs, il y a mille Sanfermines, mille programmes et mille façons de les vivre.
MOTS CLÉS HITZ GAKOAK
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Habitude: ohitura Programme : egitarau Événement : gertakari En masse : trumilka
rock around
el drogas, un cŒur cHaudière
Lié au quartier de la Txantrea, Enrique Villarreal Armendariz, El Drogas, fut le créateur du groupe mythique Barricada. Il nous raconte son histoire.
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texte Txomin Laxalt / photographie Jorge Moreno
el droGas, Galdara biHotZ bat txantreako auzoari oso lotuta, enrique Villareal armendariz el drogas, barricada talde mitikoaren sortzailea izan zen. bere historioa kontatzen digu.
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l est enfant de la Txantrea et le revendique haut et fort. Le succès ne l’a pas convaincu d’aller habiter ailleurs que dans le quartier de son enfance. Enrique Villareal Armendariz El Drogas (Iruña, 1959), créateur, chanteur et bassiste du mythique groupe Barricada, ne rechigne pas à évoquer sa Txantrea qui l’a modelé comme elle a orienté ses goûts musicaux. Pour ceux qui ne sont pas au fait de son style musical, précisons qu’il s’agit de hard rock mâtiné de rock punk voire heavy metal ; pour faire bref, une manifestation de la culture urbaine dans ce qu’elle pouvait avoir de plus rude dans les bouillantes années 80. Barricada, un nom comme un jour d’émeute pour un groupe dans la musique duquel, entre 1982 et 2011, une génération s’est reconnue. Pas moins de quinze albums, plus de mille concerts – le premier, le 18 avril 1982, place de la Txantrea – et un disque de diamant pour plus d’un million de disques vendus ! Enrique nous avait reçu dans son confortable studio, à michemin entre le vaisseau pirate et le salon littéraire. Un univers électrique tempéré par un patchwork de tentures et tapis, conférant au lieu des allures de repaire. Lui, le visage labouré aux profonds sillons d’une vie qu’il admet avoir bûlée – il a totalement renoncé aux substances et à l’alcool depuis 10 ans - foulard à l’année noué sur la tête, longues tresses et enfilades d’anneaux aux oreilles. Pas vraiment le gendre idéal ? Et pourtant, il suffit d’écouter ce timide que répugne la violence, raconter sa Txantrea : « les rues alors n’étaient pas goudronnées, un vrai quartier ouvrier avec une conscience sociale très forte ; il y avait des gamins partout, tu apprends vite ce que signifie une famille nombreuse. Des gens venus de partout. Aujourd’hui de croiser toutes les couleurs de peau m’enchante. » La famille ? Les amis ? Sacrés. Cet écorché vif qu’inspirent avant tout les thèmes sociaux, la mémoire historique, « tout a commencé en Navarre un certain juillet 36 », parle avec tendresse de sa compagne qu’il a rencontré en 1978, de leurs deux enfants, « je n’ai pas appris l’euskara mais eux ont fait tout leur cursus en ikastola, une évidence. » Si c’est dans le quartier de la Navarrería qu’Enrique s’est construit artistiquement : « Un bouillon de culture marqué par la rupture, où s’exprimaient toutes les expressions artistiques, depuis les fanzines jusqu’au rock alternatif », c’est toujours vers la Txantrea qu’il revient. « Contrairement à ce que l’on a laissé croire, un lieu paisible même si son histoire relève du tragi-comique ». Ce cœur chaudière - parallèlement, il œuvre musicalement autour de thèmes aussi sensibles que la paternité responsable et la trisomie 21 a abandonné Barricada en 2012 mais continue au sein du groupe El Drogas à témoigner du monde.
MOTS CLÉS HITZ GAKOAK
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Groupe de musique : musika taldea Génération : belaunaldi Culture urbaine : hiriko kultura Écorché : sumindua
Histoire urbaine
la txantrea soliDaire et DissiDente texte Txomin Laxalt / photographies Jorge Moreno
tXantrea, solidario eta disidentea
atipikoa, txantrea auzoak lau haizetatik etorritako jendeak biltzen ditu. auzo koniktiboa izenekoa oso erakargarria da, bai bere historiarengatik, bai bere biztanleengatik.
Atypique, le quartier Txantrea rassemble des habitants venus des quatre horizons. L'histoire de celui que l'on appelle le quartier conflictuel est particulièrement attirante.
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comme des casernes Seules les montagnes qui dessinent l'horizon semblent apporter une touche de poĂŠsie Ă ce quartier monotone.
