Zibeline n°33

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du 15/09/10 au 13/10/10 | un gratuit qui se lit

RentrĂŠe culturelle, vers quel avenir ?



Politique culturelle Le Théâtre de Toulon La Criée Les galeries marseillaises, le Parvis des Arts Formations : ISTS, ERAC, FIJAD 11

5 6à8 10

Festivals Le Festival d’Avignon Avignon Off Vaison Danses, les Hivernales, Châteauvallon Le Festival d’Aix, les Chorégies d’Orange La Roque d’Anthéron Festivals Durance Luberon, Chaillol L’Opéra au Village, TrumpetArtEnsemble Festival Côté Cour, les Nuits du Château de Trets Arles, Hyères, Six-Fours, Istres Jazz des 5 continents, La Roque, la Seyne

12, 13 14 à 18 20, 21 22, 23 24, 25 26 27 28 29 30, 31

Saisons La Minoterie, les Bernardines, le Lenche, le Off Athanor, Daki Ling, Marie-Jeanne, Archange, Parvis des Arts, la Compagnie Gap, Briançon, Aix, Sète

32 33 34, 35

Evénements Sainte-Maxime, ActOral, le Merlan

36

Théâtre Nono, Centaure, Gymnase, Théâtralia, pop philosophie Au programme

38 40, 41

Danse BNM, Pavillon Noir, Karwan, MOD, Théâtre Durance, Cavaillon Ollioules, 3bisf, Barjols

42 43

Musique Au programme La Meson, jazz Musiques actuelles Au programme

44 à 46 48 49 50

Arts de la rue Small is beautiful, Gardanne, Port-St-Louis Petit Art Petit, Port-St-Louis, Salon-de-Provence

52 53

Cirque Arles, Miramas, Château-Arnoux, Istres, Port-de-bouc, Pays d’Aix, Fos, Ollioules

54, 55

Jeunesse Massalia, St-Rémy, Saorge, Arles Institut Culture Italien, Badaboum théâtre Au programme Livres

56 57 58, 59 60

Cinéma Les rendez-vous d’Annie FFM, Best of Short Lussas, Avignon, Rustrel

62 63 64

Arts visuels Art-O-Rama, MAV PACA Istres, Avignon Aix-en-Provence La Ciotat, le Lavandou Toulon, Le Thoronet Au programme

66 67 68 69 70 71 à 73

Livres Arts Musique Littérature, essais Rencontres, Barjols

74, 75 76, 77 78 à 82 84, 85

Histoire Les Journées Européennes du Patrimoine Marseille au Moyen Âge

Sciences et Techniques Philosophie Michel Onfray Charlie Hebdo

Adhérents

86, 87 88 90 91 92, 93 94

Barbaries

Todorov l’écrivait dans La Peur des barbares : si «aucune culture n’est en elle-même barbare, aucun peuple n’est définitivement civilisé.» L’histoire récente s’attache hélas à lui donner raison. Barbarie l’expulsion des Roms, la stigmatisation comme ils disent pour ne pas avouer l’incitation à la violence, qui tombe sous le coup de la loi. Barbarie aussi l’indignation face à l’expulsion de ces Européens catholiques, quand les Africains sont éjectés depuis toujours sans soubresauts. Barbarie la lenteur de la solidarité internationale envers ces Pakis qui ont le mauvais goût de crever en août, et d’être musulmans. Barbarie ce mépris de la souffrance des hommes, ce déni absolu d’humanité, toutes ces lapidations insidieuses. La barbarie n’est pas à nos portes, elle est entrée dans nos cœurs. Elle déboussole notre sens des valeurs, nous laisse accepter, vaguement déroutés, que des têtes voilées traversent nos rues, que les adolescents agressifs terrorisent les passagers des bus communs, que les flics se fassent descendre, que les vieux soient ignorés, que l’image des femmes se dégrade, que la fille Le Pen gagne des voix. Plus grave encore, que les professeurs aient peur de monter en classe, que l’éducation se délite, l’enseignement de l’en-commun. Que notre peuple renonce à transmettre à ses enfants sa civilisation, seul rempart contre leur propre barbarie. Mais comment s’en étonner lorsque la possession est devenue la seule jouissance possible, lorsque la globalisation se résume à la mainmise économique, lorsque les plaies de l’histoire sont toujours déniées ? Lorsque l’éducation, la sécurité sociale au sens propre de ces termes, la culture, le savoir sont regardés comme des valeurs molles et ringardes ? Comme coûteuses, quand elles seules construisent ? Les Journées du Patrimoine célèbrent aujourd’hui les Grands Hommes. Les nôtres sont dans la rue : ils défendent la civilisation. Celle où le travail reçoit son salaire, où les agioteurs rengainent leur arrogance, où le savoir se transmet dans le plaisir, où les jeunes peuvent travailler. Où ceux qui ont trimé longtemps n’ont pas à soumettre leur dignité aux règles aliénantes de l’efficacité. Une civilisation qui disparaît, au profit très immédiat des barbares qui nous gouvernent. AGNÈS FRESCHEL

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THÉÂTRE DE TOULON

Le concile de Toulon La venue du Ministre de la Culture Frédéric Mitterrand le 31 juillet se devait d’apaiser les esprits. La visite du chantier du futur Théâtre Liberté -dont l’inauguration est prévue à l’automne 2011- suivie d’une réunion à l’Opéra voulait couper court à la polémique née de la nomination de Charles et Philippe Berling en avril, et du projet de scène nationale. En présence de Hubert Falco, maire de Toulon et président de Toulon-Provence-Méditerranée (TPM), Hugues Parant, Préfet, Patrick Mennucci, vice-président du Conseil régional, de François Brouat, directeur de la Drac Paca, des frères Berling, codirecteurs, de Claude-Henri Bonnet, directeur de l’Opéra et de Christian Tamet, directeur de Châteauvallon, le Ministre de la Culture a réaffirmé l’engagement de l’État. Financièrement d’abord, avec l’injection de 2,4 M€ pour la construction, puis 1,5 à 1,7 M€ par an pour le fonctionnement dès son ouverture. Tout en précisant que «le budget de Châteauvallon est sanctuarisé et qu’il n’est donc pas question d’y toucher (…) Nos propos nous engagent et je le dis de manière un peu solennelle car c’est la vérité. Il n’est pas question de revenir sur la qualité ni l’avenir de Châteauvallon». Alors, comment faire cohabiter ces deux équipements sur le même territoire, continuer à soutenir les scènes

Théâtre Liberté, Scène nationale La Criée, Centre dramatique national Le Merlan, Scène nationale Théâtres en Dracénie, scène Conventionnée

conventionnées de Draguignan et de Grasse, qui réclament à juste titre de devenir scène nationale depuis des années, et attribuer le cinquième label en région PACA, dans un contexte très clair de diminution globale des subventions culturelles ? «En inventant une scène nationale à deux têtes et en mutualisant leurs forces, répond Frédéric Mitterrand. On n’est pas dans

POLITIQUE CULTURELLE

une situation d’antagonisme mais de complémentarité. On arrivera à trouver une solution acceptable pour tout le monde du point de vue artistique et financier». Un engagement qu’Hubert Falco a souhaité éclaircir dès la visite de chantier, se faisant très offensif : «Je suis heureux qu’il y ait Christian Tamet. Je n’ai pas compris la polémique car Châteauvallon fait partie de TPM, il y a toute sa place, comme le théâtre Liberté qui viendra compléter l’offre de l’Opéra». Si tous semblent rassurés quant au © Olivier Pastor - TPM

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soutien financier de l’État et à leur future labellisation, le projet artistique reste vague. Les frères Berling parlent à l’unisson d’une programmation axée sur la Méditerranée et les pays riverains, d’un lieu de création pluridisciplinaire à dimension populaire. Des contacts ont été pris avec des structures et des compagnies varoises par «souci de faire en sorte qu’un tiers de la programmation soit ouverte aux compagnies émergentes»… Satisfait de l’installation «d’un théâtre au cœur d’un territoire urbain», Christian Tamet s’interrogeait néanmoins «sur la question de l’accroissement des publics…». Aujourd’hui l’heure est à la finalisation des travaux «d’un équipement qui s’installe magnifiquement sur la place de la Liberté, commente Frédéric Mitterrand, une scène nationale qui s’inscrira dans la stratégie de Marseille 2013 et la ville de Toulon plus particulièrement». MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Théâtre Liberté, Toulon 3 salles de 700, 200 et 146 places 31 spectacles dont 3 créations, 116 représentations pour la 1re saison Coût total de la construction : 12,7 M€ TPM : 7 M€, État : 2,4 M€, Conseil régional : 1,2 M€, Conseil Général du Var : 1,7 M€ 400 000 euros manquent encore à l’appel

Ministère

CR PACA

Départements

Villes ou communautés

790 000 20%

790 000 20%

1 192 000 30%

1 192 000 30%

2 850 000

0

0

900 000

3 750 000

558 000

160 000

125 000

1 080 000

1 923 000

220 000

260 000

222 000

879 000

1 581 000

Total 3 950 000 (soit 75% du budget prévisionnel)

Tableau comparatif des subventions de fonctionnement Ce tableau est réalisé avec les subventions de fonctionnement 2009 actuelles (arrondies) des plus subventionnés des CDN, Scènes nationale et conventionnée de PACA, et avec le budget prévisionnel (5.3 M) et les pourcentages communiqués par Toulon Provence Méditerranée, auxquels on a retiré 25%, admettant que le théâtre Liberté puisse générer 25% de recettes propres, ce qui n’est pas la vocation des Scènes nationales (qui génèrent en moyenne 21% de recettes) et ne peut s’obtenir, étant donné que la taille de chaque salle reste modeste, qu’en pratiquant des tarifs chers et en faisant venir des spectacles accrocheurs. Cette comparaison fait apparaître que le Théâtre Liberté deviendrait le théâtre le plus

subventionné de la région, totalisant à lui seul autant que ce que l’État attribue aux 7 Scènes conventionnées de la région réunies. Quant à la Région, elle attribuerait au seul fonctionnement de ce théâtre presque autant que ce qu’elle donne à tous les théâtres marseillais (815000 €), ou aux 4 Scènes nationales (783000 €), ou aux 7 Scènes conventionnées (782000 €). Le Département du Var quant à lui attribuerait au Théâtre Liberté 5 fois plus que ce qu’il donne actuellement à sa Scène conventionnée de Dracénie. A.F.


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POLITIQUE CULTURELLE

LA CRIÉE

Demain la Criée

Jean-Louis Benoit, en 2011, arrivera au terme de son second mandat et sera remplacé par un directeur, choisi par le Ministère de la Culture, la Criée étant un Centre dramatique national, et approuvé par la Ville de Marseille et les différentes collectivités. Après le premier round d’élimination, trois candidats seulement restent en lice, et présentent leur projet en septembre

CATHERINE MARNAS

© Agnès Mellon

Seule parmi les trois candidats à être implantée dans la Région, elle est connue du public Marseillais, entre autres, pour sa mise en scène à la Criée de Sainte Jeanne des Abattoirs (Brecht, 2007), ou le succès récent du Banquet Fabulateur à la Friche, ses collaborations avec l’ensemble Télémaque (La Jeune Fille aux mains d’argent). Sa Compagnie Parnas, formée par un noyau de comédiens auquel elle est fidèle, est implantée à Marseille mais programmée surtout hors des théâtres de la ville, sur les Scènes nationales de Gap et de Martigues où elle est artiste associée depuis 1994 et 2005, et régulièrement à Cavaillon, Arles, Grasse, Draguignan… Après avoir enseigné au Conservatoire Supérieur de Paris, elle a choisi de donner des cours réguliers à l’ERAC, et sa dernière création avec les élèves était présentée lors du Festival d’Avignon. Si elle est solidement implantée aujourd’hui dans les Pôles Régionaux, sa carrière a pourtant débuté dans la Capitale : assistante de Vitez puis de Lavaudant, Grand Prix National du Ministère de la Culture en 1999, elle continue à jouer régulièrement à Paris (Théâtre de la ville, Rond-Point) et dans les CDNs d’Aubervilliers, Toulouse ou Strasbourg… Mais elle aime surtout à ressourcer son inspiration en créant des auteurs français avec des troupes étrangères : en Amérique Latine (Brésil et Mexique) ou en Asie (Chine, Cambodge).

Spécialiste de Koltès, adepte naturelle des écritures contemporaines (Copi, Py, Dubillard, Pasolini, Rebotier, Frish, Valletti, Huston…), son théâtre est aussi un art de la lutte et de la joie, qui la porte naturellement à mettre en scène les oppressions des femmes, du peuple, de l’histoire, et à créer des spectacles collectifs où le plaisir de la fable n’a d’égal que celui du jeu. A.F.

À voir : Le Banquet fabulateur, spectacle convivial qui dit, autour d’une table partagée, l’amour des fables et du théâtre, sera au Sémaphore (Port-de-Bouc), puis à Cannes, Miramas et Aubagne en octobre et novembre. L’occasion, pour ceux qui ne le connaîtrait pas, de découvrir le talent des comédiens de la Cie Parnas, avant de les retrouver en mars 2011 dans Lignes de failles à Gap, Martigues et Draguignan. Le Banquet Fabulateur Les 8 et 9 oct Le Sémaphore, Port-de-Bouc 04 42 06 39 09 www.theatre-semaphore-portdebouc.com

Ce qu’ils en pensent Daniel Hermann, Adjoint délégué à la Culture de la Ville de Marseille Zibeline : Quelle est la position de la Ville de Marseille sur la prochaine nomination du directeur de la Criée ? Daniel Hermann : Il convient d’abord de préciser l’importance de cette nomination pour la Ville. La Criée n’est pas une petite affaire, et elle doit avoir -ou retrouver après les difficultés de ces dernières années- un rôle essentiel non seulement dans la Ville, mais dans la région. Je souhaite d’ailleurs qu’à ce titre le conseil général et le conseil régional entrent dans le financement, et il en est enfin question aujourd’hui. Avez-vous un avis sur les candidatures qui restent en lice ? Elles restent en lice parce que toutes les trois sont bonnes ! Mais pour moi une chose est essentielle. Le Ministre dit qu’il faut un directeur qui ait une

renommée nationale. Je dis oui. Mais il faut surtout quelqu’un qui mette les mains dans le cambouis, qui soit là et ne passe pas sa vie en allers retours, quelqu’un qui s’investisse à fond dans la programmation, la création ici. On pourrait dire qu’avec les trois candidats en lice il reste 1 locale et 2 nationaux. Mais ce n’est pas vrai : Catherine Marnas a une carrière nationale, plus discrète, nettement orientée vers le théâtre plutôt que vers le cinéma, ce qui explique qu’elle ait moins de renommée. Mais ce n’est pas une «locale» au mauvais sens du terme. Ou alors on a de la chance d’avoir une locale comme cela ! Pensez-vous que l’on puisse nommer un acteur, et non un metteur en scène, à la tête d’un Centre Dramatique ? Cela ne s’est jamais fait mais pourquoi pas ? Rien ne l’interdit, et si Simon Abkarian reste en lice c’est parce que son projet est bon, peu importe qu’il soit

ou non un metteur en scène. Comment envisagez-vous l’avenir de la Criée ? Essentiellement dans la continuité. Quant à notre financement, nous poursuivrons avec le nouveau directeur et la nouvelle équipe. La remise à neuf du bâtiment en fera à nouveau un outil extraordinaire : le désamiantage définitif de la grande salle commence en septembre. Pour un coût de 803 000 €, la société AG Développement a été désignée au terme de l’appel d’offre, tout est en route à présent et sera livré en février 2011. Il faut rendre hommage à Jean-Louis Benoit qui ces dernières années a vraiment manifesté une volonté d’ouverture aux compagnies régionales par exemple, et ne pas le juger sur ses deux saisons tronquées, ce qui ne lui rendrait pas justice. C’est pour cela que je parle de continuité, mais avec cet outil neuf et merveilleux, ces deux salles sur le Port en parfait état de marche, avec une façade et un


POLITIQUE CULTURELLE

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MACHA MAKEÏEFF

Son visage est familier même si ce n’est pas à proprement parler une star. Par pudeur, peut-être, il ne fait pas la une des médias, à moins que ce ne soit son désir «de rester derrière les personnages [qu’il] joue»… Du coup quand on évoque son nom pour une éventuelle nomination à la tête de La Criée, il y a comme un flottement dans l’air. Pourtant le public de la région a déjà eu la chance de le voir dans deux de ses plus beaux rôles au théâtre : Une bête sur la lune d’Irina Brook au Jeu de Paume à Aix, pour lequel il a obtenu le Molière du meilleur comédien (2001), et ce printemps au Gymnase à Marseille dans Le menteur de Goldoni mis en scène par Laurent Pelly. Au théâtre, Simon Abkarian donne l’impression de constituer autour de lui une «famille» depuis qu’il a réuni un noyau d’acteurs rencontrés pour la plupart au Théâtre du Soleil au début des années 80. Avec eux, il monta notamment Peines d’amour perdues de Shakespeare en 98 aux Bouffes du Nord et Titus Andronicus, encore Shakespeare, à Chaillot en 2003. Mais il s’attache également à la mise en scène, à la traduction, à l’écriture (Pénélope Ô Pénélope en 2008 à Chaillot) et à l’enseignement (Conservatoire national d’art dramatique de Paris en 2004 et 2005). Quant au cinéma, sa filmographie est impressionnante et traverse tous les styles : de Cédric Klapisch et Robert Guédiguian avec lesquels il tourna plusieurs fois (respectivement, Ce qui me meut, Riens du tout, Chacun cherche son chat…, Le voyage en © Brigitte Enguerand Arménie et L’Armée du crime…), à Martin Campbell (Casino Royale lors de sa courte escale aux États-Unis), Marjane Satrapi (Persépolis auquel il prêta sa voix) ou Jean-Michel Ribes (Musée haut, musée bas)… Comme si un fil rouge invisible liait tous ses rôles autour d’un même engagement pour un cinéma de qualité, exigeant et humain.

Metteur en scène, auteur, plasticienne, Macha Makeïeff est aussi, on le sait moins, marseillaise. C’est Antoine Vitez qui lui a mis le pied à l’étrier en lui confiant sa première mise en scène au théâtre des quartiers d’Ivry. Après cela elle s’installe à Paris pour des études de littérature et d’histoire de l’art à la Sorbonne et l’Institut d’Art. La suite est plus connue, grâce aux spectacles dont elle est l’auteur avec son compagnon Jérôme Deschamps, parmi lesquels Lapin-Chasseur, C’est Magnifique, Les Pieds dans l’eau, La Cour des grands, Les Étourdis ou encore Salle des fêtes, dernière création toujours en tournée, et programmée à la Criée au mois d’avril prochain. Grâce aussi aux Deschiens, série culte qui fera les beaux jours de Canal +. Attirée également par l’opéra, elle met en scène, entre autres, Moscou-Tchériomouchki à l’Opéra de Lyon, Mozart Short Cuts que l’on a pu voir au Grand Théâtre de Provence, Les Brigands d’Offenbach qu’elle reprend à l’opéra de Toulon en mai 2011, La Callisto de Cavalli au Théâtre des ChampsElysées… Ses prochaines mises en scène seront d’ailleurs musicales : le Bœuf sur le toit de Darius Milhaud et Les Mamelles de Tirésias de Francis Poulenc, prévus à l’Opéra Comique et à l’Opéra de Lyon. Avant de devenir directrice artistique du Théâtre de Nîmes de 2003 à 2008, elle fonda, en 2000, avec Sophie Tatischeff et Jérôme Deschamps Les Films de mon oncle, structure qui se consacre au rayonnement international et à la restauration de l’œuvre de Jacques Tati ; elle a d’ailleurs été commissaire et scénographe de l’exposition Jacques Tati, 2 Temps 3 Mouvements présentée en 2009 à la Cinémathèque Française. Autant d’intérêts divers, d’activités artistiques qui se rejoignent en une œuvre cohérente que sa propre compagnie, Mademoiselle, fondée en 2010, fera perdurer.

MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

hall neufs… Au niveau de la programmation souhaitez-vous des changements ? Cela ne dépend pas de moi, il faut savoir garder sa place. Mais il faut travailler à l’émergence des talents d’ici, la Criée peut faire beaucoup à cet égard. Et quand on a deux plateaux comme ça il faut accueillir aussi les compagnies chorégraphiques et musicales qui travaillent ici, même si c’est un centre dramatique. Faire jouer de grands textes, de grands auteurs, et être capables aussi de modernité. Ce que fait d’ailleurs à l’heure actuelle Jean-Louis Benoit. Avec un nouveau directeur qui sera présent et impliqué, un théâtre en état de marche, un financement nouveau des collectivités territoriales, la Criée peut redevenir un formidable outil de développement culturel.

Macha Makeieff © Benoit Linero

SIMON ABKARIAN

DOMINIQUE MARÇON

Michel Pezet, vice-président du conseil général en charge de la Culture Zibeline : Quelle est la position du conseil général sur la prochaine nomination du directeur de la Criée ? Michel Pezet : Pour la première fois le conseil général est cordialement invité à donner son avis sur cette nomination, qui dépend bien évidemment du Ministère, puisqu’ils sont les financeurs. Mais Annick Colombani a suivi pour nous le dossier, et nous pensons que l’idée même qu’a eue la DRAC de nous consulter, de demander son avis aux collectivités territoriales, tend à prouver que l’État se préoccupe particulièrement, aujourd’hui, du sort de cette maison. Le conseil général a-t-il l’intention d’entrer dans le financement de la Criée ? Ce n’est pas notre vocation, c’est un Centre dramatique national, mais nous pourrons envisager à

l’avenir, si le projet retenu nous intéresse, d’y regarder de plus près sur certaines opérations. En ce sens la candidature de Catherine Marnas retient particulièrement notre attention. Parce qu’elle a du talent bien sûr, ses réussites l’ont largement démontré, mais aussi parce qu’il nous semble que sa démarche inscrirait la Criée différemment dans le paysage artistique régional. Comme un pôle de création ouvert, avec une vraie présence ici du directeur, une démarche pédagogique. Mais la décision ne nous appartient pas, même si nous n’avons pas vocation non plus à jouer les pots de fleur : on nous a demandé notre avis, nous le donnons clairement !


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POLITIQUE CULTURELLE

Patrick Mennucci, viceprésident du conseil régional en charge de la Culture Zibeline : Quelle est la position du conseil régional sur la prochaine nomination du directeur de la Criée? Patrick Mennucci : Nous attendons les dossiers et ne pouvons nous prononcer à présent. Les trois candidatures retenues sont très sérieuses, on a éliminé toutes celles qui n’étaient pas à la hauteur d’un Théâtre National, ou pas en adéquation avec ses missions. Pour la première fois la Région a participé à la présélection, et on peut se féliciter du choix : les trois candidats sont en capacité de diriger la Criée. Reste maintenant à aller au-delà, à lire les projets, à se demander ce que ces artistes veulent réellement pour le théâtre de Marseille. Le conseil régional a-t-il l’intention d’entrer dans le financement de la Criée ? Oui, nous sommes prêts à entrer au CA de la Criée et à participer au financement, si la Criée devient réellement un Pôle Régional. C’est-àdire si elle joue un rôle de pivot dans la création théâtrale ici, à Marseille bien sûr, mais aussi dans tous les territoires où l’accès au théâtre est plus difficile, d’Arles à Gap ou Draguignan. Si nous estimons que le projet retenu répond à ces attentes, nous subventionnerons. À condition que l’État n’en profite pas pour baisser son financement actuel, nous ne souhaitons pas du tout le remplacer ! Quelles seraient les caractéristiques du projet qui retiendraient votre attention ? Je vous l’ai dit, le problème du théâtre à Marseille n’est pas celui de la création ni de l’offre -il y a beaucoup de théâtres à Marseille-, mais du rayonnement. Bon, il faut aussi que le projet soit ouvert sur le monde, la Méditerranée. Dans l’optique de 2013 ? Ah non, la nomination du Directeur de la Criée va au-delà de cela et impacte le territoire bien autrement ! Il ne faut pas tout mélanger, ni tout tourner vers la Méditerranée qui n’est qu’une part de notre culture, surtout théâtrale. En fait, l’idéal serait d’aider à la diffusion des spectacles créés ici, et dans l’autre sens aussi, de faire venir ce qu’il y a de bon ailleurs. Avec une Criée qui ne tourne pas le dos à ce qui se passe sur les Scènes nationales de la Région, mais construise une programmation qui les concerne, les guide et les complète. ENTRETIENS RÉALISÉS PAR AGNÈS FRESCHEL

LA CRIÉE

Trop mortel ! La Criée, privée de sa grande salle jusqu’en mars, a commencé tôt sa saison dans le petit théâtre, avec un joli cadeau ! Product est un vrai moment de théâtre hilarant, contemporain à l’anglo-saxonne, reposant sur l’abattage d’un comédien exceptionnel et des ressorts outranciers assumés. Spécialiste d’un théâtre anglais bien plus cruel, d’Edward Bond à Sarah Kane, Christian Benedetti s’est accordé ici une récréation pas si anodine : le Product de Mark Ravenhill est drôle, tapageur, mais il s’attache aussi à mettre au jour les ressorts dramatiques des fictions amerloques dégoulinantes. Celles qui alimentent à longueur de temps nos petits écrans, et nos multiplexes : rien de plus salutaire qui d’ironiser efficacement contre ces produits dits «culturels».

L’intrigue ? Un producteur déjanté et minable raconte à une actrice qui restera muette un incroyable scénario catastrophe qui accumule tous les clichés les plus vulgaires des sous Rambo, version love story with a muslim, forcément terroriste. Trash, débile, férocement invraisemblable, mais pas plus toutefois que bien des scénarios catastrophes et des séries pour ados… et transportant les mêmes clichés racistes, sexistes, pervers qui abreuvent la plupart de nos concitoyens, ceux du moins qui préfèrent encore les fictions aux reality shows. La mise en scène de Sylvain Creuzevault repose sur… la confiance qu’il a dans son comédien, emmené au bout d’un mauvais goût d’une expansion démesurée, une façon d’appuyer sans complexe les effets comiques du texte, et la décision

assumée d’en rajouter encore trois tonnes : le numéro final, mime d’une attaque à la mitraillette lourde, grenade aux dents, sur la musique d’Ennio Morricone, est irrésistible ! AGNÈS FRESCHEL

Product se joue à la Criée jusqu’au 22 septembre

À venir Hubert Colas, dans le cadre d’ActOral, met en espace Zone d’Education Prioritaire de Sonia Chiambretto, avec les élèves de l’ensemble 19 de l’ERAC. Un texte très fort (voir Zib 28), et une écriture qu’Hubert Colas connaît bien. Les deux représentations seront précédées ou suivies de lectures de textes de Sabine Macher et Thomas Mailaender (le 25 sept) et de Dieudonné Niangouna (le 26 sept). Une création du 8 au 16 octobre : Joël Jouanneau a adapté en français un roman de l’auteur norvégien Tarjei Vesaas : Palais de glace est l’histoire d’un amour, celui de deux fillettes, dont l’une s’est perdue dans un univers fantastique… raconté par deux femmes, dessinée par deux acrobates et un musicien… Un atelier de critique autour de Palais de Glace est proposé par la Criée et Zibeline, ouvert aux spectateurs, sur inscription, le 16 octobre (10h-13h). La Criée 04 91 54 70 54 www.theatre-lacriee.com

Product © Agnès Mellon



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POLITIQUE CULTURELLE

LES GALERIES MARSEILLAISES | PARVIS DES ARTS

Marseille ville d’Art ? Cette année encore le salon Art-O-rama (voir p 66) est l’occasion, pour les galeries marseillaises, de mutualiser leurs moyens, afin d’obtenir une visibilité commune, profitable à tous. Ainsi l’an dernier, lors d’Art-O-rama, 60000 € d’acquisitions ont été faites par des collectionneurs venus pour l’événement, et environ un tiers de cette somme a profité aux galeries marseillaises. Sans compter une fréquentation en nette hausse quand les galeries s’allient : ainsi le Printemps de l’Art organisé par Marseille expo il y a quelques mois a regroupé de 350 à 500 visiteurs par soirée, chiffre tout à fait exceptionnel, d’autant plus qu’il débouche sur des ventes, mais aussi sur des commandes à des artistes exposés. Cette année donc, en même temps qu’Art-O-rama et les expositions d’Astérides à la Friche, il y aura 19 vernissages dans la ville, avec la volonté commune de faire valoir des artistes émergeants aux côtés d’œuvres cotées. Le FRAC aussi s’y met, pour sa dernière exposition au Panier. Le gala de Triangle a eu lieu au Cercle des nageurs le 11 septembre, sur le même principe que l’an dernier : 40 artistes font un don, 40 lots de 300 € sont attribués, par tirage au sort, aux acheteurs des 40 billets, et les bénéfices sont alloués aux artistes résidents… Car le but commun de ces galeries, fonds et salons alliés est de produire des œuvres, de soutenir des artistes en résidence. Astérides (voir p 66) accompagne 4 artistes pendant 1 à 6 mois, présente 14 œuvres et des multiples durant Art-O-rama. Des mécènes comme Vacances Bleues ont une véritable

politique de commandes en rapport avec leur activité hôtelière, et l’œuvre de Boris Chouvellon Petites victoires, petites morts, sera après Art-O-rama exposée dans une chambre du Château de Montvillargenne. Le Centre International du Verre et Arts Plastiques a permis de produire l’œuvre de Pascal Martinez, artiste invité d’Art-O-rama 2010 à l’issue du Show-room de l’année précédente : ses secrets enfermés dans des cubes de verre n’auraient pu naître sans les techniciens de pointe du CIRVA… Autant d’initiatives qui s’inscrivent également dans l’esprit des ateliers de l’EuroMéditerranée de Marseille Provence 2013, et dessinent un paysage économique nouveau, alliant efficacement les collectivités publiques, l’art, et les entreprises, qui ont toujours été attentives dès qu’il s’agit d’arts visuels, par nature marchandisables, mais plus frileuses avec les arts de son temps. La synergie née autour d’Art-O-rama est un signe encourageant : Marseille redeviendrait-elle une place centrale pour un certain marché de l’Art ?

