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Le pédagonumérique au cœur des dispositifs en réponse à la pandémie

LE PÉDAGONUMÉRIQUE

AU CŒUR DES DISPOSITIFS EN RÉPONSE À LA PANDÉMIE

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Par Robert Grégoire // Directeur exécutif, REFAD

Le terme quelque peu rébarbatif de « pédagonumérique » est entré dans le vocabulaire courant avec l’avènement, en 2018, du Plan d’action numérique en Éducation et en Enseignement supérieur du Québec. Auparavant, nous parlions plus simplement d’enseignement et d’apprentissage en ligne ou de technologies éducatives.

Le Réseau d’enseignement francophone à distance (REFAD) est un organisme pancanadien regroupant des établissements, des entreprises et des professionnels de tous les niveaux de l’éducation et de la formation qui se donne pour mission de faciliter la collaboration entre les acteurs et de susciter l’émergence de pratiques innovantes en matière de formation à distance et d’approches pédagonumériques.

L’énoncé de mission du REFAD stipule que celui-ci assure une présence constante auprès de ses membres et des acteurs du milieu par la mise en commun d’expertises, le partage de savoirs et de pratiques, le perfectionnement, le réseautage et les activités de veille. Le REFAD regroupe plus de 30 institutions canadiennes d’enseignement francophone dans sept provinces et trois ordres d’enseignement.

À l’époque de sa fondation, en 1988, les membres du REFAD traitaient des meilleures pratiques de cours par correspondance, c’est-à-dire le service aux apprenants inscrits à distance, dont la principale méthode d’engagement passait par l’échange postal du matériel éducatif, de la rétroaction et parfois aussi des évaluations. C’était il y a à peine trente ans. Que de chemin parcouru depuis cette époque!

LES MODALITÉS DE L’APPRENTISSAGE EN LIGNE

Grâce à la pandémie, les termes synchrone/asynchrone, présentiel/en ligne et hybride ont fait leur entrée dans le jargon populaire, semant au passage un sain scepticisme auprès de certains. Ces expressions réfèrent à la modalité d’enseignement et d’apprentissage d’un cours à distance. Ainsi, l’étudiant inscrit à un cours en ligne se connecte au cours à travers une plateforme de gestion des contenus d’apprentissage, où il s’identifie et progresse dans les rubriques d’apprentissage. Ceci par opposition aux cours traditionnels qui se déroulent en classe et que d’aucuns aiment décrire comme étant en présentiel (d’aucuns préfèrent parler de face à face).

En ligne (donc à distance), l’étudiant peut se connecter au moment de son choix pour apprendre. On dit alors que son apprentissage est asynchrone parce qu’il progresse à son rythme, sans égard à l’activité de ses confrères et consœurs qui cheminent à leur convenance dans les contenus d’apprentissage. Pour la majorité des cours en ligne, dans lesquels les rubriques d’apprentissage sont par définition offertes grâce à un système de gestion des contenus d’apprentissage, l’enseignant prévoit aussi des moments de rencontre afin de veiller au bon déroulement de son cours. On dit de ces moments prévus dans le temps, lorsque tous les étudiants se connectent au même moment que l’enseignant, qu’ils sont synchrones.

Avant la pandémie, la minorité d’institutions offrant des programmes en ligne le faisaient suivant un mode hybride. C’està-dire que les étudiants inscrits à un cours en ligne pouvaient apprendre en tout temps et de n’importe où, mais qu’ils se devaient de faire acte de présence à des moments réguliers avec leur enseignant et condisciples, en mode synchrone. L’hybridité découle alors du fait que ces étudiants progressaient généralement de façon asynchrone, à leur propre rythme, en faisant aussi acte de présence synchrone à des moments établis.

Bien qu’il soit encore tôt pour généraliser, le pivot vers les cours en ligne pour cause de pandémie a souvent donné lieu à une solution rapide de cours à distance dits synchrones,

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AU CŒUR DES DISPOSITIFS EN RÉPONSE À LA PANDÉMIE

contenant peu ou prou de conception pédagogique pour guider la progression de l’étudiant avec des activités en ligne structurées d’une manière plus pédagogique. Pour légitime que soit la modalité d’enseignement synchrone, que la majorité reconnaîtront sous la forme de réunions Zoom et autres webinaires, il demeure que dans les mains d’un enseignant inexpérimenté en formation à distance, cette approche prête flanc aux plus vives critiques, justement parce que le « pédagogique » est absent du « numérique », ne laissant plus qu’une morne tête parlante à l’écran. Des heures durant. En l’occurrence, tout sauf du « pédagonumérique ».

PIVOT VERS LE PÉDAGONUMÉRIQUE ET CHANGEMENT DE PARADIGME

Plusieurs disent avec raison qu’il n’y aura pas de retour en arrière possible après la pandémie. La nouvelle normale incorporera sans doute beaucoup plus de télétravail, permettant à de nombreux professionnels d’interagir avec leurs collègues et de remplir leurs engagements de l’endroit qui leur convient. À preuve, la hausse marquée un peu partout au pays des couts de résidence en milieu rural.

Il en va pourtant différemment à la formation initiale. Ceci s’explique entre autres par deux réalités incontournables. Tout d’abord, l’aptitude de l’étudiant à apprendre en ligne est inversement proportionnel à son degré d’autonomie. En d’autres mots, plus l’élève est jeune, plus il a besoin d’encadrement, d’accompagnement et de contextualisation. À l’opposé, les élèves en fin de secondaire deviennent de meilleurs candidats aux cours en ligne, à mesure qu’ils acquièrent une autonomie de vie accrue.

La seconde réalité incontournable à l’apprentissage en ligne découle du fait que l’école n’est pas à prime abord un lieu d’apprentissage, mais plutôt un milieu de vie où l’adulte en devenir apprend à côtoyer ses pairs et à interagir en société. Cet apprentissage essentiel à l’être humain qui est grégaire par définition constitue la principale raison d’être de l’école, permettant entre autres de resserrer les mailles du filet social que les régimes démocratiques, libéraux et progressifs souhaitent propice à un idéal de citoyen compétent et éduqué. Un tel modèle permet de veiller au bien-être de tous, peu importe les circonstances sociales individuelles.

VERS UN RENOUVEAU DE L’ENVIRONNEMENT SCOLAIRE

Peu d’entre nous disposons de la boule de cristal qui permettrait de prédire vers où se dirige l’école de demain. Pourtant certains indices qui se dessinent très nettement permettent d’envisager un renouveau scolaire important. Tout d’abord, l’ubiquité des dispositifs technologiques, le « numérique », présage une révolution complète de l’apprentissage. En effet, les jeunes d’aujourd’hui baignent dans un monde où les technologies sont omniprésentes. L’une des particularités de cet univers technologique branché réside dans le fait que la connaissance est librement accessible à tous, pour peu qu’on vive dans un régime démocratique connecté.

Ensuite, les éducateurs réalisent maintenant qu’il convient de privilégier le développement des compétences dans l’éducation. Dans ce modèle, les élèves confrontent des problèmes authentiques et complexes, s’inscrivant ainsi comme acteur principal de leur cheminement éducatif de citoyens en devenir. L’éducateur change alors de posture pour adopter un rôle d’accompagnement et de facilitation. C’est pourquoi le développement des compétences numériques constitue un enjeu incontournable vers le renouveau éducatif. t

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