Zibeline l'hebdo Cult' #13

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CULTURE LOISIRS TÉLÉ ciné

07.12 > 14.12.2018

ZIBELINE

L’hebdo Cult’ N°13

Sam Karpienia Reevox-NH Thierry Balasse Chants de Noël Marion Rampal Riccardo Del Fra

L 18754 - 13 - F: 2,50 €

Musiques !


ZIBELINE

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sommaire 13

société (P.4-5) Produire sans pesticides, c’est possible

Politique Culturelle (P.6-7) La place de la culture dans la presse ; portrait de Sam Karpienia

événements (P.8-13) Riccardo Del Fra à Gap

Les Chants de Noël dans les Bouches-du-Rhône Reevox-NH au Gmem BNMFest au Ballet National de Marseille Hors-piste de Karwan

Cosmos 1969, entretien avec Thierry Balasse

Le probleme avec le rose, Christophe Garcia © Vincent Fribault

CRITIQUES (P.14-19)

La Friche, la Criée, le Klap, Leda Atomica Musique, Opéra de Marseille, Bois de l’Aune, Théâtre d’Arles, Forum de Berre, Pertuis, la Garance, Théâtre Durance, Domaine d’O

au programme de la semaine Spectacle vivant (P.20-24) Musiques (P.25-27) Arts Visuels (P.28-29)

Cosmos 1969, collectif Inouïe © Patrick Berger

CONSEILS TÉLÉVISION (P.30-31) CINÉMA (P.32-33) Retour : le Primed Critique : Pupille

PHILOLITTÉ (P.34-37) Naissance-mariage-mort, trois étapes de la vie,

Prix Art, Patrimoine et Culture à Primed de Asuman ATAKUL FIRTINA

PAYSAGE (P. 38-39)

Randonnée urbaine à Martigues

Livres de la semaine : L’opéra, miroir du monde et Faire vivre l’opéra ; Le grand Nord-Ouest ; Jouir, vingt-six vies consacrées Philo Kakou Feuilleton littéraire d’Eduardo Berti, cinquième épisode


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société

Cultiver sain

Face aux pesticides, l’agriculture biologique locale en plein essor

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es riches habitants des communes de Gordes et la Tour d’Aigues, ainsi que les touristes qui se pressent tout l’été dans les ruelles des villages du Luberon, seront-ils contents d’apprendre la nouvelle ? Leur lieu favori de villégiature a remporté un prix. Une première place pour le Vaucluse sur le podium des Glyph’Awards, qui récompensent ironiquement -et amèrement- les départements « les plus accros » au glyphosate, cet herbicide jugé cancérogène probable par l’OMS. 1,25 kg ont été utilisés par hectare de Surface Agricole Utile en 2017, imbibant les si jolis fruits et légumes des fertiles terres provençales. L’association Générations Futures* a exploité la base de données des ventes des distributeurs (BNV-D) qui fournit les quantités des différents pesticides vendus sur chaque territoire, en s’intéressant au profil toxicologique des substances actives. Le résultat est effrayant. Les Plans Ecophyto qui se succèdent pour réduire l’usage des pesticides ont été inefficaces, et l’agriculture conventionnelle continue à utiliser ces produits, qui détruisent les sols, polluent les eaux, et font chuter la biodiversité (notamment les populations de pollinisateurs).

Viser la santé

Un espoir toutefois : la prise de conscience des dangers des pesticides commence à faire bouger les choses, même si la législation ne suit pas (l’interdiction du glyphosate n’a pas été inscrite dans la loi, comme Emmanuel Macron l’avait pourtant promis lors de sa campagne). Les consommateurs s’inquiètent pour leur santé, et les producteurs sont de

ZIBELINE L'HEBDO CULT'

plus en plus nombreux à faire le choix de l’agriculture biologique. C’est le cas dans le Vaucluse, où l’année 2017 a vu un bond spectaculaire des surfaces en conversion : 3049 hectares, soit une augmentation de +41% ! Sur le territoire des Hautes-Alpes, le nombre d’exploitations qui produisent en bio des plantes aromatiques et médicinales a doublé en cinq ans. Dans les Bouches-du-Rhône, 81% des communes ont au moins une ferme en bio. Si cela continue à ce rythme-là, on va peut-être bientôt pouvoir manger des cerises sans s’empoisonner, et pour les riverains des terres agricoles, cesser de respirer les toxiques pulvérisés dans les champs.

Foin de la chimie !

Cultiver sans pesticides ni engrais chimiques, c’est possible. AgribioVar, qui appartient au réseau FNAB (Fédération

Les chiffres clés de l’Observatoire Régional de l’Agriculture Biologique Paca, édition 2018 : 3 246 fermes engagées en bio + 366 fermes en 1 an, soit une progression de 12,6% 137 023 hectares dont 30 738 hectares en conversion 1re région bio de France, avec un taux de Surface Agricole Utile en agriculture biologique de 23,2%, contre 6,5% au niveau national

Maquette : © Alouette sans tête Photo de couverture : Ramkoers © Sigrid Spinnox

Administration admin@journalzibeline.fr contact@journalzibeline.fr

Hebdomadaire paraissant le vendredi

Directrice de publication Agnès Freschel

Édité à 20 000 exemplaires par Zibeline

Rédaction : journal.zibeline@gmail.com

Chargée des abonnements Marine Jacquens mjacquens.zibeline@gmail.com

CULTURE

LOISIRS

TÉLÉ

CINÉ

BP 90007 13201 Marseille Cedex 1 Dépôt légal : janvier 2008 ISSN 2491-0732 Imprimé par Rotimpress Imprim’vert - papier recyclé

Commerciale Rachel Lebihan rachel.zibeline@gmail.com

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THéÂTRe JoLIeTTe LenCHe+mInoTeRIe

Nationale de l’Agriculture Biologique), a entrepris de le démontrer. La structure accompagne ceux qui envisagent la conversion ou une création d’entreprise en bio, organise des formations, des visites et des démonstrations sur des exploitations résolument sans OGM et sans produits de synthèse. « La base pour produire de bonnes récoltes », explique sa présidente Blandine Arcusa, « c’est d’avoir un sol vivant ». Paysanne-boulangère, elle s’est installée avec son mari sur des terres conventionnelles, et au terme du processus de conversion, qui dure quatre ans, leurs propres céréales poussent sur 20 hectares à Tourves : cinq variétés anciennes de blé tendre, khorasan, seigle, petit épeautre... Pour éviter les mauvaises herbes, ils pratiquent une rotation longue des cultures, avec plantation de luzerne ou de sainfoin, et de pois chiches. Leurs semences sont traitées au vinaigre blanc, et ils bénéficient d’alliés : les « insectes auxiliaires » que sont les coccinelles et les guêpes Syrphes attaquent les pucerons.

SCène Co nVenTIo nnée aRT eT CRéaTIon exPReSSIo nS eT éCRITuReS Co nTemPo RaIneS

saison VI 2018-2019

Changer de méthode

18 > 21 décembre

Héroïne(s) #1 Lamento de Livia

Sabine Tamisier / Lucile Jourdan / Stéphanie Rongeot Compagnie Les Passeurs

www.theatrejoliette.fr - 04 91 90 74 28

Vivre bien

Yves Gros, viticulteur à Hyères (Domaine des Fouques), travaille selon le cahier des charges de l’agriculture bio et de la biodynamie. Sa grande satisfaction est de vivre avec la nature, de l’observer et la connaître. « Dans l’agriculture industrielle, on ne descend plus du tracteur, ce n’est pas intéressant. » Lui comme ses consœurs estiment que le travail nécessaire sur leurs terres est à peu près équivalent à celui requis en conventionnel. Isé Crebely, sur son terrain argileux et caillouteux, fournit les grandes tables, qui apprécient le goût exceptionnel de ses légumes. « On arrive à vivre correctement et à avoir des salariés ». Elle constate que la tendance est aux petites exploitations, phénomène lié au manque de foncier agricole, mais aussi à l’envie de trouver un équilibre entre revenu adéquat et surface à taille humaine. Blandine Arcusa souligne que la demande en produits biologiques est de plus en plus forte, y compris dans la restauration collective, mais que l’on manque encore de paysans pour y répondre. GAËLLE CLOAREC

* Sur le site generations-futures.fr/cartes/, on peut passer sa souris sur le département de son choix, voir les pesticides les plus vendus dans cette zone, son classement par rapport aux autres départements, et télécharger les données au format PDF.

gmem.org 04  96  20  60  16

Marseille

graphisme : Teschner—Sturacci

photo © isabelle Fournier

Pour Isé Crebely, maraîchère également installée à Tourves, cultiver en bio demande une approche particulière. « On est dans le préventif, car il y a moins de moyens curatifs. Les techniques évoluent, il y a plein de procédés intéressants que l’on commence à découvrir. » Elle aussi utilise les insectes, efficaces, et qui coûtent moins cher que les produits phytosanitaires. Elle a également testé avec succès la diffusion d’huile essentielle d’oignon contre le ver de la mouche qui s’attaque à ses carottes. Résultat : 80% de larves en moins. L’un des avantages de cette approche est qu’elle évite la surenchère systématique des produits de synthèse. Le traitement se fait au cas par cas, en fonction des menaces, et respecte l’environnement. C’est ce qui plaît à Isé Crebely : « Le bio n’est jamais arrêté, il faut continuer à le réfléchir ». Pour s’adapter au changement climatique, elle va se mettre à l’agroforesterie, planter des arbres -fruitiers, amandiers, pistachiers, légumineuses comme les féviers ou acacias, fixateurs d’azote- pour créer de l’ombre, garder l’humidité sur les terrains.


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politique culturelle

Presse et Culture, le Montévidéo invite Zibeline à réfléchir sur les rapports de la Presse et de la Culture. Un premier débat le 12 décembre. Avec Sam Karpienia pour finir en musique, et en création

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es acteurs culturels s’en plaignent, les journalistes s’en excusent : la culture dans les médias est un sujet annexe, relégué dans les dernières pages ou aux heures de faible écoute. Une de ces informations secondaires, très rarement en Une, considérées par les « vrais » journalistes comme l’affaire de chroniqueurs spécialistes, et comptabilisées par le ministère de la Culture -pourtant- comme

des informations accessoires. L’important, c’est l’IPG, entendez l’Information Politique et Générale. Dont par exemple l’économie peut faire partie, l’actualité nationale et internationale, les faits divers et de justice, la vie des partis et les élections, l’éducation et les sujets sociétaux... mais ni le sport, ni la culture. Encore le sport, à savoir le foot, est-il très

souvent en Une. Il peut aussi, lorsqu’il est généraliste et quotidien, c’est-à-dire lorsqu’il se nomme L’Equipe, prétendre aux aides d’États et aux tarifs postaux réservés à la presse IPG. La presse culturelle spécialisée ne le peut jamais, même lorsqu’elle s’appelle Télérama. Cette séparation entre IPG et non-IPG n’est pas récente mais, dans le contexte de crise généralisée de la presse, elle atteint profondément un des rouages essentiels à la vitalité culturelle, et à sa démocratisation : les journalistes culture sont de moins en moins nombreux dans les quotidiens, les publications spécialisées payantes s'acquittent du tarif fort de la distribution, une certaine presse culturelle gratuite de type La Terrasse entretient une confusion entre information et communication… Résultat :

Sam Karpienia, chanteur d’usine Il fut la voix de Dupain. Il est celle de De la Crau. Rencontre avec un artiste du peuple, toujours inspiré

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acha Empega, Kanjar’oc, Dupain, Forabandit et main- grandi à Port-de-Bouc avec les communistes et la CGT. Ces tenant De la Crau. Sam Karpienia a plus d’un groupe valeurs sont en moi et ne me quitteront jamais. » à son arc. Des formations qu’il a enchaînées, souvent quittées, parfois mises en sommeil pour leur redonner vie. Qu’importe si c’est pour une poignée de dates. Un instable ? Révolté par « le mépris à l’égard des classes populaires, dePlutôt un passionné, entier et surtout bouillonnant. venues invisibles dans le monde médiatique », il est Dans le projet qu’il défend depuis un an, il a atteint par l’ambiance pesante qui règne ces troqué la mandole contre une guitare élecderniers mois à Marseille, entre l’affront de trique. Comme un retour à ses débuts de la Plaine et la tragédie de Noailles. « Ça fait vingt ans que je suis à la Plaine. Je musicien. Il choisit le nom De la Crau. Un clin d’œil au « paysage cinématograme dis parfois que si elle n’existait pas, phique de la steppe », cette « route de ça ferait longtemps que j’aurais quitté la ville. » Et de s’exaspérer devant les l’ouest » parsemée d’usines, qu’il emprunte depuis qu’il est minot. Entouré politiques à l’œuvre, qui croient « qu’on du percussionniste Thomas Lippens peut changer une ville au détriment de ses habitants. Comme ceux qui veulent et du contrebassiste Manu Reymond, avec parfois Pauline Willerval et Nicofaire rentrer l’Afrique dans le moule de las Dick en invités, il chante inlassablel’occidentalisation capitaliste. Bien sûr que ment la résistance, la solidarité, les conditout le monde aspire à bien vivre, mais pas Sam ens Karp tions de vie des plus humbles. Que ce soit celles en calquant des modèles qui se foutent complèienia © Antoine Lipp tement d’une réalité historique ». des migrants ou de la classe ouvrière avec notamment un hommage à la lutte des ex-Fralib qui ont gagné leur bras Fils d’ouvrier sidérurgiste, il fait le tour des usines de l’étang de fer contre Unilever et créé une société coopérative. « J’ai de Berre, dès ses 18 ans, histoire de se « faire quatre ronds »,

Mépris de classe


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débat des acteurs culturels de moins en moins écoutés et décryptés, des professionnels de la communication de plus en plus exigeants face à des médias qui les sollicitent aussi pour obtenir de la publicité, et des médias privés de plus en plus tentés, pour vendre ou faire de l’audience, de mettre en avant les artistes bankables, ou les scandales...

Services publics

Les médias publics, quant à eux, ne devraient pas être affectés par ce type de problématique puisque leurs cahiers des charges comprennent l’information culturelle. Pourtant les quelques minutes consacrées en fin de journal télévisé à la culture sont dans les médias nationaux exclusivement parisiens, et dans les médias régionaux extrêmement réduits aux attentes supposées du « grand public » : les artistes et opérateurs culturels de la région n’ont, en pratique, que très peu de créneaux pour médiatiser ce qu’ils inventent. Les rares sujets longs sont consacrés aux grands « partenariats » passés entre les chaînes et radios publiques et les « grands événements » du territoire, ce qui accentue nettement la fracture du monde culturel entre ceux

© Agnès Mellon

qui passent à la télé, à la radio publique, et les autres. Pour parler de ces relations de dépendance et de friction Zibeline et Montévidéo ont invité Jacques Dupont Duquesne, administrateur de France 3 Sud Est, Hervé Godard, journaliste à France Bleu Provence, Sébastien Boistel, journaliste au Ravi et membre des « médias pas pareils », ainsi que moi-même, créatrice et directrice de publication de Zibeline. Le débat sera modéré par Ludovic Tomas, et ouvert à la salle où lecteurs, abonnés, opérateurs culturels et journalistes de tous médias sont bienvenus, avec leur parole ! Fabienne Pavia, éditrice (Bec en l’air) et organisatrice des Rencontres d’Averroès et de Oh les Beaux Jours, y représentera

avant de continuer des études dans le domaine de l’action sociale et culturelle. Au terme d’un service civil dans le centre social de son quartier, il s’oriente définitivement vers la musique. Ce qui ne l’empêchera pas, récemment, de mettre sa carrière entre parenthèses pendant près de deux ans. « Je ne me sentais plus à 200% dans ce que je faisais, j’avais trop de doutes. » Il suit une formation de marin et prend le large. « Ça m’a permis de remettre un pied dans le monde ouvrier, d’être avec des mecs qui triment. Des collègues m’ont dit : si j’avais ton talent, je ne serais pas ici. ça m’a recadré. » C’est en effet sa fougue artistique qui aura le dernier mot.

L’occitan comme instrument

Si Sam Karpienia ne cesse de renaître, projet après projet, il avance toujours sur ses deux jambes, l’une dans les musiques du monde, l’autre dans le rock. Même s’il s’est coupé volontairement de la musique anglo-saxonne, par rejet de sa domination. À l’époque de Gacha Empega, avec son complice Manu Théron, il se penche sur la culture provençale qu’il découvre « dans un état catastrophique » par rapport à d’autres

le point de vue des opérateurs culturels, et Florian Laurençon, Directeur adjoint des Services Culture, Education et jeunesse de la Région Sud, représentera celui des collectivités. Après les débats, Sam Karpienia proposera un temps musical en solo autour de sa prochaine création... Le bar est ouvert toute la soirée, et plats et desserts sont servis par Tablée et Noix de coco carotte. AGNÈS FRESCHEL

Quelle est la place de la Culture dans les médias régionaux ? 12 décembre, 20h Montévidéo, Marseille 04 91 37 97 35 montevideo-marseille.com

cultures traditionnelles. L’apport de l’un et de l’autre va radicalement changer la donne. Dupain fait les premières parties de Noir Désir et Lo Còr de la plana des tournées mondiales. Dans le paysage des musiques actuelles, Karpienia est bien davantage qu’une voix -et quelle voix !- occitane. S’il a définitivement adopté cette langue, ce n’est plus seulement par militantisme mais parce qu’elle permet « d’exprimer une émotion » mais aussi pour la part de « mystère qu’elle provoque chez les gens qui écoutent » et qui peuvent ainsi imaginer « leur propre histoire. J’aime bien dire que je m’en sers comme d’un instrument. Et avec n’importe quel instrument, on peut jouer n’importe quelle musique. » Sans remettre en question le collectif, l’aventure solo le démange. « Peut-être parce que j’ai atteint une maturité musicale et que je veux voir ce que je suis capable de créer seul. » Avec l’envie de proposer une forme de pièce qui pourrait être un morceau unique, essentiellement instrumental… dont on pourrait avoir un avant-goût à Montévidéo, le 12 décembre ! LUDOVIC TOMAS


événements

Hommage à Chet Baker Une coopération orchestrée par le Festival de Chaillol permet la rencontre de l’Orchestre Symphonique de Toulon et d’un Quintet de jazz de haute volée. Sur My Chet My Song de Riccardo Del Fra !

