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MENSUEL CULTUREL & CITOYEN DU SUD-EST DU 21.05.2016 AU 18.06.2016

Exemplaire offert avec La Marseillaise le 21 mai 2016

JOURNALZIBELINE.FR

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société La démocratie aux champs politique culturelle L’État à Toulon, l’état d’Avignon évènements Arts de la rue, bucoliques ou marins


41

ZIBELINE EST EN VENTE DANS NOS LIBRAIRIES ET LIEUX PARTENAIRES À L’ENCRE BLEUE 86 boulevard Roger Chieusse - 13016 Marseille 04 91 51 46 96

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LIBRAIRIE L’ALINÉA Place de Provence - 13127 Vitrolles 04 42 46 38 74 LIBRAIRIE L’ALINÉA 12 rue Jean Roque - Quartier Ferrières 13500 Martigues 04 42 42 19 03 AUX VENTS DES MOTS 32 boulevard Carnot - 13120 Gardanne 04 42 52 65 47 LIBRAIRIE GOULARD 37 cours Mirabeau - 13100 Aix-en-Provence 04 42 27 66 47 LIBRAIRIE DE PROVENCE 31 cours Mirabeau - 13100 Aix-en-Provence 04 42 26 07 23 BOOK IN BAR 4 rue Cabassol - 13100 Aix-en-Provence 04 42 26 60 07 LIBRAIRIE LE BLASON 2 rue Jacques de la Roque 13100 Aix-en-Provence 04 42 63 12 07 LA BÉDÉRIE 9 rue des cordeliers - 13100 Aix-en-Provence 09 81 77 75 45 LA PORTÉE DES MOTS 34/36 rue des frères Kennedy 13300 Salon-de-Provence 04 90 55 93 20 LE GRENIER D’ABONDANCE 38 rue Auguste Moutin 13300 Salon-de-Provence 04 90 58 36 40 FORUM HM LIVRE 3-5 rue du Président Wilson - 13200 Arles 04 90 93 65 39

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MAI JUIN 2016

RETROUVEZ ZIBELINE SUR JOURNALZIBELINE.FR CULTURE ET SOCIÉTÉ Mensuel payant paraissant un samedi par mois Édité à 18 000 exemplaires, imprimés sur papier recyclé Édité par Zibeline BP 90007 13201 marseille Cedex 1 Dépôt légal : janvier 2008 Imprimé par Riccobono Imprim’vert - papier recyclé Crédit couverture : © Alouette sans tête Conception maquette Tiphaine Dubois

Où sont nos festivals ? Voilà que le temps des festivals commence, prélude des vacances, des beaux jours qui reviennent et font le charme incomparable de notre Sud. Hélas, on ne compte plus les manifestations qui ont fermé depuis 2014 et la baisse des dotations aux collectivités, que la plupart des villes et départements ont répercuté sur la culture. En 2014 la crise des intermittents a brouillé l’analyse. En 2015 l’alerte a été donnée, sans effet, et des festivals ont disparu. En 2016, le régime des intermittents

Directrice de publication & rédactrice en chef Agnès Freschel agnes.freschel@gmail.com 06 09 08 30 34 Rédactrice en chef adjointe Dominique Marçon journal.zibeline@gmail.com 06 23 00 65 42 Secrétaire de rédaction Delphine Michelangeli d.michelangeli@free.fr 06 65 79 81 10

semble sauvé, mais la raréfaction des propositions artistiques est indéniable : le nombre de spectacles, de concerts, de films produits, de festivals qui les projettent, a considérablement diminué en trois ans. Chacun tente de survivre avec les moyens du bord : crowdfunding, bénévolat, stagiaires, diminution des budgets de production, d’hébergement, de communication, coupes dans le nombre de jours de

ARTS VISUELS Claude Lorin claudelorin@wanadoo.fr

festivals, le nombre de représentations, le nombre d’artistes sur

LIVRES Fred Robert fred.robert.zibeline@gmail.com MUSIQUE ET DISQUES Jacques Freschel jacques.freschel@gmail.com CINÉMA Annie Gava annie.gava@laposte.net

06 82 84 88 94

les scènes... Les grands festivals, soutenus par l’État et dont la nécessité pour l’économie a été démontrée, surnagent, et voient

06 20 42 40 57

06 86 94 70 44

généralement leurs budgets confortés. Mais les

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petites associations font les frais des diminutions

Élise Padovani elise.padovani@orange.fr

et de leur absence de visibilité nationale. Ce sont

André Gilles a-gilles@wanadoo.fr

elles pourtant qui assuraient la douceur des étés de nos régions, à peu de frais. Et elles aussi qui créaient de l’emploi, saisonnier, intermittent, mais aussi structurel, dans chacune

Polyvolants Chris Bourgue chris.bourgue@wanadoo.fr

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Gaëlle Cloarec ga.cloarec@gmail.com Maryvonne Colombani mycolombani@gmail.com

ÉDITO

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de nos villes. A-t-on estimé le coût social de la disparition de la vie culturelle associative, qui amène aujourd’hui vers une véritable

06 62 10 15 75

crise, en un temps où la priorité de tous les politiques semble la lutte

Marie-Jo Dhô dho.ramon@wanadoo.fr

contre le chômage ?

Marie Godfrin-Guidicelli m-g-g@wanadoo.fr 06 64 97 51 56

L’appauvrissement global du secteur culturel a des conséquences sur la

Jan Cyril Salemi jcsalemi@gmail.com

l’artisanat, la restauration, l’hôtellerie, la presse, la communication,

Maquettiste Philippe Perotti philippe.zibeline@gmail.com

ainsi que tous leurs clients et fournisseurs. Sauver les grands festivals 06 19 62 03 61

WRZ-Web Radio Zibeline Marc Voiry marcvoiry@hotmail.com Directrice Commerciale Véronique Linais vlinais@yahoo.fr 06 63 70 64 18 La régie Jean-Michel Florant laregie@gmx.fr 06 22 17 07 56 Collaborateurs réguliers : Régis Vlachos, Dan Warzy, Frédéric Isoletta, Yves Bergé, Émilien Moreau, Christophe Floquet, Pierre-Alain Hoyet, Aude Fanlo, Thomas Dalicante, Marion Cordier, Franck Marteyn, Marie Michaud, Anna Zisman Administration Axelle Monge admin@journalzibeline.fr Houda Moutaouakil contact@journalzibeline.fr

qualité de vie de chacun, et sur l’emploi dans tous les secteurs voisins :

06 33 78 94 09 04 91 57 75 11

et les grandes maisons ne suffira pas à conserver l’attractivité du territoire, et les habitants de nos régions devront se passer du plaisir incomparable de voir, l’été, leurs places publiques se transformer en lieux de convivialité retrouvée. AGNÈS FRESCHEL


4 mai—26 juin 2016

Fort Saint-Jean

Mucem Beyrouth ya Beyrouth

Temps fort Beyrouth Installations et parcours, cinéma, rencontres et spectacles

Mucem.org

Mucem, Fort Saint-Jean, bâtiment Georges Henri Rivière, Marseille

Copyright photographique : © arabianEye/Corbis

Design graphique : Spassky Fischer, Paris


sommaire 96

SociÉtÉ

Entretien avec Joëlle Zask, la démocratie aux champs (P.6) Le FN et les homos, une affinité élective ? La représentation féminine à la Métropole (P.8-9)

Politique culturelle

Ombres et lumières au CIPM (P.10) Audrey Azoulay dans le Var (P.12-13) Quel avenir pour la culture à Avignon ? (P.14-15)

Hubert Falco, Maire de Toulon, Audrey Azoulay, ministre de la Culture, Charles Berling et Pascale Boeglin, directeurs du Liberté. En arrière plan Marc Giraud, Président du Conseil départemental du Var. Devant le Liberté © Agnès Freschel

Évènements

Le Liban et Picasso au MuCEM (P.16-18)

FESTIVALS

Arts de la rue, les premiers Festivals (P.20-21) Aix en juin, Uzès Danse, Alternatiba (P.22-23) La Comédie du livre et le Printemps des Comédiens à Montpellier (P.24-25) Les Eauditives à Barjols, Contes & Jardins à La Valette, l’été à Châteauvallon (P.26-27) Les rendez-vous du kiosque, Africa Fête, Sons dessus de Sault (P.28-29)

Bestias © Arthur Bramao

critiques

Spectacles, musiques, rencontres (P.30-39) Marseille, Martigues, Aix, Cucuron, Avignon, Toulon, Correns, Montpellier, Sète, Mont-Carlo

Madame S, Hétérocères © Gaëlle Cloarec

au programme Musiques (P.42-45) Spectacles (P.46-51)

Exposition Focale Syrienne-Guerre en contraste, Hosam Katan © Maryvonne Colombani

cinéma [P.52-57] Arts visuels [P.58-65]

Marseille, Aix, Arles, Châteauneuf-le-Rouge, Toulon, Draguignan, Montpellier, Nîmes, Sète

livres [P.66-68] rencontres La Caravane culturelle syrienne

histoire [P.70-71]

La Commune de Marseille


6

Société

Cultiver son jardin

©

La longue résistance des paysans à l’oppresseur, souvent réprimée dans le sang, se poursuit aujourd’hui. Que peuvent-ils face aux multinationales ? Les paysans luttent depuis longtemps contre le capitalisme industriel, défendant un droit d’accès à la terre, et leurs pratiques autonomes. L’agriculture familiale et l’agriculture urbaine représentent des centaines de millions de gens, selon un rapport de la FAO datant de 2015. Ces cultivateurs produisent 80% des ressources alimentaires planétaires, et sont protecteurs de ces ressources en termes de savoirfaire. On peut imaginer leur force s’ils se fédéraient ou simplement entraient en relation, ce qui est en train d’arriver, notamment via Internet. La mainmise sur les semences et l’accaparement des terres atteignent des proportions inouïes, mais la lutte passe aussi par la revalorisation de l’image du paysan, dont l’humiliation a désolidarisé un grand nombre de citoyens.

Est-ce que le fait d’être producteur et non plus seulement consommateur y participerait ? Plutôt que de producteur, on pourrait parler d’acteur, au sens le plus fort du terme : celui qui agit, qui est à l’initiative d’une activité, avec la possibilité de la suivre de A à Z. Le Z incluant la jouissance des produits du travail. Un très grand nombre de nos institutions nous destituent de cette possibilité d’agir, de commencer quelque chose de nouveau, pour

à lire

Joëlle Zask La démocratie aux champs La découverte, 18,50 €

PROPOS RECUEILLIS PAR GAËLLE CLOAREC

Cl oa

La démocratie représentative -ou devrait-on dire oligarchie, ploutocratie ?- est fortement remise en question ces temps-ci. Considérer la démocratie comme un jardin dont tous les éléments sont reliés, et non comme une machine rationnelle, peut-il enrichir le débat ? Oui, absolument. L’image du jardin relie l’écologie à la politique, ce dont elle a bien besoin. Via les jardins partagés, par exemple, dont la récurrence planétaire m’a étonnée au

reprendre une formule d’Hannah Arendt, et de la conclure. Il suffit de penser à la division des tâches qui frappe les agriculteurs industriels : ils n’ont pas le choix de leurs semences, des outils qu’ils utilisent... à peine celui de leur rythme de travail. Ils sont dépossédés, leur activité est confisquée.

Ga ëll e

Zibeline : Pourquoi une telle disqualification politique des paysans au fil des siècles ? Joëlle Zask : Le paysan, depuis très longtemps, n’est pas considéré comme un animal politique, pour reprendre l’expression d’Aristote. On lui dénie la capacité de s’organiser ou d’avoir une quelconque vision du bien commun. Au fil des siècles, il est perçu comme abruti par son travail, sans cervelle ni morale, égoïste et conservateur. Sur certaines enluminures médiévales, le paysan est laid, hirsute, rustre, un va-nu-pieds à peine humain. C’est très violent. Et cette disqualification frappe quand même 80 à 90% de la population. Au moment des grandes révolutions démocratiques, dans les années 1780 et au delà, intégrer les paysans dans la citoyenneté c’était y admettre énormément de monde. Mais le pouvoir ne se partage pas facilement : on a trouvé de bonnes raisons d’installer des représentations très limitées, une participation très encadrée... ce qui est vrai jusqu’à aujourd’hui. Or, les paysans exerçaient une forme d’autogouvernement fort intéressante : ils ont eu très tôt des assemblées locales, auxquelles les femmes participaient bien souvent. Leurs façons de « se gouverner soi-même sans un maître », pour reprendre Jefferson ou Tocqueville, étaient profondes, incarnées dans leurs habitudes et dans leurs vies. Je pense que le discrédit des paysans a inconsciemment visé à détruire ces formes démocratiques, qui existaient depuis le Néolithique, semble-t-il.

cours de mes recherches. Il s’agit en général d’un terrain commun, subdivisé en parcelles individuelles. Cette combinaison est propice à l’essor d’usages collectifs, en créant une communauté au sens le plus littéral du terme, favorable au développement de la responsabilité, de l’initiative, de l’observation. Une forme qui peine à s’imposer ailleurs, à l’école, à l’hôpital, dans la politique gouvernementale bien-sûr. Cela tient à la difficulté de penser que la masse des gens puisse être compétente. Si l’on arrivait à revoir la dichotomie entre l’individu et la communauté, on serait peut-être plus attentif aux solutions locales, et au caractère de paradigme qu’elles peuvent apporter.

c re

J

oëlle Zask enseigne la philosophie à l’université Aix-Marseille. Son travail est centré sur la démocratie sous toutes ses formes, mais récemment il a porté plus précisément sur les racines paysannes de l’autogouvernement. Entretien avec l’auteure de La démocratie aux champs.

Retrouvez l’intégralité de cet entretien sur notre Webradio


TINTAMARRES #5 AUTOUR DE CHRISTINE GROULT MARDI 24 MAI 18H15 (rencontre) 20H30 (concert)

CITÉ DE LA MUSIQUE, AUDITORIUM

VENDREDI 3 JUIN 20H30

CITÉ DE LA MUSIQUE, LA MAGALONE

LES MOTS EN JAZZ LUNDI 6 JUIN 19H00

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LE LIVRE DE LA JUNGLE

Licence n°2-102-7568 / n°1-103-5155

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34e Festival du Premier Film Francophone

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Tout le programme sur www.berceau-cinema.com et sur la page facebook Berceau du Cinéma.

La Ciotat

en partenariat avec la ville de La Ciotat


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Société

Le FN et les homos, une affinité élective ? DEPUIS 2012, UN CERTAIN NOMBRE D’ENQUÊTES ET D’ARTICLES S’ÉTONNENT DU SUCCÈS GRANDISSANT DU FRONT NATIONAL AUPRÈS DES HOMOSEXUELS. QU’EN EST-IL, ET COMMENT L’ANALYSER ?

L

e premier constat à tirer est relativiste : aucune étude statistique fine n’existe pour recenser le vote des homosexuels. Les plus sérieuses, celles de l’Ifop en 2012 (François Kraus) avant les élections présidentielles et en 2014 (Jérôme Fourquet) après l’adoption de la loi sur le mariage, se fondent sur des pourcentages forcément aléatoires : recensant ceux qui se disent homosexuels ou bisexuels (ces deux catégories étant différenciées), ils ne distinguent pas ceux qui vivent leur homosexualité publiquement et ceux qui énoncent une tendance secrète, passée, fugace. De plus ils ne font aucune opposition entre gays et lesbiennes, ni entre trans et homos. De fait ces sondages sont faits pour estimer les intentions

Gauche(s)

Modem

de vote, non pour comprendre finement les raisons électives des « non hétérosexuels », comme ils les désignent. Le deuxième constat est d’évidence : il semblerait, même si les chiffres sont à nuancer, que les LGBT votent plus à gauche que les hétéros, mais moins massivement que l’on pouvait le croire, et de façon moins constante : comme en 2007 ils ont voté pour le PS en 2012, attentifs aux promesses du mariage pour tous. Etant donné qu’ils représentent environ 3 millions d’électeurs, soit 1 votant sur 12, cela représente 1,5 million de voix au premier tour pour François Hollande. Qui n’a battu Nicolas Sarkozy que d’1,1 m de voix. Mais depuis l’outing de Florian Philippot et la discrétion de Marine le Pen dans le débat du mariage pour tous, et malgré les positions de sa nièce lors des manifs pour tous, il semblerait que la donne ait changé. Et que par ailleurs les gays et les lesbiennes ont adopté des comportements électoraux opposés (l’étude de Sylvain Brouard portant sur les régionales 2015 s’attache exclusivement au vote des couples).

Droite(s)

Front National

Vote au premier tour

LGBT

Hétéros

LGBT

Hétéros

LGBT

Hétéros

LGBT

Hétéros

Présidentielles 2007

44%

38%

17%

19%

24%

34%

13%

11%

Présidentielles 2012

49%

42%

9%

9%

22%

29%

18%

18%

Régionales 2015 (étude des couples)

G

L

32%

36%

Droites (avec Modem) 35%

G 27%

L 34%

H 35%

G

L

38%

26%

29%

Bleu, blanc et masculin PEU DE FEMMES ET PAS DE DIVERSITÉ DANS LES COMMISSIONS ET DÉLÉGATIONS DE LA MÉTROPOLE AIX MARSEILLE PROVENCE ET UNE CAMPAGNE D’AFFICHAGE ENJOIGNANT À AIMER LA FRANCE : POUR QUELLE REPRÉSENTATION POLITIQUE ?

A

MP est enfin en place, les présidences et les commissions attribuées. La représentation des territoires est harmonieuse, mais manque cruellement de femmes, et de diversité. Ainsi les délégations sont au nombre de 28, dont 6 attribuées à des femmes. Et les commissions au nombre de 12 sont présidées par 11

hommes et 1 femme, secondés par 21 hommes et 3 femmes. Soit en tout, si on compte le Président Jean Claude Gaudin, 51 élus, dont 10 femmes. Parmi eux, des maires des petites communes, des adjoints des plus grandes, tous prénommés Patrick, Gérard, Pascal, Georges, Roland, Martine, Arlette, Daniel, Christian, Dominique... Pas un seul de ces prénoms que

l’on entend tous les jours dans nos rues ou dans les cours de nos établissements scolaires. On peut juger logique, même si l’attribution des commissions fut houleux et que le PS local y laissa ses dernières plumes (voir Zib’94), que la majorité élue s’attribue les présidences : c’est le cas dans toutes les collectivités. Mais le mode de scrutin indirect de la Métropole accentue


9 Même s’il est difficile de comparer une étude sur les couples avec des études portant sur l’ensemble de la population, le vote des LGBT semble avoir notablement changé : l’écart entre gays et lesbiennes, qui ne recoupe pas l’écart général entre hommes et femmes hétérosexuels, demanderait qu’on s’attache plus finement à leurs raisons respectives, sans s’intéresser aux seuls couples.

Rose Marine

Comprendre les raisons du vote FN de certains homosexuels, et plus spécifiquement des hommes, est le but du livre écrit par Marie Pierre Bourgeois, sous titré Enquête sur le FN et l’homosexualité (voir encadré). Il met au jour la stratégie électorale du FN : rallier au Sud catholiques traditionalistes anti mariage avec Marion, et gagner au Nord, et à Paris où ils vivent en grande partie, le vote essentiel des homosexuels grâce aux lieutenants de Marine. Une stratégie qui veut rallier des électeurs très différents, mais le FN sait que le vote repose souvent sur la fabrication d’un ennemi commun... Et le bouc émissaire est trouvé depuis longtemps par le FN, qui autrefois disait l’Arabe, et maintenant emploie la métonymie de l’Islam. Certes Marine Le Pen est entourée de gays, mais il serait simplificateur de ne voir là qu’un goût étrange : les gays qui rallient le FN ont cédé à la peur de l’Arabe, forcément homophobe, comme certaines féministes qui répugnent épidermiquement au port du voile, comme

un déficit de représentation dommageable, si l’on veut que les citoyens renouent avec l’envie de voter pour être, justement, représentés.

La France, aimez-la ou... ?

D’autant qu’il coïncide avec une campagne de communication étrange des députés Républicains. Les affiches « Aimons la France » qui ont orné les rues de nos circonscriptions, anticipant la campagne législative, ne posent apparemment pas de problèmes légaux : il s’agit de campagnes d’affichages privées, financées par les députés ou candidats aux législatives. Un geste pour annoncer les candidatures, mais

certains juifs, oublieux des amitiés nazies du grand-père, se rallient au FN par peur de l’« antisémitisme musulman ». Le livre de Marie Pierre Bourgeois fait le tour des motivations du vote FN des homosexuels, mais ne donne pas de clefs pour sortir du fantasme : comment ignorer qu’il existe des musulmans homosexuels, des musulmanes féministes, des arabes athées, des noirs

à noter L’auteure et son éditeur Les Editions du moment font l’objet d’une attaque en justice du Conseiller régional PACA Philippe Vardon, ex dirigeant des Jeunesses Identitaires et de Nissa rebella (mouvement qui distribuait de la soupe au lard aux SDF), et a été condamné autrefois pour « reconstitution de ligue dissoute et incitation à la haine raciale ». Son adhésion au Rassemblement Bleu Marine a été finalement admise par Marine Le Pen lorsque sa nièce l’a placé en 5e position sur la liste des Alpes-Maritimes aux Régionales : la candidate a expliqué qu’il avait « beaucoup changé. ». Dans son livre L’Imam Estrosi, demain à Nice, 20 mosquées ?, Philippe Vardon reproche au maire de Nice de vouloir islamiser sa ville, et appelle l’UMPS Une Mosquée Par Seconde. Pourquoi assigner Marie-Pierre Bourgeois en justice ? À la page 177 de Rose Marine, il est écrit que Philippe Vardon apparaît dans le documentaire Rassemblement Bleu Marine, le chant nazi du petit nouveau d’Aziz Zemouri « faisant le salut nazi en entonnant un hymne antisémite ». Notre désormais Conseiller régional réfute d’avoir fait le salut nazi (et effectivement seuls ses camarades autour de lui lèvent le bras). Il demande le retrait du livre, sans nier le chant antisémite.

aussi se réapproprier l’amour de la France que le Front national veut confisquer. Cette campagne injonctive oublie pourtant les nuances aujourd’hui nécessaires pour reconstruire une unité nationale : l’amour de la France ne va pas forcément de soi. Faut-il aimer la France qui a déporté les Juifs ? La France qui a été un des derniers pays à abolir l’esclavage ? La France qui a refusé le statut de citoyen aux indigènes qu’elle colonisait ? La France qui a été un des derniers pays à accorder le droit de vote aux femmes, et où les inégalités de salaires et de représentation politique restent parmi les plus fortes des pays européens ? La France qui aujourd’hui sous

catholiques, des juifs arabes, des chrétiens d’orient ? Marie-Pierre Bourgeois rappelle les liens des homosexuels avec le parti nazi jusqu’à la Nuit des longs couteaux, mais elle n’a pas les moyens de déboulonner les fantasmes racistes qui minent la société française d’aujourd’hui : les homosexuels FN qu’elle a interrogés rapportent qu’ils ont vécu, ou plutôt que certains qu’ils connaissent ont vécu, des agressions homophobes perpétrées par des « musulmans ». Il s’agirait de quantifier ce fait, et de se demander d’où provient l’homophobie supposée des racisés de France... Il est loin, du moins pour les gays, le temps de la convergence des luttes homosexuelles, féministes, queer et antiracistes contre le patriarcat blanc et hétéro. À moins que, pour paraphraser Aragon, la lesbienne ne soit l’avenir de l’homo ? AGNÈS FRESCHEL

Rose Marine Marie Pierre Bourgeois Enquête sur le FN et l’homosexualité Editions du Moment 18,50€

emploie ses jeunes et ses séniors ? L’amour de la patrie ne se commande pas, surtout lorsque nos parents, nos ancêtres, nos enfants, ont souffert et souffrent de ce qui fit aussi la France : l’Esclavage, la Colonisation, la Collaboration. Tout autant que les droits de l’homme, la laïcité, le désir d’égalité, la Résistance, la passion politique. Tout cela fait notre histoire contradictoire, et explique les tensions que vit la société française, qui tarde à s’admettre composite et bigarrée. Plutôt que d’enjoindre à l’aimer, peut-être faudrait-il parvenir à la regarder toute entière, et à construire une représentation qui reflète mieux sa réalité. A.F.


10 Politique Culturelle

Ombres et lumières au CIPM

QUE SE PASSE-T-IL SOUS LES VOÛTES MAJESTUEUSES DES SALLES DE LA VIEILLE CHARITÉ QUI ABRITENT LE CENTRE INTERNATIONAL DE POÉSIE MARSEILLE ?

P

ourquoi cet énigmatique et douloureux courrier reçu par l’Usager (c’est ainsi que se nomme l’adhérent à l’association composée du public et de poètes, nettement distincte de l’association plus fermée qui gère la structure) portant la signature d’Emmanuel Ponsart, son directeur, qui sans plus d’explication fait mention de l’attaque à la veille du 1er avril d’un « groupe aigre » qui serait sournoisement caché derrière un unique signataire affligé du syndrome de Monte-Cristo (sic)… Julien Blaine / Christian Poitevin, lui-même poète et fondateur du Centre en 1990, sis au Couvent du Refuge, alors qu’il était adjoint à la culture du maire de Marseille ? La première surprise passée -légèrement amusée il faut le dire-, l’envie de comprendre s’est imposée avec la diffusion sur FB de deux injonctions tout aussi fédératrices et non contradictoires, « Sauvons le CIPM » et « Soutenons le CIPM » émanant des deux parties pourtant positionnées en adversaires.

Soutenons le CIPM

Une structure exceptionnelle que les marseillais ont la chance et le bonheur d’avoir dans leur ville… Personne en effet ne semble remettre en question l’existence d’un tel outil unique en Europe dédié à la fois à la création via résidences d’auteurs et ateliers de traduction, et à la diffusion de la poésie contemporaine, proposant lectures publiques, expositions, conférences, publiant chaque semestre les Cahiers Critiques de Poésie (actualité éditoriale) et toutes les cinq semaines les Cahiers du Refuge plus axés sur les activités du centre ; la conservation -transmission est assurée par une bibliothèque d’environ 40 000 documents y compris visuels et sonores. Un budget de 600 000 € (l’association est subventionnée par la Ville, la Direction Régionale des Affaires Culturelles, le Département, la

Région), malgré une forte diminution de la subvention de la Ville de Marseille, devrait permettre un fonctionnement relativement confortable dans sa mission de service public et assurer aux actions initiées un rayonnement au-delà du local. Alors d’où vient la menace ? Quelle est la nature de l’agression et en tout cas de la « déstabilisation » dont fait mention en creux et en filigrane la page d’accueil du site : « Nous avons dépassé les 1000 signatures ; notre liste de soutien est dorénavant fermée ; vous pouvez la consulter sur ce lien. »

Gouvernance figée, dérive autoritaire et opacité de gestion sont tour à tour dénoncées et explicitées comme véritable péril en la demeure. Sauvons le CIPM ?

Le centre se met-il en danger par un fonctionnement interne marqué par l’inertie et le repli sur soi ? C’est en tout cas ce qu’affirme et développe avec un argumentaire serré la Lettre Ouverte au Public et aux Institutions qui a de toute évidence un objectif plus élevé que l’attaque personnelle et a recueilli des signatures solides -Liliane Giraudon, Jean-Marie Gleize, Bernard Noël, Charles Pennequin, Jean-Jacques Viton, Edith Azam ou Christian Prigent, au milieu desquelles bien sûr celle de Julien Blaine et de beaucoup d’autres. Celle-ci appelle à

l’élaboration ambitieuse d’un nouveau projet, davantage et véritablement en lien avec le territoire d’implantation du Centre, en dialogue avec le public, la presse et les partenaires locaux (la poésie contemporaine vit aussi dans d’autres structures comme Montevideo), à la mise en place donc d’une communication plus ouverte et par là-même d’une programmation cohérente pensée aussi en termes d’interaction poètes / lecteurs / auditeurs. Le renouvellement, l’évolution des objectifs et des moyens suppose aussi une mise en question de la direction -et c’est manifestement là que le bât blesse- occupée depuis 26 ans par le même homme, Emmanuel Ponsart, salarié de l’association dont le président du Bureau, Jean Daive, est aussi en place depuis 15 ans… Gouvernance figée, dérive autoritaire et opacité de gestion sont tour à tour dénoncées et explicitées comme véritable péril en la demeure. Le conseil d’administration est lui-même l’assemblée générale en vertu de l’article 7 des statuts, procédé courant dans les associations culturelles, mais qui amène parfois à des replis dommageables dans des structures financées par la puissance publique, mais décidant seules. Il est donc assez clair, quoi qu’il en soit, que cette institution que tout le monde s’accorde à vouloir protéger, doit retrouver rapidement transparence et sérénité, conditions sine qua non d’une dynamique locale, nationale et internationale au service de la poésie, bien commun qui ne doit pas être le bouc sacrifié sur l’autel de la discorde. MARIE JO DHO


SAISON 15/16

DANSE

HIP-HOP

MAI 2016

©

Renaud Vezin

PRÉLUDE AU FESTIVAL D’AIX

27 / 05 / 16

PRINTEMPS DE LA DANSE

DU 4 AU 29 JUIN 2016

2016

t arif s EC B : 8 / 5 / 3 / 1 ,5 € dans le cadre du Print e m ps de la Dans e

duré e ± 1h / t out p u blic

VENDREDI 27 MAI 2016 > 20h30

N O S L I M I T ES C ie Alexandra N’Possee

CONCERTS SPECTACLES PARADE[S]

“Une danse de résistance de l’amour contre toutes les violences. Des corps qui s’écorchent au pilori d’une humanité malmenée, maltraitée, méprisée. Au détour de l’écartèlement, de l’affrontement des peurs réciproques, refleurissent les instants d’une infinie tendresse. La chorégraphie de Martine Jaussen et Abdennour Belalit met au service du sens de nos limites les capacités extraordinaires des danseurs de la compagnie Alexandra N’Possee. Il ne s’agit à aucun moment d’une exhibition triviale de performances. Les exploits physiques époustouflants s’ordonnent comme des notes sur cette grille, qui fait portée gestuelle à la symphonie des corps.”

15€ POUR TOUT VOIR ! Gratuit - de 30 ans

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SAISON 15/16

e n par t e nar i at av e c l ' As s oc i at i on de P r omot i on de l ' E s pac e C ul t ur e l B us s e r i ne


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Une ministre au cœur AUDREY AZOULAY, MINISTRE DE LA CULTURE POUR UN AN, VISITE LES RÉGIONS, RÈGLE LE PROBLÈME DES INTERMITTENTS, S’ATTACHE À DÉFENDRE UNE CULTURE POUR TOUS. MAIS LE CHANTIER POUR RECONSTRUIRE UNE POLITIQUE CULTURELLE PROGRESSISTE EST VASTE...