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Histoire urbaine
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La chose est acquise. Selon la volonté bien arrêtée de ses habitants, le quartier s’écrit désormais Txantrea et non plus Chantrea, une déformation castillane renvoyant au temps où la zone appartenait à la Chantría, entité chargée du chœur de la cathédrale de la ville. Le quartier de la Txantrea n’est certes pas le plus beau de la capitale navarraise, tant s’en faut, et le touriste l’ignore. Ici, point de pavé, ni ruelles, ni palais. Entre les rives ombragées de l’Arga, l’avenue de Villava, Burlada et les quartiers de la Magadalena et Rotxapea, la Txantrea veille farouchement sur le tissage au cordeau de ses rues et savoure fièrement le triomphe de la brique et du béton. Certains l’ont stigmatisée quand d’autres, bien plus avisés, lui ont appliqué ce qualificatif que revendiquent ses quelque 20 000 habitants : Auzo lan (littéralement, travail de voisin). Il ne serait en être autrement avec son histoire écrite avec ses mains, sa sueur et ses rêves. En 1949, la Navarre tente d’oublier. Vainqueurs comme vaincus préfèrent se murer dans le silence, on le sait, la plus mauvaise façon de panser les blessures. La dépression qui a suivi la Guerre civile a vidé les campagnes au profit des villes et le manque de logements se fait cruellement sentir. Le ministère du Logement va alors lancer une campagne pour l’habitat qui se traduira à Iruña par la préemption de ces terrains en lisière de ville en vue de la création de 200 logements avec une singularité cependant, la
entre les rues tirées au corDeau, triomphent fièrement la Brique et le Béton, Âmes De la txantrea
construction demeurant à la charge du soumissionnaire. La robada – ancienne mesure navarraise équivalant à 900 m² – sera vendue 10 000 pesetas, soit 60 euros ! La Diputación fournit le bois d’Urbasa, la pierre d’Ezkaba et chaque famille touche 44 000 pesetas, soit 260 euros pour se meubler. En échange, les nouveaux résidents s’engagent à travailler au moins quatre heures par jour après le taf quotidien, par groupe de quinze à vingt. Un formidable chantier voit le jour qui rassemble nouveaux voisins en quête d’une non moins nouvelle vie, accourus de toute la Navarre mais aussi de différentes régions d’Espagne.
solidarité et contestation Vivant loin de la Txantrea, ces travailleurs se rendaient au chantier le plus souvent à bicyclette pour, dans des conditions difficiles, souvent sans lumière, monter murs, creuser des fossés d’irrigation… Magnanime, l’évêque éditera une bulle qui les autorisera à travailler le dimanche, après la messe exceptionnellement dite à 5 heures du matin. La dernière phase du chantier s’achève en 1960, la paroisse San José aura été inaugurée, elle, en 1953. Un formidable élan de solidarité qui marque la Txantrea de son sceau. Très vite le quartier devient le centre névralgique de la contesta-
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un quatier animé Les dalles en béton, les constructions austères, n'empêchent pas les gamins de la Txantrea d'aimer leur quartier.
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BarricaDes et insurrection sont monnaie courante Dans le quartier qui fut Désigné, Dans les années 1980, comme le quartier conflictuel convivialité Ici, les gens se connaissent et se parlent, c'est sûrement la plus belle réussite de la Txantrea !
alignements Parfois, la lumière du soir, parvient à maquiller les tristes façades.
tion et de l’irrédentisme abertzale dans une Navarre corsetée par le franquisme. Comme nous le rappellera Enrique Villareal Armendariz El Drogas (lire pages 52-53)) : « Les prêtres de la paroisse étaient tous prêtres ouvriers, le premier Centre de planification familiale de la péninsule naquit à la Txantrea. S’y développa une forte vie associative et culturelle mais le quartier fut aussi une pépinière de l’objection de conscience, du syndicalisme. » À tel point que dans les années quatre-vingts, la Txantrea se voit dotée d’une autre désignation : Le quartier conflictuel. Barricades et insurrections y sont monnaie courante et, à la perplexité de la Garde Civile, les rues, une fois conquises, sont vides d’émeutiers. Toujours solidarité oblige, à la Txantrea les portes s’ouvrent sur celui que l’on traque. La Txantrea n’oubliant pas qu’elle est aussi Irundar, c’est en 1957 que la peña Alegría Txantreana – aujourd’hui 232 membres, et 350 enfants – participe à ses premières Sanfermines. Le quartier possède aussi ses propres Géants qui défilent lors des fêtes de la dernière semaine d’avril.