De lF ra ©

R. Ph oto n

Zibeline : Comment est né ce projet ? Michaël Dian (directeur de l’Espace Culturel de Chaillol) : Par une conjonction exceptionnelle des volontés : ma rencontre avec Riccardo Del Fra, qui a permis la mise à disposition du Quattro par la ville de Gap, et la venue de l’orchestre de l’opéra de Toulon, dirigé par Léo Margue. Il a fallu faire travailler ensemble des opérateurs très différents qui se rencontrent peu ! Riccardo Del Fra : La demande de Michaël a rencontré un projet que je développe depuis plusieurs années. En 2011 le festival de Marciac m’a demandé d’écrire un hommage à Chet Baker avec lequel j’ai joué pendant plus de 9 ans (de 1979 à la mort du trompettiste en 1988 ndlr). Avec l’orchestre du conservatoire de Toulouse, avec en invité exceptionnel Roy Hargrove. Il ne s’agissait pas de « refaire » à l’identique des morceaux joués il y a 25 ans, mais de s’autoriser une vraie liberté stylistique, et d’employer le langage que j’utilise aujourd’hui.

Ric car do

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C’est-à-dire ? R. F. : Un langage qui s’inscrit dans la tradition du jazz et de la musique classique, et qui tiraille aussi vers des choses plus contemporaines. J’ai ainsi pu écrire des suites, et pas simplement de petits morceaux avec l’orchestre et des solistes qui improvisent par-dessus. Ces suites impliquent une véritable interaction entre l’orchestre et les solistes. Une tournée a été organisée avec une formation de quintet en Allemagne, en Italie et en France. En même temps je me suis consacré à d’autres projets, notamment le disque qui vient de sortir, Moving People, évocation de l’humanité, vulnérable et puissante, dans la géographie mouvante des peuples, de l’Autre qui nous émeut. Il y aura d’ailleurs un arrangement de Moving People pour orchestre dans le concert, car Chet Baker était un de ces « Moving People » auxquels je pense. On m’a proposé en Allemagne d’enregistrer en 2014 avec l’orchestre des Studios de Babelsberg l’album My Chet My Song. En quoi ce projet est-il particulier et exceptionnel ? R. F. : Pour jouer avec un orchestre symphonique et un quintet de jazz, il faut des lieux, des moyens, et c’est une « synchronicité » de sympathies qui a permis d’amener ce projet à Gap. 30 ans après la mort de Chet je suis heureux de consacrer un hommage à celui qui a changé ma vie : j’étais sur le point d’entrer dans l’orchestre de la Radio-Télévision italienne, et j’avais des projets professionnels déjà en cours, une fiancée, ma maman, j’ai tout quitté. Je devais partir juste 20 jours avec Chet Baker, et je suis resté plus de neuf ans. Ça a été un bouleversement

musical et un changement de vie. Que retrouve-t-on, de vous, de lui dans ce My Chet My Song, titre qui affirme vos deux présences ? R. F. : Les afficionados de Chet le retrouveront, par certains morceaux, dans certains arrangements. Néanmoins, j’ai créé des introductions d’orchestre qui peuvent satisfaire des oreilles habituées à la musique classique, l’orchestre ne sera pas simplement un outil, un tapis sonore pour les improvisateurs. J’essaie aussi d’y mettre des bribes de ma vie, de mon expérience existentielle avec Chet, et ce qui en a découlé, drame, vertiges, parce que ce qui reste de Chet aujourd’hui ce ne sont pas ses histoires de drogue, ou de prison ou de femmes, c’est une poésie qui est encore actuelle, liée à la mélodie, à la beauté de la musique, à la profondeur du propos. Comment le quintet s’inscrit-il dans cette histoire de Chet et vous ? On n’est pas dans l’exercice de style, je ne demande pas d’imiter Chet Baker, chaque interprète (Fabien Mary, trompette, Rémi Fox, saxophone, Bruno Ruder, piano, Ariel Tessier, batterie) est dans son expression, son identité, sa personnalité, mais au service d’un projet commun, poétique, celui de l’interprète… C’est ce qui permet la symbiose avec l’orchestre de Toulon, je sais comment faire briller des sections de cordes ou des soufflants à l’orchestre, j’aime bien donner des rôles solistiques à chaque pupitre de l’orchestre classique. C’est ce dialogue qui m’intéresse, le concert ne s’enferme pas dans le regret, le passé, mais instaure une continuité signifiante de lumière et d’espoir. ENTRETIEN RÉALISÉ PAR MARYVONNE COLOMBANI

My Chet my song 16 décembre Le Quattro, Gap 04 92 53 25 04 lequattro.fr


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Chants de Noël XXL Anglais, corse, flamenco jazz ou provençal. Le Département des Bouches-du-Rhône offre ses traditionnels concerts de fin d’année

A Filetta & Fadia Tomb El-Hage © Didier D.Daarwin

C

omme chaque année, à l’approche des fêtes, la collectivité propose une programmation musicale autour de plusieurs thématiques. Une tradition réinventée en 2018, avec cinq concerts grand format dans des salles prestigieuses du territoire. Explications par Dimitri Kogan, chargé de mission musique au sein de la direction de la culture. Zibeline : Pourquoi cette nouveauté qui s’ajoute aux concerts donnés dans les églises ? Dimitri Kogan : Grâce à la jauge de ces grandes salles, on répond à une demande très forte des habitants qui se pressent chaque année aux concerts souvent complets. Cela nous permet donc de toucher un public encore plus grand. La présidente Martine Vassal voulait que l’on soit présent dans des grandes salles tout en maintenant des manifestations dans tous les cantons des Bouches-du-Rhône, à Marseille comme en dehors. D’où cette proposition de grandes formes à partir desquelles on pouvait décliner des petites, et continuer à programmer dans les églises du département. Cela reste entièrement gratuit, dans la limite des places disponibles.

Comment préparez-vous cet événement ? Les thèmes sont muris un an avant l’échéance, autour de musiques à la fois traditionnelles et vivantes, qui permettent aussi des rencontres entre des artistes locaux et d’autres de rayonnement national voire international. Ce travail implique les directions de la culture et de la communication, de nombreux agents pour l’accueil ainsi qu’une équipe chevronnée d’intermittents pour donner aux spectacles de qualité présentés la meilleure technique. Le Noël corse nous donne l’occasion de revoir A Filetta avec un concert événement... A Filetta est justement de ces formations au rayonnement national. C’est un groupe corse qui met la rencontre avec les autres cultures au cœur de sa musique. Comme ils reviennent aux Chants de Noël après quatre ans d’absence, nous leur offrons une carte blanche pour qu’ils revisitent leurs quatre décennies de rencontres polyphoniques en Méditerranée. La présence, parmi les invités, de la chanteuse de langue arabe Fadia Tomb El-Hage permet par exemple une ouverture sur les répertoires de musiques à la fois savantes et populaires. On retrouve également Daniele di Bonaventura, joueur

de bandonéon avec lequel A Filetta travaille régulièrement et enfin l’Ensemble Eva Quartet, issu de la tradition des voix bulgares. Quels sont les autres événements de cette édition ? Le Noël Anglais accueille Nigel Short, un des très grands chefs d’orchestre, qui a créé et dirige le Chœur Tenebrae. C’est un groupe d’excellence mondiale avec 14 chanteurs qui va proposer des chants traditionnels anglais, ainsi que des grands classiques du répertoire américain comme Jingle bells. Le Noël flamenco jazz donne lieu à une rencontre entre Juan Carmona et Louis Winsberg. Cela a beaucoup de sens pour nous de les réunir. L’un habite à Aubagne, l’autre à Eygalières. Juan vient du flamenco et va vers le jazz et Louis vient du jazz et va vers le flamenco. Ils invitent le grand danseur El Choro pour la date à La Ciotat. Parmi les incontournables de Noël, il y a aussi les chants gospel et la tradition provençale… Nous invitions Martin Grizzell, un artiste américain incroyable, qui crée un hommage inédit à Edwin et Walter Hawkins, fondateurs du mouvement New gospel sound qui ont fait de leur version de Oh happy day un succès mondial. Il y aura 45 chanteurs sur la scène de la Criée, autour de trois grandes voix américaines qui apportent la dimension authentique au projet puisqu’elles ont fréquenté la famille Hawkins : Carolyn Anderson, Anise Ritchie et Georges Jackson. Pour le Noël des féeries de Provence, on a demandé à Alexandros Markeas, de revisiter les tubes de Noëls, provençaux et d’ailleurs, avec la participation du conteur Jean Guillon, des musiciens de l’Orchestre philharmonique de l’opéra de Marseille, de la chorale Anguélos et de la Maîtrise du Conservatoire de Marseille, sous la direction de Jean-Philippe Dambreville. ENTRETIEN REALISÉ PAR LUDOVIC TOMAS

Chants de Noël Jusqu’au 21 décembre Divers lieux, Bouches-du-rhöne departement13.fr/leschantsdenoel


10 événements

Mariage de rêve et d’hiver E

Les musiques électroniques, improvisées et expérimentales fusionnent pour donner vie à Reevox-NH

n 2016, le Grim (Groupe de recherche et d’improvisation musicales) cofondé par le guitariste Jean-Marc Montera intégrait le GMEM (Centre national de création musicale) de Christian Sébille. De cette absorption nait, cette année, Reevox-NH (pour Nuit d’hiver), fusion des deux manifestations portées initialement par chacune des structures. Pour cette première édition présentée comme un ballon d’essai, les musiques électroniques s’ouvrent donc à celles improvisées et expérimentales. Du jeudi au samedi, étalée sur deux semaines, la programmation fait la part belle à la création internationale.

Performer la musique

Marseille Labo Band © Pierre Gondard

En ouverture du festival, What is ours, une rencontre improbable, sur une proposition de la chorégraphe Mathilde Monnier, entre le danseur de step dance -danse traditionnelle irlandaise proche des claquettes- Colin Dunne et

Le BNM bouleverse le répertoire

L

a danse dans tous ses états. En 9 jours et 6 spectacles, le BNMFEST continue, pour le quatrième hiver, de faire bouger les corps et les esprits. Toujours plus émancipée, la danse mêle de plus en plus ses influences, et si les catégorisations se multiplient, l’art chorégraphique est au contraire sur le chemin d’une réunification, qui juxtapose les styles dans un brassage fécond. Le public du festival pourra ainsi s’imprégner de toutes sortes de genres, avec le mouvement comme langage commun. Les deux directeurs Emio Greco et Pieter C. Scholten ont élaboré une programmation pointue et festive, avec ateliers de pratique pour tous et un regard particulier sur la scène néerlandaise, appuyé, comme la dernière édition d’actOral, par le soutien du fonds Dutch Performing Art. Introduit par une conférence de Geneviève Vincent qui interrogera la notion de répertoire, héritage et terreau d’invention (« Parlons danse », entrée libre),

le coup d’envoi du BNMFEST sera donné par la nouvelle création des hôtes du lieu. Les cygnes et les autres célèbre le bicentenaire de la naissance de Marius Petipa, et mobilise là aussi le souvenir, l’empreinte d’une écriture fondatrice sur les corps et les propos chorégraphiques d’aujourd’hui. Entre fidélité et invention, la pièce est une redécouverte du langage de l’iconique chorégraphe du ballet russe. On pourra ensuite se plonger dans un tout autre univers, en participant à l’atelier proposé par Sarada Sarita Keilman (membre du collectif néerlandais ISH) : une initiation à la pratique du voging, arrivée du New York des années 80, inspirée des poses des mannequins lors des défilés de mode. Dans BSTRD, Katerina Andreou revendique l’hybridation des origines, métisse les influences et les styles, en élevant le rapport à la culture house et au disque vinyle comme principale référence. C’est un ballon de foot qui dessine

.Ball, Cie Corpo Maquina © Ernest Potters

l’univers de .Ball. Née de la rencontre entre le chorégraphe Guilherme Miotto et le double champion du monde de football


11 le compositeur ErikM. « L’enjeu principal consiste à élaborer un environnement sonore tolérable pour le danseur », explique ce dernier qui clôt avec cette pièce une série de travaux autour de la percussion et des rythmes machiniques. La deuxième soirée (14 décembre) est conçue comme un parcours d’installations et de performances qui invite le public à déambuler pendant plusieurs heures dans les différents espaces du Frac (Fonds régional d’art contemporain). L’artiste israélienne Maya Dunietz propose une expérience physique complète à travers un paysage sonore qui explore l’univers de la pulsation par un phénomène psychoacoustique. Avec sa création T.O.C., Lucien Gaudion avec ses haut-parleurs éventrés revient à un archaïsme low-tech, entre paléo-techno et musique électroacoustique d’avantgarde. Le compositeur marseillais présente également deux autres œuvres : Sama’ et Ballast. Enfin, le berlinois Rashad Becker, considéré comme l’un des plus imminents artistes de musiques électroniques actuel, offrira son nouveau live.

Marseille, le ciel, l'Italie Fruit d’un partenariat avec la Biennale des Imaginaires Numériques (Chroniques) et le Cabaret Aléatoire, la soirée du premier samedi va demander de l’endurance avec une programmation au format XXL, de 18 à 4 heures du matin, répartie dans cinq lieux de la Friche Belle de Mai. Parmi la multitude de propositions que nous pouvons énumérer ici, Continuum, une installation co-imaginée par la plasticienne Félicie d’Estienne d’Orves et la compositrice Eliane Radigue qui nous suggère un coucher de soleil tel que l’on pourrait l’observer sur la planète Mars. À noter également, SpaceTime helix, performance de l’Italienne Michela Pelusio : une hélice dont le mouvement circulaire continu transforme l’objet en une sculpture vivante autour de laquelle le public pourra se déplacer. La deuxième partie de soirée est consacrée aux « musiques intelligentes à danser », selon les mots de Pierre-Alain Etchegaray, programmateur du Cabaret Aléatoire qui invite trois artistes internationaux : Dopplereffekt (États-Unis) et Sleeparchive

de rue Nasser el Jackson, la pièce est un solo entre le sportif et son ballon : les mouvements ne sont plus dirigés vers une victoire, mais vers une communion directe avec le public. Focus néerlandais avec, le même soir, Sychron(icit)y, première française du collectif DIKKER + OOSTRIK, variation sur des extraits de chorégraphies de Greco et Scholten, suivi d’Escape in 49 et 30 (première française), où Amos Ben-Tal interroge la mesure du temps, où le public pourra éprouver qu’il ne passe pas à la même vitesse pour tout le monde. Ziel Rouh (première française) est une chorégraphie conçue par quatre chorégraphes (Greco et Scholten, Nacera Belaza et Vincent Colomes), interprétée par les danseurs de la Cie ICK. Porté par le chant de Karima El Fillali et l’orchestre andalou d’Amsterdam, le spectacle est une fusion des états de l’âme humaine. Le DJ set de Why am I Mr Pink ? (Radio Grenouille) finira finalement de mettre tout le monde d’accord. ANNA ZISMAN

BNMFEST 13 au 21 décembre Ballet National de Marseille 04 91 327 327 ballet-de-marseille.com

(Allemagne) pour deux lives et Randomer (Grande-Bretagne) pour un DJ set. Le week-end suivant débutera par une célébration de l’Italie innovante avec la venue de l’ensemble Curva Minore Piccolo, trio acoustique typiquement sicilien du contrebassiste Lelio Giannetto puis de My Cat is an Alien, duo qui fabrique et électrifie ses propres instruments et qui sera rejoint pour l’occasion par Jean-Marc Montera. Pas moins de quatre concerts sont prévus dans la dernière ligne droite. La rencontre étonnante entre les anches (saxophones, clarinettes) de Peter Brötzmann et la pedal stell guitar de Heather Leigh précède l’univers inclassable de Felix Kubin. Final en beauté autour du batteur et percussionniste Tony Buck pour un concert partagé avec le Marseille Labo Band, collectif dirigé par l’incontournable Jean-Marc Montera. LUDOVIC TOMAS

Reevox-NH 13 au 22 décembre La Friche, Montévidéo, Frac Paca, Marseille 04 96 20 60 16 gmem.org