Same, same but different, Sylvain Ciavaldini et Antonio Gagliardi Du 10 sept au 30 oct Galerie Porte Avion Véronique Airieau Du 10 sept au 9 oct OÙ - lieu d’exposition pour l’art actuel Simone Stoll Du 11 sept au 30 oct 3ème Rue Galerie Il n’y a pas de mot comme équivalent, João Vilhena Du 11 sept au 2 oct SAFFIR, galerie Nomade

AGNES FRESCHEL

Dumping Nature, Valère Costes Du 10 sept au 30 oct galerieofmarseille

À visiter… New York USA, Dolorès Marat Du 7 sept au 17 sept Atelier de visu

Caro diario, Vanessa Santullo Du 12 sept au 6 nov La GAD - Galerie Arnaud Deschin

John Wood et Paul Harrison Du 8 sept au 9 oct Galerie Ho

Gilles Olry Du 17 sept au 16 oct Galerie Mourlot - Jeu de Paume

Après le white cube

À laisser et à prendre, Pauliina Salminen Du 24 sept au 20 nov Galerie Territoires Partagés

Pour sa dernière expo avant réouverture dans ses nouveaux murs à la Joliette en 2012, le FRAC poursuit sa réflexion sur la question de la nature et de la fonction de l’exposition. Le commissariat en est confié à une spécialiste de la question, Florence Ostende qui a choisi des œuvres dans les collections du FRAC et ailleurs. Un journal en rendra compte en fin de monstration. L’exposition comme matériau d’exposition ou l’art de la tautologie ?

Légères anesthésies et dérivation, Iris Levasseur Du 11 sept au 13 nov Galerie Dukan & Hourdequin Fin de série, Paul Pouvreau Du 11 sept au 16 oct La Traverse

C.L.

Prendre la porte et faire le mur jusqu’au 11 décembre FRAC, Marseille 04 91 91 27 55 www.fracpaca.org

Votre prix sera le nôtre - Archist Du 9 sept au 2 oct Galerie des Grands Bains Douches de la Plaine

Dora Garcia, Instant Narrative (IN) 2006, vue de l'installation Double agent, Baltic Centre, Londres 2008, Courtesy ProjecteSD Barcelona © X-D.R

Marseille expos réseau des galeries et lieux d’art contemporain www.marseilleexpos.com

Comment vous entendons-nous ? autour du Livre des amours, lecture théâtralisée sur le désir et les plaisirs par la Cie la Pierre en bois de Toulouse, le 8 octobre ; soirée humour avec deux spectacles : Ma Parole de la Cie IVT (Paris), et Sourd, et alors ? présenté par Jef’s de Toulouse, qui a connu un joli succès au festival Off en Avignon. La journée du dimanche se partagera en famille, pour découvrir les Contes du monde entier. Des ateliers de poésie, de langage corporel et le Manifeste du

Surdisme permettront des échanges fructueux tandis que 2 étudiantes sourdes des Beaux-Arts de Marseille témoigneront de leur intégration dans ladite école. CHRIS BOURGUE

Festival Sur le fil du 8 au 10 octobre Parvis des Arts, Marseille 3e Association Arts-Terres 04 91 81 34 25 Programme en LSF sur www.arts-terres.org

Sourd et alors? © X-D.R

Pour la 3e année consécutive, l’association Arts-Terre présente le festival Sur Le Fil. Son but : rassembler sourds, malentendants et entendants de tous âges, artistes et spectateurs, autour de la création en langue des signes française (LSF). Convaincus de l’urgence de briser le mur entre des entendants qui se pensent normaux et des sourds qui parlent autrement, l’équipe propose des animations et des spectacles en LSF. Soirée « Interdit aux moins de 16 ans !»


Si un chien rencontre un chat © Pierre Grobois

ISTS | ERAC | FIJAD

Notre région,

FORMATION

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creuset pour la formation dramatique Un pôle s’y met peu à peu en place : avec la collaboration étroite entre l’ISTS, l’ERAC, la Friche de la Belle de mai et les Universités d’Aix et d’Avignon, les métiers du théâtre ne s’abordent plus en misant sur la chance, mais sur le talent, et le travail ! En témoignent la présence cette année au festival d’Avignon, au Cloître St Louis, dans les locaux de l’ISTS (Institut Supérieur des Techniques du Spectacle), de deux écoles de théâtre qui font autorité. L’ÉRAC (École Régionale d’Acteurs de Cannes) n’est plus à présenter dans nos pages. Elle présentait du 8 au 12 juillet Si un chien rencontre un chat de BernardMarie Koltès dans la mise en scène savamment orchestrée de Catherine Marnas (voir Zib’32). Superbe spectacle qui a fait salle comble tous les soirs ! La Manufacture, haute école de théâtre de Suisse romande de Lausanne, présentait Les Helvètes du 22 au 26 juillet, une pièce conçue et mise en scène par Christian Geffroy Schittler. Proposition intéressante en ce qu’elle s’est construite autour d’improvisations, mais qui manquait de maîtrise. Les acteurs campaient une galerie de personnages, de Max Frich à Ferdinand de Saussure ou Le Corbusier... Interrogations sur le bonheur, sur l’avenir de l’homme... et remise en question de la fameuse neutralité suisse!

Le FIJAD à l’aide Que deviennent les jeunes comédiens lorsqu’ils sortent de leurs écoles supérieures ? C’est une question cruciale en ces temps difficiles pour tous. La ferveur, oui, mais il faut vivre aussi ! On doit à l’ERAC d’avoir imaginé un début de solution à ce problème. En effet, sous l’impulsion de la Région PACA suivie par le Ministère de la Culture s’est créé en 2004 un Fonds pour favoriser l’Insertion Professionnelle des Jeunes Artistes Dramatiques : le FIJAD. Durant les 2 années

qui suivent la fin de leur formation, une aide particulière est accordée aux structures qui les emploient, ce qui favorise évidemment leur embauche. Ainsi, les jeunes comédiens peuvent bénéficier, à l’issue d’auditions organisées par le FIJAD, de 6 mois de salaire pour un minimum de 2 productions sur deux ans. Puis une convention est établie sur la base d’un mois et demi de répétitions pour un minimum de 15 représentations. Les comédiens de l’ERAC sont ainsi présents, en 2010, sur scène mais aussi en tant qu’assistant ou scénographe, au festival d’Avignon, au Théâtre de la Ville, dans les centres dramatiques de Nice, Montpellier, Bordeaux, Nanterre… ERAC, Cannes 04 93 38 73 30 www.erac-cannes.fr

La technique et l’Art Depuis les années 80 une profonde mutation technique s’est opérée dans le monde du spectacle vivant. Le numérique a provoqué de nouveaux besoins, et permis la mise au point de nouvelles pratiques. C’est en 1987 qu’Alain Crombecque, alors directeur du Festival d’Avignon, a constaté la nécessité d’un personnel qualifié dans le son et l’image. Ainsi s’est mis en place un système de formations plus ou moins empiriques durant le festival. Le succès a été quasiment foudroyant et a permis très rapidement l’organisation de sessions pour aboutir en 1987 à la création de l’ISTS. L’association a été implantée dans le Cloître Saint-Louis avec le soutien de

la ville d’Avignon, du département 84, de la Région et de l’État. Elle dispose d’une salle de théâtre équipée en machinerie permettant l’accueil de spectacles, d’un atelier de construction de décors et d’électricité, d’un studio d’enregistrement, de salles de cours et d’un centre de documentation. Très vite la mission de l’ISTS s’est étendue à l’ensemble du territoire national et à l’étranger. David Bourbonnaud, depuis 3 ans Directeur du développement et de la communication, est intarissable sur sa nouvelle «maison». Il montre les machines à vent, à pluie ou à tonnerre fabriquées par les successifs stagiaires avec autant de plaisir qu’il parle de ses missions à l’étranger… Les activités de formation continue diplômante (4 à 9 mois, 35 h/semaine) sont en pleine extension, ainsi que des sessions de perfectionnement, assurées par un véritable réseau de professionnels; chaque année on compte environ 800 stagiaires et une centaine de formateurs. Les compétences de l’Institut sont aussi réclamées dans les pays du bassin méditerranéen, au Vietnam, en Afrique, pour du diagnostic et du conseil en régie, en scénographie, mais aussi pour la gestion des contingences matérielles et réglementaires en matière de sécurité, de prévention des risques et de responsabilité pénale. Ces interventions payantes lui permettent ainsi de générer une partie des ressources nécessaires à son activité tout en participant au rayonnement de l’Institut. CHRIS BOURGUE

ISTS, Avignon 04 90 14 14 16 Calendrier des formations 2010/2011 consultable sur le site www.ists-avignon.com


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THÉÂTRE

FESTIVAL D’AVIGNON

Là où se joue l’avenir du théâtre ?

gnon, sorte de mythe vivant qui se décline durant trois semaines annuelles de fièvre, a toujours suscité des polémiques vives. Elles en font aussi le charme, et Avignon est un lieu d’idées autant que de théâtre. Ceci admis, on peut pointer les ratages, même nombreux, même éclatants, sans réclamer des têtes: programmer 40 spectacles en prenant le risque de la création et de la jeunesse ne va pas sans échecs. Restent des réactions agaçantes, qui consistent à faire passer un désaccord esthétique pour une querelle des Anciens et des Modernes. Il est de bon ton de regarder comme «ringard» le public de plus de cinquante ans, et ceux qui ont passé leur jeunesse sur les gradins, ou à lire des textes, à plonger le nez, la tête et le cœur dans les œuvres des grands penseurs et artistes des

Hortense Archambault et Vincent Baudriller, qui codirigent le festival depuis 7 ans, parviendront au bout de leur deuxième mandat en 2011. Si l’on en croit les statuts du Festival ils ne sont plus renouvelables… mais des statuts associatifs se changent ! Louis Schweitzer, Président du Festival, et Marie Josée Roig, Maire d’Avignon, soulignent la bonne gestion, le fort taux de recettes propres (41%) et le public nombreux (116 milliers de spectateurs soit 95% de fréquentation cette année), qui de plus se renouvelle. Des signes de satisfaction qui laissent envisager un changement de statut possible, si le Ministère, premier subventionneur du Festival (3.5 M€), approuve. Mais qu’en est-il de l’artistique ? Le Festival d’Avi-

Créer pour survivre «Le Festival des performances», particularité essentielle et revendiquée de cette édition 2010, a tenu certaines de ses promesses. Surtout grâce aux femmes Si la Cour d’honneur n’a malheureusement pas brillé de feux théâtraux inoubliables, le musicien Rodolphe Burger (troisième artiste invité ?) a réussi, en un Concert Dessiné unique, à illuminer enfin le Palais des Papes. Cadavre exquis entre musique et dessin, accompagné par Julien Perraudeau, Alberto Malo et Erik Truffaz et deux dessinateurs de BD en pleine jubilation, Philippe Dupuy et Charles Berberian, ce concert a mis le feu aux joues de la Cour et emballé le public. Énergie communicative avec un rock gracieux et explosif, émotion avec la reprise (parfaite) de Bashung, clin d’œil malin à Olivier Cadiot avec la bande-son d’Un nid pour quoi faire, un rendez-vous brillant ! Quand il y a du plaisir à faire et à montrer, visiblement ça marche… Plus confidentiel mais tout aussi inspiré, Stanislas Nordey a livré à la Salle de Montfavet une séduisante fable sur l’écriture, dans laquelle sa performance, dans

un monologue intense, a rappelé qu’il est plus que tout, jusque dans ses mises en scène, un acteur. Dans My Secret garden, il raconte le journal intime d’un auteur en crise, Falk Richter, également metteur en scène de la pièce, qui revient sur son passé pour réapprendre à vivre. Une autofiction à tiroirs, au cœur de l’actualité, où se mêlent intime, politique et théâtre (!). Rejoint par Laurent Sauvage et Anne Tismer, deux comédiens habitués à naviguer hors des sentiers battus, le spectacle bascule dans une conférence-concert plus fantasque mais explicitement engagée. Drôle, cérébral, multiple. Du souffle quoi !

Femmes : souffle et matière Du souffle, la performeuse Angélica Liddell, en a envoyé sur ce Festival, avec deux spectacles «coups de poing». Avec La Casa de la fuerza au Cloître des Carmes, en 5 heures et 3 tableaux, l’Espagnole a signé une œuvre dantesque et universelle sur la violence subie par les femmes. Interrogeant sa douleur face à celle des mères de Ciudad Juarez au Mexique, la directrice de l’Atra Bilis de Madrid, qui se définit comme «résistante civile» douée pour la compassion, accompagnée de 5 femmes tout aussi étonnantes, transforme l’horreur pour faire de l’acte théâtral un geste de survie. Cru, violent, jusqu’au-boutiste, ce

My secret garden © Delphine Michelangeli

La Casa de la fuerza © Christophe Raynaud de Lage

théâtre sans autocensure endosse la cruauté du monde, épuisement physique et violence des mots à l’appui. Puis, c’est dans le corps de Richard III et à la Chapelle des Pénitents blancs convertie en arène, qu’Angélica Liddell s’est transformée en furie humaine, basculant d’un état maniaco-dépressif à la folie dictatoriale, et confirmant son goût pour parler des monstres. Dans El año de Ricardo, la comédienne totalement possédée par le personnage emprunté à Shakespeare, déverse un texte monstrueusement puissant (parfois dur à suivre, son débit étant exceptionnellement rapide et, sauf une maîtrise parfaite de la langue, demandant un temps de lecture conséquent) entre colère et douleur physique, encore une fois. Une cascade d’insanités pour interroger le pouvoir, la manipulation, la tyrannie. Pourquoi pas ? L’essence même de Shakespeare, qui manquait dans la Cour… L’artiste visuelle québécoise Julie Andrée T., invitée également pour la 1re fois au Festival, aura sans doute été plus discrète, moins médiatisée. Pour autant, les deux pièces très conceptuelles, présentées quasi simultanément aux Pénitents Blancs, relevaient de surprenantes œuvres plastiques construites en direct, créatives et burlesques. Rouge, accumulation visuelle créant un paysage hétéroclite, poétique et insensé d’un côté, et Not Waterproof, utilisation du corps comme matière à sculpter se diluant dans la matière et l’espace. Des pièces étranges et hermétiques relevant purement du poème plastique. DELPHINE MICHELANGELI


THÉÂTRE siècles précédents. Qui ont pratiqué la lutte sociale aussi, syndicale, féministe. Ceux qui ne comprennent pas la pauvreté intellectuelle d’un certain théâtre, et d’une certaine danse, très présents à Avignon. Ceux qui ont fait des études de lettres, de philosophie, d’histoire plutôt que de communication, de sciences po ou de commerce. Ceux qui savent qu’il est généralement plus sain de «croire» dans le travail, l’écriture, la pensée, plutôt que dans le génie, le ressenti et l’immanence.

Regarder ailleurs Ce n’est pas une querelle de génération. Les spectateurs qui quittaient les salles étaient souvent jeunes, aussi. Et ceux qui applaudissaient à tout rom-

pre à la vacuité de spectacles ennuyeux -en criant bravo bien fort- étaient souvent des professionnels. Le désaccord, la frustration sont multiples, et si les spectateurs n’en sont pas encore venus aux mains les accrochages ont souvent dégénéré en insultes. Entre personnes du même âge… Avignon s’est engagé dans des chemins esthétiques nouveaux, et y persiste en disant que l’avenir est forcément là, malgré le désaveu très violent de 2005, et celui, moins fracassant mais plus désabusé, de 2010. Boris Charmatz, artiste associé de 2011, est de cette école (voir ci-dessous). Peut-être faudrait-il regarder ailleurs… ou l’on risque de devoir céder à la terrible réaction en cours. Celle-ci, revers de la même pièce, fille du même rejet de la pensée critique et du

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même amour de l’ineffable, pousse aujourd’hui des acteurs estampillés par leur carrière au cinéma sur les plateaux subventionnés, et parfois à leur direction. Il ne manque pas de metteurs en scène et de chorégraphes de grand talent, professionnels de la scène, loin d’être dépassés. On aimerait les voir dans les Cours d’Avignon, sinon à sa tête. AGNÈS FRESCHEL

Écoles et réussites diverses Comme il est bon d’entendre un grand acteur dire un grand texte ! Quand Denis Podalydès lit Pierre Michon l’air entre lui et nous devient dense de replis. On se perd dans cette confession où les voix s’emboîtent, Hugo biblique regardant Booz endormi, Michon s’identifiant, ironique, à ce patriarche au carré, Podalydès s’engouffrant dans la blessure masculine narcissique, mettant au jour la douleur que le texte affleure. L’air de l’été matinal vibre… comme il frissonne lorsque Laurent Poitrenaux joue le Mage en été d’Olivier Cadiot, aussi précis dans l’espace et la lumière qu’un musicien soliste qui pense chacun de ses accents… Virtuosité d’acteurs exceptionnels qui savent faire entendre la subtilité en mouvement des phrases dans leurs complexités. Le texte de Cadiot, volontairement fragmenté et obscur, trouve là, grâce aussi à la brillante mise en images de Ludovic Lagarde, une lisibilité qui n’allait pas de soi. Il reste un peu de cet exploit d’acteur dans le Richard II si controversé de la Cour. Podalydès en roi, à un instant, vers la fin, offre un moment de grâce. Le reste est mauvais. Terriblement. Les comédiens sont mal dirigés, mal choisis, l’espace n’a pas de sens, les spectateurs n’entendent rien malgré une inefficace sonorisation, la musique est balancée n’importe comment mais surtout on ne voit vraiment pas ce que Jean Baptiste Sastre veut dire : certes Richard II n’est pas ce que Shakespeare a fait de mieux, mais monter une pièce dans la Cour nécessite qu’on en ait une vision. Ce Shakespeare concédé aux amateurs de «classiques», mais confié à un metteur en scène sans l’expérience nécessaire à la Cour, risque de donner du grain à moudre aux contempteurs du répertoire… Le succès de Baal devra les détromper. Et prouve que monter un texte, un Brecht étrange, avec une bande de

répétition/scansion de «Je veux voir un nu d’humain vaincu par un chien». Pas sûr que ce désir d’auto-humiliation fasse grand bien à notre humanité. A.F.

Richard II © Agnes Mellon

comédiens formidables n’est pas une entreprise rétrograde. Ça pulse, ça décoiffe, ça accroche, à coups d’attitudes qui ailleurs relèvent souvent du formalisme –rock, violence, dénudements, diatribes face public, alcool et sexe qui coulent à flots- mais qui là interrogent étrangement la modernité de ce premier Brecht : le texte fragmenté ressemble à Woyzzeck, et le mal être n’y construit pas encore d’ordre politique, ni esthétique. À ce titre il sied à merveille aux jeunes comédiens et à leur désordre, magnifiquement incarné par l’ambiguïté sexuelle de Baal/Clotilde Hesme…

Hors texte Et puis il y avait le reste. Qui cherchait hors de ces chemins-là. Les Corbeaux sublimes de Josef Nadj, recherche plastique et sonore sur l’âme goudronnée des oiseaux, incarnée par un artiste qui maîtrise la temporalité de la performance, et sait ménager les surprises qu’il vous balance dans la poire… Le GdRA proposait une forme documentaire intéressante, qui se penche sur trois Singularités ordinaires merveilleuses, échantillons émouvants d’une huma-

nité qui ne trouve pas habituellement place dans nos représentations ; la forme, habile, qui fictionnalise légèrement les documents, opère des rapprochements à l’emporte pièce mais ouvre indéniablement des voies… Ce qui ne fut pas le cas avec Big Bang de Philippe Quesne, scénographe qui sait fabriquer des images dont la lente succession reste vaine, ni avec Boris Charmatz : sa Danseuse malade, malgré le talent de Jeanne Balibar, malgré l’ingéniosité du dispositif scénique -un camion guidé sur scène par un bras mécanique- s’égarait dans des voies de parking. Le texte de Tatsumi Hijikata, un des deux pères du Butô, aide à comprendre la douleur post-traumatique de cette danse de la souffrance inhibée, mais transporte un masochisme malsain. Il expose une violence ici magnifiée par la mise en scène -écrasements, corps blanchis, encroûtés, heurtés brutalement dans un camion qui roule- dans un processus éprouvant, ce qui serait acceptable malgré les temps morts de l’ennui (autre torture ?) s’ils n’étaient pas profondément dégradants, et ceci en vain (ils ne dénoncent rien). La pièce se termine par la


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THÉÂTRE

AVIGNON OFF

Le Off d’Avignon, une Indéniablement, juillet transforme la ville d’Avignon en une terre culturelle désormais très rentable. Mais qui profite des 80 millions d’euros (estimés) de retombées économiques générées par le In et le Off ? Le Festival, un sacré commerce ! À la Chambre de Commerce et d’Industrie, on reste prudent sur la mesure des retombées du Festival en pleine saison touristique. «Le taux de remplissage hôtelier est exceptionnel en juillet, quasiment 100% de réservations un mois à l’avance. Certains visiteurs sont envoyés parfois jusqu’à Nîmes par l’Office de Tourisme» confirme Philippe Bondurant, directeur de la communication à la CCI. Sans compter les bénéfices des particuliers qui (sous)louent leurs habitations, une pratique coutumière difficilement mesurable. «Au niveau du commerce, notamment des restaurateurs, on observe un timide début de reprise. Un léger mieux qui n’éponge pas la baisse des recettes des 2 années précédentes» : les festivaliers, comme les autres touristes, dépensent moins avec la crise… Ces 80 millions sont largement générés par le Off, le nombre de spectateurs étant 10 fois plus important que celui du «In». «En 2003, le Festival avait généré 54 M €, même après l’annulation du In. Les commerçants restent traumatisés par l’événement», explique le Manager du centre ville. «Il doit continuer à bien fonctionner, c’est l’activité qui permet de redorer les trésoreries. 90% des commerçants font leur chiffre d’affaires en juillet. C’est le 1er mois de l’année.» Bernard le Corff, directeur du Collège de la Salle et chargé de la communication d’AF&C (Avignon Festival et Compagnies) précise : «Si l’impact économique est la litanie du transport, hôtellerie, commerce, il faut y rajouter le volume financier généré par les ventes des spectacles après le Off et la vitrine pour la Ville, qui s’investit de plus en plus.» Le In vend cette année 116 000 billets et affiche une fréquentation de 95%, mais le Off à lui seul enregistre plus d’1.2 M d’entrées, soit près de 7 M de recettes. Un taux de remplissage en légère diminution (55% contre 56% en 2009), dû à l’accroissement du nombre de salles et de

propositions spectaculaires. 7000 artistes occupent ainsi 123 lieux et l’on peut estimer qu’il y a 500 000 spectateurs qu’il faut loger, nourrir…

Le Off, un pari sur l’avenir Pour jouer dans le Off, «un moment majeur pour une troupe» selon Bernard le Corff, 1100 spectacles ont donc été enregistrés par AF&C (adhésion 210 € HT). Les compagnies investissent, en moyenne, entre 20 et 50000 € (location, hébergement, salaires, communication), pour des recettes comprises entre 10 et 30000 €. Soit un déficit de 10000 € souvent inéluctable. Mais «Jouer dans le Off, c’est la meilleure manière d’avoir les programmateurs. Même s’il n’y a qu’eux dans la salle, c’est primordial. Cette année en moyenne chaque troupe en a reçu 40. On n’en a jamais vu autant.» Une moyenne qui fait rêver ! Le Off, qui comptera l’an prochain 1300 spectacles (d’après AF&C) essentiellement dans le centre ville, est donc indéniablement une forte source de revenus pour la ville et le département. Mais la question de l’affluence se pose sérieusement. «Avignon est un lieu de rassemblement, tout doit se passer au plus près du centre ville. Les directeurs de théâtre oublient parfois de dire qu’au-delà des remparts, il n’y a pas beaucoup de salut, à part Villeneuve en Scène ou Monclar» affirme Bernard le Corff. «En même temps, plus on est compressé dans les remparts, plus les prix vont augmenter. Il va falloir qu’on en sorte, mais tranquillement.» Si le rapprochement avec le Festival d’Edimbourg ou de Pékin fait rêver certains, à Avignon le problème de place va devoir se régler sous peine d’implosion.

Des risques calculés AF&C organise en région des réunions préventives auprès des troupes pour qu’elles mesurent le risque financier. Même pour les compagnies permanentes d’Avignon, pour lesquelles le problème de l’hébergement est réduit, le déficit reste important. Certains ne jouent qu’une dizaine de jours pour limiter les risques. D’autres comptent sur les 3 semaines du Off pour créer une tournée, comme la cie Onstap, avec son spectacle Parce qu’on va pas lâcher. Mais louer une salle repérée reste d’«un coût exorbitant». Sur les 123 lieux que répertorie AF&C, aucun n’achète les spectacles, seuls 15% proposent de «coréaliser» en participant à la communication, 25% partagent des recettes et 60% sont en location. Pour exemple, le théâtre du Balcon et le Chien qui Fume louent leur salle de 200 places, pour un créneau horaire, 12000 € (selon AF&C). Moins chères, les salles du Bourg Neuf ou de la Luna (3500 €) n’ont que 50 places. Plutôt malins (et intrépides), les Onstap ont donc mutualisé les 120 places du chapiteau le Mazouing, sur la Barthelasse, avec 7 autres compagnies. 7800 € de participation financière pour chacun. Grâce à un gros travail auprès des diffuseurs, ils ont reçus plus de 5700 spectateurs,

© Delphine Michelangeli

dont beaucoup de pros (180 pour Onstap, une cinquantaine de dates envisagées). La cie Hors Série, avec La géographie du danger d’Hamid Ben Mahi, un magnifique solo sur le parcours d’un sanspapiers et sa lente métamorphose vers la déshumanisation, aura sans doute contribué à faire reconnaître le lieu, pour cette première tentative réussie. Au Théâtre des Halles on peut prendre des risques. La reprise de leur dernier spectacle Simples Mortels, difficile à tourner vu l’ampleur du décor, revient à 50000 €. «Alain Timar ne crée pas en pensant à la tournée» explique Sophie Redon. «Et au Festival, on ne parle pas en termes de rentabilité financière, mais plutôt artistique et de diffusion.» Les 50% de remplissage seulement pour cette reprise n’ont donc rien de dramatique, puisque Rhinocéros a lui enregistré une belle fréquentation et que la création 2008, Je veux qu’on me parle, avait très bien tourné pendant 2 ans. Le lieu a vu passer 15509 spectateurs (malgré l’arrêt tragique du spectacle de Philippe Avron après 12 représentations) pour 10 spectacles accueillis.

Rentable ? Pour les professionnels du tourisme sans aucun doute… mais pour les compagnies, jouer au Off est un investissement sur l’avenir très coûteux. Autant proposer des spectacles de qualité, pour conquérir le public qui passera dans la salle… et fera tourner l’info ! DELPHINE MICHELANGELI


CRT

THÉÂTRE

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manne économique ? Parcours d’une battante Edmonde Franchi, auteure et comédienne marseillaise, a vécu sa 6e participation au Off avec CarmenSeitas qui a fait salle comble depuis sa création en 2008 et était accueillie par le Théâtre du Chêne noir Zibeline : Quel bilan pouvez-vous tirer de votre participation ? Edmonde Franchi : Faire un bilan à la toute fin du festival est difficile. Car il est presque toujours négatif, on perd pas mal d’argent, on est fatigué et il est tôt pour tirer des conclusions en terme de retombées. Puis au bout de 2 mois, on se dit qu’on a eu 3000 spectateurs, de bons échos dans la presse, qu’on a déjà fait 5 ventes. Notamment nous jouons à ClermondFerrand et à Septèmes en novembre. Quelles ont été les conditions matérielles de votre séjour ? J’avais loué une maison et un appartement pour les 9 personnes de l’équipe. Gérard Gélas (Directeur du Chêne Noir, ndlr) m’avait proposé une co-réalisation. Très intéressant car dans ce cas il n’y a pas de frais de

location, et ce sont eux qui s’occupent des réservations, de la billetterie. C’est un grand confort ! Après chaque représentation on pouvait discuter avec le public dans la cour. Mais même ainsi sur le plan financier on reste très déficitaire. J’ai pourtant obtenu une subvention de l’AF&C pour l’Aide à la diffusion du Off, affectée sur dossier à 10 compagnies sur 1000 chaque année ! Comment voyez-vous l’avenir du Off ? Le nouveau directeur, Greg Germain veut faire un festival prestigieux. C’est une bonne idée. Ce n’est pas le nombre qui compte, ce sont les conditions dans lesquelles travaillent les compagnies, il faut surtout que les conventions collectives soient respectées. Prête à recommencer ? Oui. Peut-être avec mon dernier solo, Coeur@prendre, un spectacle sur la solitude, avec les succès des années 60. En prenant un technicien sur place cela n’engagerait pas trop de frais, c’est l’avantage des solos... Un autre spectacle en préparation ? Oui. J’ai fait une résidence d’écriture pour De toutes beautés ; l’écriture

Carmenseitas © Philippe Houssin

c’est comme la couture : on taille, on assemble, on reprend... La 1re forme sera donnée à la Busserine les 19 et 20 novembre, avec 2 musiciens. PROPOS RECUEILLIS PAR CHRIS BOURGUE

Qui travaille en été ? Le Comité Régional de Tourisme de PACA dresse chaque année un bilan de la saison d’été, en enquêtant auprès des professionnels. Enquête complétée, dans chaque département, par les Comités Départementaux du Tourisme. Cette année encore le bilan, dans la deuxième région touristique de France (après Paris), est bon : la crise économique l’affecte paradoxalement, et l’année 2009 s’était avérée très surprenante, avec un net retrait de la clientèle étrangère, mais des records pour ce qui était de la clientèle Française, venue d’autres régions, ou simplement restée en PACA. L’année 2010 renforce cette tendance : les touristes restés en France par souci d’économie y ont pris goût, et la clientèle étrangère, hormis les Anglais, revient… De quoi satisfaire les professionnels, même s’ils disent unanimement que les touristes dépensent moins, en particulier au restaurant, préférant les pique-niques, réduisant l’alcool, négociant les prix et diminuant la durée des séjours. Il n’en reste pas moins que 110 millions de nuitées (hôtels, gîtes et campings) sont vendues en juillet/août dans la Région, et qu’il faut doubler ce chiffre si l’on veut tenir compte des touristes hébergés par les familles et les amis, et des maisons secondaires (PACA est la 1re région en ce domaine). La part du tourisme culturel ? Lors de la dernière enquête à ce sujet, 5% des touristes interrogés déclaraient venir «principalement» pour les festivals. Ce qui représente tout de même 11 millions de nuitées, si l’on tient compte des hébergés. Un chiffre énorme, qui confirme l’impact des festivals sur l’activité

économique. D’autant que le directeur du CDT du Var soulignait que «même ceux qui viennent pour la plage et le soleil sont de plus en plus nombreux à consommer des visites de villes, de monuments et de musées», ajoutant même que «les activités périphériques, sportives et culturelles sont devenues structurelles, même en août, même dans le Var.» Car les autres départements, en particulier les départements Alpins, soulignent l’attractivité culturelle de leurs territoires, avec des équipements comme le Musée de Quinson, ou les festivals de musique classique. Les Bouches-du-Rhône, plus vastes et complexes, constatent le succès des investissements muséaux et festivaliers à Aix et Arles, et notent que Marseille commence à attirer un certain tourisme culturel. Quant au Vaucluse : 116 000 spectateurs au Festival d’Avignon, plus un million de places vendues durant le off, sans compter la forte attractivité des Chorégies et de Vaison-laRomaine, et tous les «petits festivals» qui animent le territoire. Une activité économique essentielle, dont on peut déplorer qu’elle grève sérieusement les budgets courants de la culture, consommant en été une grande part des subventions des collectivités vauclusiennes… AGNÈS FRESCHEL

Comité Régional de Tourisme www.chiffres-tourisme-paca.fr


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THÉÂTRE

AVIGNON OFF

Parmi les 1200 spectacles proposés, difficile de faire son choix ! Voici les nôtres, aléatoires

À la Manufacture, la Cie Adesso e Sempre de Julien Bouffier a présenté une revisitation audacieuse et convaincante d’Hiroshima mon amour, sur la trace du film de Resnais. Quoi de plus symbolique qu’Hiroshima, terre d’inhumanité, pour questionner la naissance d’un amour ? Comment faire évoluer ces amants étrangers sur les cendres d’une société anéantie par la bombe atomique ? Construit à partir d’images documentaires filmées à Hiroshima et des projections «live» qui démultiplient l’éclatement du décor, et interprété par Vanessa Liautey et Ramzi Choukair (un acteur Syrien magnétique qui incarne «le Japonais» de Duras), le spectacle impose avec fougue l’évidente nécessité de la mémoire. Une exploration passionnante de la rencontre avec «l’autre».