de fauX airs d'aMériQue latine
MOTS CLÉS HITZ GAKOAK
Immeuble : eraikin Brique : adreilu Emigré : etorkin Solidarité : elkartasun
L’architecture de la Txantrea est typique des années franquistes : alignements au coude à coude de maisonnettes. Mais personnalisées par leurs propriétaires, coquettement fleuries et hébergeant jardinets, vergers ou potagers, s’est imposé l’esprit du lieu. Plus que le coron, elles évoqueraient davantage quelque riante contrée d’Amérique latine. Des pelouses aménagées pour la rencontre – réminiscence des années soixante, on y croise les traditionnelles aires de ciment ovales destinées au patin à roulettes – s’intercalent systématiquement entre les barres d’immeubles. Commerces de proximité, placettes et les inestimables bars qui vont avec, viennent comme autant de respirations. Des quadrilatères bétonnés certes, mais jamais rédhibitoires pour les grands carrés de ciel et les heureuses autant qu’anachroniques perspectives vers les remparts et les clochers de la cathédrale qu’ils ménagent. Alors que nous évoluions entre eux, Aurora, une pionnière du quartier, qui prenait l’air à sa fenêtre nous convia sans façon à visiter son appartement. Petit mais coquet et impeccablement entretenu avec une minuscule salle à manger à napperons, « on ne l’utilise que pour Noël, en famille », ainsi qu’elle nous l‘avait confié. Une trop brève pause pour une touchante tranche de vie.
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PAMPELUNE sommaire
La capitale de la Navarre est surtout connue et fréquentée pendant la célèbre semaine de juillet, celle des Sanfermines. Découvrons-la les 51 autres semaines !
4-Coups de cœur Jorge Moreno est un reporter-photographe installé à Pampelune. Il a réalisé les reportages de ce numéro, et nous à ouvert ses archives pour nous offrir ses coups de cœur sur sa ville.
12-Histoire Fortement marquée par l'occupation romaine Pampelune fut, tour à tour, capitale des Vascons, puis du Royaume de Navarre.
18-Ezkaba Pas facile de vivre ensemble, lorsque ce sont les bourreaux qui ont pardonné aux victimes ! Pourtant, la forteresse d'Ezkaba fournit la preuve que cela peut devenir possible.
22-César Oroz Ses dessins, comme autant de coups de griffe, régalent, entre autres, les lecteurs du Diario de Navarra.
24-Libre parcours Célèbre dans le monde entier pour ses incomparables Fêtes, Pampelune n'en demeure pas moins une des villes les moins connues en dehors de l'inoubliable semaine de juillet. Alors, laissons libre cours à notre errance et partons à la rencontre de ses habitants.
36-Peñas On voit leurs banderoles pendant les Fêtes, mais toute l'année les peñas pamplonaises remplissent une vraie fonction sociale.
38- Z.Z.Z Elles sont mythiques les gourdes signées des trois Z, fabriquées à Pampelune depuis plus d'un siècle.
40-San Fermin Les célèbres Fêtes sont avant tout celles des Irundarrak. Elles obéissent à des règles bien précises. Petite initiation en compagnie de Miguel Izu qui nous enseigne les différentes façons de les célébrer.
52-El Drogas Enrique Villarreal Armendariz, El Drogas, est le créateur du groupe mythique Barricada. Il nous raconte son histoire.
54-Txantrea De prime abord le quartier n'a rien d'exceptionnel. Il serait même plutôt inintéressant. Mais dès que l'on plonge dans son histoire et celle des habitants, on découvre pourquoi Txantrea est bien davantage qu'un simple quartier.
60- Les churros Depuis 145 ans, la même famille fabrique les incomparables churros de la rue Mañueta.
ESPACES VERTS Comme dans un phalanstère des bouts de jardinets amoureusement cultivés.
RENCONTRES Les habitants entretiennent coquettement intérieurs et extérieurs de leurs maisons.
ibilka
LES INÉGALABLES CHURROS DE LA MAÑUETA
le magazine
Depuis 145 ans, rue Mañueta, on confectionne les meilleurs churros de la Péninsule. Une histoire de famille. Aujourd'hui la 5e génération.
Mañueta karrikan, duela 145 urte, penintsulako txurro hoberenak egiten dira. Familiako historio bat, bostgarren belaunaldikoa.
