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L’ACTE DE RESISTANCE _ 2
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CONSONANCE ET DISSONANCE _
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« Il ne faudrait pas perdre la musicalité du langage » m’écriais-je en approchant la Dead Zone et en poursuivant les installations sur site de nos prédécesseurs. Je ne voulais pas écrire des passages que les lecteurs sauteraient, en perdant le rythme de la lecture ou le sens de l’orchestration, si caractéristique de la prose romanesque. « Le style est souvent plat », rajoutais-je, en m’employant à décrire les opérations d’à côté, « comme si l’ennui présidait à leur programmation et n’était que la conséquence de l’analyse fade de leurs observateurs ». La démarche « pour sortir de l’ennui » s’apparentait à une démarche de « bonne humeur » fut-t-elle irrévérencieuse. J’hésitais, pour arriver à quelque chose qui soit simplement nouveau, mais pas idiot, à composer avec des consonances et des dissonances, comme on pourrait le faire avec des consonnes et des voyelles. Car, il s’agissait, pour moi, de chambouler le « prêt à construire », en brassant des références urbaines, littéraires ou stylistiques, et de détourner aussi bien les codes d’expression que les signes d’une rigueur, dictée par la règle ou (plus étrangement) par d’étranges raisonnements. La consonance en musique, c’est « sonner avec », en ajoutant « qu’elle désigne la cohérence d’un ensemble de sons entendus simultanément ». On dit que c’est une harmonie tonale. Pour construire la ville, la consonance c’est « réaliser avec », en supposant que tout sonne pareil. Et, en architecture, la consonance c’est «composer avec ». C’est présumer, qu’appliquée à notre art, elle consisterait à assembler des formes, des gabarits et des architectures simultanément produites. Elles seraient similaires et unitaires, tendraient vers une cohérence de signes et « d’appellations contrôlées », très éloignées des métissages ou des assemblages hybrides, « chacun pour soi, vœu pieux pour tous ». La dissonance en musique, désigne la discordance d’un ensemble de sons (accords ou intervalles) produisant une impression d’instabilité et de tension nécessitant une résolution. Toute note dissonante doit être considérée comme « une note attractive faisant partie d’un mouvement mélodique obligé ». Appliquée à l’architecture et à la mise en scène urbaine, la dissonance pourrait être l’expression simple de matières emmêlées
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CONSONANCE ET DISSONANCE _
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et d’influences diverses. On admettrait que différents styles sont alors compatibles (pas « quels qu’ils soient ») à la condition qu’ils participent à la fabrication « d’une composition consonante bâtie volontairement sur des dissonances ». En 2003, Christian Lacroix, dans sa collection Printemps /Eté, ose la cohabitation, avec une capote fin XIX ème, portée avec un court jupon en organdi, croisement des époques et des temps, des matières et des destinations. En s’attaquant aux mélanges des genres, le couturier poursuit dans la voie d’une créativité débridée et démontre, comme s’il en était encore utile, avec les délires de Jean Paul Gaultier qui consistent, depuis plus de vingt ans à assembler, à récupérer, à découdre, à casser, à assembler, qu’elle peut casser les diktats et les assemblages convenus pour des oeuvres pleines d’à propos. Désormais, l’éclectisme n’est plus entre les pièces d’une même collection ou d’un même territoire urbain. « Il peut configurer la pièce, elle-même ». Voici venu le temps des appellations semi contrôlées, des demi-garanties, des certifications incertaines, des matériaux composites et des moteurs hybrides. Nous sommes à l’heure du métissage, du mélange des mots et des expressions, des langages et des genres. Le cinéma et la télévision nous ont appris à confondre réalité et fiction, les vrais mensonges et les fausses vérités. Chacun installe dans le paysage ses propres accumulations. En quoi devrait-on se gêner de laisser apparaître la traçabilité de ses emprunts ?
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LES ARCHITECTES ET LE POUVOIR _
Il suffit d’exercer une certaine curiosité sur les rapports entretenus, à travers l’histoire, entre les architectes, les artistes et le pouvoir pour mettre en évidence leurs rôles respectifs dans la construction de toutes les œuvres importantes qui marquèrent leur temps. Pour apporter au débat un éclairage précis sur le rôle particulier qu’ont tenu l’artiste et l’architecte, au fil du temps, dans leurs sociétés. C’est à travers ce type d’approche ‘comprend mieux quel est le rôle que peut tenir l’architecte aujourd’hui, mais aussi l’importance de celui qu’il devrait occuper dans les années à venir. Les architectes de l’an V (Le rôle revu de l’architecte dans la période actuelle).
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De tous temps, les architectes et les artistes ont placé l’art au service des grandes causes et ont entretenu avec le pouvoir des relations compliquées. Mais si leurs relations ont évolué dans le temps et revêtu des formes multiples d’expression, c’est parce que le pouvoir a lui-même changé, au cours du temps. Les créatifs et les gens de pouvoir se sont souvent croisés, rapprochés ou même affrontés. Ils se sont influencés et se sont souvent rendus complices d’oeuvres majeures. Ce qui ne les a pas empêchés de violemment s’opposer sur des sujets importants, ayant trait à la suprématie des pouvoirs, sans jamais vraiment s’éloigner les uns des autres. Brunelleschi, Michel Ange, Mozart, Léonard de Vinci, Géricault, Delacroix, Goya, Maïakovski, Le Corbusier, Wagner, Gaudi, Picasso, Boulée, Piano, Pei et beaucoup d’autres ont convolé en justes noces avec les papes, les rois, les présidents. Ils croisèrent, tous, des orientations existentielles et décisives différentes et purent, sur des modes distincts, modifier le cours des choses avec art et sang-froid.
Château de Versailles
Le conflit ou le divorce entre l’art et le pouvoir ne peuvent donc exister. Car l’artiste et l’architecte sont des éléments structurants du jeu complexe qui les rapproche de cette autorité politique qu’ils ont toujours accompagnée au cours du temps, soit en la servant, soit en l’exerçant.
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10 Les Architectes de l’an I (du Quattrocento au XVI siècle) Brunelleschi revendique l’aptitude du génie en inventant des formes et des techniques nouvelles et passe en force pour imposer la puissance inventive d’un nouveau monde. Le Bernin brille grâce à son engagement spontané et s’illustre dans le dessein jésuitique. Et Michel Ange, sous la papauté de Jules II, va jusqu’à défier sa souveraineté, en se désignant, à l’égal de Dieu, créateur suprême. Les Architectes de l’an II (de la Renaissance à Malraux) Mais la Renaissance, sous la puissance de ses monarques, les transforme en auxiliaires de la gouvernance, quand elle n’en fait pas ses adversaires. Les rois et les papes remettent la main sur le pouvoir spirituel, faisant d’eux des gens ordinaires. Rien d’autre que «de petites gens sous commande» qui doivent bâtir et évoluer sous leur enseigne. Plus tard, au XVI et au XVII siècles, et comme dans un éternel rebondissement, les architectes construisent pour célébrer à nouveau la puissance de l’Etat. Ainsi, Buckingham satisfait à l’absolutisme du roi d’Angleterre, l’Escurial à celui du roi d’Espagne et Versailles celui du roi de France. Au XVIII siècle, à Venise, Canaletto, marque le passage de l’art sacré vers de nouvelles valeurs liées aux activités ordinaires et au développement des échanges commerciaux, Il invente un nouvel art de vivre qui met, à la portée de tous, ses perspectives, rendues reproductibles. L’art et l’allégorie de l’architecture s’expriment à travers la gravure et descendent dans la rue et le long des canaux de la sérénissime. Avec les déconvenues et les désillusions qui frappent le XIX siècle, les créateurs se retrouvent seuls, face à un pouvoir affaibli. La création et l’institution se séparent. Géricault, Delacroix, Rodin ou les impressionnistes font sécession, comme les architectes et sont récupérés par la République qui se veut alors restauratrice de la liberté de créer. Et c’est avec Malraux, dans le XX siècle d’après-guerre, que la collusion des pouvoirs est
voulue et s’impose. L’Etat fabrique des lois qui protègent les artistes, les auteurs et les architectes. Et leurs œuvres, aussi. Les Architectes de l’an III (de Pompidou à Mitterrand) Les années Georges Pompidou et la période de la présidence de François Mitterrand réveillent à nouveau cette attirance irrépressible entre le pouvoir et l’artiste. Des oeuvres importantes voient alors le jour (Beaubourg, la Pyramide du Louvre, l’Arche de la Défense) donnant à l’architecte la responsabilité d’interpréter le nouveau dynamisme culturel, Dans toutes les disciplines, les créatifs se transforment en acteurs exposés et, parce qu’ils sont subitement soumis aux raccourcis fulgurants d’une communication ultra-synthétique, ils agissent sur des univers rétrécis, mais mieux adaptés au rythme ultra-rapide d’une communication de plus en plus dévorante et dévastatrice, Nous sommes loin des valeurs mystiques, lentes et partagées qu’entretenaient Michel Ange ou Brunelleschi, avec les populations. Les Architectes de l’an IV (du début des années 2000 à aujourd’hui) Au début des années 2000, la masse la plus importante de la commande passe des mains du secteur public à celles du secteur privé. Le journaliste François LAMARRE pointe du doigt le déficit de performance attendue entre la promesse des projets lancés et la réalité du résultat, quand il écrit « que les constructions engagées sous l’autorité d’une politique de prestige sont dépassées et qu’on n’en récupère aujourd’hui que les débris inconséquents ». L’architecte «nouvelle génération» est, dès lors, engagé, malgré lui, dans une obligation de produire des réponses plus adaptées aux questions économiques et politiques et, de manière plus ciblée, à celles qui restent posées par la mutation ultra-rapide et sur-sophistiquée de nos sociétés. Pour y parvenir, il met en place des dispositifs méthodologiques qui fabriquent les