E

n déplacement à Toulon le 21 avril, la Ministre est venue officialiser la Scène nationale à deux têtes Liberté-Châteauvallon, inaugurer l’exposition Mode et Photographie de la Villa Noailles, rencontrer les acteurs culturels du Var. Une journée marathon, où elle a pris le temps de répondre à quelques questions, et d’affirmer ses priorités. Elles sont volontaristes : il s’agit « d’engager l’État », de « défendre la culture sur toutes ses formes, dans tous les territoires et envers tous, et en particulier envers les enfants ». Elle rappelle aussi, avec force, que le Gouvernement est « aux côtés des intermittents, conscient de la nécessité du maintien de ce régime ». Depuis le 21 avril, l’État a débloqué les 90 millions réclamés par l’UNEDIC et le MEDEF pour ne pas supprimer le statut... Mais ce jour-là, souligner le rôle de l’État passe par une affirmation de l’importance du label de Scène nationale, attribué en décembre au bipôle Châteauvallon Liberté (voir journalzibeline.fr). Une première, qui prend en compte les besoins, l’histoire et les spécificités de Toulon : on sait que Châteauvallon a été particulièrement bien doté par l’État, avec aujourd’hui plus d’1million d’euros, obtenus en partie par soutien contre la municipalité Front national des années 90. Il s’agit aujourd’hui de conforter son statut, après 50 ans d’existence d’un lieu toujours magique, havre de beauté durant l’été, à la programmation contemporaine et du monde exigeante, affichant des taux de fréquentation importants, et accueillant en ses murs les projets artistiques associatifs du territoire varois. Ainsi, lors du passage d’Audrey Azoulay, l’Atelier du

Hubert Falco, Maire de Toulon, Audrey Azoulay, ministre de la Culture, Charles Berling et Pascale Boeglin, directeurs du Liberté. En arrière plan Marc Giraud, Président du Conseil départemental du Var. Devant le Liberté © Agnès Freschel

lycée professionnel Cisson de Toulon répétait un spectacle de hip hop, qu’elle a regardé avec un intérêt visible. Le Liberté a une histoire bien plus récente : Charles Berling expliquait qu’ils avaient volontairement enlevé le mot Théâtre de l’appellation d’un équipement ouvert aux arts plastiques, numériques, vidéo, et aux rencontres thématiques. Un équipement qui lui aussi

il n’est pas question de déshabiller Châteauvallon pour habiller le Liberté affiche une bonne santé et s’est imposé dans le paysage comme indispensable, avec une fréquentation très forte, et un attachement immédiat des Toulonnais à « leur » théâtre, qu’ils attendaient depuis tant d’années. Pour autant la reconnaissance de l’État n’a pas été immédiate, et le label double a tardé à venir : si l’agglomération toulonnaise injecte plus de 2 millions dans son Liberté (à peine 570 000 euros pour Châteauvallon) , l’État est en dessous du

seuil minimal (220 000 euros) : pour devenir Scène nationale, il faut que ce seuil soit atteint ; il était envisagé pour cette scène bicéphale de considérer ce seuil minimal comme atteint par les deux équipements ensemble, or il n’est pas question de fusionner avec Châteauvallon... Aujourd’hui la réponse de l’État est claire : chacune des deux structures atteindra, à terme, le seuil des 500 000 euros annuels. Il s’agit donc d’augmenter de façon conséquente la dotation du Liberté, (plus du double d’ici 2017) et de conserver deux structures indépendantes. La Scène nationale a non seulement deux têtes, mais deux corps, et pas grand chose qui les unit : pas de contrat d’objectif commun, peu de circulation des publics. Quelques opérations croisées, mais pas de programmation partagée : chacun garde ainsi l’identité qui fait son succès.

La promesse de crédits supplémentaires Une bonne nouvelle pour Toulon ? Certes, et la Ministre balaie les inquiétudes. Elle le garantit : il n’est pas question de déshabiller Châteauvallon pour habiller le Liberté, pas question non plus de baisser les dotations des autres équipements nationaux du Var,


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du Var ou de la Région. La Direction Régionale des Affaires Culturelles recevra des fonds spéciaux pour couvrir cette dépense supplémentaire : l’inquiétude que l’on avait pour les autres Scènes nationales de la région, ou pour la scène conventionnée de Draguignan, ne semble pas de mise, même si la labellisation, double, de Toulon, renvoie sans doute celle du Théâtre de Grasse et du Théâtre Durance à un futur très lointain. Car la Région Paca compte désormais deux Centres dramatiques nationaux (Marseille et Nice), 5 Scènes nationales dont une qui en coûte deux (le Liberté-Châteauvallon, qui vient s’ajouter aux Salins de Martigues, à La Passerelle de Gap, La Garance de Cavaillon, le Merlan de Marseille), des Festivals nationaux très nombreux sur le territoire, un patrimoine exceptionnel et coûteux à entretenir : la DRAC PACA aura du mal, sans une réelle redistribution des budgets d’État, à conserver des marges de manœuvre pour des équipements, des compagnies, des orientations nouvelles...

Les budgets de l’État en régions Car qu’en est-il de la répartition territoriale des budgets de l’État ? Après plusieurs années de baisse consécutive, le budget du ministère de la Culture et de la Communication affiche enfin une hausse en 2016, ainsi qu’une volonté de mieux répartir des dépenses culturelles particulièrement inégales entre la Capitale, l’Île de France et les autres régions. La Ministre affirme qu’aucun autre État ne consacre un budget aussi important à la Culture. Ce qui n’est pas faux, à strictement parler, même si les dépenses culturelles d’État ont fortement diminué : jusqu’au début des années 2000 les ministères de l’Éducation, de la Jeunesse et des Sports, de la Défense, des Affaires Étrangères... dépensaient plus ensemble, pour la Culture, que le MCC tout seul. Aujourd’hui ces dépenses se réduisent à quantité négligeable, sans report de ces financements vers le MCC. Par ailleurs cette affirmation d’un fort engagement de l’État cache la réalité d’un pays qui donne peu d’autonomie à ses collectivités territoriales, et lui impose actuellement une forte diminution de ses dotations. En Allemagne, ce sont les régions et les villes,

autonomes économiquement, qui construisent les politiques culturelles et les financent. Et de fait la vie culturelle allemande est beaucoup mieux financée que celle des « provinces » françaises, qui collectent beaucoup moins d’impôts depuis la fin de la taxe professionnelle, se voient imposer des réformes territoriales et des baisses des moyens attribués directement par l’État. La légère hausse du budget de la culture

L’État Français, qui labellise, nomme, déplace, mais ne paye que peu, veut reprendre la main dans des territoires que sa politique a délaissés est loin de compenser ce que les collectivités territoriales se voient souvent obligées de supprimer. Car le Ministère a beau affirmer que la culture doit être une priorité, il est difficile de l’imposer dans les faits : à l’Europe, qui reste sourde, aux villes, qui ne peuvent supprimer leurs autres engagements, dans les crèches, les écoles, les transports, le stades, les piscines, pour maintenir leurs subventions culturelles. Et parmi leurs équipements, doivent-elles choisir entre leurs théâtres, leurs musées, leurs opéras, leurs bibliothèques, leurs festivals ?

Et les compagnies indépendantes ? Aujourd’hui, localement, les acteurs culturels doivent défendre leur existence pied à pied, heureux lorsqu’on maintient simplement des budgets qui n’ont cessé de baisser, et en prise aux larges coupes de la plupart des Conseils départementaux et des Villes. Ici les Régions PACA et Languedoc Roussillon Midi Pyrénées ont maintenu leurs budgets 2016, l’État également, mais cela est loin de compenser les coupes de 20 % que l’on observe dans la plupart des territoires... La création par l’État de Compagnies nationales, qui seront deux ou trois par Région

tout domaine confondus (70 en tout), va venir encore compliquer la donne. Pour faire partie de ces quelques élus, il va falloir avoir un « rayonnement national et international ». Comment y parvenir, lorsque les conventionnements des DRAC diminuent, s’abaissant parfois aujourd’hui à 30 000 euros par an ? Comment créer un peu sérieusement, et diffuser, et rayonner internationalement, quand les théâtres, opéras, centres chorégraphiques produisent de moins en moins de compagnies indépendantes, se concentrant souvent sur leurs propres productions, ou celles de ceux qui les programment en retour ? Comment demander à des compagnies indépendantes régionales une qualité de création alors que les collectivités les aident de moins en moins, que l’État depuis des années a bloqué leurs conventionnements, que les Festivals les programment peu, que les théâtres les produisent de moins en moins, que les mécènes ne financent que les grosses maisons ou les actions culturelles à vocation sociale ? Tous les artistes le savent : il faut désormais, pour avoir des moyens, postuler pour diriger un lieu. L’État Français, qui labellise, nomme, déplace, mais ne paye que peu, veut reprendre la main dans des territoires que sa politique a délaissés, en créant des compagnies nationales, et en labellisant l’existant, comme à Toulon. Mais ce que le MCC donne aujourd’hui est très loin de compenser ce que la réforme territoriale et la baisse des dotations d’Etat a d’ores et déjà coûté directement à la vie culturelle... AGNÈS FRESCHEL


14 politique culturelle

Avignon, mai 2016 © Delphine Michelangeli

Quel avenir pour la culture à Avignon ? À L’HEURE DES BAISSES DE DOTATIONS DE L’ÉTAT, UN DÉSENGAGEMENT CULTUREL SE PROFILE DANS LA CITÉ DES PAPES… POURTANT FONDAMENTALEMENT CULTURELLE ! POUR QUEL DÉNOUEMENT FINAL ?

Ç

a ressemble à une pièce de théâtre, avec acteurs émérites et procédés spectaculaires. Sauf qu’il ne s’agit pas d’une farce : depuis une première baisse en 2015 des subventions de la Ville aux associations culturelles (de 8 à 15 %), par mesure d’économie, l’inquiétude et l’abattement gagnent Avignon. Cette année encore, la Maire Cécile Helle qui demande à tous « un effort de solidarité », a réduit pour certains ses aides, lançant parallèlement un nouvel appel à projets pour les associations culturelles émergentes non conventionnées (à hauteur de 5 000 € maximum chacune, pour une enveloppe globale de 80 000 €), afin de « remplacer le système de subvention de fonctionnement en cours ». Sans adjointe à la culture (ndlr. Catherine Bugeon a démissionné fin 2015 et ne sera vraisemblablement pas remplacée), chacun s’interroge sur la politique culturelle menée par la Ville1. Trois structures de référence, plus vraiment émergentes, s’inquiètent et alertent.

École d’art : Une désorganisation organisée À l’École supérieure d’art, les 122 étudiants et 14 enseignants se mobilisent depuis début avril pour alerter sur la précarité, si ce n’est la


15 mort annoncée, de leur EPCC2, favorisée par la gestion jugée « incompétente et autoritaire » de la nouvelle direction. Nommée depuis 2 ans, Dominique Boulard aurait pris, selon l’équipe et les élèves, des décisions « indignes » ayant fragilisé l’établissement ; la validation du conseil d’administration d’ajourner le concours d’entrée en 1ère année face à la réduction budgétaire (160 000 € sur 2 ans) a mis le feu aux poudres : « Si on arrête de recruter de nouveaux étudiants, comment continuer ? ». Constitué pour pallier l’absence de la directrice en arrêt maladie depuis plus d’un mois, un comité de pilotage réclame sa démission (« dossier à charge » à l’appui), une mise à plat du budget, la réouverture du concours en L1 et une réaffectation de la subvention. Mais la récente réponse de la vice-présidente du CA demandant de réintégrer la direction, sans répondre à aucune des revendications, sous peine de ne pouvoir valider diplômes et salaires (un « chantage honteux » selon le personnel), vient assombrir l’horizon. Car, pour tous, la « logique de fermeture » serait en place depuis le recrutement de Dominique Boulard. « Aujourd’hui certaines matières ne sont plus enseignées par manque d’intervenants. Je ne peux pas laisser croire à mes étudiants qu’il y a ici une formation digne de ce nom. Notre spécificité de double cursus (ndlr, conservation/ restauration) n’a plus de sens ! » s’indigne Marc Maire, enseignant depuis 21 ans, qui a vu pour la première fois trois élèves partir en cours de cursus ! La fermeture de l’École semble inéluctable, accélérée par cette baisse de financement et d’inscriptions -sans parler d’un projet d’établissement en berne, de vacances scolaires hors zone, d’un emploi du temps « délirant » et d’un cursus « amputé de sa substance » avec certains étudiants doctorants qui remplacent bénévolement les intervenants. Un cercle vicieux que le Ministère de la Culture est en train d’analyser suite à une inspection diligentée le 29 mars. Ce qu’a confirmé Cécile Helle dans un communiqué du 22 avril, réaffirmant un soutien financier (1 548 912 €, soit 85% du budget global) « qui marque le choix délibéré de la Ville de continuer à accompagner pleinement l’Ecole d’art d’Avignon alors que le contexte budgétaire dû aux baisses de l’Etat contraint les collectivités à repenser leurs politiques d’aides publiques, conduisant même, comme c’est actuellement le cas à Perpignan, à la fermeture pure et simple des établissements… », soufflant qu’elle était « toujours en attente de la présentation par la Direction d’un projet d’établissement ». Déception et inquiétude minent les étudiants qui ont intégré cette école avec le projet de travailler sur les collections des musées de

France : ils se retrouvent dans un établissement au bord du gouffre. Rappelons qu’après la suspension polémique du directeur JeanMarc Ferrari il y a 4 ans, l’École s’était vue reléguée en périphérie de la ville, dans un établissement non approprié et, comble du cynisme, à côté du crématorium, après que la collection Lambert a récupéré ses locaux pour une extension (au demeurant très réussie). Les rêves d’une construction mitoyenne à la FabricA sont bien loin…

Estrosi « au secours » du Festival In À La FabricA, la Région invitait la presse le 27 avril à une « réunion d’urgence » entre Christian Estrosi, président de la Région PACA et Olivier Py, directeur du Festival d’Avignon dont le budget prévisionnel (13 M d’€) a vu multipliés « ses coûts de sécurisation liés au prolongement de l’état d’urgence ». Christian Estrosi a réaffirmé que « la culture était une priorité régionale » et annoncé une subvention à la hausse de 50 000 € (soit 630 000 € de la Région), sans réitérer la déclaration maladroite de « se substituer à la Mairie », que Cécile Helle avait fortement dénoncée dans un communiqué, rappelant que c’était le Grand Avignon (LR) qui baissait de 49 000 € sa subvention au Festival : la Ville maintient son aide de 931 000 €, plus 75 000 € d’investissement et des mises à disposition de 788 000 €. Le président du Conseil Régional a ainsi finement évité d’alimenter la polémique affirmant même, un peu vite, avoir invité la Maire à la réunion… ce que Cécile Helle a démenti en conseil municipal, dès le lendemain. Un vrai vaudeville ! Refusant qu’on lui « tresse une couronne de lauriers » pour cette aide supplémentaire, Christian Estrosi a avoué avoir été « un peu tiré par la manche » le président du Grand Avignon Jean-Marc Roubaud, pour une petite rallonge de 30 000 €. Fort de ses 80 000 €, Olivier Py un peu sonné par cette dramaturgie forcée, a précisé que c’était « toujours mieux », mais que le Festival restait « sous-subventionné si on imagine qu’il doit être un moteur actif de cette Région et mener de l’action sociale sur le plan local ». Tous savent qu’un Festival d’Avignon réussi (In et Off confondus) a des retentissements importants sur la saison touristique et économique.

Scènes d’Avignon : le Chêne Noir voit rouge Face à la 2e baisse de subventions municipales auprès de 3 des 5 Scènes permanentes, Gérard Gélas, directeur du Chêne Noir,

théâtre le plus impacté, convoquait à son tour la presse le 28 avril, outré par « l’inégalité des diminutions » non appliquées aux Théâtres des Halles et des Carmes « par souci de solidarité et de justice ». Ce que Cécile Helle a confirmé par communiqué dès le lendemain, assumant ses choix, qui redéploient des moyens reconduits envers les mêmes depuis des dizaines d’années, et rectifiant les chiffres : le Chêne reçoit 204 750 € de la Ville pour 2016, sur un budget global de 548 000 €. Gérard Gélas a rétorqué, à son tour, par communiqué. A n’en plus finir... Avec le franc parler qu’on lui connaît, le metteur en scène, « en total désaccord avec la politique culturelle de la Ville » et dénonçant « un pouvoir municipal replié sur lui-même », entendait « exprimer le malaise général du tissu culturel avignonnais ». « En 2 ans, nous avons subi 23% de baisses cumulées, soit 97 000€. C’est colossal ! Ce n’est pas de l’argent qui va dans ma poche ni dans mes créations ! 7 salariés travaillent ici », auquel on peut ajouter des intermittents, plus de 300 levers de rideaux par an, l’éducation artistique... et une « redistribution des subventions qui servent à diminuer le prix des places ». « Il se met en place ici une politique socio-culturelle qui chasse les artistes… On espère ne pas être KO debout en 2017, pour les 50 ans du Chêne ». En attendant, un comité de soutien s’est créé, l’ancien rideau de scène découpé en petits morceaux sera vendu Place de l’horloge en juin. Des idées, les artistes en ont toujours ! DELPHINE MICHELANGELI

Contacté, le directeur des affaires culturelles de la Ville, Michel Galvane, n’a pas répondu à nos demandes d’entretien, pour expliquer les mesures et orientations prises par la Ville

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établissement public de coopération culturelle autonome. Une pétition est en cours contre la fermeture de l’École d’art (voir blog des étudiants en lutte : etudiantsesaa.wordpress.com)

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16 événements

Les beaux jours au MuCEM

L

e 21 mai, c’est la nuit des Musées ! Le MuCEM participe à l’événement, en ouvrant ses portes jusqu’à minuit, et propose un parcours chorégraphié autour de l’exposition Jean Genet (retrouvez sa critique sur journalzibeline.fr), avec la participation de la section danse du lycée Saint Charles. Les 26 et 27 mai, danse toujours : on verra la clôture du cycle Objets déplacés, avec le chorégraphe Faustin Linyekula, livrant un travail inédit inspiré d’un... panier destiné à recevoir les têtes des guillotinés, repéré dans les collections du musée. Pour les amoureux des plantes, la master class jardinage se poursuit chaque dernier samedi du mois jusqu’en juillet, et notamment le 28 mai avec une session consacrée à l’art des semis. Les 2 et 3 juin à l’i2mp, auront lieu les

2e Rencontres d’études balkaniques, dont l’objectif est d’aller au delà de la question « Les Balkans sont-ils encore d’actualité ? » (entrée libre sur inscription : i2mp@mucem. org). On pourra également assister, le 2 juin, à la conférence de Barbara Cassin intitulée Barbarie et traduction, qui conclura le cycle Pensées du Monde consacré à L’avenir des frontières. Avant d’enchaîner, le 3 juin, sur une visite nocturne de l’exposition Picasso (lire notre critique p16), pour une Nuit vernie pleine de surprises. Clôture également du séminaire consacré aux déchets par l’i2mp, en partenariat avec l’EHESS, le 17 juin, avec une réflexion sur les façons de répondre aux excès techniques et alimentaires. Enfin, sachez qu’en parallèle avec les « grosses » expositions du MuCEM et le temps fort

Un cèdre au MuCEM L

Najwa Barakat © X-D.R

e MuCEM s’est mis aux couleurs du Liban. La programmation, artistique et littéraire, plastique et cinématographique, est riche, et comme une mosaïque aux pièces morcelées dessine trait à trait le visage d’un pays méconnu. Son histoire tragique semble aujourd’hui, hélas, le prélude des dévastations qui ont gagné les pays voisins. Le temps fort a commencé avec Quatre heures à Chatila de Jean Genet. Et la présence de Leïla Shahid, ambassadrice de la Palestine

auprès de l’Union Européenne, qui racontait comment l’écrivain s’était retrouvé là, quelques heures après le carnage, avec elle, dans ce charnier puant dont les milliers de morts n’ont jamais eu d’autre sépulture que les mots de l’écrivain. Elle parla des phalangistes chrétiens, des Israéliens qui savaient et ont laissé faire, et même pour Sharon au moins armé et planifié le massacre. De la guerre du Liban, des bombardements incessants massacrant les civils, de Beyrouth coupé en deux, de la Syrie, de Bachir Gemayel. Et aussi, plus près de nous, de cette impossibilité aujourd’hui de dire qu’on est contre la politique d’Israël, contre l’occupation illégale de la Palestine depuis 50 ans, sans être taxé d’antisémitisme. Puis le texte de Genet, malgré une lecture trop emphatique et parfois maladroite, éclata de douleur. Il faut le lire, et le lire encore, parce que sa qualité littéraire est exceptionnelle, parce que son humanité est infinie. (écouter l’entretien sur la webradio). Le lendemain, des deux écrivaines Libanaises qui devaient être présentes (voir critique de leurs livres p 66 et 68) seule Najwa Barakat (écouter l’entretien sur la webradio) put venir en France, pour parler de ce paradoxe du Liban entrevu la veille sous un autre angle. Car s’il n’y a pas à Beyrouth de monuments commémorant la guerre civile, celle ci est dans tous les esprits, tous les comportements :

Beyrouth ya Beyrouth (lire ci-contre le détail de cette programmation), le jeune couturier Yacine Aouadi rend hommage à Marseille, sa ville natale, en exposant sa première collection Haute Couture, 13’015. Une exposition qui se tiendra jusqu’au 29 août, en partenariat avec la Maison Méditerranéenne des Métiers de la Mode. GAËLLE CLOAREC

Retrouvez comme chaque mois sur notre Webradio Comme au MuCEM, une émission sous forme de traversée, consacrée aux temps forts, découvertes et coulisses du Musée des Civilisations d’Europe et de Méditerranée.

MuCEM, Marseille 04 84 35 13 13 mucem.org

« Au sortir d’une guerre civile il n’y a plus de comportements normaux. C’est la survie qui compte, le rapport dominant dominé, la relation de manipulation ». Et la littérature en témoigne : celle ci est libre, déclare-t-elle, mais victime de ses autocensures, des éditeurs qui attendent des musulmanes « l’histoire d’une femme qui se libère du tchador en allant en Europe, le tout épicé de quelques scènes érotiques ». Or dans Ya Salam les femmes sont des personnages complexes, capables de cruauté et de noirceur, actrices des rapports de domination qu’elles exercent autant qu’elles les font subir. Mais c’est «l’actualité » de son livre écrit en 2000 que l’effraie aujourd’hui : « Si Beyrouth est revenue à la paix, la Syrie et le Yémen se disloquent à leur tour, et les habitants pris en otages mettront longtemps à sortir des traumatismes qui, au Liban après 30 ans ne sont pas effacés. » La programmation de Beyrouth ya Beyrouth, particulièrement riche et passionnante, se poursuit jusqu’au 26 juin. Avec des installations (Zeina Abirached, Patrick Laffont) du cinéma, des conférences, des lectures, des débats. Autour de la mémoire, de la guerre et de ses représentations. AGNÈS FRESCHEL ET FRANCK MARTEYN


présentation de la

saison

mardi 14 mercredi 15 jeudi 16 juin à 19h www.theatre-arles.com / 04 90 52 51 51

©P. Sautelet

•| TH É ÂTR E LIB E RTÉ — PLAC E D E LA LIB E RTÉ 8 3 0 0 0 TO U LO N — 0 4 9 8 0 0 5 6 7 6 — W W W. TH E ATR E - LIB E RTE . F R — # T L I B

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24 JuIn > 19 JuIllet 2016


18 événements

Le MuCEM explore les sources d’inspiration de Picasso ancrées dans ses souvenirs et ses racines, nourries de ses rencontres, réinventées à l’aune de ses propres expériences et recherches. Une vie de création sans cesse en mouvement comme en témoigne l’exposition Un génie sans piédestal. Picasso et les arts et traditions populaires qui fait dialoguer œuvres et objets

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n 2013 à Aubagne (voir Zib’63), l’exposition Picasso céramiste et la Méditerranée développait déjà l’idée que les modèles anciens étaient des référents constitutifs du travail de Picasso. La proposition du MuCEM élargit le champ de cette réflexion en choisissant deux caps : la récurrence des thèmes liés à son Espagne natale dans l’ensemble de son œuvre, et ses incursions personnelles dans la connaissance du bois, de l’orfèvrerie, de la linogravure, du cinéma, du textile, de la tôle découpée et, bien sûr, de la céramique. Délibérément pédagogique, le parcours conçu par le scénographe marseillais Jacques Sbriglio suit une courbe linéaire comme une arène où l’on découvre successivement les espaces mis en scène autour d’un objet, d’une thématique ou d’une technique. Chacun étant agrémenté de documentations photographiques ou vidéo qui lui confèrent un supplément de vie. Après l’introduction en forme d’oratoire pour accueillir des ex-votos, place aux coiffes populaires de son enfance dont il s’est inspiré dans ses toiles cubistes, aux instruments de musique à la fois objets identitaires et évocations sexuelles (corps féminin idéalisé dans la représentation de la guitare), aux thèmes du cirque et des saltimbanques dont il se revendiquait, de la corrida qu’il illustra dès 8 ans dans le tableau El Picador, de la colombe ou encore des jouets à travers une série de papiers découpés. Les sections dédiées aux techniques mettent en lumière les relations nouées par Picasso avec les artisans qui furent ses « maîtres » et ses initiateurs, comme une forme d’hommage à ceux qui, souvent, restent dans l’ombre des

à lire Un génie sans piédestal. Picasso et les arts et traditions populaires Co-édition MuCEM / Gallimard, 290 pages, 35 €

Picasso au MuCEM, le parti pris du dialogue

de musées nationaux. Émilie Girard s’en explique, défendant son choix de « ne pas jouer la surabondance pour éviter la course à l’échalote » et préférant « parsemer ses choix pour faire une sorte d’appel. L’idée n’étant pas de faire jeu d’égal à égal car il est impossible de concurrencer Picasso ». Le MuCEM privilégie donc « les petits éclairages sur des points particuliers pour donner un aperçu des typologies » tout en s’inscrivant « dans une dynamique de relecture de ses collections ». Mais voilà, seulement 17 pièces figurent parmi les 200 œuvres de l’exposition ! Ce faible pourcentage pose question, mais le MuCEM assume son parti pris : « l’exposition a pour objectif de dépoussiérer l’idée de l’objet Pablo Picasso, Le matador, Mougins, 4 octobre 1970. Huile sur toile, 145,5 x 114 cm / MP 223, 13690 Musée Picasso-Paris / Photo © RMN-Grand Palais traditionnel qui colle aux arts (musée Picasso de Paris) / Jean-Gilles Berizzi © Succession Picasso 2016 ateliers… Outre le plaisir toujours renouvelé et traditions populaires ». C’est désormais chose de côtoyer l’art de Picasso, l’exposition montre faite. Espérons que les musées de Marseille à quel point l’outil devient une œuvre d’art se donnent les moyens financiers d’accueillir sacralisée par sa formalisation. le maître catalan dans ses murs, précisément au musée Cantini consacré à la période dite moderne du vingtième siècle.

Un face à face disproportionné

Pour Émilie Girard, Conservateur du patrimoine, responsable du Centre de conservation et de ressources du MuCEM, révéler les influences qui ont irrigué l’œuvre de Picasso est l’occasion de proposer une relecture des collections. D’où la présence dans le parcours « d’objets-références » mis en regard avec les œuvres pour créer un dialogue pertinent. Sauf que leur nombre est clairsemé et qu’ils se mêlent à d’autres objets issus de collections privées et

MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Retrouvez l’entretien avec Joséphine Matamoros, co-commissaire de l’exposition, sur notre webradio Zibeline

Un génie sans piédestal. Picasso et les arts et traditions populaires jusqu’au 29 août MuCEM, Marseille 04 84 35 13 13 mucem.org


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20 festivals

Lorsque l’été approche les Arts de la rue refleurissent en Festivals. Mais à Marseille, à Gap, à Alès, ils n’ont pas la même saveur !

Arts des villes, arts des champs A rts militants, s’offrant gratuitement au public, les arts de l’espace public sont historiquement liés aux villes et au happening, au désordre, ou du moins à l’absence du cérémonial attendu du spectacle. Mais l’air du temps modèle aussi leurs esthétiques : la préoccupation environnementale, l’attention au paysage sont aujourd’hui au cœur de la plupart des propositions des arts des villes, des monts, des littoraux et des champs. Alliant toutes les formes de spectacles, ils sont de fait pluridisiplinaires et indisciplinés, gérant des flux aléatoires, et les conduisant à la fête.

Poétiser l’urbain

L’Insomnie, Miniatures, Nathalie Pernette © Sebastien Laurent

sur toboggan : Yvonne, Princesse de Bourgogne sans autre charme que son atonie et son silence, sera jouée dans une cour d’école, par une Yvonne différente chaque soir... Autant de manières différentes de travailler le décor urbain, en le décalant dans le temps, en le faisant parler autrement, en le poétisant, en cherchant la nature qui s’y cache...

Habiter de récits Autre proposition à Marseille, les Détours & Printemps de Lieux Publics, Centre national des arts de la rue. Trois compagnies de la région Bizangos, Rara Woulib © X-D.R

Cela commence au Merlan, théâtre des quartiers nord très urbanisés, genre cités, de Marseille. Des Envolées, petites formes qui veulent emmener l’esprit ailleurs, se succèderont tout le week-end, autour du Merlan le samedi 21 mai, du KLAP, maison pour la danse de Michel Kelemenis, le dimanche 22. Au programme Aline Nari tente l’intimité extrême, et danse pour un spectateur à la fois, juste 1 minute... Michel Kelemenis reprend un duo dansé sur des chansons de Christophe et France Gall, autre manière d’emmener ailleurs, dans le temps, puis les artistes de la Ruche et de la Bande, associés au théâtre, déplacent le public dans le Parc de Font Obscure : Nathalie Pernette pour des Miniatures, une séance d’effeuillage, un massage, une rose qu’on offre... Céline Schnepff pour des Traversées en mots de son univers poétique, fait de sons et de papiers ; Fanny Soriano pour un corps à corps de cirque avec un Hêtre ; puis Fred Nevchehirlian proposera une première lecture chantée des textes écrits lors des ateliers d’écriture avec des ados du quartier ; et le soir Edith Amsellem, qui aime à décadrer les classiques, proposera un Gombrowicz

proposent des créations qui ont vocation à changer le regard des habitants des villes. La mer, proche, sera leur point commun, en des lieux où ils nous convoqueront sur réservation, mais qui resteront jusqu’au bout secrets... Sauf le premier, lieu de rendez-vous Place Bargemon, face au Vieux port. Que la metteure en scène Alexandra Tobelaim transforme en cimetière de gazon, non par esprit morbide, mais pour entamer un travail de consolation autour de la douleur intime, de la mort, de la séparation. Les spectateurs circulent autour des acteurs, professionnels et amateurs, allongés et murmurants. Ce Mois du Chrysanthème qui s’inspire et reprend les textes de Sophie Calle dans Douleur exquise, transfigure le réel et habite l’espace, en leur donnant l’épaisseur des histoires vécues par chacun. Rivages de La Folie Kilomètre est un road movie vers les déserts des centres commerciaux, le soir. Une sorte de drive in, mais mobile, en cortège, comme pour un mariage, ou un enterrement. Face à la mer encore, dans leurs voitures, les spectateurs suivent un personnage qui les guide dans son histoire... L’opéra nocturne de Rara Woulib permettra également de déambuler, à pied cette fois, toujours vers la mer, et un parc. Des chants sacrés africains, des rituels seront interprétés par 17 comédiens et un chœur de 75 amateurs, à la


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nuit tombée. Une autre manière avec Bizangos, de faire surgir des fantômes...

Respirer les cimes À Gap la scène nationale veut fêter l’arrivée des beaux jours et sortir de ses murs, dans des paysages sublimes où tout fleurit et embaume. Pourtant cette quatrième édition a failli ne pas avoir lieu, faute de financements suffisants. Il a fallu un recours aux 45 Mécènes des cimes, et un crowdfunding*... Tous dehors enfin ! est pourtant, depuis 4 ans, un moment précieux, un vrai week-end de fête, riche (14 compagnies, 15 spectacles, 44 représentations) et donnant vie à la ville grâce à une programmation juste, s’adressant à tous. On y voit des moments de cirque acrobatique épatant les enfants, de la musique et des lumières, et du théâtre de rue aussi, militant et revendicatif. Ainsi cette année on retrouve Tartar qui fait ses Adieux (n’en croyez rien) et Jérôme Cloud qui trace La grande saga de la Françafrique, mais aussi les acrobaties de Rouge Eléa, de la Cie Kiaï, du vélo sur trampoline, des fanfares, le clown Bobitch... Et puis le cadre, absolument irremplaçable, de cette ville sertie dans les montagnes. D’autant que cette année encore le Domaine de Charance qui domine la vallée est de la partie, et que la Scène nationale sait faire fleurir les cheveux des dames, ménager des instants festifs, des rencontres, des navettes entre les événements, des dégustations... et jeter des ponts avec la Fête du vélo qui se déroule les mêmes jours !

Transformer les Cévennes De l’autre côté, vers Alès, c’est un festival d’envergure et de référence qui se prépare. Né en 1999 pour aller à la rencontre du public des Cévennes, il a rapidement adopté des dénominations anglaises plus adaptées : il s’agit d’Outdoor Festival, d’Arts in Public Spaces. Car il est peu question d’arts de la rue, ici : les 3 premiers jours du festival se déroulent dans les Cévennes, à Corbès, Masillargues, dans la bambouseraie d’Anduze. Et les deux derniers jours, à Alès, jouent sur les places, les ponts, dans le jardin du bosquet. L’idée du festival, depuis sa fondation, est de faire venir des artistes internationaux, de proposer à ceux

Cri, Cie Kiaï © Philippe Laurencon

qui créent en salles de travailler dehors, et de collaborer avec le Pôle Cirque de Languedoc Roussillon... Bref, de transformer la relation que les habitants entretiennent avec le spectacle, pour que tous y viennent. Cette année on retrouvera beaucoup de musique avec Impérial Orphéon, excellent ensemble associé au Cratère, Captain Panda, lune fanfare qui déménage, mais aussi de grands et petits spectacles pyrotechniques, les acrobaties sur l’eau de MétamOrph’O, Gravity.O spectacle en hauteur pour 5 voltigeurs, un grand opéra sous les étoiles (cie Oposito), de la danse (Yann Lheureux, François Rascalou...), une création participative avec huit jeunes de 4 pays (Arts’R’Public), des clowns sans maquillages, encravatés, qui s’étreignent... Bref, 16 propositions spectaculaires, plus d’une cinquantaine de représentations, 6 créations, 5 jours de propositions sans temps mort, pour un Festival international qui a su rester attentif à ce qui s’élabore près de lui, et lui permettre d’exister, de rayonner, d’atteindre l’excellence. Exemplaire ? AGNÈS FRESCHEL

* On voit de plus en plus souvent les Scènes nationales comme celle de Gap, ou même l’Odéon à Paris !, faire appel au financement participatif, signe que l’appauvrissement du secteur culturel gagne même les grandes maisons.... Comme le mécénat des petites entreprises, le crowfunding, qui avait plutôt vocation à aider les émergents et alternatifs, est capté par les structures installées, non pour émerger, mais pour ne pas être submergées...