UN CON C E RT E X CEPTION DE N

EL

symphonique


12 événements

Un jour entier autour de Rivière Karwan, bâtisseur de projets territoriaux, propose un Hors-pistes autour de Georges Henri Rivière. En musique, fiction, voyage et gastronomie populaire. Entretien avec la directrice de Karwan Zibeline : Qu’est-ce que cette nouvelle dans le monde entier, et surtout il a fait forme que vous proposez, appelée donc entrer les arts et traditions populaires Hors-Pistes ? français dans le champ d’intérêt cultuAnne Guiot : Le 15 décembre nous lan- rel… L’exposition du Mucem permet de çons notre prototype ! Nous voulons je- découvrir précisément son trajet. Elle ter des ponts entre les manifestations sera commentée pour nous par les deux culturelles et leur réalisation de terrain commissaires d’exposition Marie-Charet, en passant du cas général au particu- lotte Calafat et Germain Viatte. Puis on lier, donner à connaître des ressources mettra le cap sur la Camargue. du territoire souvent inconnues ou in- Pourquoi ? solites. Aussi nous proposons ces excur- Parce que c’est un territoire marquant sions qui construisent des passerelles pour Rivière, et également marqué par entre des lieux repérés et d’autres qui lui. Nous irons donc au musée de la Caméritent de l’être. Ces escapades seront prises en main par des artistes tout au long du trajet, et permettront aussi de passer toute une journée ensemble, de 9h à 19h, autour d’un sujet culturel et de ses marques dans le territoire. S’agit-il d’une forme de tourisme ? De tourisme culturel si l’on veut, adressé aux gens de passage mais surtout au touriste intérieur, celui du territoire. Comment bâtissez-vous Bac de Barcarin © Trevor Hornsby ces propositions ? En essayant la fantaisie et en décloison- margue, mais avant nous prendrons le nant. On avait par exemple imaginé, l’an Bac de Barcarin pour traverser vraiment dernier, autour de l’exposition Roman le paysage, et nous nous arrêterons dans photo, de proposer une visite des studios un restaurant camarguais. L’idée est de de Plus belle la Vie. On pense aussi partir nous retrouver dans un décor ethnogrades Carrières de Lumière des Baux-de- phique, comme chez une grand-mère Provence pour aller vers les musées où camarguaise que l’on n’aurait pas. Nous on peut vraiment voir les œuvres évo- mangerons des tellines, de la daube de quées, expérience plus intime et moins taureau, dans un décor où tout est éléspectaculaire. ment de récit. On peut aussi dire, dans Et ce premier Hors-Pistes, votre proto- un décor « typique », et la Camargue est type, que propose-t-il ? un de ces endroits où le typique n’est D’aller sur les traces de Georges Henri pas fabriqué. Rivière, un personnage finalement peu Au musée nous serons accueillis par connu mais qui me fascine, et dont la Jean-Claude Duclos, qui l’a créé sur le pensée a laissé des traces dans ce terri- conseil de Rivière. Car c’est aussi lui qui toire. Il a révolutionné la muséographie a inventé le Parc Naturel Régional, avec

sa composante ethnographique. Tout près du Mucem et de son exposition il y a un véritable cas pratique ! Qui fête ses 40 ans : Estelle Rouquette, la conservatrice actuelle, sera là également, et nous conviera au Noël des Gardians. Quel est le rôle de Marion Rampal et Anne Corté dans cette escapade ? Il est essentiel ! On ne pouvait pas concevoir ces escapades sans une présence forte d’artistes ! Elles vont nous accompagner toute la journée, depuis le Mucem jusqu’au retour, et elles ont fabriqué les étapes d’une « Revue roulante » qui souligne le premier amour de Rivière : la musique. Marion Rampal, chanteuse de jazz, s’est évidemment intéressée à l’intérêt de Rivière pour le cabaret et les revues, les années folles. C’était un fan de Gershwin, de Joséphine Baker dont il était le parolier. Quant à Anne Corté, son travail sur le multiple et l’ordinaire est très caustique… Ensemble elles ont fabriqué un certain nombre d’étapes qui vont éclairer le chemin tout au long de la journée. Les modalités pour y participer ? Il faut s’inscrire ! Nous avons rendez-vous à 9h au Mucem, le retour est prévu vers 18h45. L’escapade coûte 56€ la journée, entrées aux musées, Noël Gardian et repas compris. Et c’est ouvert à tous les publics. ENTRETIEN RÉALISÉ PAR AGNÈS FRESCHEL

Hors-Pistes 15 décembre de 9h à 18h45 Marseille et Camargue 04 96 15 76 30 billetweb.fr/karwan


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Alunir, c’est inouï ! Le spectacle Cosmos 1969, créé en janvier à Nanterre, arrive à Martigues et à ChâteauArnoux. Entretien avec Thierry Balasse, compositeur et directeur de la Compagnie Inouïe Zibeline : Pourquoi le thème d’Apollo 11 ? J’ai deux passions, le travail sur le souffle et tout ce qui est lié à l’espace. J’ai un souvenir très marquant de mon père -j’avais 5 ans en 69- me réveillant la nuit pour assister aux premiers pas d’un homme sur la lune. D’autre part, la musique de cette période-là (fin 60 début 70) me touche particulièrement. Vous concevez votre musique comme « une sculpture sonore et immersive » ? Il y a deux sortes de musiques dans le spectacle, celle pop -Beatles, Pink Floyd, Bowie- qui est interprétée sur scène et parfois réarrangée, puis ma composition électroacoustique qui est au centre du spectacle. J’ai une formation d’ingénieur du son et un vrai goût pour la matière sonore. Ma musique ne s’appuie pas sur la mélodie ou les harmonies, sur les standards de la musique classique ou pop, mais sur la matière sonore et son utilisation. J’ai aussi été formé aux techniques du son pour le théâtre, où on est libre de diffuser le son comme on le souhaite. Avec un spectacle qui touche à l’aventure spatiale, la dimension de l’espace sonore est essentielle. Vous évoquez la nouvelle appréhension que nous avons du cosmos : il ne se composerait pas de particules mais de phénomènes ondulatoires… J’ai rencontré des scientifiques pour ce projet, mais musicalement, je n’ai aucune prétention scientifique ! Ce que j’ai pu saisir, c’est qu’effectivement on croit qu’on est entourés d’un monde matériel, mais en fait tout est immatériel et vibratoire. Aussi, j’avais envie dans la pièce Quanta Canta qu’il y ait une sensation

Thierry Balasse © Parick Berger

d’effet vibratoire permanent. Pour cela le public est entouré par dix enceintes. Quant au terme « musique quantique », il s’agit juste d’un jeu de mots ! Avez-vous eu l’idée d’une composition totale, musicale et plastique, dès la conception du spectacle ? Deux partitions se mêlent : votre écriture et celle de Chloé Moglia, sur sa « courbe suspendue ». Au départ du projet, je pensais qu’il serait strictement musical, mais la présence humaine dans la mission Apollo 11, pourtant hautement technologique, est primordiale. La mission a failli rater : à l’instant final, l’ordinateur qui devait tout gérer a « planté » et c’est Niel Armstrong qui a posé le module sur la lune. Il me semblait donc indispensable d’incarner sa présence sur le plateau, par l’écriture gestuelle de Chloé Moglia. Ella a produit, librement, un travail très poétique. J’ai l’idée de départ, la direction artistique, mais tout le monde apporte une dimension d’écriture dans le spectacle. De cette écriture naît un paradoxe, celui de la place de l’homme face à l’infini, relative, même s’il reste au centre… La mission Apollo 11 a été précédée par 10 autres missions évidemment, et on avait commencé à voir la terre de l’espace. C’est le premier choc écologique en fait : l’homme prend conscience qu’il est sur une boule perdue au milieu de l’espace. C’est un choc philosophique et esthétique. Aucun cosmonaute n’est

revenu indemne : le fait de voir la terre de loin est un vrai déracinement… Ce travail sur la mémoire et notre histoire récente invente-t-il une sorte de musique documentaire ? Il s’agit plutôt d’une volonté d’être dans le sensoriel, et pas uniquement dans l’intellectuel. Je ne prétends pas proposer quelque chose de nouveau, mais présenter ce que les gens ne peuvent pas retrouver ailleurs. La scène est pour moi un espace de liberté, où l’on va vivre une expérience unique, chaque soir, où je n’ai pas de normes à respecter. Si j’aime utiliser les technologies, ce n’est pas pour standardiser le rapport au spectateur, mais produire une sensation d’espace inhabituelle. ENTRETIEN RÉALISÉ PAR MARYVONNE COLOMBANI

à venir 11 décembre Théâtre des Salins, Martigues 04 42 49 02 00 les-salins.net 14 décembre Théâtre Durance, Château-Arnoux 04 92 64 27 34 theatredurance.fr


14 critiques spectacles

Cicatrices coloniales, artistes du futur Dernière soirée enthousiasmante des Rencontres à l’échelle

C

’est une des particularités du metteur en scène allemand Nicolas Stemann : donner à voir un travail inachevé, à un instant T de son processus de création. Après une première résidence de répétitions au Théâtre de Vidy-Lausanne, et avant la première en mars 2020, il offrait en clôture des Rencontres à l’échelle Meursault, contre-enquête, adaptation du premier roman de l’écrivain algérien Kamel Daoud. Plus abouti qu’une mise en lecture, le spectacle en l’état annonce déjà une puissante interprétation des acteurs Mounir Margoum et Thierry Raynaud. Tous deux se mettent dans la peau de Haroun, frère de « l’Arabe » tué par Meursault, héros de L’Étranger d’Albert Camus. Son but : relater sa propre version des faits, raconter l’envers du décor, rendre son identité et sa dignité à cette figure niée de la littérature qui se nomme ici Moussa. Pourquoi deux acteurs et surtout pourquoi parmi eux un Français ? Parce que même

Arabstazy © X-D.R.

70 ans plus tard -et même au théâtre- les réflexes colonialistes resurgissent. C’est ce que semble vouloir nous dire la future pièce. La victime reste cet indigène négligeable, mort sur une plage d’Alger à cause du soleil comme les morts de la rue d’Aubagne l’ont été à cause de la pluie. À l’instar du texte original, Meursault et Camus sont volontairement assimilés, semant la confusion. Mais Stemann pas plus que Daoud n’a en réalité comme dessein la mise en cause de l’engagement humaniste du Prix Nobel de littérature. C’est une manière troublante mais efficace de questionner la responsabilité des nations

postcoloniales dans les mutations religieuses, historiques ou politiques qui traversent aujourd’hui les sociétés arabo-musulmanes. La soirée s’achève en musique. Tout d’abord, avec un concert de Johan Papaconstantino. Le jeune marseillais au phrasé nonchalant et aux textes décalés propose une électro-pop minimaliste, imprégnée de sonorités orientales bidouillées aux machines ou à la guitare. Puis, les DJ Mettani et Tropikal Camel et le VJ Ghazi Frini du collectif Arabstazy donnent à voir et entendre un échantillon de la créativité de la scène électronique underground en Afrique du Nord et au Moyen-Orient, loin des clichés orientalistes. LUDOVIC TOMAS

La soirée de clôture des Rencontres à l’échelle a eu lieu le 1er décembre, à la Friche la Belle de Mai, à Marseille

La construction des genres

«

Le rose, c’est pour les filles ! ». La phrase entendue par les quatre enfants qui jouent sur un grand carré rose à s’inventer des histoires va, intimement, les détruire. Erika Tremblay-Roy et Christophe Garcia ont écrit un spectacle entre théâtre et danse, Québec et France, pour dire les ravages de l’assignation genrée. Pour devenir de « vrais gars » les quatre danseurs changent leurs mouvements, font de leurs jeux des combats où plus rien n’est doux ou intime ; rejettent, parmi eux, la fille, qui essaiera dans un solo émouvant de devenir une princesse vouée à l’attente, vivant cette contrainte comme une pluie de coups de poing ; la socialité devient rivalité, proscription, dissimulation pour les garçons de leurs émotions... Un petit spectacle tout public remarquable à plusieurs égards : d’une grande lisibilité et évidence, il est susceptible de donner des armes aux enfants qui

filles dominées. Mieux encore, il donne à voir cette souffrance des garçons à se voir imposer le masculin, voire le viril : le combat contre l’assignation genrée n’est pas une lutte féministe ou LGBT, et les garçons hétéro ont tout à y gagner, aussi, et peut-être davantage. Enfin, il exprime tout cela dans un autre entredeux genres, où les danseurs parlent, la pensée se voit, où les corps ont plaisir et souffrance, où les dialogues nourrissent la joie du mouvement. Et le triomphe de l’amour du rose et de la libre construction de soi. AGNÈS FRESCHEL

© Vincent Fribault

s’imposent des comportements genrés, et se séparent si cruellement dans les cours d’écoles en garçons dominants et

Le problème avec le rose a été dansé les 2 et 3 décembre à Klap Maison pour la danse, à Marseille, dans le cadre du festival Festiv’Anges qui se poursuit jusqu’au 9 décembre


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Grande scène des débuts

L

e Théâtre d’Arles accueillait cette année la Grande Scène, plateforme nationale des Petites Scènes Ouvertes -réseau de soutien aux jeunes chorégraphes. Sélectionnées dans le cadre d’un appel à candidatures, les onze compagnies ont proposé des extraits de spectacles, l’occasion pour les professionnels et amateurs venus nombreux de découvrir leurs dernières créations et de prendre le temps de la discussion et de la réflexion. Parmi ces artistes, Alexandre Fandard présentait Quelques-uns le demeurent, solo nourri par l’univers de Samuel Beckett et notamment une phrase tirée de En attendant Godot, « Nous naissons tous fous, quelques-uns le demeurent ». C’est la force créatrice de la folie qui est donnée à voir, dans un clair-obscur inspiré de Caravage, un noir profond d’où émergent magnifiquement ses mains, ses bras, puis son visage dont les traits sont estompés : l’homme est seul, son corps lutte sans cesse contre lui-même, apparaissant puis disparaissant subitement, ombre inquiétante et fascinante. Le duo que forment la danseuse Arianna Rodeghiero et le musicien Samuel

sa vision de l’ailleurs dans Les villes invisibles. Le corps de la jeune danseuse arpente progressivement le territoire du plateau en d’amples mouvements qui répondent aux longs riffs de guitare, traversant les espaces, aussi invisibles que cruciaux, qui les lient. C’est en RoqueStar, enfin, que Benjamin Forgues occupe le plateau. Chorégraphiée par Charlie-Anastasia Merlet, cette courte pièce, premier volet d’un triptyque en gestation, théâtralise l’entrée en scène. Des coulisses à la lumière le corps du danseur se transforme, dévoile une virtuosité d’autant plus éclatante que les gestes préparatifs semblaient hésitants. Entre savoir-faire et fragilité se dessine ainsi l’histoire du geste créatif…

Dimmi ancora... © Gianni Foraboschi

Moncharmont explore quant à lui dans Dimmi ancora un’altra citta le thème du voyage comme transition d’un lieu à l’autre, empruntant à Italo Calvino

DO.M.

La Grande Scène s’est déroulée les 27 et 28 novembre au Théâtre d’Arles

L’illusoire liberté de choix

O

n s’y serait cru ! Dans le Forum de Berre où tous les sièges sont occupés, les stagiaires « sélection Berre » en formation de maîtrise mondiale des masses écoutent depuis un moment déjà le coach qui donne ses recommandations et rappelle quelques présupposés de base : « Le respect des autres ne va pas faire partie des valeurs qu’on va défendre ce soir », « Chaque personne qui vous entoure est un ennemi », « Ne rien faire pour obtenir l’argent des pauvres, tel est le but »... Le ton est donné, délicieusement corrosif et provocateur, les stagiaires sont prêts à entamer le processus qui aboutira à l’élection de l’élu du soir -issu du public parmi quatre candidats-, futur « maître du monde » en puissance, en cinq stratégies de manipulation, simples et immédiatement préhensibles et reconnues par tous. Tout

ici renvoie à des notions de psychologie sociale et comportementale, appliquées notamment par de grandes entreprises qui motivent leurs salariés lors de stages semblables, mais aussi à l’échelle de pays pour assoir, voire consolider, le pouvoir des dirigeants, et c’est effrayant. Ignorance, émotions, peur, persuasion, cohésion... la méthodologie semble être identique, que l’on soit rassemblé dans une salle de spectacle, ou individu isolé faisant partie intégrante d’une masse manipulable. C’est notre liberté de choix qu’interroge la Cie Les Décatalogués et son « coach » Didier Urbain (génial Gibé QB). Une illusion à l’en croire, qui nous laisse penser que notre obéissance est justifiée et sert le bien commun. Belle illustration de mentalisme, qui noie les esprits dans une démonstration implacable et déstabilisante, où l’exercice du

© Do.M

pouvoir croise le marketing, où l’humour sert la remise en question, sans moralisme, et provoque la réflexion. DO.M.

La Méthode Urbain a été délivrée le 30 novembre au Forum de Berre L’Étang


16 critiques spectacles

À la rencontre de cet autre moi

L

a compagnie SIC.12 de Gustavo Giacosa poursuit son compagnonnage avec le Bois de l’Aune, en présentant En Chemin, 3e volet du triptyque amorcé avec Ponts suspendus (2014) puis La Maison (2016). Quatre personnages, assis en cercle, conversent au centre du plateau. Baignant dans une lumière fauve alors que les autres acteurs sont éclairés d’une blancheur crue, de© Amandine Nandrin bout, un être se tient la tête, cherche à échapper aux mots en voix des Douleurs, ou reine sado-maso entre off que miment les assis, puis les tue. fouet et pole dance… On peut aussi y La tension, insupportable, se traduit trouver une condamnation de l’emprise par la danse vide des mains torturées de la religion et de la société de consomqui émergent de l’ombre… Le sommeil mation… Les acteurs, dont deux (Kostia enveloppe le personnage qui traverse Botkine et Philippe Marien) issus de la en un songe halluciné un patchwork de « S » Grand Atelier (Centre de création saynètes disparates où apparaissent les pour artistes mentalement déficients), figures tutélaires du père, de la mère jouent avec justesse. Akira Inumaru, (Francesca Zaccaria), sous divers ava- plus connu pour ses talents de peintre, tars, violence de la ceinture paternelle évolue dans ce monde où fantômes et prête aux coups, seins « felliniens » de la illusions se mêlent. À la beauté des lumère nourricière, auréole de la Madone mières se conjugue la partition musicale

de Fausto Ferraiuolo qui l’interprète sur scène. Sens aigu de la mélodie, délicatesse onirique de la composition, habitent l’espace, et accordent une unité à l’ensemble désordonné où passent les figures énigmatiques d’un pingouin et d’une tortue, et un fil rouge (cordon ombilical impossible à couper ?). « Pour moi, ce spectacle est un chemin de libération et constitue un tournant dans mon itinéraire personnel, explique Gustavo Giacosa, qui précise les modalités de son travail, dans lequel l’improvisation tient une grande place. Il est difficile d’expliquer la pièce, c’est de la poésie visuelle, avec des zones libres ouvertes inexpliquées ». « Le chemin c’est aller à la rencontre de l’autre », affirme-t-il. Ou d’un bon mal de crâne ? MARYVONNE COLOMBANI

En chemin a été donné les 29 et 30 novembre au Bois de l’Aune, Aix-en-Provence

Entre les portes

E

rvart ou Les derniers jours de Frédéric Nietzsche d’Hervé Blutsch s’amuse, dans la mise en scène de Laurent Fréchuret, à brouiller les pistes, mélanger styles et époques. Est-on dans les années 1888-89, ou aujourd’hui ? Peu importe, l’absurde se plaît ici, où le sujet est avant tout le théâtre qui se met en scène, joue de ses incongruités, de sa capacité à inventer le réel, à rendre aux mots leur charge d’actes. Ervart (Vincent Dedienne) est jaloux, et donc (sic !) met la ville à feu et à sang pour clamer sa douleur de supposer sa femme, Philomène, infidèle. Tirs, courses, fumées, multiplication de portes rouges qui claquent, rideaux transparents derrière lesquels se projettent les scènes issues de l’imagination maladive du personnage, intermèdes cocasses, ouverture délirante de la pièce avec un duo d’acteurs « anglais » se livrant à un lamento sur une poubelle « victime » de violences urbaines… bref, tous les ingrédients sont là pour un spectacle où burlesque, absurde, dérision,

mise en abyme, conjugueraient leurs strates en un cocktail réjouissant et déjanté. L’univers bourgeois digne des pièces de Feydeau est convoqué avec un inénarrable majordome, Stockholm, (Jean-Claude Bolle-Reddat), tandis que les services secrets se tiennent prêts à intervenir envoyant pour leur enquête un espion (Stéphane Bernard) aux déguisements douteux et zoophile, que Nietzsche vient jeter en cachette ses manuscrits sulfureux (ils explosent dans la poubelle autour de laquelle la « troupe » anglaise sert du thé avant de se rendre compte qu’elle s’est encore une fois trompée de pièce), qu’une actrice en quête de cachets tente de créer son rôle, et que le « psychanalyste citationniste » embauché par Philomène pour soigner son mari déclame pêle-mêle Cioran, Platon, Aristote, Spinoza et sequor… Ajoutez un cheval

© Christophe Raynaud de Lage

blanc, les dessins animés de la Warner, des enfants échappés de leur « enclos », du piano, des claquettes, un Fantômas… Et pourtant, l’ensemble dure, l’entrain du début s’estompe, certains passages tirent à la ligne, le rythme que l’on attendait s’essouffle, se perd. L’ensemble gagnerait à être plus resserré pour que la pièce prenne toute sa démesure. M.C.