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LES ARCHITECTES ET LE POUVOIR _
12 versions opérantes des projets modernes. Il favorise certaines aptitudes proches d’un art de synthèse qui le conduisent à inventer une forme nouvelle plus personnelle, plus réfléchie et plus complète. On peut alors espérer que l’architecte sera vu autrement qu’à travers « l’illustre illustrateur » qu’il était devenu pour les promoteurs ou pour la puissance publique. Ce raisonnement se construit d’abord autour des éléments lourds et prioritaires d’un projet et libère la dimension sensible et imprévisible, indispensable à tout ouvrage partagé. Mais l’art n’est pas absent de la méthode. L’architecte en fait sa cible. La décision est diluée et se disperse avec le temps. Quand, en parallèle, la démocratie atteint le degré le plus pervers de son succès. Trop de concertations ont tué l’expressivité et la cohérence des projets. L’architecte, dont l’œuvre est prise, chaque jour davantage en otage par les professionnels du recours, s’interroge sur son rôle : Est-ce que Brunelleschi, au moment d’entreprendre la coupole de la Cathédrale de Florence, comme n’importe quel architecte aujourd’hui, peut sortir vivant (ou simplement entendu) du croisement meurtrier des décisions engagées, sur le terrain politique, par des élus, des collèges d’experts, des investisseurs et des associations qui se partagent le pouvoir ? Les Architectes de l’an V (d’aujourd’hui à plus tard) Les managers ont remplacé les ingénieurs après que les ingenieurs ont remplacé les architectes dans la conduite des affaires. La culture du tableau récapitulatif et celle de la prévision d’aléas ont supplanté le recours aux connaissances techniques qui présidaient à tous les projets. La renaissance de groupes d’individus capables de résister à l’encombrement de ces forces dispersées est urgente. L’architecte d’un « genre nouveau » devrait glisser vers des territoires nouveaux où l’intuition des solutions techniques remplacerait celle des formes et des figures
infondées qui nous encombrent. La question sensible du pouvoir évacué comme celui du style ou de la couleur, l’architecte pourrait bien se distinguer par une position solide au croisement synthétique des urgences. C’est sur le chemin d’une préservation scientifique de la planète, de ré-interventions sur l’art et d’une harmonie encore floue entre les énergies elles-mêmes et ce qu’elles interdiront ou permettront de faire (car, là, est le nouveau pouvoir) qu’il devrait réapparaitre. Un monde s’éteint par épuisement au moment où un autre s’ouvre sur une nouvelle façon d’aborder la curiosité. On s’aperçoit, qu’à travers le temps, l’influence de l’autorité s’épuise et que la société moderne trouve d’autres moyens d’exprimer sa puissance ou les formes de ses politiques. C’est la communication, poussée à l’extrême, qui commande et se glisse entre les arts et le pouvoir, constituant une inévitable troisième force qui change la règle du jeu. Le monde de la grande diffusion déplace les cibles autant qu’il affaiblit les lignes de compétences d’un commanditaire qui délègue désormais son ambition à des commissions stériles, incapables de définir des lignes de conduite claires à des architectes qui s’installent peu à peu dans la désespérance. L’architecte et l’artiste se réfugient dans une réflexion plus sourde. Bien qu’isolés et transformés en « produits dérivés et dérivants », ils restent les seuls à pouvoir encore garantir, dans un monde désincarné et disloqué, des actes de cohérence harmonieux et endurants. Figure libre dans un milieu confus dont la liberté d’action sera gagnée sur le dos d’un incroyable abandon des responsabilités.
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L’ACTE DE RESISTANCE _
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On constate que la construction des logements s’effrange dangereusement à l’endroit de la résistance de son rôle social ou de son « low standing ». L’architecture domestique, envoyée au combat du « toujours moins cher » rivalise d’oppositions avec celle du « toujours plus cher » de projets publics mal gérés et sur-dessinés. Car, comment résister à l’effeuillage chronique de la construction et de la ville, constaté sans que personne ne réagisse vraiment ? Cet effeuillage est un signe flagrant de la déliquescence des attitudes responsables, au profit de l’affermissement du « tout rendement ». Faut-il le négliger ? Le secteur public, on le sait, malgré toutes les incantations tactiques, n’a plus de moyens pour porter loin un développement immobilier dynamique et concerté. Et même si les villes et les communautés urbaines ont gardé cette obligation d’être vigilantes sur la valorisation de leur foncier, leurs compétences ont été transférées, sans frais, ni précautions, au secteur privé. Mais, s’il y a bien eu transfert opérationnel et financier, on n’y a constaté aucun portage culturel, ni aucune prescription encadrée. La loi du « rendement en toute bonne foi », devenant l’évangile du nouvel investisseur. L’acte de résistance est celui qu’on accorde communément, au caricaturiste à l’artiste, à l’architecte. Pour les premiers, la démonstration d’une résistance active est faite. Les derniers, désemparés par la crise, ne se retrouveraient-ils pas complices, malgré eux, d’une exigence dégradée par ordonnance ? La fermeté et l’audace, seraient-elles devenues coupables ? A ne pas en prendre la mesure, le risque de disparaitre pour l’architecte est grand. Il s’agit, pour l’architecte, d’atteindre le noyau dur de la beauté et de l’efficacité, s’il veut rester indispensable à l’acte de construire et ne pas se déguiser en illustrateurs de programmes chiches.Bien loin de moi, l’idée d’avancer que l’acte de résistance est chose aisée, naturelle et inscrite dans nos gènes. Mais, rien ne nous oblige à reculer devant la contrainte du « tout commercial, du tout médiatique». Je m’y suis inlassablement opposée, toujours laborieusement, parfois difficilement, mais jamais coupablement.
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16 Faire acte de résistance, sur ce terrain n’est donc pas chose facile, tellement les habitudes, les réflexes et les certitudes sont présentes. Mais, proposer un code d’architecture universel pour faire front serait illusoire. « Il ne peut y avoir que des actes distinctifs, en réponses particulières à des cas spécifiques ». Ce serait donc répondre par une succession de contre-pieds aux successions d’absurdités qu’on nous assène, à chaque projet, au prétexte que tout aurait déjà été testé et vérifié. « Rapports, audits et analyses commerciales en témoignant formellement, bien sûr ». Cette histoire, dans laquelle se déclinent des architectures prioritairement domestiques, trouve son origine dans les opportunités que j’ai croisées, ces six dernières années. J’ai pu successivement atteindre des opérations de logements, de bureaux, de sièges d’entreprises ou d’équipements, parce que l’occasion m’en était donnée mais aussi parce que c’est sur ce terrain que la ville s’écrit. Et la ville, ses extensions, sa densité, ses mutations énergétiques, son esthétique et ses règles, m’intéressent.Cette présentation des choses, vous l’aurez compris, vise à éradiquer, la question politique d’un style qui encombre la dimension fondamentale de l’œuvre et limite sa portée. Il s’agit, bien sûr, d’atteindre le noyau dur de la beauté, en tendant vers l’efficacité et de rester essentiels à l’acte de construire, en ne nous déguisant pas en illustrateurs de programmes chiches. Chacune des réalisations qui illustrent cet ouvrage est porteuse d’un un acte de résistance, soit que l’on attendait tout autre chose, soit qu’elles affichent un refus à se standardiser ou à se limiter à l’urgence. Paris - Rive Gauche - M9D4 . Cet ensemble de logements fait référence à la pensée de Jean Prouvé : « Ce n’est pas la forme qui fait la belle chose, mais sa contexture ». Echapper aux enduits ne fut pas chose facile, mais l’énoncer comme préalable est faire acte de résistance. Déployer des centaines de mètres carrés de tôles d’aluminium, perforées ou embouties, légèrement dorées, en guise de façades, de persiennes ou de vêtures, ne fut pas de tout repos. L’entêtement devait conduire à la nature inédite de cette opération. Elle devint le socle de son succès commercial.
Paris - Saussure - Rezo « Quand à la banalisation des surfaces de bureaux ne conduit pas automatiquement àla banalisation de l’architecture ». La construction d’immeubles de bureaux, sans attribution directe, conduit couramment à une écriture banale, capable de tout absorber. L’acte de résistance consiste dans ce cas précis à lui opposer un dessin nouveau dont les vibrations s’accorderaient avec celles du paysan ferroviaire. Nancy - Rives de Meurthe - Quai Ouest « Quand des yeux ne se contentent plus de regarder par paires ». A Nancy, on nous demande de l’exceptionnel. Mais la dimension de l’exceptionnel, n’ayant pas la même signification pour tous, l’acte de résistance se situe sur la précision de sa définition. « Ici, à Nancy, sur l’Ile de Corse, les choses ne se sont pas passées comme elles auraient pu se passer. Car si l’ambition n’avait été inscrite dans le code génétique de ce projet, rien d’intéressant n’aurait pu être fait. Car, tout autant insolite que savoureux, le côté sans histoire d’une affaire sans histoire s’est très vite transformé en histoire singulière d’une affaire singulière. Paris - Val de Marne - Les Dunes « Quand les grandes banques se mettent à onduler». L’acte de résistance se manifeste dans le nouveau siège de la Société Générale dès les premières esquisses (concours d’architecture) pour véhiculer une idée en rupture totale avec les réponses archétypiques convenues. C’est une attitude, à l’évidence, plus risquée que celle qui consiste à glisser sa réponse dans le droit fil de celles qui sont labellisées. Strasbourg - Presqu’île Malraux - Black Swans Trois programmes sont « interchangeables » dans une même enveloppe. C’est elle qui, grâce à ses variations, construit la chartre graphique des trois bâtiments et apporte à l’œuvre cet acte de résistance : il va à l’encontre des habitudes anciennes.