Les Envolées 21 mai Le Merlan, Marseille 04 91 11 19 20 merlan.otg Détours & Printemps 27 et 28 mai Lieux Publics, Marseille 04 91 03 81 28 lieuxpublics.com Tous dehors enfin ! 27, 28 & 29 mai La Passerelle, Gap 04 92 52 52 52 theatre-la-passerelle.eu Cratère Surfaces 28 juin au 2 juillet Scène nationale d’Alès Anduze, Corbès, Masillargues 04 66 52 52 64 cratere-surfaces.com


22 festivals

L’antichambre du Festival d’Aix L

e rendez-vous est fixé depuis 2013 : Aix en Juin, brillant préambule au Festival d’Aix-en-Provence, attire un public nombreux autour de manifestations variées, concerts, récitals, master classes, répétitions d’opéras (en accès gratuit ou peu coûteux)... Tout débute le 4 juin au Jas-de-Bouffan avec Ouverture[s], une création « déambulatoire et participative » de près de 300 amateurs conduits par des professionnels, musiciens, dont la chorégraphe Geneviève Sorin… et une présentation en musique (Panorama le 8 juin). De récents Lauréats HSBC donnent deux beaux récitals de Lieder : d’Amour et de Mort (11 juin à la Fondation Vasarely) et Mélodies nordiques (24 juin à l’Hôtel Maynier d’Oppède). À Silvacane, c’est le Chœur de l’Opéra de Cape Town (17 juin) qu’on découvre, avant de retrouver ces voix solaires lors de la traditionnelle Parade[s] sur le Cours Mirabeau (26 juin) ; on entend aussi à l’abbaye l’Ensemble Solistes XXI dans des polyphonies de Gesualdo, et des mélodies modernes par de jeunes chanteurs de l’Académie (18 juin). Le violoniste tunisien Zied Zouari (14 juin) précède le saxophoniste Raphaël Imbert (Solomax le 23 juin) à l’Hôtel Maynier d’Oppède, alors qu’un concert est donné en hommage à Gabriel Dussurget

Et tâchons d’épuiser la mort dans un baiser © Sonia Barcet

disparu il y a 20 ans (25 juin au Conservatoire D. Milhaud). On attend avec intérêt le spectacle musical Et tâchons d’épuiser la mort dans un baiser, production de l’Académie, mise en scène par Marc Lainé, autour de la correspondance de Debussy et des fragments de son opéra inachevé La Chute de la maison Usher (29 juin à l’Hôtel Maynier d’Oppède). Des concerts du Quatuor Berlin-Tokyo, Mélodie & Création, de « Jeunes Voix lyriques » ou de Musique de chambre émaillent la programmation à

Aix où hors-les murs (Martigues, Aubagne, Beaurecueil, Ensuès, La Ciotat), Mozart est présent au Tholonet (23 juin) et une Soirée Bœuf sur le toit est annoncée à La Friche de la Belle de mai (Marseille le 25 juin)… sans oublier les répétitions publiques des opéras programmés en juillet. JACQUES FRESCHEL

Aix en juin du 4 au 29 juin 08 20 922 923 festival-aix.com/fr/programmation/aix-en-juin

La danse sous toutes ses coutures aisant la part belle aux spectacles à voir en famille, l’ouverture du festival se fera avec la création de Ladies First de Marion Muzac. Une pièce qui regroupe vingt jeunes filles issues de régions différentes qui rendent un hommage vibrant aux pionnières du début du vingtième siècle. Une soirée d’ouverture qui se poursuivra avec un grand bal la Piste à dansoire initié par le collectif Mobil Casbah. Suivront Magali Milian et Romuald Luydlin, Cie La Zampa, pour B&B, leur libre adaptation de La belle et la bête, ou encore l’artiste allemand Thomas Lehmen qui invite l’art dans notre quotidien avec sa pièce A Piece for You. Des pièces plus intimes seront présentées tel le solo autobiographique Quartiers libres de Nadia Beugré, chorégraphe ivoirienne, qui

Jaguar, Marlene Monteiro Freitas © Uupi Tirronen

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explore les tabous qui nous emprisonnent ; Angela Schubot présentera sa quête d’un corps « sans pouvoir », le solo Körper ohne Macht, quand Mickaël Phelippeau, poursuivant son travail de portraits chorégraphiques, nous fera découvrir la face cachée de la danseuse Lola Rubio dans Llàmama Lola. Des pièces aussi dans lesquelles les corps se métamorphosent dans l’ivresse avec le Sacre de David Wampach, artiste associé du festival, ou dans la recherche de l’animalité

pour Marlène Monteiro Freitas dans Jaguar. Le festival se clôturera avec la performance musicale et plastique percutante de Karl Van Welden qui questionne avec Mars II les menaces écologiques, économiques ou terroristes qui planent sur nos têtes. À l’issue des représentations, les Bords de plateau, animés par Olivier Hespel, proposeront une série de rencontres avec les artistes qui donneront des analyses des pièces présentées et permettront aussi de recueillir « à chaud » le ressenti des spectateurs. Enfin, une exposition, La danse contemporaine en questions, créée par le Centre national de la danse et l’Institut français, proposera d’aborder les questions clés de la danse contemporaine pour mieux comprendre le monde de la création chorégraphique en 12 affiches (du 19 mai au 18 juin à la médiathèque). FRANCK MARTEYN

Festival Uzès danse 10, 11, 12 & 16, 17, 18 juin Divers lieux, Uzès 04 66 03 15 39 uzesdanse.fr


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Village des Alternatives

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édition

festival

ARTS et POÉSIES 

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© JCS

            

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hangeons le système, pas le climat ! » Avec cette idée toute simple, Alternatiba est un collectif qui fédère 120 antennes en France. Celle de Martigues organise son Village des Alternatives, le 18 juin au Jardin du Prieuré. Au menu, solutions locales pour désordre global, balade à vélo ou construction d’un four solaire. Et aussi, à 10h30, intervention d’Enercoop sur l’éléctricité100% renouvelable, ou à 14h30 débat sur le gaz de schiste. Final en fanfare dès 19h avec les concerts de Cats Fingers et Fiera Brass. JAN-CYRIL SALEMI

18 juin Jardin du Prieuré, Martigues alternatiba.eu

Château—Arnoux

Saint—Auban

2016

eauditives a v e c l ’ É c o l e S u p é r i e u r e d ’ A r t e t D e s i g n To u l o n P r o v e n c e M é d i t e r r a n é e

28 mai LA CELLE  29 mai TOURVES  

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Scène conventionnée Pôle régional de développement culturel Pôle transfrontalier

présentation de la saison 2016 / 2017 mer 15 juin 18:00

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24 festivals

Printemps de rêve à Montpellier Le Printemps des comédiens fête ses 30 ans et fait la part belle au théâtre européen, et au cirque qui y fait son grand retour

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n mois avant Avignon, le théâtre fait son festival à Montpellier avec le Printemps des comédiens qui fête cette année ses 30 ans d’existence. De grands maîtres du théâtre européen seront là, à commencer par Georgio Strehler, dont l’Arlequin, serviteur de deux maîtres, qu’il avait mis en scène il y a bientôt 70 ans avec son Piccolo Teatro di Milano, fait l’ouverture du festival dans une version

Ça ira (1), Fin de Louis © Elisabeth Carecchio

renouvelée, avec l’acteur Ferruccio Soleri dans son rôle historique d’Arlequin ; Georges Lavaudant qui crée Le Rosaire des voluptés

épineuses d’après Stanislas Rodanski avec des comédiens montpelliérains ; Peter Brook et Marie-Hélène Estienne avec Battlefield,

sur les spécificités de la langue sarde qui apporte un supplément d’âme à l’italien, avec Marcello Fois ou Michela Murgia, se passionner lors des petits déjeuners littéraires, des escapades littéraires et musicales, des entretiens, des cafés littéraires… Dialogues, lectures, rencontres, ateliers offriront autant d’occasions d’approcher les auteurs et leurs œuvres, de les découvrir, les retrouver, les comprendre… Les illustrateurs aussi seront à l’honneur, et pas seulement pour le public-jeunesse, fort attendu, avec le roman graphique de Michelangelo Setola ou encore l’affiche de la manifestation par Lorenzo Mattotti. Ce seul programme satisferait déjà les plus difficiles, mais les trois journées de cette fête du livre foisonnent de surprises, d’expositions, invitent une centaine d’auteurs de langue française, sélectionnés par les libraires partenaires. Ces derniers présentent, parmi la multitude des parutions entre les rentrées littéraires de septembre et de janvier, leurs coups de cœurs, écrivains « représentatifs d’une saison de livre », qui viendront se livrer à l’exercice délicat et convivial de la dédicace sur les différents stands des librairies indépendantes de Montpellier. Les rencontres fleuriront encore, autour de

Tahar ben Jelloun, Jérôme Ferrari, ou lors de la carte blanche laissée à Maylis de Kerangal qui envisage ce moment privilégié comme un « tâtonnement avec les auteurs » autour des enjeux de la création littéraire, entre la part de ce qui est hors de la fiction et la documente et ce qui a trait à la part intérieure de l’écriture littéraire. Les petites maisons d’édition françaises ainsi que les nouvellement nées seront mises en avant. Ce beau festival s’attachera aussi à la maison d’édition Verdier, qui, plus qu’un projet, est décrite comme un trajet collectif, gardant « la petite musique de la langue de Mai 68 » : si l’on ne peut pas « changer le monde, on peut du moins contribuer à changer les consciences »… d’où une « démarche émancipatrice et exigeante ». Cet esprit d’éveil des intelligences pour tous se retrouve dans la gratuité de cette manifestation, qui, concoctée par Montpellier Méditerranée Métropole, et la Ville de Montpellier en partenariat avec le CNL, se déroule en plein cœur de Montpellier, sur l’esplanade Charles-de-Gaulle, à La Panacée et à l’espace Dominique Bagouet ainsi que dans le réseau des médiathèques sur tout le territoire.

Maylis de Kerangal © Catherine Hélie-Gallimard

Livres de saison

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uatre Prix Goncourt, un éditeur rare, POL, un foisonnement d’évènements… Précédée de préfaces en avant-goût (manifestations gratuites dans le réseau des médiathèques), la 31e édition de la Comédie du livre de Montpellier, qui clôt rituellement les grandes manifestations littéraires de l’année en France, se place sous le signe de l’Italie, avec un hommage à Umberto Eco, un focus sur la littérature italienne contemporaine, l’histoire, le roman noir, un parfum de Sardaigne, une once napolitaine, un soupçon de Gênes, une étape romaine... La botte italienne, véritable patchwork de langues et de traditions, est parcourue du nord au sud avec des noms que l’on a déjà appréciés à Aix, comme Francesca Melandri… impossible de les citer tous ! Plus de 34 auteurs ont confirmé leur venue, et une éditrice phare, Liana Levi. On pourra s’attarder

MARYVONNE COLOMBANI

La Comédie du livre 27, 28 & 29 mai Montpellier comediedulivre.fr


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d’après le Mahabharata et la pièce de JeanClaude Carrière ; Dag Jeanneret qui met en scène Poison, un texte de la Néerlandaise Lot Vekemans. Parmi les maîtres de la nouvelle génération, Jean-François Sivadier, dont le Dom Juan, avec Nicolas Bouchaud dans le rôle titre est très attendu, de même que Ça ira (1), Fin de Louis, premier volet d’une saga explorant le mythe de la révolution de 1789 monté par Joël Pommerat. Autres grands noms, et pas des moindres : James Thierrée, grand fidèle du Printemps, qui revient avec sa dernière création, La Grenouille avait raison ; Simon McBurney qui vient présenter en première française La Rencontre, voyage sensoriel immobile vertigineux ; Michèle Anne De Mey, Jaco Van Dormael et le collectif Kiss & Cry de retour avec Cold Blood ; Alain Françon, Robert Cantarella, Gilbert Milin et Jean-Pierre Baro qui

mettront en scène les élèves de l’École Nationale d’Art Dramatique de Montpellier… Le cirque, qui fait un retour en force, a aussi ses grands rendez-vous : Triptyque de la Cie québécoise Les 7 doigts de la main, qui regroupe les pièces Anne et Samuel, Variations 9.81 et Nocturnes qui allient subtilement les arts du cirque et la danse contemporaine ; Tentatives d’approches d’un point de suspension, déambulation gracieuse de Yoann Bourgeois ; Le Cirque poussière de et avec Julien Candy, qui crée un monde avec trois fois rien ; Mundos de papel de la Cie espagnole Vol’e Temps ; le très impressionnant BoO du CirkVOST, structure géante de 368 bambous entrecroisés au cœur de laquelle évoluent huit trapézistes ; ou encore les acrobaties impressionnantes de Matthieu Gary et Sidney Pin dans Chute !. Un peu plus loin, aux portes de Béziers dans

le Domaine de Bayssan, Bartabas pose son théâtre Zingaro pour 22 représentations de On achève bien les anges (élégies), fascinante rêverie équestre fantastique et onirique qui s’appuie sur des musiques de Tom Waits, les Doors, Bach et Messiaen. Pour compléter cette appétissante programmation, le festival propose aussi de nombreuses rencontres avec certains des metteurs en scène invités, des lectures, une exposition de photographies de Marie Clauzade, photographe du festival depuis plus de deux décennies, qui fête les 30 ans en 30 photos… DOMINIQUE MARÇON

Printemps des comédiens du 3 juin au 10 juillet Domaine départemental d’O, Montpellier Domaine de Bayssan, Béziers 04 67 63 66 66 printempsdescomediens.com

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SAISON 2016—2017


26 festivals

Châteauvallon à l’heure d’été u 17 juin au 30 juillet, sept soirées marquent le grand retour des spectacles dans l’amphithéâtre en plein air de Châteauvallon - scène nationale. D’abord un premier rendez-vous musical avec un duo de choc : Natacha Atlas et Ibrahim Maalouf. Quinze ans après le succès planétaire de Mon amie la rose, la chanteuse fait son come back sur scène à l’occasion de la sortie de son nouvel opus River Nile coécrit, arrangé et produit par le compositeur et trompettiste. Loin des clichés du chant arabe dans lesquels elle se sentait enfermée, la voici embarquée dans un album jazz aux mélopées orientales… à découvrir le 17 juin. Deux spectacles de théâtre scellent les retrouvailles du théâtre d’Ollioules avec la Compagnie Marius et David Bobée, fidèles parmi les fidèles. Après Manon et Jean de Florette qui avaient laissé en 2007 les spectateurs ébahis, et Le Schpountz en 2014, les flamands proposent la trilogie de Marcel Pagnol Marius, Fanny et César en version intégrale et dans un dispositif inédit. Effet de surprise et bonheur communicatif garantis en compagnie de ces artistes qui font entendre différemment ce texte classique et universel (24 au 26 juin). Là encore avec Lucrèce Borgia de Victor Hugo, la présence de David Bobée est une histoire au long cours. D’abord Hamlet, puis Roméo et Juliette, et aujourd’hui Lucrèce Borgia qui a éclos lors d’une résidence à l’été 2014 avant d’être adaptée pour le théâtre couvert en avril 2015. Les représentations des 1er et

de Lorraine font la preuve une fois encore de l’ampleur de leur répertoire. Au programme le 12 juillet, trois pièces de chorégraphes majeurs : Shaker Loops d’Andonis Foniadakis, The Vertiginous Thrill of Exactitude de William Forsythe et Nine Sinatra Songs de Twyla Tharp. On reste aux États-Unis avec la venue les 22 et 23 juillet du L.A. Dance Project fondé à Los Angeles par Benjamin Millepied. Là encore un programme éclectique composé de sa propre chorégraphie Hearts and Arrows, du célèbre Quintett de Forsythe et de Harbor Me de Sidi Larbi Cherkaoui. Les 29 et 30 juillet, Les Nuits Flamencas fêteront leur 10e édition : pour cet événement, Juan Carmona a imaginé un vrai feu d’artifices en invitant à ses côtés Joaquin Grilo pour un hommage à Paco de Lucia, et Jose Maldonado qui croise flamenco, peinture, musique et danse… Lucrece Borgia © Arnaud Bertereau - Agence Mona

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2 juillet en plein air bouclent la boucle d’une tournée en France qui a mis en avant son regard novateur sur l’œuvre et, dans le rôle titre, le talent de Béatrice Dalle surnommée « l’astre noir ». Comme à l’accoutumée, les dernières soirées estivales de Châteauvallon privilégient la présence de compagnies chorégraphiques de renommée internationale. Les 8 et 9 juillet, le Ballet Preljocaj redonne vie à Roméo et Juliette, l’une des toutes premières créations d’Angelin Preljocaj. Plongée dans l’univers futuriste d’Enki Bilal, la pièce de Shakespeare avait fait fureur en 1990, sa relecture aujourd’hui fait d’elle une œuvre intemporelle. Sur les musiques de John Adams, Franz Schubert et Frank Sinatra, les danseurs du Centre chorégraphique national - Ballet

MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Châteauvallon - scène nationale, Ollioules 04 94 22 02 02 chateauvallon.com

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our la 14e fois, le superbe Parc des Troènes à La Valette-duVar accueille le festival Contes et Jardins. Une manifestation qui se distingue par des tarifs très doux, un engagement écologique non factice, et la grande qualité de sa programmation : quatre jours durant, petits et grands y trouveront la crème des arts du récit. Tout commencera le 26 mai, en douceur : Francine Chevaldonne entraînera les enfants à partir de 4 ans dans sa Ronde des saisons, tandis que les plus de 10 ans suivront Olivier Ponsot, « funambule sur corde vocale ». Les jours suivants, on ne manquera pas l’exceptionnel Jihad Darwiche, ramenant du Liban de son enfance l’esprit des Mille et une nuits, Jacques Bourgarel, voyageur musical, Brigitte Carle, avec sa

© Ville de La Valette-Du-Var

Au paradis des contes

moisson de fables récoltées au Yémen et en Ousbékistan, ou encore Mélancolie Motte (oui, c’est son vrai prénom), qui tire le conte vers le théâtre-récit. Le 28, prévoyez de réserver votre place rapidement pour la soirée contée. Des moules, des frites, et des histoires, que demander de plus pour 10 euros ? Peut-être

le dessert, et justement, il est inclus dans le prix ! Dans ce jardin enchanteur il y a aussi le Zizmanège de Madame Bonheur et Igor, machine infernale à mi-chemin entre le manège et la boîte à musique géante, des ateliers de loisirs créatifs pour s’initier à la confection d’objets à partir d’éléments de récup’, et des animations ludiques et conviviales autour du tri des déchets. Enfin pour que les adultes puissent, à leur tour, enchanter les soirées de leurs enfants, sachez qu’un temps d’échange parents-conteurs leur est proposé, afin d’apprendre à conter (les samedi et dimanche, à 16h30). GAËLLE CLOAREC

Contes & Jardins 26 au 29 mai Parc des Troènes, La Valette-du-Var 04 94 23 62 06 lavalette83.fr


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Eauditivez ! Eauditivez ! evenues le rendez-vous poétique de la Provence verte au printemps, les Eauditives, délicieux néologisme qui mêle aux mots et aux sons les eaux propices à l’inspiration des rivières et des fontaines, se conjuguent, puisque maintenant familières, 8e édition déjà ! On eauditivera donc les 28 et 29 mai au musée des Gueules Rouges de Tourves et au village de La Celle, cadre de choix offert aux performances et improvisations poétiques orchestrées avec finesse par la ZIP (Zone d’Intérêt Poétique) de Barjols et les éditions Plaine Page. Sept parutions à la clé, dans les diverses collections de cette maison d’édition : trois recueils se lovent dans les cornets des Oublies, comme autant de saveurs à déguster, c’est le Oui de Laura Vasquez, les Fragments sur de Vanda Mikšić, et le Et faire à partir de l’explosion de Thomas Déjammes. La collection Connexions retrouve dans l’écrin de ses volumes la poésie de Maxime Hortense Pascal, Le Tambour de Pénélope et celle d’Hervé Brunaux Homo presque Sapiens. Enfin, Tennis de table de Charles Pennequin se glisse dans le format des vieux cahiers d’écolier de la collection Calepins. Deux tables rondes animées par

Nicole Peyrafitte, USA, édition 2015 © Editions Plaine Page

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des journalistes littéraires permettront d’approcher les œuvres neuves de ces poètes dont on aura applaudi les lectures et performances. Parmi ces instants privilégiés une mise en scène permettra de voir et entendre dans une performance bilingue, français parlé et langue des signes française (LSF), États de neige de Brigitte Baumé, par l’auteure et la comédienne Marie Lamothe. Les étudiants de l’École d’Art (ÉSADTPM), avec la complicité de leur professeur, poète et performeur Patrick

Sirot, apporteront leur fougue inventive par des performances et des installations sonores. Voix OFF restituera les travaux de l’atelier poétique (initié par les professeurs documentalistes Fanette Bianchi, Françoise Leboutet-Millet et Karine Mertens) des secondes de Sabrina Coutenay professeur de lettres du lycée Raynouard (Brignoles), accompagnés par Cédric Lerible, Claudie Lenzi et Eric Blanco. Autre atelier, celui des voix de l’ÉIMAD*, dirigé par Roula Safar. On entendra aussi cette charismatique artiste lors d’un récital et d’un intermède musical où instruments, voix et poésie s’accordent. Enfin, le violoncelle virtuose de Yassir Bousselam ajoutera sa magie à celle de cette belle manifestation. MARYVONNE COLOMBANI

* l’École Intercommunale de Musique Art et Danse du Comté de Provence

Les Eauditives 28 & 29 mai Musée des Gueules Rouges, Tourves Parvis de l’Abbaye, La Celle 04 94 72 54 81 plainepage.com

2016 2017 Ouverture des ventes 04 93 40 53 00 www.theatredegrasse.com samedi 28 mai


28 festivals

Kiosque à mosaïque

Loheem © Alice Lemarin

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omme chaque été, l’association BIP (Bureau Intermédiaire de Production) lance son invitation aux amateurs de sons, de gourmandises et d’apéros qui se prolongent sous les étoiles. Les Rendez-vous du Kiosque, 5e du nom, reviennent à Marseille pour cinq dates en juin et juillet. Au menu, convivialité, éclectisme musical, animations et découvertes pour les plus jeunes, le tout sans débourser le moindre

euro, sauf pour le boire et le manger, bien sûr. Quatre soirées auront lieu en plein air, au kiosque des Réformés, allées Léon-Gambetta, et l’ouverture de la manifestation se fera au Waaw, le bar du cours Julien. Au programme de ce premier rendez-vous « délocalisé », une ambiance qui promet d’être déjantée. Nommée Nos idoles nos icônes, la soirée conviera les chanteurs de salle de bains ou les vocalistes

du volant à reprendre en chœur leurs tubes favoris. Accompagné des musiciens programmés cette année, cet orchestre participatif se mettra en place au gré de l’humeur et de l’audace de chacun. Le 12 juin, le kiosque à musique de la Canebière retrouvera sa fonction initiale. Dès 18h, un atelier platines sera réservé aux plus jeunes. Découvertes des sons, du sample, du mixage, les enfants joueront au DJ avec Mimix, déjà présent l’an passé pour la même activité. Puis jusqu’au soir, les styles musicaux s’enchaîneront, de la pop-folk à l’ambiance intimiste de The Dead Fox on the Road, au DJ set déjanté des Filles de l’Air, à celui, tout aussi débridé, de DJ Sonic Seducer. Le 26 juin, toujours dès 18h, Mimix remettra le couvert avec ses galettes de vinyles pour enfants, suivi par une performance samplée de LpLpo, puis le hip-hop électro d’Ideal Corpus et le DJ set de Why I Am M. Pink, un habitué des ondes de Radio Grenouille.

Voilà l’été Le passage au cœur de l’été se fera le 10 juillet. L’atelier de Mimix passera le cran supérieur et proposera cette fois aux enfants de créer leurs tubes avec toutes les matières sonores imaginables à leur disposition. Quant au plateau scène, il prendra la forme d’une

Sault good ! usique, fête, spectacles, bonne humeur, le tout sans bourse délier ! Le 12 juin, au pied du Ventoux, les Sons Dessus de Sault accueillent l’art, la création et la convivialité. À l’initiative du festival, le Phare à Lucioles, une association qui promeut la culture sur le territoire du Nord-Vaucluse. Rencontres, curiosité, découverte, respect et tout ce qui ouvre l’esprit, voilà les valeurs portées à l’année par le collectif et mises à l’honneur lors de la manifestation. Ce dimanche de festival sera l’occasion de présenter le CREA, projet au long cours sur lequel s’investit pleinement l’association. Ce Cursus de Recherche et d’Expérimentation Artistique développe l’expression des arts et de la culture dans les établissements scolaires. Les 80 élèves du collège de Sault associés au CREA seront présents toute la journée pour faire découvrir leur travail

photographique, réalisé avec Vincent Beaune, ou des performances dansées dans les rues aux côtés d’Aurélien Nadaud. Une dizaine d’autres rendez-vous jalonneront le parcours des festivaliers. Départ en fanfare, dès 11h avec Bouzouk, un quartet de rue qui mêle

ses cuivres et percussions aux musiques issues du répertoire du cirque traditionnel. À 14h, après la pause apéro et cantine, accompagnée de l’accordéon de Jimmy VI, place à la danse et la poésie, avec Jardin d’Idées : Elsa Marquet-Lienhart et Mathilde Vrignaud content, chantent, dansent, en un mot jouent, pour les tout-petits comme pour les très grands. Citons encore Be Claude, étonnante performance de rue théâtrale et dansée par Pierre Pilatte ; Sans, performance tout aussi déroutante de Robin Decourcy, qui transforme corps Camel Zekri et Gilles Laval © X-D.R

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Chaleur africaine carte blanche à Seconde Nature. Cette association aixoise organise notamment Chroniques, un festival dédié aux arts et cultures numériques. L’événement fera donc un petit crochet par Marseille, et le kiosque des Réformés accueillera pour l’occasion deux pointures de la scène électro phocéenne. Fred Berthet et DJ Oil, longtemps réunis au sein des Troublemakers, œuvrent désormais chacun à leur projets personnels. Ils seront ensemble aux platines pour un DJ set à deux têtes et quatre mains annoncé déjà comme un événement incontournable. Quand au dernier rendez-vous, il aura lieu le 24 juillet. Avec sa spéciale sélection, Mimix invitera les 6-12 ans à une boum pour enfants. Puis final en beauté, avec Cleary et sa toy-pop, maniant la console vidéo ou la mini guitare, la pop envoûtante et sensuelle de Loheem et fermeture du kiosque avec le DJ set électro Anticlimax. JAN-CYRIL SALEMI

Gasandji © Gaela Blandy

Les Rendez-vous du kiosque 7, 12, 26 juin et 10 & 24 juillet Marseille rendezvousdukiosque.fr

et langage en « matière plastique première » ; les deux guitaristes hors pair Camel Zekri et Gilles Laval, avec un projet qui parcourt l’histoire de la guitare. Lo Cor de La Plana, l’ensemble vocal masculin de Marseille, conclura la programmation avec ses chants d’Italie ou de Provence, avant le Grand Final Collectif, où tous les artistes, y compris ceux du public, se retrouveront pour une totale impro sans limite ! JAN-CYRIL SALEMI

Sons Dessus de Sault 12 juin 04 90 64 12 26 / 06 49 60 36 60 pharealucioles.org

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oilà 40 ans que le festival Africa Fête fait rayonner les cultures du continent africain. La première édition eut lieu à Paris, en 1978. Depuis, le festival a navigué entre les EtatsUnis, le Sénégal, le Bénin ou le Cameroun. À Marseille, c’est l’association Cola Production qui porte le projet depuis 2005. La 12e mouture marseillaise se tiendra du 10 au 18 juin, avec au menu art et artisanat, concerts et danse, expos et débats, cinéma et bien plus encore. L’exposition photo Femmes d’Afrique ouvrira la manifestation. Trente portraits de figures féminines majeures de tout le continent la composent. De La Kahena à Cesaria Evora, elles seront à découvrir au CRIJ, sur la Canebière, du 9 au 17 juin. Les deux week-ends du festival seront consacrés à la musique. Le 10 à l’Arthémuse, tendance fusion, entre afro-beat et traditions pour le trio KBK, et flamenco ou jazz manouche à la kora avec Swing Manding. Le 11, ambiance électro sur le toit-terrasse de la Friche Belle-de-Mai. DJ Oil, Tony Swarez et Kêtu se chargeront des sons, accompagnés de démonstrations de danse afro-urbaine. Tony Swarez et Kêtu remettront le couvert pour l’after au Dar Lamifa. Le 16, également au Dar Lamifa, débat autour de l’actualité politique et sociale en

Afrique. Puis viendra le dernier week-end, bien chargé. Le 17, à l’Espace Julien, plateau Scène Urbaine avec notamment les mots et mélodies de Sayon Bamba, et les maux de la société comorienne rappés par Cheilkh MC. Le 18, le cours Julien, transformé en village africain, accueillera artisans, militants associatifs, ateliers, concerts et spectacles, avec entre autres les acrobates danseurs de Terya Circus ou le duo acoustique de Prince Diabaté et Jeff Kellner. Enfin, le grand rendez-vous à l’Espace Julien, avec le rap du Soldat Fou Féfé, l’un des fondateurs du Saïan Supa Crew, le jazz oriental envoûtant d’Oum, les influences métissées d’Afrique et d’Allemagne de Mariama et la voix de velours de Gasandji. JAN-CYRIL SALEMI

Africa Fête 10 au 18 juin Marseille 04 95 04 96 36 / 06 16 66 00 97 africafete.com


30 critiques spectacles

La remise en question e qu’il y a de bien, avec Grand Magasin, c’est qu’ils ne changent pas. Indifférents aux modes du théâtre contemporain, ils les ont un jour devancées, par hasard, et aujourd’hui ils poursuivent leur chemin devenu de traverse. On les y retrouve, toujours avec joie. Ce dernier spectacle s’empare de L’éloge et défense de la routine.En commençant par la répétition. Face à la salle allumée, les deux allumés exécutent un pas en chantonnant, longtemps, toujours aussi pince sans rire... Puis ils s’assoient à leur table, et commencent à lister les routines. Ce matin, le soleil se lève. Le lendemain aussi. Et le surlendemain, le jour suivant. S’en étonner ? Constater qu’on regarde l’heure à son poignet même quand on n’a pas de montre. Qu’il y a de l’itératif, et des choses qui n’arrivent qu’une fois. Comme fêter ses 37 ans. Ce qui

ne les rend pas plus exceptionnelles que le jour qui se lève chaque matin. Tout cela est drôle, bien sûr. Comme les petites chansons entonnées avec le plus de platitude possible. Mais ce n’est pas tout : faire l’éloge de la routine est aussi une mise en abyme de la forme de leurs spectacles. Sans effet. Sans quatrième mur. Sans histoire. Sans même le rituel de la conférence. Balancés comme on parle. Délicieusement potache

par moment, comme lorsqu’ils parlent de remise en question, et montrent la photo d’une remise qui pend aux cintres depuis le début du spectacle, seul décor d’un plateau nu et familier. La force du langage est le seul décalage de cet éloge avec note réel : les mots jouissent, les rires fusent, on s’ennuie un peu vers la fin, lorsque la répétition d’un poème en prose s’attarde un brin... puis on se dit que la routine, la répétition, nous l’ont fait entendre jusqu’à ce qu’on s’en détache, saturés de son sens, expliqué, répété. Pour que vive et passe la banalité même des mots poétiques. Une remise en questions ? AGNÈS FRESCHEL

© Véronique Ellena

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Éloge et défense de la routine s’est joué à la Friche, Marseille, dans le cadre de la programmation de Marseille Objectif Danse les 21 et 22 avril

D’un Dinner l’autre amiaan De Schrijver et Peter Van den Eede (des Cies flamandes TG Stan et De Koe) sont des monstres de la scène, cabotins de génie. Ils jouent un spectacle étrange, d’après un film de Louis Malle sur le théâtre (My dinner with André 1983) où Wallace Shawn et André Grégory conversaient en un long huis clos, parlant d’esthétique et de choix de vie, rapportant une conversation qu’ils avaient réellement eue... Les deux acteurs en ont fait, en flamand en 1998 puis en français en 2005, un spectacle fleuve, de 3h30, qui reprend presque intégralement le dialogue du film. Surtout la partie d’André Grégory metteur en scène disciple de Grotowski, qui raconte avec force détails et logorrhée ses expériences mystiques de théâtre cérémonie. Une conversation qui fleure bon les années 70, leur enthousiasme pour la communauté et la transe créative. Le dialogue devenu théâtral est franchement long et pas toujours intéressant : l’intérêt du film de Louis Malle était qu’il traquait les visages, de face et dans les miroirs. Mais ce qui frappe dans le discours d’André, c’est le fort rejet de la consommation, de la fabrique du spectacle, d’une société qui nous endort par son flot d’information et tue en nous les cultures ancestrales au profit d’une globalisation annihilante. Wally, si rationnel, en sort ébranlé, sinon convaincu.