SAVOIR-FAIRE ET PASSION La Mañueta ? Une incontournable séquence familiale pamplonaise qui perdure depuis 1872. Située au 8 de l’étroite rue Mañueta, la plus célèbre churrería de la péninsule – elle n’ouvre que durant les fêtes et les dimanches d’octobre – ne brille pourtant ni par sa vitrine, il n’y a en pas, ni par un décor particulier, seule la désigne une façade intensément corail que barre un frustre vantail de bois s’ouvrant sur un comptoir fonctionnel. Le reste ? L’avenance, le sourire toujours, la passion pour un vieil office et un
savoir-faire unique pour une pâtisserie simple mais, ici au goût incomparable. Elias, 68 ans, expert-comptable de son état, dans un français impeccable a bien voulu nous confier un secret qui n’existe pas. « Une affaire de famille dont les membres pratiquent tous d’autres métiers, et de passion surtout. Moi-même de la 4e génération avec mes enfants Elias, 41 ans, et Oihana, 37 ans, de la 5e génération, nous travaillons ensemble mais il y a aussi Mikel, Renata, Juan, Nicolas, Itsasoa, les neveux et les nièces. » Car enfin, le churro ce n’est jamais que de la farine, de l’eau, du sel et de l’huile. Mais à la Mañueta, la farine de blé et l’huile d’olive vierge sont rigoureusement sélectionnées : « nous ouvrons deux samedis avant les Sanfermines pour les tester », avait expliqué Elias. Quant à la cuisson, elle est unique, et pour en saisir toute la subtilité, il faut descendre dans les entrailles brûlantes de la Mañueta, espace crépusculaire léché par les flammes, à mi-chemin entre fonderie et athanor d’alchimiste. La confection des churros relève d’un incroyable ballet, d’une gestuelle à la précision chirurgicale. Dans les chaudrons, les mêmes depuis 145 ans, saturés d’huile bouillante chauffée exclusivement au bois de hêtre qui leur donnera ce fumet unique, les façonniers, à l’aide d’une énorme seringue et par de larges gestes en cercles concentriques, y projettent la pâte qui, instantanément, se transmue en goûteuses roscas, ces immenses spirales d’or aussitôt récupérées à l’aide d’une longue pince. Une fois découpées, elles équivaudront exactement à douze churros et demi. « Les churros sont préparés au fur et à mesure des commandes, ce qui explique les files d’attente », confiera Elias. La famille Elizalde ne consacre que peu de temps aux Sanfermines. La corrida tous les jours, un verre que l’on s’accorde après les taureaux, guère plus. Une nouvelle mâtinée de labeur va vite débouler comme se profile déjà la 6e génération, foi d’Elias : « Mes petits enfants raffolent des churros, un signe non ? »
MOTS CLÉS HITZ GAKOAK
Pâte : ore Chaudron : galdara Hêtre : pago Frire : frijit
PAMPELUNE AUX DEUX VISAGES
Errance
S’abandonner au hasard, pour plonger dans l’intimité de Pampelune et de ses habitants.
Txantrea
Ce n’est pas le plus beau quartier, ni le plus branché, mais il incarne une aventure collective unique.
Ville capitale
Se plonger dans l’histoire de Pampelune, c’est parcourir celle du royaume de Navarre, de ses conquêtes et de ses pertes…
L’envers du foulard
ibilka le magazine - PAMPELUNE - NUMÉRO HORS SÉRIE - UDAZKENA / AUTOMNE 2017
MAÑUETAKO TXURRO PAREGABEAK
Sanfermines, six heures moins le quart du matin. Quand certains occupent déjà le vallado (barrières) de l’encierro pour ne rien manquer du spectacle, d’autres préfèrent se joindre à l’impressionnante file s’étirant devant la churrería la Mañueta, laquelle ouvrira ses portes à six heures précises. La lente procession gourmande ; noctambules et frais levés s’y croisent joyeusement ; ne cessera plus jusqu’à onze heures, heure traditionnelle de fermeture du vénérable établissement. Les Géants et Cabezudos ne s’y trompent pas lesquels, durant les fêtes, lors du défilé matinal quotidien, s’y arrêtent. Gaiteros et porteurs marquent le pas et Elias Elizalde, de la 4e génération de la Mañueta, txistulari émérite, traditionnellement, leur présente un plateau des inégalables churros avec un petit verre de patxaka (liqueur navarraise de pomme parfumée à l’anis). Un succulent accompagnement.
Sait-on vraiment ce que les Sanfermines représentent pour les Pamploneses, comment ils les vivent ? Plongée dans l’envers du décor.
Rencontres
Des peñas aux célèbres churros, en passant par les mythiques xahako Z.Z.Z, rencontres.
Spécial Pampelune