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FEMME EN ARCHITECTURE _
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« Il y a-t-il un rapport direct ou indirect entre l’avènement des femmes en architecture et la sur-utilisation des femmes dans les séries télévisées ? » Acte 1 Il n’y a qu’à regarder, avec attention et curiosité, ce que la télévision d’aujourd’hui nous renvoie, dans ces temps incertains, pour comprendre les fissures qui se sont installées dans les images véhiculées par nos anciens héros. De nouveaux princes bravaches et de nouvelles princesses crâneuses apparaissent sous plein de formes possibles, nouvelles, et souvent inattendues. Elles façonnent les derniers paysages télévisuels et cinématographiques d’une époque qui mute et modifie ses références, de façon souvent imprévisible, par ses inventions et toutes ses hardiesses. Les jolis cœurs, les vigoureuses, les athlétiques, les surdoués, les immortels, les beaux gosses, les Ursula Andress et même, plus près de nous, ces hominidés volants, mihomme mi- araignées, mi-homme chauve-souris pointé d’oreilles pointues, ont épuisé les registres les plus éculés de tous nos derniers mondes fictifs. Les fidèles téléspectateurs, adulateurs irrécupérables des John Wayne et des Elisabeth Taylor d’une époque où les acteurs étaient propres et bien coiffés avant d’aller se faire tirer le portrait chez Harcourt, ont peu à peu démystifié leurs héros pour s’attacher avec acharnement aux aventures les plus extravagantes, les plus violentes ou les mieux dessinées de ces exclus, ces parias, ces nains, ces cinglés, ces moches, ces demi hommes, ces amputés, ces obèses, ces vikings de l’apocalypse, ces indescriptibles Gollum et autre Mystique qui se transmute à l’envie, au milieu des X-men. Les idylles, les suspens, les sagas, ont changé leurs terrains d’expression, tout comme leurs spectateurs. Les acteurs ont changé de physionomie et les histoires qui s’écrivent, de plus en plus, comme des tourbillons de survie romanesque. Depuis Spielberg et la Guerre des Etoiles, elles ont changé de galaxies et, avec elles, les regards qu’on y prête. Mais, sait-on vraiment si elles ont été le produit pur de l’imagination des hommes ou si ce ne serait pas d’abord les espèces humaines et sociales qui, mutantes et voraces
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20 de changements n’auraient pas exprimé le vœu d’exposer un destin dans lequel nous engagent ces temps poissés et incertains ? Les hommes avaient le rôle du seigneur dans toutes ces aventures. Ils en gardent encore la plus grande partie, laissant aux femmes le pouvoir occulte et l’affichage simplifié de leurs faiblesses pour elles. Mais les héros qui changent de look et d’horizon ont aussi leurs propres hiérarchies. Et il n’est pas rare de voir l’homme inquiet trouver la puissance qui lui manque chez la femme, la femme bafouée et répudiée devenir chef d’armées rebelles et de sentinelles surnaturelles, armée de faucons guerriers ou de Blaster DC 15. La part féminine se renforce. Et là où les femmes étaient majoritaires en nombre et minoritaires en décision, elles s’imposent aujourd’hui en ordonnance. C’est comme dans ces séries où leur nombre augmentait sans que les rôles majeurs ne leur soient réservés et où on pouvait craindre, à contrario, une perte de représentation avec le départ de l’écran d’une de ses championnes ou l’affaiblissement d’une de ses reines. Les départs, les questionnements, les déplacements, les ont menées, au contraire, la plupart du temps, vers une émancipation inattendue et libératrice, Car les personnages féminins des séries sont riches en caractères et ne sont plus désormais, cantonnés aux seuls rôles d’héroïnes accablées et accessoires, poursuivant un chemin chaotique et intriguant. Ce sont de vraies héroïnes évoluant à visage découvert, au milieu des hordes de barbares, ou des armées d‘indicateurs fébriles sur-informatisés. Elles sont créatives et impertinentes, façonnent les nouvelles images et nous manquent quand elles en sont absentes. Ce n’est donc plus d’émancipation qu’il s’agit, mais bien d’anticipation. Acte 2 L’architecture (puisqu’il s’agit ce cela, au fond) aborde bien ses anticipations. L’émancipation des femmes entrées en architecture pour y jouer d’abord les seconds rôles s’est affranchie de toutes les règles en vigueur pour y développer du pouvoir. Mais qu’est ce pouvoir en face de ces décennies et de ces siècles où l’emprise des hommes sur toutes les phases d’un ouvrage fut sans partage ?
Il ne s’agit pas aujourd’hui d’imposer l’effet du nombre ( les femmes sont en nombre supérieur à celui des hommes dans les Ecoles d’architecture) comme une des lois du droit à la décision, ni même de féminiser les styles ou de modifier les codes du plan. Non, il s’agit plutôt d’installer la confiance sur le terrain d’échanges des idées, de la construction et de l’autorité. Et pourquoi pas sur ceux du sacro-saint « business » dont les terrains de golf leur ouvriraient leurs parcours. L’authenticité de l’architecture est apparue plus forte que jamais sous François Mitterrand, portée par une dimension exceptionnelle que les canonnades de règles imbéciles et de droits à recours ont porté au plus bas, aidées bien involontairement par les coups mortels des crises successives. Crises économiques, crises de confiance, génération du « No Future » et absences d’utopies ont produit concomitamment un « petit déclin », dont on peut dire qu’il fut une sorte de « désespérance molle » qui fit oublier la consistance de l’être et de ses sensations. L’être, alors, en moins de temps qu’il faudrait pour le consigner, fut (et ce n’est pas étonnant) féminin. Car, moins empêtrée dans des regards improductifs et repentis sur ce qui venait soudainement de s’arrêter, les femmes trouvaient, là, une place de choix, pour proposer un autre monde mis en mouvement, plus silencieux, plus inventif, posé, plus ajusté. Un monde construit sur une pensée nouvelle plus facile à porter puisqu’elle ne ressemble en rien à celle de nos anciens héros.
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EVOLUTION ET DESTRUCTION _ PARIS SE RECONSTRUIT ... Faut-il détruire pour transformer ?
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POSTE DU LOUVRE / PARIS
Dans un pays comme la France où le patrimoine tient une place importante, voire exagérée, dans l’esprit d’une population capable de citer assez naturellement des monuments comme Versailles, Chenonceau, Chambord, Le Louvre, la Tour Eiffel ou le Mont Saint Michel, il est toujours assez difficile d’annoncer qu’il va falloir détruire ou remplacer un bâtiment existant, même partiellement, par une construction neuve. L’architecture contemporaine, pourtant essentielle pour dynamiser l’économie d’un pays et redonner de la perspective aux nouvelles générations, reste trop souvent suspecte et ne convainc pas grand monde, là où l’obligation de conserver avant d’étudier, reste un sport national. La tradition est largement représentée en France. Et ce ne sont pas des émissions de télévision comme des Racines et des Ailes» qui redonneront le gout de la modernité et l’envie d’un futur architectural aux français. Il s’agit de savoir où situer exactement le patrimoine pour le rendre à nouveau UTILE. Et où nous situer, nous, architectes, dans cette histoire ? Comment agir pour lui restituer des objectifs comme : l’appartenance à la collectivité, l’équilibre économique d’une opération, le prolongement des valeurs esthétiques, les restaurations émotionnelles et les nouvelles activités. La modernisation architecturale du Louvre n’a-t-elle pas, en effet, rendu le Palais du Louvre plus vivant et plus profitable ? Et pourtant, il aura fallu oser y toucher.
ESPCI / PARIS
La transformation d’un bâtiment ne permet pas de faire l’économie d’un diagnostic particulier pour chaque bâtiment. Elle nous oblige à des réflexions spécifiques et pertinentes, adaptées, d’une part, à ce qu’on trouve sur les sites et dictées, d’autre part, par tous les objectifs qu’on lui aura fixés.