Qu’en est-il à la fin de la pièce, rendue par sa forme à un autre jeu de miroirs ? Il est question du théâtre sur une scène cette fois, mais transformée en restaurant où chaque soir deux cuisiniers préparent en direct et servent un repas en 4 services... La consommation devant un public qui ne mange pas renvoie à la participation théâtrale, dont il est question dans le dialogue du film. D’un geste répété et drôle, André empêche Wally de porter le vin, la nourriture à sa bouche. Les deux comédiens introduisent une distance entre les personnages, réels, qu’ils jouent, et leur réalité : Grotowski est mort, et ce Dinner a

lieu au présent. Les deux acteurs se coupent la parole, font référence au texte épais qu’il reste à dire. C’est drôle, même si le propos esthétique sur le théâtre a vieilli... et puis vers la fin, quand la conversation prend un tour plus ontologique, qu’il est question de toucher à ce détachement de soi que l’on vit lorsqu’on joue, qu’on jouit ou qu’on meurt, on comprend pourquoi ils ont repris, et remâché, et épaissi ce dialogue : seule la distance décalée, et le ressassement, et la fatigue, pouvaient nous amener aussi près de l’essence entrevue du théâtre. A.F. © Tim Wouters

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My dinner with André a été joué au théâtre du Merlan, Marseille, du 26 au 29 avril


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Sortir de l’ombre M

onique et Myriam sont deux femmes dans la vraie vie qui ne se connaissent pas, ont des métiers à première vue très éloignés mais se retrouvent formidablement incarnées sur scène par une seule actrice, Léna Bréban, dont les yeux brillants suffiraient presque à dire combien leur parole et leur existence sont précieuses. À partir de l’émission de France Culture Les Pieds sur Terre, au cours de laquelle se construisent pour les auditeurs des témoignages sans fard de ce que les hommes vivent, le metteur en scène Jean-Louis Benoît a fabriqué un objet de théâtre émouvant, sensible et intelligent qui sublime les paroles recueillies et fait naître deux personnages inoubliables. Les gestes pleins et les mots de Léna Bréban -ceux de Monique, garde-barrière, ceux de Myriam, infirmière en psychiatrie, ceux d’une actrice à bonne distance- évoquent, suggèrent, soulignent sans effet autre que de prouver une fois encore les vertus dramatiques de la retenue : la salle captée dans un grand miroir de fond qui se révèle aussi écran-vidéo tend l’œil et l’oreille dans un silence empathique. Robe à fleurs, cheveux relevés, visage bienveillant mais las, la garde-barrière repasse un grand sweet-shirt rouge -celui de son fils peut-être à l’horizon de cette immense voie ferrée qui

© Patrick Berger

ouvre l’espace scénique- pendant que temps et trains passent inlassablement ; baisser, ouvrir la barrière et répondre au signe de la main (geste subtilement maladroit ou naïf qui fera discrètement lien avec le deuxième personnage) du conducteur qui file vite c’est du travail et c’est même une vie, de solitude et de peu ; distribuer les somnifères, apaiser les angoisses, être là tout simplement en blouse blanche et queue de cheval, grand cahier à la main pour noter et rendre compte de nuits que l’on croit volontiers toujours agitées face à ses visages anxieux, un peu déformés non sans humour par les images projetées en

gros plan, c’est le quotidien de l’infirmière en « psychatrie » (détail phonétique touchant qui remonte à la source des mots) livré du plus profond de son humanité et de sa dignité. Une scénographie efficace et suffisante, une comédienne dirigée et inspirée laissent filtrer cette petite lumière de chacun pour chacun qui est peut-être ce que l’on nomme l’âme. Ce spectacle n’en manque pas ! MARIE JO DHO

Garde-barrière et garde-fous a été présenté à La Criée, Marseille, du 26 au 29 avril

Transsibérien, il est près une « mise à feu » de saison au TNM La Criée, une résidence de création à La Gare Franche, et une Sirène avec Lieux Publics (lire critique sur journalzibeline.fr), Philippe Fenwick a investi La Friche à bord de son Transsibérien. Paradoxe de l’esprit russe, brûlant et passionné autant que rigide et brutal : dès le prélude aux Grandes Tables, malmené par l’armée rouge et de pulpeuses demoiselles aux longues jambes, le spectateur embarque dans un univers contrasté. - 20 °C, bienvenue à Irkoutsk, direction Vladivostok ! Une fois installé sur le Grand Plateau, on reconstitue pas à pas le destin tragique de Jacques Mercier, artiste de cabaret brestois, mis au chômage suite au transfert de la marine nationale à Toulon. Un homme rêvant d’absolu, d’amours slaves et de steppes enneigées, tellement pris dans son fantasme russe qu’il ne veut plus jamais en émerger. Ravitaillé en vodka par la fille de sa logeuse, tout aussi esseulée, l’ancienne gloire de Recouvrance est une splendide incarnation

du déni flamboyant. Plutôt crever, titubant mais debout, que d’admettre une vérité médiocre ! La pièce, par un entremêlement de récits

savamment orchestrés, est aussi l’occasion pour le metteur en scène de critiquer au vitriol les écueils bureaucratiques qui freinent l’élan créatif dans un pays étrangement familier, la Dramatie du Nord. « Licence d’entrepreneur du spectacle, URSSAF, Audiens... la vie de Bohème, enfin ! ». Philippe Fenwick brûle les planches, hilarant lorsqu’il se heurte au répondeur kafkaïen de la Drac, et entouré d’une équipe à la hauteur de ses envolées. Lorsque la représentation s’achève, les comédiens s’alignent pour saluer, et une fois les applaudissements tempérés, entreprennent de faire le point sur la lutte des intermittents. Très clair, leur discours n’en touche que plus l’assistance, après une telle démonstration de vitalité artistique. GAËLLE CLOAREC

© Benoit Fortyre

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Transsibérien je suis, hors les murs de La Criée à La Friche, Marseille, s’est joué du 11 au 14 mai


32 critiques

spectacles

Pas rieuse… P

Une mouette c Herve Bellamy.jpg

as triste non plus, un brin joueuse, un brin boudeuse surtout cette Mouette à six plumes que l’on aura eu bien du mal à saisir peut-être parce qu’elle ne prend jamais son envol. Au départ, une idée piquante et fondée sur une connaissance fine de la pièce phare de Tchekhov : la liberté écrasante et fragile de l’artiste en est sans doute bien le sujet de fond et Hubert Colas en a proposé une réécriture à six auteurs contemporains, confiant à chacun l’un des quatre actes augmentés d’un prologue et d’un épilogue. Jacob Wren, Edith Azam, Liliane Giraudon, Nathalie Quintane, Annie Zadek ont su s’emparer de ce qui faisait « mouette » en eux, livrant par la même occasion un fragment de leur œuvre propre avec langue et thématiques personnelles à travers personnages et situations de la pièce d’origine, sans oublier Hamlet qui s’invite en figure permanente, signature absolue du metteur en scène et Angélica Liddell en deux temps bien repérables criant son refus de participer à une telle entreprise ! Beaucoup de monde donc au bord du lac à courir après ce qui fait sens aujourd’hui de ces « conversations sur la littérature » de ce « peu d’action » et de cette « tonne d’amour » (assumée par l’intelligente malice de Liliane Giraudon) selon les termes prosaïques de l’auteur russe ; pari ambitieux et écrasant sans doute autant pour

les acteurs (qui fournissent un beau travail et pas seulement lorsqu’ils écossent les petits pois de Nathalie Quintane, même si l’habituelle aisance inquiète et goguenarde de Thierry Raynaud est un peu rognée en Trigorine), que pour les spectateurs souvent désorientés. La scénographie efficace -les fauteuils-club à roulettes et le rideau de perles-écran font socle et lien- n’empêche pas qu’une partie du spectacle file, échappe ou s’évapore dans l’hétérogénéité ; de beaux moments suspendent le temps et le sens comme ce dialogue troué de silence où les lèvres bougent pour « rien » ou cette échappée wagnérienne vers la planète Mélancholia ; d’autres le plombent

c Adrien Bargin.jpg

uelques tapis ont été déployés sur le sol pour permettre au public de s’installer confortablement sur la place de l’Opéra. Les percussions de Kyung Jin So éclatent énergiquement tandis que six danseurs, 3 français et 3 coréens, free-runners et acrobates, occupent l’espace. Il s’agit du Groupe Noni, compagnie coréenne sous la direction de la metteuse en scène Kyung Hee Kim dont la pratique mélange traditions coréennes, danse

MJ DHO

Une Mouette et autres cas d’espèces a été présentée au théâtre du Gymnase, Marseille, du 26 au 30 avril

Agamemnon

Le plaisir du jeu

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dans un certain ressassement de formes -les affres de la représentation- ou une actualisation dérisoire des thèmes -salaire des instituteurs ou disparition des abeilles. Plus de trois heures trente de montagnes russes auxquelles un épilogue brillant (l’accent de Valère Habermann fait sonner les bites dorées d’Angélica Liddell) arrache de sincères applaudissements aux spectateurs qui n’ont pas lâché prise.

et techniques de Parkour pour des spectacles très dynamiques. Station est une chorégraphie faite de sauts et d’équilibre qui demandent une grande maîtrise. Elle s’inspire du jeu d’enfants 1, 2, 3 soleil ! Les 6 interprètes virevoltent ou se déplacent avec lenteur, puis invitent les spectateurs. Les enfants se précipitent et le jeu continue dans la joie jusqu’à former un grand moulon réjouissant. CHRIS BOURGUE

Le spectacle s’est donné le 4 mai dans le cadre de l’année France-Corée 2015-2016.

à venir Fire Steps par Josette Baïz et sa Cie Grenade, avec la participation d’élèves du primaire 1er juin Parvis de l’Opéra de Marseille 04 91 03 81 28 lieuxpublics.com

N

on mais je le crois pas, le mec il a tué sa fille et il revient comme ça, tranquille, il croit quoi ? C’est ainsi qu’échangeaient des lycéens à Martigues après le passage d’Agamemnon par D’ de Kabal et sa bande. La suite de l’échange étant encore plus révélatrice. Ouais mais l’autre, sa femme, c’est pas pour sa fille qu’elle le tue, c’est parce qu’il ramène une folle, et en plus elle elle a un mec... Agamemnon le père abusif, Clytemnestre la femme infidèle, Cassandre l’illuminée, Iphigénie la sacrifiée, tout est dit, compris, et rapproché de l’expérience commune, celle des histoires qui traversent tous les temps, de la tragédie grecque aux sitcoms, et aux faits divers. Grâce à une simplification, une adaptation, une vulgarisation ? À aucun moment : tout le texte est là, dans un renouvellement intelligent de la tragédie antique, avec son chœur, ses ponctuations musicales, son coryphée, ses tirades...


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Un Grand ménage qui déménage ! C

’est un petit village qui résiste encore et toujours à la morosité : à Cucuron dans le Luberon, qu’on se le dise, la culture n’est pas un vain mot ! Pour la deuxième année, un festival de théâtre de rue de caractère a battu le pavé, porté par une équipe dynamique et chaleureuse, avec une ligne artistique exigeante et le sens du détail. Le grand ménage de printemps porte bien son nom et haut ses couleurs : il suffit de cheminer un instant sous ses étendages chargés de linge bigarré pour se sentir happé par un appel d’air frais. L’édition 2016, plus encore que la précédente, a attiré un public nombreux, venu parfois de loin voir une série de spectacles triés sur le volet. En raison d’un mistral terrible, certaines représentations ont dû être déplacées, mais les visiteurs, résistant vaillamment aux graines de platane soulevées par les rafales, ont suivi chaque proposition avec un plaisir non dissimulé. Aux grands noms du théâtre de rue, Générik Vapeur ou les 2,6 Couverts, répondaient des formes plus intimes, mais pas moins intenses. On pense à la performance de Nadège

Le Collectif Microfocus © Gaëlle Cloarec

Prugnard, venue avec Alcool livrer les affres de l’addiction à des spectateurs médusés, parfois touchés aux larmes. On pense aussi à la création nationale de Oui, du Collectif Microfocus, une très jolie déambulation entre danse, cirque et théâtre. Morgane Widmer et Jérémie Halter, mis en scène par Sébastian Lazennec -dont on avait tant aimé au printemps 2015 le spectacle Mon grand oncle (lire sur journalzibeline.fr), et dont on reconnaît l’excellent travail pétri d’humanité- forment un couple amoureux, de la rencontre à la vieillesse, émouvant et sensible. De l’émotion, donc, mais aussi de belles tranches de rire, avec Ma vie de grenier des Carnage Productions : écouter Gaëtan

Lecroteux dégommer Boucle d’or et ses ours soupivores tout en tentant de vendre un jokari wifi, rien de tel pour repartir au terme du week-end avec une énergie décuplée. On attend déjà avec impatience le Grand ménage de l’année prochaine ! GAËLLE CLOAREC

Retrouvez l’interview de Nadège Prugnard sur la Webradio Zibeline : l’artiste y évoque la jungle de Calais, où elle séjourne régulièrement auprès des migrants, dans le cadre d’un travail d’écriture commandé par le metteur en scène Guy Alloucherie

Le grand ménage de printemps a eu lieu à Cucuron du 21 au 24 avril

à portée chœur remet le politique au cœur du théâtre : il représente le peuple, victime indistincte de la violence de ceux qui le gouvernent, et agissent en tyrans ; il est créolisé, parce que les « choristes » au sens antique portent les visages, les corps, les cultures de la diversité de la société française ; il est global, parce que la musique, le texte, les mouvements, sont portés par tous, ensemble, dans une conception nouvelle, et pourtant aboutie, de l’art de la scène. Et que du coup cet Agamemnon nous parle de nos familles, de l’oppression, de la sauvagerie, et de la possibilité d’écrire ensemble, pour tous, un art nouveau. © Christophe Raynaud de Lage

Depuis 2014 ce véritable opéra tourne sur les scènes et rassemble des publics très divers, de l’adepte du hip hop à celui du théâtre classique. Et chacun y trouve son compte, parce que les acteurs, les chanteurs, les beatboxers sont excellents, et que la musique rythme les déplacements, les textes, les chœurs. Le slam pour dire des vers ? Les percussions corporelles pour ponctuer la déclamation, et servir de seul décor sonore ? Un peu de danse hip hop, dans l’émotion jamais démonstrative, pour dire la tourmente des corps ? Le spectacle, rodé, étonne par sa pertinence, et la perfection des mouvements de groupes, des mélodies à plusieurs voix soufflées aux micros. Parfois le texte commence, seul, peu à peu rythmé, il se slame, se jette, se chante, devient matière sonore, et restitue toute la poésie violente des images. Mais la justesse du spectacle n’est pas seulement esthétique. Cette conception du

AGNÈS FRESCHEL

Agamemnon a été joué le 21 avril aux Salins, à Martigues


34 critiques

spectacles

Transhumance enfantine ans la ligne 1 du tramway montpelliérain, la transhumance commence. Des petits garçons, des petites filles, courent et jouent dans la rame. Dans le parc du Domaine d’O, le mouvement prend de l’ampleur et on mesure l’importance de l’événement. Comme chaque année en mai, des nuées de parents souriants, bras arrimés à la poussette, regard tendu vers le plus grand qui gambade devant, arpentent les allées du parc et se perdent dans la « Forêt magique ». La 19e édition du Festival de théâtre pour jeune public célèbre cette année l’univers du conte. Les récits traditionnels, mais revisités et parfumés au goût d’aujourd’hui. Il n’empêche que des fées coiffées de diadèmes, des jeunes chevaliers armés d’épées nous rappellent, déguisements à l’appui, les fondamentaux des histoires qui se jouent ici ce week-end de l’Ascension. Au programme, quinze spectacles pour un public de 2 à 9 ans, deux « déambulations », un bal et cinq espaces proposant 25 activités. On se maquille, on recompose les contes, on écoute des histoires d’animaux disparus, on joue à se faire peur, on découvre des parcours dessinés par les enfants de centres de loisirs, d’écoles, on élabore des potions magiques, des bébés arpentent des maisons sensorielles à leur taille… Une ambiance de kermesse règne au Domaine. Les cloches de la Cie Les Clarines donnent

© Anna Zisman

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le ton. Les quatre artistes font jouer à leurs 16 cloches (empruntées aux cous des vaches de leur Savoie d’origine) des airs populaires. Une file de curieux les suit, jusqu’aux gradins montés pour le spectacle de la Cie Mine de rien : Cendrillon mène le bal. Joane Reymond tient bien son public. Les enfants, mais aussi les parents. Les personnages du conte sont choisis parmi les spectateurs. « moi ! moi ! » supplient les petites filles pour jouer Cendrillon. Mais non, c’est une femme « en âge de se marier » qui devra jouer le rôle. Le public, bon public, se prête au jeu. C’est en effet le principe de cette édition de Saperlipopette : autant les artistes que

les enfants, largement mis à contribution, enchantent le lieu. Tant que cela ne trahit pas une baisse de budget, la fête est réussie. ANNA ZISMAN

Le festival Saperlipopette a eu lieu les 7 et 8 mai au domaine départemental d’O, à Montpellier

à venir Saperlipopette, en voyage dans l’Hérault jusqu’au 29 mai herault.fr

Dialogues d’espèces O

sirènes de paquebots, ramènent à l’imaginaire d’un Ellis Island. Les huit artistes ont perdu quelque chose, ils attendent la suite. © Arthur Bramao

n nous explique que ça commence, là, maintenant. Aller s’asseoir sur les gradins, c’est en effet déjà plonger au cœur du spectacle Bestias, dernière création de la Cie Baro d’evel cirk. Dans les dédales du chapiteau installé ce soir à Frontignan, on a l’oppressante sensation de tourner en rond ; il se passe quelque chose, c’est certain, mais quoi ? Et voilà, c’est donc ça : deux ombres géantes, animales, mangent l’espace. Ils sont derrière la toile, ils tournent en rond, eux aussi. Odeur, chaleur des chevaux -des bêtes. Allées et venues, entrées, sorties, mouvement pendulaire, le rythme du spectacle dialogue avec la scénographie : la piste, deux ouvertures qui se font face, et une cursive, cadran de l’horloge qui bat la mesure de la représentation. Les langues qui se mélangent (espagnol, anglais, français, cheval, oiseau), les costumes désuets, la sonorisation de mégaphones, de

Ils cherchent autant qu’ils s’échappent. Ils se découvrent et se perdent. Chevaux et oiseaux sont dressés à faire comme s’ils ne l’étaient pas. Humains et animaux se mêlent et s’adaptent, complices dans cette quête d’une suite à donner, d’une vie à réinventer. Beaucoup de poésie. Des scènes très drôles aussi. De la danse, du chant, des acrobaties qui suspendent la fuite du temps. Et ce moment, magnifique, où chacun ploie au sol, inlassablement relevé par le seul resté vaillant, toujours retombant. Finalement ils parviennent à tenir debout, et celui qui les avait aidés se laisse gagner par cette langueur, libératrice : « ah ! ça fait du bien ! » A.Z.

Bestias a été donné du 10 au 13 mai à la scène nationale de Sète


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Once upon a time…

«

…A couple, and a very bad situation. » And, finally, a very good theatre show ! On pourrait ainsi être tenté de poursuivre l’exercice de style tordant donné par ce duo tout à fait inimitable composé par Agnès Limbos et le trompettiste Gregory Houben, en racontant l’admirable tour de piste qu’ils ont livré, exclusivement en anglais (niveau 6e, on vous rassure) dans Ressacs. Mais le talent, et la délicieuse poésie, avec lequel ils mettent à distance leurs personnages est unique, et leur appartient ! Accueillis au Théâtre des Doms en partenariat avec le Vélo Théâtre et La Garance, assis à une table, ces deux figures clownesques de la compagnie belge Gare Centrale, comédiens de haut vol, manipulateurs géniaux d’objets incongrus, ont tout perdu. Pavillon, voiture à crédit (rouge, cela va de soi), jardin (« with so mar-ve-lous ro-ses ») et fringues. Un vrai naufrage. Ne reste plus que le chien, et les mouettes qui tournoient autour de leur tête, avec « cadeau » en prime lâché (sauvagement) sur le crâne ! De petites chansons absurdes et entêtantes façon Philippe Katerine en dialogues à peine moins dérisoires que l’inoubliable « Brian is in the kitchen » de notre enfance, ils nous embarquent dans un hilarant gospel à

se refait pas ! Un couple ubuesque à souhait qui renait de ses cendres et joue à la roulette pour une vie meilleure. Et passe du tragique au comique, et de la fable au politique, en un tour de caravelle ! And they lived happily and had many children ? DELPHINE MICHELANGELI

© Alice Piemme

la recherche d’une reconstruction sociale… Quand il n’y a plus rien, l’imagination reste le meilleur des pouvoirs ! Tout en agrémentant leur aventure d’ustensiles burlesques et désopilants, ils s’inventent des petits chemins de traverse vers la mer et le soleil, tant qu’à faire, deviennent d’adorables robinsons en terre exotique, d’ingénieux empereurs sur île déserte… et d’infâmes capitalistes colonisateurs après avoir découvert des ressources naturelles à exploiter. Et oui, l’homme ne

Agnès Limbos est invitée au 70e Festival d’Avignon, du 12 au 14 juillet, dans le cadre du programme XS

Ressacs a été joué au Théâtre des Doms, à Avignon, le 12 mai

Tous des salauds ?!

© Christophe Raynaud De Lage

peuple. L’un est légèrement blessé au nez, l’autre est un prince à figure de clown. Tous deux sont broyés par la vie, mais pas pour les mêmes raisons. Il n’y a pas vraiment de début ni de fin et l’histoire se tricote par bribes : le récit a des trous de mémoire et leurs souvenirs ont du mal à s’accorder. Dans un phrasé très lent, une diction posée, le prince tente vainement de faire ami-ami avec ce (presque) inconnu… L’autre, au contraire, agacé et agressif, veut en finir au plus vite avec cette conversation car le prince d’Écosse (ou d’ailleurs ?) n’a aucune idée de la violence du monde tandis que lui a les pieds dedans. Et plus la réalité devient confuse, plus leur dialogue est noueux et la parole crue : il est question de meurtres, de royaume, de balles perdues, de délation, de suspicion, de privation… L’histoire se dessine en creux comme

L

e prince séquestré est une parenthèse théâtrale subjective. Sa forme est minimaliste : un lampadaire, une palissade en mauvais état, les clameurs d’une révolte ; sa narration classique : un dialogue. Pourtant la pièce ne ressemble à aucune autre malgré ses accents beckettiens. Deux hommes sortis de nulle part -François Cervantes et Hassan El Geretly, fondateur de la troupe El Warsha au Caire- se rencontrent sur un banc, à l’abri de la colère du

si le metteur en scène préférait exposer à notre regard le négatif de la photo. On saura simplement que ce sont de pauvres types, des salauds, un prince de rien du tout. Pas même d’Écosse ! On saura que la révolution brouille les frontières entre le mal et le bien. Car qui faut-il croire ? Quelle est la vérité ? Le prince est-il amnésique ? Le clown est-il malade ? Ou menteur ? Est-ce pure affabulation ? Le prince séquestré est le fruit d’une rencontre et d’une amitié offertes en partage sur le plateau. Durant deux ans, François Cervantes a accompagné Hassan El Geretly dans son chemin vers le clown. Un long processus d’écriture, de travail du corps et de questionnements… Et une sincérité palpable. Sans doute la raison de cette singularité indéfinissable. MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Le prince séquestré a été joué les 12 et 13 mai au Liberté, scène nationale de Toulon dans le cadre de Rendez-vous en méditerranée : L’Égypte


36 critiques

spectacles

Happy Birthday ! ette année fête les trente ans des Ballets de Monte Carlo. À cette occasion, Jirí Kylián offre un programme anniversaire complet (une rareté !) à la troupe à laquelle le lie un long compagnonnage et une solide amitié. Quatre pièces permettaient d’approcher l’écriture subtile du grand chorégraphe tchèque. Alors que le public s’installe, les danseurs aiguisent leurs pas ; deux blocs, à l’instar de ces presse-papiers transparents qui emprisonnent dans leur masse des silhouettes, suspendus au-dessus de la scène, contiennent l’un une femme, l’autre un homme, esquisse d’une statuaire qui renvoie aux mythes fondateurs de la création, renouant avec les plafonds célèbres de Michel Ange. La métaphore baroque se poursuit avec Bella Figura, sur des musiques de Torelli, Vivaldi, Pergolèse, et, prise dans les drapés du rideau, une danseuse qui émerge, se débat, se love dans les replis de toile, vivante Galatée, fine comme un Bernin. La pièce arpente les arcanes de la scène, joue de ses mécanismes et les transmue en magique beauté. Les corps s’éprouvent, se découvrent, se font marionnettes, aux évolutions parfaites, guidées par d’invisibles fils. L’espace épouse les variations, se réduit à la forme de petits castelets, puis reprend de l’ampleur. Les pantins acquièrent une âme… Trois couples de solistes, en duos, trios ou quatuors, explorent les déchirures et les émois du sentiment amoureux, glissent hors de scène, comme le feraient des songes un moment incarnés. Au cœur de ces apparitions, une scène d’ensemble, les danseurs, torse nu

Bella Figura © Javier del Real

C

et longue jupe rouge, dessinent une danse éblouissante et énigmatique semblable à un rituel initiatique. Gods and Dogs explore les limites entre normalité et démence. Une bougie tremble sur le devant de la scène, lampe de Diogène qui invite à la quête, de soi, des autres, des codes qui nous déterminent, entre envol spirituel et animalité, glissements et grammaire classique, lumière crue et fond de scène moiré, réalité des êtres et ombre animale que la vidéo fait entrer… Après les pièces « sérieuses », la deuxième partie se permet de délicieuses frivolités : Oskar, court métrage sur Cream de Prince, où l’on voit dans une fantaisie malicieuse avec une esthétique sautillante de

film muet, les complices Jean-Christophe Maillot et Bernice Coppieters… un jeu avec l’image, le gâteau d’anniversaire, qui devient le siège du chorégraphe, empli d’humour et d’espièglerie. Mythique ! Chapeau, créé en 2005 pour le 25e anniversaire de Béatrix de Hollande s’enchaîne naturellement à cet intermède, offrant aux Ballets sa fougue… la réplique de 50 chapeaux de la reine et un irrésistible détournement des codes… Juvénile et jubilatoire ! MARYVONNE COLOMBANI

Spectacle donné du 28 avril au 1er mai au Grimaldi Forum, Monte-Carlo

Variations sur… old d’Emanuel Gat mêle pour cinq danseurs les Variations Goldberg de Bach, interprétées par Glenn Gould, et des extraits de l’émission radio expérimentale de l’artiste, Quiet in the land, troisième volet de Solitude Trilogy (1977) qui évoque la communauté Mennonite près de Rivière Rouge. Les mots

et les sons composent un environnement poétique particulier, empli d’une atmosphère onirique dense, au cœur de laquelle éclot le geste, la conjugaison des genres, des êtres, qui se découvrent, se quittent, s’assemblent, choisissent leur voie propre. La construction contrapuntique des variations avec ses lignes mélodiques distinctes qui se superposent, se retrouve dans les variations des danseurs, avec des thèmes récurrents, un ressassement subtil, une polyphonie des gestes. Le public réparti sur deux côtés de la scène du grand studio du Pavillon Noir, voit tour à tour les phrases chorégraphiques de dos puis de face. Cette fugue énigmatique explore le monde des possibles en inventoriant © Emanuel Gat Dance

G

la multiplicité des combinaisons imaginables. Lenteur des débuts, accélérations soudaines, effarements, écoutes, observations… L’autre devient la mesure de soi, dans une réciprocité empreinte de liberté. Les corps sont alors des instruments qui suivent de complexes partitions. La proximité avec l’assistance ajoute la dimension de l’intime à ce spectacle travaillé, perçu inégalement. Les spectateurs sortent envoûtés ou perplexes, reconnaissant tous la qualité de cette démarche qui cherche à transmettre par la vertu des mouvements une approche conceptuelle des rapports sociaux. M.C.

Gold a été donné les 2, 3 et 4 mai au Pavillon Noir, Aix-en-Provence


37

Les Musiques à voir... et entendre ! R

Le Stéréoscope des solitaires © Agathe Dufourt

endez-vous printanier fixé par le Centre National de Création Musicale aux amateurs de nouveautés sonores, Les Musiques a vécu un beau week-end d’ouverture à la Criée, l’Opéra de Marseille, la Fondation Camargo de Cassis...

Airmachine 1 Dès le hall d’entrée de la Criée, l’œil est attiré par les insolites « machines à air » d’Ondřej Adámek : un orgue respirant, alimenté par un système complexe de robinetterie géré par ordinateur. Le compositeur fait entendre ses flûtes à coulisse en glissandos, tuyaux d’électricien, sonneries polyphoniques, langues de belle-mère… ou un canard gonflable livrant son dernier souffle. Burlesque !

Le Stéréoscope des Solitaires En file indienne un public curieux découvre l’opus d’Ana Maria Rodriguez, mis en scène par Ingrid von Wantoch Rekowski, inspiré du recueil de nouvelles, fantaisiste et absurde de Juan Rodolfo Wilcock. De drôles d’individus un peu dérangés nous accompagnent. Entrée par le fond de scène… déambulation ! Une danseuse en tailleur effectue quelque mystérieux pas autour d’un fil de laine rouge. Sur le plateau, on traverse un dédale de boîtes à chaussures au dessus duquel sont perchés des musiciens/animaux (Ensemble KNM)… Une fois installé dans la salle, s’ouvre à nos yeux un étrange panorama, et à l’oreille une matière sonore hypnotique : un théâtre musical gentiment déraisonnable !

Serious smile Le jongleur Jérôme Thomas donne à voir ce que les musiciens de l’Ensemble L’Instant donné donnent à entendre, de la macro-forme au détail, dans Del dos principis d’Henry Fourès : on suit les arabesques de ses balles, lancées au fil d’une écriture touffue, pulsée ou pointilliste, tendue ou apaisée… Temazca de Javier Alvarez offre au percussionniste Maxime Echardour l’occasion de s’illustrer dans un dialogue funambulesque et humoristique pour maracas et électroacoustique, quand Serious smile dessine un ballet de bras équipés de capteurs qui façonnent des

sons joués en trompe-oreille par un quatuor développant une matière sonore percutante.

Vox, Nu Piping #2 La cornemuse d’Erwan Keravec est à l’honneur à l’Opéra. Le sonneur virtuose présente un corpus inhabituel d’œuvres signées Bernard Cavanna, aux tournures populaires ou développant une étonnante alchimie avec l’électronique. En compagnie de la soprano Donatienne Michel-Dansac et du baryton Vincent Bouchot, le trio présente des scènes cocasses mises en musique par Oscar Stranoy ou le tragique No time de Jose Manuel Lopez Lopez : de vertigineuses pensées de victimes lors de leur saut dans le vide le 11 septembre 2001. Puissant !