Bons pédagos ! Eclats de Scène a posé ses valises à l’École du Spectateur pour résumer 25 siècles de théâtre en 1h30 dans l’Histoire racontée du théâtre. Une gageure ? Avec un vrai talent pédagogique et surtout un grand amour du théâtre, les deux comédiens Frédéric Richaud et Gilbert Barba, armés de personnages en papier et de castelets en kit, réalisent un exposé passionnant doublé d’un bel hommage à «ce miroir plus ou moins déformant de la société humaine». Une compagnie qui porte bien son nom de Centre culturel itinérant. À la Maison du Théâtre pour Enfants, trois pingouins ont embarqué pour l’Arche de Noé, passager clandestin à bord, et philosophé sur l’existence de Dieu. Ce Dieu qui a «la mémoire d’éléphant et qui n’oublie jamais de punir». Dans l’Arche part à 8 heures d’après le roman d’Ulrich Hub, l’Auguste Théâtre a choisi de traiter un thème qui touche forcément les petites âmes mystiques, sans jugement ni à priori. Osé et réussi, le spectacle aborde évidemment, à travers le doute et la foi, la question de la tolérance et de la différence.

Social

Intime Et puis, une vraie «claque» pour laquelle on tendrait volontiers l’autre joue. Au cœur du 23 place des Carmes, un petit appartement «témoin» de vie, celui de la cie Fraction, quelques spectateurs ont pu chaque soir assisté à La peau dure, mise en scène par le trop rare Jean-François Matignon. Sophie Vaude interprète les 3 sœurs inspirées par le sublime texte de Raymond Guérin, aussi divergentes dans leur être que proches dans leur mal-être. La promiscuité avec la comédienne au talent magistral (mais pas tape-à-l’œil), avec les murs défraîchis, le goutte-à-goutte du robinet, le grincement de l’escalier, l’odeur du vécu, l’éclairage en esquisse, nous tiennent cloués à nos petits bancs, collés à nos compagnons de route, bouleversés que nous sommes par les témoignages livrés avec autant d’authenticité. Une déambulation bouleversante dans le quotidien de femmes, pendant la Seconde guerre, qui prennent la parole après avoir encaissé des coups.

Au fil du off... 7e édition de Villeneuve en scène, elle a donné en plein air un spectacle intense et émouvant, Albatros de Fabrice Melquiot. Deux enfants peu gâtés par la vie s’y interrogent sur la cruauté, la mort, l’amour et s’inventent un avenir dans le rêve. La scénographie simple et efficace dans un espace bifrontal sert magnifiquement ce texte grave qui sait se faire léger. Une troupe à suivre... Le Théâtre Girasole est un nouveau lieu accueillant qui nous a permis de découvrir Rituels pour des signes et des métamorphoses de l’auteur syrien Saadallah Wannous. Texte d’une rare intensité mis en valeur par un dispositif dépouillé qui tient de la tour et de la plateforme, et sépare le monde de la chair et celui de l’esprit. Damas, à la fin du XIXe siècle. Bafouée, la femme du Prévôt décide de se consacrer à la prostitution pour atteindre sa vérité. S’enchaînent une série de catastophes et de désirs qui met les âmes et le pouvoir à vif. Fida Mohissen a réussi une mise en scène forte, qui assume des choix périlleux comme de faire tenir le rôle de la courtisane par un comédien (étonnant Benoît Lahos) et de faire dire toutes les didascalies. Simplement magnifique.

Alain Simon du Théâtre des Ateliers (Aix) s’est proposé de dire en slam le Discours de la méthode de Descartes pour le mettre à la portée de tous. Projet louable qui n’atteint pas tout à fait son but, la rapidité de l’élocution et la présence insistante du piano de Christophe Paturet nuisent à l’écoute, tout en réactivant le propos... Un autre monologue parfaitement sensible et maîtrisé se donnait dans le minuscule théâtre du Verbe fou. Le spectateur est totalement immergé dans le magnifique texte de Guilleragues, la passion de la religieuse portugaise séduite et abandonnée. Une table ronde, une chaise, de l’encre et une plume qui crisse sur le papier. Quelques accords de Chostakovitch. Une comédienne lumineuse, Catherine Méry, dans une stricte robe noire, dont le jeu retenu mais ardent enchante. Un moment de grâce. Humani Théâtre est une jeune troupe itinérante basée près de Béziers. Pour la

CHRIS BOURGUE

DELPHINE MICHELANGELI Rituels © Yvan Pitteloud

Avec la Répartition des Mouches de Jean Cagnard, la cie Mises en Scène continue sa route entre social et artistique à l’Entrepôt. Autour du thème de la solitude, se croisent dans un maelström surréaliste -mais pas unanimement persuasif- le Père Noël et sa fille, le Fou intérieur, l’Actrice, l’Homme avec lequel on se sent seul... Même la «Population» sera de la partie, «interprétée» par des comédiens amateurs

issus des ateliers menés vaillamment dans les quartiers d’Avignon par la compagnie. Michèle Addala met en scène ce petit monde, fragile et poétique, un peu triste parfois, accompagné par le violoncelle de Guillaume Saurel. Endosser la souffrance de l’autre et représenter la «grande tragédie humaine», un exercice louable mais périlleux, qui ne fait pas toujours mouche. La jeune cie Faim Rouge, prometteuse par ses choix aiguisés et son intérêt au monde, a choisi de dresser le portrait de la vie carcérale à travers le témoignage fataliste d’une éducatrice. Au Ring Fragmentation d’un lieu commun, écrit par Jane Sautière, une éducatrice pénitentiaire lucide face à sa mission d’assistanat, est mis en scène par Laure Vallès. Alternant à chaque création, mise en scène et jeu d’acteur avec Pauline Hornez (qui interprète donc ici la travailleuse sociale, un rôle qui demanderait un peu plus de maturité), elles se sont associées à la danseuse Céline Schneider. Un duo de femmes pour exprimer la révolte et la parole, l’usure professionnelle et la dignité humaine, l’enfermement et l’incapacité à dire.

La peau dure © X-D.R

Petit tour de l’été

Je pense donc je suis par Alain Simon s’est joué au Centre européen de poésie www.theatre-des-ateliers-aix.com Adeus, lettres de la religieuse portugaise Cie Art et latte (Paris), mes Brigitte Girardet www.artetlatte.fr A1batros de Fabrice Melquiotmes Fabien Bergès / www.humanitheatre.fr Rituels... de S. Wannous-mes F. Mohissen 06 18 65 12 91


et hasardeux… comme le off l’impose !

Entre l’ombre et la lumière

Certaines manifestations du festival ont pâti de leur éloignement du centre et ce malgré la qualité des spectacles… Et pourtant ! Le minuscule effort de marche était récompensé par de somptueuses prestations, comme celle de la jeune danseuse Choé Lanzafame qui interprétait avec une sensibilité à fleur de peau la belle chorégraphie de Marie-Anne Granier, Les Damnés, au Studio Théâtre Avignon Temps Danse. Jeux d’ombres et de lumières, savamment orchestrés par Philippe Catalano, partition aux multiples registres de Pierre Charvet, Tension vers la lumière, inaccessible. Quêtes avortées, lent cauchemar d’une conscience qui s’enlise, se révolte, s’enferme… Pureté des mouvements, sobriété du jeu, jusque dans la scène où le corps emmêlé à la corde qui le lie s’épuise. On est emporté dans un monde d’interrogations poignantes… élans, tensions, tout autant de soubresauts d’âme…

Jeux interdits Plus loin encore, un gros kilomètre du centre, l’École de Spectateur ne fournissait pas un public nombreux aux dynamiques acteurs de Ouasmok ? de Sylvain Levey? Julien Asselin et Agnès Petreau réussisaient pourtant le tour de force que de jouer l’enfance, sans ridicule, avec justesse, humour, sensibilité. Marivaudage de cour de récré, parcours d’une vie adulte rêvée, rencontre, séduction, amour, mariage, divorce… tout cela avec une verve jubilatoire revigorante ! Les personnages prennent en main leur univers, le modèlent, le dessinent au gré de leur évolution sentimentale. Spectacle tout public, à partir de 10 ans, qui en traîne les spectateurs dans une ronde pas si anodine, puisque des enfants du public sont invités à reprendre à leur compte les premières répliques de la pièce, un nouveau «ouasmok ?» est lancé, ça veut dire «comment tu t’appelles en Arabe». Histoire de donner aussi à réfléchir… Vivifiant !

Le rire du génie Tout le monde connaît le film de Milos Forman, Amadeus, et la pièce de Peter Shaffer, présentée à Brodway en 1981, et jouée à plus de 1000 reprises. La compagnie En Plein dans l’œil, issue de la collaboration entre la Compagnie ARS et la Sorbonne-Nouvelle, a eu la bonne idée de reprendre cette œuvre populaire qui interroge le concept de génie à la Petite Caserne. Théâtre mouchoir de poche dans lequel la mise en scène sait créer des espaces, une profondeur, transcrire dans les lieux l’épaisseur du temps. Julien Buda, malgré sa jambe dans le plâtre, interprète un magnifique Mozart, qui évolue entre folie ingénue, trivialité et fragile sensibilité. Lula Suassuna campe Salieri avec une grande justesse, que ce soit le vieillard désabusé ou le souvenir du jeune homme épris de son art et de Dieu, confronté à ce qu’il considère comme une injustice : le génie accordé à un être qui ne le mérite pas. Constance ainsi que l’Empereur Joseph II qui trouve comme rédhibitoire défaut à la musique de Mozart de contenir «trop de notes»… Cette pièce toute de passion a reçu un bel hommage du public, sensible tant à la qualité des interprètes qu’à celle du texte et de sa mise en lumière. MARYVONNE COLOMBANI Amadeus © X-D.R.


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THÉÂTRE

AVIGNON OFF

Mélange de genres

Monstres © X-D.R

compagnies s’ingénient à déconstruire les codes du théâtre classique avec un polar touffu : les belges de la

Tout Feydeau en un seul homme La légende autoproclamée de l’auteur dramatique qui renouvela le genre du vaudeville relate qu’il aurait été le fils naturel de Napoléon III ou de son demi-frère, le duc de Morny. En tout cas pour le moins, l’arrière petit-fils de l’impassible Talleyrand, Ministre des affaires étrangères inamovible qui traversa cinq gouvernances ! La Valse de l’Empereur de Strauss qui ouvrait le spectacle du jeune comédien Francescu Raffaelli était un clin d’œil

Au milieu de ce trouble, arretons-nous (un instant) et jouons dans le noir © X-D.R

Sur la place des Corps Saints le théâtre programme la dernière création de Jeanne Béziers, du Théâtre du Maquis. Dans la petite salle, rendez-vous avec ses Monstres hauts en couleurs. Issus de rêves, de cauchemars, de fantasmes, ces délires surréalistes lorgnent vers les contes de fées, égrainés comme une longue histoire qui n’aurait ni début ni fin, juste un corps épais fait de prose et de vers. Merveilleusement accompagnée par la contrebasse de Stéphane Diamantakiou, et profitant pleinement de la proximité de cet espace réduit pour nous ouvrir grand la porte de son univers, la comédienne fait alterner ses textes (du très sombre au très poétique, dans une langue toujours très fouillée) avec des reprises de chansons de Walt Disney (en anglais) ou des créations plus sombres de Martin Béziers, le tout servi avec une énergie et une fraîcheur jubilatoires ! Seul en scène, Lucas Franceschi tient son monologue sans faillir. Il investit la Cour d’honneur de la Faculté des sciences avec un bel hommage au monde théâtral à travers l’œuvre de Shakespeare, du comédien au personnage sans oublier le metteur en scène. Être ou ne pas être est une subtile réflexion sur la gestation d’un spectacle, et sur la précarité de l’état de personnage au sein d’une pièce. Avec, pour appuyer son propos, le kidnapping par le personnage désespéré de son comédien… Le numéro est époustouflant, le jeu de Lucas Franceschi ping-pong avec maestria entre les divers «personnages», offrant même une fin de prise d’otage surprenante… Petit passage par L’Entrepôt où deux

cie Sur le fil et les alsaciens de la cie Ecknobul ont trituré et découpé le texte de Régis Duqué, Dans le noir, pour en faire Au milieu de ce trouble, arrêtons-nous (un instant) et jouons dans le noir. Une mise en scène ingénieuse qui, sans décor, définit les lieux visuellement, et le jeu talentueux des comédiens balisent l’histoire délirante de Tom, Jerry et Donald qui bossent pour Mickey, le parrain mafieux, de Betty, sa maîtresse en titre retrouvée noyée, et de Daffy, le flic, qui doit débrouiller tout ça. La reconstitution de la scène du crime, baignoire aidant, ne manque pas de fraîcheur… Au Chien qui fume, la cie À Cour & À Corps raconte, sans paroles, Yakafaucon : trois personnages clownesques déclinent leurs relations à l’autre en prenant comme accessoire un simple bonbon… Avec humour et dextérité les gestuelles de chacun vont nourrir les saynètes, jusqu’à l’envol en trapèze des deux protagonistes

judicieux à l’ascendance supposée de celui qui sut si bien caricaturer les us et coutumes et les ridicules de cette bourgeoisie qui avait fait sien le mot d’ordre de Thiers : «Enrichissez-vous !» Dans Le Potache, l’acteur campe un collégien naïf qui va de méprise en méprise au cours d’une réception mondaine et fait étalage d’une indéniable fatuité en s’imaginant sous les traits d’un irrésistible séducteur ; le sketch suivant, J’ai mal aux dents, évoque, avec un art consommé de la suggestion, un mariage raté ; c’est un régal d’entendre couler les alexandrins, ornés de passés simples et d’imparfaits du subjonctif habilement glissés dans une volée de borborygmes. Le billet de mille permet à l’acteur, avec un boa pour tout accessoire, de se métamorphoser en personnage féminin, avant de se transformer en vieillard

féminines, un spectacle dans le spectacle qui n’allège pas forcément le propos… Loin de l’effervescence des rues très empruntées du centre, le théâtre du Cabestan contribue à faire changer d’air avec une incursion réussie dans l’univers de la princesse Palatine. L’interprétation de Marie Grudzinski est remarquable, qui s’appuie sur la mise en scène épurée de Jean-Claude Seguin, revêtant progressivement des costumes somptueux, affinant ses coiffures, passant de son boudoir à la Cour poudrée de Louis XIV. Elle campe une Palatine incisive, se reposant sur un choix de lettres judicieux qui permet de la voir vieillir imperceptiblement, saisissant raccourci qui laisse intactes les images d’un Versailles dépoussiéré. Au théâtre des Béliers, une petite pièce toute simple remet les pendules à l’heure quant au monde enchanté dans lequel vivent les petites filles, et celui qu’elles intègrent juste après... Et pendant ce temps-là les araignées tricotent des pulls autour de nos bilboquets est un anti-conte de fées drôle et cruel, une chronique qui sent le vécu, que porte Raphaëlle Moussafir, qui en est l’auteure, tel un caméléon, changeant de personnages au gré des discussions hyper réalistes, sans accessoires ni décor, campant la petite famille au fil et à mesure des changements qui s’opèrent dans le corps de celle qui voit et entend tout… Efficace ! DOMINIQUE MARÇON

ventripotent, rentier misanthrope, malheureuse victime de locataires sans scrupules dans la Complainte du pauvre propriétaire. L’homme qui n’aimait pas les monologues -véritable paradoxe pour un comédien seul en scène- car ils sonnent «faux», permet au comédien d’adresser un vibrant «Allez-vous en !» aux spectateurs médusés, ces véritables «patrons» des acteurs. JEAN-MATHIEU COLOMBANI

Feydeau dans tous ses états a été joué à Marseille et à Aix le 30 juin. Francescu Raffaelli a joué à la Chapelle de l’Oratoire Les Confessions de Saint Augustin



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DANSE

VAISON | AVIGNON | CHÂTEAUVALLON

L’été danse ici Chaque été les Hivernales offrent avec une générosité renouvelée leurs plateaux aux compagnies régionales. Concentrée durant deux semaines de juillet au théâtre de la rue Guillaume Puy, la programmation a rassemblé un peu moins de monde que les années précédentes (7000 spectateurs «seulement» et il y avait dans le «In» cette année une concurrence chorégraphique internationale impressionnante, entre Platel et Keersmaeker…). Mais si les Hivernales en février invitent des stars de la danse contemporaine, son été prend plus de risques, et se met à la disposition de cies plus confidentielles. Au programme cet été la Cie Technologia Filosofica qui a mené un bal succinct et coloré : 25 minutes de portes qui claquent en concentré de vaudeville autour de 5 danseurs ; la Cie Deux temps trois mouvements qui a interrogé en un magnifique duo athlétique la politique d’immigration de l’État Français, et l’étroitesse de l’espace accordé aux arrivants ; un solo de Fabrice Ramalingon met à jour ses paradoxes, entre danse disco, postures animales et agaçantes immobilités et répétitions ; une pièce de Franck Micheletti inutilement étirée (voir ci contre) ; et deux moments venus d’ailleurs, grâce à des collaborations internationales…

2 Flamenco Le Festival de danse

de Vaison-la-Romaine a l’art d’allier qualité et spectacle populaire, et l’a prouvé une fois de plus…

Les films de Carlos Saura, comme Noces de Sang, ont apporté à Antonio Gadès une notoriété mondiale méritée. L’esprit du chorégraphe trop tôt disparu perdure dans la compagnie qu’il avait créée, et c’est avec bonheur que la Compañia Antonio Gadès a repris Fuenteovejuna (1994) inspiré de l’œuvre de Lope de Vega. Tout a déjà été dit de cette œuvre somptueuse, qui tient de la fresque historique, un parfum de 1900 de Bertolucci, par la mise en scène d’un village entier, épisodes de la vie paysanne, moisson, lavandières, fêtes populaires, dans un décor et des costumes superbes, tableaux d’ocres et de bruns safranés… nous sommes installés au XVe siècle, dans un village

cie Malka © F. Hernandez

Meia Lua Bouba Landrille Tchouda, interprète et chorégraphe venu du hip-hop, a créé la compagnie Malka en 2001. Son travail se nourrit des cultures urbaines

et de celles du monde. Le hip hop se mêle avec un brin de samba ironique, un tango effréné, mais surtout à des éléments de capoeira. Créée dans le cadre de l’Année de la France au Brésil cette pièce possède une énergie époustouflante. Ils sont 8 dont une seule femme, sculpturale Aïda Boudrigua, formée par Josette Baïz dès son enfance, qui incendie le plateau. Objet de désir elle est peut-être la plus proche de cette moitié de lune qui les éclaire par intermittence. Statues veillées par un gardien, ils sont dans l’endroit clos d’un musée. Mais comme dans les contes ces «objets inanimés» vont prendre vie et donner du fil à retordre au gardien. La chorégraphie est inventive, variée, pleine d’humour et redoutable de vitesse… même si le rêve et la lenteur ont aussi leur place sur fond d’accordéon et de violoncelle. cie Dorina Fauer © D. Fauer

Leks Venus de Belgique encore (toujours?), un bizarre tableau de famille avec nain, sérieux glaçant ou pince-sans-rire, fausse verdure verte, camouflages, formica et recyclages de paquets de chips. Des moments de danse hallucinants -danser avec un nain, tentative inédite, provoque une invention chorégraphique constante, des portés déséquilibrés qui roulent, tombent, époustouflent, et puis des nez dans les seins, sur les fesses, une violence de coups bas entre les deux hommes, un rapport au corps et au désir troublant. On ne sait pas trop ce qui s’y dit de nous, ce que ce petit homme des forêts évoque lorsque brame le cerf, chante le rossignol et s’accumulent les reliquats de piquenique à l’orée des bois de nos légendes. Mais ça parle à l’inconscient. Très fort. CHRIS BOURGUE ET AGNÈS FRESCHEL

Les Hivernales se sont tenues du 11 au 23 juillet à Avignon

de la province de Cordoue. Un amour partagé et heureux unit le pauvre paysan Frontoso et la douce Laurentia, mais le commandeur, Fernan Gomez, cruel et tyrannique, s’interpose, abuse de la jeune fille le jour de ses noces. Les habitants du village Fuenteovejuna se révoltent et tuent le seigneur et ses sbires. Le spectacle se referme sur la scène initiale, l’harmonie l’emporte. La danse, les chants,

le choix des musiques, tout contribue à créer une progression dramatique soutenue, le public captivé s’émeut, s’indigne, s’enthousiasme, transporté par la vivacité, le jeu enlevé des danseurs. Le choix des musiques, du baroque à Moussorgski, souligne la multiplicité chatoyante des registres. Le flamenco populaire trouve ici des lettres de noblesse. Du grand art ! Le pari de Dunas était autrement plus Dunas © David Ruano

risqué : rapprocher l’art de Maria Pagès, sublime «transcendanse» de son propre corps habité d’expressivité sensuelle, et celui de Sidi Larbi Cherkaoui, contemporain, métissé d’orient plus dans l’idée que dans les faits, n’allait pas de soi. Ils se sont retrouvés dans le sable du désert, jouant chacun de l’image de l’autre sans renoncer à la sienne, se retrouvant autour de musiques arabe et flamenca interprétées par des musiciens inspirés, et d’un art calligraphique qui écrit la danse comme on dessine les corps. Un homme et une femme qui s’embrasent et s’enlacent, se cherchent et se manipulent, avec la fluidité du vent et du sable mêlés, danse amoureuse métaphore d’un rapprochement de deux arts. M.C ET A.F.

Vaison Danses a eu lieu du 9 au 27 juillet


Mille et une danses

Daniel Larrieu, Franck Micheletti et Alonzo King ont offert à Châteauvallon, le temps d’une soirée, trois manières de façonner les corps, de dialoguer avec la musique et d’occuper l’espace. Dans une chorégraphie créée sur-mesure pour Julie Dossavi, Daniel Larrieu a tiré le meilleur de sa puissance physique pour atteindre la légèreté requise. Car dans À chaque vent le papillon se déplace sur le saule il allie la finesse de sa musculation tendue à une vibration intérieure permanente, mariage dans lequel elle excelle, corps noir ancré sur le sol blanc parsemé de plumes fuchsia. «Une robe chorégraphique haute couture» dessinée par Daniel Larrieu qui se révèle être un habile couturier, mêlant le chant éraillé et sophistiqué de Sarah Jane Morris, la musique de Jean-Jacques Palix, Colleen et Matthew Herbert aux gestes amples, aux déhanchements compulsifs et aux longs silences de Julie Dossavi. Tandis que les voix d’Ève Couturier et Alica Champion chuchotent en off «Je ne sais quand ni quoi ni où vous êtes venu au monde»… Esquissé lors des premières Constellations à Toulon cet hiver, repris également durant un mois aux Hivernales (voir ci-contre), Espaço Contratempo s’enrichit, prend du poids et de la matière mais ne parvient pas à soutenir son rythme. Passant de 30 à 50 minutes, la pièce perd sa nervosité électrique ! Le trio Franck Micheletti, Idio Chichava (magnifique danseur à qui rien ne résiste), Rémi Aurine-Belloc à la guitare joue de l’espace du plateau

pour dialoguer ou entrer en résistance. À l’écoute les uns des autres, ils écrivent «une cartographie plurielle» qui laisse les spectateurs sur le bord du chemin, lassés par le manque de propos étiré inutilement. La cerise sur le gâteau était la venue du Lines Ballet d’Alonzo King, maître de la danse contemporaine outre-Atlantique depuis la fondation de sa compagnie en 1982. Un double programme offert comme une vitrine de sa conception d’une danse entre modernité et convention, le chorégraphe afro-américain étant un chantre de la danse néoclassique. La pièce Migration : The Hierarchical migration of Birds and Mammals en était un parfait exemple qui privilégiait la lumière des corps, les mouvements éthérés et des entrées plateau conventionnelles. La seconde, Rasa, à la fois plus inventive et personnelle sur le plan formel, réussissait à détourner le piège de l’illustration de la musique indienne. Car Alonzo King et Zakir Hussain ont sublimé l’interdépendance de la danse et du tabla : moins désincarnés, les corps étaient là de merveilleux instruments. MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Spectacles donnés le 20 juillet au CNCDC Châteauvallon à l’occasion du Nouveau Festival 2010

Julie Dossavi dans À chaque vent le papillon se déplace sur le saule © Agathe Poupeney


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MUSIQUE

FESTIVAL D’AIX | CHORÉGIES D’ORANGE

Fusion des Arts Il y a dans le travail entrepris par la chorégraphe Trisha Brown à l’Opéra quelque chose de captivant, de profondément novateur. En particulier parce qu’elle fait danser les chanteurs, qu’elle tente de mêler le mouvement plastique des corps, les arabesques qu’elle trace, à même le sol, à la craie noire, sur de grands panneaux figurant le décor, aux lignes ornées du chant baroque, aux dynamiques rebondies des rondeaux, rigaudons et autres antiques menuets. Son Orfeo avait dérouté il y a une douzaine d’années, parce que le public saisissait mal les amplifications que la scénographe voulait imprimer au livret, le sens des pantomimes qui se superposaient au geste vocal dans les dialogues, les airs ou les récits. Si l’on retrouve cet effet «parasite» dans son travail effectué sur Rameau, c’est dans une moindre mesure, car les extraits tirés d’Hippolyte et Aricie et l’Acte de Ballet Pygmalion sont davantage conçus autour de la danse que le chefd’œuvre de Monteverdi : la fusion des arts opère mieux. Les danseurs glissent de l’un à l’autre par des portés arrondis, des mouvements de balanciers, des corps à corps qui cherchent l’apesanteur… Trisha Brown modernise un vocabulaire puisé dans la danse préclassique, peu connue, en épousant le duvet sonore, les somptuosités orchestrales des Arts Florissants guidés tout en nuances par William Christie. Sur scène, à côté de Sophie Karthaüser, mixant quelque ébauche chorégraphique aux trilles de rossignol de la blanche Aricie, du ténor au registre un peu inégal Ed Lyon, on découvre une tragédienne à la voix sombre et à la présence scénique fascinante : Karolina Blixt (Phèdre).

L’excellence au service du populaire

© Grand Angle-Orange

Tosca. Puccini a laisse une œuvre sublime où se mêlent puissance, révolte et amours, dans une grandiloquence et une exacerbation assumées. La mise en scène de Nadine Duffaut maîtrise cet espace du drame, de la scène grandiose du Te Deum à l’intimité d’une séduction sournoise : l’immense tableau de Marie Madeleine, paradoxal envahissement de l’espace par un visage intime, sert d’ancrage

permanent à l’action. Catherine Naglestad, Tosca émouvante (Vissi d’arte) est solide dans tous les registres. Roberto Alagna (Mario Cavaradossi), est très présent vocalement et scéniquement, dans les moments ensoleillés Recondita armonia, comme dans les passages dramatiques Vittoria, Vittoria, puis torturé dans le propre tableau qu’il peint. Idée pertinente, Tosca s’y brisera aussi. Scarpia, Falk Struckmann, bon comédien, entre violence vocale (Te Deum) et scène d’amour (e allor sedete e favelliamo) fut le 18 juillet sujet à des défaillances dans les aigus étonnantes pour un baryton rompu aux joutes wagnériennes. Quant à l’orchestre Philharmonique de Radio France, il sonne magnifiquement : l’équilibre des timbres et les multiples palettes sonores sont un régal, des tutti imposants aux motifs solistiques. Le chef d’orchestre, Mikko Franck, soutient le récit et la hardiesse du langage musical dès les trois premiers accords d’une sombre atonalité. Les chœurs des Opéras de Région apportent une fougue jubilatoire (superbe Maîtrise des Bouches-du-Rhône) dans les passages avec le truculent sacristain, octogénaire bondissant Michel Trempont et une démonstration de force dans la parade militaire des sbires de Scarpia. Wojtek Smilek (Angelotti), baryton sombre et généreux et Christophe Mortagne (Spoletta), ténor léger et mordant, contribuent au beau succès d’ensemble : le plaisir d’un opéra vériste populaire comme seules les Chorégies en offrent, simplement, aux amateurs. YVES BERGÉ

Tosca a été donné les 15 et 18 juillet à Orange

JACQUES FRESCHEL

Mistral gagnant

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Pygmalion a été représenté au GTP. lors du Festival d’Aix du 16 au 21 juillet

© Elisabeth Carecchio

Avec Roméo et Juliette, Faust et Mireille, Raymond Duffaut aura fait le tour, en quelques saisons au pied du Mur, de la trilogie majeure des opéras de Gounod. Pour l’adaptation lyrique du poème provençal de Frédéric Mistral, il fait appel à un familier de l’œuvre dont la mise en scène de 1993 était encore représenté à Marseille il y a peu. Robert Fortune renouvelle son matériau scénographique à l’aide de vidéo-projections. Ici c’est sur un large panneau blanc que les décors sont figurés. Des images fascinantes s’affichent, fixes ou mouvantes : vues d’Arles façon B.D., une «Nuit étoilée» rappelant Van Gogh, des berges du Rhône plus fantastiques que nature, la Crau et son soleil noir, des cierges géants qui pleurent la mort de l’héroïne aux Saintes-Maries… Sur le plateau, la production est pléthorique, avec trois grands Chœurs réunis (Marseille, Avignon et Nice) accompagnés des pitchouns de la Maîtrise de Bouches-du-Rhône. Une profusion qui sied merveilleusement à un opus riche en scène de foule, des Magnanarelles à la Farandole arlésienne, de la fête de la Saint-Jean à la procession finale... Alain Altinoglu dirige l’Orchestre National de Bordeaux avec maestria, très à l’écoute de belles voix. Nathalie Manfrino est une Mireille jeune à la

© Philippe Gromelle - Orange

diction claire qui assume avec puissance la scène tragique de la Crau. Florian Laconi évite l’écueil du rôle, un ténor pas trop léger dans Vincent, au timbre et aux aigus solides, capable de nuances. Marie-Ange Todorovitch triomphe derechef dans la sorcière Taven, et les rôles des pères (Nicolas Cavalier, Jean-Marie Fremeau) ou de Vincenette (Karen Vourc’h) son idéalement servis. Seul l’Ourrias de Franck Ferrari est en dessous : son timbre homogène et couvert manque de projection et ses aigus ne s’ouvrent pas assez. JACQUES FRESCHEL

Mireille a été chantée à Orange du 4 au 7 août


MUSIQUE

Diva & divo

Au début on tend un peu l’oreille, car Juan Diego Flórez n’est pas de ces ténors à décibels qu’on reçoit bien calé dans un fauteuil d’orchestre : il faut aller un peu vers lui pour apprécier la pureté d’un chant unique. Le pari est osé, car on imagine difficilement entendre, dans l’immense théâtre antique, autre chose qu’un chanteur à coffre. Mais on est vite rassurés : après quelques minutes la nuit tombe et le miracle acoustique d’Orange opère. Dès lors, on jouit pleinement du récital belcantiste du Péruvien, d’un registre d’une égalité hors du commun, sans «passage» perceptible, d’aigus d’une facilité déconcertante : l’aria «Una furtiva lagrima» est un modèle «di grazia» quand les contre-uts en série de La Fille du Régiment n’en paraissent même pas… À ses côtés, Natalie Dessay, sans doute plus à l’aise sur un plateau de théâtre que dans l’exercice particulier du récital, enchaîne avec maestria vocalises, sons filés et autres acrobaties signées Bellini et Donizetti. Tout un répertoire, qu’au fil des ans, la

soprano s’est approprié. Si le vent, invité familier de la vallée du Rhône, ne facilitait pas la tache de la diva emportant sporadiquement quelquesunes unes de ses partitions, celle-ci fit montre d’une grande bravoure dans la Folie de Lucia ou un «Sempre libera», livré en bis, et dont les aigus, agrippés à la force du gosier, nous donnent des frissons ! J.F.