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24 Le rôle de l’architecte se situe donc dans la recherche de solutions particulières à chaque fois pertinentes, renouvelées et appropriées : ACCOMPAGNER, JUXTAPOSER, SUPERPOSER. Aussi, et afin de clarifier cet avant-propos, plutôt général, je vous propose de prendre justement comme exemple L’Ecole Supérieure de Physique et Chimie Industrielles (ESPCI), concours pour lequel ma proposition, en 2015, a été retenue.Ce projet consistait à repenser, l’extension et la modernisation de cette école des prix Nobel sur la base d’une succession d’ouvrages construits à des époques différentes, depuis sa fondation en 1870, et avec des architectures plus ou moins copiées ou reconduites les unes sur les autres. Pour l’ESPCI qui n’était qu’un ensemble maladroit de bâtiments juxtaposés et superposés les uns aux autres, j’ai opté pour une refonte quasi complète de l’immobilier en place, tout en ne conservant que ce qui présentait un intérêt pour la mémoire du site et de l’Ecole. Et ce dans une obligation principale d’équilibre sur le plan économique. Les surfaces existantes s’avéraient incapables d’accueillir les programmes proposés pour refonder les existants et étendre l’Ecole. L’extension qui avait été réalisée dans les années 2000, se montrait insuffisante pour ingérer une partie des nouvelles activités programmées. Trop étroite, trop mal construite, trop lourde à adapter et ne consommant même pas la hauteur maximale permise par le PLU. Une extension, en fin de compte, plus pénalisante à conserver qu’à démolir. Il fallait donc ré/intervenir sur des jauges devenues trop faibles. Nous abordons la une question de fond : la transformation d’un ouvrage nécessite-t-elle nécessairement la destruction partielle ou complète de ses supports ? Ou, comment évalue-t-on objectivement l’économie réelle et la pertinence agissante d’un bâtiment reconverti, au moment du projet ?
Dans le cas de l’Ecole de Physique et de Chimie Industrielle, l’identité de l’école était à définir. Compte tenu de ses ambitions, en matière de visibilité, dans le concert international des grandes Ecoles engagées dans la Recherche, (sept NOBEL en sont sortis, Charpak, Pierre-Gilles de Gennes, Pierre et Marie Curie) il fallait, d’après moi, aller plus loin que la solution préconisée qui consistait à s’appuyer sur les extensions successives pour en rajouter une de plus. Pour cela, il a été utile de radicaliser la démarche et de considérer que l’histoire serait gardée à l’endroit où elle serait profitable pour l’image finale de l’Ecole et reconsidérée partout où elle constituerait plus un gêne qu’autre chose. Mais, par-delà ce positionnement, que j’ai voulu sans équivoque, se pose la question de l’architecture, elle-même, soulevée par un concours de cette nature qui fixe la prise de risque pour un architecte. Comment se soustraire, en effet, à cette attitude, plus stratégique que constructive, qui consiste à ne toucher à rien, comme si on devait être obligatoirement en harmonie avec les allégations sans preuves de ceux qui pensent que conserver coûte toujours moins cher que d’enlever et reconstruire ? Il m’aura a fallu convaincre (et pas moins de 5 séances de démonstrations et de comparaisons de chiffres furent nécessaires, auprès des services financiers de la Ville de Paris) pour montrer l’intérêt économique d’une proposition qui raisonne à la fois sur l’investissement à terme et sur le coût des travaux. Car, la culture du cosmétique n’est pas une bonne solution quand il s’agit de repenser, étendre et performer, pour des décennies, des institutions de cette nature. Je ne pouvais donc pas, sous prétexte que ça pouvait déplaire à ceux qui avaient rédigé les directives de la consultation, faire l’économie d’une réponse qui visait, en priorité, l’objectif de l’Ecole. Cet objectif qui demeure, me semble-t-il, la performance d’usage pour accompagner les évolutions des besoins des chercheurs.
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26 Or, et s’il est apparu parfaitement clair qu’il fallait rattacher au nouveau plan masse tout ce qui avait contribué à l’histoire d’un immeuble fortement marqué par ses singularités, comme ses façades de briques, ses bas-reliefs, ses surfaces de mosaïques, l’expression visible de ses laboratoires, ou ses portraits marquants de ses grands chercheurs, il n’était pas certain qu’il faille conserver les stigmates des transformations successives.
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C’est ainsi que je pris la décision risquée de proposer de démolir les extensions réalisées dans les années 70, jusqu’à celles, plus difficiles à enlever, des années 2000. En affirmant que l’architecture d’aujourd’hui est, en substance, le patrimoine de demain, mais à la condition qu’elle se radicalise sur son authenticité, j’aurais au moins essayé, avec ces deux projets de transformation et d’extension d’ouvrages existants de confondre ORIGINE ET DESTINATION, sans que cela relève d’une démarche stylistique ou générique.
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AU POURTOUR DES TOURS PARIS PREND DE LA HAUTEUR _
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Paris va évoluer en restant une des grandes métropoles européennes ou dans celles qui s’ouvrent à l’avenir et qui rayonnent d’énergie. Or la construction des tours dans les années 70, dans la capitale, a subi un arrêt brutal, du fait même d’une architecture et d’un urbanisme approximatifs qui n’ont pas tenu compte du patrimoine qu’on commençait à découvrir. Beaucoup de crispations politiques et sociales ont persisté autour de ces chantiers et continuent à nourrir leur rejet. Ces objets esseulés et coupés de la ville, n’ont jamais pu démontrer leurs pertinences urbaines, trop souvent arrogants et bâtis sans contexte. Les conversations sur les tours sont inépuisables. Et les avis, concernés ou pas, sur ce que doit être, ou ne doit pas, être une tour sont infinis. Mais qui aurait raison ? Et qui aurait tort, dans cette avalanche d’impressions opposées ? Personne ne saurait le dire vraiment, l’architecture et l’urbanisme des tours recélant autant d’avertissements que d’accidents dans leur raisonnement, du fait de leurs excès. On l’entend souvent : tout le monde dit que l’architecture est affaire de tous et qu’à ce titre chacun est en droit de donner son avis de citoyen. Alors, on se met à parler d’élancement, d’ombres portées et de l’impossibilité de rencontrer qui que ce soit dans ces constructions du fait de leurs circulations verticales. On évoque, à tout bout de champ, la laideur contagieuse qu’elles dispensent autour d’elles et on disserte sur l’abandon de tout rapport fertile au sol, pour l’individu, quand on ne raconte pas qu’elles peuvent même vous donner un étrange mal de mer. Mais comme toutes ces querelles idiotes ne tournent qu’autour de toutes ces réalisations aussi sensationnelles qu’inutiles, elles laissent l’espèce humaine interrogative et ne résolvent rien. Car d’investigation, il n’en est pas question. Mais de démonstration, oui. Alors un point d’histoire : La hauteur n’a-t-elle pas toujours été l’expression de la puissance ?
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30 Il est communément admis que la tour est un phénomène contemporain. Or, c’est une idée reçue. La tour est un phénomène médiéval qui affichait la puissance d’une famille. Et quand une de ces familles devenait plus importante qu’une autre, sur le plan social comme sur le plan économique, elle pouvait démanteler le dernier étage de la tour de l’autre famille et utiliser les briques pour surélever la sienne. Scènes fascinantes de déconstructions et de reconstructions, dont on peut voir les résultats surprenants à San Giminiano ou à Lucca, avec l’une des tours les plus originales au monde, la Torre Guinigi. Pour faire simple, et plus près de nous, nous pourrions considérer qu’en dehors de New-York, aucune ville n’a réussi son pari sur la hauteur. Et la raison de cette réussite esthétique et urbaine n’est pas si compliquée que cela à comprendre. Cette ville verticale s’est construite autour de 1931 (Empire state Building) sur la simple idée que les techniques de l’époque (l’acier puis la pierre) et la main d’œuvre (les ouvriers équilibristes) le permettant, dans un pays neuf, les grands commanditaires trouvaient alors une nouvelle façon de montrer leur puissance financière. La hauteur devenait ainsi le premier message publicitaire efficace des temps modernes. Et là aussi, la hauteur faisait sens. Nous étions loin de l’idée de coloniser tous les espaces possibles, ce nouveau genre dans la recherche d’un but pour l’humanité. Depuis, toutes les villes riches se sont essayées au même exercice, mais sans le succès de New-York qui reste encore aujourd’hui la seule ville haute verticale et contemporaine qu’on visite autant comme une cité historique authentique que comme un lieu d’échanges actuel. Les autres cités verticales, trop artificielles et simplement spéculatives, sont devenues des parcs d’attractions pour businessmen en péril, limousines noires et blackjack, des Disneyland de mickeys surexcités circulant dans des ouvrages qui rivalisent de laideur. Car, saurait-on seulement désigner une seule tour parmi les plus hautes du monde qui soit simplement belle ? La Burj Khalifa à Dubaï et ses 829 mètres, la Tokyo Skytree et ses 634m, la Canton Tower à Guangzhou avec ses 600m, la CN Tower à Toronto, haute de 553m, l’One World Trade Center à New York posée sur 541 m, la Ostankino à Moscou et ses 540m, la Shanghai World Financial Center à Shanghai
(494m de haut) qui joue le décapsuleur géant ou la Taipei, haute de ses 509m et qui se prend, dit-on, pour un bambou ? Une catastrophe en chaine que même une alerte rouge ne saurait stopper. Car c’est bien la laideur qui ressort toujours des premiers mots d’une conversation sur les tours. Imaginez seulement que ces réalisations fassent l’objet d’une attention extrêmement particulière et qu’elles ne soient données, après de longues heures de délibérations, qu’aux meilleurs architectes ou designers du monde, vous imaginez combien la vie serait plus douce au pied des tours ? A une époque où on consomme, en France, plus d’un million et demie de m² de sol rural, par jour pour construire est-il raisonnable de condamner les constructions verticales ? Avec elles, ce serait moins d’espaces de sauvegarde gaspillé, plus de terres protégées, plus de corridors verts transversaux, plus d’économies de terres agricoles, plus d’espèces protégées, moins d’énergie s’essoufflant sur des réseaux trop longs, plus d’espaces extérieurs et davantage d’ensoleillement pour tout le monde. Les constructions seraient groupées, hautes et par ensembles fonctionnels incomplets (échanges avec les plateformes voisines), n’auraient qu’une seule adresse, s’inspirant des cités fortifiées de toscane. Elles s’élèveraient vers le ciel, posséderaient leurs propres stations d’atterrissage de court courrier, agenceraient des plateformes intermédiaires entre le sol et le ciel pour brasser leurs populations et faire circuler les échanges thermiques des unes aux autres dans une économie d’énergie devenue vitale. Les terres ne seraient pas gaspillées et l’épandage des maisons de villes serait stoppé, pour le bonheur de tous.La compétition a été lancée à Babel et se poursuit aujourd’hui dans tous les endroits du monde où l’homme est oublié. Les peintres ayant frôlé ces mondes dès le XVIème siècle, ils avaient compris que peindre la verticalité était un signe de densité et de diversité, sorte de mélange des genres qui, ni tout à fait dans le ciel, ni tout à fait à terre, se disperserait autour dans la nature. Ils l’avaient peinte belle et rebelle, sensuelle et désobéissante, loin (très loin) de tout ce qu’on peut voir se construire en son nom. On pourrait, encore, aujourd’hui, voir la ville verticale comme le lieu de la désobéissance.