Toh À Cassis un concert devant la baie et la falaise qui s’estompe quand le soir tombe, par trois Percussionistes de Strasbourg... Forcément japonais, et suspendu, le programme aligne, sans pause, 6 pièces de compositeurs différents, jouant de la théâtralité No, de résonances, de répétitions, de pulsions, de silences et de d’accélérations, de peaux frottées, de matière. Plus qu’un programme, c’est un voyage, une traversée de paysages fascinants, par trois solistes exceptionnels... JACQUES ET AGNÈS FRESCHEL

à venir

Les Musiques jusqu’au 22 mai 04 96 20 60 16 gmem.org

Le XXIe siècle à Silvacane L es Rencontres Musicales du XXIe siècle deviennent un nouveau rendez-vous culturel auquel nous convie Roland Hayrabedian, directeur de l’Ensemble Musicatreize, dans l’écrin de l’abbaye de Silvacane. Deux conférences tissent un lien entre passé et avenir. L’une présente, interprétée par Musicatreize, la pièce de Zad Moultaka (que l’on aura le bonheur de retrouver pour l’édition 2017) L’autre rive, dans l’installation du GMEA (Centre National de Création Musicale d’Albi-Tarn) et son étrange gouvernail qui permet de passer d’un lieu à l’autre, afin d’appréhender « l’entre-deux » mystérieux que suggère la mise en scène de l’œuvre qui retrouve ainsi les lieux de sa création (juillet 2011). La seconde

conférence préparait à l’écoute de l’œuvre de Gilbert Amy, Litanies pour Ronchamp, « composite » à l’instar du monument du Corbusier qu’elle célèbre, s’articulant autour des Litanies pour la Vierge de Horstius (XVIIe), de monodies grégoriennes (avec deux chantres), des extraits de l’Ecclésiaste, de la Missa cum jubilo, mais aussi du Quatuor à cordes en la mineur op.132 Adagio Molto de Beethoven… L’Ensemble Musicatreize et l’Ensemble Gustave en donnèrent une interprétation somptueuse ! MARYVONNE COLOMBANI

Les Rencontres ont eu lieu le 15 mai à l’Abbaye de Silvacane, à La Roque d’Anthéron


38 critiques musiques

De Jaïpur aux Saintes-Maries oms, tsiganes, gitans. Voyageurs ou sédentaires. C’est cette grande communauté de cultures aux multiples destins migratoires que la Cité de la Musique de Marseille a voulu mettre en lumière à travers le festival pluridisciplinaire (musique, danse, projections, exposition) Les fils du vent. Un voyage du Rajasthan où tout a commencé jusqu’à la Provence, puisque nous y vivons tous ensemble. Pour une première immersion, une exposition de photographies de Jean-Luc Nail, havrais tombé en amour de la multi-culturalité tsigane. Scènes de vie ou vies de scène, l’objectif sillonne les festivals comme les camps de fortune, en passant par les bazars d’Istanbul. Artistes reconnus et anonymes de talent composent ce tourbillon d’images où se côtoient musique, danse et convivialité. Une même intensité, un même plaisir, une même générosité se dégagent de ce musicien de Urs Karpatz derrière son micro comme de ce guitariste qui n’a comme estrade que le « lino » de sa caravane. Côté concerts, la semaine s’est ouverte avec un plateau sous forme de pont entre

Patrick Delalée © X-D.R

R

les musiques gitanes espagnoles et tsiganes d’Europe centrale, avec deux Provençaux aux manettes : Tchoune Tchanelas et Negrita. Deux voix, deux traditions et un dialogue qui laissent apparaître d’évidentes passerelles. Le spectacle se déclinera en trois parties. La

première, dédiée au flamenco que Tchoune ne limite pas aux guitares et palmas en intégrant piano (avec l’éclectique Martial Paoli) et violon. La deuxième, autour de la chanteuse Negrita, fait la part belle aux rythmes festifs et populaires tsiganes. Amis de longue date, les deux interprètes se retrouvent pour une dernière partie commune, fusionnant les genres et l’histoire de leurs peuples. Rumba, jazz manouche et… alegria communicative pour un final digne d’un tablao entre intimité et communion. Les deux dernières soirées auront permis de remonter aux terres d’origine de ces peuples avec Dhoad, les gitans du Rajasthan pour finir avec une nuit flamenca en compagnies des fleurons de la scène gitane, sélectionnés par maître Tchanelas. THOMAS DALICANTE

Le festival Les fils du vent a eu lieu du 9 au 13 mai, à la Cité de la Musique de Marseille

Le Woodstock de la Provence Verte lacées sous le signe du « Féminin, pluriel », les Joutes Musicales de Printemps de Correns ouvrent la saison des festivals en plein air. L’un des responsables du Centre de création des nouvelles musiques traditionnelles & musiques du monde, Le Chantier, sourit : « Alors que la plupart des festivals comptent 60% d’hommes, Les Joutes ont inversé la proportion, avec 60% de femmes. » Il souligne à quel point Les Joutes sont une synthèse des actions engagées à l’année, selon cinq axes

d’activité : soutien à la création par le biais de résidences (dix créations cette année) ; réflexion, avec la menée d’une table ronde sur les Femmes dans les musiques du monde ; du pôle amateur que l’on retrouve lors des scènes ouvertes ; sensibilisation, avec un travail de fond mené avec les écoles du territoire que l’on retrouve dans le spectacle empli d’une vivifiante énergie de Sayon Bamba ; des concerts enfin, dont les Joutes constituent le point d’orgue. Trente concerts en trois jours pour rendre compte de la foisonnante richesse des « musiques d’essence patrimoniale (qui) sont un peu comme le pouls des cultures présentes sur notre planète » affirme Miqueù Montanaro, conseiller artistique et fondateur des Joutes. On avait le privilège de l’entendre avec l’orchestre de la Cité de la Musique dirigé par Bernard Amrani sur Sayon Bamba © flag’photographie

P

ses Poèmes Cardinaux, qui s’emparent indifféremment des langues de la Méditerranée, Arabe, Italien, Français, Provençal… les flûtes s’accordent au oud, à la cornemuse, au violon, à la harpe, dans un beau syncrétisme, symbole du festival et ses inspirations multiples, parmi lesquelles on pouvait découvrir, illustrant le thème de circonstance du printemps -qui n’est définitivement pas simplement une saison-, Nena Venetsanou aux côtés de Panos Dimitrakopoulos au psaltérion sur des poèmes de grands auteurs grecs mis en musique. Dans cette lignée poétique s’inscrivent Les Dames de la Joliette qui, pour leur premier concert, conquièrent le public par la variété des textes qui évoquent les femmes, de Louise Labé aux mondines, l’inventivité des compositions, la sûreté des rythmes… De quoi vouloir s’installer en Provence Verte ! MARYVONNE COLOMBANI

La 19e édition des Joutes musicales de printemps ont eu lieu du 13 au 15 mai à Correns, dans le Var


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Hors les vignes a rencontré un succès impressionnant, sinon inattendu : plus de 3500 personnes se sont déplacées au Dock des Suds pour ce festival d’un genre nouveau à Marseille

Démocratisation sensorielle

L

a manifestation, festive, s’est déployée grâce au soutien immédiat, dès la première édition, du Conseil Départemental et de la Ville de Marseille à l’organisateur, le syndicat des vins méditerranéens IGP (Indication Géographique Protégée). Il faut dire que le projet, qui alliait une forte dimension artistique aux propositions des chefs de Gourméditerranée et des vignerons du Sud Est, avait de quoi convaincre. Et la journée s’est déroulée dans la bonne humeur, l’ivresse douce provenant autant des bains de saveurs et du partage des savoirs culinaires, que de la multiplicité des propositions artistiques et de verres de vins dispensés avec retenue et pertinence. Dès l’entrée des installations, photographies, sculptures, tableaux, tables déstructurées et humoristiques, qui donnaient un côté baroque et coloré à ce lieu industriel. Dans le Cabaret un kiosque électronique en verre, où des musiciens, des conteurs viennent s’assoir, qu’on écoute en chaussant des casques... Partout des chefs s’agitent au son de platines complices, des commandos poétiques soufflent leurs mots à vos oreilles, la Banda du Dock ou Manu Théron donnent du rythme et de la voix... Dans la Salle des Sucres, les trios performent : 9 chefs successifs préparent pour l’assistance,

nombreuse, un petit plat raffiné. En 30 minutes chacun ils dévoilent et exécutent leur recettes, et leurs plats sont servis à tous, avec un verre du vin sélectionné par les 9 vignerons présents... Bref cela pourrait ressembler à Top chef, sauf que l’on mange vraiment ! Et la cuisine est un art pourvu qu’on puisse y goûter... Décrire les saveurs associées est aussi frustrant que de regarder la cuisine à la télé, mais sachez que chacun des plats fut surprenant, délicieux, différent, associant croquant et fondant, force et douceur, acidité et acidulé, faisant de chaque bouchée une expérience sensorielle... un exploit quand on pense au nombre des convives et au caractère éphémère de la cuisine ! Les performances scéniques des trios, quant à elles, furent inégales : Jean-François Bérard fut impressionnant dans ses explications, simplement offertes comme autant de secrets, tandis que Benjamin Carbonne derrière lui exécutait en direct son portait en peinture blanche sur fond noir, avec quelques touches de tomate et de jaune d’œuf... Mais le service, intervenu trop tôt, un mixer qui ne démarrait pas, une animatrice trop bavarde donnèrent à ce premier trio trop de fébrilité. Au cours de la journée cela se cala, et on put assister au discours militant d’Emmanuel Perrodin,

mieux observer, grâce à une captation en direct de leurs mains, la minutie de Christian Ernst et l’inventivité de Roland Schembri. Les performances artistiques pourront sans doute être mieux adaptées au format des 30 minutes en direct : Pascale Robert fut envahissante, l’esprit potache de l’artiste Tabas prit trop le pas sur la dégustation de la salade de lentille, pourtant hautement symbolique, de Lionel Lévy, d’autres furent trop discrets. Noémie Boutin, violoncelliste invitée à jouer du Bach pendant que l’on dégustait le plat de Perrodin, fut parfaite ! La musique, la grande cuisine et de très bons vins ? Un plaisir combiné réservé autrefois à l’aristocratie, et que ce festival Hors les Vignes a su offrir à tous, pour un prix d’entrée plus que modeste (10 €). Une démocratisation sensorielle qui a su intéresser un public très varié, et s’est gardée de se transformer en foire : organisé par Intervins Sud Est, Hors les Vignes faisait goûter mais ne vendait pas de bouteilles... AGNÈS FRESCHEL

Hors les Vignes s’est déroulé le 23 avril au Dock des Suds, Marseille Installation de Tabas © X-D.R


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42 au programme musiques marseille

bouches-du-rhône

vaucluse

Quintette à cordes et clarinette

Carmen

Lors de ses escapades Hors les Murs, l’Opéra de Marseille propose de délicieux concerts. Ainsi, la musique de chambre sera à l’honneur dans l’écrin de l’auditorium des Archives départementales des Bouches-du-Rhône Gaston Deferre pour un voyage de pure poésie avec le Quartettsatz n°12 en do mineur C703 de Franz Schubert, l’Adagio pour clarinette et cordes de Heinrich Joseph Baermann, et le Quintette op.115 en si mineur pour clarinette et cordes de Johannes Brahms, le tout par des interprètes d’exception, Benoît Salmon et Gérard Mortier aux violons, Magali Demesse à l’alto, Xavier Chatillon au violoncelle et Valentin Favre à la clarinette. Entrée libre sur réservation.

Les mousquetaires au couvent

04 96 12 52 70

30 mai Auditorium des ABD Gaston Deferre, Marseille 04 13 31 82 00 Opéra de Marseille 04 91 55 11 10 opera.marseille.fr

© Richard Martin

Délicieuse opérette en trois actes de Louis Varney, basée sur un vaudeville d’Amable de Saint-Hilaire et Duport (1835), L’habit ne fait pas le moine, Les Mousquetaires au couvent mènent deux mousquetaires déguisés en religieux dans un couvent pour enlever leur belle. Ce qui donne lieu à maintes joyeuses confusions, sur une partition alerte et exigeante dans une mise en scène de Jack Gervais et la direction musicale de Bruno Membrey.

Opéra le plus joué au monde, Carmen sera jouée au Dôme dans le cadre du nouveau projet mené par la Fabrique Opéra Marseille Provence, sous la direction de Jacques Chalmeau, dans une mise en scène de Richard Martin. Le chef d’orchestre a choisi la version originelle de l’œuvre, un opéra-comique, succession de textes et de musiques. Richard Martin transpose la manufacture de tabac sévillane au quartier de la Belle de Mai, tissant ainsi des liens entre la belle cigarière de Bizet, indépendante et fière, et Marseille.

21 & 22 mai Odéon, Marseille culture.marseille.fr

Comme je l’entends Créée en 2009 au Théâtre des Salins, la pièce de Benjamin Dupé, Comme je l’entends, revient enfin, avec son humour, sa délicatesse, dans la maison de la musique contemporaine qu’est le PIC. Celui qui a repris dans une autre œuvre les mots de Pascal Quignard, Les oreilles n’ont pas de paupières, joue des rejets de la musique contemporaine, dite au mieux « étrange », qui refuse à l’auditeur le « confort », mais propose « un espace où l’on s’invente dans l’écoute ». Et c’est très beau !

Agnès Pika © Michele Sainte Beuve

Concert chorégraphié

Depuis la nuit où les sorcières lui ont prédit son accession au trône, au jour de sa chute, alors que la forêt de Birnam avance, Macbeth, jouet de ses ambitions, est secondé, voire précédé par son épouse, la terrifiante et inflexible Lady Macbeth, dans une spirale infernale de crimes atroces. La tragédie de Shakespeare a été portée à l’opéra par Verdi, sur un livret de Francesco Maria Piave et Andrea Maffei. Csilla Boross (Lady Macbeth), Juan Jesus Rodriguez (Macbeth), pour les rôles-titres interprèteront cette partition aux vifs et sombres éclats sous la direction de Pinchas Steinberg aux côtés de l’Orchestre et du Chœur de l’Opéra de Marseille. 7 au 15 juin Opéra de Marseille 04 91 55 11 10 opera.marseille.fr

Benjamin Dupé © Agnès Mellon

© iStock

Macbeth

4 & 6 juin Théâtre Toursky, Marseille 0 820 300 033 toursky.fr

04 91 39 29 13

31 mai PIC, Estaque ensemble-telemaque.com

Dans le cadre de #Openmymed au château Borely, musée des Arts décoratifs et de la Mode, l’Ensemble Des Équilibres et la Cie la Parenthèse conjuguent leur verve de musiciens et de danseurs dans un programme qui nous entraîne de Bach à Schubert en passant sans aucune chronologie, à Kodaly, John Adams, Piazzola et Ravel. Violon (Agnès Pyka), violoncelle (Dimitri Maslennikov), piano (Laurent Wagschal) danseront avec Marie-Eve Carrière, Julie Compans, Charline Peugeot, Alexandre Tondolo sur les chorégraphies de Christophe Garcia. 5 juin Musée Borély, Marseille 06 73 30 23 62 desequilibres.fr


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Didon et Énée

Musiques interdites Le Festival Musiques Interdites reprend sa formule annuelle. C’est dans l’écrin de Saint-Nicolas, première église Melkite au monde des Chrétiens d’Orient, que seront donnés deux concerts dédiés « Aux Hommes de bonne volonté ». Le premier est consacré aux Chants sacrés interdits de Szymanowski, Komitas, Bruch, Tigranin, création interprétée par Armenhui Khachikyan (soprano), Wilfried Tissot (ténor), la clarinette de Daniel Paloyan et le violoncelle d’Odile Gabrielli, ainsi que le piano de Vladik Polionov et l’harmonium de Frédéric Isoletta. On retrouvera ces deux derniers musiciens le lendemain pour Le chant de la Terre de Mahler, dans la version orchestrée par Schoenberg avec Qiulin Zhang (contralto), Luca Lombardo (ténor) et les musiciens de l’Orchestre de l’Opéra de Marseille sous la direction de Victorien Vanoosten (un CD du concert sera produit avec Bel Air Music).

L’opéra baroque de Purcell Didon et Énée, composé sur un livret de Nahum Tate, s’éloigne de la version de l’Énéide virgilienne quant aux raisons qui décident du départ du prince troyen. Si à l’origine c’est sur un ordre de Jupiter que la reine de Carthage est abandonnée, afin que les destins s’accomplissent et que l’ancêtre de Remus et Romulus aborde les rives du Latium, Nahum Tat suscite des sorcières qui souhaitent la chute de la reine. Cette belle partition sera interprétée par les musiciens du conservatoire d’Aubagne, l’ensemble Arccades, sous la direction artistique de Jean-Luc Bonnet, la direction du chœur de Yeomyoung Lim et la mise en scène de Michel Lebert.

Stabat Mater Le bel ensemble chœur et orchestre symphonique toulonnais Amadevs offrira dans l’écrin de l’abbaye du Thoronet la bouleversante partition du Stabat Mater de Pergolèse, écrit pour deux voix, soprano et alto, et un petit ensemble instrumental comprenant violons 1 et 2 alto et basse continue. On aura aussi le privilège de découvrir une création contemporaine de Philippe Raymond-Bailey, chef d’orchestre, fondateur et directeur artistique de l’ensemble Amadevs, et compositeur. Cette pièce nouvelle, intitulée Les Chemins de Saint-Jacques, est conçue comme une messe d’un pèlerin.

1er juin Le Comoedia, Aubagne 04 42 18 19 88 aubagne.fr

Ensemble Al Segno © Yves Colas

11 & 12 juin Saint-Nicolas, Marseille musiques-interdites.eu

22 mai Abbaye du Thoronet amadevs-musique.com

Les dates se multiplient pour le concert évènement de l’Ensemble vocal Philharmonia de Marseille, avec l’Orchestre Sinfonietta, pas moins de cinquante choristes, vingt musiciens et cinq solistes de renommée internationale, les sopranos Lucille Pessey et Muriel Tomao, le haute-contre Alain Aubin, le ténor Jean-Christophe Born et la basse René Linnenbank, sous la direction de Jean-Claude Latil. Cette belle formation donnera à écouter trois Magnificat des compositeurs Georg Philipp Teleman, Laurent Belissen et Jean-Sébastien Bach.

© X-D.R

Magnificat

L’Ensemble vocal Al Segno accompagné par le continuo de la claveciniste Julie Degiovanni, sous la direction de Pascal Denoyer, propose un concert comprenant des œuvres d’Antonio Lotti, Jandismas Zlenka, Benedetta Marcello, Domenico Scarlatti, Antonio Caldara, Antonio Vivaldi à Aix-en-Provence et à Lourmarin, permettant aux spectateurs mélomanes de comparer les acoustiques des différents lieux d’accueil.

22 mai Église Saint Julien, Arles

28 mai Église Saint-Jean-Baptiste, Aix-en-Provence

26 mai Abbaye Saint-Victor, Marseille

29 mai Temple, Lourmarin

28 mai Cathédrale Saint-Sauveur, Aix-en-Provence

5 juin Chapelle des Oblats, Aix-en-Provence 06 12 93 23 08 alsegno.free.fr

2 & 3 juillet Vivario et Bastia, Corse ensemble-philharmonia-marseille.fr

Carmen L’amour est toujours l’oiseau rebelle de Carmen. Liberté envers et contre tout et tous, cartes funestes et goût de la Manzanilla, contrebandiers et brigadiers, toréador, fleur jetée… Chaque terme appelle un air célèbre que l’on retrouvera avec délectation dans une nouvelle production des Chorégies d’Orange, avec la mise en scène de Louis désiré, l’Orchestre Régional Avignon-Provence, le Chœur et la Maîtrise de l’Opéra du Grand Avignon, dirigés par Alain Guibal. Karine Deshayes campera le flamboyant personnage de Carmen, Ludivine Gombert, Micaëla, Florian Laconi, Don José et Christina Helmer, Escamillo. 5 & 7 juin Opéra Grand Avignon, Avignon 04 90 14 26 40 operagrandavignon.fr


44 au programme musiques alpes var gard hérault

Voyage dans l’Italie Baroque

Bruno Le Levreur © Paul Pascal

Le Festival de Chaillol arpente le territoire et, grâce à ses week-ends musicaux, permet aux lieux les plus éloignés l’accès à des concerts d’une grande qualité. Ainsi, après un concert à l’Institut du Monde Arabe à Paris et une tournée en Palestine, le Trio Sabil glisse son répertoire aux rythmiques atypiques, aux échelles musicales orientales (les maqâms), aux improvisations inspirées dans les églises de Laragne, La Rochette, Tallard, Les Costes. Le compositeur Ahmad Al-Khatib, le contrebassiste Hubert Dupont, le percussionniste Youssef Hbeisch sont bouleversants de justesse et de sobriété.

L’Orchestre de Nîmes, l’Ensemble Colla Parte et le Chœur du Conservatoire de Nîmes, menés par la chef de chœur Laura Céleski, nous entraînent dans un voyage au cœur de la musique italienne de l’époque baroque. On croisera des œuvres de Pietro Antonio Locatelli (Introduttione teatrale IV, Concerto Grosso n°8), Nicola Porpora (Alto Giove, l’air de Polifemo, Acte III), Antonio Vivaldi (Nisi Dominus, La Stravaganza, Filiae Maestae Jerusalem, Gloria), profanes et sacrées, portées par le soliste Bruno Le Levreur, contre-ténor et le premier violon solo Silvio Failla.

© Ultrabolic

Royal Palace/Il Tabarro

Récital Julie Fuchs

26 au 29 mai Laragne, La Rochette, Tallard, Les Costes festivaldechaillol.com

Retrouver lors d’un même concert deux musiciens aussi exceptionnels que la violoniste Simone Lamsma et le chef d’orchestre Jean-Christophe Spinosi est un bonheur en soi. Ils interprèteront avec l’Orchestre Symphonique de l’Opéra de Toulon l’Ouverture de l’unique ballet de Beethoven, Les Créatures de Prométhée et sa Symphonie N°1 en ut majeur op. 21. Enfin, le Concerto pour violon en ré majeur, op. 77 de Brahms offrira à la virtuosité de la jeune violoniste l’une des partitions solistes les plus difficiles et des plus enthousiasmantes ! 27 mai Opéra de Toulon, Toulon 04 94 93 03 76 operadetoulon.fr

© X-D.R.

Le pianiste virtuose Alphonse Cemin et la soprano Julie Fuchs, dont il est devenu le partenaire privilégié, tous deux lauréats HSBC de l’Académie du Festival d’Aix, offrent un récital tout en finesse consacré à la mélodie française : celle des Roses d’Ispahan de Gabriel Fauré, du Clair de lune de Debussy, des Fiançailles pour rire de Francis Poulenc… Poésies délicates accordées aux volutes de mélodies suaves, mais aussi piques subtiles, temps suspendu aux effets d’une note… Une escapade en fin de concert goûte aux accents teintés de jazz de Cole Porter. 30 mai Opéra Comédie, Montpellier 04 67 601 999 opera-orchestre-montpellier.fr

Le Petit Opéra d’Opéra Junior interprètera deux pièces délicieusement alertes. Une Cantate pour voix d’enfants écrite par le chef de chœur et compositeur Manuel Coley, s’inspire de la Chauve-souris de Desnos (où va le masque après le bal ?) et de la fable de La Fontaine La Chauve-souris et les deux belettes. Où l’oiseau-souris garde la vie sauve arguant être souris ou oiseau selon les haines de l’un ou de l’autre de ses prédateurs… Puis les Chantefables de Jean Wiener et Yvon Bourrel inspirées du recueil de Desnos, évoquent avec un humour fantasque trente animaux… dans une mise en scène de Marc Pastor et la direction musicale de Caroline Comola. 9 & 10 juin Théâtre La Vignette, Montpellier 04 67 14 55 98 opera-orchestre-montpellier.fr

21 mai Théâtre Bernadette Lafont, Nîmes 04 66 36 65 10 theatredenimes.com

Simone Lamsma et Jean-Christophe Spinosi

Cantate et Chantefable

Royal Palace de Kurt Weill est un opéra en un acte dont l’inspiration est liée aux musiques de danse, contemporaines du compositeur. Il y a dans cette partition reconstituée (par Gunther Schuller) un irrésistible parfum de Broadway… Suit un autre opéra en un acte, beaucoup plus sombre, Il Tabarro de Puccini qui se situe dans le courant vériste. Michele, patron d’une péniche, fait travailler des débardeurs. L’un d’entre eux, Luigi, est l’amant de Giorgetta, la femme de Michele. La jalousie et l’avidité tissent la trame de la tragédie… Rani Calderon dirige l’Orchestre national Montpellier Languedoc-Roussillon et le chœur Opéra national Montpellier Languedoc-Roussillon (dont le chef est Noëlle Gény). Le Chœur Opéra Junior (dirigé par Vincent Recolin) rejoindra l’ensemble pour Il Tabarro.

Kelebogile Besong © X-D.R

Trio Sabil

10 au 16 juin Opéra Comédie, Montpellier 04 67 601 999 opera-orchestre-montpellier.fr


marseille

bouches-du-rhône

Carte blanche à Leda Atomica Le Lenche donne carte blanche à Leda Atomica Musique ! Au menu, Les Voix citoyennes, spectacle créé pour deux alti, Alain Aubin et Marie Démon, dont le ton oscille entre Tintin et Tout l’univers, avec un répertoire qui va de Dalida à Purcell, de Ramona à Verdi (le 24 mai) ; un ciné-concert avec dix films courts qui servent de prétexte aux improvisations de Phil et Tom Spectrum à la musique et Marie Démon au chant et à la narration (les 26 et 27 mai) ; et une soirée surprise au cours de laquelle Phil Spectrum invite le poète et performer Pierre Guéry, mais aussi Jean Sallier Dolette, Marie Démon, Danielle Stéfan et Clis Gaul (le 28 mai).

© Emile Holba

Shadi Fathi © Muriel Despiau

Guillaume Perret, saxophoniste trentenaire, réinvente depuis quelques années le jazz métal sur toutes les plus grandes scènes internationales. Il forme avec son groupe The Electric Epic, complété par Nenad Gajin à la guitare électrique, Laurent David à la basse électrique et Yoann Serra à la batterie, un groupe de jazz fusion contemporain qui se revendique volontiers du rock progressif des années 70, tout en flirtant avec le métal ou le groove funky. Jubilatoire ! Alain Aubin et Marie Démon © X-D.R.

L’Ensemble vocal Irini invite à la découverte de la diversité et de la richesse musicale du culte marial en Méditerranée, dans un programme qui présente des chants orthodoxes grecs, libanais, syriaques, chypriotes, des extraits du Livre Vermeil de Montserrat (XIVe siècle) et des Laudes italiennes du XIIIe siècle (le 3 juin). Le 10 juin, la musique traditionnelle persane envahira l’auditorium avec Shadi Fathi au setar et au shouranguiz (luths iraniens) et Bijan Chemirani aux percussions. Les deux artistes, qui habitent à Marseille, unissent leurs univers pour faire se rencontrer la poésie, la mélodie et le rythme. 3 & 10 juin Cité de la musique, Marseille 04 91 39 28 28 citemusique-marseille.com

Fiesta cubanisima

20 mai Les Salins, Martigues 04 42 49 02 00 les-salins.net

Virginie Teychené quartet

24, 26, 27 & 28 mai Le Lenche, Marseille 04 91 91 52 22 theatredelenche.info

On air Pour la 4e année consécutive, La Friche et les Grandes Tables proposent les soirées On air chaque vendredi et samedi soir de l’été, du 3 juin au 27 août. Sur le toit-terrasse, la musique côtoiera des petits mets et des jeux pour tous. Les 3 et 4, l’électro prend le dessus avec Jack Ollins et Massimiliano Pagliara, l’Amateur, Meteor, Oy et Mawimbi. Les 10 et 11 l’électro de Big Oh et At’Lhas se mêleront aux sons africains de Dj Oil, Tony Swarez et Dj Kêtu. Les 17 et 18 DaWad et Hervé AK programmés par le Cabaret Aléatoire précèderont les sonorités électro Shaâbi expérimentales et précolombiennes de Nicolás Cruz, Maurice Louca et Djs Puta ! Puta ! programmées par Les Suds à Arles. Nous reviendrons sur la suite de la programmation au fil de l’été ! 3 & 4, 10 & 11, 17 & 18 juin La Friche, Marseille 04 95 04 95 95 lafriche.org

© X-D.R

Ruben Paz © Serge Miclo

3 juin Espace Julien, Marseille 04 91 24 34 10 espace-julien.com artsetmusiques.com

au programme 45

Guillaume Perret & The Electric Epic

Cité de la musique

Une soirée unique pour découvrir les mystères de la Havane, les couleurs des Caraïbes, et les saveurs de l’Argentine, c’est ce que proposent l’association Arts et Musiques en Provence et l’Espace Julien. Sous la direction musicale de Ruben Paz, plusieurs musiciens latino-américains et français, réunis sous le nom Chévéréfusion, concocteront un cocktail aux sons de rythmes cubains, salsa, conga, timba et chachacha fusionnés avec du funk et du jazz ; l’afro rumba de l’association Yoruba de Cuba en Francia et Dj Lao & Dj Samouraï complèteront l’ambiance !

musiques

Au firmament du jazz vocal français, Virginie Teychené fait figure d’étoile montante. Sa personnalité riche et vibrante s’inscrit dans le droit fil d’une tradition du swing qu’elle complète de ses scats profonds, d’une voix veloutée qui fait vibrer les grooves et qui s’élève dans les aigus sans souci. Elle est accompagnée de ses complices Stéphane Bernard au piano, Gérard Maurin à la contrebasse et Jean-Pierre Arnaud à la batterie. 27 mai Le Sémaphore, Port-de-Bouc 04 42 06 39 39 theatre-semaphore-portdebouc.com


46 au programme

spectacles

marseille bouches-du-rhône

Peer Gynt

Fire Steps

Irina Brook adapte Henrik Ibsen façon rock’n roll, avec une vitalité ébouriffante. Le héros, vantard et séducteur en série, captivé par les mirages de la célébrité, se perd en cours de route. Pour retrouver le sens de sa propre vie, il s’en retourne au pays natal, où l’attend son amour de jeunesse, trop longtemps négligé... Les poèmes de Sam Shepard ponctuent cette pièce jouant des codes de la comédie musicale, et Iggy Pop a écrit deux des chansons qui en composent la bande originale. Spectacle en anglais surtitré.

1er juin Lieux Publics, Marseille 04 91 03 81 28 lieuxpublics.com

4 juin Le Merlan, Marseille 04 91 11 19 20 merlan.org

Les raisons d’un retour au pays natal

© Mémoires vives

Mémoires vivantes

24 & 25 mai Le Merlan, Marseille 04 91 11 19 20 merlan.org

Découvertes dansées

Ma ville ma forêt © Agnès Mellon

27 & 28 mai La Criée, Marseille theatre-la-criee.com

Le directeur artistique de la Cie Mémoires vives, Yan Gilg, met en scène deux hommes échoués sur une plage du sud de la France, au terme d’un périple éprouvant. L’un vient du Sénégal, l’autre des Comores, et tous deux ont rêvé d’une vie meilleure sur le continent européen. Sans papiers, confrontés aux difficultés de l’administration hexagonale, ils vont nouer une forte amitié au gré d’un parcours chaotique, entre couloirs austères et foyers d’immigrés. Tout public à partir de 12 ans.

Taïaut, sus, à l’abordage ! Les écoliers marseillais recrutés par Josette Baïz se joignent aux danseurs de la compagnie Grenade pour une chorégraphie endiablée (Fire Steps signifie « pas enflammés » en anglais). Rendez-vous comme d’habitude, pour la Sirène de juin, sur le Parvis de l’Opéra de Marseille, à midi pile, le 1er mercredi du mois : le cocktail techno-rock concocté par la troupe s’annonce détonnant !

© Cie Itinérrances

04 91 54 70 54

Christine Fricker affirme sa volonté de « s’adresser à des publics peu familiers avec l’art chorégraphique ». En une quarantaine de minutes, elle favorise la rencontre entre les générations : deux jeunes danseurs, Archibald et Mermoz Melchior, évoluent sur scène avec des adultes, Julien Dégrémont et Anthony Deroche. Un dialogue entre l’amateur et le professionnel, l’expérience et le noviciat, l’enfance et la maturité. Ce projet a reçu le soutien de la Fondation de France.

© Léo Ballani

© X-D.R.