Ervart ou Les derniers jours de Frédéric Nietzsche s’est joué le 1er décembre au Théâtre Durance de Château-Arnoux-Saint-Auban


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Procès d’attentat

T

umultes* exposait, dans une énergie furieusement communicative, le désir de résister. Résister à la connerie toute simple, celle de la mesquinerie naturelle, qui mène parfois jusqu’au fascisme. Il fallait faire la révolution sur scène. La pièce était une répétition permanente, la révolution y était vivante et fragile. Marion Aubert mélangeait les grands faits et personnages historiques aux luttes intestines de la troupe de théâtre (Cie Tire pas la nappe) en pleine création d’un moment révolutionnaire. L’auteure reprend, avec Les Juré.e.s, ce même principe de représentation du travail en train de se faire. Un parallélépipède transparent évoque l’espace d’une scène de théâtre où les comédiens évoluent, le temps de se replonger, sur le plateau, dans l’élaboration de la réflexion en cours. Il s’agit cette fois des « événements ». Les attentats. Celui contre Charlie Hebdo en particulier. Au nom de la liberté d’expression, que défendre ? Que revendiquer ? Jusqu’à quel point ? Les cinq comédiens posent les grandes lignes de la pièce en devenir. Et, entre introspection et moments de représentation formelle, des sketchs se succèdent. « On fait quoi là, on joue, ou

© Jean-Louis Fernandez

on travaille ? » Personnages de fiction et histoires intimes se chevauchent et se nourrissent les uns les autres. On se jauge, on se juge. Ils vont loin dans leurs délires, la langue d’Aubert, toujours brillante et hautement comique, se régale dans le trivial. Comment réagiront les spectateurs qui, plus que jamais, sont les jurés de la pièce ? Étonnamment, beaucoup partent ! Comme une démonstration que le théâtre, c’est la vie, ces mécontents illustrent parfaitement le propos des Juré.e.s. Il y a bien une limite implicite, qu’on ne devrait pas dépasser. De façon un peu brouillonne

parfois, elle l’est ici joyeusement, façon La Grande bouffe. Éloge du trop, pour mieux faire apparaître une vérité dépouillée de ses attraits. Désespérée, mais qui laisse, pourtant, une chance aux personnages, jusqu’à la fin. ANNA ZISMAN

*La pièce Tumultes sera reprise les 4 & 5 avril au Théâtre Jean Vilar à Montpellier, et les 25 & 26 avril au Théâtre de la Joliette à Marseille La pièce Les Juré.e.s a été jouée les 27 & 28 novembre au Théâtre Jean-Claude Carrière, Domaine d’O, à Montpellier

Colères d’écrivains

D

ans le cadre de sa dernière rencontre de résidence, initiée par l’association Nouvelles Hybrides, Emmanuel Adély invitait auprès de lui Arno Bertina et Emmanuelle Heidsieck pour une table ronde finement orchestrée par Camille Thomine. « Avant même la colère, dit Bertina, il y a la surprise. Par exemple, le terme « violence » a caractérisé dans la presse les chemises déchirées lors les manifestations des salariés d’Air France contre le plan de licenciement de 3000 salariés. Pour les paroles de pouvoir, sont dites inqualifiables les « chemises déchirées » et non le plan de licenciement. On assiste ici à la confiscation des mots. Comme cela touche au langage, la colère n’est plus seulement celle du citoyen, mais celle de l’écrivain. Manifestement, la guerre se situe au niveau du langage

et de ses éléments. » Adély rappelle : « On est passé du terme d’« exploité » (ce qui suppose un exploiteur et une victimisation) à « pauvre » (la faute est renvoyée à celui qui subit cette situation). Le rôle de l’écrivain est de redonner à tous les mots leur charge explosive complète ». Heidsieck ajoute : « La demande d’euphémisation des termes est une violence. Dans mes livres, on voit l’offensive libérale qui attaque notre modèle social. La Sécurité Sociale a autant de légitimité à entrer dans un roman qu’une description de forêt. Il faut réintroduire dans la fiction ce qui fait notre vie ». Adély complète : « Le discours politique obéit à une logique fictionnelle qui vole les écrivains. Il est nécessaire de décoder ces discours qui nous traversent et nous abîment. » « Les arts, en général, souligne Bertina, ont le moyen de ne pas

être seulement dans une dimension critique, ils ont recours à l’humour, ont des « coups d’avance ». Il n’est pas possible de s’installer uniquement dans la rugosité du présent. La tâche de l’art est d’en faire ressortir la beauté. » Bertina : « Je ne suis pas très partisan de dire que la littérature dévoile, démasque pour accéder à la vérité, dans une perspective platonicienne, avec un monde des idées hors du monde physique. Il s’agit plutôt de ramener à un point de complexité. Ce n’est pas parce que les choses sont compliquées, touffues, qu’elles ne sont pas aimables. » La littérature : double instrument de réflexion du monde ! MARYVONNE COLOMBANI

La rencontre a eu lieu le 30 novembre à la Médiathèque des Carmes, à Pertuis


18 critiques musiques

Z’inopéra Le Festival Les Zinos a réservé un traitement cabaret et underground aux pages classiques les plus éprouvées

L

’inépuisable souffle romantique qui traverse l’œuvre de Chopin est d’essence lyrique et opératique ; le compositeur n’a pourtant jamais écrit d’opéra. En juxtaposant ses pièces pour piano les plus théâtrales et les « tubes » du répertoire vocal que le compositeur a beaucoup côtoyés, le pianiste Ludovic Selmi et la soprano Cécilia Arbel esquissent ces subtiles correspondances, et opèrent d’élégants aller-retours entre la ligne de chant belcantiste et la vigueur mélodique que permet le clavier. Ce sont ainsi des jeux de nuances jumeaux qui traversent la familière Etude opus 10 n°3 et le non moins légendaire air de Norma, « Casta Diva », la même sensualité qui opère dans l’ornementation des Nocturnes et dans les vocalises de Donizetti, que Cécilia Arbel enchaîne avec une légèreté évidente, doublée d’une belle articulation. Le sens du tragique demeure enfin, de l’opus 10 n°12 -la célébrissime Etude

Révolutionnaire- à la folie qui transfigure Lucia di Lammermoor. D’un compositeur et d’un musicien à l’autre, le même sens du phrasé, la même force du chant se déploie, dans l’écrin intime du Leda Atomica Musique qui s’avère une caisse de résonance idéale. Les quelques lectures qui ponctuent les morceaux, comme le rouge ardent de la robe et de la rose qu’arbore la soprano, ont cette expressivité outrée très rock qui est la marque de fabrique du festival, à l’image de ce piano droit aux harmoniques si métalliques qui évoque volontiers le cabaret et dont Ludovic Selmi s’empare sans peine. Nul doute qu’elle persistera, intacte, durant tout le mois de décembre. SUZANNE CANESSA

Chopin et le Bel Canto a été donné le 30 novembre à Leda Atomica Musique, à Marseille, dans le cadre du festival Les Z’inos qui se poursuit jusqu’au 22 décembre

Cécilia Arbel et Ludovic Selmi © X-D.R

Accents Tziganes Audacieux et exigeant, le programme concocté par Lawrence Foster a fait particulièrement briller l’Orchestre Philharmonique de Marseille et ses musiciens invités

Alexandra Conunova © X-D.R

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ès l’ouverture, le concert se révèle marqué par les racines slaves de la musique. Les Danses Hongroises de Brahms sont une belle entrée en matière : les numéros choisis ne sont pas les plus connus, et leur étrangeté est bienvenue. Déjà, l’intonation tzigane des cordes et le phrasé serpentin des bois séduisent.

Lawrence Foster dédie ensuite le bien plus familier « Air » de la Suite n°3 de Bach aux victimes des effondrements de la rue d’Aubagne, qu’il prend le temps de nommer, avant de lancer les cordes. La violoniste Alexandra Conunova entre alors en scène, et le temps se suspend jusqu’à la conclusion du Concerto n°2 pour violon de Bartók. La pièce est fascinante, et les timbres miroitent au sein même de l’orchestre : les violons préfigurent le bourdonnement des cuivres, l’éther de la harpe donne le ton aux vents, le crépitement des percussions se propage dans tout l’orchestre. L’inspiration d’Alexandra Conunova se mêle à la douceur de ses attaques. Le son, ombrageux, vif, sait se faire pur dans les aigus, flou dans les chromatismes sans jamais rien céder de sa justesse ou de son grain. Le

public applaudit à tout rompre et la soliste le gratifie de deux bis. Au retour de l’entracte, le cymbaliste Cyril Dupuy présente, le temps d’un « prébis » impulsé par Lawrence Foster, son instrument à l’auditoire, très curieux, le temps de brèves variations sur un thème de Brahms, composées par sa sœur Flora Dupuy. La masse orchestrale se déploie ensuite sur Kodály. Sa Háry János Suite, adaptée de son singspiel homonyme, a le ton facétieux du conte et la malice de l’enfance. Elle sollicite l’orchestre sous des coutures inhabituelles, enrichie du son particulier du cymbalum. Son sens de l’ironie n’endigue ni l’émotion, ni l’enthousiasme : le concert se conclut sur ces notes brillantes. S.C.

Concert donné le 2 décembre à l’Auditorium du Pharo, Marseille Le prochain concert de l’Orchestre Philharmonique de Marseille (Bach, Elgar et Schubert) aura lieu le 9 décembre à 15h à l’Auditorium du Pharo, Marseille


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Een strijd

R

amkoers, « aller au clash » en néerlandais. Et ils y vont, ces satanés bataves. Dézingueurs de la musique, les musiciens de BOT débarquent en débardeurs ouvriers mais en jupes, exhibant leurs biceps et leurs jambes, cranes chauves ou chevelure folle, férocement peuple. Tout y est dynamité : la virilité rock, la frontière entre théâtre et concert, et surtout la production du son. Dès le © Sigrid Spinnox début un accordéon sur roulettes traverse la scène vide en gémis- de papiers froissés, d’instruments troués sant, précédant une floppée d’instru- et malmenés avec un grand sang-froid ments loufoques, cuivres électroniques, burlesque… absolument hilarant. Oui, percussions absurdes et sublimes, cla- les sons peuvent être drôles ! viers montés sur des roues traversant la Le public, tantôt en pleine lumière et scène, thérémine aux ondes invisibles, invité à battre des mains, tantôt plongé sirènes d’alertes, jouets d’enfants… Tout dans l’obscurité du spectacle d’objets auest low tech et fabriqué sans boucle élec- quel il assiste, se laisse transporter par tronique, incarné dans le mécanique, l’ar- l’énergie du chanteur à la voix de rock tisanal, fait de tuyauteries, de fumées et star, et cette musique qui se donne à voir

jusque dans ses structures : on y perçoit, par la démonstration mécanique, comment les sons ajoutent leurs mélodies aux répétitions, leurs accords aux rythmes des percussions spectaculaires. Seul regret, en dehors du plateau exclusivement masculin : on aimerait savoir à quels propos le public applaudit debout. Une feuille de salle proposant des traductions, quelques surtitres français peut-être, auraient permis qu’au-delà de la forme on profite également du sens. Il y est question de clash (ramkoers), de lutte (strijd), de résistance (verzet). Lesquels ? AGNÈS FRESCHEL

Ramkoers a été joué à la Garance, Scène Nationale de Cavaillon, le 28 novembre, et à La Passerelle, Scène Nationale de Gap, du 30 novembre au 1er décembre

Transe caribéenne Le sorcier Anthony Joseph était de retour à Marseille dans le cadre de Jazz sur la ville

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n ne compte plus le nombre de ses passages à Marseille depuis qu’il a émergé musicalement en 2007. C’est peut-être la raison pour laquelle l’affluence est moindre. À moins que l’OM n’y soit pas pour rien. Tant pis pour les absents, le moment n’en sera que plus intimiste et fusionnel. De plus, depuis son dernier concert donné cet été à la belle étoile dans le Parc de la Moline, Anthony Joseph a sorti un excellent nouvel album, People of the sun, qu’il vient présenter dans une de ses « villes préférées non pas de France mais du monde ». Avec des incursions dans les sonorités urbaines de manière plus ou moins prononcée, la fusion des cultures caribéennes constitue l’ADN de l’œuvre musicale de cet enfant de Trinidad-et-Tobago dont il brandit un drapeau sur scène. La scène, c’est là que la puissance de cet imposant barbu au visage rieur et aux vêtements

chaleureusement colorés se révèle. C’est Car Anthony Joseph, qui est aussi poète, sur scène, y compris devant un auditoire romancier et conférencier, assume l’héconfidentiel, que cette fusion devient ritage des artistes Noirs engagés pour jubilatoire, au croisement les droits humains et la justice de l’afrobeat, de la soca, sociale. Il distille sa rédu free jazz, du rap, volte dans un spoken de la soul, du vooword qu’il pratique doo funk voire du avec lyrisme. Sa rock. Un évenverve se transtail aussi ouforme volontiers vert que l’aren envolées, dans un mouchipel des ses origines qu’il vement général parvient à uniqui prend des alfier. Et si certains lures de transe. LUDOVIC TOMAS textes de son dernier opus évoquent la dure réalité de ces « gens An tho ny J oseph © ite du soleil » qui peuvent périr Mirabelwh en mer dans l’espoir d’une vie meilAnthony Joseph s’est produit le 29 novembre leure, c’est dans une communion festive au Cabaret aléatoire, à Marseille, et empathique qu’ils sont interprétés. dans le cadre de Jazz sur la ville


20 au programme spectacles bouches-du-rhône

Inuk

Précieux(ses)

Dominique Rousseau est conteuse, contrebassiste, improvisatrice. Elle aime les histoires où les animaux, les humains et la nature se parlent. C’est le cas dans de nombreux contes inuits, où l’on apprend par exemple pourquoi le corbeau est noir, comment la nuit succède aux jours ou bien d’où viennent les nuages. Des histoires dans lesquelles elle mêle, en musicienne exploratrice de l’oralité, mots, musique, bruitages, silences… Un voyage dans le Grand Nord, et une invitation à la rêverie et à l’écoute. À partir de 6 ans.

Une tête brûlée sous l’eau

9 décembre La Criée, Marseille 04 91 54 70 54 theatre-lacriee.com

12 et 13 décembre Théâtre Joliette, Marseille 04 91 90 74 28 theatrejoliette.fr

Assoiffés

1000 chemins d’oreillers Formée à la danse et au théâtre, Claire Ruffin mène une recherche autour du sommeil. L’univers sensible et ouaté présent dans L’Insomnante (à la fois titre de son précédent spectacle et nom de sa compagnie) se retrouve dans sa nouvelle proposition, un parcours sensoriel, parsemé d’oreillers (200 !), un spectacle immersif et ludique proposé aux plus petits (3-7 ans). Des jeux et des sensations autour de l’endormissement, comme la traversée d’une douce rêverie (lire journalzibeline.fr).

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Fraîchement issue de l’école de la Comédie de Saint-Etienne, Melissa Zehner met en scène, dans une langue âpre et énergique, cette version de La petite sirène, où il s’agit plus de questionner la complexité du désir féminin que de donner à voir un conte de fées, pailleté de minauderies rose bonbon. Tendresse et humour sont néanmoins présents dans cette adaptation libre et inventive du conte d’Andersen. Dès 8 ans.

Les précieuses ridicules de Molière transposé en télé-réalité ! L’émission s’appelle « Le Grand Bureau des Merveilles » et propose à des filles de la petite bourgeoisie provinciale de rencontrer des hommes de la jeunesse dorée à Paris. Place du spectateur et culte du paraître, drague, téléréalité et ridicule, une adaptation hilarante signée par la Cie Pirénopolis pour 2 comédiens, 10 personnages, des smartphones, un écran télé, et une table multifonction. Dès 14 ans. 13 au 16 décembre Théâtre Massalia, Marseille 04 95 04 95 75 theatremassalia.com

Bouquet final

© DR

13 et 14 décembre Le Merlan, Marseille 04 91 11 19 20 merlan.org

14 décembre Théâtre Toursky, Marseille 0 820 300 033 toursky.fr

La Baraka Pizza Devant le camion pizza La Baraka, la vie se joue et se rejoue au gré des dates des matchs de foot, des stades devant lesquels Le Chef (Laurent Fernandez) a décidé d’installer sa cuisine roulante. Avec l’Acteur (Cyril Lecomte, auteur du texte), chaque fois ils reprennent leur échange, et, devant le public-supporter, le jeu se tend, s’accélère, pour peut-être aller jusqu’au but : reprendre l’histoire avec Elle (Blandine Papillon), un amour plus fort que les aléas des résultats des matchs. Mise en scène de Simon Abkarian. 14 au 16 décembre Théâtre de l’Odéon, Marseille 04 96 12 52 70 odeon.marseille.fr

© DR

C’est de soif de vivre dont il s’agit dans Assoiffés, et aussi de jeunesse et de mémoire, de vérité et de beauté, de recherche de sens. Le texte de Wajdi Mouawad, l’un des auteurs les plus en vogue du théâtre contemporain, met en scène un anthropologue judiciaire, qui à l’occasion de l’examen de deux cadavres que l’on a retrouvés entrelacés au fond d’un fleuve, replonge dans sa propre adolescence, et y retrouve ses rêves abandonnés. Un univers fantastique où se mêlent réalité et fiction, humour et drame.