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APPRIVOISER LE PERIPHERIQUE ARRONDISSEMENT 21 PARIS S’ETEND _
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Le Périphérique est un territoire particulièrement intéressant. Il configure une réserve foncière et une provision urbaine rares. Ce sont plus de 100 hectares de voies, 38 hectares de bretelles, 80 hectares de talus et 44 hectares d’espaces, boisés de 10 000 sujets, qui sont à la disposition de PARIS. Ce tracé routier n’est recouvert qu’occasionnellement par de rares construction et reste l’autoroute la plus fréquentée de la région parisienne. On dit souvent que le Périphérique est une barrière infranchissable pour la banlieue de la première couronne et pour les communes riveraines. On dit que Paris est une capitale qui reste enfermée dans son Périphérique. Mais, au moment où plus personne n’imagine que Paris pourra rayonner en Europe sans connivence avec sa banlieue et son étendue communautaire, il est peut-être temps d’intervenir sur un territoire comme celui-ci, de planification palpable, d’en définir l’image instantanée et d’affermir l’opinion autour de sa transformation. Ce que je propose d’évaluer, ici, c’est une vision qui fait plusieurs fois sens et qui propose un avenir tangible et prochain pour Paris. C’est d’inscrire l’évolution du Périphérique comme une solution pour en sortir et sous trois formes : la relation Paris/ Banlieue, la réparation atmosphérique d’un site dégradé et la reconnaissance administrative d’un nouvel arrondissement LA RELATION PARIS/BANLIEUE Le modèle urbain qui pourrait créer une relation intéressante entre Paris et son faubourg n’est pas nécessairement à trouver dans une solution qui chercherait à couvrir, morceau par morceau, l’ensemble du circulaire. Il faut plutôt considérer que cette césure n’en est pas une et qu’elle concentre sur tout son tracé une authentique territorialité. Ce territoire, par nature périphérique, pourrait paradoxalement transformer la lecture de la capitale et devenir, au bout du compte, La nouvelle centralité foncière et urbaine de Paris.
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34 Cette nouvelle unité foncière, inédite par sa topographie et par sa géographie, deviendrait une entité administrative conduite par un maire d’arrondissement.
ce territoire pour espérer lui redonner l’atmosphère respirable qu’il a perdue depuis l’installation de la voirie.
Nous construirions, ainsi, une ville linéaire, celle à laquelle de nombreux architectes, penseurs et auteurs d’anticipations ou de sciences-fictions ont, un jour, rêvé. Une ville écrin, écrite sur un ruban dont les franges sont alternativement bâties, sous les impulsions vives et concomitantes de Paris et des communes limitrophes.
Les réflexes décisifs pour engager la bonne réflexion demeurent la maitrise et le remplacement d’un environnement abîmé, par de nouvelles énergies et par le développement de formes nouvelles de communication (comme la co-contribution, ou le service internet substitutif aux déplacements en voiture).
Les passages, les ponts, les voies déchirent perpendiculairement le cercle parisien bâti en continu. Les ouvrages construits entre la capitale et la première couronne sont faits sur des gabarits moyens. Ils alternent avec quelques édifices construits plus en hauteur et regroupés autour de quelques grandes respirations boisées. L’espace du milieu est traversé par un tramway, monté sur monorail, qui circule en site propre.
Pour cela, il s’agit de repenser le Périphérique comme un nouvel axe majeur de circulation intérieure et non plus de circulation de transit. Cet axe se trouve débarrassé des nuisances phoniques et atmosphériques actuelles. On remplace les véhicules polluants par des véhicules et par des transports qui fonctionnent à l’électricité ou aux énergies nouvelles renouvelables. Les constructions assurent les concentrations énergétiques qui mettent la ville en indépendance énergétique.
L’objet du projet est donc bien celui d’une densité d’un type nouveau, s’installant autour d’un intervalle d’un type nouveau. C’est d’ailleurs bien par la densité qu’on crée habituellement du lien, bien plus qu’on saurait le faire sur la face intérieur d’un mur extérieur. L’idée est donc bien, en fin de compte, de projeter tout autour de Paris une ville-agrafe qui se configure par des fragments, des continuums, des linéarités et des déchirements recentrant toutes les énergies de la ville moderne sur une cité périphérique et continue. C’est une ville à part entière, fluide et distinctive, garante d’une destination urbaine partagée, construite sur l’idée que tout le monde la traverse à un moment ou à un autre. LA REPARATION ATMOSPHERIQUE D’UN SITE DEGRADE Le Périphérique concentre, à lui seul, les taux d’émission en carbone les plus élevés de la capitale, mettant, en tête des quartiers les plus pollués, ceux qui s’y situent de part et d’autre. On peut donc penser qu’on peut s’attaquer utilement à l’ensemble de
La transformation de Paris que je propose, à contrario des mesures homéopathiques qui sont définies, se réalise sur des choix sûrs et de bonne dimension. Il n’existe pas de transformation efficace sans évolution radicale des modes de déplacement urbain et sans changement profond des modes de vie en ville. Tout cela hors conscience du caractère d’urgence d’élargir, sur ses limites, le territoire du département de la SEINE. Le seul critère de l’esthétique ne suffit pas. L’histoire des villes a déjà mis en avant l’inefficacité des transformations urbaines qui n’ont retenu, comme références et modèles, les compositions trop composées. Le modèle urbain de ce nouvel arrondissement ne passe pas obligatoirement par de grandes verticales ou par des tours, simplement disposées le long d’un parcours. Avec l’internet et le dynamisme numérique, tous les systèmes se sont déconcentrés et sont devenus plus collaboratifs (le préfixe « co-» étant rattaché, depuis peu, à une multitude de mots qui désignent des activités comme co-voiturage, co-working, co-location, courbanité, co-production). Une logique de croissance et de développement, créant du lien horizontal, étant en train de se développer autour de ces distensions.
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36 L’étalement bas est favorable à la création de cette nouvelle urbanité dont les échanges, placés en vitesse lente dans un mouvement continu, sont immédiats. On évite vite l’éparpillement des fonctions et c’est dans la diversité et la fusion des points d’accroche qu’on construit l’essentiel du flux bâti. La ville est pensée plastiquement comme une gondole de supermarché : celle des présentations frontales des ressources mutualisées et des mises à disposition bâties du tour de PARIS. Elle s’inspire de la pratique de l’économie numérique et de celle plus imagée des rayonnages. Les services associés et les services concédés se nichent dans les espaces interstitiels laissés par les bureaux et les habitations, opérant en masse sur la base d’un modèle économique d’équilibre et sur l’idée que nous donne Yona FRIEDMAN de ce qu’est une ville construite dans l’espace. LA RECONNAISSANCE ADMINISTRATIVE D’UN NOUVEL ARRONDISSEMENT Aujourd’hui, le Périphérique reste rattaché, par des portions de voie, à plusieurs arrondissements de Paris. Il en dépend, section après section, tant sur le plan du cadastre que sur celui de son attache administrative. L’occasion est idéale pour lui donner une forme affranchie. Un nouvel arrondissement serait ainsi créé. Il réunirait l’emprise complète du Périphérique, ses abords directs, le Bois de Boulogne et le Bois de Vincennes. Les espaces proposés, alternances de parties roulantes, de bâtisses et d’espaces libres constitueraient, l’arrondissement 21 de Paris, du siècle 21.