Faux pas

Lieux Fictifs a conçu, en partenariat avec l’Université Aix-Marseille et le laboratoire le Lesa, une conférence accompagnée d’une programmation artistique collaborative, pour dresser le bilan de 3 années de coopération européenne sur le projet In living memory. Artistes et chercheurs ont travaillé sur la réappropriation de l’histoire collective, avec différents publics, à partir d’images d’archives. La Travessia, spectacle de théâtre mis en scène par Thomas Louvat, et une performance chorégraphique dirigée par Thierry Thieû Niang, ponctueront les échanges. Entrée libre sur inscription : 04 95 04 96 37 inlivingmemory.eu. 2 & 3 juin La Friche, Marseille 04 95 04 95 95 lafriche.org

La Maison pour la danse de Michel Kelemenis propose plusieurs Découvertes dansées d’une trentaine de minutes chacune. Le 24 mai, Le temps d’Éducadanse, avec les élèves du collège Henri Wallon, Emportés, une chorégraphie de Thomas Lebrun interprétée par les danseurs de la formation professionnelle Coline, ainsi que A New Wild Blossom, proposition de Fabrice Ramalingom avec les élèves de la même promotion. Le 3 juin, Chéries, Chéris rassemblera enfants et seniors du quartier pour de petites formes partagées en scène. Le temps d’Éducadanse Emportés A New Wild Blossom 24 mai Chéries, Chéris 3 juin Klap, Marseille 04 96 11 11 20 kelemenis.fr


Après tout Le spectacle de Corinne Pontana, créé le 9 octobre 2015 dans le cadre de Question de danse au KLAP (Maison pour la danse), est un solo composé autour de trois objets, signes d’une présence humaine disparue et réinventée par la danse. Le sens perdu se retrouve entre le passé mort et l’incertitude de l’avenir, de ce qui aurait pu être. La danseuse et chorégraphe nourrit son propos de l’histoire de l’unique survivante de la population indienne de l’île de San Nicolas, qui survécut 18 ans dans la solitude la plus complète. L’accompagnent les mots et les compositions de François Bouteau et les lumières de Xavier Longo.

© X-D.R

26 & 27 mai Marseille Objectif danse, Marseille 04 95 04 96 42 marseille-objectif-danse.org

Les deux du stade Le sport dans sa médiatisation donne à voir l’exploit, des corps sculptés, un ensemble codifié qui vise à la performance. Le duo clownesque formé par Wonder Susie, archétype de l’antisportive, et Super Biscotte qui au-delà des muscles a une part bien féminine, se lance dans un triathlon intercommunal et interdisciplinaire « in terre with eau » peu habituel. Trois épreuves font passer ces « athlètes » hors norme de la compagnie BICEPsuelle entre l’art du cirque, du sport et de la réflexion, avec une belle verve jubilatoire. 25 mai Stade de Fontblanche, Vitrolles 04 42 02 46 50 vitrolles13.fr

Rocco

27 mai Salle Guy Obino, Vitrolles 04 42 02 46 50 vitrolles13.fr

© Alwin Poiana

Entre le cinéma et la boxe, Visconti et le boxeur Mohamed Ali, Emio Greco et Pieter C. Sholten composent une chorégraphie virtuose où quatre danseurs s’affrontent multipliant les rounds, danseurs devenus boxeurs, boxeurs se métamorphosant en danseurs… Les écritures se mêlent, inventives, jouent de la parodie, font des clins d’œil au septième art, invoquent les figures de Dalida ou d’Alain Delon. Légèreté et violence s’allient, déclinent force et douceur, confondues parfois en de superbes élans.


48 au programme spectacles Bouches-du-rhône var

Dites à ma mère

À l’envers

Dans le cadre du dispositif TRIDANSE, le Collectif État d’Urgence présentera une étape de travail lors de sa résidence de création pour le spectacle Dites à ma mère que je suis là. Le projet cherche à transcrire les données et questionnements scientifiques d’Amanda Da Silva, chercheuse en migrations internationales. Une conférence le 14 juin interroge « Comment construisons-nous les frontières ?. Une étude sur la sécurisation et l’immigration en Europe », et précède le spectacle (17 juin) qui unit danseurs et circassiens dans une esthétique de confrontation et de partage.

Le jour du grand jour

17 juin 3bisf, Aix-en-Provence 04 42 16 17 75 3bisf.com

© Vincent Bouvier

Le théâtre des Salins fait une escapade place des Aires (Martigues) pour un spectacle du Théâtre Dromesko, Le jour du grand jour, qui décrit comme un « impromptu nuptial et turlututu funèbre ». Sont évoquées les cérémonies qui sont autant de manifestations théâtrales, que ce soit mariage, enterrement, avec leurs costumes, leurs rites, leurs textes plus ou moins convenus. Le public est réparti dans un dispositif bi-frontal dans la petite baraque du Théâtre Dromesko, convive de ces rituels sociaux (attention, à partir de 15 ans).

Magie, mentalisme, alchimie. Voici pour les principaux ingrédients du spectacle de Scorpène. Ajoutez-y un peu d’onirisme et pas mal de mystère, vous obtiendrez un résultat bluffant. À partir de rêves et du langage des oiseaux -cet étrange code utilisé par les alchimistes-, l’illusionniste nous embarque aux frontières de l’inconscient. Dans ce voyage déroutant et fascinant, la réalité devient un concept très flottant...

Avant toutes disparitions

© Fanny Gonin

4 juin La Colonne, Miramas 04 90 50 66 21 scenesetcines.fr 2 juin La Croisée des Arts, Saint-Maximin 04 94 86 18 90 st-maximin.fr

14 au 18 juin Les Salins, Martigues 04 42 49 02 00 theatre-des-salins.fr

Ombul

« Il y a la nécessité de danser » affirme Thomas Lebrun, qui chorégraphie cette pièce pour douze danseurs. Le mouvement est ici exacerbé, explosif, volontaire, avant d’atteindre la sérénité. Esthétique de survie, magnifiée par l’élan, le geste, ardente et pleine avant la toute fin. Thomas Lebrun rassemble ici des interprètes avec lesquels il collabore depuis de nombreuses créations, ainsi que les « danseurs puissants » que sont Odile Azagury et Daniel Larrieu. 27 mai Les Salins, Martigues 04 42 49 02 00 theatre-des-salins.fr

© Philippe Guillot

Dans cette chorégraphie d’Abderzak Houmi, huit danseurs issus d’univers très différents vont créer un contact à la frontière du hip hop et de la danse contemporaine. B-boy, acrobates, danseuse contemporaines… autant de richesses et de diversités qui permettent au chorégraphe de bousculer les codes et de remettre en question la posture du danseur et sa gestuelle.

Le Théâtre Désaccordé invite les tout-petits à une traversée délicate, aérienne, aux confins de l’endormissement et du rêve par le biais de la peinture. En s’appuyant sur les œuvres de Mirò et Calder, cette traversée débute avec un mobile suspendu. Par un jeu malicieux d’ombres et lumières naissent des images en mouvement qui font naître l’étonnement et l’étrange… © Vero Houdre

© Frederic Iovino

Contacts #2

24 mai La Colonne, Miramas 04 90 50 66 21 scenesetcines.fr

04 42 11 01 99

25 mai Théâtre de Fos scenesetcines.fr


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Qui-vive

Viva la revolucion !

Nouveau cirque, magie, prestidigitation et création plastique… l’univers des deux artistes Maxime Delforges et Jérôme Helfenstein fourmille d’inventivité ! Entourés d’objets du quotidien qu’ils font apparaître ou disparaître, ils plongent les spectateurs dans leur monde absurde, instable, où l’illusion est reine. Avec eux le chaos est esthétique, la folie et l’imagination poétiques !

Fin de saison latine et festive à l’Espace Gérard Philippe, avec une soirée incontournable en deux parties. À 18h30, la Cie Méninas jouera La Nuit de la cucaracha : au cours d’une nuit inoubliable, deux jeunes femmes que tout oppose vont être amenées à faire connaissance, en discutant et en interprétant des chants populaires révolutionnaires d’Amérique du Sud. Puis, après un apéritif dînatoire, c’est une chaude deuxième partie de soirée dansée qui vous attend dès 21h !

04 42 11 01 99

4 juin Théâtre de Fos scenesetcines.fr

Maître dans l’art de la magie nouvelle, Thierry Collet, accompagné par l’italien Carmelo Cacciato et le belge Kurt Demey, offre une véritable expérience autour de la manipulation des consciences. « Je ne fais pas de la magie pour endormir les gens, mais pour les réveiller », explique le concepteur du projet. À nous de rester sur notre qui-vive pour déjouer les effets psychologiques, ou plonger dans l’art de l’illusion.

04 42 56 48 48

FLA.CO.MEN

3 juin Espace Gérard Philippe, Port-Saint-Louis 04 42 48 52 31 scenesetcines.fr

3 juin L’Olivier, Istres scenesetcines.fr

Estrans En résidence aux Marais du Vigueirat, le collectif L’Ecumerie présente une sortie de chantier pour présenter sa recherche en cours autour de la fragilité des paysages. Et plus particulièrement sur l’estran (lanière de terre découverte à marée basse et immergée à marée haute), cette frontière qui sépare et relie l’homme à la mer que l’artiste paysagiste Marie Delaite nous invite à observer dans une déambulation poétique. En route pour une promenade dansée et théâtralisée sur le rivage, inspirée par l’attente, l’imaginaire, l’eau, le sable…

Contact #1

© Hugo Gumiel

© Fred Beaubeau

Israel Galvàn, danseur et chorégraphe internationalement reconnu, s’affranchit une fois de plus de tous les codes dans ce spectacle qui « résume sans les répéter » toutes ses précédentes chorégraphies. Entouré de six musiciens et chanteurs, il fait de son corps un instrument parmi les autres, déconstruit le flamenco pour le reconstruire à sa manière, le régénérer, avec humour et talent.

04 42 56 48 48

27 mai L’Olivier, Istres scenesetcines.fr

Trois jours après Contact #2 programmé à La Colonne (voir p48), Abderzak Houmi propose Contact #1, pièce pour deux danseuses magnifiques, Sophie Lozzi et Julia Flot. Le chorégraphe découpe l’espace et trace des trajectoires autour desquelles les danseuses se rapprochent, se touchent, s’entremêlent… 27 mai Espace Gérard Philippe, Port-Saint-Louis 04 42 48 52 31 scenesetcines.fr

© X-D.R

© Cie 32 Novembre

© Nathaniel Baruch

CloC

5 juin Le Citron Jaune, Port-Saint-Louis 04 42 48 40 04 lecitronjaune.com


50 au programme spectacles vaucluse var

Il y a quelque chose qui cloche

Bled Runner

C’est désormais une tradition, les élèves comédiens du Conservatoire à rayonnement régional du Grand Avignon sont accueillis chaque fin de saison par le Théâtre des Halles. Dirigés par leur professeur Sylvie Boutley, ils présentent cette année, avec les élèves des classes théâtre du collège Viala, l’adaptation de textes issus de deux ouvrages non théoriques de Ronald Donald Laing, fondateur du courant dit « antipsychiatrique ». Les rapports acteurs-spectateurs, ainsi que les notions de jeu et de non-jeu, seront visités. Entrée libre sur réservation.

Deux équipes proches des cultures urbaines, dans un même temps de résidence, sinon rien, au Théâtre des Doms ! Le 15 juin, dans The old loop, les danseurs burlesques Harold Henning et Mohamed Benaji exploreront la station debout dans une chorégraphie basée sur le comique de répétition, et en plein air. Le 17, ce sera le groupe Tsek qui présentera un « hymne à l’imperfection » grâce à ses improvisations verbales et au slam virtuose de Maky dans des Dérapages contrôlés. Entrées libres sur réservations.

© X-D.R

27 mai Théâtre des Halles, Avignon 04 32 76 24 51 theatredeshalles.com

© Denis Rouvre

© Delestrade

The old loop vs Dérapages contrôlés

15 & 17 juin Théâtre des Doms, Avignon 04 90 14 07 99 lesdoms.be

Si Fellag se méfie des gens « qui n’ont pas le sens du second degré », ça ne l’empêche heureusement pas de continuer à brandir le rire comme seule arme, surtout lorsqu’il parle de son Algérie réelle comme rêvée, à travers le prisme de sa fantaisie sans limites. Toujours mis en scène par Marianne Épin, il présente Bled Runner comme un voyage au cœur des textes puisés au fil de des spectacles écrits ces vingt dernières années pour la scène, qui mettent notamment en lumière son combat pour l’acceptation et la connaissance de l’autre. 3 et 4 juin Châteauvallon-Scène nationale, Ollioules 04 94 22 02 02 chateauvallon.com

In/Out

4 juin Théâtre des Doms, Avignon 04 90 14 07 99 lesdoms.be

© Patrick Berger

Sortie de résidence d’un « documentaire vivant » sur la thématique du dedans et du dehors, de l’intra et de l’extramuros, de l’intérieur et de l’extérieur, organisé auprès de différentes générations par la performeuse Isabelle Bats, avec l’aide de l’équipe culture de l’Université d’Avignon. La question du In et du Out donnera lieu la saison prochaine à une future Superésidence pluridisciplinaire partagée entre Avignon et Amiens, lancée par le Théâtre des Doms et Surikat Production auprès de six artistes émergents.

Asa Nisi Masa

Acrobates, jongleurs, danseurs, pratiquants d’arts martiaux ou musiciens, ils sont vingtdeux artistes réunis dans ce spectacle débordant d’énergie. L’univers est celui d’un village vietnamien et ses habitants. Les mutations et évolutions de ce cadre de vie selon le cours de la modernité sont au cœur du propos. La tradition ancestrale se mixe avec le cirque contemporain ou un battle hip hop, pour un voyage en images et en musiques rempli d’émotions et de poésie.

© Ahn Phuong Nguyen

© Isabelle Bats

A O Lang Pho

du 24 au 28 mai Châteauvallon-Scène nationale, Ollioules 04 94 22 02 02 chateauvallon.com

Il était une fois... Ainsi commencent presque tous les contes de notre enfance. Le chorégraphe José Montalvo reprend à son compte la formule équivalente utilisée dans Huit et demi. Il suffisait de prononcer Asa Nisi Masa pour que le héros du film de Fellini soit projeté dans son enfance. Des contes peuplés d’animaux, d’illusions féeriques et de réalités poétiques, prennent vie sur scène grâce aux danseurs, et sur écran, par la magie du numérique et de la vidéo. 7 juin Châteauvallon-Scène nationale, Ollioules 04 94 22 02 02 chateauvallon.com


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spectacles

au programme 51

Teatro comico

Service suicide

« Chaque fois que je me suis trouvé quelque part à l’étranger, aux antipodes, n’importe où en train de bourlinguer, je me demandais: mon pauvre petit vieux, qu’est- ce que tu fous là? » Ces quelques mots de Blaise Cendrars expriment simplement la sensation commune du voyageur. Bourlinguer est un recueil de nouvelles, où l’écrivain se promène dans les ports du monde entier. Darius Peyamiras en a adapté une courte séquence. Il en confie l’interprétation, magistrale, à Jean-Quentin Châtelain.

Lecture de l’une des premières pièces de Christian Lollike, l’un des chefs de file de l’écriture théâtrale contemporaine au Danemark, encore très peu connu en France, et adepte des objets scéniques et textuels provocants. Sans sentimentalisme mais beaucoup de sensibilité, cette pièce forte et ironique en 4 parties mise en espace par Laurent Berger, dont le sujet est remarquablement traité, est basée sur des témoignages authentiques et donne la parole aux suicidés et aux familles. Entrée libre sur réservation, au terrain de foot de Grammont.

© O. Prevosto

Bourlinguer

Qu’est-ce que le théâtre populaire aujourd’hui ? Vaste question, à laquelle la Compagnia Dall’Improviso tente de répondre avec humour, fantaisie et décalage. La commedia dell’arte est le pilier du spectacle, sorte de conférence autour de ce thème. Les acteurs de la troupe italienne viennent livrer et confronter cette tradition à d’autres courants théâtraux. En résulte une joute théâtrale, pleine de vivacité, d’entrain, mais aussi de réflexion sur la place que tient l’art de la scène dans nos sociétés.

10 juin Châteauvallon-Scène Nationale, Ollioules 04 94 22 02 02 chateauvallon.com

L’arrière-boutique Attention ! Objets Artistiques Non Identifiés en approche ! Fidèle à son habitude, le Cabinet de Curiosités, la compagnie en résidence au Théâtre du Rocher, propose une visite de son Arrière- boutique. Au programme, entre 18h et 23h, lectures, petits films, danse, musique, forme théâtrale courte, et surtout une place majeure laissée à la création. Travaux aboutis, ébauches ou simples éclats d’un soir sont ainsi l’occasion d’explorer les mécanismes artistiques et d’aller à la rencontre directe du public. 29 mai Théâtre du Rocher, La Garde 04 94 08 99 34 ville-lagarde.fr

Café Müller & Le Sacre du Printemps Accueillis en partenariat avec les ATP d’Aix aux Arènes de Nîmes, ces deux chefs-d’œuvre de Pina Bausch seront joués en plein air par le Tanztheater Wuppertal Pina Bausch et accompagnés par l’orchestre Les Siècles. Café Müller, créé en 1978 sur une musique d’Henry Purcell, est une réminiscence de la brasserie des parents de la chorégraphe dans l’Allemagne en guerre, et traite de ses thèmes de prédilection, la solitude, les blessures intimes, l’incapacité de la rencontre. Le Sacre du Printemps (1975) est un monument de l’art : la version du ballet de Nijinski par Pina Bausch est l’une des plus marquantes, la force du groupe y est magistrale. Dirigé par François-Xavier Roth, l’Orchestre jouera sur des instruments d’époque cette 2e pièce autour du sacrifice d’une jeune fille.

04 66 36 65 10

Bosque Ardora Impulsive, charnelle, sauvage, la danseuse chorégraphe Rocío Molina s’entoure de huit hommes (2 danseurs et 6 musiciens) et nous invite au cœur de la forêt pour vivre, le temps du spectacle, une journée particulière, du petit jour à la nuit. Dans une partition chorégraphique où tous les codes du flamenco sont présents et transcendés, l’artiste à la puissance et à la maîtrise hors du commun se dévoile à la fois femme, animal et Artémis, chasseresse et créature mythologique. Virtuosité et liberté composent cette pièce brûlante et envoûtante.

6 au 9 juin Théâtre de Nîmes theatredenimes.com

© Alain Scherer

© Carole Parodi

24 mai Théâtre du Rocher, La Garde 04 94 08 99 34 ville-lagarde.fr

24 mai CDN Humain trop humain, Montpellier 04 67 99 25 00 humaintrophumain.fr

24 mai Scène nationale, Sète 04 67 74 66 97 theatredesete.com


52 au programme cinéma marseille

bouches-du-rhône

Soyez les bienvenus

Fabulosa Casablanca

Motivés et moteurs

Soyez les bienvenus de Elem Klimov © Mosfilm

Le 24 mai, organisée par le ciné-club russe Le Miroir et Cinépage, soirée exceptionnelle au cinéma Les Variétés ! Après un apéro russe à 19h, projection du film de Elem Klimov Soyez les bienvenus ou Entrée interdite aux étrangers. Ce titre double reprend les inscriptions contradictoires affichées à l’entrée d’un camp de vacances de l’ex-URSS, dans lequel un ado espiègle et rebelle s’oppose au directeur tyrannique, incarnation du système soviétique d’alors. Limité à une exploitation pour enfants en raison de sa trop grande liberté, devenu paradoxalement très populaire et redécouvert à Cannes classics 2015, ce film n’a pas de distributeur en France. Une occasion rare donc de le découvrir !

Et si on se faisait du bien, en regardant un documentaire optimiste, sensible et joyeux ? Le réalisateur franco-britannique Oliver Dickinson sera au cinéma Les Variétés, le 26 mai à 19h30 pour présenter Des locaux très motivés. Ces locaux-là habitent en Aveyron, ont l’ambition de devenir les « locomotives » du projet écologique et social des circuits courts. Le cinéaste suit leur action au sein de l’association des Loco-Motivés dans une suite de portraits intimistes et poétiques.

Horizontes del Sur, Marseille 09 54 61 48 09 horizontesdelsur.fr

Le week-end de Claire

Des locaux très motivés d’Oliver Dickinson © Les Films de l’Anse - Oliver Dickinson

Cinéma Les Variétés, Marseille 0982 68 05 97 cinemetroart.com

Cinéma Les Variétés, Marseille 08 92 68 05 97 cinemetroart.com

Regards sur le cinéma iranien

Nahid d’Ida Panahandeh © Habib Madjidi

Le Gyptis en partenariat avec le Vidéodrome2 propose des «Regards sur le cinéma iranien». Deux soirées passionnantes à ne pas rater au cinéma de la Belle de Mai. Le 24 mai, après un concert de la chanteuse Maryam Chemirani et de la concertiste Shadi Fathi, projection d’une pépite de 2016 : Nahid d’Ida Panahandeh, le portrait d’une femme divorcée qui voudrait pouvoir « refaire sa vie » en gardant son fils contre tradition et volonté paternelle. Le 29 mai à 17h, retour sur le génial Close Up d’Abbas Kiarostami (1991), éclairé par une conférence de Caroline Renard, spécialiste de ce grand cinéaste. Le Gyptis, Marseille 04 95 04 96 25 lafriche.org/content/le-gyptis

Dans le cadre de la 15e édition du festival L’Espagne des trois cultures organisé par Horizontes del Sur, est proposé le 29 mai à 17h, en avant-première, à la Villa Méditerranée, le documentaire de Manuel Horrillo en sa présence. La Fabulosa Casablanca remémore l’histoire de la communauté espagnole qui a habité à Casablanca dans la première moitié du XXe siècle pendant le protectorat français. Souvenirs personnels, témoignages sur l’actuelle Casablanca, répétitions de théâtre, évoquent le conflit qui mit fin à la coexistence entre Européens et Marocains dans les années 1950-1970.

Le bois dont les rêves sont faits de Claire Simon © Just Sayin’ films

Les films engagés font leur printemps Dans le cadre du Printemps du Film Engagé, Attac, U, FSU, Les Amis du Monde diplomatique, le Ravi, l’union syndicale Solidaires présentent des documentaires suivis de débats avec réalisateurs et acteurs du mouvement social. À l’Alhambra, le 23 mai à 19h, on retrouvera Comme des lions de Françoise Davisse ; le 24 mai, au Centre Social des Flamants, Le Réveil des reines de Paule Sardou et le 25 mai, aux Variétés, Marseille entre deux tours de Jean-Louis Comolli et Michel Samson.

Marseille entre deux tours de Jean-Louis Comolli et Michel Samson © Promenade Film

Divers lieux, Marseille facebook.com/printempsdufilmengage

Pour ceux qui avaient été déçus de ne pas pouvoir voir le dernier film de Claire Simon sur les écrans de Marseille lors de sa sortie nationale, et pour tous les amoureux d’un cinéma intelligent qui abolit les frontières de genre et débusque les mille fictions qu’offre le réel, Le Gyptis organise un week-end entier avec la cinéaste. Au programme, le 4 juin à 20h, Le bois dont les rêves sont faits (2016), promenade en marge de la Ville dans un bois de Vincennes où se côtoient d’étonnantes personnes. À 11h le 5 juin, un entretien avec la réalisatrice à partir d’extraits de ses films, sur la façon de filmer les « Autres », anonymes ou proches, stars ou inconnus, permettra de mieux apprécier le reste de la programmation : Coûte que coûte (1995) qui suit le combat d’une petite entreprise en difficultés, Récréations (1993) qui plonge dans le monde impitoyable d’une cour d’école, « entre burlesque, polar et western ». Et enfin Les Bureaux de Dieu (2008) où s’entend dans un planning familial de fiction face à des conseillères interprétées par Anne Alvaro, Nathalie Baye, la parole la plus intime des femmes. Le Gyptis, Marseille 04 95 04 96 25 lafriche.org/content/le-gyptis


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Les Nuits en Or 2016

Miles Davis

Cinéphiles à la barre

Le 9 juin à 20h et 22h30, l’Alhambra Ciné Marseille, en partenariat avec Marseille Jazz des Cinq Continents, propose en avant-première Miles ahead, un film sur le célèbre trompettiste que Don Cheadle a mis une dizaine d’années à réaliser. Centré sur les années 70, il retrace une période de paralysie artistique dans la vie de Miles Davis -qu’il interprète- et sa tentative pour retrouver un enregistrement volé chez lui.

Du 3 au 5 juin, les amateurs de voile et de cinéma pourront satisfaire leur passion à l’Eden à La Ciotat ! Art et essai Lumière propose en effet L’Homme et son voilier, documentaires et rencontres avec des marins et des réalisateurs comme Michael Pitiot, Gilles Martin-Raget, Guilain Grenier, Jean-Dominique Lamy ou Valérie Toëbat. Une occasion de voir et de parler de l’Hermione, de l’Alcyon, du Jolokia… et de bien d’autres voiliers.

Le repas dominical de Céline Devaux © Sacrebleu production

Le 26 mai à 20h30, au cinéma Renoir à Aix-en-Provence, est proposé un programme de 9 courts métrages, choisis parmi les 33 meilleurs films primés des Nuits en Or. Une occasion de découvrir La Contre-allée de Cécile Ducrocq, My father’s truck de Mauricio Osaki, Kacey Mottet Klein, naissance d’un acteur d’Ursula Meier ou les films d’animation comme Le repas dominical de Céline Devaux, ou The ballad of Immortal Joe de Hector Herrera. Cinéma Renoir, Aix-en-Provence 08 92 68 72 70 lescinemasaixois.com

White bird Miles ahead de Don Cheadle © Sony Pictures Classics

Cinéma Alhambra, Marseille 04 91 03 84 66 alhambracine.com

Dernier rendez-vous Le dernier rendez-vous avec la Cinémathèque de Bologne, le 17 juin à 21h au MuCEM, sera consacré à Ermanno Olmi qui, en présentant Il Tempo si è fermato (Le Temps s’est arrêté) à la Biennale de Venise de 1959, a anticipé la « Nouvelle Vague à l’italienne ». Ce film raconte l’histoire d’un gardien d’une digue en haute montagne, qui initie un jeune garçon à s’adapter aux rythmes de la nature.

White bird de Gregg Araki © Bac Films

Le 29 mai à 18h30 à l’Eden, Art et Essai Lumière donne une Carte Blanche à Arnaud Gairoard, étudiant en cinéma, qui propose White bird du cinéaste américain Gregg Araki. Un film sur l’adolescence, un portrait de la famille américaine des années 80 à partir de l’histoire de Kat Connors âgée de 17 ans dont la mère disparaît sans laisser de traces… Arnaud Gairoard, dont le mémoire de Master est consacré au cinéaste, animera le débat après la projection.

Alcyon, 1871© Guilain Grenier-Gilles Martin-Raget

Art et Essai Lumière, La Ciotat 06 64 85 96 40 artetessailumiere.fr

Citizen Web Du 30 mai au 1er juin, à l’initiative de l’association Arsenic, auront lieu les Rencontres des Usages Numériques et de l’Internet Citoyen (REUNIC). Lors de cette semaine dédiée à l’Internet citoyen, les effets de la révolution informatique, fait majeur de notre époque, seront abordés en détails : impact sur le quotidien, les achats, la communication, le travail, mais aussi la vie privée. Le 2 juin, le Renoir présentera Citizenfour de Laura Poitras, Oscar du meilleur documentaire en 2015. Le film relate les révélations fracassantes d’Edward Snowden qui, malgré des pressions permanentes, dénonça la surveillance massive des citoyens opérée par la NSA aux ÉtatsUnis. La projection sera suivie d’un débat.

Citizenfour © Laura Poitras

Art et Essai Lumière, La Ciotat 06 64 85 96 40 artetessailumiere.fr Il Tempo si è fermato d’Ermanno Olmi © Lux Film

MuCEM, Marseille 04 84 35 13 13 mucem.org

Cinéma Jean Renoir, Martigues 09 63 00 37 60 cinemartigues.com


54 au programme cinéma bouches-du-rhône

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Cinéma intemporel

Livres et ciné

Maestà, la Passion du Christ

Scarface © United Artists

Jusqu’au 28 juin, Scènes et Cinés donne à voir ou à revoir de grands classiques du patrimoine cinématographique. Des joyaux des années 30-40 seront à l’affiche de l’Odyssée à Fos-sur-Mer, et de l’Espace Robert Hossein à Grans. Au programme, Scarface d’Howard Hawks (version 1932), les 24 et 31 mai à Grans et les 22, 25 et 29 à Fos. En juin, Le Quai des Brumes de Marcel Carné (7 et 14 à Grans et les 2, 5, 8, 12 à Fos), et Whisky à gogo d’Alexander Mackendrick (les 21 et 28 à l’Espace R. Hossein et les 16, 19, 22, 26 juin à L’Odyssée).

Entre 2008 et 2015, Andy Guérif s’est plongé dans une œuvre majeure de l’art italien. La Maestà de Duccio, peinte au début du XIVe siècle pour la cathédrale de Sienne, est transformée en tableau vivant par le réalisateur. Les vingt-six panneaux, qui composent l’œuvre initiale, apparaissent simultanément à l’écran comme une mosaïque animée. Toutes les étapes de la vie du Christ prennent soudain corps, dans une fidélité absolue au modèle du maestro. La projection, en collaboration avec le Parcours de l’Art et le Musée du Petit Palais, aura lieu en présence du cinéaste, le 3 juin.

Cinéma L’Odyssée, Fos-sur-Mer 04 42 11 02 10 scenesetcines.fr Espace Robert Hossein, Grans 04 90 55 71 53 scenesetcines.fr

Amama

Amama d’Asier Altuna © Txintxua films

En plein cœur du pays basque, une famille vit encore au rythme de traditions ancestrales. Leur ferme se transmet de générations en générations selon un destin figé à l’avance par l’amama, la grand-mère en basque. À chaque naissance, un arbre est planté, et de la couleur que lui attribuera la vielle dame dépendront le caractère et la vie du nouveau-né. Mais Gaizka, désigné pour reprendre la ferme, s’y refuse. Le film, tourné en basque et produit par le cinéma l’Atalante de Bayonne, sera projeté en avant-première le 30 mai, en présence d’Asier Altuna, le réalisateur. Cinéma Utopia, Avignon 04 90 82 65 36 cinemas-utopia.org

Suburra de Stefano Sollima © Emanuela Scarpa

Dans le cadre de la Comédie du Livre, le festival littéraire de Montpellier (voir p. 24), plusieurs rendez-vous cinéma sur le thème de l’Italie seront à l’affiche. Le 26 mai, veille de l’ouverture de la manifestation, le cinéma Nestor Burma programmera La Conscience de Svevo de Yann Simic. Ce documentaire sur le romancier de Trieste, Italo Svevo, sera suivi d’une rencontre avec Nathalie Combe, scénariste du film. Le 28, les romanciers Giancarlo de Cataldo et Carlo Bonini seront présents pour la projection de Suburra, le film de Stefano Sollima tiré de leur œuvre (lire p.68). Cinéma Nestor Burma, Montpellier 04 67 61 08 04 montpellier.fr

Maestà, la Passion du Christ d’Andy Guérif © Capricci Films

Cinéma Utopia, Avignon 04 90 82 65 36 cinemas-utopia.org

Alice avant l’heure

At(h)ome at Apt Le 14 juin à 19h au Cinémovida à Apt, projection de At(h)ome en présence de la réalisatrice Élisabeth Leuvrey. Un documentaire qui nous ramène en 1962, en plein Sahara algérien, suivant le parcours d’une explosion nucléaire expérimentale et de ses conséquences. Extraits d’archives, photos-portraits de Bruno Hadjih nous racontent une histoire occultée, tragiquement oubliée. La projection sera suivie d’un débat animé par Dominique Wallon (Festival des Cinémas d’Afrique). (Lire chronique sur journalzibeline.fr).