Concert lyrique Dessay/Flórez donné le 17 juillet aux Chorégies Concert lyrique Natalie Dessay-Juan Diego Florez © X-D.R

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Une jeunesse très romantique Toujours aux Chorégies, le 6 août, l’Orchestre National Bordeaux Aquitaine, sous la direction de son jeune chef Kwamé Ryan, a du lutter contre un vent capricieux, et un sort apparemment défavorable ! On attendait le virtuose turc Fazil Say dans un programme Tchaïkovski avec le célébrissime concerto pour piano n°1 en si bémol mineur et la 6e symphonie en si mineur dite Pathétique : malade, il fut remplacé par le russe Andreï Korobeinikov, 24 ans, prix du Conservatoire de Moscou à 19 ans, virtuose très inspiré. Le concerto débute par d’immenses accords du piano suivis d’un thème legato magnifique des cordes. Le pianiste semble voler sur le clavier, le posséder, époustouflant dans les passages rythmiques et retenu dans les moments de nostalgie et de mélancolie. Le chef très expressif, bondissant puis sensible, magnifia le deuxième mouvement où le dialogue

entre violoncelles et hautbois planait au-dessus de l’Empereur Auguste. L’orchestre sonne et répond au mistral par un souffle et un élan, comme en un double concerto de circonstance... Cuivres et percussions n’écrasent jamais des cordes homogènes. Le pianiste fait sa révérence avec une mélodie de Moussorgksy arrangée par lui-même au clavier : populaire, enjouée, magnifique. Dans La Symphonie Fantastique, le chef dessine avec son corps les contours mélodiques du premier thème sombre. On trouve dans l’Allegro con grazia une valse légère, élégante, sans mièvrerie. L’Allegro molto vivace est un scherzo assez militaire d’une grande vitalité, où l’orchestre modèle chaque motif dans une étonnante énergie. Un chef et un pianiste triomphants, un orchestre très présent et un romantisme Y.B.


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FESTIVAL DE LA ROQUE D’ANTHÉRON

Échos de La Roque On se dirige un dimanche après-midi sur les routes du Lubéron vers Lourmarin et son petit Temple situé à quelques pas du Château. Là, traditionnellement, l’édifice sert d’écrin à des récitals intimes : on n’y entre pas nombreux, serrés sur des bancs austères. Entre deux immenses Tables du Décalogue, le 1er août, c’est un formidable pianiste russe qui se produit. Alexandre Melnikov est de ceux à qui le lieu convient. Sur un Bechstein de concert, il sculpte le corps sonore de joyaux «classiques» signés, au début des années 1950, par Chostakovitch qui rendait alors hommage au Clavier bien tempéré de Bach. Son Opus 87 est joué avec un sens halluciné du chant et de la polyphonie, de la forme et de ses respirations, d’un foisonnement expressif conduisant parfois, entre un puissant choral et quelque contrepoint tendre, aux frontières de la tonalité. À 37 ans, Melnikov est de ces artistes dont on suit avec intérêt la carrière… On peut aussi retrouver son récent cycle des Préludes et Fugues paru chez Harmonia Mundi.

Orage et quatre mains Lorsqu’on arrive, le soir même, au parc du Château de Florans, le ciel s’est chargé en nuages et l’air en moustiques… De fait, après quelques mesures du Concerto pathétique de Liszt, on prend l’eau. Après la cadence finale, abrités sous la haute conque acoustique, Brigitte Engerer et Boris Berezovsky font une pause. Les bénévoles distribuent des bâches

protectrices, fines carapaces qui permettront, si le Ciel l’entend, d’aller au bout de la soirée. Avec Brahms et ses fameuses Danses Hongroises les quatre mains s’emballent… et la pluie aussi. On entend davantage le choc des gouttes sur les ponchos plastifiés que les touches du clavier : c’est le déluge! On songe à annuler. Mais les encouragements du public poussent les artistes à poursuivre… jusqu’à une miraculeuse accalmie qui offre au duo complice la possibilité d’exalter l’effervescence rapsodique de Liszt ou le lyrisme chaleureux de la Suite n°2 pour deux pianos de Rachmaninov. Ça tonne au loin ! Après quelque bis à perdre haleine, la pluie reprend. On file alors, la tête emplie de belles harmonies…

Ce colosse Sokolov ! En point d’orgue du festival, le 10 août, on file écouter Grigory Sokolov. Celui-ci refuse le plein air et, depuis une paire d’années, a quitté Lourmarin pour une salle à la mesure de «ses ailes de géants». C’est au Grand Théâtre de Provence que ses aficionados le suivent désormais. Comme des pèlerins vers leur Lieu Saint, les amateurs de piano doivent, au moins une fois dans leur vie, écouter le Russe. À La Roque, on entend de merveilleux virtuoses, des plasticiens du son qui vous embarquent dans leur univers poétique… Mais personne ne joue comme Sokolov. Avec force évidence, ce dernier interprète les partitions

Grigory Sokolov © Klaus Rudolph

comme chacun aimerait pouvoir les jouer… Dans Bach, ses doigts pèsent sur les touches, sans dureté, sa main droite dévide des notes perlées, en sourdine, alors que la gauche rebondit tel l’archet d’une viole. Avec Brahms, il nous prend par l’oreille, déroule le fil d’une épopée au chant royal, aux accents nostalgiques, fougueux et fins. C’est que Sokolov joue aussi merveilleusement avec ses pieds, de ces pédales qui sont comme

la troisième main du pianiste. D’un Schumann de jeunesse, qui sous d’autres doigts nous semblerait mineur, il réalise un chef-d’œuvre ! Après six bis et un dernier salut, l’artiste nous quitte... et nous laisse pantois ! N’attendez plus pour l’entendre… il n’est plus si jeune ! Et même les colosses finissent par tomber…

trois pianos du compositeur hongrois Barnabas Dukay, elle n’a pas remporté un franc succès : après de timides applaudissements, des réactions assez vives se sont fait entendre lorsque le compositeur est

monté sur scène pour saluer et remercier ses interprètes. Ces œuvres, Les Étoiles dans une nuit sans lune, et Les arbres de la montagne étaient pourtant tout en simplicité, poésie et silence. Le public de la Roque est-il réticent à toute œuvre contemporaine, ou rétif simplement à ce minimalisme anti virtuosité ?

JACQUES FRESCHEL

Trois temps inégaux Ranki et Edit Klukon fut modestement applaudi dans leurs paraphrases de concerts de Liszt et d’un Boléro de Ravel assez fade. Quant à leur interprétation, avec leur fils, de deux créations mondiales pour

CHRISTINE REY Mari Kodama © Christian Steiner

Momo Kodama © Vincent Garnier

Pour la dernière Nuit consacrée exclusivement au piano, la scène du Parc du Château de Florans a reçu le 20 août sept artistes venus interpréter un répertoire très varié. Les premières et dernière parties, consacrées à des œuvres pour deux pianos, ont reçu un accueil très chaleureux : les japonaises Momo et Mari Kodama ont triomphé dans leur interprétation brillante et enlevée du Sacre du Printemps, et les français Michel Beroff et Jean-Philippe Collard ont joué avec passion en dernière partie un programme consacré à Ravel, Rachmaninov et Debussy. Le second concert de la soirée fut moins apprécié : le couple Deszö


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30 ans, pas une ride Si la Roque programme essentiellement du répertoire pianistique, le festival sait jouer aussi la carte des classiques de demain (voir aussi p31). Ainsi, au Temple de Lourmarin, carte blanche était donnée à Bruno Mantovani. Les œuvres de ce brillant musicien, désormais directeur du Conservatoire National Supérieur de Musique de Paris (vous avez peut-être assisté à L’enterrement de Mozart, par Musicatreize) étaient interprétées avec une maestria remarquable : au piano, Claire Désert livrait un Suonare somptueux, œuvre de tensions où se mesurent les extrêmes, comme un essai sur la contraction et la dilatation de l’univers. Le trio Wanderer reprenait les Huit Moments musicaux pour violon, violoncelle et piano, une musique de l’attente à l’esprit schubertien : monde au ralenti, les sons s’éternisent, les cordes s’enlisent, respirations comme suspendues au bourdon lancinant du piano, puis une voix s’élance, réconciliation avec le temps avant la dissolution dans laquelle se perdent des accélérations soudaines et comme impromptues… superbe ! Le même 13 août, au parc du Château de Florans, le plaisir des grands classiques : le jeu pur et délié de David Fray tenait en suspens l’assistance. Son interprétation du Concerto pour piano et orchestre n° 22 tout en finesse laissait aux cadences un parfum pré romantique… extase du beau son, effleurement subtil… le public ne s’y trompe pas et ovationne le jeune artiste, comme d’ailleurs le superbe orchestre Sinfonia Varsovia sous la brillante direction de George Tchitchinadze. Ouverture des Noces de Figaro puis une symphonie n°5 de Beethoven (et oui, encore pom pom pom pom !), jouées avec une maîtrise rare. Chaque pupitre s’entend, les bois, les flûtes, les cors

Capucon et Angelich © Xavier Antoinet

surtout, avec de superbes pianissimi, se mêlent aux cordes, tout en gardant leur timbre. Un bonheur d’écoute ! La formule carte blanche donnait à Renaud Capuçon l’occasion de réunir autour de lui l’English Chamber Orchestra, et Nicholas Angelich (1re partie concerto pour piano violon et orchestre de Chausson) et Katia Buniatishvili (2e partie concerto pour violon piano et cordes de

Mendelssohn). La virtuosité des pianistes, la direction précise et dynamique du jeune violoniste, donnaient l’impression que la musique devenait autonome, les instruments n’étant plus que des abstractions… L’essence de la beauté ? MARYVONNE COLOMBANI

Bouquet final

Pour la clôture du Festival, on a assisté à une soirée magique, réunissant talents confirmés et jeunes virtuoses, de Bach à Poulenc, et improvisations talentueuses de Yaron Hermann. Le Concerto pour quatre claviers de Bach imposait clarté des touchers, précision du chef Christian Zacharias dirigeant l’Orchestre de Chambre de Lausanne comme une horlogerie suisse, où Anne Queffélec et Edith Klukon jubilaient d’être associées aux jeunes Dezsö Ranki et David Kadouch. Mari et Momo Kodama, toucher brillant, donnaient vie à l’Allegro con spirito pour deux pianos de Mozart. Lidija et Sanja Bizjak imprimaient à la Valse de Ravel pour deux pianos un flot incessant d’accords puissants et de

© Yves Bergé

plages impressionnistes. Bertrand Chamayou et David Kadouch excellèrent dans le Concerto pour deux pianos en ré mineur de Poulenc, dissonances acerbes et clin d’œil mozartien. Superbe Ménage à trois pour six mains, respiration ludique de Jean Castérède : Emmanuel Strosser, Jean-Frédéric Neuburger, Brigitte

Engerer (trois pianistes pour un seul piano) ! Quant à la transcription de Marc Olivier Dupin de l’Ouverture des Maîtres Chanteurs de Nuremberg de Wagner (douze pianistes), elle garde la puissance et la poésie de l’œuvre, et la fugue y résonne en un éclatement spatial étonnant. La

Danse Macabre de Saint Saëns pour deux pianos à huit mains, n’a pas la densité de l’orchestre, mais gagne en lisibilité technique. Un final en apothéose avec l’Ouverture des Noces de Figaro de Mozart pour douze pianos (M. O. Dupin) : la disposition des pianistes, de dos sur une seule ligne, nous cache les 24 mains mais l’on perçoit aux entrées du thème principal la géniale théâtralité de cette musique. Une fête du dialogue, de l’écoute de l’autre, mélange des genres, des styles, des âges. Des pianistes d’origines diverses pour un concert magnifique de partage ! YVES BERGÉ

Ce concert-surprise a eu lieu le 22 août au parc du Château de Florans


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DURANCE LUBÉRON | CHAILLOL

Délices sur Durance

La jeune fille aux mains d'argent © Agnes Mellon

L’un des nombreux charmes du Festival Durance Luberon réside dans la multiplicité des lieux de concerts. Le festivalier devient voyageur, apprécie les paysages, les lieux, architectures secrètes… On regarde, on déguste, on hume les fragrances de l’été, on savoure les concerts, autant de délicieuses étapes pour le mélomane. D’abord, au Château Paradis, la délicate Jeune Fille aux Mains d’Argent de Raoul Lay, avec l’ensemble Télémaque en grande forme, le génial comédienmarionnettiste Franck Manzoni, les très beaux chœurs conjugués Le Chant du Voisin (dirigé par Catherine Delolme) et l’Académie du Chant Populaire de Alain Aubin, dans une mise en scène tout en finesse de Catherine Marnas. Souvent, les spectateurs viennent revoir cette œuvre, qui à l’exemple des feuilles qui repoussent au printemps comme les mains coupées de la jeune fille, émerveille toujours. Un conte joué pour la 51e fois ce 15 août, fait exceptionnel dans le monde de la musique contemporaine ! Le 18 août, au Château de la Verrerie, 500 kilos de tension sur les cordes d’une harpe (Marie-Pierre Daboval) jouée avec passion et les trilles champêtres d’une flûte (Bernard Marin). Concert qui reprend avec bonheur les standards de la Barcarolle des Contes d’Hoffmann le duo des fleurs

de Lakmé ou la Méditation de Thaïs, pour livrer quelques passages rarissimes, comme un extrait du Voyage à Reims de Rossini. Bémol : un rhume d’été nuisait aux performances vocales de Dominique Marin. Mais Le Rossignol de la géniale harpiste Deborah Henson-Conant fut interprété avec

fougue par Marie-Pierre Daboval. Puis le 23 août à Silvacane, l’alliance déconcertante du chœur et des harpes d’Ad Fontes Canticorum et de la danse de la tradition de l’Inde du Sud, Arabesques & Mudras formation de Nirmala et Patrick Gleize. Le propos était d’interpréter par la danse la musique composée par Gustav Holst (que l’on connaît surtout pour la symphonie des Planètes), et quelques-unes de ses traductions des hymnes du Rig Veda. Beauté des voix, fluidité des gestes qui se figent en statuaire de temple, rapidité des mains qui racontent, parfois même en traduction simultanée du texte dit par Jean Pascal Mouthier. Un apprentissage de la lenteur… Enfin le 25 août au Château de Mirabeau, une soirée romantique, au cours de laquelle on se sent une âme de châtelain, avec un orchestre qui ne joue que pour vous plaire… Buffet viennois, promenade dans le parc, on écoute des poèmes, Heine, Daumer, Wesendonck, Goethe… Agnès Audiffren, toujours superbe, les rend avec juste ce qu’il faut d’intensité passionnée. L’ensemble Unissoni, cordes et vents, joue en septuor pour Beethoven, (la douceur de l’air fait oublier les petits dérapages) puis en octuor sur un Schubert plus enlevé. L’ensemble est charmant. Et vivement l’automne : Durance Luberon s’épanouit en été mais court sur l’année tout entière ! MARYVONNE COLOMBANI

Culturellement vôtre ! Du 18 juillet au 13 août, le Festival de Chaillol a désacralisé la musique avec bonheur Au cœur des vallées du Champsaur, entre Valgaudemar et Pays Gapençais, le village-station de Chaillol peut être fier du chemin parcouru depuis 14 éditions. Pourtant, ce bourg perché à 1600 mètres d’altitude reste un endroit inconnu du géocentrisme étatique français. Au cœur de cette immense contrée communément appelée «province», appellation qui consiste à désigner les lieux où les «autres» gens habitent, Chaillol a la chance de pouvoir compter sur une équipe de choc dirigée par Michaël Dian. Changer l’image sommaire de l’implantation culturelle en milieu rural, offrir une programmation d’une excellente qualité, proposer des rencontres d’autres cultures (Maghreb, Japon…), de la musique contemporaine, accompagner l’auditeur en journée (ballades musicales, rencontres, ateliers…), voilà un pari difficile à tenir. Et pourtant gagné ! Du hameau de Saint-Michel à Saint-Bonnet en passant par Tallard ou La Batie-Neuve, la bonne humeur et la proximité des artistes rapprochent ostensiblement touristes et autochtones du rituel concertant trop sacralisé : les interprètes ne sont pas là pour jouer les tubes du classique mais pour faire découvrir toutes les musiques au gré des rencontres.

restan Boutin et Michaël Ertscheid) accompagnant la danseuse japonaise Toschiko Oiwa pour un solo époustouflant. Vêtue d’une tunique virginale, le lotus se forme, la jeune fille est pure et fait corps le piano, converse avec les instrumentistes, répète ses gestes comme un thème litanique avant d’être proie de convulsions à même le sol, devenant le sacrifice lié au désir de l’homme. L’intégrale de la musique de chambre de Ravel attestait également des ambitions du festival, mettant au jour les filiations des compositeurs : le quatuor Bénaïm y proposa le 25 juillet L’interrogation de Landwoski, étirant Olivia Hughes, Ingrid Schoenlaub et Laurent Wagschal © Alexandre Chevillard le temps de façon inquiétante, puis le quatuor à cordes de Frédéric Pattar, jeune compositeur présent qui put expliquer son processus d’écriture. La soirée du 31 juillet fut sublime grâce à l’interprétation d’Oliva Hughes (violon), d’Ingrid Schoenlaub (violoncelle) et Laurent Wagschal au piano : le Duo pour violon et violoncelle de Ravel, œuvre incroyablement moderne, et le célèbre trio furent les témoins d’une fusion instrumentale passionnelle, à l’image du festival.

Ainsi le tunisien Jasser HajYoussef (violon et viole d’amour) le 29 juillet, accompagné par Ahmad AlKhatib (oud) et Youssef Hbeisch (percussions) dans un moment musical de haute volée, rapprocha avec sensibilité l’orient et l’occident, de même que le trio japonais Miyazaki présentant le koto (instrument roi de la famille des harpes), ou François Rossé évoquant l‘improvisation aux jeunes stagiaires musiciens de l’académie d’été de Chaillol, qui fonctionne en parallèle avec le festival. Autre pari : programmer Le sacre du printemps de Stravinsky dans sa version pour deux pianos (Flo-

FRÉDÉRIC ISOLETTA ET AGNÈS CONDAMIN


OPÉRA AU VILLAGE | TRUMPETARTENSEMBLE

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Aux sources du sorcier Depuis 2006, l’Opéra au village enchante les étés de Pourrières par la qualité des spectacles et la convivialité du Couvent des Minimes, belle bâtisse du XVIe, restaurée depuis 40 ans par Jean de Gaspary. Un goût des raretés qui s’allie au bonheur de faire découvrir des partitions oubliées… Cet été, le public fidèle (guichet fermé !) a été invité à déguster, outre le délicieux dîner sous les marronniers, Le dernier Sorcier de Pauline Viardot dirigé par Luc Coadou et mis en scène par

Bernard Grimonet. Ce dernier raconte avec passion les recherches menées aux bibliothèques de New York, de Harvard, les négociations par l’intermédiaire d’avocats, de connaissances, tout un jeu diplomatique de négociations, l’aide du professeur Zekulin de Calgari, la collaboration de Alexandre Zviguilsky, conservateur du musée Tourgueniev (Bougival), pour se procurer livret et partition du Dernier sorcier, inaccessibles en France ! Et pourtant, l’œuvre est un petit bijou, cela tient du Songe d’une

nuit d’été, avec un sens subtil de la mélodie, et une distanciation ironique dans le tour convenu du conte. Jolie mise en scène malgré l’étroitesse des lieux, décors superbes de dentelles et de filet blanc ! Fraîcheur du jeu, délicatesse des costumes, rigueur de la direction (Luc Coadou). Œuvre féministe aussi, (est-ce pour cela qu’en France elle a été oubliée ?), l’harmonie féminine triomphe, portée par le charmant chœur des elfes: une Flûte enchantée inversée dans le propos, un Zarastro dégradé, dans le

© X-D.R

JEAN-MATHIEU COLOMBANI

Ce concert a été donné du 17 au 23 août à Sisteron, Manosque, Courthézon, Aix et Gréoux les Bains

MARYVONNE COLOMBANI

Le dernier sorcier a été recréé à Pourrières du 15 au 23 juillet © X-D.R

Voici 18 ans, Horst-Dieter Bolz, professeur de trompette au Conservatoire Supérieur de Trossingen, a initié une étrange coutume : inviter ses élèves chez lui, en Provence, pendant les 15 derniers jours d’août ; les faire travailler d’arrachepied pour les concours de recrutement les plus difficiles ; et, afin de les motiver, donner des concerts associant leurs instruments aux grandes orgues tenues par Jean-Jacques TournebiseCerrutti, titulaire de celles de Forcalquier. Le stratagème a permis à ces jeunes musiciens d’occuper aujourd’hui les premières places au sein des orchestres les plus prestigieux d’Allemagne… mais ces musiciens émérites, solistes virtuoses sont restés fidèles à la Provence et à leur professeur : ils continuent à se retrouver pour le plaisir de faire de

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Sonnez, trompettes, la gloire d’un maître !

la musique ensemble, sous forme associative ; ainsi, solistes de l’Orchestre de Stuttgart, de Philharmoniques, d’Opéras, de radios et télévision d’État… jouent bénévolement par fidélité à leur professeur ! La trompette a connu son heure de gloire au XVIIe siècle dans les Cours d’Europe pour célébrer la gloire du Roy ou de Dieu, et elle connaît un renouveau contemporain. Aussi le programme proposé était-il varié : après un hommage au Grand Siècle avec le Carrousel de Lully, la Canzon de Gabrielli permettait à l’orgue de donner la réplique aux trompettes dans la pure tradition vénitienne, la suavité des cuivres répondant tantôt à la douceur, tantôt à la puissance et l’éclat des grandes orgues. La Suite d’Abdelazer d’Henry Purcell, succession de musiques de scène, permettait d’apprécier le très populaire rondo. Dans la Symphonie de Fandares du Provençal Jean-Joseph Mouret, on retrouvait avec bonheur la saveur et l’accent du Sud. Dans le concerto pour 8 trompettes du compositeur américain contemporain Thomas Wilson, l’utilisation des sourdines permettait un son plus jazzy, parfois proche du didgeridoo. Verdissage, de Karl Heinz Kôper, offrait une composition échevelée, un puzzle farfelu où les thèmes les plus populaires de Verdi, de Bizet se croisent, se métissent et se répondent en de subtiles ou hilarantes variations. Un bis de Gabrielli venait récompenser la folle ovation du public pour ces musiciens de haute volée !

personnage du vieux sorcier bougon, Krakamiche, et une reine de la nuit magnifiée dans la reine des elfes qui permet aux jeunes gens de s’aimer… Fable écologiste avant la lettre, la forêt est rendue à ses habitants, épargnée des destructions que le pouvoir masculin lui faisait subir. Une œuvre formidable !


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MUSIQUE

FESTIVAL CÔTÉ COUR | LES NUITS DU CHÂTEAU DE TRETS

Brésil, fruit de la passion

© Yves Bergé

Le Cloître des Oblats a offert un magnifique écrin à Dona Kju, un trio étonnant et détonnant de fougue et sensualité qui a proposé un programme original de mélodies envoûtantes, rythmes chaloupés, danses communicatives. Cirandas, tournoiement perpétuel de rondes enfantines, baião populaire, batuca-

da, rappelant la samba, côco d’influence africaine : un Brésil aux styles musicaux précis, tous rutilants de liberté. La voix sensuelle de Lanna, jamais forcée, où les sons finissent en résonnance et se posent sur le sable de Copacabana, comme une offrande, s’accompagne au cavaquinho, petite guitare complice.

Emilia Chamone, marimba de verre, percussions, redoutable rythmicienne, se joue, avec délectation, de toutes les formules où la syncope est reine. Ugo Castro Alves, guitare à 7 cordes, enchante par ses harmonies inouïes et sa technique éblouissante. Lanna sollicite le public sur des jeux polyphoniques à trois voix, sur lesquels elle improvise à merveille. L’hommage à la déesse de la mer pour une pêche abondante nous fait découvrir le son sublime du marimba de verre qui accompagne les vocalises aériennes de la chanteuse. L’évocation de la vie des marins permet une multiplication d’effets vocaux, entre bruitages et musique concrète, diaboliques accords de la guitare et polyrythmie jubilatoire des percussions (congas, cajón, cymbales). On se délecte de l’accent de

Lanna sur le papillon et la fleur de Victor Hugo qu’elle traduit, laissant vibrer une samba plus funk (Ciranda da rosa vermelha). Les variations de la Cinquième de Beethoven sont encore une fête du rythme, Valsinha de Chico Buarque et Trenzinho caipira de Villa Lobos sont des moments de grâce. Le public reçoit ce rythme incessant sur lequel se posent des mélodies riches, lumineuses ou graves. Le temps d’un Carnaval multicolore, multiethnique, où la musique est sans cesse (en) mouvement. YVES BERGÉ

Dona Kju s’est produit lors du Festival Côté Cour le 23 juillet à Aix

Viva Pergolesi ! Benito Pelegrin, le nouveau directeur artistique de Côté Cour préfère «célébrer la naissance des compositeurs plutôt que leur mort !». De fait, le dernier concert du festival aixois, le 27 juillet, a honoré un musicien né il y a trois siècles (mort à 26 ans !), connu pour son Stabat mater et pour avoir déclenché la fameuse Querelle des Bouffons (1752). Mais lorsque Pergolèse compose son opéra buffa La Serva Padrona en 1733, il ne se doute pas qu’en France, après sa mort, l’œuvre fera l’objet d’une joute esthétique engagée par Rousseau. La pièce chantée est cependant, de nos jours, assez peu jouée. On loue donc l’entreprise qui, pour une unique représentation, mise en scène par JeanMarc Patris, a habilement réactualisé l’opus : le grincheux Uberto est un cadre très dynamique (Cyril Rovery) et Serpina (Raphaële Andrieu) une

© X-D.R.

Jean-Marie Puli, l’Orchestre de chambre Mosaïque (dir. Marie Christine Thomasset) ont, avec bonheur, créé un double concerto inouï sur les scènes françaises. Chapeau !

hôtesse-secrétaire qui finit, à force de malice, pas se faire épouser par son boss. Des dialogues parlés, adaptés en français, ont permis de suivre le fil de la comédie, les airs et duos italiens furent chantés avec talent, et Vespone (Alain Iltis), sbire muet, a catalysé l’attention. En prélude, les clavecinistes Brigitte Tramier et

J.F.

Du Jazz aux Mouflons I Muvrini © Nicolas Dobranowski

Les festivals d’été de Trets perdurent, moins fournis que les années précédentes. Une nouvelle formule estivale, sur trois jours (15, 16, 17 juillet) avec des spectacles relevant d’univers totalement différents, jazz, (Rhoda Scott), humour (Laurent Gerra), world music (I Muvrini). Un seul concert jazz, donc, cette année dans la belle cour du château : après une belle première partie avec le Colibri Quartet, se produisait, accompagnée de Lionel Grivet à la batterie, Rhoda Scott, «the barefoot lady», (le surnom vient de sa technique particulière, elle joue pieds nus les basses du pédalier). Cette grande dame du jazz a enflammé l’assistance par l’interprétation de nombreux standards, de Duke Ellington, Ella Fitzgerald, James Brown, Django Reinhardt, avant de se lancer dans un pot pourri à la demande du public, mêlant Valse à Charlotte, The Cat, Moon for love, Summertime…

Une démonstration virtuose des capacités de l’orgue Hammond ! Malgré un cocasse défaut d’annonce (certains s’attendaient à voir Marc Lavoine !), le concert des Muvrini au stade de La Gardi a drainé une foule

enthousiaste, ravie d’applaudir ces artistes généreux qui se refusent à entrer dans un moule convenu. Ainsi, l’on pouvait entendre des chants Baolais, ou Dans le port d’Amsterdam (magnifiquement chanté), parallèlement aux morceaux de leur dernier album, Gioia, dont la première chanson est dédiée à frère Xavier Plassat, qui se bat contre l’esclavage des enfants au Brésil. Comme dans tout concert des Muvrini, ce n’est pas seulement la beauté des voix ou la virtuosité des musiciens, l’émotion sensible des textes, le recours à l’humour aussi, qui transportent le public, mais le message de fraternité, la volonté d’une liberté citoyenne, l’appel à l’harmonie. De quoi devenir fan, même pour les accros de Marc Lavoine ! MARYVONNE COLOMBANI


ARLES | ISTRES | HYÈRES | SIX-FOURS

Escale en Arles

Sous la lune à MIDI !