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EMBARQUEMENT IMMEDIAT VERS UN MODELE FRANCAIS INTELLIGENT _ 38
« Le climat et le développement économique seraient-ils devenus définitivement incompatibles s’interroge ? S’indigner et proclamer que « nous ne pouvons plus continuer à détruire notre planète » ne suffit plus. Anne Démians propose la mise en place d’un Pacte d’Intérêt Énergétique sur une Ligne d’Échange Responsable. », Les nouveaux paysages et les prochaines perspectives urbaines, devront, demain, croiser les objectifs climatiques sans plus provoquer de dégâts. Pour cela, la ville et les territoires concernés ne devront plus être aux mains des stratèges du foncier ou à celles, plus exclusives et plus restrictives, des financiers et des comptables. Il faudra anticiper les développements urbains et ruraux avant que des aménagements banalisés et spéculatifs ne contrarient leur équilibre, ou que l’accélération des situations critiques n’alimente, lentement mais inévitablement, leur effondrement. A l’échelle planétaire, comme à celle de chaque pays, des orientations inédites, des incitations originales et des règles nouvelles seront à imaginer pour façonner bâtiments et villes responsables. Il est donc urgent de redonner du sens à nos initiatives, du réalisme à nos directives, et de formuler de nouvelles réglementations qui requalifient l’intérêt général. Mais, il nous faudra, surtout, nous empresser d’abroger tous les textes encore en vigueur qui ne font plus la preuve de la moindre efficacité dans un monde soumis à un total recadrage. Embarquement immédiat ! On peut redonner à chaque pays une autonomie alimentaire et énergétique nouvelle en repensant à la fois le partage des ressources et celui, impressionnant, des déficits naturels. On limiterait les échanges aux besoins essentiels, tout en en maîtrisant l’empreinte écologique. Toutefois, les attitudes humaines varient selon la latitude et le continent, et l‘engagement dépend de l’importance des efforts à fournir. Comment faire pour convaincre une Chine, qui découvre les plaisirs de la consommation, de ne plus consommer, au prétexte que l’Amérique et l’Europe viennent juste de prendre conscience que la surconsommation durant le XXe siècle a mis en danger la pérennité
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40 de la planète ? Cette prise de conscience est difficile à faire partager et nécessite un long travail qui doit commencer au niveau micro. Une fois expliqué et adapté il peut être, progressivement, adopté et reproduit. De telles actions, individuelles ou collectives, sont déjà en cours d’expérimentation, mais ne pourront être efficaces que si les mentalités évoluent à l’unisson. L’exemple Helvétique est intéressant, car la population y est particulièrement sensible aux choix de développement. Les Suisses partagent le sentiment d’un ordre et d’un espace collectifs, organisés et forts. Les objectifs fixés par les autorités cantonales, entrent en résonnance avec le comportement, depuis longtemps responsable, des habitants. L’objectif annoncé de limiter la consommation énergétique annuelle à 2 000 watts par habitant est ambitieux, mais a généré une telle inventivité et une telle concurrence entre cantons que les habitudes de consommation, des acteurs, ont été rapidement modifiées. En France, l’objectif est le même (2000 watts par habitant par an), mais nous ne pouvons guère nous inspirer du modèle suisse et dupliquer ses résultats. L’organisation territoriale française est historiquement centralisée et le mode de fonctionnement rigide qui en découle ne permet pas des réactions rapides et un embarquement immédiat. La reproduction à l’identique de la démarche suisse dans des pays émergents ou à faible discipline citoyenne, serait aussi inopportune qu’inefficace. Faut-il, pour autant, renoncer à tout nouveau positionnement en matière d’énergie et de construction ? Faut-il abandonner notre sort à la spirale incontrôlable d’un consumérisme inepte, sous prétexte que nous ne sommes pas assez disciplinés ? Non ! Car on peut y répondre par des actions cernées et responsables, réalisables à des échelles variables, en commençant par la mise en partage de territoires aussi différents qu’ils sont éloignés et porteurs de spécificités climatiques et culturelles. À bien y regarder, le territoire français est une réduction fortuite, mais bien réelle, de ce qu’est la planète.
L’indépendance des pays va s’organiser autour de la raréfaction des réserves naturelles, des sources d’énergie et des réserves d’eau. Celles-ci vont devenir les nouvelles valeurs d’échange. Face aux enjeux énergétiques mondiaux, un nouveau modèle français, pourrait émerger, fondé sur une politique d’échange responsable. Cette réorganisation des échanges de consommations améliorerait son autonomie énergétique, et pourrait s’inscrire, par contagion, dans un système d’échange similaire avec les pays voisins d’abord, avant de s’étendre au niveau mondial. La France possède des terres, des mers, des côtes, des plaines et des montagnes. Il y fait froid et chaud au même moment sur une ligne de partage nord/sud. On y croise des terres humides et des terres sèches. On y répertorie des énergies renouvelables ou des ressources naturelles, comme le soleil des régions sud, les vents des côtes ouest, les pluies des régions nord et la neige de sa façade atlantique. L’eau est en abondance. Elle est source d’énergies propres et diversifiées, une richesse certaine qu’on pourrait supposer rationnellement exploitée en fonction de la géographie. Or, on sait qu’en France la réglementation s’applique de la même manière sur l’ensemble du territoire. Cette mise en œuvre égalitariste (au sens français du terme), montre toutes ses limites quand il s’agit du climat et des règles de construction (orientations/confort d’été/ confort d’hiver/ ponts thermiques/ isolation/ inertie des ouvrages/ dimension des ouvertures/ arrosage des jardins). Les premiers résultats observés suite aux évolutions réglementaires récentes, sont souvent très contrastés sur le plan économique. Ils montrent des surabondances ou des insuffisances. De grandes différences climatiques (notamment entre le nord et le sud) existent. Il s’agit donc, avec une politique d’échange responsable, d’en exploiter la disparité, plutôt que la négliger, par voie règlementaire. La proposition serait d’inscrire des villes de France dans un Pacte d’Intérêt Energétique (PIE) en les installant face à face sur une Ligne d’Echange Responsable (LER), à chaque bout d’une autoroute exclusive, le long de laquelle seraient positionnés des échanges
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42 multiples d’énergies et prévaudrait une attitude responsable en matière de construction. Les règles ne seraient plus nationales, strictes et inadaptées, mais spécifiques à chaque région, intelligentes et adaptées aux particularités de l’environnement. On y favoriserait des échanges de ressources naturelles (eau, par exemple) et des transports d’énergies diverses entre villes, situées dans des régions opposées et suffisamment éloignées pour créer l’Échange. Des réservoirs d’énergies et de ressources jalonneraient ces autoroutes et répartiraient les stockages près des points sensibles et demandeurs de la Ligne d’échange. On s’appuierait sur des réseaux intelligents de distribution d’énergie (smartgrid) en utilisant les technologies informatiques pour réguler et optimiser la production, la distribution et la consommation d’énergie. Ce système, démultiplié, s’apparente à ceux que propose Jeremy Rifkin, lorsqu’il annonce la troisième révolution Industrielle. Les idées ne manquent pas pour agir efficacement à l’échelle du territoire. Pour favoriser concrètement la mise en place et le développement expérimental des Pactes d’intérêt énergétique et des Lignes d’échange responsable, seraient créés des Comités d’incitation, de développement et de surveillance des actions engagées. Quatre Instituts pour le Développement d’un Environnement Evolutif (IDEE), organismes mixtes (état/ énergéticiens privés) fonctionneraient de manière transversale ; ainsi agissait, en son temps, la Mission interministérielle pour la qualité des constructions publiques qui apportait aux maires, collectivités territoriales, départements ou régions, avis et propositions critiques. La politique de ces IDEE serait orientée par les réflexions d’une assemblée d’experts, élargie aux hommes de terrain. Des aides et des subventions stimuleraient les villes ou les régions à entrer sur ces Lignes d’échange responsable, à signer les Pactes et à renforcer cette politique en vue d’expériences étendues, proches ou similaires. Chaque IDEE serait renouvelé régulièrement ; ses membres seraient choisis dans toutes les branches de la vie publique et de la société civile : experts en planification, en environnement, en paysage, en économie, en énergies, en économie, en anticipation et en architecture.
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QUI DISPARAITRA
UN MODELE D’ANTICIPATION DES ATTENTES _ 44
L’évolution de l’espace du travail est la conséquence de l’évolution d’un espace planétaire en pleine mutation, autour d’un individu en pleine mutation, évoluant dans des sociétés avancées en pleine mutation. Cette transformation progressive s’effectue sur un mode de mutation lent, depuis les débuts de l’industrialisation, mais devenu expéditif avec l’internet. Il est comparable à celui qu’il sert : celui du travail. Car, si depuis le début du vingtième siècle, on s’est efforcé, avec un certain succès, peut-on dire, à favoriser le confort de ceux qui travaillent, en avançant les objectifs de la meilleure santé et de la meilleure humeur comme des critères indiscutables pour augmenter les chances de l’entreprise d’être efficace, on ne pense pas assez encore à cette dématérialisation de l’espace qu’Internet a engagé et à l’allure que prendrait le monde si le travail n’existait plus. Mais plus précisément sous la forme dans laquelle il s’accomplit aujourd’hui. L’espace tertiaire a bien évolué. Pour autant, le travail s’effondre. Nos sociétés progressistes sont suréquipées et les demandes régressent. L’argent manque et le pouvoir d’achat des classes moyennes et des classes les plus faibles, les plus nombreuses encore, est en berne. Il n’y a donc aucun lien entre l’amélioration de l’espace du travail, quel qu’il soit, et l’offre de travail, doit-on fâcheusement constater. Au risque de s’y perdre, essayons de raccrocher le travail à l’espace du globe avant que l’espace du travail ne se perde sur Internet. Doit-on poursuivre dans le perfectionnement de ces espaces, comme on poursuit dans le champ du perfectionnement absolu de l’automobile, pour faire de mieux en mieux, de plus en plus fiable, de plus en plus économique, de plus en plus rapide, de plus en plus confortable, de plus en plus équipé, ou sécurisé, jusqu’à ce que l’on invente une nouvelle forme de travail, comme de nouvelles manières de se déplacer et que tout cela devienne subitement obsolète ? Certainement, car l’avenir, aujourd’hui, tient plus de la science-fiction que de la prévision météo à dix jours.
