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L'architecture Organique

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de architectura

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1880 – 2084 : quand la définition dépasse les frontières de la fiction organique

« l’archiborescence » d’une notion complexe

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Nombres d’architectes s’en prévalent sans pour autant savoir en identifier clairement le sens exact. L’architecture organique se définit pourtant dans l’imaginaire collectif comme un style ou un mouvement de l’architecture, or c’est en vérité une philosophie, un concept. Notion polymorphe aux multiples facettes qui ne cesse de repousser les limites de son champ de définition, ne peut être rattachée qu’à un seul mouvement englobant. L’architecture organique pourrait se définir d’une part comme une imitation de la nature par sa forme, et d’autre part comme une inspiration de l’organisation et le développement des organismes vivants.

Même si la notion a déjà émergé au XIXe siècle, ce n’est qu’en 1939 que Frank Lloyd Wright définit textuellement le terme d’architecture organique lors de la publication de son livre « Une Architecture Organique ». Une pensée retranscrite quelques années plus tard par David Pearson avec “La Charte de Gaïa”, sorte de “recette magique” permettant, par l’énoncé de grands principes directeurs, de définir les grands traits de l’architecture organique. Il n’empêche qu’encore aujourd’hui nous ne faisons que constamment redéfinir ce terme. Cela rentre en dialogue ou en conflit avec plusieurs autres styles, ou conception (architecture écologique, régionalisme critique, biomimétisme…). Nous décidons de laisser la parole aux architectes eux-même sur leur vision de l’architecture organique.

le banquet : une discussion de différents architectes autour de la notion

1 – Antoni Gaudi - “Il n’y a pas de lignes droites ou des angles aigus dans la nature. Aussi, les bâtiments ne doivent donc avoir aucune lignes droites.”

Figure tutélaire du mouvement Art Nouveau Catalan, Antoni Gaudi, a donné une première expression au concept d’architecture organique. S’inspirant de la Nature et de ses différentes lois biomorphiques, Gaudi a conçu une architecture où la couleur, les formes et la matière participent à l’élaboration d’un ensemble global dont la résultante finale est “l’arbre”, entité totale déclinée de celle-ci. Une « nature de la Nature » comme modèle logique de conception architecturale mais aussi comme ornementation où le mimétisme et l’observation de ses formes traduisent une admiration de l’architecte pour la création et les paysages méditerranéens. Ainsi, Gaudi théorise, avec la déclinaison de son concept “d’Arbre-Homme”, une architecture commune entre les différentes civilisations en mettant en avant un procédé universel de conception avec “des éléments de support naturel minimal”.

2 – Franck Lloyd Wright - « Je déclare que l’heure est venue pour l’architecture de reconnaître sa propre nature, de comprendre qu’elle dérive de la vie. »

Franck Lloyd Wright est le premier architecte américain à théoriser à la fin du XIXème la notion d’architecture organique. Ayant comme maître Wight, Furness & Sullivan, FLW a lui aussi puisé dans l’architecture gothique et son « style organique ». Une pensée influencée tout aussi bien par Viollet Leduc & Owen Jones que de Ruskin & Ruprick Roberts qui ont participé à l’élaboration de sa théorie sur « la ville organique ». Une architecture prenant la forme d’un corps où la nature en serait le caractère, l’organicité l’entité et le matériau un élément-organe qui permettrait à l’ornement de « devenir l’intégral de la structure ». Cette architecture organique, qui trouve son application dans l’expérience typologique sur les habitats péri-urbains « Prairie House », se définit alors comme une composition, un procédé de conception ou « la forme et la fonction ne font qu’un ».

3 – Alvar Aalto - “Nous devons travailler pour des choses simples, bonnes, non décorées, mais qui sont en harmonie avec l’être humain et organiquement adaptées au petit homme de la rue.”

En parallèle au mouvement Moderne, l’architecte et designer finlandais fut l’initiateur du concept de “Régionalisme Critique”. Une approche théorisée par l’américain Kenneth Frampton qui prend comme fondement les différents “traits de caractère” du lieu ainsi que l’emploi de matériaux locaux pour créer une architecture respectueuse de la culture, de l’histoire et de la “mémoire du lieu”. Un mouvement alternatif qui trouva un écho chez les rationalistes portugais membres de l’Ecole de Porto (Siza, Souto de Moura).

4 – Anti-Lovag - “La Nature demande ça.”

Anti-Lovag est reconnu pour ses maison bulles, architecture remarquable sur la côte d’Azur dans les années 60. Appelées plus communément “les maisons des Barbapapa”, le Palais Bulles, ou encore la Maison Gaudet ont été fabriqués grâce à un voile de béton armé sans coffrage, une technique tout à fait insolite qui donne cette forme organique de bulle. Ici l’architecture est un clin d’oeil aux constructions traditionnelles (huttes, cases, grottes) en osmose avec le paysage de la Côte d’Azur. Cette architecture inspirera par la suite la “Blob architecture”.

5 – Junya Ishigami - “[L’architecture] doit prendre en compte son environnement proche et celui de la planète entière, ce qui doit décupler nos réponses.”

Il est vrai que lorsqu’on parle d’architecture et Nature, nous en venons souvent à l’architecture nippone. C’est une vision de l’architecture traditionnelle japonaise comme un exemple parfait entre simplicité et harmonie. Junya Ishigami en fait tout son propos : l’institut de technologie de Kanagawa est une forêt dense de poteaux fins, un musée qui est creusé dans le sol, un restaurant qui a l’aspect d’une grotte, la création d’un lac artificiel qui laisse place à une promenade en son milieu. C’est une vision onirique et poétique du rapport entre architecture et nature.

6 – Schuiten - “Enfant, je rêvais d’habiter les arbres. Aujourd’hui par la force de l’imaginaire, j’habite une cité archiborescente et je reviens de moins en moins souvent par ici. Vous pouvez me croiser dans la rue, mais ne vous y trompez pas, ce n’est qu’une apparence, Je suis ailleurs.”

Luc Schuiten fait parti des architectes qui crée des utopies urbaines, et cela nous fait tous rêver. A l’origine, il est réputé et adoré par les architectes et néophytes pour ses bandes dessinées de villes futuristes. C’est à travers ses différents manifestes utopiques “Archiborescence” et “Vers une cité végétale” que nous pouvons croire à la ville de 2100 constituée uniquement d’architecture organique. Il présente différents types de villes comme la cité tressée, la cité lotus, ou encore la ville solaire.

Léa Balmy, Vincent Richard du Perron

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