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PRÉLUDE D’UN MOUVEMENT SYNDICAL

La création du premier ministère de la Santé, en 1936, par Maurice Duplessis, permet notamment d’organiser la dispensation de soins à la population, la mise en place de stratégies d’hygiène et de santé publique, et l’inspection des hôpitaux gérés par des congrégations religieuses ou par des organisations privées.

L’équipe libérale de Jean Lesage, arrivée au pouvoir en 1960, annonce de grands changements en matière de santé. Suivant la volonté du gouvernement fédéral de mettre en place un système universel d’assurance maladie, l’équipe Lesage propose un programme d’assurance hospitalisation. Le système de santé connaît alors de multiples bouleversements : enquête sur des irrégularités administratives à l’Hôpital Jean-Talon, instauration d’une loi des hôpitaux et révision des pouvoirs de l’ordre professionnel des médecins, pour n’en nommer que quelques-uns.

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Durant cette période, dite de la Révolution tranquille, les médecins craignent que leur ordre professionnel, qui défendait alors les intérêts des médecins, ne soit réduit à exercer un rôle de protecteur de la qualité des soins, et ce, dans l’intérêt du public. De petites associations sectorielles ou régionales veulent obtenir des ententes afin de défendre les droits de leurs membres, mais les médecins appréhendent une division de la profession vu le grand nombre de ces petites entités. Les omnipraticiens comprennent donc l’importance du regroupement et fondent, en 1956, l’Association des médecins de pratique générale du Québec afin de « protéger et développer de toute manière les intérêts professionnels, économiques et sociaux de ses membres ». Cette association ne jouera qu’un rôle limité et sera rapidement remplacée par une nouvelle association aux intentions syndicales plus solides et plus unifiées. Celle-ci sera le prélude à la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec.

Pendant ce temps, le Collège des médecins et chirurgiens de la province du Québec veut, lui aussi, continuer de représenter les intérêts des médecins. Cependant, cette démarche est fortement critiquée. Le Collège est un organisme de contrôle de la qualité de l’acte et de la profession médicale, lui donner aussi le rôle de négocier les tarifs médicaux le placerait en situation de conflit d’intérêts.

De leur côté, les médecins spécialistes créent des associations sectorielles devant certaines inquiétudes face à des projets provenant d’un gouvernement de plus en plus interventionniste ; c’est le cas des neurologistes, des neurochirurgiens, des cardiologues et des chirurgiens cardiovasculaires. Ces regroupements sont controversés : ayant toujours entretenu de bonnes relations avec les partis au pouvoir, les médecins appréhendent qu’une fois regroupés, la population ne les appuie pas. Mais la crainte de l’étatisation de la médecine et de l’imposition du salariat les incite à prêter l’oreille à ces regroupements.

Un neurologue de l’Hôpital Maisonneuve avance l’idée de créer une association de médecins spécialistes et de l’incorporer selon la Loi des syndicats professionnels. Ce médecin, Dr Raymond Robillard, avait en effet constaté les multiples difficultés de ses collègues de laboratoire et de radiologie à obtenir une juste rémunération de leur travail. Il organise une première réunion informelle en février 1961 afin de discuter des problèmes communs aux spécialités médicales. Cette démarche sera le premier jalon de la création d’une grande fédération qui surviendra presque cinq ans plus tard.

Les Radiologistes Au Front

Au cours de l’année 1961, les radiologistes organisent un mouvement de grève qui paralyse les activités diagnostiques et thérapeutiques. Ils dénoncent la mise en place de l’assurance hospitalisation et les problèmes qui en découlent, principalement attribuables à l’inexpérience des fonctionnaires. Dans leur mouvement de grève, les radiologistes sont suivis des pathologistes et des médecins de laboratoire. D’ailleurs, certains médecins de laboratoire vont jusqu’à donner leur démission. Une entente viendra régler la situation, et ce, grâce à l’intervention d’un collègue de l’un des démissionnaires, ce collègue ayant été nommé à la tête du programme fédéral de l’Assurance hospitalisation. Dans l’entente, les médecins grévistes obtiennent gain de cause, mais doivent faire d’importantes concessions qui seront la cause de nouveaux conflits jusqu’au début des années 1970.

Ainsi, les médecins réalisent l’importance de se regrouper : il faut s’unir pour contrer la volonté de l’État qui veut imposer le salariat aux médecins. Dr Robillard rencontre tour à tour les médecins de diverses spécialités médicales. Il les incite à créer de nouvelles associations : celles qui le souhaitent pourront poursuivre leurs activités médicoscientifiques et professionnelles. Les revendications des médecins diffèrent d’une spécialité à l’autre, mais tous réalisent l’importance du regroupement comme interlocuteur valable devant le gouvernement. Le contexte est favorable, surtout que l’on assiste à une accalmie entre les omnipraticiens et le Collège, accalmie qui s’annonce aussi pour une future fédération de médecins spécialistes.

Entre le 13 mars et le 11 juin 1965, huit associations entérinent des résolutions pour créer la fédération. Elles seront dix à signer la requête de création. Le 28 juin, un conseil exécutif provisoire est nommé, car la Loi des syndicats professionnels stipule que la Fédération peut être formée sans que le tout soit approuvé par le gouvernement pourvu qu’une charte soit déjà écrite. La FMSQ reçoit ses lettres patentes le 14 décembre 1965, date où le premier conseil d’administration officiel est nommé.

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