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46 SCENARIO 1 Nous sommes en 2014 et m’inscrivant dans cet état de grâce qui favorise le développement des espaces de travail, je favorise dans ce premier scenario, la flexibilité et la disponibilité, comme des valeurs « possibles » capables d’accompagner les rares constructions responsables que nous devrons bâtir, dans les années qui viennent. Dire que l’espace de travail moderne est « flexible » relève presque de la banalité, tant il ne peut se distinguer de la rapidité avec laquelle il évolue, même dans l’espace d’une journée. L’espace de travail à venir est un espace plus « disponible » que flexible. D’abord, par son instantanéité dans sa réponse à réagir et à s’adapter devant des situations de plus en plus imprévisibles et exigeantes, puis par ses dispositions à ne jamais laisser un espace se fixer dans une seule affectation.Les espaces sont mieux et moins équipés. Les câblages disparaissent au profit des connexions par ondes électromagnétiques (Wifi)) qui produisent davantage d’espace : moins de « faux » plafonds et moins de « faux » planchers. Le renouvellement d’air et le spectre de la lumière sont plus généreux. L’ouvrage plus léger et plus économe. Les façades s’enrichissent techniquement et la diffusion de chaud et de froid évolue vite avec la mise en place de dalles devenues actives. Les espaces s’accompagnent d’une sophistication plus mécaniste en dégageant « moins de bâtiment et plus de domotique ». Les espaces libérés, se transforment en surfaces ouvertes où l’on s’assied pour parler en groupes, où l’on s’arrête pour réaliser une tâche, seul ou à plusieurs. Le bureau perd sa référence. Il se dégage ses volumes de sa forme actuelle et devient déplaçable (portables et téléphones mobiles). Les espaces en ressortent sans affectation précise, autre que celle que le moment choisi. L’optimisation des surfaces est évidente. La confidentialité est assurée. Elle est mobile et attachée à son sujet, dans sa boîte. Moins d’espaces sont nécessaires. Ils basculent leur trop plein de surfaces désactivées vers des lieux définis pour des activités communes (vidéo/conférences, cafétérias, laboratoires) « Je vais au bureau » continue encore, pour un temps, à dégager du sens.
Les espaces sont de moins en moins attribués. La communication entre les individus se réalise davantage par voie électronique que par les déplacements, même pour des individus se situant à proximité, les uns des autres. On ne peut, en effet, rendre banal le corps ou l’esprit, dans le même espace, l’individu ne sachant pas bien se dématérialiser totalement. Mais il devient plus fluide, plus rapide. Les espaces sont plus équipés plus préhensibles pendant que ceux dévolus à la convivialité sont regardés avec l’exigence qui convient à la demande d’un contact devenu exceptionnel. Les jardins sont vus comme des lieux d’alternance, de repos. Les espaces du travail se sont rendus, avec le temps, « très actifs, très réactifs ». SCENARIO 2 L’espace du travail, bien que progressant à toute vitesse n’est en rien, comme nous l’avons dit plus haut, une garantie pour l’entreprise de maintenir son niveau de développement ou mieux de le faire progresser quand le marché s’effondre. Ne serions-nous pas en droit de nous interroger : Jusqu’à quand nous devrions prolonger ces modes de pensée qui conduisent à ces espaces en progression accélérée vers l’inutile, une impasse à bout de souffle ? Nous pourrions imaginer que pour repenser radicalement « l’espace du travail », nous devrions certainement d’abord « repenser le travail » Le travail est au centre de nos sociétés de plus en plus organisées autour de groupes hyper rassemblés et entraînés, de filières spécialisées ou d’activités construites sur des thèmes spécifiques. Peu nombreux, en fait, sont les emplois diversifiés, les obligations alternatives, les rôles successifs et les mélanges de genres, industriels, administratifs ou marchands. Les contenus et les attitudes qu’ils génèrent ne se concentrent plus que sur des spécialités. On ne peut plus imaginer une attitude sans aptitude, une mission hors le champ d’une compétence extrême, des échanges de courriers sans bureaux, des échanges de fruits sans étales, une télévision sans journalistes de la télé parlant d’eux-mêmes ou des semaines à ne pas faire, du lundi au vendredi, le même métier.
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48 Imaginons. nous sommes en 2044. Les citoyens du monde s’activent tout autant. Le mot « travail » est exclu du vocabulaire ambiant. Ses propriétés et sa décrue ne sont plus au centre des débats et des promesses iniques des hommes et des femmes politiques. Mais pour autant, tout le monde s’active. La terre est peuplée de 9 milliards d’habitants. Il faut trouver une solution pour que la fin du monde ne soit pas le résultat d’une lutte sans merci, entre les individus, pour survivre. Imaginons maintenant que l’on accepte de ne plus être seulement, médecin, maçon, architecte, aventurier, journaliste, épicier, voiturier, ministre, peintre ou archéologue, mais que nous soyons devenus un peu de tout cela, en même temps ? L’individu formé à l’école du « pluralisme effectif », serait très différent de celui qui évoluait dans les vieilles écoles qui pratiquaient « l’excellence ciblée ». Il évoluerait dans le champ des opportunités se présentant à lui, suivant les niveaux de compétence cernés. Hommes et femmes, intellectuels ou manuels, évolueraient dans un monde organisé et encadré où les aptitudes et les interventions de chacun seraient optimisées sur un spectre plus large d’activités.Il serait alors plus facile de modifier ses temps d’action, de faire valoir sa disponibilité, choisir ses plans et son terrain d’activité. Nul ne serait plus attaché à une spécialité, enfermé dans une filière choisie comme un plan de carrière. Chacun serait confronté à des départements ouverts. Mais que faire du solde de cette philosophie basée sur « la tentation de l’efficacité absolue » ? De cette pensée rétrécie avec laquelle efficacité, rendement, productivité, bourse et actionnaires se régalaient de des courses frénétiques en avant, alors que nous devenions uniquement cycliste, dopé pour aller plus vite, uniquement médecin, formé pour savoir recevoir autant de patients en si peu de temps, uniquement entrepreneur, suffisamment filou pour engranger toujours plus de recettes, uniquement architecte, affreusement seuls à croire à leur génie ? Rien d’autre que de s’en souvenir comme on se souvient tout juste d’une époque où les journées aux champs étaient longues et où la terre nourrissait tout le monde, sans que ça paraisse pouvoir changer, un jour.
Et pourtant ? L’individu est devenu flexible. Le replacement de ses idées se fait au fur et à mesure que le sujet se pose, plus du tout en amont et de manière définitive. La fin des carrières, la fin des désignations à vie, la fin des apprentissages fermés est confirmée. « La permutation graduelle et universelle des compétences » est la nouvelle référence. L’individu est mobile, moins lourd, plus vert, évoluant sans positionnement fixe, il œuvre hors les murs, aux périmètres des espaces d’un monde organisé et entrainé à la circulation des personnes et des matières. Pour dessiner ces nouveaux espaces, on sollicite, en collèges, les esprits de synthèse à même de maîtriser le comportement de ces nouveaux artisans du mouvement.
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LETTRE BLACK SWANS 1ere PIERRE _ 50
Pose de la première pierre des Black Swan le 26 octobre 2015 «Quand MALRAUX flirte avec les signes Cher Roland RIES, cher Olivier WIGNIOLLE, cher Hervé MANET, il est assez rare, aujourd›hui, pour une architecte, de se voir proposer une occasion comme celle-là, de réaliser, non pas un immeuble, finalisé et isolé, mais une pièce immense, suffisamment condensée et suffisamment significative pour désigner et identifier un site majeur de centre-ville comme celui des bassins André MALRAUX, à Strasbourg. Ce travail, qui est proposé en fond de la perspective ordonnée des bassins, essaye de contribuer, par son architecture, à l’assemblage le plus complet possible du dispositif général de cet ancien port industriel qui se met en place. L’offre était de taille et la réponse ne pouvait être éparpillée ou émiettée. Elle nécessitait, au contraire, une réponse dense et agressive (au sens sportif du terme) et une certaine délicatesse (au sens d’une simple formule de politesse bien adressée).Il nous fallait donc essayer le mélange de la puissance et de l’élégance, celles voisines des cygnes du bassin, lourds et graciles, et aussi noirs qu’on puisse les copier pour pouvoir en reproduire la profondeur. C’était, là, l’occasion de préciser que l’élégance, quelle qu’en soit l’origine, reprise et transposée dans une architecture dessinée pour faire «comme si elle avait toujours été là», ne contrarie pas forcément l’efficacité des assemblages commerciaux qu’on demandait ici.Masses extraordinairement importantes à bâtir, sans la moindre concession à l’envahissement d’une lumière omniprésente (habitations, bureaux, équipements, commerces ou surfaces utiles d’autre nature), elles sont comme des fragrances prégnantes, qu’on aurait assemblées pour un produire un parfum unique et donnent à voir trois édifices qui, avec insistance, semblent s’afficher comme les mêmes, malgré leurs différences têtues. Mais, précisément ce sont les mêmes. Et, précisément encore, il s’agit de mettre en situation de réussite un dispositif simple, construit sur trois tours voisines et homo-
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BLACK SWANS _
52 gènes qui permettent, avant tout, de mélanger n’importe quelle fonction domestique à une autre, à l’intérieur d’un même immeuble. Leur écriture est commune. Elle a, pour vertu, de neutraliser toute tentative d’expression bavarde et vise à donner à l’opération une identité globale dont les variations de couleurs, placées en deuxième plan, suffisent à les distinguer les unes des autres. Dans l’album blanc des Beatles, Paul MAC CARTNEY provoque une émotion intense, avec «son» BLACK BIRD. J’aimerais juste que «nos» BLACK SWANS distillent des émotions du même type, à tous ceux qui y habiteront. J’aimerais aussi qu’elles puissent transmettre, sur le site, une fluidité de même nature et de même profondeur que celle du glissement des cygnes sur l’eau.