Scénario catastrophe : un astéroïde va percuter la terre de façon imminente, c’est la fin du monde ! Une bande d’amis décide donc de s’offrir une dernière fête. Toutes et tous se retrouvent dans un chalet perdu en pleine montagne. Les situations cocasses vont s’enchainer à un rythme endiablé, une comédie portée par une bande de comédiens enragés ! 14 décembre Le Comoedia, Aubagne 04 42 18 19 88 aubagne.fr


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au programme spectacles bouches-du-rhône

Vous n’aurez pas ma haine

L’enfant

Imaginons qu’un beau jour, la gravité s’inverse. Plus aucun objet n’obéirait aux impératifs de la pesanteur terrestre. Une bonne hypothèse de départ pour le clown circassien qu’est Rémi Lasvènes ! Car les balles du jongleur, de même que l’entièreté de son décor, de bric et de broc, se prennent au jeu et l’emmènent toujours plus loin dans la joie de l’absurde. À voir en famille dès 6 ans.

La mort de Tintagiles, ouvrage de Maurice Maeterlinck (1862-1949), adapté et mis en scène par Élise Vigneron. Une pièce qui repose sur la thématique du passage, le franchissement de seuils, les mouvements informulés de l’âme qui fascinaient l’auteur, figure de proue du symbolisme belge et prix Nobel de littérature en 1911. L’enfant Tintagiles est représenté par une marionnette, animée par Sarah Lascar. Tout public à partir de 14 ans.

11 décembre Théâtre de l’Olivier, Istres 04 42 56 48 48 scenesetcines.fr

© John Hogg

Dada Masilo, surnommée « l’Amazone de Johannesburg », poursuit sa relecture de classiques européens. Après s’être attachée aux personnages d’Ophélie ou Carmen, la voilà qui dynamite le ballet romantique par excellence, Giselle. D’une jeune fille qui se laisse mourir d’amour, elle fait une héroïne révoltée et vengeresse. Une pièce pour 12 danseurs, embrasée par des chants zoulous qui réveillent la partition originale d’Adolphe Adam.

13 au 15 décembre Pavillon Noir, Aix-en-Provence 04 42 93 48 14 preljocaj.org

Léonard l’enfant de la lune

13 & 14 décembre Théâtre d’Arles 04 90 52 51 51 theatre-arles.com

Sur mon chemin...

© X DR

Giselle

© Théâtre de l'Entrouvert

14 & 15 décembre Jeu de Paume, Aix-en-Provence 08 2013 2013 lestheatres.net

Le talent d’acteur de Raphaël Personnaz au service d’un texte aussi fort que tragique, écrit par Antoine Leiris après le décès de sa femme Hélène dans l’attentat du Bataclan. Il y évoque la nécessité de survivre malgré le deuil, pour et avec leur enfant : « toute sa vie, ce petit garçon vous fera l’affront d’être heureux, et libre, car non, vous n’aurez pas sa haine non plus ».

La création 2018 de la Cie Qui-Bout !, du théâtre d’ombre sans narration, adapté aux enfants âgés de 1 à 3 ans. Une approche en douceur de l’univers d’Alice, cette fillette tombée dans un monde onirique, capable de rapetisser puis de grandir à nouveau, comme un petit être humain le fait, à son rythme, dans une succession de repli prudent et d’audace exploratrice.

Un spectacle destiné au très jeune public (à partir de 18 mois), centré sur un petit bonhomme, occupant de la lune. Gourmand, il la grignote, la grignote... jusqu’au moment où il n’a plus de place ! Le voilà forcé de s’en aller. Katy Elissalde et Sara Formosa manipulent les marionnettes qui donnent corps à son voyage sur Terre. 15 décembre Espace Gérard Philipe, Port-St-Louis 04 42 48 52 31 scenesetcines.fr

© X DR

© Arthur Bramao

© Giovanni Cittadini Cesi

Déluge

12 décembre Alpilium, Saint-Rémy-de-Provence 04 90 92 70 37 mairie-saintremydeprovence.fr


22 au programme spectacles alpes var

La famille Semianyki

Face à la mère

Ils tournent dans le monde entier, ils sont jeunes et plein d’audace. Les quatre acrobates du Cirque Le Roux mêlent l’univers des années 30, celui des mystères d’Hercule Poirot ou du Faucon Maltais, au nouveau cirque. Une enquête de haute voltige, à l’humour pétillant, où le champagne coule à flots. Tout public à partir de 7 ans.

Alexandra Tobelaim met en scène un texte du dramaturge Jean-René Lemoine. Une déclaration d’amour à la mère de ce dernier, disparue tragiquement, portée par trois interprètes de la Cie Tandaim, Stéphane Brouleaux, Geoffrey Mandon, et Olivier Veillon. Une attention particulière est portée à la musique du spectacle, assurée en direct par trois musiciens (Astérion, Yoann Buffeteau et Lionel Laquerrière).

© Maria Mitrofanova

© Cie Tandaim, Philippe Ariagno

The elephant in the room

Ah, la Russie, ses oligarques, sa vodka... et ses clowns. Vous aviez adoré le Slava’s snow show ? Voici la famille Semianyki, dotée d’un humour corrosif et d’une vitalité à toute épreuve. Bizarrement peu reconnue dans son pays d’origine, cette troupe de six artistes basée à Saint-Pétersbourg sillonne la planète de succès en succès. Pas de barrière de langue : leur éloquence ne recourt pas aux mots. À voir en famille à partir de 6 ans.

© Eva Trifft

11 décembre La Passerelle, Gap 04 92 52 52 52 theatre-la-passerelle.eu

12 au 16 décembre Châteauvallon - Scène Nationale, Ollioules 04 94 22 02 02 chateauvallon.com

Le promontoire du songe

14 décembre Le Carré, Sainte-Maxime 04 94 56 77 77 carreleongaumont.com

Tartuffe

Le promontoire du songe, c’est un volcan que Victor Hugo discerne dans la lunette d’un télescope, prêté par l’astronome François Arago, lors d’une visite de l’Observatoire de Paris. Une révélation que le poète immortalisa en de tumultueuses pages, adaptées par Philippe Berling et Ivan Dmitrieff. Du théâtre d’ombres à voir en famille, à partir de 12 ans. 12 au 14 décembre Théâtre Liberté, Toulon 04 98 00 56 76 theatre-liberte.fr

© Théâtre de l'Iris

© Nathalie Prats

18 au 21 Théâtre de Nîmes 04 66 36 65 10 theatredenimes.com

Traviata – Vous méritez un avenir meilleur

Benjamin Lazar met en scène sa version de La Dame au camélias, entremêlant extraits du roman d’Alexandre Dumas fils, archives, et extraits du livret écrit par Francesco Maria Piave pour accompagner l’opéra de Giuseppe Verdi au mitan du XIXe siècle. Les acteurs-chanteurs sont dirigés par Florent Hubert et Paul Escobar. 14 décembre Théâtres en Dracénie, Draguignan 04 94 50 59 59 theatresendracenie.com 18 décembre Scène 55, Mougins 04 92 92 55 67 scene55.fr 21 décembre Le Carré, Sainte-Maxime 04 94 56 77 77 carreleongaumont.com

Philippe Clément aime à rapprocher le Tartuffe de Molière et Boudu sauvé des eaux de Renoir. Dans les deux œuvres, un brave homme recueille un homme dans la détresse, et « l’âme du généreux bienfaiteur est parcourue d’une fêlure étrange qui s’oppose au sens commun et à la conduite enseignée par le bon ordre social ». Dans sa version, l’accent est mis non sur l’aspect religieux de la pièce, mais sur ce qui fait scandale dans une société donnée, et peut résonner à toutes les époques. 15 décembre La Croisée des Arts, Saint-Maximin 04 94 86 18 90 st-maximin.fr


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au programme spectacles var alpes-maritimes gard bouches-du-rhône

Hop là

Fantaisie littéraire

Mathieu Enderlin conçoit des « comptines visuelles et jeux de mains augmentés ». Les deux interprètes Yasuyo Mochizuki et Aurélie Dumaret reconstruisent des histoires brèves avec des cubes, multiplient les sens en changeant de sens, les écrans vidéos recomposent le propos. Un jeu d’habileté malin et poétique, pour questionner et évaluer notre rapport à l’image. Réflexion ludique, dès 5 ans.

NatYot est architecte, mais préfère construire avec des mots. Poète et musicienne installée à Montpellier, elle fait de ses lectures des performances accompagnée de danseurs, de plasticiens, de musiciens. Ce sera cette fois avec le vibraphoniste Tom Garell. Bruno Paternot dira des textes de Ghérasim Luca, poète performeur iconoclaste disparu, accompagné par Jean-François Oliver (vibraphone) Patrice Soletti (guitare).

© Nathalie Sternalski

Cubix

© DR

Pascale Thévenon (Cie 1,2,3 soleil) s’est inspirée de l’album-jeu Prendre et donner (Lucie Félix, éditions Les Grandes personnes) pour composer ce spectacle adressé aux tout-petits (dès 2 ans) et leurs parents. Marionnettes à doigts et à tiges côtoient le théâtre d’ombres, et le son remplace les mots. La souris Getulio se promène dans cet univers sensible, et appréhende la notion de contraire : prendre/donner, apparaître/disparaître,... Tout se transforme, tout est possible.

14 décembre Scène 55, Mougins 04 92 92 55 67 scene55.fr

13 décembre (NatYot) 14 décembre (Ghérasim Luca) Maison des littératures à voix hautes, Nîmes 04 66 62 06 66

Alonzo King Lines Ballet

15 décembre Forum Jacques Prévert, Carros 04 93 08 76 07 forumcarros.com

Événement dans la région ! Le chorégraphe américain Alonzo King arrive avec deux pièces majeures. La danse classique s’exprime ici avec tous ses canons : grâce absolue, bras déliés, pointes parfaites, corps élastiques et puissants... Le ballet présente Figures of speech, dédié aux langues des peuples en voie de disparition, et Art songs, avec la grande mezzo-soprano israélienne Maya Lahyadi, qui interprète Bach, Haendel, Purcell...

La Maladie de la mort Sympathetic Magic

14 décembre Théâtre de Grasse 04 93 40 53 00 theatredegrasse.com

Huis clos tragique écrit par Marguerite Duras, ce texte a déjà été plusieurs fois adapté pour le théâtre. Christelle Derré (collectif Or Normes) compose, avec la chorégraphe Odile Azagury, une forme entre un comédien et une danseuse. Il raconte sa rencontre avec elle, qu’il a placée sur un piédestal, pour mieux l’admirer et la posséder. Désir et solitude habitent la pièce, sensuelle et tragique, portée par les mots tranchants de Duras. 11 & 12 décembre Théâtre de l’Odéon, Nîmes 04 66 36 65 00 theatredenimes.com

© RJ Muna

© Laurent Philippe

© Nicola-Frank Vachon

Les onze titres de l’album de Peter Von Poehl, musicien suédois aux airs de pop délicate et planante, sont le support à la chorégraphie sensible des deux danseurs chorégraphes Héla Fatoumi et Eric Lamoureux. Tout se fait en direct et sur scène, la voix porte les pas, les gestes communiquent avec les ballades mélodiques. Un spectacle symbiotique et fusionnel, un moment de douceur et de grâce.

11 & 12 décembre Le Cratère, Alès 04 90 14 26 06 lecratere.fr 14 décembre Théâtre de l’Olivier, Istres 04 42 56 48 48 scenesetcines.fr


24 au programme spectacles gard hérault

Othello, variation pour trois acteurs

La Chute

11 décembre, La Rotonde, Molières-sur-Cèze 12 décembre, Médiathèque Germinal, La Grand’Combe 13 décembre, Centre d’Accueil, Les Vans 14 décembre, Auditorium du Lycée, Le Vigan 15 décembre, Église, St Privat-de-Vallongue

Blanche Neige ou la chute du mur de Berlin 14 au 16 décembre Théâtre Jean-Claude Carrière, Domaine d’O, Montpellier 0 800 200 165 domainedo.fr

L’Homme hors de lui

© Simon Gosselin

Refuge Artiste associé au CCN de Montpellier, Vincent Dupont y a créé sa nouvelle pièce. Refuge, c’est une succession de gestes machinaux par les deux interprètes (Dupont et Raphaël Dupin), manutentionnaires à l’écoute de leur propre souffle et voix amplifiées, qui tentent de se libérer de la répétition, insistant jusqu’au jaillissement d’un déchainement libérateur.

11 au 14 décembre Théâtre des 13 vents, Montpellier 04 67 99 25 00 13vents.fr

11 & 12 décembre ICI, Centre chorégraphique, Montpellier 04 67 60 06 79 ici-ccn.com

Un spectacle pensé pour l’itinérance, le partage. Olivier Saccomano (texte) et Nathalie Garraud (mise en scène) mettent en question le thème central de la pièce de Shakespeare : la jalousie. Othello est celui qui porte le chapeau, mais n’est-ce pas toute la société qui s’incarne dans ce travers alimenté par la société de marchands vénitienne ? (lire journalzibeline.fr) Entrée libre sur réservation : billetterie@ theatrelavignette.fr 15 décembre Centre sportif universitaire La Motte Rouge, Montpellier 04 67 14 55 98 theatre.univ-mont3.fr

Incertain Monsieur Tokbar

© Marc Domage

C’est leur quatrième collaboration ; Valère Novarina et Dominique Pinon livrent à eux deux (l’auteur-metteur en scène et le comédien) une performance hors limites. Les mots de l’écrivain poète, qui « ne veut pas emmener le spectateur en promenade culturelle, mais le libérer par violence comique » lacèrent le réel, lui donne une porte de sortie que Pinon emprunte avec brio. Moment rare de création pure (parmi les tableaux peints par l’écrivain).

© Camille Lorin

Le célèbre monologue de Jean-Baptiste Clamence, avocat désenchanté. Jean-Marc Bourg incarne le personnage créé par Albert Camus, adapté et mis en scène par Stéphane Laudier (Cie V-2 Schneider). Une prise de conscience douloureuse. Un bilan désenchanté, où la lâcheté laisse peu à peu la place à la lucidité, avec son lot de remise en question.

Le film (muet) est projeté sur un écran pendant que les comédiens jouent la pièce, avec les musiciens et bruitages en live. La Cie La Cordonnerie est spécialiste de cet alliage : une histoire filmée qui rencontre son reflet vivant sur scène. Le duos de femmes (la marâtre, la jeune fille) est installé en 1989, pendant la chute du Mur. L’adulte est hôtesse de l’air, folle de son reflet, l’ado est mutique, planquée sous son casque de walkman. Dès 8 ans.

© Sébastien Dumas

© DR.

Blanche Neige ou la chute...

Le voyage, en Turakie, s’effectue en prenant les kilomètres derrière, pour les mettre devant. Et recommencer jusqu’à ce qu’on arrive quelque part. Monsieur Tokbar, Happy culteur, tombe malheureusement en panne de side car. Ce sera le départ d’un autre voyage... Michel Laubu et Emili Hufnagel (Turak Théâtre) font un théâtre de la bricole, inventent des souvenirs, fabriquent du neuf avec du vieux. Royaume des objets, du désuet, du masque, leur univers est merveilleux. À partir de 8 ans. 14 & 15 décembre Théâtre Molière, Sète 04 67 74 66 97 theatredesete.com


au programme spectacles musiques hérault bouches-rhône vaucluse 25

Écrire la nuit

Tafelmusik

Olivier Martin Salvan (comédien) et Miguel Henry (musicien) proposent un retour aux origines, un voyage vers les tréfonds de notre langue. La langue de François Rabelais, à la fois savante et charnelle, appelle le théâtre et la musique : lire Rabelais à voix haute, c’est provoquer un réveil de sonorités inouïes, des images de paysages anciens, de campagne infinies qui reprennent corps.

Univers baroque à souhait que celui où nous convie Héloïse Gaillard. En une subtile mise en scène du regard, les tableaux du XVIIe et XVIIIe font écho aux œuvres de Telemann et Delalande dans une mise en scène de Perrine Mornay. Le jour naît, empli de métaphores et de symboles, on se laisse aller au gré de caprices et « facéties visuelles et égotiques d’une bande de convives » tandis que « La Musique surgit des flots pour y trouver l’ivresse »…

Années 30 autour de Scotto Mathieu Latil (violon), Xavier Frank (alto), Odile Gabrielli (violoncelle), Frédéric Baron (basson), Christelle Abinasr (piano), quel beau quintette pour nous inviter à une promenade dans les airs des années 30. Légèreté rieuse, insouciance de la fête, suivons l’injonction de Werner Richard Heymann, Amusez-vous ! L’ensemble nous donne à déguster de délicieuses friandises (de Gosselain, Chaplin, Claret, Monti, Loubé, Sasseli, Kaper, Vaissade, Churchill) autour de mélodies de Vincent Scotto, dont l’inénarrable Viens Fifine… 15 décembre Foyer de l’Opéra, Marseille 04 91 55 11 10 / 04 91 55 20 43 opera.marseille.fr

© Pauline Rühl Saur

13 décembre La Garance, Cavaillon 04 90 78 64 64 lagarance.com

9 décembre Foyer de l’Opéra, Marseille 04 96 20 60 10 gmem.org

Les trois ténors français

Le Messie

Épousant le ressort dramatique et musical de l’opéra, l’oratorio sacré de Haendel, Le Messie (Messiah) sera interprété par le King’s Consort dirigé par Robert King. Julia Doyle (soprano), Hilary Summers (alto), Joshua Ellicott (ténor), David Wilson-Johnson (basse) serviront cette fresque brillante dont les 70 « Alléluias » firent se lever d’enthousiasme le Roi d’Angleterre en 1743 lors de la première. 15 décembre Grand Théâtre de Provence, Aix-en-Provence 08 2013 2013 lestheatres.net

Le mois de Noël aime les concerts où les musiciens virtuoses s’affrontent et se complètent en une fraternelle émulation, la jonction de trois ténors d’exception fait partie de ces moments incontournables. Florian Laconi, Jean-Pierre Furlan et Christophe Berry mêleront grands airs d’opéra, d’opérette et de musiques populaires. Leurs assauts belcantistes seront accompagnés par l’Orchestre Régional Avignon-Provence sous la houlette de Didier Benetti, ainsi que par le Chœur, le Ballet et la Maîtrise de l’Opéra Grand Avignon.