Au cœur du midi un 24 juillet, un festival perché et branché sur les hauteurs de Hyères

Le lundi 26 juillet, on jetait l’ancre sur les gradins du théâtre antique d’Arles pour une étape très rock du festival des Escales du cargo Les colonnes du théâtre antique en vibrent encore : la performance d’une Izia survitaminée a véritablement su faire larguer les amarres à un public bigarré et nombreux, de prime abord curieux puis peu à peu totalement conquis. En transe, quasi possédée, Izia fait oublier son jeune âge pour livrer un concert bluffant où la communion est totale, dans le rock, le vrai, celui qui prend aux tripes et qui envoie en l’air tous les codes du politiquement correct. Cette énergie, rare et communicative, a transformé en l’espace de trois morceaux un public passif, assis, en foule délirante, dansante et par-dessus tout, heureuse ! On vivait ce moment presque en apnée, parenthèse d’énergie brute, en accord finalement parfait avec la puissance des pierres antiques qui servaient de décor à ce festin de son. Difficile fut la mission des Pony Pony Run Run qui prenaient

Izia © Pascale Franchi

la suite de cet extraordinaire moment, le public à bout de souffle s’étant quelque peu désengagé. Arrivé à bon port, le cargo du rock a fait trembler Arles ce soir-là, transmué en bateau pirate le temps d’une étape, d’une escale. PASCALE FRANCHI

Entends-tu les Voix...? Parmi les festivals incontournables de l’été, Les Voix du Gaou s’imposent toujours comme une référence. Retour sur les concerts du 28 juillet Sur la superbe presqu’île des confins du Brusc, on se presse chaque année sans hésiter tant la programmation est d’une constante qualité. Et cet été encore, le festival ne déroge pas à la règle. Quatre groupes se sont succédé ce soir-là sur la scène dominant le parterre des groupies, amateurs ou autres curieux, dans un crescendo maîtrisé d’ambiance et de rythmes rock. Skip the use ouvrait le bal, suivi par les étonnants et électro Pete Doherty © Pascale Franchi

Metronomy, en guise d’introduction aux blockbusters attendus qui devaient suivre. Pete Doherty est ainsi monté sur scène, à grand renfort de cris de fans hystériques, entouré par ses Babyshambles envoûtants. Un soulagement pour ceux qui ne croyaient pas à sa présence ! Quelques instants plus tard, jetant son célèbre galurin dans la foule, il provoquait, il n’en fallait pas moins, les hurlements stridents des nombreuses jeunes filles sous le charme tout british de l’idole controversée, petit revival de concerts d’anthologie où 4 anglais dans le vent provoquaient quelques évanouissements célèbres... Cette prestation nonchalamment rock passée, les Versaillais de Phoenix investissaient la scène en belle apothéose. Du son, du bon, du puissant, et de l’énergie à revendre : ils participaient de la transe collective de la fin de soirée avec brio et maîtrise. De quoi entendre et pour longtemps les Voix dans sa tête ! PASCALE FRANCHI

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Il est des initiatives qui ne peuvent que susciter l’intérêt et la curiosité. La 6e édition du festival MIDI, sur trois soirées, au cœur-même des jardins de la villa Noailles, cadre enchanteur et privilégié, ne pouvait que faire miroiter les plus hautes attentes… Que l’on ne s’y trompe pas, la foule présente sous les pins de ce haut lieu de la culture hyéroise n’était pas constituée des seuls curieux désœuvrés de la fin juillet, bien au contraire ! C’est toute la jeunesse dorée et décalée de la région qui s’était donné rendez-vous pour danser au son de la programmation électronico-rock de la soirée, oubliant les cigales et la lune qui les regardaient interloqués. Pas moins de cinq concerts se succédaient, engendrant l’enthousiasme et des déhanchés de plus en plus marqués, notamment lorsque le chanteur charismatique des Kindness se laissait aller à quelques pas de danse remarqués ou lorsqu’on se laissait emporter malgré soi dans quelque transe provoquée par le groupe toulonnais des Mina May. Si on pouvait se demander par moment qui des artistes ou des spectateurs était en représentation, le lieu suffisait à faire oublier quelques faux-semblants et permettait de goûter sincèrement cet instant unique. Et si d’aventure la débauche de concerts ne suffisait pas à rassasier les oreilles et les corps, la fête se poursuivait sur la plage de l’Almanarre jusqu’à 4h du matin. De quoi se lever le lendemain à... MIDI ! PASCALE FRANCHI

La folie istréenne Les Nuits d’Istres furent percutantes, entre la belle folie d’Higelin et la frénésie d’Iggy & The Stooges Iggy… il s’appelle Iggy… c’est un garçon pas comme les autres… Même si la comparaison s’arrête là avec le Ziggy de Starmania, l’Iguane débarqué avec ses vieux Stooges n’est vraiment pas fait comme nous. Et dire qu’il n’a «que» 63 ans ! La pile longue durée du rock ne sent pas le poids de l’âge, au grand dam du technicien plateau qui a passé la soirée à réparer les frasques du marsupilami déjà torse nu et qui, au dernier pied de micro à ramasser a sans doute du invoquer les dieux et les supplier que le bon vieux Iggy ne repasse plus jamais dans le secteur ! Certains groupes actuels à la morosité affichée auraient quelques leçons à prendre du routard possédé : bonne humeur, plaisir d’être là, communication accrue avec le public et timing aux orties ! Notre Trabant indomptable jouait les prolongations, restant seul sur scène, hilare et pas près d’être couché… Et même si les cordes vocales commencent à fatiguer, la légende est toujours là, les Search and destroy, I wanna be your dog et autre No fun ont littéralement mis le feu au Pavillon Grignan, magnifique demeure du XVIe siècle trop sage, avec des places numérotées sur gradins qui n’ont pas tenu un morceau, les fans de tous âges s’agglutinant sur les barrières et

Iggy Pop © Pascale Franchi

même… sur scène pour un morceau en compagnie des inventeurs du punk ! Iggy, quand tu nous tiens…. Quelques jours auparavant c’était Higelin qui régalait un public impatient, heureux de retrouver l’énergie du chanteur intacte… Higelin entamait par un Minimum de légende avant quelques incursions vers le dernier album, pour des morceaux très rock. Et puis, de Mona Lisa Klaxon jusqu’à un Champagne rajeuni, la fête fut totale, jusqu’au «discours» final du toujours engagé Higelin, émouvant même dans ses coups de gueule… F.I. ET DO.M.


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MUSIQUE

JAZZ DES 5 CONTINENTS | LA ROQUE | LA SEYNE

La colline des Jazz Sachez-le : un bon souffle et de bonnes jambes sont nécessaires pour gravir les marches du Palais Longchamp. Ce fut le cas pour un public venu très nombreux (guichet fermé !, plus de 3500 spectateurs chaque soir !) durant les six soirées de concerts de la Xe édition du Festival Jazz des Cinq Continents. Parvenu à la dernière marche, on s’arrête un peu pour la vue, un peu pour reprendre son souffle et franchir encore la plate-bande inclinée, piste de décollage pour près de 3 heures de musique ! La programmation de cette année a permis de satisfaire les multiples goûts musicaux des spectateurs, et ont laissé des images indélébiles. Le 1er soir : Magic Malik, flûte aux lèvres, dans un nuage de fumée. Le lendemain la charmante contrebassiste-chanteuse Espéranza Spalding précédait Monsieur Al Jarreau, qui réalisait une prestation extraordinaire et lançait un défi au temps qui passe avec une vigueur et un enthousiasme incomparables -on a tremblé pour lui en apprenant deux jours plus tard son hospitalisation à Gap, mais il est depuis remonté sur scène. Le clou de la soirée ? La venue sur scène de Chick Corea pour un duo d’une grande simplicité, inoubliable d’émotion. Mémorable soirée suivante avec le trio Omri Mor & guests, puis Chick Corea, héros de la formation Return to Forever avec le Freedom Band : Chris Mc Bride à la contrebasse, sourire vissé aux lèvres, le

Chick Corea © Dan Warzy

saxophoniste très inspiré Kenny Garrett et Roy Haynes, batteur légendaire qui a toujours su être à l’avant-garde. Moment de grâce et public aux anges ! 4e soirée avec le trompettiste de jazz oriental Ibrahim Maalouf, puis le Richard Bona group au son groovy et très rythmé laissant les amateurs de danse sur leur faim, le public étant tenu de rester assis afin que tous puissent profiter de la vision entière de la scène. Pour la 5e soirée, le pianiste israélien Yaron Herman était accompagné de Simon Tailleu à la contrebasse et de Cédric Bec à la batterie, tous deux bien connus dans notre région pour s’y produire régulièrement. Le batteur Manu Katché entrait ensuite sur scène avec son quartet et son excellent saxophoniste Tore Brunborg. Trois invités se joignaient à eux au cours du concert : le guitariste Sylvain Luc démontrant une grande maîtrise de son instrument avec de longues séquences d’improvisations, Marion Rampal, chanteuse marseillaise, ainsi qu’un flûtiste, souffleur d’un

instrument traditionnel et mystérieux qui a fait planer une atmosphère de quiétude un peu éthérée. Le dernier soir du festival, hommage était rendu pour le centenaire de sa naissance au guitariste manouche Django Reinhardt, inventeur du jazz français, par le guitariste Biréli Lagrène en trio, avec Didier Lockwood au violon. Nos gouvernants n’ont pas attendu bien longtemps, cet hommage sitôt rendu, pour stigmatiser la population manouche... Le saxophoniste Macéo Parker et son orchestre ont clôturé ces six jours de festival lors d’un concert funky où planait l’esprit de James Brown. Les manifestations ont perduré durant l’été autour du jazz. Expo photos à l’Espace Villeneuve-Bargemon, expo à Maison-Blanche ainsi que la riche collaboration à cet événement de la Bibliothèque Municipale de l’Alcazar, laissant pour quelue temps encore une couleur jazz à la ville… DAN WARZY

Le Festival Jazz des 5 Continents a eu lieu à Marseille du 19 au 24 juillet

Maceo Parker © Dan Warzy

Al Jarreau et Chick Corea © Dan Warzy


Légende et minéral Le Festival International de piano de La Roque d’Anthéron n’est pas dédié exclusivement à la musique classique. Le jazz y a aussi sa place et la programmation de cette année a été des plus audacieuses : Eric Legnini, Yaron Herman, Makoto Ozone, Chick Corea et McCoy Tyner. C’est dans les Carrières de Rognes, décor minéral grandiose aux parois découpées, qu’a été installé le Steinway. Le dernier survivant du glorieux quartet de John Coltrane est assis là au piano : McCoy Tyner. Il a contribué au cours de sa longue carrière à transcender le vocabulaire harmonique modal et est encore une source d’inspiration pour de nombreux pianistes. Quelques cigales tardent à faire silence, la température est idéale. Pour l’accompagner, Gérald Cannon à la contrebasse, Eric Kamau Gravatt à la batterie et le saxophoniste ténor Joe Lovano. Proprement bouleversant. DAN WARZY

Ce concert a eu lieu le 26 juillet McCoy Tyner © Dan Warzy

Le potentiel du pachyderme initiateurs d’une nouvelle page de l’histoire du jazz ? DAN WARZY

Ce concert a eu lieu le 30 juillet au Fort Napoleon à La Seyne-sur-Mer CD : Au revoir Porc-Epic / Label Naïve 2006 CD : Original Pimpant / Label Naïve 2009

Émile Parisien © Dan Warzy

Présentation habituelle de la soirée par Jean-Paul Ricard de l’AJMI et début d’improvisation ou accordage entre musiciens ? Quelques réticences, on ne sait pas vraiment si le concert a débuté... Et puis, on se retrouve happé par un univers sonore étrange. On se demande ce qui se joue là… Le saxophone soprano pointé en avant, Emile Parisien balance de tout son corps, dans des va-et-vient de bête traquée, comme le ferait un éléphant face au danger. Trouve-t-il ainsi la juste pulsation ? Il réussit finalement à nous entraîner, puis insensiblement à envoûter, puis subjuguer. Le jazz de ce 4tet laisse découvrir des territoires inexplorés. Yvan Gélugne à la contrebasse, Sylvain Darrifourcq à la batterie et Julien Touery au piano accompagnent le saxo et on perçoit leur plaisir à jouer ensemble. Sont-ils les


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SAISONS

MARSEILLE

Les Minotiers persistent Le Théâtre de la Joliette reste bien ferme dans sa ligne, et continue d’accueillir toutes les écritures contemporaines en ses murs. Celles qui viennent d’ailleurs, mais celles qui naissent ici surtout, et nombreuses sont les cies régionales qui sans cette Scène conventionnée ne trouveraient pas de lieu d’accueil. Pour répéter, et se produire. La saison commence donc comme un peu partout dans Marseille par actOral les 29 et 30 sept (voir p36), et enchaîne sur la création maison du Théâtre provisoire : à partir d’une catastrophe véritable –la cie avait commencé à répéter La Putain de l’Ohio d’Hanokh Levin mais s’est vue au dernier moment refuser les droits-, Haïm Menahem, Philippe Séjourné et Christian Mazzuchini ont conçu un spectacle qui met leur aventure en abyme, et s’adresse directement aux

spectateurs… avec des textes de Valletti, Visniec, Lagarce, Rebotier, Tarkos. Ce sera du 5 au 9 octobre, et ça s’intitule Ça serait trop long de t’expliquer, le mieux est que tu viennes. Dont acte ! Cette entrée en matière sera suivie de nombreux accueils d’écritures variées, mais toutes contemporaines : pour les enfants il y aura le Vélo théâtre avec son joli spectacle Et il me mangea, et la Cie Naïve avec Mathieu trop court François trop long, en danse programmée par Dansem, en musique l’Ensemble Télémaque pour son Mois des compositeurs, des lectures, des projections et beaucoup de théâtre, souvent sous forme de cabarets, dans un esprit toujours convivial, pour des tarifs très abordables… Surtout pour nos adhérents (8 euros !)

Ca serait trop long de t’expliquer... © Philippe Houssin

La Minoterie Saison 2010-2011 Théâtre de la Joliette 04 91 90 07 94 www.minoterie.org

Dans le droit fil Tous tant qu'ils sont © Fabrice Duhamel

On parlait fidélité et mise en réseau ? Les Bernardines commencent leur saison en ouvrant grand les portes à tous les festivals contemporains qui s’inscrivent dans la ville : actOral tout naturellement puisqu’ils accueillent Eva Doumbia, Xavier Marchand (texte de Suzanne Joubert) et Spiro Scimoni et Francesco Sframeli en septembre et octobre, mais aussi le Préavis de désordre urbain pour la 4e édition d’un festival de performances qui veut vraiment troubler l’ordre public (du 18 au 25 sept) et que les Bernardines coproduisent… Et puis bien sûr il y aura les Questions de danse de Kéléménis, le Mois des compositeurs de Télémaque, et Dansem, pour lequel Alain Fourneau créera une pièce avec Carol

Vanni en décembre. La suite de la saison ? Eva Doumbia, Marie José Malis, Aurélie Leroux, Marie Vayssière (et oui, des femmes d’ici) les Quatre jumelles de Copi mises en scène par Christophe Chave, et les Informelles en mai. Pas de grandes surprises donc… mais c’est souvent la clé du bonheur ! A.F.

Les Bernardines, Saison 2010/2011 04 91 24 30 40 www.theatre-bernardines.org

Chanter sans déchanter chanté de l’époque (du 1er au 17 oct). Dès après cette ouverture des propositions à ne pas rater : Renaud Marie Leblanc qui interprète un texte de Christophe Pellet, une création de l’Egregore, la Station Champbaudet de Labiche, de la danse venue du Maghreb avec Dansem, Mai en musique, Minots marmailles et compagnie… et la présence en fin de saison de Lionel Damei et Claudine Galea. Pour finir en chansons !

Sigmund Freud, qui trouva matière à réflexion et plaisir. Interprété par Natalie Joly, qui retrouve le parlé-

A.F.

Je ne sais quoi © X-D.R

Après une saison en demi-teintes on se réjouissait de découvrir une programmation riche de belles aventures… Hélas pour des problèmes de visa que les autorités françaises en Algérie s’obstinent à refuser au comédiens du Théâtre National d’Alger, les représentations du Songe d’une nuit d’été coproduites par le Gymnase, le Lenche et le TNA sont annulées… Reste une très belle saison tout de même, à soutenir et partager d’autant plus ardemment, d’autant que là encore les places sont très peu chères, et réduites (7euros) pour les adhérents de Zibeline… La première proposition, Je ne sais quoi, nous ramène au Paris de l’entre deux guerres, et à l’échange épistolaire entre Yvette Guilbert, chanteuse de café concert au répertoire coquin, et

Théâtre de Lenche Saison 2010/2011 04 91 91 52 22 www.theatredelenche.info

Jusque chez eux Le Théâtre off continue son travail avec les détenus en installant un projet d’envergure, avec résidences d’artistes, ateliers d’écriture et de jeu, représentations ouvertes qui mêleront les publics, travail avec le personnel de l’établissement pénitentiaire… au cœur du nouvel établissement pénitentiaire pour mineurs, où sont détenus 60 jeunes de 13 à 18 ans. Une pratique artistique «urgente» et courageuse, en prise avec le plus cru des réels, qui doit aboutir enfin de saison à un spectacle élaboré en commun. A.F.

Le 4e Mur Théâtre Off, scène des écritures urgentes 04 91 33 12 92 www.theatreoff.com


SAISONS

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Du côté des petits Les quartiers de Marseille fourmillent de petites salles de spectacle, ouvertes à un public de proximité, qui proposent des spectacles tous publics et des ateliers de formation Pour apprendre... L’Athanor théâtre est niché au Cours Julien. Il favorise les textes du répertoire et accueille très régulièrement des scolaires dans sa petite salle de 49 places. La saison commencera dès le 23 sept avec un divertissement dynamique Barouf a Chioggia de Goldoni et restera dans une note comique avec Le fil à la patte de Feydeau ! Puis viendront des textes plus sérieux avec Phèdre en janvier, La Cerisaie en mars... Un mardi par mois ont lieu des lectures mettant en lumière des textes plus confidentiels choisis par les comédiens et ateliers pour enfants et adultes, le lundi.

Aux commandes, Patrick Rabier dont le travail est essentiellement axé sur le jeu masqué, orientation grotesque et expressioniste. Sont également proposés des spectacles de clowns, de cabaret, des ateliers de formations pour amateurs et professionnels. La saison commence le 30 sept avec un spectacle mis en scène par Patrick Rabier et Frédérique Souloumiac, La cité sans sommeil, où l’on verra ce qu’il advient lorsqu’un monarque fou décrête que le sommeil est une perte de temps et d’argent... En octobre Le concert insolite proposé par Guillaume Vallée, magicien-comédien.

Pour rire... Pour jouer... Au cœur du quartier Noailles le Daki Ling propose essentiellement des spectacles de clowns, de marionnettes, des matches d’impro, mais aussi de la danse et des projections sous les voûtes d’une chapelle du XIIIe siècle. 2011 verra la 6e édition de son festival Tendance Clown. Un lieu associatif particulièrement convivial, où le verre qu’on boit avant et la conversation d’après importe (presque) autant que le spectacle.

CHRIS BOURGUE

À L’Archange c’est le rire qui règne en maître ! Solos, duos, comédies burlesques. Des sketchs et du gros rire mais aussi des spectacles plus nuancés comme Exercices de style de Queneau en décembre. Des spectacles scolaires pour les 3 à 9 ans concentrés sur les périodes des vacances scolaires. Et des ateliers pour enfants et adultes, dont certains sont devenus professionnels et se produisent dans le lieu.

Pour s’évader... Pour trembler... Rue Berlioz se trouve le Théâtre MarieJeanne qui fête ses 10 ans cette année.

La Cite sans sommeil © X-D.R

théâtre et le jazz, et sa petite cour intérieure, l’endroit tient sa promesse. Ateliers de formation dès le 27 septembre : Clowns, marionnettes, impros, théâtre d’objets, pour débutants et avancés. En octobre, la structure accueille le Festival Sur le fil (voir p.10).

Le Parvis des Arts se veut le lieu d’une certaine légèreté en ces temps moroses. Avec ses 2 salles de spectacle pour le

Athanor Théâtre : 2 rue Vian-13006 04 91 48 02 02 www.athanor-theatre.com Daki Ling, le jardin des Muses : 45 A rue d’Aubagne-13001 04 91 33 45 14 www.dakiling.com Théâtre Marie-Jeanne : 56 rue Berlioz-13006 04 96 12 62 91 www.theatre-mariejeanne.com

Salut la compagnie En lettres minuscules flanquées d’une virgule qui invite à poursuivre la rêverie, l’atelier d’artistes du 19 rue Francis de Pressensé se signale discrètement mais fermement en rouge sur façade blanche, carte de visite un peu énigmatique dans son élégance minimaliste. Coller le nez à la devanture (mais ce n’est pas un magasin !) ou lécher la vitrine (surtout pas une galerie !) ne servent à rien pour saisir la singularité de cet espace-temps, lieu de créations pluridisciplinaires avec une histoire déjà riche, un présent foisonnant ancré dans une pratique au quotidien et un horizon clairement balisé d’une étonnante cohérence : «poétique et politique» nous dit crânement Paul-Emmanuel Odin, directeur artistique de l’association ! C’est du solide et le terme de «piliers» dont sont gratifiés les trois autres membres du collectif renseigne sur l’engagement réel et le désir d’inscrire l’art dans la vie par l’échange et la pratique. Même si l’œuvre en cours de chacun dit plutôt le mouvement et la fragilité (Laure Maternati, artiste du «geste simple» joue sur la force de l’éphémère et de la mémoire, Muriel Modr travaille ouvert sur le quartier et le monde et François Billaud élabore dans la durée un parcours vidéographique sur trois écrans), les projets de l’année à venir témoignent d’une solide volonté, placée sous le signe de la «contre-pente», expression empruntée à Florence Pazzottu, poète en résidence ; ils tendent de manière diverse à intensifier les partenariats (FID,

Instants Vidéo, Grains de Lumière ou Aflam pour l’image) et les rencontres autour d’écritures en marche : Dorothée Volut, Liliane Giraudon ou Arno Calleja y pratiqueront lectures et ateliers. Au-dessus des deux vœux émis par Paul-Emmanuel Odin («durer» / faire du lieu une «école d’art contemporain populaire») flotte aussi un doux (?) rêve : organiser à Belsunce un débat qui réunirait Alain Badiou, Slavoj Zizek et Eric Hazan. Une Compagnie en majuscules ! MARIE-JO DHO La compagnie vue d'en haut © Florence Pazzottu

L’Archange : 36 rue Negresko-13008 04 91 76 15 97 www.larchange.fr Le Parvis des Arts : 8, rue du Pasteur Heuzé - 13003 04 91 64 06 37 www.parvisdesarts.com


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SAISONS

GAP | BRIANÇON | AIX | SÈTE

Une passerelle transfrontalière Sur le grand plateau de La Passerelle, la danse, le théâtre, les grandes formes de cirque s’épanouissent tandis que la photographie habite la galerie du théâtre, parfois en écho aux spectacles. Comme pour Un endroit où aller, libre interprétation du travail photographique de Michel Graniou par Gilles Granouillet (expo du 5 oct au 23 nov, représentations les 9 et 10 nov). Et les compagnonnages avec les artistes perdurent, se renforcent ou s’inventent. Catherine Marnas, artiste associée au théâtre depuis 1992, créera l’intégrale de Lignes de faille de Nancy Huston (12 et 13 mars) et Il Convivio sur le principe du Banquet fabulateur mais en puisant dans la mémoire du théâtre italien (18-21 mai à Gap, juillet au Festival Teatro A Corte à Turin). Didier Galas, artiste associé au Théâtre national de Bretagne, sera présent à Gap et doublement ! En qualité de comédien d’abord dans Délire à deux

les Alpes avec quatre «créations métissées franco-italiennes», fruits d’une coopération avec la Fondazione Teatro Piemonte Europa de Turin. Répétitions, créations, ateliers et stages se dérouleront aussi bien à La Mandria à Turin qu’à l’Usine Badin à Gap où l’on pourra découvrir deux pièces inédites d’Eugène Durif, Dette d’amour (9-21 oct, voir p 41) et Loin derrière les collines (4-5 nov), les variations bilingues de Catherine Marnas et Didier Galas. Bref, la boucle est bouclée. M.G.-G.

La Passerelle, Gap Saison 2010/2011 04 92 52 52 52 www.theatre-la-passrelle.eu Elisabeth Kontomanou © Agnes Mellon

d’Eugène Ionesco mis en scène par Christophe Feutrier (18 janv), puis de «chef d’orchestre» de Trickster dell’arlecchino, création dont il est l’auteur, le

Faisons fondre la glace ! Le théâtre Vitez, sur le campus de l’Université des lettres, poursuit son travail de diffusion, de création et de recherche en se posant cette année la question de la place des sentiments personnels et collectifs. Et «pour briser la glace de la mer intérieure», les compagnies régionales locales seront bien présentes, à l’image, entre autres, de la cie Théâtre Provisoire et de la mise en scène d’Haïm Menahem Ce serait trop long à t’expliquer… le mieux c’est que tu viennes, qui interroge la relation public-comédiens ; la cie Vol

metteur en scène et l’acteur (du 21 mars au 2 avril en tournée dans les Hautes-Alpes pour les Excentrés). En 2010/2011, La Passerelle franchit

communes du Pays d’Aix lors du 8e festival de théâtre amateur du Pays d’Aix. Et pour débuter la saison, en avant-première et dans le cadre du colloque Woolf contemporaine, la cie Moving Stories du Théâtre de l’Université de Bah monte Vanessa and Virginia, d’après la correspondance de Virginia Woolf et sa sœur Vanessa. Le lancement de saison aura lieu le lendemain, le 18 octobre.

Plané et le merveilleux Peter Pan qu’Alexis Moati met en scène, à voir dans le cadre du Festival Mômaix; l’étape de travail proposée par la maîtresse des lieux, Danielle Bré, d’après l’œuvre de Robert Walser, La Recréation ; le travail de la Last cie marseillaise et son Acte Vegas, Une autre mouette, qui précèdera le texte de Sabine Tamisier, Nina (épilogue) d’après La Mouette de Tchekhov ; l’opérette écrite par Germaine Tillion au camp de Ravensbrück, Le Verfügbar aux enfers, dont s’empare la cie Trafic d’Arts II. Sans oublier les créations de l’atelier de l’Université de Provence que sont Le Diable probablement d’après le scénario de Robert Bresson mis en scène par Frédéric Poinceau, les spectacles des compagnies et ateliers issus des

DO.M.

Théâtre Vitez, Aix Saison 2010/2011 04 42 59 94 37 http://theatre-vitez.com

Le Cadran hors cadre Monêtier-les-Bains…) et les spectacles jeune public deviennent itinérants (Le voyage de Teddy à Puy StAndré…). Sans oublier Les Excentrés qui chevauchent monts et vallées : Dette d’amour un impromptu à Venise d’Eugène Durif mis en scène par Beppe Navello (9-21 oct, voir p 41), la création Fred Pellerin © Jean Francois Gratton

D’abord il y a la présence des artistes : Jean-Marc Montera, cofondateur et directeur du GRIM, qui créera en novembre L’Échappée belle avec le Méditrio ; et Jean-Christophe Keck, directeur musical de l’Orchestre de chambre des HautesAlpes, qui créera en décembre Pomme d’api. Ensuite l’ouverture vers l’Italie avec le projet transfrontalier Musiche dal vivo nelle Alpi Latine qui favorise la circulation des formations de jazz et des ensembles musicaux (Télémaque en 2009, Uri Caine en 2010, Méditrio en 2011…). Et surtout ce qui caractérise cette saison 2010/2011 : la volonté de «sortir du Cadran» avec une programmation hors les murs, dans les villages de la Communauté de communes du Briançonnais. Du coup la musique voyage tous azimuts (Opium, cabaret-récital conçu par Christine Brotons & Albert Tovi en tournée à La Grave, De Montgenèvre et Val-des-Prés), Slonovski Bal à

Trickster dell’arlecchino écrit, mis en scène et joué par Didier Galas (21 mars-2 avril) et Ici, spectacle cirque et musique imaginé par Jérôme Thomas, Markus Schmidt et Pierre Bastien (3-15 mai). D’ici-là, la saison démarrera intra-muros le 20 octobre avec un spectacle venu du froid québécois, L’Arracheuse de temps, de et avec Fred Pellerin (voir p 59), suivi le 22 octobre d’un autre dépaysement en images et en musique avec Courts voyages sur les traces de Georges Mélies et de Charley Bowers né de la rencontre entre Louis Sclavis et un groupe de musiciens cambodgiens… M.G.-G.

Le Cadran, Briançon Saison 2010/2011 04 92 25 52 52 www.theatre-le-cadran.eu


La saison vivante du Théâtre de Sète La Scène Nationale de Sète et du Bassin de Thau accueille une saison pointue en théâtre, danse, musique, jeune public et cirque. Une programmation qui témoigne de l’actualité artistique régionale, nationale et internationale en maintenant sa mission de décentralisation dans l’agglomération de Thau. Avant que l’emblématique Théâtre de Molière ne ferme pour 2 années de travaux à la fin de la saison et ne programme hors les murs, voici les temps forts d’une belle saison qui se décrit comme la «plus jolie salle à l’italienne de tout le Sud de la France». Pour ceux qui n’étaient pas à Avignon en juillet, ou qui souhaitent vérifier en salle la magie du Concert Dessiné de Rodolphe Burger (voir p 49), rendez-vous dès le 28 septembre. Côté théâtre, 20 spectacles sont proposés. La compagnie chilienne Teatrocinema revient avec le second volet de leur trilogie l’Homme qui donnait à boire aux papillons, un conte philosophique entre théâtre et cinéma (5/6 octobre, voir p 40). Puis Goldoni avec la Serva Amorosa et Robert Hirsch (8/9 octobre, voir p 40), Beckett avec Premier Amour et Sami Frey (9 novembre), Valletti et son Sale Août (25/26 novembre), Molière avec Les Femmes Savantes mises en scène par Marc Paquien (13/14 janvier), Beaumarchais avec le Barbier de Séville par la Cie In Situ (18/22 janvier). Philippe Genty avec ses magiques Voyageurs Immobiles (27/28 janvier). En février (1er/2), c’est Guy Cassiers qui présentera Sous le Volcan de Malcolm Lowry. Belgique encore et danse-théâtre avec La Maison des Cerfs de Jan Lauwers (14/15 avril). L’événement chorégraphique de la rentrée sera la venue du spectacle Political Mother de l’Israélien Hofesh Shechter (1er octobre). Musique et danse du monde avec Africa Umoja par Thembi Nyandeni et Todd Twala (16/17 novembre), puis les 14 danseurs argentins de Che… Malambô ! (13 /14 décembre). Kader Attou le 3 décembre et Maguy Marin le 21 janvier avec l’incontournable, indémodable, irrespirable, irremplaçable May B. Côté musique, chanson avec Claire Diterzi dans Rosa la Rouge (19 octobre). Classique avec un récital de la violoniste Silvia Marcovici et Aimo Pagin au piano (12 novembre). Lyrique avec Rigoletto de Verdi (28 novembre) et La Sonnambula de Bellini (16 janvier). Cirque dès le mois de décembre (9/10) avec Mister Monster de la cie Anomalie. En février (11/20), Le Chant du Dindon par les Rasposo et en mars L’Orage et le cerf volant par la Cie Hors Pistes (18 mars). DE.M.