53
VAL DE FONTENAY
LES DUNES Siège social Société Générale
2011-2016
54
55
STRASBOURG-PRESQU’ILE MALRAUX
3 BLACK SWANS
Logements en accession, logements étudiants, hôtel de luxe, bureaux, commerces
2012-2018
56
57
NANCY
QUAI OUEST
Siège social Bouygues Bâtiment Nord-Est, résidence hôtelière Adagio Apart’Hôtel, KPMG, Caisse des Dépôts, Cofely Services
2010-2014
58
59
PARIS-SEINE RIVE GAUCHE
M9D4-ORESSENCE 55 logements et commerces
2008-2014
60
61
PARIS 20eme-PORTE DES LILAS
CCXX Cuisine Centrale
2006-2012
62
63
PARIS 18eme
REZO
Bureaux en blanc
2010-2014
64
65
PARIS 5eme
ESPCI
Ecole Supérieure de Physique Chimie Industrielle
2015-2020
66
67
PARIS 13eme
RUNGIS
100 logements en accession
2010-2014
68
69
PARIS 16eme
PORTE D’AUTEUIL 350 logements sociaux et en accession
2008-2016
70
71
STRASBOURG
ZIEGELWASSER Résidence pour travailleurs étrangers
2012-2016
72
73
VAL DE FONTENAY LES DUNES
CARRESSER HUMP
74
75
DUNES, SIEGE SOCIAL DE LA SOCIÉTÉ GÉNÉRALE A FONTENAY EQUIPE PROJET Directeurs de projet : Martin Mercier (concours), Jack Weinand (études et chantier) Collaborateurs : Malik Darmayan, Gabriel Ober, Francesco Girardi, Minsu Lee, Maité Casas, David Dahan, Igor Sanchez, Alain Saboujian, Arnaud Housset Images : Igor Sanchez Maitre d’ouvrage : Société Générale Maître d’ouvrage mandataire : Sogeprom Surface SHON : 89 000m2 Budget : 210 M euros HT
ACAJOU
DUNES
SATIN
TRI-ONDULER
CRIBIER
SINUSOÏDAL
SEKISUI
CATHEDRALES
L
B
STRASBOURG PRESQU’ILE MALRAUX 3 BLACK SWANS 76
77 C
A
K
S
BLACK SWANS, OPERATION DE LOGEMENTS, BUREAUX, HOTEL, RESIDENCE ETUDIANTE RESIDENCE SERVICES A STRASBOURG
W
A
EQUIPE PROJET Directeurs de projet : Martin Mercier (études), Jack Weinand (chantier) Chefs de projet : Alain Sabounjian (études), Julien Syras (chantier) Collaborateurs : Juliette Ménage, Pauline Reysset, Clémence Yon, Images : Igor Sanchez, Martin Mercier, Silvio Evora Maitre d’ouvrage : ICADE Surface SHON : 40 850m2 Coût prévisionnel : 55M euros HT
N
S
APPONTEMENT
VOUSSURE
78
79 IRIS
ANDRE
NANCY QUAI OUEST INALTERABLE
QUAI OUEST, SIEGE SOCIAL DE BOUYGUES BATIMENT NORD-EST, RESIDENCE HOTELLIERE A NANCY EQUIPE PROJET Directeur de projet : Philippe Monjaret Chef de projet : Typhaine Blanchet Collaborateurs : Arnaud Housset, Blandine Plenard, Annelise Bal Maitre d’ouvrage privé : CIRMAD EST Surface SHON : 10 200m2 Budget : 15M euros HT
COSMETIQUE
PAUPIERE
DUPLIQUER
STANISLAS
CARAPACES
MASSENA
CONFIDENTIALITES
80
81 DRAPER
VERTICALISER
AVOISINER
MORDORE
PARIS SEINE RIVE GAUCHE M9D4 ORESSENCE TRAVERSER M9D4, 55 LOGEMENTS ET COMMERCES DANS LE 13EME ARRONDISSEMENT DE PARIS EQUIPE PROJET Directeur de projet : Martin Mercier Chef de projet : Arnaud Housset Collaborateurs : Typhaine Blanchet Maitre d’ouvrage : Vinci Immobilier Aménageur : SEMAPA Surface SHON : 3 600m2 Budget : 10M euros HT
9, 7 & 3
ARGENT
VASARELY
REACTEUR
CADRAGES
82
83 INDUSTRIEL
CULINAIRE
BLANC
CHARRIOTS
PROCESS
BAMBINS
PIZZA-CHIC
CCXX, CUISINE CENTRALE DU 20EME ARRONDISSEMENT DE PARIS EQUIPE PROJET Directeur de projet : Martin Mercier Chefs de projet : Sio Southiphong (études), Simon Guillermoz (chantier) Collaborateurs : Arnaud Housset Maitre d’ouvrage public : Direction du Patrimoine et de l’Architecture Maitre d’ouvrage mandataire : SLA 20 Surface SHON : 3 600m2 Budget : 10M euros HT
PARIS PORTE DES LILAS CCXX CUISINE CENTRALE XXEME
TERRITOIRES
INSOLITUDE
VITESSE
PARIS REZO 84
85 ANODISE STRAIGHT
REZO, BUREAUX EN BLANC A SAUSSURE DANS LE 18EME ARRONDISSEMENT DE PARIS EQUIPE PROJET Directeur de projet : Philippe Monjaret Chefs de projet : Alain Sabounjian (études), Simon Guillermoz (chantier), Laurent Baudelot (chantier) Collaborateurs : Typhaine Blanchet, Blandine Plenard Maitre d’ouvrage public : SODEARIF, SNEF Surface SHON : 16 500m2 Coût : 32.5M euros HT
BAUDRILLARD
ARRETE
RAILWAYS
ZERO
STOP
CARDINET
SCIENTIFIQUEMENT
NOIR
PARIS ESPCI 86
MOLLE
CINQUIEME
ESPCI DANS LE 5EME ARRONDISSEMENT DE PARIS EQUIPE PROJET Directeurs de projet : Martin Mercier Chef de projet : Alain Sabounjian Collaborateurs : Juliette Ménage, Marielle Kremp, Maité Casas Images : Igor Sanchez, Silvio Evora, Martin Mercier Maitre d’ouvrage : Ville de Paris, Direction du Patrimoine et de l’Architecture Surface SHON : 50 000m2 Coût prévisionnel : 105M euros HT
SERANDIPITE
CURIE
NOUER
ABYSSAL
BROSSOLETTE
NACRES
87
PARIS RUNGIS
ROCHERS CARBONE
88
89 GRIS-BLANC
BRISURES
ECLAIRCIR
MINERALITE
EBOULEMENTS
FACETER
POLYEDRES, 100 LOGEMENTS DANS LE 13EME ARRONDISSEMENT DE PARIS EQUIPE PROJET Directeur de projet : Martin Mercier Chef de projet : Julien Syras Collaborateurs : Adriana Cavanna, Maël Esnoux, Elie Moutel Maitre d’ouvrage : Vinci Immobilier Surface SHON : 6 700m2 Coût : 11.2M euros HT
CIMENTE
TRIPLES
FINN
CONFIDENCE
90
91 RUDY
MECANISMES
ANNE
MONTMORENCY
PARIS AUTEUIL FRANCIS PORTE D’AUTEUIL, 350 LOGEMENTS EN ACCESSION ET SOCIAUX DANS LE 16EME ARRONDISSEMENT DE PARIS EQUIPE PROJET Directeur de projet : Philippe Monjaret Chefs de projet : Typhaine Blanchet Bâtiment B, Arnaud Housset Bâtiment D Collaborateurs : Suzy Plusquellec Images : Igor Sanchez, Martin Mercier Maitre d’ouvrage public : Paris Habitat OPH - COGEDIM Surface SHON : 30 000m2 Coût prévisionnel : 65M euros HT
PRIVE/PUBLIC
2008
GRENAILLAGE
92
PERCOLATEUR
URGENCE
ACIER
OMBRIERE
93
STRASBOURG ZIEGELWASSER
ANONYMES
COUPELLE-CONE
ZIEGELWASSER, RÉSIDENCE POUR TRAVAILLEURS ÉTRANGERS À STRASBOURG EQUIPE PROJET Directeur de projet : Philippe Monjaret Chefs de projet : Alain Sabounjian (études), Marielle Kremp (études), Arnaud Housset (chantier) Images : Silvio Evora, Igor Sanchez Maitre d’ouvrage : ADOMA Surface SHON : 6 540m2 Budget : 11.5 M euros HT
IDENTITE
MITRAILLE
ABYSSE
TANGUY
94
95
UNE EQUIPE DE CHOC !
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L’ACTE DE RESISTANCE _ Textes : Anne Démians / AAD / Michèle Leloup Conception graphique et fabrication : AAD, Anne Lerondeau, D.Dahan Panoply Relecture : Michèle Leloup AGENCE 14SEPTEMBRE Crédits photographiques : L. Vasconi, JP. Porcher, P.O. Deschamps, D.Dahan Achevé d’imprimer en décembre 2015 en France par Panoply la chaîne Graphique