Florian Laconi © DR.

13 & 14 décembre, Théâtre sortieOuest, Béziers 15 décembre, Les Verreries, Moussan 16 décembre, Salle Jean Ferrat, Portiragnes

Poètes, troubadours et électronique s’accordent avec délicatesse au cœur des Matins Sonnants du GMEM, qui conjugue avec l’Opéra de Marseille les inspirations nocturnes d’Emily Dickinson, Jaufré Rudel, Edmond Jabès, aux compositions de Loïse Bulot, Kaija Saariaho et Philippe Leroux. La voix de la soprano Raphaèle Kennedy mêlera la saveur onirique des mots aux élans électroniques nocturnes.

Robert King © Keith Saunders

Olivier Martin Salvan © Julien Cigana

Raphaële Kennedy © Isabelle Françaix

Éloge à Rabelais

9 décembre Opéra Confluence, Avignon 04 90 14 26 40 operagrandavignon.fr


26 au programme musiques vaucluse var hérault bouches-du-rhône

Chants de Noël

© Etienne Charbonnier

Quatuor Ludwig

10 décembre Église Saint-Paul, Toulon 04 94 36 30 00 toulon.fr

11 décembre Opéra Confluence, Avignon 04 90 14 26 40 operagrandavignon.fr

Bach à voix basse

Le subtil violoncelle de Sonia Wieder-Atherton s’attache à nous faire découvrir des œuvres souvent méconnues, ainsi la pièce de Bruch, Kol Nidrei, (« Tous les vœux »), inspirée de deux mélodies hébraïques : la prière Kol Nidre, récitée pour Yom Kippour, et l’arrangement par Isaac Nathan du O Weep for Those that Wept on Babel’s Stream de Lord Byron. Puis le Concerto pour violoncelle et orchestre de Penard déclinera ses gammes irisées avant la sublime Symphonie N°2 de Brahms, par l’Orchestre Régional Avignon-Provence dirigé par Alexandre Piquion. 14 décembre Opéra Confluence, Avignon 04 90 14 26 40 operagrandavignon.fr

En résidence à la Salle Musicatreize, le Kami Octet, formation composée de musiciens de diverses générations, donne des ateliers de création et improvisation avec des étudiants du secteur musique d’Aix-Marseille Université et des amateurs. Leurs univers qui touchent au jazz, à la musique contemporaine, et à l’improvisation tissent un parcours poétique d’une écriture où éclot avec virtuosité un air de liberté. 15 décembre Salle Musicatreize, Marseille 04 91 00 91 31 musicatreize.org

Ferrago

11 décembre Salle Pasteur, Corum, Montpellier 04 67 601 999 opera-orchestre-montpellier.fr © DR

Sonia Wieder Atherton © X DR

Inspiration et recueillement

L’ensemble Orfeo 55, en résidence à l’Opéra Orchestre national Montpellier Occitanie, nous invite à un parcours atypique au cours duquel nous serons initiés à la symbolique des voix chez Jean-Sébastien Bach, la basse (le baryton Leon Kosavic), profonde, dramatique, évoque le Christ, l’alto (la contralto Nathalie Stutzmann, aussi à la direction) est la voix de l’âme, emplie d’espérance… Sinfonias et airs séparés enchâssent ces dialogues inspirés entre l’âme et Dieu.

© Burlo Jack

Cafe Zimmermann © J.B. Millot

Thierry Brodard (1e violon), Manuel Doutrelant (2e violon), Padrig Fauré (alto), Anne Copéry (violoncelle) proposent un programme de musique française, tout en subtile délicatesse. Le Quatuor à cordes en sol mineur opus 10 de Debussy répondra à celui de Chausson en ut mineur op. 35, avant une conclusion de Ravel, son Quatuor à cordes en fa majeur. Le concert est présenté sous l’égide du Rotary Club au profit de l’Opération Orange, œuvre de Sœur Emmanuelle et Sœur Sara.

Concert Kami Octet

Dans le cadre de l’Hivernal, festival de musique de Toulon et sa Région, le bel ensemble Café Zimmermann propose en l’église Saint-Paul de Toulon un concert où se croisent les œuvres de Telemann et de Bach. Ces deux musiciens prolifiques et virtuoses de l’époque baroque se lièrent d’amitié. Ouverture et Cantate de l’un répondent à un Oratorio et une Cantate de l’autre, en un programme empli de l’esprit de Noël.

Quatuor Diotima Après avoir fêté les vingt ans de leur Quatuor Diotima avec deux albums salués par la critique, Yun-Peng Zhao (violon), Constance Ronzatti (violon), Franck Chevalier (alto), Pierre Morlet (violoncelle), proposent en deux concerts sur une même journée l’intégrale des six quatuors de Béla Bartók. L’évolution du compositeur est ici rendue sensible, la liberté formelle et stylistique s’installe au fil des pièces. Deux temps en apesanteur. 11 décembre Salle Pasteur, Corum, Montpellier 04 67 601 999 opera-orchestre-montpellier.fr

Sébastien Spessa (Lo CÒr de la Plana), Braka (Désirs Chroniques Quartet, BVZK), Thierry Daudet (Auprès de Ma Blonde), ont enfin trouvé un prétexte pour conjuguer leurs talents en faisant voyager les musiques d’ailleurs, en associant des mondes séparés par des océans. Ainsi, on découvrira dans leurs délirants « Sketches of Italie », tarentelles new-yorkaises, rock’n roll calabrais, tammurriates australiennes et western-jazz napolitain. Qui a dit que les musiques traditionnelles étaient ennemies de la liberté ? 14 décembre Cité de la Musique, Marseille 04 91 39 28 28 citemusique-marseille.com


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Les triplettes de Belleville

Sucré/Salé

© Diaphana films

Home comme maison, mais aussi nation, pays, un « chez soi » qui diffère selon le parcours de vie… S’appuyant sur un travail mené par la compositrice et chanteuse Helen Chadwick, basé sur des interviews de personnes ayant émigré et des poèmes de Darwich et Himet, le spectacle parle de racines et de déplacements. Le Chœur mixte Les Mardisonnants accompagne les voix des solistes (H. Chadwick, Brigitte Cirla, Soraya Mahdaoui et Tania Zolty), dans un dispositif qui place les spectateurs au centre de l’écoute. 12 au 14 décembre La Friche, Marseille indechiffrables.free.fr

Poètes du bitume

Groupe Circonstance © X-D.R

Bijou d’animation encensé par les critiques françaises et internationales, Les triplettes de Belleville raconte l’histoire d’un petit garçon passionné de cyclisme entrainé par sa grand-mère qui le mènera jusqu’au Tour de France. Sous la baguette du compositeur Benoît Charest, venez (re)découvrir cette fable rétro-décalée dans une version ciné-concert pour un spectacle très swing assuré par les huit talentueux jazzmen du Terrible Orchestre de Belleville.

14 décembre Théâtre Le Sémaphore, Port-de-Bouc 04 42 06 39 09 theatresemaphore-portdebouc.com

© ze-factory.fr

14 novembre Espace NoVa, Velaux 04 42 87 75 00 espacenova-velaux.com

Baa Box

Shadi Fathi & Bijan Chemirani La musique persane est à l’honneur à l’auditorium Jean Moulin. S’y rencontrent Shadi Fathi, musicienne et soliste iranienne formée à la musique savante, et Bijan Chemirani, maître du tambour tombak. Construisant un paysage sonore inspiré de la lointaine Perse, ce duo complice mêlera rythmes envoûtants et improvisations virtuoses pour un concert tout en douceur et en élégance.

© pierrick guidou

La douceur des voix d’enfants caressent les mots sombres et mélancoliques du rappeur Dooz Kawa. S’y mêlent aussi la poésie visionnaire et engagée de Léo Ferré, reprise par Richard Martin et le rock’n’roll insolent de Féloche, accompagné par sa mandoline. Une rencontre surprenante, extrême, où chacun incarnera fidèlement son genre tout en s’accordant avec les autres. La musique et les mots résonnent juste dans cette soirée définitivement ovni. 15 décembre Théâtre Toursky, Marseille 04 91 02 58 35 toursky.fr

Pink Martini Pour leur tournée de Noël, les douze musiciens de Pink Martini viennent enchanter le Grand Théâtre de Provence avec leur jazz-pop colorée. Au programme les titres les plus emblématiques de leur répertoire, mais aussi un tour du monde des chansons de fin d’années : White Christmas, Santa Baby, Douce Nuit dans sa version originale allemande, une chanson chinoise célébrant le Nouvel An et bien d’autres… 11 et 13 décembre GTP, Aix-en-Provence 04 42 91 69 70 lestheatres.net

La fin de l’année au Sémaphore sera synonyme de transition, mais aussi de fête ! Avant d’accueillir la nouvelle directrice du lieu, Laurence Cabrol, en janvier, Pierre Grafféo a prévu de dire « au revoir et merci » en musique. Le concert du groupe Circonstance, au sein duquel il joue du piano aux côtés de Jean-François Heffer (batterie), Patrick Heurtel (basse), Didier Cerboni (guitare) et Jean-Jacques Lion (saxophones), clôturera une soirée pleine d’émotions !

Hors des codes, Leïla Martial a inventé son propre langage pour chanter le jazz. Une forte personnalité au groove solaire et atypique, bientôt sur la scène du Comoedia avec son groupe Baa Box pour une soirée placée sous le signe de la créativité, aux croisements de différents genres musicaux. À ses côtés Éric Perez (batterie) et Pierre Tereygeol (guitare) tisseront l’écrin mélodique dans lequel la chanteuse exprimera son talent, conjuguant toutes les langues. 13 décembre Comoedia, Miramas 04 90 50 14 74 scenesetcines.fr

© Muriel Despiau

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9 décembre Auditorium Jean Moulin, Le Thor 04 90 33 97 32 auditoriumjeanmoulin.com


28 au programme arts visuels bouches-du-rhône

Pierre Gutierrez & Chrislaine Dupuy L’aquarelliste Pierre Gutierrez (œuvres vendues au profit de l’Institut Paoli Calmettes) et Chrislaine Dupuy (peinture à l’huile modulée au couteau) sont les derniers hôtes de la Galerie etmoietmoi avant qu’elle ne se lance dans de nouvelles activités. Le premier parcourt du regard les paysages et villages provençaux, la seconde puise dans les plages normandes sa source d’inspiration. M.G.-G. jusqu’au 16 décembre Galerie etmoietmoi, Marseille 04 91 54 08 88 etmoietmoi-marseille.fr

Vers la lumière © Chrislaine Dupuy

Renaud Grizard Artiste fidèle de la galerie marseillaise Anne Tschopp, le peintre Renaud Grizard se confronte aux espaces monumentaux du Silo où il expose ses toiles habitées de silhouettes colorées et de jeux d’ombres. Des séries peintes à l’huile, à la matière travaillée par surépaisseurs et grattages, qui questionnent inlassablement la place de l’homme dans le monde. La sienne ?… M.G.-G. Des hommes et des couleurs 15 janvier à avril Le Silo, Marseille 06 07 04 54 02 silo-marseille.fr

Le chien andalou © Renaud Grizard

No futurs D’une balade dessinée à l’autre dans les communes du Pays d’Aubagne et de l’Étoile en compagnie d’illustrateurs-marcheurs (Benoit Guillaume, Clément Baloup, Renaud Perrin, Matthias Picard, Laurent Eisler) et de guides du GR2013 (Nicolas Mémain, Hélène Dattler, Collectif SAFI, Clémentine Henriot, Julie de Muer, Jeanne Robet), les dessinateurs-marcheurs volontaires ont réinventé les paysages de demain. Le résultat ? Une exposition dans la vitrine du Bureau des guides sur La Canebière. M.G.-G. Les paysages de demain du pays de l’Étoile jusqu’au 15 février 152 La Canebière, Marseille gr2013.fr

© X DR

Pascale Lefebvre Pas un jour sans que Pascale Lefebvre ne « dessine tout ce qui lui tombe sous la main » ! Elle réalise des graphismes sur papier, des dessins, des « encres » qui nourrissent à leur tour des « huiles » dans un va-et-vient continu de formes, de couleurs, de matières, d’inspirations. Urban Gallery réunit la production de ses cinq dernières années riches en recherches et tentatives : carnets de croquis brut, dessins-tablettes, monotypes, lavis et grandes aquarelles. M.G.-G. Au jour le jour jusqu’au 9 janvier Urban Gallery, Marseille 04 91 87 43 35 urbangallery.org Agrafe, diptyque, huile sur toile, 180 x 130 cm © Pascale Lefebvre


au programme arts visuels bouches-du-rhône var gard

Nathalie Bagarry Chanceux ! ceux et celles qui n’ont pas pu encore voir Le Pont du sel. L’exposition de Nathalie Bagarry est prolongée. Au bord de la Méditerranée, une série de portraits en surimpression entre fiction et autobiographie. Dans la même veine, on pourra découvrir son court-métrage présenté cette année au Festival Voies Off à Arles. C.L. Le Pont du sel jusqu’au 22 décembre La Fontaine Obscure, Aix-en-Provence 04 42 27 82 41 fontaine-obscure.com

© Nathalie Bagarry

Marc Chagall

Pour prolonger l’émerveillement de l’exposition à l’Hôtel de Caumont (Zib’10), découvrons une série de grandes lithographies à petit tirage réalisées d’après les vitraux du peintre exécutés en 1961 pour la synagogue de l’Hôpital Hadassah de Jérusalem en Israël. Des estampes imprimées et éditées en 1963 par Fernand Mourlot à Paris où l’on retrouve l’univers enchanteur du peintre-poète qui faisait vibrer le ciel sans ombre. M.G.-G Vitraux pour Jérusalem, Lithographies, 1963 jusqu’au 29 décembre Galerie Vincent Bercker, Aix-en-Provence 04 42 21 46 84

© Marc Chagall

Eugène Baboulène Depuis que Michel Estades a côtoyé Eugène Baboulène avant sa mort en 1994, il n’a cessé de défendre son œuvre en lui consacrant régulièrement des expositions monographiques. Parmi les thèmes récurrents chers à ce grand maître de la peinture provençale, on retrouve les marines, les bouquets de fleurs, les intérieurs et les natures mortes aux poissons qui ont fait sa réputation. M.G.-G. jusqu’au 12 janvier Galerie Estades, Toulon 04 94 89 49 98 estades.com/galerie-toulon © Eugène Baboulene

Gilles Saussier La colonne sans fin fut la seule œuvre de Constantin Brancusi installée dans un espace public. Réactivant un travail antérieur, le photographe Gilles Saussier propose, avec la participation des étudiants, un nouveau regard sur ce mythique et monumental chef-d’œuvre sur le principe d’une réflexion dédoublée. Présentation du livre et vernissage vendredi 7 décembre à partir de 14h30. C.L. Spolia Spolia 10 au 20 décembre École supérieure des Beaux-arts, Nîmes 04 30 06 12 00 esba-nimes.fr G.Saussier © Arnaud Vasseux

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Les films à ne pas louper cette semaine Demain de Mélanie Laurent et Cyril Dion dimanche à 22h45 1900 de Bernardo Bertolucci lundi à 20h55

petit

écran

L’homme pressé d’Edouard Molinaro lundi à 20h50 Une chambre en ville de Jacques Demy lundi à 21h Les temps qui changent d’André Téchiné mercredi à 20h55 Sur un arbre perché de Serge Korber jeudi à 20h50 Le bel Antonio de Mauro Bolognini, jeudi à 20h50

Les arpenteurs de la Terre samedi à 20h50 Arte Il sert aux scientifiques, aux urbanistes, et même aux artistes. Poétique autant que pragmatique, l’arpentage est une discipline nécessaire pour fonder les connaissances scientifiques et explorer la Terre dans ses moindres recoins. Le réalisateur Christopher Gerisch nous fait découvrir les nouvelles techniques : si l’orientation grâce aux étoiles a longtemps présidé au défrichage des terres, c’est désormais grâce aux satellites, drones ou caméras que le scientifique peut nourrir ses explorations pour mesurer l’évolution des océans, des volcans ou de l’atmosphère.

Tarzan, le mythe de la jungle

À consumer avec modération

dimanche à 14h

dimanche à 20h50

À l’orée de Noël, la Galerie France 5 propose un volet ludique et familial. On connait tous son hululement et ses « atours » se baladant de liane en liane… Tarzan est né en 1912, sous la plume d’Edgar Rice Burroughs. Traduit en français en 1926, il est adapté au cinéma dès 1918, avant de prendre les traits du célèbre Johnny Weissmuller en 1932. Le mythe a ensuite traversé le siècle, de personnage de comics en dessin animé, en passant par les produits dérivés, et même les pastiches (Tarzoon, la honte de la jungle ! ; George de la jungle…) L’on découvre pourtant dans ce documentaire signé Michel Le Bris et Priscilla Pizzato que ces multiples déclinaisons n’ont plus grand-chose à voir avec le héros originel pensé par Burroughs, qui cherchait à explorer l’éternelle figure de l’enfant sauvage confronté à la civilisation. Ni Jane ni Cheeta ne sont nés de son imagination !