Alice de l’autre côté du miroir de James Bobin © The Walt Disney Company France

Soirée exceptionnelle le 31 mai au Cinéplanet d’Alès. À la veille de sa sortie en France, Alice de l’autre côté du miroir, deuxième volet de la version signée James Bobin, sera présenté en avant-première, avec notamment Johnny Depp et Mia Wasikowska au générique. Ce dernier opus est la suite d’Alice aux Pays des Merveilles de Tim Burton sorti en 2010. Les deux films, en 3D, seront programmés successivement à 17h30 puis 19h30. Cinéplanet, Alès 04 66 52 63 03 cineplanet.fr

At(h)ome de Élisabeth Leuvrey © Bruno Hadjih

Festival des Cinémas d’Afrique du Pays d’Apt Cinémovida, Apt africapt-festival.fr


Salagon, musée et jardins à Mane, Alpes de Haute-Provence

Retrouvez-nous sur

Tél. 04 92 75 70 50 www.musee-de-salagon.com

la Galerie Saint-Laurent & Euroméditerranée présentent

MarseilleStreetArtShow

PHOTO CAMILLE MOIRENC

Exposition de 12 artistes à la Galerie Saint Laurent Halle des Antiquaires Marché aux puces du 20 mai au 30 août 2016

DÉCOUVREZ ÉGALEMENT LES FRESQUES GÉANTES DES STREET-ARTISTES DONT INTI ET DALE GRIMSHAW SUR LES FAÇADES DES PUCES Halle des Antiquaires 130 Chemin de la Madrague-Ville 13015 Marseille 04 91 47 45 70

www.galeriesaintlaurent.com


56 au programme cinéma marseille vaucluse

Cannes s’invite à Saint-Henri e n’est pas la Croisette mais elle est bien jolie tout de même la place Raphaël de Saint-Henri ! Et comme tous les ans, Cannes s’y offre à nous avec la reprise de la Quinzaine des Réalisateurs au cinéma l’Alhambra, deux jours à peine après le Palmarès. Du 24 mai au 5 juin : 29 films dont 11 courts et pas moins de 10 invités ! Une large palette où l’on retrouvera des anciens de la Quinzaine comme Alejandro Jodorowski qui poursuit son autobiographie initiée en 2014 par La danza de la Realidad avec Poesía sin fin, ou encore Pablo Larraín dont on avait adoré No en 2012 et qui revient avec Neruda, biopic sur le grand poète chilien traqué par un policier de Videla, incarné par Gael Garcia Bernal. À côté de cinéastes confirmés, à l’instar de Marco Bellochio qui nous parle de la douleur du deuil dans Fais de beaux rêves ou de Paul Schrader dont l’adaptation du polar de Edward Bunker Dog Eat Dog avec John Cage et Willem Dafoe est très attendue, on pourra découvrir des premiers films : Mercenaire de Sacha Wolff qui suit un jeune Wallisien venu en Métropole contre l’avis de son père pour jouer au rugby, Divines de Houda Benahmia qui se déroule dans une banlieue ghetto, ou encore Mean dreams du Canadien Nathan Morlando, la traque de deux jeunes gens borderline par un shérif corrompu. Il y aura des films très noirs comme Raman Raghav 2.0 d’Anurag Kashyap, s’inspirant de l’histoire vraie d’un tueur en série psychopathe

L’Effet aquatique de Sólveig Anspach © Le Pacte.

C

sévissant à Mumbai (Bombay) dans les années 60. Et des comédies sur le couple à fonder pour une maître nageuse et un grutier dans L’Effet aquatique, film posthume de Sólveig Anspach, produit par Robert Guediguian. Ou à fuir comme dans L’Economie du couple du réalisateur belge Joachim Lafosse. Notons la présence du premier film français réalisé en stop-motion à Lyon : Ma Vie de courgette de Claude Barras, co-scénarisé par Céline Sciamma et deux documentaires : Les Vies de Thérèse, prolongement du travail entrepris par Sébastien Lifshitz dans Les Invisibles pour recueillir la parole d’homosexuels d’avant 68, et Risk de la journaliste d’investigation Laura Poitras, persona non grata aux States, pour son travail sur l’Irak et Guantanamo, qui

Palestine en Vaucluse D

u 23 mai au 29 mai, l’association Présences palestiniennes propose une semaine de cinéma en Vaucluse. Au Pandora d’Avignon le 23, Les 18 Fugitives, un documentaire d’animation d’Amer Shomali et Paul Cowan sur l’histoire d’un mouvement palestinien de désobéissance civile pendant la première Intifada. Successivement on pourra Les 18 Fugitives d’Amer Shomali et Paul Cowan © Intuitive Pictures National Film, Board of voir La Belle Promise, premier Canada, Bellota Films Dar Films, ARTE France film de Suha Arraf, un huis clos lourd qui passer à l’action. Le 26 mai, ce sera Palestine oppose trois femmes solitaires et amères à leur Stereo de Rashid Masharawi, un tableau nièce sortie de l’orphelinat, puis Omar d’Hany de situations cocasses et désespérées sur Abu-Assad, prix du Jury Un Certain Regard l’absurdité de la vie en Palestine. 2013, qui campe de jeunes Palestiniens prêt à La semaine palestinienne se poursuivra au

enquête ici sur Julian Assange, fondateur de WikiLeaks. Rendez-vous le 24 mai à 20h30 pour l’ouverture avec Rachid Djaidani et son Tour de France qui finit à Marseille. On entendra parler italien, anglais, espagnol et surtout français dans cette sélection de longs métrages qui allume déjà une lumière de plaisir dans les yeux des cinéphiles, mais ne compte, faut-il encore le remarquer, que trois réalisatrices pour 18 films. ELISE PADOVANI

Quinzaine des Réalisateurs 24 mai au 5 juin Cinéma l’Alhambra, Marseille 04 91 03 84 66 alhambracine.com

César d’Apt avec, le 27 mai à 18h30, en avant-première, 3000 nuits de Maï Masri, le dilemme d’une jeune Palestinienne incarcérée dans une prison israélienne sécurisée où elle a donné naissance à un garçon…Enfin, le 29 mai à 19h15 à La Strada de L’Isle-sur-la-Sorgue, un huis clos dans un salon de coiffure à Gaza : Dégradé d’Arab et Tarzan Abu-Nasser (lire critique sur journalzibeline.fr). Toutes les projections seront suivies de débats co-animés avec des associations citoyennes, invitées par Présences palestiniennes. ANNIE GAVA

Semaine du cinéma palestinien en Vaucluse 23 au 29 mai Avignon, Apt, Isle-sur-la-Sorgue facebook.com/PresencesPalestiniennes


Cour(t)s-y-vite !

U

© Tilt

ne programmation de courts choisis PAR des enfants POUR des enfants, c’est ce que propose le Club Cinetilt pour la 13e fois, le 15 juin à 16h30, au cinéma Le Gyptis à Marseille. Si à ce jour la programmation n’est pas tout à fait terminée, on peut supposer que parmi les 22 courts métrages que les 10 élèves volontaires de l’école Bernard Cadenat, ont visionnés, analysés, après les cours, durant 8 mois avec des professionnels de l’association Tilt, certains vont recueillir une majorité de voix… comme La Queue de la souris de Benjamin Renner (2007) ou La Voisine de Malec de Buster Keaton (1920). En effet, leur sont proposés aussi bien des films récents, sélectionnés dans les grands festivals (Clermont-Ferrand, Tous Courts à Aix-enProvence, Cinémed à Montpellier, Rotterdam, Berlin, Cannes…) que des films plus anciens, reliant le cinéma d’aujourd’hui à ses origines. Ces élèves motivés ont aussi créé l’affiche de Cour(t) s-y-vite ! avec l’illustratrice Sabine Allard. Alors tentez l’expérience, allez découvrir leur sélection et courez-vite au Gyptis ! ANNIE GAVA

Cour(t)s-y-vite ! 15 juin Le Gyptis, Marseille 04 91 91 07 99 www.cinetilt.org

Cinéma d’Israël

D

u 15 au 21 juin, avec la 17e édition du festival Regards sur le cinéma israélien, le meilleur du cinéma de ce pays s’affiche sur les écrans marseillais au César et au Prado. Placé sous le parrainage du journaliste, scénariste, producteur, homme de télé et de ciné Serge Moati, le festival rendra hommage, à travers sa programmation, à la grande Roni Elkabetz récemment disparue en présence de nombreuses personnalités qui l’ont connue et travaillé avec elle. On y découvrira une dizaine de films inédits, diffusés plusieurs fois dans la semaine, accompagnés par leurs réalisateurs et interprètes. Shemi Zahrin viendra présenter son dernier film De douces paroles où il traite du secret de famille. Il y met en scène une jeune Israélienne et ses deux frères qui, après la mort de leur mère, partent en France à la recherche d’un passé enfoui et d’une identité volée. On attend aussi le jeune Nitzan Gilady pour son premier long métrage Poupée de mariage dont l’héroïne Hagit, jeune ouvrière atteinte d’un léger retard mental, travaille dans une fabrique de papier toilette près du désert du Néguev, bricolant des mariées-poupées avec les rouleaux et rêvant mariage avec le fils du patron. Une programmation à découvrir sur le site. ELISE PADOVANI

Regards sur le cinéma israélien 15 au 21 juin Cinémas Le César et Le Prado, Marseille 04 91 37 40 57 judaicine.fr


58 critiques arts visuels

Parallélépipède (détail) Gérard Fabre © Chris Bourgue

Défis de l’éphémère

L

e parc arboré de Maison Blanche accueille la 8e édition des Arts Éphémères, inscrite pour la première fois dans le cadre

du Printemps de l’art contemporain à Marseille (PAC). Le public nombreux dans lequel on reconnaît de plus en plus d’artistes et d’amateurs éclairés a plébiscité le Théâtre du Centaure, le BNM avec des chorégraphies d’E. Greco et P. Schoten, et de Christophe Garcia. Les plasticiens ont joué avec l’espace réalisant des œuvres en fonction du lieu et du thème : trouver comment « donner le moment tout entier » selon l’expression de Virginia Woolf. Une attention particulière a été accordée aux matériaux utilisés. Certains sont nobles et durables comme l’acier (Amandine Artaud, Denis Falloux), d’autres appartiennent à l’univers de la construction, béton pour Nicolas Daubant, Marc Quer, briques pour Clémentine Carlsberg qui les habille richement d’un papier peint William Morris ; d’autres sont détournés comme les tentures de tissus teints d’Adrien Vescovato, les bâches plastiques de Rémi dal Negro livrées aux caprices du vent. Plus près de la nature, Berdaguer et Péjus transforment un arbre vivant en sculpture, les étudiants

de l’École d’art malaxent la terre tandis que d’autres dialoguent sur l’eau avec des mousses polyéthylènes (Marie-Johanna Cornut et Pierre Malphettes). Gérard Fabre désacralise le concept du white cube en installant un cube et des petits volumes très colorés tandis que les enfants s’approprient tout à côté les ballons de foot « maquillés » par Ludivine Catillard. Dans les salons Monique Dérégibus adresse un hommage à Delphine Seyrig tandis que Chourouk Hriech met en scène ses dessins exécutés à partir d’une sculpture de la bastide. Saluons enfin les ateliers publics et leurs travaux remarquables tant avec les adultes que les enfants. Ainsi humour et jeu, liberté et poésie perturbent délicieusement l’espace du jardin. CHRIS BOURGUE

Arts Éphémères jusqu’au 29 mai Parc et salons de Maison Blanche, Marseille www.marseille9-10.fr

Un PAC à consommer sans modération L

e Printemps de l’art contemporain étend son champ d’investigation sur le territoire marseillais et aixois avec une cinquantaine de lieux dont 37 membres du réseau Marseille Expos. Du 5 au 28 mai, et plus longtemps dans certains cas, le public est invité à naviguer d’expositions en rencontres, de workshops en sorties de résidences, de tables rondes en ouvertures d’ateliers… Comme à Endoume où The American Gallery présente le livre d’artiste Home Guard Manual of Camouflage de Cari Gonzalez-Casanova qui marque l’aboutissement d’un travail de recherche initié en 2011. La production de l’ouvrage* s’accompagne d’un corpus d’objets à espace modulable, de vidéos, de sources documentaires qui sont autant d’informations et de réflexions sur l’usage du manuel comme vecteur d’idéologie. Car l’artiste a étudié minutieusement trois types de manuels (militaire, sécurité gouvernementale, contre culture américaine des années 70) pour traiter, in fine, non pas de l’esthétique du camouflage mais de son impact psychologique : paranoïa, duperie… Une « œuvre totale » exemplaire tant sur le plan de sa construction que de sa réalisation. Dans le quartier de La Plaine, l’atelier-galerie Tank Art Space met en

collection coup de cœur de Bernard Muntaner sous le titre facétieux Ah, si j’avais des sous !. Méli-mélo de talents émergents et de valeurs sûres, d’artistes des scènes marseillaises et nationales : Orlan, Lionel Scoccimaro, Nicolas Desplats, Clémentine Carsberg, Michèle Sylvander… Le tout avec prix de vente et quelques pastilles rouges car le public du PAC, s’il est curieux, est aussi collectionneur. MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

* avec le soutien de Mécènes du Sud, Ville de Marseille, The American Gallery, Conseil Régional Paca

Oeuvre de Cari Gonzalez-Casanova in situ, The American Gallery, mai 2016 © MGG/Zibeline

résonance les œuvres de Catarina de Oliveira et Amandine Guruceaga autour d’un même geste lié à la dégradation et à l’érosion de la matière. La mise en espace répond à leur volonté respective de « trouver une dynamique aux objets non figés dans le mur » et « d’aller dans le champ de la sculpture en posant l’œuvre sur tissu à terre ». Aux Réformés, la galerie Art Est Ouest réunit la

8 mai au 16 juillet The American Gallery, Marseille 7e 06 27 28 28 60 american-gallery.org 5 mai au 4 juin Galerie Art Est Ouest, Marseille 1er 06 17 24 81 86 art-est-ouest.org 5 mai au 5 juin Tank Art Space, Marseille 5e 06 89 52 21 29 artspacetank.com Programme complet sur pac.marseilleexpos.com


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« The sun is Gold »*

Calais Sands at Low Water, Poissards Collecting Bait - Joseph Mallord William Turner © Bury Art Museum, Greater Manchester UK

Jusqu’au 18 septembre, la nouvelle exposition de l’Hôtel de Caumont, à Aix-en-Provence, est consacrée au parcours de celui que l’on surnomma « le peintre de la lumière », Turner

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ntelligemment, le commissaire de Turner et la couleur, Ian Warrel s’est refusé à la traditionnelle présentation au public de la vingtaine des grandes toiles les plus célèbres, sans autre propos que d’en célébrer la palette. « Ajouter une énième exposition de ce genre a un intérêt limité », explique-t-il. Il s’est attaché à rendre sensible l’évolution de l’art de Turner, soulignant les influences de Lorrain, Salvator Rosa, Poussin, Titien, Canaletto, dans le traitement de la couleur et de la lumière. On suit ce jeune fils d’un barbier dans le quartier de Covent Garden à Londres, ses esquisses, son apprentissage du dessin. Sa phénoménale mémoire lui permet de se souvenir avec exactitude des couleurs et des formes, bien après ses promenades. Peu à peu sa palette s’éclaircit, grâce à la préparation des supports, jusqu’à obtenir des couleurs translucides. Il rend sur la toile, notant avec précision les variations du jour, les paysages familiers ou lointains, Grèce, Italie, Provence, Allemagne, Angleterre et le petit port de pêche Margate, dans le Kent, où l’on peut observer « les plus beaux ciels d’Europe » ; des centaines de carnets s’emplissent d’esquisses ;

il retient aussi des scènes familières, les petits métiers, les gens humbles. Petit à petit, les personnages deviennent silhouettes, les formes se transcrivent en impressions lumineuses, accordant une sensibilité particulière aux œuvres. S’inspirant des théories de Goethe (Lumière et couleur) il emporte ses toiles dans un tourbillon caléidoscopique, si bien que les détracteurs du peintre parlent de « manifestations monstrueuses de chromomania ». Une caricature parue dans l’Almanack of the month (juin 1846) montre un Turner ventripotent plongeant son balai à franges dans un seau de jaune (sa couleur fétiche) afin d’en enduire un tableau. La scénographie de Hubert Le Gall accorde un écrin choisi aux œuvres, plus de 130 (19 huiles, 99 aquarelles et œuvres sur papier, un portrait, des documents), reconstituant ici les salons de l’Académie royale, la galerie personnelle du peintre, là, son atelier, avec pinceaux, palettes, et une frise chronologique rappelant combien les techniques sont liées : si en 1840, des seringues en verre contenaient la peinture, elles sont remplacées en 1842 par le tube souple en aluminium à bouchon vissé des

établissements Windsor & Newton… On suit le guide, on revient, on se laisse absorber par la vibration des couleurs, on sourit au récit d’anecdotes comme celle du tableau à la jeune fille en robe bleue, composé pour s’excuser d’avoir gâté avec du lait la dite robe, on regarde les extraits du documentaire J.M.W. Turner réalisé par Alain Jaubert… On rappelle le rôle des collectionneurs (dont l’écrivain John Ruskin) qui font vivre l’artiste, mais dont les collections gardent souvent secrètes des œuvres merveilleuses. La Tate de Londres prête à l’exposition 36 œuvres « acceptées par la nation dans le cadre du legs Turner en 1856 »… L’exposition repartira à Londres pour le 5e anniversaire de la Turner Contemporary qui en est co-organisatrice aux côtés de Culture Espace. MARYVONNE COLOMBANI

*Turner « le soleil c’est de l’or »

Turner et la couleur jusqu’au 18 septembre Hôtel de Caumont, Aix-en-Provence 04 42 20 70 01 caumont-centredart.com


60 critiques arts visuels

Madame S, Hétérocères © Gaëlle Cloarec

L’art sous les feuilles

L’homme, une espèce tragique ?

avec le public, amateurs et collectionneurs. Cette importante galerie/salon en plein air laisse une première impression tenace : la pop culture inspire décidément bien des pratiques contemporaines. On ne compte plus les super

Photomed s’invite à l’Hôtel des arts de Toulon pour la cinquième année et ouvre sa focale sur la vidéo à travers l’exposition Animal & Cie et le solo show de Moussa Sarr, Asile

Super Congo vidéos et peintures 2015 2016 © Moussa Sarr

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e Sm’art, 11e Salon d’art contemporain d’Aixen-Provence, s’est tenu à la mi-mai sous les arbres du parc Jourdan. Avec plus de 200 artistes déjà connus ou émergents, chacun dans une tente blanche, prêts à partager leur démarche

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ne manière de questionner la pratique de la vidéo par les photographes et inversement. Le médium n’est pas le seul lien entre ces artistes qui interrogent, ici, la part de l’animal dans l’homme et soulignent comment l’animal est une expression de la façon dont l’homme se comporte. Tension, identification, fascination, répulsion, autoritarisme, transgression, discrimination... des liaisons dangereuses objets de représentations multiples, de la plus objective à la plus métaphorique, de la plus réaliste à la plus fantasmatique. La preuve par l’image avec huit artistes internationaux sélectionnés par la Maison européenne de la photographie pour l’événement Arte Vidéo Night. Sous forme de bestiaires, Adel Abidin, Alice anderson, Martial Cherrier, Mihai Grecu, Sanna Kannisto, Yves Netzhammer, Chloé Piene et Miguel Angel Rios inventent des fables contemporaines. À nous d’en décrypter la morale.

héros, stars hollywoodiennes, personnages de bande dessinée peints, sculptés, sérigraphiés. Autre remarque significative, parmi les artistes les plus originaux, nombre de femmes, dont l’œuvre intense attire le regard, avec pour point commun un amour très charnel de la matière. On a ainsi repéré Marie Chardiny, qui « travaille avec la réalité et ses rêves mélangés ». Sur les murs de toile de l’espace qui lui a été attribué, un œuf, emporté par un torrent de feuilles mortes (« en ce moment, je rêve d’œufs, j’ai été attirée par l’aspect un peu pelucheux du jaune, contrastant avec le blanc brillant »), un chat étoilé (« c’est une nuit en forme de chat, ou un chat en forme de nuit... »), une jeune femme soulevée par un courant d’air (« elle a déjà décollé, mais elle n’est pas encore partie »). Mme S., elle, est venue de Marseille exposer ses belles dénudées, jouant des transparences et d’une animalité détonante, avec un plaisir d’entomologiste : elle épingle sur leurs corps de délicats papillons aux ocelles de papier

Les pièces produites dans l’atelier de Moussa Sarr (à la fois refuge et asile) entrent en parfaite résonance avec Animal & Cie. Hier vidéaste-performeur, aujourd’hui vidéaste-fabuliste, Moussa Sarr brosse le portrait du monde dans lequel il vit, accessoirement des autoportraits, en dupliquant la posture animale, en empruntant son langage, sa corpulence, ses déplacements. Photographies et vidéo le saisissent en plein vol sous les traits du

Duck Man au discours incompréhensible mais autoritaire, dénonçant ainsi les super pouvoirs de ceux qui ont le pouvoir ; ou réincarné en singe Congo côté sur le marché de l’art dans les années 1950/60, peignant sans pinceaux mais affublé d’une cravate maculée de tâches. Clin d’œil à Basquiat doublé d’un coup de griffe aux préjugés… Moussa Sarr sait aussi se rendre invisible dans une série de photos noir et blanc dont on saisit brutalement la


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Inspirés brûlé... Autre artiste prometteuse, Aurore Laty, formée à Spilimbergo, capitale de la mosaïque en Italie. Son travail à base de matériaux naturels, marbres, galets, terres cuites, donne une impression de profondeur immédiate : « Les mosaïques contemporaines, qui ne sont pas des sols, permettent de jouer sur les formes et le relief. » Ses frênes corses, vus en contre-plongée et poussant très droit, semblent prêts à osciller sous le souffle de la Tramontane. Si l’ambition du Sm’art est bien d’être un « détecteur de talents », voilà qui est confirmé. GAËLLE CLOAREC

Le Sm’art a eu lieu à Aix-en-Provence du 12 au 16 mai salonsmart-aix.com

tentative désespérée de disparaitre aux yeux du monde. Comme dans Postures, son travail photographique s’appuie sur une extrême tension des mouvements et un sens aigu de la chorégraphie. La bestialité de l’homme n’est jamais exempte du cadre même quand elle est hors champ : sa dernière vidéo Le Nouveau nez emprunte à Pinocchio le masque de l’enfance mais l’effroi s’impose à la vue d’une tronçonneuse prête à en découdre. Avec intelligence, il nous épargne de voir le coup fatal, seul le vrombissement perdure. Dans la vidéo Duo de chats, l’agressé devient agresseur faute d’aide et de compassion, et ce renversement des rôles sonne comme un avertissement. On avait quitté Moussa Sarr au WEYA en 20121, alors jeune diplômé de l’École d’art de Toulon, on le retrouve voguant entre Paris, Londres et bientôt Berlin. Un parcours sans faute, preuve d’une maturité plus prometteuse que jamais. MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

World Young Event Artists (WEYA) organisé à Nottingham sur le modèle de la BJCEM (Zib’56).

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jusqu’au 19 juin Hôtel des arts, Toulon 04 83 95 18 40 hdatoulon.fr

Glenn Brown, The Hokey Cokey, 2016, peinture à l’huile et acrylique sur bronze. Courtesy Gagosian Gallery © Mike Bruce

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ans la continuité des précédentes, les deux expositions d’été de la Fondation Van Gogh s’attachent à la question du renouvellement de la tradition. Se répondent Vincent Van Gogh et Glenn Brown, notre contemporain.

L’expo attendue C’est une sélection méticuleusement pensée que nous propose SjraarVan Heugten déjà à la manœuvre pour les deux précédentes, Couleurs du Nord, couleurs du sud et Les dessins de Van Gogh qui traitait des rapports en tradition et modernité. À part l’autoportrait au chapeau de feutre gris, c’est la découverte d’une trentaine de toiles moins connues -des débuts aux derniers moments du peintre- qui se répartissent entre trois grands genres picturaux, le portrait (et le tableau de figures), la nature morte et le paysage principalement. Tout en restant fidèle à ses thèmes et à ses artistes de prédilection, Van Gogh pourra se tourner vers des recherches picturales innovantes. On sait l’importance des changements fondamentaux pour le peintre lorsqu’il bascule du nord de l’Europe pour la France et le sud si proche pour lui du Japon rêvé. On en a ici la démonstration entre l’obscur terreux et les chromatismes rayonnants « outrés » qui suivirent, mais aussi

dans le choix de points de vue inhabituels comme son Carré d’herbe (Paris, 1887). Dans cette continuité renouvelée, l’artiste anglais Glenn Brown réactive avec virtuosité les emprunts à l’histoire de l’art que précisent les titres (After...). Peintures, sculptures et dessins. Ces derniers, tantôt surjouent une filiation technique telle celle des trois crayons, ou recouvrent à l’encre de Chine le support synthétique transparent, démultipliant les réseaux d’ il/lisiblité, l’huile sur bois préparée à l’ancienne, parfois sur résine. L’artiste revendique une sorte de « slow peinture » comme existe une slow food, avec méticulosité, jubilation dans les savoir-faire hyper lisses. Ses sculptures sur bronze (hélas protégées de plexiglas), proches des rebuts d’atelier par ses amas de matière colorée, renouvellent le genre dans une sorte de dé-figuration insensée. On enrichira la visite grâce aux deux catalogues respectifs confiés aux éditeurs arlésiens Actes Sud et Analogues. CLAUDE LORIN

Van Gogh en Provence Glenn Brown : « Suffer well » jusqu’au 11 septembre Fondation Vincent Van Gogh, Arles 04 90 93 08 08 fondation-vincentvangogh-arles.org


62 critiques arts visuels

Bois veiné U

ne structure monumentale au centre de l’espace, avec une ouverture. Prendre la mesure de cet élément par l’extérieur. Ne pas y pénétrer tout de suite. Sur le mur, Strange Fruit 2 (verre peint monté sur châssis en acier, 101 x 121 x 7,5 cm, 2011). Des branches d’arbres, saisies là comme dans un brouillard aussi doux qu’inquiétant. L’image arrêtée d’une histoire qu’on devine longue comme le monde. L’avant et l’après semblent contenus dans ce cadre aux ramifications grisbleu, il y a une profondeur et un mouvement qui incitent à se déplacer devant l’image, à traquer un souvenir, un bruissement, une éclaircie peut-être même. Un reflet de quelque chose qu’on craint tous connaître. C’est un concentré de sensations très intimes, et le titre de l’œuvre de Carole Benzaken brouille les pistes. C’est l’hiver. Pas de fruits, donc… Manque. Malaise. Un texte sur un panneau donne un arrêt brutal à l’imaginaire qui s’emballe, et apporte une confirmation dans l’impression oppressante qu’un danger plane dans cette image-miroir : « Les arbres du Sud portent un fruit étrange / Du sang sur les feuilles et du sang sur les racines / Des corps noirs qui se balancent dans la brise du Sud / Un fruit étrange suspendu au peuplier. » Ce sont les paroles d’une chanson datée de 1946 (Abel Meeropol), interprétée par Billie Holliday, évoquant les Neckties Parties, pendaisons des Noirs dans le Sud des États-Unis, auxquelles on venait assister comme devant un spectacle. On revient alors se confronter à la peinture sur verre feuilleté. Elle est maintenant une proposition d’un regard à la loupe sur un drame. Il se déroule hors-champ, plus menaçant encore. Face au texte, la structure. Enigmatique. Imposante. Dressée vers la voute de Sainte-Anne. Les couleurs des vitraux se reflètent, floues, sur le blanc des panneaux. On se souvient qu’on est dans une église. Comme les autres artistes invités avant elle à investir ce lieu religieux désacralisé, Carole Benzaken réinterprète l’espace, dialogue avec ses symboles et son histoire. Avec Yod, dessinée avec le concours de SHEMAA Architectes, elle habite l’église en en transcendant ses codes (pointe dressée vers le ciel, ouvertures vers un intérieur sombre et mystérieux, façades sobres et blanches), en imposant ses propres chemins, liés au passé tumultueux du peuple juif. Yod, dixième lettre de l’alphabet hébreu et initiale du prénom du prophète Yechezq’l, est une sculpture qui reflète et contient à la

Carole Benzaken, Yod, 2015 © SCHEMAA Architectes

leds. Ils n’ont pas tous le même souffle. Chacun a son histoire. Ils sont comme des carrés de peau, observée au microscope. Vaisseaux sanguins, tissus dermiques. Comme dans Strange Fruit 2, le mouvement affleure. La troisième dimension est suggérée. Un récit s’immisce dans l’abstraction de l’image. C’est un voyage dans le temps et dans la matière Saviv saviv, 2015, Courtesy galerie Nathalie Obadia, Paris Bruxelles © David Bordes que nous propose Carole fois. Une œuvre binaire. Extérieur - intérieur, Benzaken. Les branchages des arbres du support - contenant, écrin - objet d’art. Sud américain se superposent aux systèmes veineux, s’imposent au regard dans les 15 cuves de Saviv saviv : la souffrance des corps Voyage dans le temps et des âmes côtoie la vie qui pulse, et l’œuvre et la matière célèbre une certaine régénérescence. Dedans, dans le noir, les 15 cubes (l’artiste aime Les reflets des vitraux de Sainte-Anne attirent à parler de cuves, et c’est plus juste, tant ce vers la sortie de Yod. Subtil et lumineux langage, qui s’y déroule à l’intérieur semble bouillonner, circulation intuitive suggérée par l’artiste. traversé d’une énergie irrépressible). On découvre enfin Magnolias (Encre de C’est Saviv saviv. (dessins inclus dans du chine et crayons, feuilleté sur verre, 160 x verre feuilleté, rétroéclairés et intégrés dans 120 cm, 2015), tout en couleurs, traits nets, un module ; 15 modules, 60 x 60 x 40 cm, superpositions de matières. 2015, suite d’un long travail initié en 2009). On sort du brouillard. On lève le regard Les modules sont au centre de l’antre. Dédale au-dessus du puits. de vitraux horizontaux et flous. On tourne Les arbres semblent, pour un temps, avoir autour (Saviv, en hébreu, se traduit autour), refleuri. ANNA ZISMAN on se penche au-dessus de ces carrés comme on le ferait vers un puits, cherchant à voir jusqu’au fond, à mesurer la distance qui nous Yod sépare de l’abîme. jusqu’au 22 mai Les cubes respirent au rythme de la pro- Carré Sainte-Anne, Montpellier grammation de l’éclairage des ampoules 04 67 34 88 80 montpellier.fr


marseille

bouches-du-rhône arts visuels

au programme

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Street Art Cette troisième édition met en avant la scène émergente du street art européen et les créateurs inspirés par l’art urbain. Calam et Geoffroy de Boismenu en guest artists. Programmation éclectique, pluridisciplinaire, avec des travaux d’atelier et cette année un hors-les-murs aux Docks Village de Marseille du 2 au 15 juin. C.L.

Marseille Street Art Show#3 jusqu’au 30 août Galerie Saint Laurent, Marseille 04 91 47 45 70 galeriesaintlaurent.com

Inspire yourself de Pokras Lampas, un des maîtres du calligraffiti contemporain russe © X-D.R.