Théâtre Molière Scène Nationale de Sète 04 67 74 66 97 www.theatredesete.com Concert dessiné © Alain Beaulet


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ÉVÉNEMENTS

SAINTE-MAXIME | ACTORAL | MERLAN

Merlan mon lapin

Le soir des monstres © Elsa Revol

Ringard, le Merlan ? Sûrement pas ! et suffisamment branché pour pouvoir accueillir et défendre l’art de l’illusion sans passer pour rétrograde, ou ballot ! L’air du temps est à une réhabilitation de l’art de l’illusion sur les scènes, et une pléiade d’artistes nouveaux interrogent le plaisir de ces tricheries qui flirtent ironiquement avec le surnaturel et l’hypnose… Ça va léviter ! Vont-ils faire surgir des lapins de haut de forme dépoussiérés ? Peut-être… En tous les cas il y aura des paillettes, un grand gala d’ouverture (le 1er oct), du close up, des voyages spirituels avec Scorpène (les 2 et 3 oct), les jonglages et prestidigitations d’Etienne Saglio (le 6 oct), deux soirées indiennes versions Bollywood enchanté (les 8 et 9 oct),

des solos vibratoires, et du ciné d’animation (magique !) avec Fotokino. Pour tous ceux qui aiment à s’évader bizarrement du réel… Une manifestation tout public ! À noter : dorénavant le Merlan est accessible en navette depuis le Stade Vélodrome ou le centre ville. Aller et retour, avec même le temps de boire un coup après et/ou avant. Tous les horaires et arrêts sont sur le site ! A.F.

Magic Week Du 1er au 9 oct Le Merlan, Marseille 04 91 11 19 20 www.merlan.org

See, sun and gipsy Najarro et son Jazzing flamenco, et le jazzman David Murray accompagné par les maîtres des percussions traditionnelles des Caraïbes, The Gwo-Ka Masters. Musique et danse toujours, sur les traces des artistes nomades avec le conte musical Sur la route des

tziganes, les guitaristes du Nouveau Trio gitan et son invité le violoniste Florin Niculescu. Ou encore le mariage de la culture yiddish et du cirque catalan dans Circus Klezmer d’Adrián Schvarzstein. Enfin quand le soleil a rendez-vous avec la lune, le festival offre des Nuits singulières aux «frontières du réel et des territoires euphorisants», entre spectacles, installations, happenings, échappées musicales et gourmandes… M.G.-G. Cie La Salamandre © X-D.R.

Conçu par Artefact, compagnie associée au Carré Sainte-Maxime, le festival Itinérances Sous le soleil exactement ouvre la saison avec un scénario «brûlant» et 3 opus aux titres évocateurs : Il sentait bon le sable chaud à l’ombre de la figure de GainsbourgGainsbarre, Tout feu, tout flamme sur un rythme flamenco et jazz, Les fils du vent en hommage aux traditions nomades. Pour les inconditionnels de l’homme à la tête de chou, rien de moins qu’une exposition-installation vidéo, un Cabaret Gainsbourg multi-scènes et une rencontre avec les musiciens. À quelques mesures seulement de là, la légion, au cœur du texte Mon képi blanc de Sonia Chiambretto mis en scène par Hubert Colas avec Manuel Vallade. Puis le thermomètre explose avec la Cie Salamandre qui joue avec le feu dans Variations autour de la flamme/Rêves, le danseur et chorégraphe du Ballet national d’Espagne Antonio

Itinérances - festival d’automne Du 8 au 24 octobre Nuis singulières Les 8 et 9 octobre Le Carré, Sainte-Maxime 04 94 56 77 77 www.carreleongaumont.com

Les impromptus d’ActOral Considéré comme un laboratoire ou une anti-chambre, le festival international des arts & des écritures contemporaines ActOral foisonne de rencontres insolites autour du «livre qui n’est pas seulement un livre, mais aussi une

arme», avec des artistes qui ont libre cours pour inventer de nouvelles formes. De cette «jungle» en effervescence, on retiendra quelques rendez-vous où la prise de parole va de pair avec la prise de risque. Daniel Linehan © X-D.R

Avec des auteurs : Dieudonné Niangouna pour une mise en lecture de son texte Le socle des vertiges (26 sept La Criée), Spiro Scimone présent aux Bernardines à double titre pour le spectacle tiré de Nunzio (29 sept) et la projection de Due Amici (30 sept). Ou encore Sonia Chiambretto en résidence du 14 au 24 septembre et dont l’ouvrage Zone d’éducation prioritaire est l’objet d’une mise en espace par Hubert Colas avec l’ensemble 19 de l’ERAC (25 et 26 sept La Criée). Avec des metteurs en scène aussi : Eva Doumbia pour sa mise en espace de Sous-chambre d’Edward Bond (5, 6, 7 oct Studio Longchamp) ou Alexandra Tobelaim qui s’offre un face à face Italie-Brésil 3 à 2 d’après Davide Enia (29 sept La Minoterie)… Et puis tant de rencontres improbables

entre la danse et l’écrit, programmées comme chaque année par Marseille Objectif Danse : Batterie de David Wampach (28 sept, 2 oct Montévidéo), Not about everything de Daniel Linehan (29 sept), Non solo de Vladimir Globulev, While we were holding it together d’Ivana Müller par I’m Company (7 oct Friche Belle de mai)… Avec la musique et la vidéo pour des performances, des installations… On y va les yeux fermés, mu par l’envie de se frotter aux mots des autres comme à ses propres maux. MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Actoral Du 25 sept au 13 oct Montévidéo et autres lieux, Marseille 04 91 37 30 27 www.actoral.org



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THÉÂTRE

MARSEILLE

Autour de la piste

© Lea Torreadrado

Pendant deux semaines Les Nonos font leur cirque à Marseille. Chez eux, à Pastré, pour 14 représentations, qui donneront à chacun l’occasion d’entrer dans l’univers particulier de Serge Noyelle et Marion Coutris, mis en musique par Marco Quesada. C’est en effet à un grand spectacle qu’ils nous convient : 23 personnes en scène, comédiens, musiciens, acrobates et jongleurs, pour élaborer ensemble comme un cirque aux frontières du rêve. Les numéros s’y succèdent en jouant sur le risque, la chute possible, le baroque des clowns, les belles images que les Nonos savent faire surgir, et des textes, histoires qui racontent tout cela en introduisant une distance subjective avec les exploits offerts. Un cirque onirique et magique qui renvoie à l’enfance, à ses émotions enfouies, à ses chevaux magiques…

Citoyens objets Rire au Gymnase Interroger notre société de consommation en allant jusqu’au bout de ses rituels consuméristes quotidiens… C’est dans cet esprit que Mathieu Bouchain (cie TPublic) a conçu son Défilé de marques, une «collection d’hommes et de femmes» qui, comme des mannequins, viendront se présenter en objets, apportant chacun un accessoire. 10 acteurs se mêlent à une cinquantaine de citoyens de tous âges (18 à 81 ans) et de tous les quartiers et milieux de Marseille, recrutés après un casting. Une entreprise qui se poursuivra jusqu’à 2013, pour interroger le corps en représentation, et dresser le portrait d’une ville qui, à terme, compte bien se donner en spectacle. A.F.

Un défilé de Marques Le 18 sept La Friche, Marseille Dans le cadre de Préavis de désordre urbain Le 24 sept Le Gymnase, Marseille www.lestheatres.net

Kaïros, sisyphes et zombies Les 8 et 8 oct Miam Miam Du 12 au 23 oct Le Gymnase, Marseille www.lestheatres.net

A.F.

Les Nonos font leur cirque Du 7 au 23 oct Théâtre Nono, Marseille 8e 04 91 75 64 59 www.theatre-nono.com

Apprivoiser l’hybride Le théâtre du Centaure met en place de nouvelles formules pour faire connaître la spécificité de son travail. Il faut dire qu’il n’est pas évident à appréhender : si le public est nombreux à venir et à apprécier la beauté plastique de leurs spectacles, certains malentendus persistent. Car le théâtre de Camille et Manolo n’a rien à voir avec du cirque : il s’agit d’inventer de nouveaux acteurs au corps hybride, et de faire avec eux un théâtre visuel où l’exploit n’est pas spectaculaire, et repose sur la fusion/adéquation du cavalier et de l’animal, pas forcément monture… Le premier poème centaure sera récité par Manolo et Tao, un lourd percheron d’une tonne avec lequel l’acteur fait corps depuis 10 ans. Une performance de 20 minutes, tout public, sous chapiteau, pour 5 euros, chaque second samedi du mois, à Pastré où la cie est installée. A.F.

Poème-Centaure Le 9 oct Théâtre du Centaure, Marseille 8e 04 91 25 38 10 www.theatreducentaure.com

Miam Miam © Sylvain Granjon

Après Offenbach et le Défilé de marques la saison du Gymnase se poursuivra dans un esprit tout autant festif… avec Miam Miam, de et avec Edouard Baer, et une demi-douzaine de comparses comédiens qui, devant le peu de succès de leur spectacle, décident de transformer le théâtre en restaurant cabaret.. prétexte à numéros… Avant cela le Gymnase lui aussi accueillera actOral, pour un autre spectacle drôle, mais dans un tout autre esprit ! Kaïros, sisyphes et zombies est un objet surréaliste d’Oskar Gomez Mata, qui propose de faire des trous dans le temps, pour retrouver les figures mythologiques grecques, quelques paradoxes temporels, dans l’esprit philosophico burlesque de la cie Alakran.

Un defile de marques © Vincent Lucas

Pop philosopher La Semaine de la pop philosophie veut fomenter des opérations philosophiques à partir d’objets de la culture populaire et de ses représentations médiatiques. L’expression, née dans les années 70 sous la plume de Deleuze, renvoie aux années rock, pense que philosopher est un acte, un geste artistique, nourri de pratiques théâtrales, musicales, littéraires. Et forcément non académiques, puisqu’elles doivent permettent d’interroger le réel par leur angle d’approche, forcément de biais. La programmation cette année regroupe une trentaine de penseurs, écrivains, artistes, historiens, sociologues, scientifiques. Autour d’analyses de la pensée de Deleuze, mais aussi de réflexions autour du portable, de Plus belle la vie, de Buffy contre les vampires, du rock des années 70. La semaine de la Pop philosophie Du 18 au 24 oct 04 91 90 08 55 www.lesrencontresplacepublique.fr

Le théâtre au Centre La revue marseillaise de théâtre organise pour la deuxième année dans le Centre Bourse une semaine de théâtre : de courts extraits offerts par des compagnies de Marseille aux acheteurs qui passent… et peuvent ainsi imaginer aller un jour au théâtre, dans des petits lieux qu’ils ne fréquentent pas. Le tout est complété par des expositions, animations, lectures, et ateliers. Le 16 octobre, cela dure toute la nuit… et on y gagne des billets scoop, qui permettent d’aller au théâtre pour 5 euros. Les Théatralia Du 11 au 16 oct à partir de 10 h Centre Bourse, Marseille www.larevuemarseillaisedutheatre.com



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THÉÂTRE

AU PROGRAMME

Émois

Justice

Responsables

Servante fidèle et dévouée, pleine de bonté et de bon sens, Coraline se charge, avec ruse et persuasion, de défendre la fortune de son vieux maître Ottavio, manipulé par sa seconde femme Béatrice et le fils de cette dernière Lélio, et de réunir le père et son fils, Florindo, jeté à la rue par sa belle-mère… Christophe Lidon met en scène la comédie haute en couleur de Goldoni avec trois grands comédiens dans les rôlestitres : Robert Hirsh, Claire Nadeau et Clémentine Célarié.

© Cosimo Mirco Magliocca

Drôle d’endroit pour une rencontre… Au cimetière où tous deux viennent rendre visite à leurs chers disparus, Désirée, la veuve lettrée et raffinée, et Benny, le paysan rustre et tardivement orphelin sont voisins de tombes. Ces deux personnages que tout oppose vont bien sûr finir par se rapprocher et tomber amoureux. Adapté par Alain Ganas, le roman de Katarina Mazetti, Le Mec de la tombe d’à côté (éd. Actes Sud, coll. Babel) se transforme en pièce, la mise en scène de Panchika Velez révélant de façon tendre et sensible les sentiments des deux personnages.

Sin Sangre © Rodrigo Gomez Rovira

La singulière compagnie chilienne Teatrocinema (anciennement cie La Troppa) lie dans ses créations le théâtre et le cinéma, les techniques des deux disciplines créant un cadre visuel et narratif unique. Les deux premiers volets, en espagnol surtitré en français, d’une trilogie portant sur le thème de la responsabilité des hommes dans leur histoire sont programmés au théâtre des Salins : Sin sangre, adapté d’un roman d’Alessandro Baricco, évoque les années noires de la dictature de Pinochet au Chili, le spectacle mêlant des images de fiction au jeu des comédiens ; le lendemain, L’Homme qui donnait à boire aux papillons fait appel au même dispositif scénique pour raconter l’histoire de Filippo, vieil homme qui, à la fin de sa vie, veut accomplir un rituel ancestral particulier : donner à boire aux papillons tout juste nés afin de les guider dans leur migration. Un parcours initiatique riche de rencontres et de découvertes…

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La Serva amorosa Les 12 et 13 oct Théâtre de Nîmes 04 66 36 65 10 www.theatredenimes.com les 8 et 9 octobre Théâtre Molière, Sète 04 67 7466 97 www.theatredesete.com

Le Mec de la tombe d’à côté Du 5 au 9 oct Le Jeu de Paume, Aix 0820 000 422 http://lestheatres.net © Cosimo Mirco Magliocca

Isolement

© Philippe Delacroix

L’Oral et Hardi Le 5 oct à 20h30 Salle Emilien Ventre, Rousset 04 42 29 82 53 www.rousset-fr.com

Ne pas oublier de (mourir) vivre Le 9 oct à 20h30 Théâtre de La Colonne, Miramas 04 90 58 37 86 www.scenesetcines.fr

Intimiste

© Benoite Fanton-WikiSpectacle

Quand le comédien Jacques Bonnaffé revêt les mots du poète belge Jean-Pierre Verheggen, ça donne L’Oral et Hardi, un condensé de textes choisis, mis en scène et dits par le comédien. Des grands textes, des harangues, des discours manifestes qui ont tous le goût et le souffle d’une aventure des mots et des sons. «L’handicapé de la langue, languedicapé de naissance» comme il se définit lui-même trouve en Bonnaffé un habile entremetteur, un révélateur de cet univers si singulier où se mélangent signifiants et signifiés et où se crée une langue nouvelle.

Sin sangre Le 12 oct à 20h30 L’Homme qui donnait à boire aux papillons Le 13 oct à 20h30 Théâtre des Salins, Martigues 04 42 49 02 00 www.theatre-des-salins.fr les 5 et 6 octobre Théâtre Molière, Sète 04 67 7466 97 www.theatredesete.com

Dans le parloir d’une prison pour femmes va se nouer un long dialogue, une relation étrange entre une détenue, isolée, surnommée «le monstre» à cause du crime odieux pour lequel elle est condamnée, et un prêtre, convaincu de sa foi et de ses certitudes. Rejet, hostilité puis écoute et enfin apprivoisement les parcourront au cours de confessions et libérations verbales. Régis Santon met en scène le texte grave et dur de Frédéric Mancier et Bernard Larré, avec Claire Nebout et Tom Novembre dans ce périlleux face à face.

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Oralité

Le jeune metteur en scène Frédéric Borie revisite le chef-d’œuvre de Shakespeare, Hamlet, s’attachant plus à la tragédie familiale qu’à l’aspect historique et politique de l’histoire. Dépassant la vengeance du héros, il oriente la tragédie vers un questionnement très humain, toujours contemporain : «avec lui, aujourd’hui, on continue de s’interroger sur agir ou ne pas agir, être ou ne pas être. Qu’allons-nous faire de ce temps qui nous est donné ?» Hamlet Le 12 oct à 20h30 Théâtre de Fos 04 42 11 01 99 www.scenesetcines.fr


THÉÂTRE 41

Success story

Nectar

Rhapsodie

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Premières gorgées de bière et autres plaisirs minuscules Le 8 oct Théâtre Durance, Château-Arnoux 04 92 64 27 34 www.theatredurance.com © X-D.R.

Tragi-comique Les comédiens Dau et Catella délaissent momentanément le chemin de la comédie pour une incursion dramatique dans l’histoire des deux révolutionnaires italiens Sacco et Vanzetti, emblèmes de la lutte contre l’injustice, l’intolérance et la discrimination. On est bluffé par la densité de leur interprétation et la mise en scène de François Boursier qui fait passer à la trappe le duo du rire pour éclairer sa fibre tragique et la force de leur complicité. Sacco et Vanzetti Le 2 oct Théâtre Comœdia, Aubagne 04 42 18 19 88 www.aubagne.fr

Réquisitoire

Inspiré

Robert Schneider donne la parole à Sad, immigré clandestin qui a étudié la philosophie et la littérature allemande avant de débarquer en Allemagne où il est vendeur de roses… Sad l’irakien, très sérieux quand il dit «Plus je vous regarde, plus ma culpabilité augmente»… À la dureté de la langue, Farid Ounchiouene répond par la légèreté du hip hop (4 danseurs pour 1 monologue) et de la musique à laquelle il réserve une place de choix, comme si mixer théâtre-danse-musique était la manière la plus juste de faire écho à la psyché de son héros. Saleté Le 24 sept CNCDC Châteauvallon, Ollioules 04 9422 02 02 www.chateauvallon.com

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Confidences à Allah Du 30 sept au 2 oct Théâtre du Chêne Noir, Avignon 04 90 82 40 57 www.chenenoir.fr

Déjà en 2008 Patrice Chéreau dirigeait Romain Duris dans son film Persécution. Leurs retrouvailles, sur les planches cette fois, marquent le retour de Chéreau à l’écriture de Koltès, accompagné à la mise en scène par le danseur-chorégraphe Thierry Thieû Niang. Dans La Nuit juste avant les forêts, un homme nous parle, il sait que sa mort est au bout du chemin, sous les apparences de «loubards sapés» qui ont fini par lui casser la gueule… Mais une nuit lui suffira-t-elle à accepter de s’enfoncer plus avant ? La nuit juste avant les forêts Les 27 et 28 sept CNCDC Châteauvallon, Ollioules 04 9422 02 02 www.chateauvallon.com

© Manuel Pascual

L’irradiante Alice Belaïdi, Révélation féminine aux Molières 2010, revient au théâtre du Chêne Noir, la scène qui l’a révélée dès 2008 au grand public dans le rôle magnifique de Jbara. Petite bergère du Maghreb, devenue prostituée puis femme d’imam, Jbara se confie à Allah, son seul confident. Un témoignage renversant, cru et drôle, écrit par Saphia Azzeddine (éditions Léo Scheer) et mis en scène par Gérard Gélas, sur l’oppression des femmes mais aussi un émouvant chant de liberté, même si sa conclusion est ambiguë. L’ultime chance de rencontrer à Avignon ce texte porté par une très jeune actrice, prometteuse et touchante. Une voix d’enfant caché dans un corps de femme, ou peutêtre l’inverse, qui nous touche en plein cœur par sa foi en la vie. Un Molière absolument mérité !

© Pascal Victor

Un best-seller qui fit couler beaucoup d’encre, Premières gorgées de bière et autres plaisirs minuscules de Philippe Delerm, la présence ombrageuse et épicurienne du comédien Jean-Louis Foulquier associés à la délicatesse de l’archet de la violoncelliste Maëva Leberre : c’est à coup sûr un cocktail aussi rafraîchissant que gouleyant ! Pour ses premiers pas sur les planches, l’acteur de cinéma et de télévision donne envie de se servir encore quelques rasades…

© X-D.R

© Andras Fenris

Quand Eugène Durif rend hommage à Carlo Goldoni à l’occasion des 300 ans de sa naissance, cela donne Dette d’amour, un impromptu à Venise ou les affres d’un auteur dramatique face à la panne d’inspiration. Une pièce jubilatoire, au trait burlesque, au ton enjoué, qui excelle dans l’exercice «du théâtre dans le théâtre» sans jamais forcer le trait, servie par une troupe d’acteurs français et italiens réunis par Beppe Navello. Dette d’amour, un impromptu à Venise Tournée dans le cadre des Excentrés à L’Argentière, Guillestre, Embrun, Tallard, Chabottes, Veynes et Serres Du 9 au 21 oct La Passerelle, Gap 04 92 52 52 58 www.theatre-la-passerelle.eu Le Cadran, Briançon 04 92 25 52 52 www.theatre-le-cadran.eu


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DANSE

AU PROGRAMME

Créations au Ballet La saison du Ballet National de Marseille repart à toute allure ! danseurs de montrer la singularité diverse de leurs talents, reprendra la création 2008 de Flamand, Métamorphoses, jeu de transformations magiques autour des récits d’Ovide ; l’autre partie de la soirée sera consacrée à une création de Thierry Malandain pour le BNM. Le chorégraphe néo-classique, si unique aujourd’hui en son genre, si perfectionniste, s’attachera au sublime cycle de Berlioz sur des poèmes de Théophile Gautier, Les Nuits d’été. Une musique d’une rare émotion romantique, qui dessine un trajet amoureux traversé de passages lyriques et élégiaques, d’affres, de deuil, de solitudes. Quatre couples danseront intégralement les six mélodies, malheureusement diffusées sur bande ! Un comble (de plus !) à l’Opéra… AGNÈS FRESCHEL

Moving Target Du 23 au 25 sept Grand Théâtre de Provence, Aix 04 42 91 69 69 www.legrandtheatre.net Métamorphoses. Les Nuits d’été Du 14 au 16 oct Opéra de Marseille 04 91 22 55 89 www.ballet-de-marseille.com

Questions d’origines Tandis que le Ballet Preljocaj et le Bolchoï créent Suivront 1000 ans de calme à Moscou, puis à la biennale de Lyon et à Chaillot, (ils seront au GTP en novembre), le Pavillon Noir commence sa saison par Songook Yaakaar -Germaine Acogny © Antoine Tempe

l’accueil de deux femmes : l’italienne Patrizia Lo Sciuto danse son enfance en Sicile en regard de sa vie de femme adulte, accompagnée au violon par le compositeur Alessandro Librio ; Germaine Acogny, magnifique danseuse et chorégraphe contemporaine, danse son Sénégal, sa terre natale, sa grand-mère prêtresse Yoruba dans un solo accompagné de textes et de vidéos. Attention : la pièce de Patrizia Lo Sciuto, de trente minutes, est dansée à 19h, 20h et 22h. Songook Yaakaar, qui dure une heure, est dansé aux mêmes dates à 20h. Patrizia Lo Sciuto, Germaine Acogny Du 7 au 9 oct Pavillon Noir, Aix 0811 020 111 www.preljocaj.org

Temporalité

Mod actoralise

Avant de partir sur les routes vauclusiennes lors des Nomade(s) du Théâtre de Cavaillon (voir Zib 32), la cie Pernette s’installe Place Saint-Victor (dans le 7e arr.) pour danser les quatre courtes pièces que sont les miniatures : La Rose, L’apparition, L’Insomnie et Les Oignons se succèderont, offrant des univers très différents qui redessinent l’espace urbain, entrecoupées de textes lus par Franck Gervais.

Comme chaque année, ne ratez pas la programmation danse d’actOral, concoctée par Marseille Objectif Danse. En commençant par le spectacle performance de David Wampach, les 28 sept et 2 oct, et en enchaînant avec Ivana Müller, While we were holding, les 7 et 8 oct (voir p 36).

Les Miniatures Le 22 septembre à 19h Place Saint-Victor Marseille, 7e Karwan-Cité des arts de la rue 04 96 15 76 30

Les écrits de la danse Montévidéo, La Friche 04 95 04 96 42 www.marseille-objectif-danse.org

Moving Target © F. de Cugnac

Il faut dire qu’avec quatre nouveaux danseurs, un répertoire qui s’enrichit, des tournées qui s’étoffent et s’internationalisent, un public de plus en plus fidèle et nombreux dans la région, le BNM se porte bien. C’est qu’il a su, grâce à ses actions pédagogiques en milieu scolaire, approcher les populations les plus éloignées de la culture, tout en ouvrant son répertoire à plusieurs esthétiques, et ses portes aux autres compagnies. Il commence la saison avec deux très beaux programmes : Moving Target est la pièce qui a fait connaître la danse architecturale de Frédéric Flamand en Europe. Conçu avec les architectes Elizabeth Diller et Ricardo Scofidio (ceux qui viennent de rénover le Lincoln Center), créé par sa compagnie de Charleroi en 1996, le spectacle a beaucoup tourné jusqu’en 2002, accueilli en particulier au Festival de Marseille en 1998. Le Ballet national le reprend à la demande du Grand Théâtre de Provence, qui l’accueille en résidence durant deux semaines. La pièce, qui questionne la schizophrénie imposée par notre société de normalisation et de contrôle, reprend les Cahiers de Nijinski, qu’il écrivit en partie durant ses internements, et repose sur un dédoublement complet du spectacle, projeté sur un immense miroir par lequel passent aussi d’autres images… et sur la présence de deux musiciens qui répondent à des musiques enregistrées. Un autre programme, qui donnera l’occasion à tous les

T’as du feu poupée ? Denis Plassard (Cie Propos) a conçu un genre de roman photo dansé… comme un polar noir américain, avec intrigue, meurtre et trahison, détective bien sûr, meublé, chapeau mou, trench coat, bigoudi, et femme fatale. Tout cela en danse bien sûr, une sorte de film de genre qui s’égarerait dans l’acrobatie et y trouverait un autre punch… retombant d’ailleurs sur les élans du Quatuor Tercea interprétant Beethoven ! Mais jamais Denis Plassard n’a hésité à mélanger les genres, du populaire au classique... Les cadavres se regardent dans le miroir le 2 oct Théâtre Durance, Château-Arnoux 04 92 64 27 34 www.theatredecavaillon.com le 19 oct Scène nationale de Cavaillon 04 90 78 64 64 www.theatredecavaillon.com © Christian Ganet


DANSE

Universel

Wonderful !

Cofondateur avec Martine Jaussen de la Cie Alaxandra N’Possee, Abdennour Belalit fait des mythes et des symboles qui collent à la peau des États-Unis le cœur de sa nouvelle chorégraphie. Dans Les s’tazunis, place à la quête du billet vert, à l’industrie cinématographique, la guerre du Viêt-Nam, le rock, le 11 septembre 2001… évoqués en autant de tableaux à la gestuelle hip hop, marque de fabrique de sa compagnie. Le tout dans un décor épuré, 1 table et 6 fauteuils gris, transformable à l’envi. Puis changement de continent, direction l’Asie ! Sur le plateau de Châteauvallon, 29 danseurs et 9 musiciens du Ballet royal du Cambodge offrent un programme dont le langage et l’esthétique restent toujours compréhensibles. Car la coexistence du terrestre et du céleste caractéristique de la danse royale khmère parle à tous les peuples.

Lieu de résidences d’artistes, le 3Bisf à Aix accueille du 13 au 24 sept la compagnie chorégraphique Nathalie Baesse pour sa nouvelle création Wonderful World née d’un questionnement sur la naissance de la parole et de la rencontre avec un espace, une ancienne base sousmarine… Travail de recherches, ateliers les 15 et 17 sept (10h-12h) et répétition le 24 à 15h permettront au public de suivre au plus près le travail de cette artiste installée à Angers. Après de nombreuses résidences itinérantes, Wonderful World sera créée le 15 mars au Lieu uniquescène nationale de Nantes et le 21 mai au CNDC le Quai à Angers.

Les S’tazunis, Cie Alexandra N’Possee Le 1er octobre La légende de l’Apsara Mera, Ballet royal du Cambodge Le 8 octobre CNCDC Châteauvallon, Ollioules 04 94 22 02 02 www.chateauvallon.com

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Place ensuite à Christian Ubl qui, du 8 au 14 octobre, répétera en studio son prochain spectacle inspiré de La Semeuse de Fabrice Melquiot, avant sa participation au festival Dansem… Une conférence de presse ouverte au public, en présence de l’équipe et des artistes, est organisée le 15 octobre à 13h30. Wonderful World 3Bisf, Aix 04 42 16 17 75 www.3bisf.com

Intergénérationnel Christian Ubl (Cie Cube) en maître de ballet ? Oui, le temps d’une soirée à double détente traversée par les thèmes du patrimoine, de la mémoire, et placée sous le signe du plaisir. Pour découvrir son solo I’m from Austria, like Wolfi ! et s’essayer seul ou accompagné au Bal… sur des musiques d’hier à aujourd’hui conçu comme un voyage dans le temps, les styles et les musiques. D’une danse à l’autre et d’un pas de deux à plus si affinités… Cette soirée composée marque la réouverture de La Tannerie comme lieu de création et de recherche

chorégraphiques dans le Var, volontairement festive et ouverte à tous grâce à ses ateliers d’initiation préliminaires. C’est aussi une façon de l’inscrire dans une actualité culturelle beaucoup plus large : les Journées européennes du patrimoine. Le bal du siècle (!) Le 18 septembre La Tannerie, Barjols 04 94 59 74 60


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MUSIQUE

AU PROGRAMME

Terreur vériste

Flashs Bach

Quatre ans avant Puccini pour Tosca (1900), Umberto Giordano puise dans la période post-révolutionnaire de la fin du XVIIIe siècle. C’est que les «véristes» s’intéressent particulièrement aux situations qui engendrent des actes de violence ! Du coup la Terreur française s’avère propice, dans Andrea Chénier, à de cathartiques débordements expressifs, générant une œuvre lyrique dont les exigences vocales effrayent parfois les chanteurs. Le livret est librement inspiré de l’histoire du poète André Chénier, guillotiné en 1794, qui paya cher ses positions de tempérance face aux excès de Robespierre (arrêté le surlendemain de son exécution !) et la défense de la tête de Louis XVI. On entendra peut-être un jour Roberto Alagna dans le rôle titre (un des emplois les plus lourds du répertoire), mais dans l’immédiat, le ténor a renoncé (judicieusement ?) à s’y frotter. En attendant de retrouver le Divo dans Le Cid au mois de juin, c’est Zoran Todorovitch qui s’y emploie. Le célèbre air La mamma morta est chanté par la jeune soprano Irène Cerboncini (qui remplace Sylvie Valayre dans le rôle de Madeleine de Coigny), quand le baryton Marco di Felice incarne Charles Gérard, révolutionnaire aux sentiments complexes. Cette production de l’Opéra de Monte-Carlo est mise en scène par Claire Servais et dirigée par Fabrizio Maria Carminati.