Si l’encens comme le papier d’Arménie ont longtemps constitué une alternative aux produits chimiques pour purifier nos intérieurs, on sait désormais que l’on ne peut plus faire confiance à ces substances autoproclamées naturelles. Un Français sur deux continue pourtant d’utiliser un désodorisant à combustion. Laurent Dy et Robin Braquet livrent une véritable enquête sur la fabrication de trois produits phares. Le papier d’Arménie tout d’abord, de Montrouge où il fut inventé il y a un siècle par un binôme de pharmaciens, jusqu’au Laos où est extrait le benjoin qui le compose. En Normandie, on découvre chez Trudon, fabricant historique de bougies, que si le test de « suie » est le seul obligatoire, les bougies émettent aussi des pollutions invisibles telles que le formaldéhyde. En Inde enfin, chez un producteur d’encens, on évoque le benzène rejeté. Les analyses effectuées débouchent sur ce

paradoxe : en cas d’utilisation d’un de ces produits, il faut ouvrir les fenêtres !

Aliments industriels, nous rendent-ils malades ? mardi à 20h50

Ce nouveau numéro d’Enquête de santé se penche sur les produits ultra-transformés. Présentés à leur apparition dans les années 70 comme « nouvel art de vivre » ou encore « bouée de sauvetage de la cuisinière », ils représentent aujourd’hui près de la moitié des aliments vendus en supermarchés. La transition alimentaire des années 80 a entraîné une explosion des maladies chroniques, diabète et obésité en tête. Aucun industriel n’ayant souhaité répondre aux questions de Bruno Timsit, la composition des aliments est passée sous le crible d’un chimiste. Nul besoin d’en passer par les plus diaboliques – cordon bleu et surimi – pour constater les dégâts. La technique du « cracking » est utilisée dans tous les plats : les composants


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sont vendus séparément aux industriels, pour en valoriser chacune des parties. Le documentaire fait également une incursion au Brésil, où les stratégies offensives de l’agro alimentaire ont incité le gouvernement à mettre en place une classification des aliments, un pas que la France n’a toujours pas franchi.

L’irrésistible ascension d’Amazon mardi à 20h50

Tandis que la nécessaire taxation des GAFA est sous les feux de la rampe, le réalisateur David-Carr Brown revient sur la fulgurante ascension d’Amazon, de ses débuts dans un faubourg de Seattle, aux lignes qui sous-tendent sa politique de développement - précarité de l’emploi, optimisation fiscale… -, révélateurs du modèle ultralibéral qui prévaut sur Internet. Le géant prévoit désormais de se positionner en tant que fournisseur de services publics, et même… de conquérir l’espace. La thématique se poursuit à 22h30, avec l’excellent Quand les multinationales attaquent les états. Ce documentaire de Laure Delesalle révèle les pouvoirs démesurés conférés aux tribunaux d’arbitrage, permettant à des multinationales d’attaquer les états devant des avocats d’affaires, afin de réclamer la compensation d’un manque à gagner réel ou potentiel induit par un changement de législation. Des affaires emblématiques illustrent ce dispositif encore largement méconnu du grand public : la protestation européenne contre le Ceta, traité de libre échange avec le Canada ; l’affrontement entre Cosigo Resources Ltd. et l’état colombien, suite à l’annulation d’une concession minière prévue sur un territoire amazonien sacré. Mais aussi le géant de l’énergie supposée verte Vattenfall s’opposant à l’état allemand, ou encore la multinationale Renco polluant au plomb le village péruvien de La Oroya. Alain Deneault, du Collège international de philosophie à Paris, s’inquiète de l’émergence de « deux régimes de pouvoir : l’un traditionnel, qui tend à se folkloriser, théâtre d’ombres pour distraire la plèbe. Un autre qui s’organise tout autrement et procède à sa manière : les multinationales se voient hors sol ».

Au cœur des éléments : la tempête mardi à 21h Tous les procédés sont-ils bons pour sensibiliser le grand public à la cause climatique ? Ce nouveau programme, présenté par Olivier Minne et Chloé Nabédian, se présente comme un Escape game : confinée dans une maison durant une nuit entière, une famille est plongée au cœur d’une simulation de tempête. Dans un centre de commandement voisin, un pompier et un expert analysent les phénomènes en temps réel. France 2 promet un « dispositif inédit et spectaculaire »… à juger sur pièces. À 23h15, le programme se poursuit par la diffusion dans la case Infrarouge du documentaire Après-Demain. Deux ans après Demain, le réalisateur Cyril Dion y fait le bilan de nouvelles initiatives prometteuses, aux côtés de Laure Noualhat.

Venise, le défi technologique jeudi à 20h50 Posée sur l’eau, on sait combien Venise est menacée de disparition. Les scientifiques s’attellent à sauvegarder ce patrimoine, en luttant contre les multiples dangers qui le guettent : sel, réchauffement climatique, affaissement des sous-sols, tourisme de masse... Le reportage fait le point sur les expériences en cours. Des reconstitutions 3D laissent entrevoir les solutions qui pourraient lui donner un peu de répit.

Derniers jours d’un médecin de campagne jeudi à 00h30 En 2016, Patrick Laine avait créé un engouement médiatique : à l’approche de la retraite, ce médecin de campagne proposait la cession de son cabinet sur Le Bon Coin. Point de fanfaronnade, il s’agissait pour le praticien de trouver une réelle solution afin de ne pas laisser esseulés ses patients de Saulnot, commune de 800 habitants en Haute-Saône. Olivier Ducray revendique l’aspect humain de son documentaire : c’est par un versant profondément empathique qu’il aborde le sujet des déserts médicaux, donnant force et vie à une solitude et exclusion vécues au quotidien. Pas de voix off ni d’analyses d’experts, mais un quotidien filmé avec pudeur et respect durant 11 mois, dans la lignée de son film sorti en salles, La vie des gens. À l’heure qu’il est, le docteur Laine n’a toujours pas trouvé son remplaçant… JULIE BORDENAVE

Et aussi… Norilsk, l’étreinte de glace dimanche à 14h Protestants de France dimanche à 22h40 Bonaparte, côté noir lundi à 15h35 De l’autre côté des remparts lundi après Soir 3 Koffi Annan, le rêve suspendu mardi à 20h30 Une histoire à ma fille mercredi à 14h Disparition : comment j’ai quitté les miens jeudi à 22h35 Abba, Bee Gees, Carpenters vendredi à 22h25


32 critiques

cinéma

Au fil des documentaires La sélection de la 22e édition du Primed a proposé 25 documentaires et reportages présentés dans 6 catégories

É

té 1970, à Cadaquès, Thérèse et Marc Lacroix rencontrent Salvador Dalí, un événement qui va changer leur vie. Trente ans plus tard, Céline Formentin, qui préparait un documentaire sur Gala, la femme du peintre, rencontre Thérèse, la femme du photographe : un coup de cœur d’où nait un film, Au-delà de l’objectif : Lacroix, Dali ; trois portraits s’y dessinent, s’entremêlent, nous permettant de découvrir Thérèse, qui plonge dans ses souvenirs. Elle commente, lit, parfois émue jusqu’aux larmes, les textes de Marc Lacroix, son mari, dont elle est tombée amoureuse le jour où un rayon de soleil a illuminé les yeux de ce photographe qui avait acheté son premier appareil à quatorze ans et qui rêvait de rencontrer… Dali. Une vraie amitié et une complicité artistique retracées aussi bien par les enregistrements que Thérèse a conservés que par les images d’hier ou d’aujourd’hui. Images d’archives ou promenade dans des lieux baignés de lumière que reflètent miroirs ou fenêtres. Thérèse, après la mort de Dali qui avait un peu « vampirisé » son mari, s’est mise à la sculpture pour exprimer cette « divine obsession » et le spectateur a comme l’impression d’avoir lui aussi partagé durant une heure la vie de ces artistes. (catégorie Art, patrimoine et culture) Dans Strange Fish, c’est le portrait de trois pêcheurs que nous fait Giulia Bertoluzzi. Ils vivent de la pêche artisanale à Zarzis dans le Sud tunisien. Mais depuis 2002, ils ne ramènent pas que des poissons au port : ils secourent inlassablement des gens qui ont pris la mer au péril de leur vie, fuyant la misère ou la guerre. « En 2006, nous avons sauvé 2000 personnes » Mais Chamseddine Marzoug n’oublie pas les morts non plus : il est impensable de laisser sur le rivage les corps que la mer a rapportés. On le suit sur le terrain qu’ils ont obtenu de la municipalité, - à côté de la décharge- où il donne une sépulture à ceux qui n’en ont pas. Le « Cimetière des Inconnus ». Avec leur association de pêche artisanale qui comprend aujourd’hui un millier

Dalì et Lacroix, au-delà de l'objectif - Antonio PEREZ MOLERO et Céline FORMENTIN

de membres, ils refusent l’inhumanité, continuant à sauver des vies, empêchant le ravitaillement en essence aux bateaux « fascistes » qui traquent les migrants et interpellant le Parlement européen pour qu’il agisse. La caméra a su capter aussi bien les moments magiques de la pêche que l’émotion sur les visages de ces hommes qui n’ont pas baissé les bras. (catégorie Enjeux Méditerranéens)

Rites de passage On feuillette comme un livre d’images le film de la Turque Asuman Atakul Firtina. Construit en 3 parties et une vingtaine de chapitres aux titres évocateurs, -Ail sous l’oreiller/corde noire, Epingle dans le coussin, Basilic et khôl au bébé…- le documentaire Naissance-Mariage-Mort, Trois étapes de la vie nous fait découvrir des rites de passage qui perdurent depuis la nuit des temps. La réalisatrice a sillonné la Turquie, donnant la parole essentiellement aux femmes des villages, et dévoile des traditions qui mêlent souvent rites païens et religieux. Certaines sont savoureuses comme l’épreuve que doit subir, dans la famille de la mariée, le nouveau gendre : il doit rester durant toute une nuit assis sur les genoux près d’un feu qu’on alimente, et le matin, suant sang et eau, il lui faut fendre une énorme souche avec une hache émoussée.

Une manière de tester sa force et sa patience. Un documentaire aux couleurs éclatantes qui nous montre une Turquie où le temps semble s’être arrêté. ANNIE GAVA

La 22e édition du Primed s’est tenue du 25 novembre au 1er décembre à Marseille

PALMARÈS Grand Prix Enjeux Méditerranéens : Anatomie d’un crime de Cécile Allegra Prix Mémoire de la Méditerranée : Missing Fetine de Yeliz Shukri Prix Première œuvre : Des Moutons et des hommes de Karim Sayad Prix Art, patrimoine et culture : Naissance-Mariage-Mort, Trois étapes de la vie de Asuman Atakul Firtina Prix Jeunes de la Méditerranée : Le grand Saphir, une révolte ordinaire de Jérémi Stadler Prix Court méditerranéen (Prix du public) : Dying for Europe de Nikos Pilos Mention spéciale : Marseille, ils ont tué mon fils d’Edouard Bergeon et Philippe Pujol Prix à la diffusion 2M (Maroc) : Ashbal, les lionceaux du califat de Thomas Dandois et François-Xavier Trégan France 3 Corse ViaStella et RAI 3 (Italie) : Strange fish de Giulia Bertoluzzi


Pupille : La prunelle de ses yeux

Film de la semaine

S

aluée pour l’élégant et facétieux Elle l’adore, Jeanne Herry revient avec Pupille sur un sujet peu commun : de la naissance de Théo - sous X - à son adoption, on assiste à la prise en charge du nouveau-né par différents membres de l’aide sociale. Pour dire cette histoire peu souvent évoquée, pour tordre le cou à certains lieux communs prêtés à la parentalité, la jeune réalisatrice fait montre d’une délicatesse admirable. Certains pourront peut-être voir dans ce portrait d’une mère biologique ni instable, ni indigne, mais faisant défaut malgré elle, ou encore dans cette représentation de services sociaux à peu près irréprochables un manque de réalisme. Mais cette propension du film à prendre à rebours les clichés de la maternité, tout en rendant le récit paradoxalement, par endroits, prévisible, n’exclut ni la pertinence du discours, ni l’émotion qui en découle. D’autant que le scénario et les dialogues, finement élaborés sur ce fil entre ironie, tragique et candeur qui est devenu la marque de fabrique de Jeanne Herry, sont servis par des comédiens particulièrement inspirés – et vraisemblablement très bien dirigés. Miou-Miou (la mère de la réalisatrice, NDLR) est une passeuse de flambeau désarmante. Sandrine Kiberlain, autre habituée de la réalisatrice, compose avec un Gilles Lellouche étonnant un couple de fortune qui peine à cloisonner le flot d’émotions intrinsèque à leur profession et leurs cadres familiaux respectifs ; entre infantilité et autorité, ils n’incarnent pas la parentalité mais bel et bien le statut précaire de la tutelle, avec les séquelles que l’on imagine sur leur intimité. Elodie Bouchez, enfin, est tout simplement bouleversante : les évolutions successives de son personnage, du couple à la séparation, de la séparation à l’adoption, se devinent au fil de ses présences et de ses absences à l’écran, jusque dans la force de ses silences mêmes. On saura gré à Jeanne Herry de lui avoir - enfin ! - confié un rôle à son ampleur.

Du 8 au 28 décembre

SUZANNE CANESSA

Pupille, de Jeanne Herry, est sorti le 5 décembre (1h47)

Animations dans le cœur de ville Lancement officiel : samedi 8 décembre

Pupille de Jeanne Herry © 2018 Trésor Films - Chi-Fou-Mi Productions - Studiocanal - France 3 Cinema - Artémis Productions

www.ville-martigues.fr Ville de Martigues - Officiel Martigues Cœur de Ville


34 philolitté

Jouir de A à Z

E

n ces temps de morosité et de crises à répétition, on aurait tort de s’en priver. Alors, bienvenue dans le nouvel abécédaire des Billets de La Bibliothèque, consacré à la lettre J. J comme Jacobi. J comme Jouir. Michéa Jacobi, notre « piéton de Marseille » invite ici le lecteur à une fort agréable promenade dans les contrées très variées de la jouissance, au fil de vingtsix vies consacrées à cet art, comme il l’indique en sous-titre à ce petit ouvrage qui se déguste comme une friandise. Après les marcheurs de Walking Class Heroes, les Xénophiles, les Renonçants, d’autres encore, Jacobi a pioché dans sa réserve

de biographies - 676 au total, dans une somme intitulée Humanitatis Elementi, 26 x 26 - et en a extrait ces vingt-six entrées, parfois très brèves (un court feuillet), parfois plus longues (quelques pages), toutes marquées au coin de la jouissance. Une jouissance qui est bien loin de se limiter aux plaisirs de la chair et des sens, même si ceux-ci ne sont évidemment pas oubliés. Car on peut jouir de tellement de choses : de l’art, de l’écriture, de l’amour de Dieu, du vin, de l’opium… Et de tellement de façons. Au fil de ces vingt-six lettres, et de ces vingt-six vies, on croise des gens célèbres, de Lucrèce à Louise Bourgeois, en passant par Colette ou

Ella Fitzgerald, mais aussi de parfaits inconnus tel ce Gaufridi Louis « martyr des Capucins » ou cet Urbicus, qualifié de « mari lubrique » (VIe siècle). On y traverse allégrement les époques, les pays, les religions, les styles. Et ce n’est pas la moindre des jouissances que procure ce petit livre. Outre la faconde, l’inventivité verbale et l’humour, que l’on apprécie toujours, on se régale de la façon dont Jacobi fait se côtoyer la call-girl (X comme Xaviera Hollander) et le philosophe (Y comme Yang Zhu), la « mystique courtoise » (H comme Hadewijch) et le « libidographe » (I comme Imamura Shôhei). Un mélange des genres, et des plaisirs, des plus réjouissants ! FRED ROBERT

Jouir, vingt-six vies consacrées à cet art Michéa Jacobi Éditions La Bibliothèque 14 €

L’opéra, un art du futur

D

eux publications scellaient les douze fructueuses années que Bernard Foccroulle a passées à la tête du Festival international d’Art Lyrique d’Aix-en-Provence : un recueil d’entretiens avec Bernard Foccroulle et un album, L’opéra, miroir du monde, rassemblant des photographies des productions de ces dernières années, commentées par Louis Geisler et Alain Perroux, assorties de commentaires d’artistes. La multiplicité des regards, qu’ils soient extérieurs, comme ceux des photographes, ou captés de l’intérieur avec des paroles d’artistes, de metteurs en scène, apporte un témoignage vivant, choisissant, parmi les 65 spectacles évoqués, 18 productions particulières car symboliques d’une démarche. Faire vivre l’opéra, sous-titré « Un art qui donne du sens au monde », est composé de quatre entretiens avec Bernard Foccroulle, menés tour à tour par Chantal Cazaux à propos de la force de la création, Sabine de Ville, l’opéra au cœur de la cité, Shirley Apthorp, l’urgence d’un dialogue interculturel, Anton Fleurov, l’opéra dans un monde globalisé. Le bientôt ex-directeur du Festival

aixois présentait le 5 juillet dernier cette somme de réflexions sur le devenir du monde de l’opéra, nourries par une expérience concrète : « Le moteur de l’opéra, c’est la création, affirme-t-il, et trop souvent l’on se contente de produire des interprétations du passé. L’opéra repose aussi sur les artistes, leur présence en résidence est indispensable, nécessaire pour revivifier les institutions, il faut les accompagner réellement. La question des publics se pose, l’œuvre sera d’autant plus riche que l’association du public à sa création sera importante. Il faut placer l’opéra au cœur de la cité, par le biais de formes participatives. D’autre part, l’opéra a

besoin de nouvelles narrations, il se doit d’évoquer, de répondre aux questions de notre époque, de réfléchir en terme de dialogue, fonder une nouvelle équité entre les cultures en notre période de globalisation ». « L’opéra, comme tous les arts, doit prendre vigoureusement sa part dans un réveil des consciences, plus nécessaire que jamais », conclut ce passionnant ouvrage en résonnance avec l’actualité. MARYVONNE COLOMBANI

L’opéra, miroir du monde, Actes Sud Beaux-Arts, Hors collection, 32 € Faire vivre l’opéra Bernard Foccroulle, Actes Sud, 20 €


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Sur la piste des origines

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e jour de la grande fête organisée pour les 6 ans de Jessie, son père se noie et sa mère, la belle Lorna, décide de « mettre les voiles », fuyant la Californie au volant de sa Cadillac rose. Destination le Grand Nord avec une carte très aléatoire, dessinée sur un papier, pour seul guide, et quelques babioles de première nécessité, dont une trousse de maquillage ! Quelques minutes ont suffi pour que l’épouse et la fille d’un richissime magnat du cinéma - mais aussi un peu escroc – passent d’une vie frivole et confortable à celle des grands espaces, d’un road movie coloré à l’immensité immaculée. Lorna a un physique de star, Jessie une chevelure rousse, aussi ne passent-elles pas inaperçues. Cela leur permet de s’embarquer sur un rafiot, de traverser l’Alaska et le Yukon, sans laisser de traces, changeant de nom à chaque nouvelle étape. Quinze ans plus tard, Jessie revient sur ces terres, son « royaume », et fait le récit de cette

épopée à Bud qui la retranscrira fidèlement. Elle évoque la fuite, la rencontre d’une indienne chamane et de son compagnon Herman, indien enlevé aux siens et élevé par des Blancs. À leurs côtés, Lorna et Jessie avaient découvert les pratiques de survie dans l’hiver, le salage des chairs, le tannage des peaux, le pouvoir des plantes… Une nuit Jessie avait surpris les confidences de Lorna à Kaska : elle a du sang indien et a été élevée en France. Les lecteurs de La source, précédent roman d’Anne-Marie Garat, se souviendront alors de la petite Anaïs ramenée chez sa grand-mère par un inconnu. À 34 ans, elle était enfin partie à la recherche de ses origines et d’un amour d’enfance. À la fois

roman d’aventures, récit initiatique, conte et histoire d’amour, le texte séduit par une langue riche, l’évocation précise des actions destructrices des blancs dans ces contrées où la civilisation indienne a été anéantie. Nourrie des lectures de London et de Melville, éblouie par son voyage dans ces régions sauvages, Anne-Marie Garat redonne toute leur noblesse aux indiens méprisés par les blancs et toute leurs forces aux rêves de l’enfance. CHRIS BOURGUE

Le Grand Nord-Ouest Anne-Marie Garat Actes Sud, 21,50 €

«Cacou » ; en provençal, celui qui se la pète, qui fait le fanfaron. En grec Kakou est le génitif de kakos, mauvais, laid. Donc Philo Kakou, la philosophie du mauvais !