Festival La Photo se livre Si les journées de la microédition et du livre d’artiste photographique fêtent leur 2e édition, la galerie de La Fontaine obscure a depuis longtemps acquis ses lettres de noblesse. Raison de plus pour découvrir ses expositions (L’auberge d’Estelle Lagarde) et des maisons d’édition (Arnaud Bizalion), expérimenter ses ateliers de création de livre-objet et participer à la table ronde sur la narration photographique sur les murs et dans le livre. M.G.-G. Galerie de La Fontaine obscure, Aix-en-Provence 31 mai au 11 juin 04 42 27 82 41 fontaine-obscure.com

Chapitre 5 © Estelle Lagarde, agence révélateur

Traces Que nous dit la surface des choses ? Marie Sommer retient les traces minérales en partie issues des friches industrielles désaffectées, tandis que sur les murs argentins Marina Losada relève les témoignages d’amour laissés ici et là. Forte d’un grand succès dans son pays, cette série sera aussi sa première exposition offerte en Europe. C.L. Surfaces jusqu’au 25 juin Comptoirs arlésiens de la jeune photographie, Arles 06 07 78 94 71 comptoirsarlesiens.com

© Marina Losada

Pour la singularité Galerie de vente d’œuvres originales en ligne créée à Avignon, lagalerienomade.fr s’offre des cimaises au 38 rue du 4 septembre à Arles, avec pour première exposition un ensemble d’œuvres de Caroline Trucco, Rose Lemeunier, Fabien Boitard, Madhu&Ikuru Kuwajima autour de la question de l’uniformisation de nos sociétés. C.L. Tous uniformes ? jusqu’au 18 juin lagalerienomade.fr, Arles 09 83 68 94 83 lagalerienomade.fr

Caroline Trucco, Cannes enfumées sur moule blanc © Florent Borgna


64 au programme arts visuels bouches-du-rhône gard

En double Résidence d’artistes située à Aureille, les Ateliers Fourwinds proposent une double exposition arlésienne avec les sculptures d’Ursula Hanes et les peintures photographiques inspirées par la matière de Vianney Pinon. À l’Espace Van Gogh jusqu’au 6 juin, et dans le jardin de la Villa J jusqu’au 18 juin avec rencontre/discussion à 18h30 entre Ursula Hanes et Ariane Allard, journaliste. C.L. Nature humaine 27 mai au 18 juin Villa J, Arles 04 90 93 80 30 25 mai au 6 juin Espace Van Gogh, Arles 04 90 49 39 39 ateliersfourwinds.com

Sentinelles du vallon des caisses II © Ursula Hanes © Lionel Jarmasson

Visions portées À l’invitation d’Arteum, quatre habitantes de Châteauneuf-le-Rouge se sont réapproprié les collections du musée et du Fonds départemental des Nouveaux collectionneurs au Collège. Leur « commissariat » orienté sur les notions d’entraves et de libertés permet de croiser les deux corpus (de Bellissen à Talard et de Moreno à Hervé Paraponaris) en offrant une nouvelle lecture des œuvres ainsi mises en regard. M.G.-G. jusqu’au 9 juillet Arteum, musée d’art contemporain, Châteauneuf-le-Rouge 04 42 58 61 53 mac-arteum.com

Killmainhall Gaol, 2015 © Nicolas Daubanes

Ugo Rondinone Pour son exposition personnelle nîmoise, Ugo Rondinone a repensé entièrement les espaces du musée comme un vaste paysage. Peintures de nuits étoilées, paysages grands formats à l’encre de Chine, installations d’animaux en bronze tous différents de forme et dimensions, en correspondance avec la nature, suggèrent une vision romantique autant que le sublime. C.L. Becoming soil jusqu’au 18 septembre Carré d’art, Nîmes 04 66 76 35 70 carreartmusee.com

Blue White Blue Clock, 2013, vitrail, fil, diam. 50 cm. Courtesy de l’artiste et Galerie Eva Presenhuber, Zürich © Ugo Rondinone

Tenter la ville Rendez-vous incontournable du mois de l’architecture de Nîmes, les rencontres proposent différentes approches photographiques pour décrire la ville et ses habitants. Santiago du Chili revisitée par Alexis Diaz ou Lokichokio, une ville « artificielle » au Kenya captée par Michael Zumstein, l’habitat léger des décroissants vu par Myrtille Visscher, Edith Roux à la rencontre des Ouighours. C.L. Rencontres images et villes 2016/Habiter jusqu’au 31 juillet Galerie Negpos Fotolft, Nîmes 04 66 76 23 96 negpos.fr Edith Roux, série Les dépossédés, 2010-2011 © Edith Roux courtesy galerie Negpos


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hérault arts visuels

au programme

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Marie Piselli Profondément marquée par l’âme de la prison qui jouxte son atelier, évacuée après les inondations de 2014, l’artiste plasticienne Marie Piselli a décidé d’y puiser la matière première à son installation et à sa réflexion sur l’enfermement. Au visiteur de découvrir d’authentiques portes de cellules, d’explorer les limites de l’espace pour réussir à les dépasser, de découvrir ses œuvres-objets muni d’un « guide visuel » conçu par l’artiste. Un parcours singulier pour une expérience inédite. M.G.-G. Hop…e jusqu’au 16 juillet Musée d’arts et d’histoire, Chapelle de l’Observance, Draguignan 04 98 10 26 85 / 04 94 84 54 31

Ciel, pas si simple © Marie Piselli

Photomed Le festival, dont l’ambition est de mettre en exergue par la photographie les valeurs positives et partagées des Méditerranéens, dédie sa 6e édition à la photographe Leila Alaoui, victime des attentats de Ouagadougou en janvier 2016. Pas de « pays phare » cette année mais des variations proposées par l’écrivain, photographe et historien de l’art Guillaume de Sardes autour du cinéma, des vestiges antiques et de Beyrouth où Photomed est implanté depuis trois ans. M.G.-G. 26 mai au 19 juin Sanary-sur-Mer, Toulon, La Cadière, île des Embiez festivalphotomed.com © Nick Hannes, Cosmos, série Méditerranée

Planter le décor Lauréat de la première résidence Booster réalisée par l’association Le Port des créateurs à Toulon, Victor Remere plante le décor sur le territoire toulonnais, au propre comme au figuré. L’artiste plasticien et artisan sculpteur nancéen rassemble les traces de sa réflexion sur la végétation ornementale, de son passage dans la ville, de ses rencontres avec les habitants et les étudiants de l’école d’art. M.G.-G.

07 83 30 73 75

jusqu’au 28 mai L’Axolotl, Toulon leportdescreateurs.net

© Victor Réméré

Shadoks ! « Ga Bu Zo Miam », kezako ? Une exposition haute en couleur et en impertinence par fidélité à l’humour de Jacques Rouxel, auteur modeste et discret des fameux Shadoks, ces petits personnages mi-hommes mi-oiseaux à la langue bien pendue. Le MIAM les fait revivre à travers des dessins préparatoires et des story-boards originaux, des films de commande, des produits dérivés et des œuvres d’artistes contemporains qui cultivent le même état d’esprit. M.G.-G. Shadoks ! Ga Bu Zo Miam 18 juin au 6 novembre MIAM, Sète 04 99 04 76 44 miam.org

Shadoks © Jacques Rouxel - aaa production


66 critiques livres

Le juste ton C

’est une belle histoire de notes et de mots. De voyages aussi. Dans le monde, la musique, la langue. Zeina Abiracheb revient au roman graphique avec Le piano oriental, un ouvrage superbe qui déploie ses lignes et ses volutes en noir et blanc sur plus de 200 pages, et qu’on referme à regret. La jeune bédéiste et illustratrice franco-libanaise plonge une fois encore dans le passé de sa famille et dans le sien pour cerner une identité complexe. Le piano oriental débute à Beyrouth en 1959 au moment où Abdallah Kamanja vient de recevoir la réponse positive d’un célèbre facteur de pianos viennois : le piano très spécial qu’il a mis au point intéresse ! C’est qu’Abdallah Kamanja -le personnage, fictif, est inspiré de la figure de son grand-père auquel Zeina Abiracheb dédie le livre-, a trouvé, après moult tentatives infructueuses et grâce à l’aide bien involontaire d’une voisine excédée, comment rendre, sur un piano européen, le quart de ton oriental.

Loin des yeux de l’Occident J

ustine est née à 5 ans d’un coma. Pour elle, avant, c’est l’amnésie totale. Ce n’est pas son père, avec qui elle vit au Caire, qui l’aidera dans la quête de ses origines. Il apparaît en effet, comme un véritable censeur de la mémoire. Trois mots sont totalement proscrits de leur vocabulaire commun : mère, Liban et coma. C’est dans ce mystère de sa petite enfance que Justine devra pourtant grandir. Écartelée entre une vie de mensonge par omission et la réalité. Son père, qui n’est pas à une contradiction près, lui infligera tout au long de sa jeunesse

« Je tricote depuis l’enfance une langue faite de deux fils fragiles et précieux » écrit-elle joliment. Le livre tricote lui aussi deux histoires : celle d’Abdallah et celle de Zeina. On passe de l’une à l’autre, comme au fil d’associations d’idées, l’aventure viennoise de l’un appelant les voyages de l’autre ; le système particulier du piano faisant écho à la langue particulière de la narratrice. On retrouve avec plaisir le graphisme de Zeina Abiracheb, à la fois net, très contrôlé, si lyrique pourtant. Et son univers, d’une tendresse, d’un humour, d’une poésie inimitables. FRED ROBERT

Cette invention révolutionnaire ne connaîtra pas le succès escompté, mais qu’importe. Avec son « piano oriental » Abdallah aura lancé un pont musical entre l’Occident et l’Orient. Comme le fait la narratrice, toujours entre Paris et Beyrouth, entre le français et l’arabe.

des discours litaniques obsessionnels : pour lui, les deux grandes tragédies de la chrétienté d’Orient sont la fin de Byzance et la chute de Constantinople en 1453. Depuis, tout est déclin, chaos et laxisme. Tout est halluciné se présente ainsi comme un roman sur la quête de soi et l’émancipation. Justine va se lancer à corps perdu dans la littérature et l’écriture pour inscrire ses propres mots sur sa vie, comme seules grille de lecture de la réalité. À travers le destin de son héroïne, Hyam Yared nous emmène dans une vaste fresque qui dépeint en parallèle des adultes figés dans le passé et des jeunes gens engagés dans la réalité contemporaine du Moyen-Orient. Ce sont ces derniers qui prennent la parole contre le monde occidental près à soutenir les dictateurs du monde arabe tant qu’ils sont pourvoyeurs de pétrole par exemple. Leurs analyses du chaos géopolitique des pays arabes, leurs révoltes, leur sens critique aiguisé et leurs espoirs déçus des « printemps » campent un point de vue lucide et passionnant sur les rapports entre Orient et Occident. Un livre indispensable parce qu’il donne à entendre le point de vue du Moyen-Orient par lui-même, loin du regard trop souvent monolithique et à sens unique de l’Occident. FRANCK MARTEYN

Tout est halluciné Fayard, 20 €

Hyam Yared

Zeina Abiracheb était invitée aux Escapades littéraires de Draguignan en avril dernier. Elle sera prochainement au MuCEM (voir p. 16)

Le piano oriental Zeina Abiracheb Casterman, 22 €

Aux sources de A

u cœur des Cévennes ardéchoises, la grotte Chauvet-Pont d’Arc recèle le plus ancien chef-d’œuvre de l’humanité : 447 peintures, dessins et gravures d’animaux réalisés il y 36 000 ans. Jean-Jacques Salgon a eu le privilège de franchir la porte blindée qui donne accès à ce sanctuaire, fermé au grand public depuis sa découverte en 1994. Dès son premier livre, 07 et autres récits*, la place accordée dans son œuvre à l’Ardèche du Sud, dont il arpente depuis l’enfance les garrigues de calcaire, lui valait bien cette formidable plongée « dans les tréfonds d’une lointaine mémoire ». L’écrivain n’a pu oublier l’éblouissement ressenti, ce matin d’août 2004, devant des œuvres chargées d’humanité, offertes au regardeur


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Lignes de vie

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n 1943, neuf mille prisonniers de guerre australiens sont affectés à la construction de « la Voie ferrée de la Mort », que les Japonais veulent construire dans la jungle pour approvisionner leurs alliés birmans. Une Ligne de

l’art

et de la connaissance qui rend pleinement humains ». À ses côtés, avant, pendant et après la guerre, d’autres humains se fraient une voie, tellement humains, même les moins glorieux, même les ordures. Cette traversée de la jungle, et des années, est illuminée par la fraternité, l’amour aussi malgré les ironies du destin, et la passion de la littérature. Le titre du roman vient d’un recueil de Bashô ; des haïkus le ponctuent, de nombreux vers y résonnent. Car les livres sont des viatiques, qui seuls peuvent « donner forme et sens » à l’horreur et à la vie des hommes. FRED ROBERT

La Route étroite vers le Nord lointain Richard Flanagan Traduit de l’anglais (Australie) par France Camus-Pichon Actes Sud, 23 €

L’Art du document

« dans leur fraîcheur, dans leur naturalisme, dans l’immédiateté de leur présence ». Mais quelque chose en elles se dérobait au regard. C’est ce mystère que Parade sauvage tente de percer. Jean-Jacques Salgon se fait chasseur-cueilleur. Il emprunte librement les voies qui se présentent à lui pour se rapprocher de ces Aurignaciens qui, à l’abri d’un monde inhumain et hostile, dessinèrent « les corps magnifiés » d’animaux redoutés, lions et ours des cavernes, mammouths et rhinocéros. Le récit avance par fragments, cairns posés sur le chemin de « ces mondes perdus », où l’ordre sauvage régnait sur la relation entre l’homme et l’animal. Quête et méditation mènent à Georges Bataille, Jean Rouch ou Racine, au rituel de la chasse et aux origines de l’art, à la corrida, au chamanisme ou à l’astronomie. L’auteur montre les images de la grotte à la peintre Judith Reigl, au torero Juan Bautista, visite d’autres cavernes : l’atelier de Claude Viallat, une église orthodoxe russe, une galerie d’art oriental… Et en revient à son enfance, aussi lointaine désormais que ces jours « où les aurochs couraient sur les bords de l’Ardèche ». *Éditions Verdier (1993)

l’Enfer, dont peu reviendront tant les conditions de vie et de travail à marche forcée y furent effroyables. Aux épidémies, à l’insalubrité, à la faim, aux trombes de la mousson s’ajoute la violence des châtiments infligés par les soldats japonais sous le moindre prétexte. S’inspirant de l’histoire de son père, rescapé de la Ligne, l’écrivain tasmanien Richard Flanagan met magistralement en lumière un fait historique méconnu. On aurait cependant tort de lire La Route étroite vers le Nord lointain comme un simple récit de guerre. Ce superbe roman, centré sur la figure et les étapes de l’existence de Dorrigo Evans, offre, comme toutes les plongées au cœur des ténèbres, une intense méditation sur la vie et l’humanité. Un personnage attachant que ce major, devenu héros presque malgré lui -c’est du moins ainsi qu’il se perçoit, lui qui pense qu’il n’y a « d’hommes que ceux morts sur la Ligne. […] seuls à avoir en eux la terrible perfection de la souffrance

MARIE MICHAUD

Parade sauvage Jean-Jacques Salgon Éditions Verdier, 13,50 €

N

e vous méprenez pas sur le titre et ni ne reposez ce livre d’un air peu amène. Document, fiction et droit en art contemporain ne relève pas du manuel juridique ! Cet ouvrage collectif constitue le prolongement du colloque éponyme qui s’est déroulé à Marseille et Bruxelles en 2013, à l’initiative de Jean Arnaud, artiste plasticien et enseignant à l’université d’Aix-Marseille/LESA (Laboratoire d’Études en Sciences des Arts) et de Bruno Goosse, artiste lui aussi et professeur à l’Académie royale des Beaux-Arts de Bruxelles/POL®ART. Bien trop dense pour être résumé ici sans gauchir les différentes entrées, approches et croisements des champs de réflexion, l’ouvrage, appuyé sur de nombreuses illustrations, cherche par le truchement des participations de philosophes, juristes, historiens de l’art, commissaires d’exposition et artistes (Kader Attia), à cerner les multiples modalités d’appropriation élaborées par les artistes contemporains concernant le concept de document, et de l’objet matériel lui-même, comme les dispositifs conceptuels et d’exposition singuliers qui peuvent en surgir. Ainsi, l’œuvre performative conçue par les artistes Olive Martin et Patrick Bernier en collaboration avec des avocats, X. et Y. c/Préfet... Plaidoirie pour une jurisprudence associe l’art et le droit sur la question du droit d’auteur pour les étrangers. Dans le domaine

musical, Christine Esclapez propose pour sa part « de travailler sur l’archive comme possible collecte d’un processus de création musicale fondé sur l’improvisation » en s’appuyant sur l’œuvre de l’artiste espagnole Fátima Miranda. De l’archive comme témoin vers la mise en fiction du réel, du statut juridique à l’œuvre d’art, de l’œuvre comme simulacre documentaire, sur la question de l’appropriation plus généralement, d’aucuns ont bien sûr avancé l’idée d’envisager le document comme œuvre. Attendons avec quelque impatience que ce livre le devienne. CLAUDE LORIN

Document, fiction et droit en art contemporain Presses Universitaires de Provence, 28 €


68 critiques livres

Georgia de A à Z C

’est un roman…oui peut-être -Prix Ulysse du premier roman / Prix Senghor du premier roman francophone et francophile- et celle qui dit « je » est pourtant bien, comme le confirment certains indices, madame Makhlouf, journaliste et chroniqueuse à L’Orient-Le Jour. Ce refus de l’assignation autobiographique se repère déjà dans la belle et si juste citation en exergue d’Amin Maalouf « Je n’aime

pas le mot « racines »… nos pieds ne servent qu’à marcher. Pour nous, seules importent les routes » et engage l’auteur à biaiser, autrement dit à faire entreprise littéraire : « Certains noms et adresses sont tout ce qui reste de pans entiers de ma vie, de ses replis inquiets, de ses méandres incertains » ; les carnets (celui de Beyrouth / celui de Paris) seront donc les chemins à remonter la mémoire de ceux qui ne sont plus, morts ou disparus, Les Absents donc. L’ordre alphabétique fait mettre un pied devant l’autre à la narratrice qui zigzague entre les années en brossant portrait après portrait -chacun s’abat comme une carte déterminante dans la construction de sa personnalité- les grandes lignes d’un Liban perpétuellement en guerre et d’une jeune femme, elle-même, éprise de liberté, sensible et lucide. Répétitif le procédé installe un léger ennui quand les personnes évoquées (ne citons pas de nom) n’ont de lien qu’avec l’intime mais éclaire en les ravivant les années 70-80 à Beyrouth et à Paris vécues de l’intérieur d’un milieu de gauche, qui affronte avec courage les horreurs de la guerre et les contradictions idéologiques.

Précis de décomposition urbaine S

uburra, c’est le nom d’un quartier mal famé de Rome. C’est aussi le titre d’un roman noir, d’un film, et bientôt d’une série. C’est dire le succès de cette turpide histoire de projet immobilier sur fond de guerre des gangs, qui révèle crûment les accointances et les petits arrangements qu’ont à Rome l’État (des élus aux juges en passant par certains chefs de la police), le Vatican et la mafia. Quelques dates d’abord. 2013 : le roman paraît en Italie, coécrit par le juge au tribunal de Rome Giancarlo De Cataldo (déjà connu des amateurs de polar pour Romanzo criminale et autres histoires de gangs et de mafia) et Carlo Bonini, journaliste d’investigation à la Repubblica et grand collecteur de faits divers peu clairs. Fin 2014 : le scandale « Mafia capitale » éclate, éclaboussant au passage pas mal de personnalités du monde des affaires et de la politique. La fiction échafaudée par

les deux spécialistes des coulisses criminelles du pouvoir semble avoir simplement anticipé la réalité. Décembre 2015 : une adaptation du roman arrive sur les écrans, signée Stefano Sollima (réalisateur de la série Gomorra) ; scénaristes : De Cataldo et Bonini. 2016 : si l’on peut aisément se passer de voir le film (hyper violent et caricatural), il est recommandé de plonger dans la version

Une écriture aisée et un parfait classicisme de la langue française mettent peut-être trop à distance des affects qui ainsi policés se teintent de lieu commun, « Parfois la colère me prenait, grossissait comme une vague, je détestais cette absente que j’étais devenue, car il fallait bien se rendre à l’évidence, je n’étais plus vivante qu’à moitié », et du coup ne touchent le lecteur qu’en surface. Mais si « je » est une autre alors… MARIE-JO DHO

Georgia Makhlouf était invitée aux Escapades Littéraires à Draguignan du 22 au 24 avril

Les Absents Georgia Makhlouf Rivages/ L’Orient des Lettres, 20 €

française du roman, tout juste éditée aux éditions Métailié, d’autant que la remarquable traduction de Serge Quadruppani rend à merveille la vivacité des dialogues et la tension générale de cette fiction ultra réaliste. Des personnages nombreux et bien dessinés, des scènes d’anthologie (très visuelles, encore une bonne raison d’éviter le film) et une réflexion intéressante sur la politique et la citoyenneté, malgré un cynisme glaçant, puisqu’à la fin, on en prend d’autres et on recommence. Mais n’est-ce pas là la meilleure façon d’alerter le lecteur ? C’est en tout cas ce que semblent penser les deux auteurs, qui n’y vont pas de main morte, et qu’on est tenté de suivre, tant leur connaissance des « affaires » est précise et leur talent à les mettre en scène éclatant. FRED ROBERT

Suburra Carlo Bonini & Giancarlo De Cataldo Traduit de l’italien par Serge Quadruppani Métailié Noir, 23 €


rencontres

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La porte de la paix Annie Terrier et les Écritures Croisées, en partenariat avec l’Institut de l’Image et l’Institut d’Études Politiques d’Aix, ont organisé une rencontre de trois jours avec la Caravane culturelle syrienne, intitulée Liberté pour le peuple syrien. Le grand camping-car rose s’est arrêté à la Cité du Livre, apportant le langage universel de la culture et des hommes de bonne volonté

P

our évoquer cette manifestation, reprenons en titre le nom d’une des portes de la ville d’Alep, « la porte de la paix », à l’instar du magnifique trio Bab Assalam1 qui a enchanté l’amphithéâtre de la Verrière mêlant la beauté des chants, les accents du oud (Khaled Aljaramani) et des percussions (Mohanad Aljaramani) aux volutes inspirés de la clarinette (Raphaël Vuillard). Focale Syrienne-Guerre en contraste 2 ouvre ces journées avec les photographies de Hosam Katan, primé cette année du prestigieux Nannen Preis. On y voit le quotidien, la tendresse, les jeux, les barbelés, les destructions, sous un angle qui esthétise, donne à comprendre sans heurter, même dans l’imprescriptible horreur du petit Dormeur du val, dans les gravats.

Un demi-siècle de dictature du clan Assad Le politologue François Burgat en explique la complexité : il y a la machine à broyer des russes/les revirements de l’occident/les revendications d’un véritable état/la volonté d’un retour à la situation d’avant 2011/les radicaux pour un « sunnistan »/les groupes mafieux qui profitent du désordre ambiant… et aujourd’hui une situation simple, la planète entière contre Daesh, les opposants au régime mis en échec par les russes et Assad, qui s’avère soutenu par tous…

Place de l’art dans un pays aussi meurtri L’art reste essentiel, « malgré la déraison de l’impitoyable présent » (A. Terrier). Mohamad Al Roumi, président de la Caravane culturelle syrienne insiste : « Une cause oubliée est une cause perdue ». Pour Farouk Mardam Bey, directeur des éditions Sindbad (Actes Sud) « depuis 2011, la Syrie vit la plus grande catastrophe humanitaire au monde depuis la 2e guerre mondiale ». Il pose les jalons de la table ronde axée sur le thème

Exposition Focale Syrienne-Guerre en contraste, Hosam Katan © Maryvonne Colombani

L’art, langage universel, et pose la question des caractéristiques de la nouvelle écriture syrienne. L’écrivain Yassine Haj Saleh en expose les transformations depuis 2011 : la présence de gens ordinaires, la vie quotidienne font leur intrusion, de même que la narration d’expériences personnelles. Le sens tragique domine cette écriture ce qui mène à une confrontation avec ses codes. Une foule d’écrivains inconnus émerge. Enfin, résultat de la situation (70 pays se battent en Syrie), une ouverture nouvelle sur le monde.

Écrire, un acte de résistance Samar Yazbek évoque son expérience d’auteure : « Par ces temps de massacre, l’idée première était de trouver comment transposer ce qui se passait dans la rue. Mon rôle était de transmettre… Romancière, je ne pouvais me voir de loin, en tant que journaliste, témoin, comme une forme d’exil que je vivais en moi, avec la question des moyens à mettre en œuvre pour accéder à l’esthétique à laquelle j’aspirais. » « L’obsession quand on voit ce qui se passe, renchérit la journaliste Hala

Kodmani, c’est de témoigner. Le phénomène du reporting s’est multiplié avec une foule de citoyens reporters qui sont en train d’inventer un genre nouveau : le reportage sur le terrain n’existait pas dans l’histoire de la presse arabe. » Les textes de ces auteurs, lus avec finesse par Macha Makeïeff, illustrent la justesse de leurs propos. La traductrice Rania Samara brosse un passionnant panorama de l’histoire littéraire syrienne, sourit à propos de l’explosion de la créativité qui ne lui laisse plus le temps de tout traduire. La poésie dense, symbolique, empreinte d’une subtile liberté, de Kouloud Al Zghayare et de Golan Haji clôt ces rencontres, réconciliant l’être et les mots. L’art, une porte de la paix… MARYVONNE COLOMBANI

Bab Assalam : traduction « la porte de la paix » Projet porté des étudiants de Science Po Aix et l’association Courant d’Art

1

2

La Caravane culturelle syrienne s’est tenue du 9 au 11 mai (exposition jusqu’au 21 mai) à la Cité du livre d’Aix-en-Provence. Cet automne à la Friche de la Belle de Mai de Marseille, en novembre à la MJC de Martigues, bientôt en Allemagne à la Fondation Heinrich Böll…


70 histoire

La Commune Révolutionnaire de Marseille

Épisode 2

1870. Depuis près de vingt ans, la France est gouvernée par Napoléon III. Le Second Empire masque la colère sociale du pays par une prospérité industrielle apparente et des conquêtes coloniales. Le 19 juillet, la guerre est déclarée à la Prusse. La ferveur patriotique étouffe un temps la contestation populaire. Mais rapidement, l’armée est en débâcle. Le 2 septembre, l’Empereur, capturé par les Prussiens, signe l’acte de reddition. Le 4 septembre, la République est proclamée en France. À Marseille, où la rébellion couve depuis des mois, il règne un climat révolutionnaire. leurs actions et s’en prennent violemment aux notables et à l’Eglise. À son arrivée, Esquiros avait constaté que la dictature à Marseille était « celle de l’opinion publique », et il décida de lui accorder quelques « sages concessions ».

Marseille © Malika Moine

La Ligue du Midi

D

ès l’annonce de la proclamation de la République, des milliers de Marseillais se sont rassemblés devant la Préfecture. Au matin du 5 septembre 1870, le peuple enfonce les portes et prend possession du bâtiment, symbole du pouvoir impérial. Pour tenter de maîtriser la situation, Léon Gambetta, ministre de l’Intérieur dans le tout récent gouvernement de la défense nationale, nomme Alphonse Esquiros comme administrateur supérieur des Bouches-du-Rhône. Celui-ci est connu pour ses idées socialistes et anticléricales, et le 7 septembre il est accueilli à Marseille avec

enthousiasme. Il souffle alors en ville une grande excitation populaire, encouragée par les gardes civiques. Cette sorte de milice citoyenne, qui regroupe essentiellement des ouvriers, s’est constituée de fait lors de l’occupation de la Préfecture. Les républicains modérés, un peu débordés, ont laissé se former cette garde civique révolutionnaire, qui fait autorité dans les rues. Elle procède à des arrestations expéditives et se montre intransigeante envers tous les opposants à la Révolution. Avec la bienveillance d’Esquiros, les gardes civiques accentuent

Mais l’administrateur se trouva rapidement pris entre deux feux : d’un côté, maintenir l’ordre et d’un autre, laisser s’exprimer la Révolution. La mission est complexe, elle l’est d’autant plus que le gouvernement central est sous la menace. Les Prussiens s’approchent de Paris, et la France semble incapable de résister à l’avancée. La nation est proche de l’implosion. Pour défendre la souveraineté du territoire, Esquiros accepte les propositions d’un comité qui réclame la création d’un gouvernement du Midi. Le 14 septembre, Esquiros adresse un ultimatum à Paris. Il demande sous trois jours l’autorisation pour les départements du Midi de s’organiser militairement. La réponse ne vient pas, et le 18 septembre, il annonce la constitution de la Ligue du Midi, qui aura « la liberté d’action entière pour l’organisation de la défense nationale ». Treize départements s’unissent pour essayer de « sauver le Nord » : Bouches-du-Rhône, Gard, Hérault, Var, Vaucluse, Alpes Maritimes,


71 Basses-Alpes, Hautes-Alpes, Drôme, Ardèche, Haute-Loire, Rhône et Isère. Marseille est désignée capitale de cette Fédération, qui forme un véritable gouvernement, avec Esquiros à sa tête. Mais au-delà du programme militaire, l’ambition de la Ligue est aussi d’imposer des décisions politiques et révolutionnaires : confiscation des biens du clergé, séparation de l’Eglise et de l’Etat, application d’un impôt sur la fortune, liberté de la presse, etc.

Risque de guerre civile Le gouvernement central ne veut pas céder à cette agitation, mais il est déjà dépassé par son ampleur. Début octobre, la Ligue du Midi annonce : « Nous sommes résolus à tous les sacrifices, (...) et nous ferons appel à la Révolution implacable et inexorable, avec toutes ses haines, ses colères et ses fureurs patriotiques. » Gambetta tente de destituer Esquiros. Mais le soutien de la population, qui a juré « de brûler la ville plutôt que de laisser partir Esquiros », est tel qu’il reste en poste. Durant tout le mois d’octobre, l’opposition au pouvoir central ne cesse de s’amplifier. Le gouvernement, qui face à l’avancée des Prussiens, s’est replié à Tours, n’a plus la moindre prise sur les événements.

le commandant ordonne à la garde nationale d’encercler l’Hôtel de Ville.

La Commune proclamée Le 1er novembre, la colère gronde en ville. La population n’accepte pas cette intimidation de la garde nationale. La foule se rassemble et marche sur la mairie. Les gardes nationaux sont vite débordés, le barrage est facilement forcé, et dans l’enthousiasme, la Commune Révolutionnaire de Marseille est proclamée officiellement. Des affiches recouvrent aussitôt les murs, annonçant : « Citoyens du Midi, une Commune Révolutionnaire, acclamée par le peuple marseillais, vient de s’installer à l’Hôtel de Ville. (...) Son but, citoyens, le voici : le salut de la République française une et indivisible. Le peuple a cru la majorité du conseil municipal incapable d’accomplir cette grande et noble tâche, il a voulu le remplacer par une Commune Révolutionnaire agissant avec énergie et résolution. » L’ambition de la Commune est d’être reconnue par le gouvernement de Tours et de rendre officielle la Ligue du Midi. Mais Gambetta n’entend pas céder et veut reprendre la main. Il lui faut

gardes civiques de la Préfecture. La population, redoutant un bain de sang, se masse devant le bâtiment pour empêcher l’affrontement.

L’ordre rétabli Après plusieurs heures de tension, le 4 novembre, les civiques acceptent de quitter les lieux dans le calme. Gent vient de gagner sa première bataille. Le retrait des civiques entraîne de fait la chute de la Commune, qui n’aura duré que quatre jours. Les insurgés quittent la mairie, mais Gent refuse de les poursuivre, persuadé que le calme précaire repose sur cette indulgence. En quelques jours, l’ordre est effectivement rétabli. Le 8 novembre, Gent annonce la fusion de la garde civique et de la garde nationale. Le même jour, Gambetta déclare la Ligue du Midi illégale. Le 13, Gent adresse un télégramme à Gambetta, assurant que « l’ordre tout entier règne à Marseille ». Mais sous ce calme apparent, l’instabilité et l’effervescence vont couver pendant tout l’hiver. Jusqu’au printemps 1871, où la ville va connaître sa seconde Commune Révolutionnaire et une sanglante répression. À suivre... JAN-CYRIL SALEMI

« (...) Le peuple a cru la majorité du conseil municipal incapable d’accomplir cette grande et noble tâche, il a voulu le remplacer par une Commune Révolutionnaire agissant avec énergie et résolution. » La situation est devenue explosive à Marseille qui vit désormais en situation de totale rébellion. La Ligue du Midi et les révolutionnaires s’opposent aux républicains modérés et la ville n’est pas loin de la guerre civile. Toutes les conditions sont réunies pour que bientôt la Commune s’empare du pouvoir. Fin octobre, les révolutionnaires parviennent à faire voter par la municipalité un impôt de trois millions de francs sur les riches, destiné à la Ligue du Midi. Mais des membres modérés du conseil municipal n’entendent pas laisser la Révolution s’imposer. Ils craignent que la mairie soit envahie et en avertissent le commandant de la garde nationale. À la différence des gardes civiques, qui sont une sorte de milice révolutionnaire, les gardes nationaux sont les représentants légaux de l’autorité. Le 31 octobre, pour parer à tout mouvement,

pour cela écarter Esquiros. L’administrateur, qu’il a lui-même nommé en septembre, lui est désormais ouvertement opposé et il est plus populaire que jamais auprès des Marseillais. Gambetta désigne alors Alphonse Gent pour succéder à Esquiros. Le 2 novembre, Gent arrive à Marseille. Sitôt sur place, il se rend à la Préfecture. Il y rencontre les gardes civiques, qui occupent le bâtiment depuis deux mois, et quelques délégués de la Commune. Ils essayent de le convaincre de céder son pouvoir à Esquiros. Gent refuse. S’ensuit une bousculade, un coup de feu part, Gent est atteint au ventre. Mais sa blessure est légère, et il parvient finalement à tirer profit de toute cette confusion. Il ne porte pas plainte contre l’auteur du coup de feu, et cette attitude lui attire la sympathie populaire. Le lendemain, la garde nationale reçoit l’ordre d’évacuer les


SAISON 2016–2017

M usiq ues d u monde • M usiq ue classiq ue Cirque • Jeune public • Théâtre • Opéra • Jazz Humour – Angelin Preljocaj • Mélanie Laurent • Emmanuelle Béart • James Thierrée • Kad Merad • Renaud Capuçon • Camille Berthollet • Pink Martini Muriel Robin • Catherine Frot • Natalie Dessay Isabelle Carré • Sophia Aram • Simon Abkarian Daniel Auteuil • Olivier Dubois • Fazil Say Stéphane Braunschweig... Ils vous donnent rendez-vous en 2016–2017 !

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