Laurence Equilbey partenaire «historique» du Grand Théâtre de Provence s’associe à Brigitte Engerer au piano pour faire chanter les voix d’Accentus dans des grandes pages chorales ou transcriptions symphoniques de Liszt, Reger, Mahler… (Derniers feux romantiques le 2 oct). On sait les liens étroits que la pianiste Zhu Xiao-Mei entretient avec la musique de Bach : elle fut un réconfort salvateur au temps des sa captivité dans les camps de la Révolution culturelle chinoise. Elle est aujourd’hui attendue partout dans les grandes fresques pour clavier du Kantor (Variations Goldbergle 12 oct). Le fil rouge de la «Saison Bach», imaginée par Dominique Bluzet et Françoise Jan, se déroule en compagnie de l’incontournable figure du monde pédago-ludique : Jean-François Zygel (Bach to the future le 14 oct). J.F.

Grand Théâtre de Provence, Aix Concerts à 20h30 04 42 91 69 69 www.legrandtheatre.net Andrea Chenier © Opera Monte Carlo

JACQUES FRESCHEL

Andrea Chénier les 23 et 29 sept, 2 et 5 oct. à 20h et le 26 sept. à 14h30 Opéra de Marseille 04 91 55 11 10 www.opera.marseille.fr

Musique libre L’ensemble Télémaque donne à ses performances des formes sortant du commun des concerts

Jean-Bernard Rière © Agnès Mellon

Le programme, conçu par Raoul Lay, est bâti autour du Quintette de Prokofiev, pièce au dispositif instrumental singulier, destiné en 1924 au ballet Trapèze. Adapté en musique de chambre «pure», l’opus conserve l’esprit narratif initial. L’auteur mixe finement les timbres pour illustrer un orgue de barbarie, une danse d’acrobates ou les arabesques souples d’une ballerine... Entre les mouvements de cet opus génial, chaque interprète offre un solo étonnant signé de compositeurs «inclassables» qui, tel Prokofiev, privilégient l’expressivité sensuelle, s’appuient sur une tradition classique ou populaire, sans pour autant fuir les nouvelles techniques d’expression. Jean-Bernard Rière à la contrebasse rugissante ou plaintive (Melancholia d’Hersant), Blandine Bacqué et son hautbois multi-phonique, lointainement pastoral (Sarc d’Ohana), Pascale Guérin à l’alto furioso hallucinatoire (Sonate op.25 n°1 d’Hindemith), Linda Amrani et ses voltiges, soufflets et tremblements de clarinette (Sonate de Denisov), Jean-Christophe Selmi aux sons de volutes de violon acrobatique (Cadenza de Penderecki) offrent au public un récital de haut vol, ponctué par un duo de Tristan Murail où clarinette et violon s’éperonnent leurs notes respectives (Les ruines circulaires). JACQUES FRESCHEL

Les Subjectifs Le 18 sept. à 19h Couvent des Minimes, Pourrières Dans le cadre des Journées du Patrimoine 06 98 31 42 06 www.ensemble-telemaque.com

Sévère la musique ? L’épigraphe du premier concert de la saison du Chœur contemporain s’entend comme un pied de nez fait à ceux qui associent musique classique et ennui, raideur, voire morgue… Sébastien Boin dirige l’ensemble vocal dans le cadre de la Saison 13 et des pièces aux titres qui en disent long sur les intentions de leur auteur : Burleske de Kagel, les Mal marié(e)s de Dallapicolla, Nonsense de Petrassi, les Poèmes élastiques de Constant ou les cocasses Chansons françaises de Poulenc. Le 19 sept. à 17h Théâtre de Tarascon 04 90 91 51 30

…Lamento Changement d’atmosphère ! C’est le poème tragique de Federico Garcia Lorca Llanto por Ignacio Sanchez Mejias, à la mémoire de son ami torero mort d’un coup de corne en 1934, mis en musique par Maurice Ohana en 1950 que dirige Roland Hayrabedian à la tête du chœur de femmes de Musicatreize & du Chœur contemporain, de l’Orchestre des Jeunes de la Méditerranée, de Jean-Marc Aymes (clavecin) du baryton Job Tomé et du récitant Olivier Boudrant. J.F. Llanto por Ignacio Sanchez Mejias Le 26 sept. à 11h Méjan, Arles 04 90 49 56 78 Le 2 oct. à 20h30 Atrium du CG83, Toulon www.musicatreize.org


MUSIQUE

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Thaïs par Jaho Voix baroques L’automne musical conçu par le claveciniste Jean-Marc Aymes, directeur de Concerto Soave, est un rendez-vous privilégié des amateurs de musique baroque. Trois concerts sont prévus cette année à Marseille avant un départ de l’ensemble en tournée

L’opéra Thaïs de Massenet baigne dans un climat sulpicien, typique de l’époque (1894), et une volupté sonore unique où les airs fameux, comme la célèbre «méditation» religieuse confiée au violon seul, brillent au firmament des constellations classiques. On ne manque pas Ermonela Jaho dans le rôle de cette courtisane convertie au christianisme et mourant dans la rédemption. En compagnie du baryton Franck Ferrari (le moine Athanël), la formidable soprano est dirigée par le maestro Giuliano Carella dans une mise en scène de Jean-Louis Pichon.

Michel Lambert est un musicien français du XVIIe siècle tellement négligé qu’on en oublie de célébrer le 400e anniversaire en 2010. Une telle faute de goût est réparée par Monique Zanetti qui chante ses Airs de cour raffinés, accompagnés du luth, de la viole et

JACQUES FRESCHEL

Concerto Soave © Catherine Peillon

Thaïs Les 12, 15 et 19 oct. à 20h, le 17oct. à 14h30 Opéra de Toulon 04 94 93 03 76 www.operadetoulon.fr

Russes primitifs L’histoire des arts attribue d’ordinaire les termes «Ballets russes» à l’ère Diaghilev ayant engendré, entre 1909 et 1929, des spectacles transdisciplinaires parfois fondateurs de nouveaux langages chorégraphique, musical et plastique au XXe siècle (Le Sacre du Printemps, Jeux, Parade, Les Biches, Le Pas d’acier, L’enfant et les Sortilèges…). Mais si François-Xavier Roth et l’ensemble Les Siècles convoquent ces vocables à Nîmes et Aix c’est pour nous remémorer les toutes premières saisons (1909-1910) de la compagnie à Paris. Les musiques étaient encore russes dans l’âme, empruntes de folklore slave, tournées vers le siècle passé : un temps d’avant le «choc» Stravinsky de 1913. On entend donc des pièces symphoniques signées Borodine (Danses Polovstiennes) ou RimskiKorsakov (Shéhérazade), comme des ouvrages collectifs (Le Festin, Les Orientales), pièces agencées pour les chorégraphies encore très classiques, juste un brin folkloriques, de Fokine.

du clavecin dans l’acoustique intime du Temple Grignan (le 30 sept. à 20h30). L’Aixois André Campra est né, quant à lui, 50 ans après. Autour de sa cantate Didon, Les Folies Françoises de Patrick Cohën-Akenine (violon & direction) escortent la soprano Anne Magouët dans des opus de contemporains également inspirés de l’histoire tragique de la Reine de Carthage (le 1 oct. à 20h30 – Temple Grignan). La soprano María Cristina Kiehr, son complice Jean-Marc Aymes et les cordes de Concerto Soave interprètent enfin la cantate Bella Madre dei fiori d’Alessandro Scarlatti et le Salve Regina de Pergolèse (le 3 oct. à 18h – Eglise Saint-Laurent). J.F.

Automne baroque du 30 sept. au 3 oct Marseille Espace culture 04 96 11 04 61 www.concerto-soave.com

Offenbach in progress La Vie parisienne est peut-être, parmi les opérettes régulièrement jouées d’Offenbach, celle qui est la plus «théâtrale»… ou sans doute celle qui exige, de la part de ses interprètes, un équilibre (rare !) entre leur jeu d’acteur (pour les importants dialogues parlés) et leurs facultés vocales (pour les airs chantés : «Je suis brésilien, j’ai de l’or», «Je veux m’en fourrer jusque-là», «Je suis veuve d’un colonel»…). L’œuvre créée en 1866 est un peu

l’ancêtre de ce que l’on nommera plus tard la Comédie musicale. De fait, Alain Sachs propose une mise en scène qui pousse ses acteurs/chanteurs à danser et, de surcroît, jouer la partition adaptée et dirigée par Patrice Peyriéras. Il imagine de jeunes artistes passant un casting et découvrant l’œuvre en l’interprétant autour d’un piano. Le plateau de scène fait office de décor et sert d’écrin à un jeu de «théâtre dans le théâtre» où champagne, cancan et fantaisie trouvent leur place. Un spectacle festif qui a connu un vif succès lors de sa création à Paris en décembre 2009. JACQUES FRESCHEL La Vie Parisienne © X-D.R.

JACQUES FRESCHEL

Ballets russes Le 5 oct. à 20h30 (scol. à 14h30) Grand Théâtre de Provence, Aix 04 42 91 69 69 www.legrandtheatre.net Le 6 oct. à 19h Théâtre de Nîmes 04 66 36 65 10 www.theatredenimes.org

La Vie parisienne du 28 sept. au 2 oct. à 20h30 (sauf 29 sept. à 19h) Théâtre du Gymnase, Marseille 0 820 000 422 www.lestheatres.net

Pour tout l’orgue du monde F.-X. Roth © Celine Gaudier

Pour sa 14e édition, le Festival International d’Orgue de Roquevaire programme un plateau des plus éclectiques autour du gigantesque instrument et ce jusqu’au 17 octobre. Après le récital du trompettiste virtuose David Guerrier accompagné par Michel Robert aux claviers, le Grand Prix de Chartres Saki Aoki sera à découvrir dans un programme à l’accent français : Couperin, Franck, Litaize, Duruflé (18/9 à 21h). Suivra une association des plus singulières avec le Trio Delta (percussions) et Jean Guillou (26/9 à 16h), puis le quintette de cuivres Magnifica dialoguant avec Michaël Matthes (2/10 à 21h). Le concert associant Emilie

et Michel Gastaud (harpe et percussions) et Philippe Brandeis à la console attise à juste titre bien des curiosités (10/10 à 16h). Ce sera avant le récital de Vincent Dubois pour un programme essentiellement français. La clôture du festival se fera sous les cordes du violoniste Diego Tosi pour un duo avec Baptiste Marle-Ouvrard qui, par leur répertoire (Sarasate, Ysaye, Paganini…), ne manquera pas de panache (voir 76). FREDERIC ISOLETTA

Festival de Roquevaire 04 42 04 05 33 www.orgue-roquevaire.fr


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MUSIQUE

AU PROGRAMME

Musique ancienne Chopin et Vivaldi Bach aux pianos Le festival Les Nuits pianistiques débute par une La saison avignonnaise débute avec de la musique Pour l’ouverture du festival automnal à l’abbaye intégrale des Concertos pour 2, 3 et 4 claviers BWV 1060 à 1065 de Jean-Sébastien Bach, avec l’Orchestre de chambre de Toulouse dirigé par Gilles Collard, et les pianistes Evelina Pitti, Michel Bourdoncle, Alexandra Lescure, Antonio Soria et Artur Jaron. Les Nuits pianistiques jusqu’au 18 déc Le 2 oct. à 20h30 Théâtre du Jeu de Paume Aix Le 3 oct. à 16h Salle Tino Rossi. Les PennesMirabeau 06 16 77 60 89 - www.lesnuitspianistiques.com

ancienne couvrant une vaste période historique. Les figures héroïques ayant inspiré Cherubini (Circé, Médée…) sont incarnées par Karine Deshayes avec l’ensemble Les Nouveaux Caractères (1er oct. à 20h30 Palais des Papes), The king’s consort chante un programme baroque autour des Leçons de Ténèbres de Couperin, (le 10 oct. à 17h Chapelle de l’oratoire), et Mathias Vidal livre des Cantates françaises pour haute-contre signées Charpentier, Campra… (le 12 oct. à 20h30 Eglise St Pierre). Jusqu’au 19 oct. Avignon 04 90 82 81 40 - www.operatheatredavignon.fr

fortifiée de St-Victor, François-René Duchâble retrouve son compère le comédien Alain Carré pour un voyage musical et épistolaire autour de l’œuvre et de la correspondance de Frédéric Chopin. On suit le fil d’une vie commencée en Pologne et poursuivie à Paris, vers Nohant avec Georges Sand ou aux Baléares… (Le 23 sept). Alberto Martini et I Virtuosi Italiani jouent ensuite les Concerts de la nature et des passions humaines de Vivaldi (le 7 oct). JACQUES FRESCHEL

Festival de Saint-Victor Jusqu’au 2 déc, Marseille 04 91 05 84 48 - http://www.chez.com/saintvictor

Au Programme Hommages

Patrimoine 3

Méditerranée

À Pierre Barbizet et Victor Vasarely par la pianiste Evelina Pitti dans Bach, Dutilleux, Rachmaninov.

Les Festes d’Orphée propose un panorama musical de compositeurs locaux baroques (Campra, Poitevin, Gilles, Gantez), romantique (Félicien David) ou plus récents (Milhaud, Villette, Tyack).

L’ensemble Maye et le Quatuor vocal féminin Balkanes chantent la tradition grecque d’Asie mineure et la Bulgarie polyphonique.

AIX. Le 16 sept. à 20h30 Fondation Vasarelyi Concerts d’Aix - 06 09 54 06 77 Evelina Pitti © Gerard Pau

AIX. Le 19 sept. à 16h Eglise du St-Esprit 04 42 99 37 11 - www.orphee.org

AUBAGNE. Le 3 oct. à 17h Comoedia 04 42 18 19 88 - www.aubagne.com

Mexique

Flûte/piano

Concert de Mariachis dans le cadre du Festival Mexico Magico

Clara David (flûte) et Gisèle Mouret (piano) jouent Debussy (Syrinx), les Sonates de Poulenc et Prokofiev (n°2)…

MARSEILLE. Le 18 sept. à 19h Théâtre Toursky 04 91 90 10 95 - www.mexicomagico.net

MARSEILLE. Le 8 oct. à 20h30 La Magalone 04 91 39 28 28 - www.citemusique-marseille.fr

Piano Récital de la jeune pianiste aixoise Emile Capulet dans Chopin, Schumann, Mozart, Schubert. CASSIS. Le 19 sept. à 15h Château 06 63 70 56 52

Orgue Concert inaugural de l’orgue restauré de St-Giniez (Mutin- Cavaillé Coll de 1912) par l’ensemble Da camera avec André Rossi à la console et ses complices, pour un programme mêlant classique et jazz, comme les fantastiques impros Bach/Coltrane joués avec le sax de Raphaël Imbert… MARSEILLE. Le 23 sept. à 20h30 Eglise de St-Giniez Libre participation 04 91 23 01 10

Patrimoine 1 Baroques-Graffiti présente, dans le cadre de l’exposition des collections italiennes du musée des Beaux-Arts à la Vieille Charité, Viaggio musicale «Tableaux bibliques» mis en musique par Johann Khunau (1660-1722) avec Corine Milian (voix), Ömer Konur (kaval-duduk) et Jean-Paul Serra (clavecin). MARSEILLE. Les 18 et 19 sept. à 18h Chapelle de la Vieille Charité 09 51 16 69 59 - www.baroquesgraffiti.com

Trombones Le Tromb’Opéra Quintet (Christian Ballaz, Laurent Cabaret et Julien Lucchi aux trombones, Thomas Leleu au tuba et Bernard Pereira aux percussions) font sonner des pièces de Bernstein, Michel Legrand, Lennon/Mc Cartney…

Goethe Récital de Christine Kattner (mezzo-soprano) et Eduardo de Rafael (piano) : Goethe, mis en musique par Beethoven, Schubert, Schumann, Liszt, Wolf, Berg, Thomas. MARSEILLE. Le 12 oct. à 20h Auditorium de St-Joseph 04 91 54 76 45 - www.musiqueandco.com

Espagne L’ensemble Dulcinosa joue Alegria Alegria un programme de pièces tirées des deux grands Cancioneros des XVe et XVIe siècles : Musique espagnole et théâtre d’ombre. MARSEILLE. Le 15 oct. à 20h30 Auditorim/Cité de la musique 04 91 39 28 28 www.citemusique-marseille.com

MARSEILLE. Le 25 sept. à 17h Opéra 04 91 55 11 10 - opera.marseille.fr Concert-conférence Le 18 sept. à 13h à l’Alcazar

Explosif ! Patrimoine 2 Programmes de musique de chambre à Valréas (Musée du cartonnage le 18 sept. à 21h), Vaison-laRomaine (Chapelle St-Quentin le 19 sept. à 18h) et Bollène (Collégiale St-Martin le 19 sept. à 18h30). Floraisons musicales (Causerie 1h avant-concert) 04 90 303 600 - www.floraisonsmusicales.com

Jonathan Soucasse (piano) et Cathy Heiting (diva) livrent un opus lyrico-déjanté mis en scène par André Lévèque. Opéra Molotov mêle Puccini aux ballades de jazz ou à la variété décalée. CORNILLON-CONFOUX. Le 25 sept. à 21h (en extérieur) Saison 13 - www.scenesetcines.fr

Ensemble Dulcinosa © X-D.R



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MUSIQUE

JAZZ

De nombreux lieux à Marseille se fédèrent pour accueillir la 5e édition de Jazz sur la ville du 1er au 17 octobre : la Cité de la Musique, le Cri du Port, La Mesòn, La Station Alexandre mais aussi le Roll’Studio, La Maison du Chant, La Bergerie, Le Poste à Galène, L’Institut Culturel Italien, La Maison Hantée, Le Planet Mundo Kfé, L’Embobineuse, Le Point Bar/re, Le Cabaret Aléatoire, L’Espace Julien, La Grotte des Accoules, Le Nomad Café, L’Eolienne, La Bibliothèque BMVR de l’Alcazar et La Cinémathèque ! L’occasion pour tous les amoureux du jazz de découvrir des lieux où la musique a d’ordinaire d’au-

tres rythmes dans les oreilles. On y retrouvera parmi beaucoup d’autres le New Quartet Line 4 de Christophe Leloil ou encore son Buk Project, mais aussi Kirie Kristmanson ou encore le Fantazio duo... Des soirées conviviales, et des expositions : Histoires de Batteries à la Cité de la musique, Instants Jazz par Denis Dalmasso au Cri du Port. Jazz sur la Ville Du 1er au 17 oct Marseille, divers lieux www.myspace.com/jazzsurlaville

Et après ?

Nouveau !

Marseille continue de programmer du Jazz !

Au Théâtre de la Criée un cabaret Jazz, rendez-vous mensuel dans une ambiance feutrée, après le spectacle en cours. Entrée libre, consommations payantes. 17/9 à partir de 21h15 / En quartet, Ronald Baker, Paul Pioli, Pierre Fenichel, Thierry Larosa.

Et ailleurs ? Ça jazze aussi

Olivier Temime © Guy Vivien

15/10 à 21h00 Olivier Temime 18/10 à 21h00 Jazz en Scène (scène ouverte jazz ) La Cave 04 91 392 828 www.citemusique-marseille.com

14/10 à 20h30 Choumissa invite Maria Simoglou

Aix 18/9 : 22e Nuit du Jazz Hot Games, Tess 5 tet, Piero Ianetti 6tet, Roy Swart’s Latin Nonet, Benjamin Legrand avec Marcel Sabiani trio. Concerts Gratuits Parc de la Mareschale 04 42 591 971 www.jazzclubprovence.com

7/10 : Steve Coleman and Five Elements (le saxophoniste de Chicago en attendant Carla Bley...) Grand Théâtre de Provence 04 42 916 970 www.grandtheatre.fr

Le Cri du Port 04 91 505 141 www.myspace.com/criduport

Jam Sessions Jazz tous les Mercredis soirs Mundo K’fé 06 69 97 17 55 www.myspace.com/mundokfe

18/9 Rémi Abram 4tet 25/9 Duo Jazz avec Paul Pioli (g) et Christian Brazier (ctb)

15/10 à partir de 21h30 / Serge Casero, Paul Pioli, Pierre Fenichel, Thierry Larosa. La Criée 04 96 178 031 www.theatre-lacriee.com

Avignon 14 au 17/9 à 18h30 Cour du Théâtre des Doms : Thierry Crommen 4tet (Harmonica) 8/10 Fabien Mary 4tet invite Frank Basile 14/10 Workshop de Lyon / Slogan 19/10 Tom Rainey Trio AJMI / La Manutention 04 90 860 861 www.jazzalajmi.com

Château Arnoux / Saint Auban 9/10 à 21h00 David Murray & The Gwo-Ka Masters (Jazz métissé USA-Guadeloupe) Theâtre Durance 04 92 642 734 www.theatredurance.fr

And on the other hand! Ou tout simplement 5e édition du Festival des Musiques Improvisées organisée par La Méson du 16 au 18 septembre. La manifestation se déroulera dans plusieurs lieux en plus du repaire de la rue Consolat: le théâtre des Argonautes, l’Andiamo Comptoir Artistique Phocéen, Akdmia del Tango, Guimik Gallery, et accueillera

Sebastien Coste © Emilie Salquebre

Station Alexandre 04 91 009 000 www.station-alexandre.org

Festival de Jazz à St Rémy Du 16 au 18 sept http://jazzasaintremy.free.fr

Moulin à Jazz Domaine de Fontblanche 04 42 796 360 www.charliefree.com

AOTOH ?

17/9 Jazz à Cinq 24/9 Annie Bucchini 4tet

24/9 dès 19h30 Carrese & Friends

16/9 : Hommage à Django Reinhardt ( Jazz manouche) avec le quintet Loic Cœurdeuil et le César Swing et en invité Florin Niculescu au violon 17/9 : Le groupe Pink Turtle 18/9 : Tania Maria et son band pour une incartade brésilienne (Bossa-Nova, Samba, Choro). Apéro-Swing en divers endroits dans la ville / Glanum en Musique de 15h à 18h00 sur le site archéologique.

Vitrolles 2/10 à 21h00 / Kami 5tet 16/10 à 21h00 / Robin Nicaise 5tet

Saint-Rémy Trois concerts en soirée à 20h30 dans le Jardin de Sade

Roll Studio 04 91 644 315 www.rollstudio.fr

Inga des Riaux 06 07 575 558 www.inga-des-riaux.com

Kyrie Kristmanson © X-D.R.

Marseille rentre en jazz

entre autres le solo de musique spectaculée et pleine d’air / ballon de baudruches de Sébastien Coste (16/9 à 19h) poursuivi par Barre Philips muni d’une contrebasse et Emmanuelle Pepin de son corps de danseuse avec leur numéro Carol’s Dream (à 20h à l’Akdmia). Le lendemain, l’Andiamo reçoit les Balles perdues de la basse électrique de David Merlo (19h) et les Argonautes les solos fous du clarinettiste Xavier Charles (20h30) qui cédera la place à Emilie Lesbros, instigatrice du projet accompagnée de la harpe de Raphaëlle Rinaudo (à 20h30 le 17/9). Les boîtes à cantine de percussions de Claudio Bettinelli résonneront pour la clôture à la Guimik Gallery (18/9 à 19h) avant de filer à La Méson (20h) pour écouter Dgiz Solo (voix et contrebasse) avant l’apothéose finale : la Jam improvisée avec tous les musiciens du festival (21h). F.I.

04 91 50 11 61 www.lameson.com www.myspace.com/andontheotherhand


ACTUELLES

MUSIQUE LIVRES

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Nouveau lieu pour le Festival Zik Zac qui poursuit son itinéraire à Aix au pied du viaduc de l’Arc de Meyran les 17 et 18 septembre. La Fonderie-Aix ne ménage pas ses efforts de programmation pour cette 13e édition, à l’image du site spectaculaire et imposant. Sous les chapiteaux il faudra composer avec une centrifugeuse sonore carrément mosaïquée et tournant à plein régime (Mali, Ouganda, Méditerranée, Venezuela, Europe de l’Est…) avec le tzigane rock des Mango Gadzi à ne rater sous aucun prétexte, l’afro hip hop malien Smod et le dance floor marseillais électro-swing de Stereobox (17/9 à partir de 19h30). Reste à garder des forces vives pour le lendemain : les toujours énergiques Watcha Clan, l’heavy funk rhodanien de Sfonx ou l’afro blues béninois de Bonga (18/9). De quoi fêter dignement le dernier week-end de l’été ! FRÉDÉRIC ISOLETTA

www.zikzac.fr

Watcha Clan © X-D.R.

Un dernier goût d’été

De retour

L’art de Rien Véritable boîte à idées improbables ou lieu de révolution permanente prête à accoucher à tout instant de concepts théâtro-musicaux-performances auxquels personne n’aurait jamais pensé ? Ou tout simplement, comme le disent les membres de ce cabinet de curiosités artistiques, «Théâtre de Fortune & élevage intensif d’individus, Collectifs de mauvais goûts pluriels». Rien ne sert d’expliquer plus en détail les méandres dadaïstes qui hantent le lieu associatif de la Belle de Mai (avec le concept du sport spectacle prêt à se transformer en terrain de paille pour une soirée catch complètement tordue ou en hippodrome de fortune pour des chevaux en carton…) ! «Quand se déshabituera-t-on de l’habitude de tout expliquer ?» Picabia avait posé cette question au public de Relâche en 1924 sur une pancarte tenue par Satie, principe applicable à ce cabaret instan-

tanéiste marseillais qui se vit et ne s’explique pas. Passé le festival sans fin Art et Terrorisme du 11 septembre, La colonie de vacances tour (17/9) accueille Marvin, Pneu, Papier Tigre et Electric Electric, que des doux noms pour un noise rock musclé histoire de fêter la naissance de la compilation Embobinoiz Copulum. Marionnettes et poney-rodéo (25 au 29/9), pianocktails (installation musicale alcoolique le 28/9) sauront vous divertir au même titre que le noise minimaliste d’Agathe Max (19/9) qui, comme d’autres soirées, a lieu au Data, alter égo de l’embo au 44 rue des Bons Enfants et pratique aussi des tarifs accessibles. FREDERIC ISOLETTA

Présent l’année dernière lors d’une carte blanche, Rodolphe Burger revient au théâtre de Sète avec le Concert dessiné, qui fera par ailleurs l’objet d’une captation vidéo. Chaque représentation étant unique, oubliez la performance avignonnaise (voir p 12) et venez découvrir celle qui prendra forme avec les illustrateurs Philippe Dupuy et Charles Berberian, des musiciens Julien Perraudeau, Alberto Malo et, sous réserve, Erik Truffaz. Concert dessiné Le 28 septembre à 20h30 Scène Nationale de Sète 04 67 74 66 97 www.theatredesete.com

04 91 50 66 09 www.lembobineuse.biz

Happy birthday

Marsatac se pose à la Friche Après les atermoiements et refus (notamment des plages) des pouvoirs publics locaux, on craignait le pire pour la 12e édition du festival phare de la rentrée. Mais à l’instar de l’effigie de l’édition 2010, Marsatac avance masqué derrière son bandana. Grâce à la ténacité de l’équipe, qui a sollicité et obtenu le soutien des médias, la Friche Belle de Mai se transformera le temps de trois nuits de pures folies sonores (23, 24 et 25 septembre) en déambulatoire underground géant pour le bonheur des nombreux adeptes de la manifestation. Avec pratiquement cinquante concerts répartis sur quatre scènes (dont la Cartonnerie métamorphosée en salle de 4500 places), et une programmation toujours plus pointue alliant électro, hip hop et rock, la marmite urbaine va bouillir comme

Beat Assailant © Gregory Bozec

jamais pour un festival toujours plus indépendant et désormais pilote dans la labellisation durable et solidaire. Pour s’imprégner du week-end à ne pas rater, l’homme orchestre Boogers et l’électro-punkette brésilienne Cibelle mettront les points sur les i dès le premier soir (23/9), avant de faire le grand saut façon hip hop la nuit suivante (24/9) : Beat Assailant, Tumi & The Volume ou encore Féfé. Le dilemme est de tout donner ou de garder suffisamment de force pour le climax annoncé lors de la nuit de

clôture ! Le menu est gargantuesque : A Certain Radio (légende funk de la Factory mancunienne), Erol Alkan, The Japanese Popstars, Success (de retour), le trio infernal marseillais Nasser… Vivement l’automne ! FRÉDÉRIC ISOLETTA

Pass 3 nuits 60 euros et 2 nuits 45euros en prévente (50 et 40 euros tarifs réduits) / nuit de 22 à 25 euros (16 à 21 réduits). www.marsatac.com

15 ans ça se fête ! Le Cargo de Nuit, antre musicale arlésienne, démarre cette rentrée sur les chapeaux de roues. La soirée anniversaire du 1er octobre va faire des envieux, avec le vernissage de l’expo 15 ans de Cargo ça s’expose, un concert de GiedRé… (invitations à retirer à partir du 15/9). À part ça ? La crème du Jamel Comedy Club Fabrice Eboué viendra trainer ses guêtres (21 au 23/9) avant les concerts attendus d’Andreya Triana (du bon folk-soul-jazz de Brighton le 2/10 à 21h30) et surtout d’Alice Russel (15/10 à 21h30). Soirée à réserver pour écouter le quintet teinté de funk et de soul qui porte la voix étonnante de cette véritable révélation, que ce soit en reprise (Seven Nation Army des White Stripes) ou en composition originale (Let us be loving). Un agenda chargé en Arles… F.I.