Philo Kakou

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vec Aristote et Platon, toutes les questions de la phi- La question de l’origine perturbe toujours les interrogations losophie se posent. Rappelons la première : qu’est-ce métaphysiques, même de notre modernité. On peut concevoir qui fait qu’une chose est ce qu’elle est ? Il peut y avoir, que la vie est le fruit du hasard, c’est la leçon de Darwin. Mais le début ? D’où le fait que de nombreux scientifiques de par exemple, des conjonctions d’atomes hasardeuses renom croient en Dieu ! Précisons pour être honcomme le pensait avec une belle intuition Démocrite ; d’autres présocratiques mettront en avant nête que c’est surtout quand ils deviennent vieux, les quatre éléments. Mais Platon va balancer à allez savoir pourquoi… Bon, en tout cas on ne s’explique toujours pas la poubelle et se foutre de la gueule de ses préle pourquoi du bing bang, et les croyants ont décesseurs. Il y mettra de la spiritualité, on l’a beau jeu de suggérer qu’un Dieu a voulu tout assez dit : il y a un ciel des idées qui porte en ça. Why not, disait Descartes ; mais juste une lui l’essence des choses. Aristote reviendra à l’observation et s’interropichenette : ok, Dieu a mis en branle le monde, gera sur les causes. Et nous en étions là la sec’est un peu le premier moteur d’Aristote, mais ensuite on laisse faire la science ! maine dernière : la fameuse régression à l’infini. La © TnK1PrdZ raison d’être de cet arbre, c’est la graine qui l’a précédé, Mais le pire, c’est ce salaud d’Einstein qui dira : « ce et cette graine vient d’un autre arbre. Et c’est là une autre des qu’il y a de plus incompréhensible dans le monde, c’est qu’il soit grandes questions de la philosophie : où s’arrêter ? D’où l’idée compréhensible… » d’un premier moteur pour Aristote, qu’il se garde bien d’appeler Allez, je vous laisse réfléchir là dessus jusqu’à la semaine prochaine ! RÉGIS VLACHOS Dieu : ça ce sont ces farfelus de chrétiens qui s’en chargeront !


36 feuilleton littéraire

Deux peintres épisode 5 : Des idées folles résumé de l'épisode 4 Il y a plus d’un siècle à Cstwertsbourg, en Allemagne, Herr Koch, peintre sans succès et veuf depuis peu, vit avec sa fille Astrid une existence routinière qui va être bouleversée quand Windmüller, le marchand d’art, le confond avec la célébrité locale, le peintre Fischer. Ses tableaux, son physique, les ressemblances sont incroyables ! Koch dément, mais se laisse prendre au jeu quand la très belle et très pétillante Gretchen commet la même confusion. Grâce à elle, il va connaître l’adresse de son double… et s’apercevoir qu’il peut « devenir Fischer » sans aucune peine.

Ed ua rdo

Bert i©

ue loq ob Mon Dorothée Billard/

L’auteur Eduardo Berti, né en Argentine, habite en France depuis vingt ans. Membre de l’Oulipo, il a publié des nouvelles, des petites proses et des romans, dont L’Ombre du Boxeur et Le Pays imaginé. Après Une présence idéale (Flammarion, 2017), son premier roman écrit en français, il publie en 2019 Un padre extranjero (Un père étranger).

en co-production avec La Marelle

Gretchen était drôlement ardente ; un volcan, selon notre peintre, toujours à l’aise devant les paysages et les analogies avec la nature. Gretchen était drôlement bavarde ; en moins de trente minutes, tandis qu’ils buvaient du thé (il avait hésité entre le café que Fischer aurait prévisiblement choisi et le thé que lui, Koch, préférait), il avait appris qu’elle était veuve et qu’après avoir épousé un homme de quarante ans plus âgé qu’elle, un industriel très riche et cultivé, elle était devenue deux ans plus tard sa seule héritière. Malgré tout cela, Koch ignorait encore si Gretchen et Fischer étaient amants. À voir la distance qu’elle adoptait en sa présence, Koch croyait qu’elle et Fischer traversaient un moment crucial : leur premier rendez-vous en tête-à-tête, sans témoins, dans la maison de Gretchen. La femme était si belle que le hasard avait choisi un excellent moment pour qu’il prenne la place de l’autre, mais Herr Koch se demandait, simultanément, si Fischer aurait accepté l’invitation de Gretchen. Peut-être que lui, Koch, était en train de faire quelque chose que Fischer n’aurait jamais fait. Peutêtre que leur seule ou principale différence se trouvait là. Gretchen bavardait à toute vitesse. Une heure plus tard, Koch découvrait qu’elle devenait encore plus loquace après l’amour. Normalement il aurait déploré cette loquacité. Pourtant, vu les circonstances, cela devenait très utile : Gretchen était une machine à donner de précieuses informations sur Fischer. Elle posait des questions rhétoriques,

des questions qui contenaient leurs réponses. Ta femme continue à jouer du piano ? Tu vas partir comme d’habitude à la recherche de paysages ? Oui, oui, disait Herr Koch. Ou bien il se contentait de hocher la tête. Au bout de trois visites à Gretchen, Koch en savait davantage. Elle était la sœur du mari de la sœur de Hannah, qui était la femme de Fischer. Elle connaissait Fischer depuis peu. Ils ne s’étaient vus qu’une fois avant que Fischer et sa famille ne s’installent à Cstwertsbourg. Tombée tout de suite sous le charme de Fischer, elle ne supportait pas Hannah, femme ordinaire et indigne d’un artiste. Entre-temps, Koch avait fait une visite démoralisante à Windmüller, qui semblait s’être un peu remis de ses troubles oculaires et ne portait à nouveau qu’un seul bandeau. Quand Eva lui avait dit, hélas, qu’ils n’avaient pas vendu une seule de ses peintures, Koch n’avait pas été surpris. Il avait une théorie à ce sujet : pour le public, il arrivait deuxième. Les gens connaissaient déjà les tableaux de Fischer, alors les siens étaient perçus comme des Fischer bis ; il lui aurait suffi d’arriver le premier, Fischer serait maintenant un simple bis. Or, Koch craignait quelque chose de pire. Windmüller n’exhibait pas trop ses paysages parce qu’il redoutait la jalousie de Fischer et parce qu’un double de Fischer comportait un risque : une « vulgarisation » de l’original et, par conséquent, une possible baisse des prix. Devant son échec, Koch se réfugiait dans les dessins pour


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Leipzig, dans les petites joies d’Astrid et dans les bras de Gretchen. Il accueillait la passion de sa nouvelle amie comme une victoire ou une revanche sur Fischer, qu’il épiait sans relâche. Et depuis un moment, comme une déclaration d’autonomie face à Fischer et de souveraineté face à Gretchen, il se proposait de faire un grand portrait d’elle. Ce besoin de peindre, non un paysage imaginé ou composé à partir de ses « croquis », mais le visage magnifiquement réel de Gretchen, était vraiment exceptionnel. Une seule fois dans le passé il avait peint un visage : celui de sa chère Monika, dans leur jeunesse. À vrai dire, il avait essayé en vain et n’avait réussi à capter ni les traits ni l’aura de Monika. Toutefois, il n’avait pas senti que cette défaite marquait les limites de son amour pour elle ; loin de là, la défaite avait montré les limites de son art en tant que peintre. Depuis lors, il ne peignait des formes humaines ou vivantes que pour les magazines de Leipzig. Des portraits imaginaires, un peu vagues, pas trop réalistes, comme effacés par un brouillard. Koch avait vu dans l’incident du portrait inachevé de Monika une preuve de son « âme de paysagiste ». Ressentir pour une deuxième fois la même envie, disons, d’aller au-delà des limites de son âme, cela voulait dire quelque chose. Presque une vie était passée. Il savait qu’il avait toutes les chances d’échouer devant ce nouveau portrait. Vingt ans auparavant, Monika avait attesté sa défaite : il lui avait dit de prendre place sous une pâle lumière d’hiver ; elle avait posé pendant trois heures jusqu’à chuchoter « j’en peux plus ». Mais en vain. Le portrait résistait. Levant les bras, il avait reconnu : –Je n’y arrive pas… Tu es trop belle. Je n’arrive pas à cerner ta beauté. Il n’avait pas menti. Il avait senti cela et la phrase, un peu frivole, avait sauvé la situation, en réorientant l’axe du problème. Mais, au fond, c’était lui qui était en infériorité face à la tâche. Monika était belle à sa façon. Il l’avait aimée et il l’aimait encore ; mais s’il essayait d’être objectif, il devait avouer que sa beauté, touchante, attendrissante, ne résistait à la moindre comparaison face aux splendeurs de Gretchen. S’il n’avait pas réussi à capter les charmes de Monika, était-il sage d’oser un portrait de Gretchen ?

Peut-être que son talent avait grandi avec le temps. Peut-être qu’il avait fait une erreur en disant à Monika de poser. Oui, il devait essayer de faire un portrait de Gretchen sans Gretchen devant lui. Cette fois, Koch avait commencé son portrait par les yeux. Il aimait à la folie les yeux de Gretchen. Il les voyait tout le temps. Il fermait les yeux (ses yeux à lui) et voyait ses yeux (ses yeux à elle), tellement superbes. Cependant, il se sentait regardé, jugé par ces yeux et il avait vite ressenti la pulsion d’abandonner. Pour toujours ? Pour un moment ? Gretchen n’était pas au courant pour le portrait. Herr Koch la visitait une ou deux fois par semaine et se cachait, dès qu’il sortait de chez elle, derrière son écharpe touffue, car la maison de Fischer était sur le chemin du retour. Un jour, en sortant de chez elle, Koch avait vu presque par hasard Fischer et sa femme Hannah monter dans une voiture et donner au vieux valet de longues instructions. Cela voulait dire, certainement, qu’ils partaient en voyage. Alors, à ce moment-là, une idée insensée lui était montée à la tête : laisser passer quelques heures, se présenter le lendemain dans cette maison en se comportant comme Fischer, dire au valet qu’il avait oublié des affaires. C’était risqué, à coup sûr, mais il avait l’espoir de trouver chez Fischer quelque chose d’essentiel ou de précieux. Le jour suivant, avant de passer à l’action, Koch avait regardé chez lui, en secret et pendant presque une heure, les yeux de Gretchen apposés sur la toile. Après quoi il avait serré les poings et s’était rendu chez son adversaire. Le chemin lui avait paru plus long que jamais. Ce n’est que devant la maison qu’il s’était rendu compte d’un fait fort évident : il ne possédait pas de clé, il devait sonner comme s’il n’était pas chez lui. –Ah, bonjour, Herr Fischer, avait dit le valet en ouvrant la porte, tandis que Koch, pour dissimuler, tâtait les poches de son pantalon. Entrez, entrez ! Vous avez encore perdu vos clés ? Il avait fait l’effort d’acquiescer et il avait eu un brusque frisson au moment de franchir le seuil.

La suite du feuilleton dans le prochain numéro...


38 paysages

Martigues au soleil d’hiver Les communes de l’Étang de Berre s’illuminent pour les fêtes, au fil d’un parcours à épisodes. Après Istres la semaine dernière, Martigues accueille la 2e étape de ces Fabriques des lumières*

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Quartier de l'ile © K. Cecile

vec ses ruelles, ses multiples cœurs de ville, ses ponts et son fantasque Miroir aux oiseaux, la belle Martégale ne manque pas de charmes, qui se révèlent sous le soleil d’hiver. Dans le cadre de l’événement Fais des lumières le 8 décembre dès 15h30, une randonnée urbaine propose l’ascension de la colline Notre-Dame des Marins, pour y admirer le coucher de soleil et le lancement des illuminations. Simultanément en cœur de ville, une parade ralliera dès 16h30 la place Jean Jaurès à la place du 4 septembre en traversant les ponts, la rue de Lamartine puis la place de l’église, avant d’aller cueillir les randonneurs sur le retour, à 19h15 dans le quartier Paradis Saint-Roch. Le groupe cheminera ensuite de concert au Cratère, lieu d’un spectacle pyrotechnique proposé par la Maison Paradis-Saint-Roch, imaginé avec les habitants sous la direction artistique de Thierry Pierras (début à 19h30). En marge de ces manifestations, c’est aussi l’occasion d’arpenter le riche patrimoine culturel de la ville. Au rez-dechaussée de l’Hôtel de Ville, la Galerie de l’histoire de Martigues accueille une scénographie épurée sur plus de 500m² : photos, maquettes, bornes interactives y retracent l’histoire de la ville de la Préhistoire à nos jours. Une visite commentée est proposée tous les samedis à 16h (entrée libre, 04 42 44 36 48). Du côté de Ferrières toujours, le Musée Ziem accueille l’exposition Interactions d’Alejandro Guzzetti, jusqu’au 3 février. Adepte d’un land art ludique et poétique, l’artiste a ici imaginé des installations


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Miroir aux oiseaux © G Xuereb

d’intérieur et sculptures éphémères, réalisées à partir de la plante molinia caerulea. Une visite commentée aura lieu le dimanche 9 décembre, à 16h ; des ateliers sont prévus en famille les 12 et 19 décembre à 14h. Côté Jonquières, la Chapelle de l’Annonciade se visite boulevard Richaud. Classé monument historique depuis 1910, restauré en 2015, cet édifice du XVIIe siècle propose un époustouflant intérieur baroque. Visite commentée tous les samedis à 14h30 (durée 1h, entrée libre, 04 42 88 79 04). Le 27 décembre, les fastes de la chapelle se découvriront à la lueur d’une lampe torche lors d’une visite nocturne (à partir de 17h, durée 1h30). Enfin, si la météo le permet, les férus de nature pourront opter pour une balade dans le Grand Parc de Figuerolles-Paul Lombard, pour une flânerie hors du tumulte de la ville, au cœur des 130 hectares de pins, prairies et oliviers, jouxtant les rives de l’Étang de Berre. JULIE BORDENAVE

*Suivront Salon le 15 décembre, puis Miramas le 21 décembre.

Galerie de l'histoire de Martigues - © N. Gabriel

Infos pratiques pour la randonnée : Départ devant l’Office de Tourisme à 15h30 1,50 € par personne Durée : environ 3h30 Distance : 9 km Prévoir des chaussures de marche, une tenue chaude et confortable, de l’eau, une lampe de poche ou frontale.


mercredi 12 décembre à 20h dans le cadre des mercredis de µontévidéo * rencontre, débat

Quelle est la place de la culture dans les médias régionaux ? Traitée comme une rubrique secondaire dans les journaux, au cœur de certains médias spécialisés plus confidentiels, la culture n’a pas bonne réputation chez les directeurs de publication : elle ferait baisser les audiences et les ventes, sauf lorsqu’elle donne de brefs « conseils sortie » ou s’attache aux stars médiatiques. Entre information et communication, critique et analyse, les attentes du monde culturel sont elles aussi ambigües et contradictoires. Comment les concilier ? C’est autour de ces questions que µontévidéo et Zibeline vous invitent à réfléchir et à débattre. Avec Jacques Dupont Duquesne (France 3 Provence-Alpes-Côte d’Azur), Hervé Godard (France Bleu Provence), Sébastien Boistel (Le Ravi), Agnès Freschel (Zibeline), Florian Laurençon (Région Sud - Provence-Alpes-Côte d’Azur) et Fabienne Pavia (Bec en l’air / Des Livres comme des idées)... Le débat sera suivi d’un concert de Sam Karpienia. Voix et âme du mythique Dupain, aujourd’hui leader de De la Crau, Sam Karpienia nous dévoilera les ébauches de son projet solo. * µontévidéo centre d’art est ouvert tous les mercredis de 19h30 à minuit. Entrée libre, réservation conseillée auprès de µontévidéo centre d’art 3, impasse Montévidéo 13006 Marseille 04 91 37 97 35 I www.montevideo-marseille.com

µontévidéo


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