04 90 49 55 99 www.cargodenuit.com


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MUSIQUE

AU PROGRAMME

AIX Pasino : Dany Brillant (30/9) 04 42 59 69 00 www.casinoaix.com/fr

Théâtre et Chansons : Les soirées cabaret, L’Autre Versant de la colline (24 au 26/9), Et toi tu marcheras dans le soleil… (1er au 3/10) 04 42 27 37 39 www.theatre-et-chansons.com

AUBAGNE Théâtre Comœdia : Chants sacrés en Méditerranée (3/10) 04 42 18 19 88 www.aubagne.com

04 90 02 13 30 www.sonographe.fr

MARSEILLE Cabaret Aléatoire : Dagoba (1er/10), Martin Campbell, Blackboard jungle sound system, Kanka (2/10), Alif & Amandine (6/10), Dj Mehdi, Riton (16/10) 04 95 04 95 09 www.cabaret-aleatoire.com

Cité de la musique : Kavaldjistan (4/10), Saïko Nata (8/10) 04 91 39 28 28 pages.citemusique-marseille.com

Espace Julien : Soft (1er/10), festival du plateau : love corner krew (2/10), Tim Robbins & The Rogues Gallery band (9/10), The swell season (14/10) 04 91 24 34 10 www.espace-julien.com

AVIGNON Les Passagers du Zinc : The Amplifetes+Be.Noizy (17/9), Jack Dope & Noise+Pasteur Guy (23/9), Luke + Curry & Coco (1er/10), Festival la Triplette des Passagers avec Izia (14/10), Hocus Pocus (15/10) et Christophe (16/10)

HYÈRES Théâtre Denis : Les Zablocks (26/9) 04 94 35 38 64

ISTRES L’Usine : Eiffel (7/10), Tété (9/10) 04 42 56 02 21 www.scenesetcines.fr

LE THOR Auditorium de Vaucluse : Hommage à Jimi Hendrix par N’Guyen Lê (25/9), Emma Daumas (9/10) 04 90 33 97 32 www.auditoriumdevaucluse.com

04 42 49 02 00 www.theatre-des-salins.fr

MAUBEC La Gare : Les Elles, La compagnie du î (8/10), Battle Graphik #3, Little Ballroom, Les Martine’s Mother (9/10), Adama Cissoko et les Blakoros, La Mauvaise herbe (15/10) 04 90 76 84 38 www.aveclagare.org

04 90 51 17 60 www.theatre-antique.com

PERNES-LES-FONTAINES Centre culturel les Augustins : Festival de la Chanson Vivante avec Sapho, Allain Leprest, André Minvielle (du 20/9 au 2/10)

04 90 82 40 57 www.chenenoir.fr

04 92 52 52 52 www.theatre-la-passerelle.eu

MARTIGUES Théâtre des Salins : concert littéraire avec Stéphane Eicher et Philippe Djian (9/10)

ORANGE Théâtre antique : Best of Floyd (25/9)

Théâtre du Chêne Noir : concert littéraire avec Stéphane Eicher et Philippe Djian (15/10)

GAP Théâtre La Passerelle : Elisabeth Kontomanou (5/10)

04 91 62 49 77 www.lenomad.com

09 54 89 64 49 www.avignonbluesfestival.com

04 90 89 45 49 www.passagersduzinc.com

04 90 22 55 54 www.akwaba.coop

Nomad Café : Beast (14/10)

MONTFAVET Salle polyvalente : 13e Avignon Blues Festival avec Honey Hush, Joe Louis Walker (8/10), Big Pete Pearson, Big James and the Chicago Playboys (9/10)

04 42 18 17 17 www.mjcaubagne.fr

CHÂTEAUNEUF-DE-GADAGNE Akwaba : Moussu T e Lei Jovents, (le18/9), ParalLel (contest graff le 24/9), Dagoba+Clone Shop+Bredd Machine (2/10), Concert jeune public Weepers Circus (5/10), Beast, Emilie Chick (le 15/10)

Le Paradox : Dj Airsolid (16/9), Misa (17/9), Oda la lune (22/9), Papaya Cake, Control Alt Supp, Guma Guma (14/10) 04 91 63 14 65 www.leparadox.fr

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L’Escale : Soirée électro (7/10), soirée bœuf (14/10), fête de la paix, concerts gratuits sur le Cours Foch : Saïko Nata, Les Ch’tis frères de Zebda, Baâziz l’insoumis, Papet J & Rit, Maxxo, Estrella Polisaria, La Slam, Danse salsa, Pibo Marquez e La Descarga Criola (18 et 19/9), Blackberry & Mr Boo-Hoo (15/10)

Le Sonograf : Christophe Godin trio, hommage à Jimi Hendrix (23/9)

06 28 43 77 21 http://chansonvivante.com Tim Robbins et The Rogues Gallery band © Amanda Reelick

Intermédiaire: Killtronik, Hope and Drown (14/9), Red Corner (15/9), Djs Nantis & Sossa (16/9), Electro pump (17/9), Mariachis, Dj set (18/9), Mofak (20/9), Lipstick, Big Fat Papa’z (21/9), The Glandinians (22/9), Zion Flex (23/9), 2KC Systeme Noursound (24/9), Eve & Tom (25/9), Jazz Time (5 et 12/10) 04 91 47 01 25 www.myspace.com/intermediaire

La Machine à Coudre : Sunday Mourning, David Oppetit (16/9), Dirty Wheels, The Stu Ungar Story, Creepy Cat’s Cadillac (17/9), The Irritones, Lazybones, The A-Phones, The Keith Richards (18/9), Rich Deluxe, Sach Trash (2/10), Lord Fester Combo, The Dirty Farmers (9/10) 04 91 55 62 65 www.lamachineacoudre.com

La Mesón : Tablao flamenco Alejandra Cortes (2/10), Samenakoa (9/10), Trio Ziad, Boukerrou, Galeski (10/10) 04 91 50 11 61 www.lameson.com

ROUSSET Salle Emilien Ventre : My g-g-gereration par l’Atelier du possible (23/9) 04 42 29 82 53 www.rousset-fr.com

SALON-DE-PROVENCE Portail Coucou : The Messengers (2/10), Technicolor Hobo, Modern folk (9/10), Tremplin Buzzbooster (16/10) 04 90 56 27 99 www.portail-coucou.com

TOULON Oméga Live : Hey hey my my, Appletop (9/10), Chewy chocolate cookies, Manege 88, The Slutgarden, Beat Wankers, Pixel Face (16/10) 04 98 070 070 www.tandem83.com



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ARTS DE LA RUE

SMALL IS BEAUTIFUL | GARDANNE | PORT-SAINT-LOUIS

Ever bigger !! Small is beautiful ne cesse de grandir, mais n’en perd pas pour autant son âme ! La manifestation mise en place par Lieux publics se déploie cette année en trois villes et quatre temps. Et chacun des épisodes est sacrément fourni… toujours sur le principe des performances courtes, urbaines, qui remettent en cause notre vision du quotidien. Cela commencera mercredi 6 octobre à midi net par la Sirène rituelle sur le Parvis de l’Opéra -c’est Roger Bernat, chef de file des arts de la rue catalans, qui s’y colle-, puis se poursuivra à Marseille du 6 au 8 oct par une descente des 104 marches de Saint Charles par tous les performers, circassiens, danseurs invités -L’ai-je bien descendu ?-, Stephen Bain qui offre un thé de poupée sur le Vieux Port, les visites urbaines de Victor B… L’épisode 2 se déroulera à Martigues les 8 et 9 oct, avec à peu près les mêmes ingrédients, plus quelques

contre), et du feuilleton architectural de Pixel 13, projeté sur un dôme lumineux au cœur des trois villes. La dernière semaine (du 11 au 16 oct), retour à Marseille au terme des voyages, pour des performances non-stop de 18h30 à la nuit, une kermesse, un polar urbain, et un Mondial de Flashrue à laquelle vous êtes conviés (le 11 oct)… Avant un épilogue (du 18 au 23 oct) qui nous emmènera à Moscou et Berlin. Vous avez dit small ? Vous rigolez… AGNÈS FRESCHEL

OPUS, La Quermesse de Menetreux @ OPUS Sylvie Monier

délices dada et Fred Nevchehirlian, mais aussi à Aubagne les 9 et 10. Avec l’entrée en scène de l’ANPU, qui

produira successivement trois psychanalyses urbaines, à Aubagne, Martigues, Marseille (et Port-Saint-Louis voir ci-

Small is beautiful Du 6 au 23 oct Marseille, Martigues, Aubagne 04 91 03 81 28 www.lieuxpublics.com

Ouverture dans la rue À Gardanne aussi, depuis 5 ans, on ouvre la saison dans la rue. En concentrant sur une journée, le 2 oct de 16h à 23h, des compagnies de tout genre, du cru et d’ailleurs. La manifestation est extrêmement populaire et rassemble presque tous les habitants, comme en un jour de marché. La plupart y découvraient encore, il y a deux ou trois ans, les arts de la rue, mais à présent la manifestation est attendue, comme les Aubagnais ou les Martégaux guettent en spécialistes les surgissements artistiques inopinés… Il faut dire qu’on leur offre de l’inspiré, et du spectaculaire : le Guid de Preljocaj, des fanfares et des chorales, du hip hop, du théâtre et du clown, et un spectacle acrobatique et pyrotechnique pour

finir dans l’éblouissement. De quoi convaincre bien au-delà de Gardanne, où les rues vont trembler… À noter : Gardanne accueille aussi, le 15 sept, Warren Zavatta, qui n’avait pu se produire au printemps (voir p 54). A.F.

Tremblements de rue Le 2 oct Gardanne 04 42 65 79 00 www.ville-gardanne.fr

Deambuloscopie par la cie Pipototal © X-D.R.

À l’ouest, du nouveau La 2e édition de Carrément à l’Ouest, toujours coréalisée par le Citron Jaune et Ouest Provence, quitte le centre-ville de Port-Saint-Louis pour s’installer quartier Ambroise Croizat. Et met à l’honneur le travail artistique des femmes en programmant des créations qui interrogent leur place dans les arts de la rue mais aussi les rapports homme/femme de nos jours. Au programme des petites formes, chorégraphiées, funambulesques, musicales, théâtrales, et des spectacles plus importants vont émailler la journée du samedi 16 octobre, réinventant l’espace urbain sur un parking, devant le Citron ou au-dessus d’une palissade. Avec, entre autres, la danse de Laure Terrier, Mademoiselle, de la cie Jeanne Simone qui est résidence au Citron du 12 au 16 oct ; les marionnettes de Hélène Pirenne, alias Lorgnette, qui nous racontent un Chaperon Rouge très personnel en Post Scriptum ; le récit de l’exilée poétique Solita, qu’incarne Sophie

Talon, à la recherche d’une terre d’accueil, et d’une identité… ; Paper-glue’n’scotch, la création in situ de Lili Jenks, actuellement en résidence au Citron, sur le thème de la prostitution, qui mêle collage, intervention publique et montage vidéo ; le récital lyrique saugrenu ch’tilysant des deux sœurs Vandekaestecker, l’une soprano l’autre alto, qui célèbre les Mademoiselle © Zidane

standards de la chanson populaire du nord de la France ; les Contes de femmes et de bonnes femmes de Marie Ricard accompagnée à l’accordéon par Pascale Petit ; la comédie musicale décalée de 3 mémés de 70 ans, pas nostalgiques pour un sou sur leur mai 68, prêtes à reprendre la lutte, et dont la particularité est d’être interprétées par… 3 hommes… Bref, direction plein ouest, là où la rue rejoint l’art et inversement ! DO.M.

Carrément à l’Ouest Du 13 au 16 oct Quartier Ambroise Crouzat, Port-Saint-Louis Le Citron Jaune/Ilotopie 04 42 48 40 04 www.ilotopie.com www.scenesetcines.fr


PETIT ART PETIT | ANPU | SALON

Une journée à part La 12e édition du festival Petit Art Petit pose sa programmation dans le parc de l’Oasis, dans le 15e arr. de Marseille, le 25 septembre dès midi Il est l’un des plus anciens festivals d’art de rue de Marseille, implanté dans les quartiers Nord, organisé par l’association Lézarap’art qui propose de faire découvrir un large panorama de créations contemporaines dans ce domaine. Toute la journée, et même durant les quelques jours qui précèdent pour certains artistes que vous pourrez découvrir arpentant les rues, se succèderont les spectacles, installations, expositions et ateliers, à voir et pratiquer en famille : le collectif de plasticiens Tout L’toutim, qui récupère et détourne les objets pour recréer l’environnement s’installe dans le quartier des Aygalades ; toujours aux Aygalades, la cie Mungo surprendra avec 12 rue d’la joie et sa concierge Gigi ; L’illustre famille Burattini exhibera un volatile géant, tandis que Tantôt, robot dont la lenteur de mouvements apaise, fera l’objet d’une vidéo-performance ; Les Cousins, un jongleur maladroit et son chien, seront Complète-

ment à la rue, et croiseront les bizarres créatures de Cirkatomik et leur PUF, Produit Utile aux Festivaliers… Accueillis en résidence à Lézarap’art, les artistes plasticiens Abdelhaq El Youssi et Pascale Mijares présenteront leurs travaux durant le festival. Enfin, les ateliers éphémères de création, mini chantiers ouverts à tous, permettent à tout le monde de s’associer à une ou plusieurs créations individuelles ou collectives Gribouillage dans les branchages, Jardin des délices, Cartographies mentales…). L’expérience est à tenter ! DO.M.

Festival Petit Art Petit Le 25 sept au Parc de l’Oasis Marseille, 15e 04 91 69 11 80 www.lezarapart.com

ARTS DE LA LIVRES RUE

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Saint-Louis au divan L’Agence Nationale de Psychanalyse Urbaine est une cie tout à fait loufoque, et profondément subversive. Elle propose, au terme de séances pas vraiment sérieuses, mais où des inconscients mine de rien se dévoilent, de psychanalyser les substrats des villes. Leur être, leur histoire, leur architetecture, pour dessiner des portraits pour rire, mais pas que. Là c’est au tour de Port-Saint-Louis, ville industrielle en proie à des spasmes économiques, départ des croisades aussi, coupée en deux et tournée vers deux horizons plats. Qu’en dira l’ANPU ? Conférence de l’ANPU Le 1er oct à 19h Salle Marcel Pagnol, Port-Saint-Louis-du-Rhône 04 42 48 40 04 www.ilotopie.com

Dans les rues de Salon Pour sa 2e édition, Salon Public, Festival des arts de la rue fait la part belle aux différentes formes de cirque que sont le mât chinois, le cadre coréen, le trapèze, le clown et le mime, accueillant des compagnies régionales (Centre, Franche-Conté, Languedoc-Roussillon, Rhône-Alpes et Paca) et étrangères (Pays-Bas, Japon et Portugal). Un peu partout en ville, trois jours durant, les spectacles s’échelonneront, à commencer par le spectacle événement qui aura lieu dans la Cour du Château, forme monumentale faite de bois et de câbles de la cie Tuig, Schraapzucht, jouée pour la 1re fois dans la région (le 1er oct). Puis, le lendemain, lors d’une déambulation, vous apercevrez les personnages du Conte urbain D.O.Q. de Pudding Théâtre et la fanfare

musicale et théâtrale Musicabrass, avant de vous diriger vers le Parc de la légion d’honneur pour voir voler

les artistes du cirque trapèze féminin et assister à l’absurde et jouissif Voyage en bordure du bord du bout du On passe a table, Cie Kitschnette © A. Belkacem 2009

monde des déjantés Trois Points de Suspension sur la Place Morgan. Dernier jour enfin qui débute avec Jean-Georges Tartar(e), avant de se prolonger avec la cie japonaise Sivouplait et ses Silences amusants d’un couple en blanc sur le Parvis de la Tour de l’horloge, avant le piquenique sorti du sac passé en compagnie des Kitschnette, Morosof et Sivouplait… Pourvu qu’il fasse beau ! Salon Public Du 1er au 3 oct 04 90 44 89 00 www.salondeprovence.fr


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CIRQUE

AU PROGRAMME

En musique ! comme les Fratellinis ou Les Barios. Pour la Cie Bis Repetita et leur spectacle Pao, il s’agit plutôt d’une confrontation de deux corps et de deux types de voltige aérienne, l’une à base de corde lisse et l’autre à partir d’un mât chinois et le tout sur une musique en live. Quant aux deux clowns de François Cervantès, Zig et Arletti, ils ont envie de philosopher sur la condition humaine avec une infinie tendresse et une sensibilité profonde et délicate : celle de la Curiosité Des Anges. Enfin, dans un entresort particulier, la Cie Circ’ombellico avec son spectacle Da/Fort invite le spectateur sur une plate-forme d’un vieux véhicule aménagé en piste. Deux artistes, débordant de messages acrobatiques, content leur voyage immobile. Comme chaque saison il y a plusieurs représentations par spectacle. Alors à vos agendas !

Ouvrir en cirque

CLARISSE GUICHARD

Cirque et Entresorts Du 9 au 15 octobre Théâtre d’Arles 04 90 52 51 51 www.theatre-arles.com

Début de saison en deux parties au Théâtre de Fos, avec deux spectacles qui mettent la musique à l’honneur, de façon bien différente. Dans le Concert insolite, l’illusionniste Guillaume Vallée est un musicien bien peu chanceux. Une fois ses instruments installés, et alors que le concert va débuter, les incidents s’enchaînent ; les instruments ne veulent rien savoir et se rebellent, se dérobent, se transforment… dans une magie théâtrale très visuelle. En deuxième partie de soirée les musiciens du groupe Cotton Candies mêlent, dans un concert plus conventionnel celui-là, leurs propres compositions aux reprises jazz des années 30. Concert insolite suivi de Cotton Candies Le 2 oct à 19h Théâtre de Fos 04 42 11 01 99 www.scenesetcines.fr

Héritages… ca va pas se faire tout seul © Vincent Muteau

Pour ouvrir la saison du théâtre, les artistes investissent la ville d’Arles et ses alentours et entraînent dans des univers insolites et poétiques : ceux de Cirque et Entresorts, où règnent virtuosité, humour et esprit de fête C’est ainsi qu’au détour d’une déambulation lascive et urbaine, il sera possible de rencontrer plusieurs compagnies de cirque de rue, de clown et de théâtre physique et fantastique, comme la Cie Anomalie avec leur nouvelle création Mister Monster. À travers une interrogation commune sur le monde moderne, circassiens, danseurs, acteurs et musiciens interrogent les personnalités doubles et troublantes, et la gémellité. La Cie espagnole Escarlata Circus propose avec Devoris Causae la mise en bouche d’une grande cuisine théâtrale où gourmands et gourmets auront l’occasion de combler leurs cinq sens. Les Cousins présentent deux spectacles, l’un en solo, avec Complètement à la rue où Lolo s’essayera à la création d’un spectacle en compagnie de son chien Bébert, pour un véritable numéro de chien savant semé de blagues, de jonglerie et d’instants musicaux ; le deuxième spectacle, Ça va pas se faire tout seul, est un duo entre maladresse et illusions scéniques, où Julot et René, inséparables, rendent un hommage aux clowns d’antan

Avec un nom pareil difficile de faire autre chose que le clown… C’est pourtant la profession que Warren Zavatta, petit-fils du grand Achille, voulait éviter. Lui voulait jouer la comédie, et d’ailleurs c’est ce qu’il fait, même si, quand on est «romano», petit-fils, fils et neveu de..., résident de la «grande famille du cirque», on commence à faire ses gammes avec les disciplines de base. De fait il sait tout faire et le démontre avec humour et distance durant tout le spectacle. Tout en dézinguant à tout va le milieu, les coulisses peu reluisantes, le lourd atavisme, l’absence du grand-père et surtout le peu de reconnaissance qu’il lui accordait. Mais la satire bénéficie du recul tendre et «raisonné» de cet artiste qui veut avant tout faire rire, se moque de

lui-même avant de se moquer des autres, et finit par s’incliner devant ce grand-père pour qui il a «un immense respect» mais qui lui a tant manqué. Ce soir dans votre ville Le 15 sept Cinéma 3 casinos, Gardanne 04 42 65 79 00 www.ville-gardanne.fr Le 29 sept à 20h30 Théâtre de La Colonne, Miramas 04 90 58 37 86 www.scenesetcines.fr Le 14 oct à 21h Théâtre Durance, Château-Arnoux 04 92 64 27 34 www.theatredurance.fr

… sans nez rouge ! Ils sont clowns mais leur discipline s’inspire plus de la pantomine, leur grande spécialité. Après quatre semaines de résidence au théâtre de l’Olivier, Madona Bouglione et Popy Moreni créent Pentimento sur la musique du Lac des cygnes de Tchaïkovski, mêlant au cirque d’autres formes d’expression plus contemporaine qui font confrontent danse, musique, vidéo, acrobaties et arts de la piste. «Un théâtre pauvre qui invente à partir de rien», explique Madona Bouglione, mais un presque rien fastueux qui soutient leurs thèmes de prédilection, «l’amour, la mort, la haine»… Un cirque qui se veut «sans aucune considération de genre», mais «aristocratique et populaire, anticonformiste et audacieux», à l’image de la directrice artistique de Cirque O Présent. Pentimento Du 1er au 3 oct Théâtre de l’Olivier, Istres 04 42 56 48 48 www.scenesetcines.fr

© X-D.R


La plus drôle pour aller danser décide de mettre ses nouveaux textes en vers et en musique, enfin à sa manière, en s’accompagnant de musiciens talentueux certes, mais pas piqués des vers, justement ! Les Los Pistoleros. Ensemble, ils créent Le Prozband, un groupe hors norme, grinçant et terriblement drôle où Proserpine slame, Proserpine et son Prozband © X-D.R. chante, danse, drague,… sur des thèmes que lui a inspiré son Tour de France International, où elle s’est appliquée à «fabriquer des liens» avec tous. Et ça tombe bien : elle est attendue au Bal du Début pour nous faire virevolter dans un tourbillon de rire !

Elle n’est pas née de la dernière pluie, elle n’est ni jetable ni recyclable, ni rechargeable, ni même échangeable ! C’est Proserpine, la clown publique qui dit merde, crache, fait pipi, enfin toutes ces choses si humaines mais si honteuses. Dans sa dernière création, elle

C.G.

Proserpine et son Prozband L’Apprentie Compagnie Le 24 septembre à 19h Le Sémaphore, Port-de-Bouc 04 42 06 39 09 www.theatre-semaphoreportdebouc.com

Enfants de la balle Pour la 5e année, la Loly Circus fait son festival en Pays d’Aix, à Cabrières, Pertuis et Coudoux : un festival de cirque itinérant -et gratuit !- qui se propose de «faire voir pour faire faire». La compagnie, qui est aussi une école de cirque mobile, exploite ses compétences en pédagogie et formation cirque en proposant des ateliers, pour enfants et adultes, «pour développer ses capacités sur terre et dans les airs» : l’équilibre avec la boule et le fil, les acrobaties sur piste avec les portés, les exercices aériens avec le

trapèze fixe et le hamac et la jonglerie. Et pour que le plaisir soit complet, un spectacle vient s’intercaler au milieu : Plume de chat est un voyage à la découverte de Tawa, l’esprit du soleil dans une légende des indiens Hopi, avec force délires acrobatiques et aériens. De cirque en village Le 18 sept à Cabriès Le 25 sept à Pertuis Le 26 sept à Coudoux 06 18 91 76 94 www.lolycircus.com

Acrobatie de la vie Le duo Zimmermann & de Perrot continue de semer la poésie sur sa route. Présenté au Festival d’Avignon 2010, Chouf Ouchouf recrée le monde en équilibre de 12 acrobates issus du groupe acrobatique de Tanger. Apparitions/disparitions dans la ville labyrinthe recomposée en d’ingénieuses tours mobiles et cascade de saynètes sur la vie marocaine composent une mosaïque de situations tendres sur un plateau qui a la bougeotte. Un festival de couleurs et d’énergie sur le thème de la rencontre

avec l’inconnu qui nous fait chanceler dans nos certitudes. Véritables châteaux de cartes humains qui gravissent des sommets d’équilibre pour nous tenir en alerte et nous faire regarder et regarder encore avec des yeux émerveillés. Une chorégraphique circassienne pleine d’humour. Chouf Ouchouf Du 16 au 18 septembre Châteauvallon, Ollioules 04 94 22 02 02 www.chateauvallon.com


CAHIER JEUNESSE

Chapeau bas !

Pour son ultime saison au Théâtre Massalia, Philippe Foulquié signe une programmation délibérément ouverte sur les styles, les formes, les continents, et reste fidèle à de nombreux compagnons de voyages «Je quitte la direction de la Friche de la Belle de Mai le 31 décembre 2010» a annoncé, ému, son fondateur Philippe Foulquié, mais je me recentre sur le Théâtre Massalia pour œuvrer à ma succession». Ce théâtre dont il signe la 24e saison et qui «restera à la Friche car sa principale activité est ici, tout en étant hors les murs». Plus d’ambiguïté donc sur l’avenir du Théâtre Massalia qui, malgré une santé financière délicate (comme toute la culture aujourd’hui at-il souligné), continuera «à cultiver la curiosité du public, les échanges et les coproductions». Et pour clore le débat sur la scission entre jeune public et tout public qui lui semble être d’arrièregarde, Philippe Foulquié réaffirme la position de Massalia «d’être au-delà de ce type de clivage». D’ailleurs la tarification favorise l’accès aux spectacles à un public familial avec un tarif unique enfant/adulte à 7 euros et des cartes d’adhésion à 5 et 15 euros…

Quel sera donc le visage de Massalia en 2010/2011 ?

Kaléidoscopique à l’aune des 27 spectacles programmés et des nombreux projets : ateliers avec les Cies Vol

plané, Rodisio, 2b2b, focus sur la littérature jeunesse (Nathalie Papin, Karin Serres et Philippe Dorin), Culture à l’hôpital avec Katy Deville. Régional car de nombreux artistes y seront accueillis en résidence ou présenteront leurs dernières créations : Arketal, Tandaim, L’Entreprise, Théâtre de Cuisine… International aussi car Massalia franchit les Alpes vers l’Italie à l’occasion de la manifestation Les Pouilles à Marseille, plus au nord en Allemagne pour la création S.I.C Système Immunitaire en construction de 2b2b et Talking Legs, et traverse même la Méditerranée jusqu’au Liban (collectif Kahraba et Cie Extramuros pour Arabiyetna) et Taiwan (création La Naissance, Cies L’Est et l’Ouest et Flying Group)… Musical parfois grâce à une nouvelle collaboration avec Le Cri du port qui sensibilisera le public à la chanson actuelle (À cloche-pied hop hop hop avec Muriel de Mars) et à son alter ego varois le PôleJeunePublic qui lance son premier Z festival de Zik (Le roi des papas de Vincent Malone). Si cette année Massalia engage des collaborations avec le Théâtre de la Tête noire, les Cies Zabraka et Tête de Pioche, le Collectif Kahraba, c’est bien

Il Malato immaginario ovvero par le Teatro Kismet Opera ouvre la saison de Massalia © C. Bari

sous le signe des retrouvailles que Philippe Foulquié tire sa révérence : le Teatro Kismet Opera qui ouvre la saison (13-20 oct.), Mediane, La Main d’œuvres, Thérèse Angebault, Sylviane Fortuny et Philippe Dorin, Cyril Bourgois, Rodisio, Lunasol, François Cervantès et Christian Carrignon, Jean-Pierre Larroche, le Butchinger’s Boot… Une saison en forme d’au revoir qui marque son ancrage historique dans la

vie culturelle de la cité, sa fidélité pour ceux qui ont participé à l’aventure comme sa curiosité pour les jeunes artistes et les formes émergentes. MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Théâtre Massalia, Marseille Saison 2010/2011 04 95 04 95 70 www.theatremassalia.com

Un jeu d’enfant Le temps d’un week-end (9-10 oct), la manifestation nationale Monument jeu d’enfant concilie activités ludiques et pédagogiques à la découverte du patrimoine. Dans 38 monuments de France, dont 3 en Provence-Alpes-Côte d’Azur, les enfants de 5 à 12 ans sont les «cibles» privilégiées des artistes, comédiens, artisans et guides qui ont plus d’une corde à leur arc pour les sensibiliser aux vieilles pierres. Deux journées inventives durant lesquelles la cité de Glanum à Saint-Rémy-deProvence (13) revit à l’heure antique et évoque la vie quotidienne à travers,

notamment, des métiers de l’époque : muni d’un livret-jeu, chaque enfant devra le remplir au gré de ses rencontres avec les habitants de la ville… Au monastère de Saorge (06), la Cie Arketal organise une exposition qui est aussi une initiation à la manipulation de marionnettes (L’Atelier d’Arkétal) et une série de petits spectacles de 10 minutes interprétés par la marionnettiste Sylvie Osman, sur un texte de Jean Cagnard (La loi de l’oie). Enfin, pour raconter les très riches heures de l’abbaye de Montmajour (13), la Cie Khoros a imaginé un spectacle déambulatoire autour d’une intrigue mystérieuse : à chaque pièce du monument correspond un chapitre de l’histoire mettant en scène, en images ou en musique, un bout de la société médiévale : les femmes, les moines, les nobles, le peuple… Un jeu de piste à feuilleter comme un grand livre d’images car, à chaque chapitre, les participants devront trouver un indice qui leur permette d’imaginer la fin de l’histoire. M.G.-G.

Montmajour © Floriane Doury-cmn

Sité archéologique de Glanum, St-Rémy-de-Provence 04 90 92 35 07 www.glanum.monuments-nationaux.fr Monastère de Saorge, Saorge 04 93 05 55 55 www.saorge.monuments-nationaux.fr Abbaye de Montmajour, Arles 04 90 54 64 17 www.monuments-nationaux.fr


INSTITUT CULTUREL ITALIEN | BADABOUM THÉÂTRE

Viva l’Italia !

L’Institut Culturel Italien de Marseille est une belle maison, claire et arrondie, qui décline ses terrasses et se niche depuis les années 30 à côté du Consulat. Ouverte au public, elle dispense de nombreux cours, en particulier aux enfants, durant l’année et les vacances scolaires. Émanation du Ministère de la Culture Italien, l’Institut fait partie d’un réseau mondial de 90 établissements destinés à promouvoir la langue et la culture italiennes, enseignées par des locuteurs italiens et répondant aux critères de compétences internationaux. L’inscription aux cours donne accès aux activités culturelles, nombreuses et variées, qui ont lieu dans ses murs ou auxquelles il s’associe : ainsi durant les mois de septembre et octobre, l’Institut organise des rencontres autour des programmations d’Andrea Chénier à l’Opéra, de la Semaine des Pouilles au

Massalia, de Films Femmes Méditerranée… Il sera présent à la Foire de Marseille avec l’exposition Italianita.

Afin de présenter toutes ses activités, et en particulier les cours de langue, l’Institut ouvre ses portes le 18 sept. Et

SAISONS 57

donne rendez-vous aux enfants à 11h30 et 16h, et de 10h à 18h pour les plus grands et les adultes. Des tests de niveau gratuits sont proposés, ainsi qu’une présentation des ateliers du samedi (de la littérature et la conversation à la cuisine !), et du fonds de livres, disques et DVD : 18 000 volumes à votre disposition ! Quoi de plus ? l’Institut offre aux abonnés de Zibeline des adhésions annuelles gratuites… A.F.

Institut Culturel Italien Marseille 5ème 04 91 48 51 94 www.iicmarsiglia.esteri.it

Atelier des enfants à L’Institut culturel italien © X-D.R

Voir et faire

Le Badaboum fête ses 20 ans cette année avec une programmation qui compte une trentaine de spectacles pour enfants à partir de 3 ans : reprises de spectacles-maison, créations et accueil de troupes extérieures. Un choix passionnant d’histoires puisées

au fond de l’imaginaire collectif ou inspirées des transformations de notre société. Les spectacles ont lieu les mercredis et samedis, et pendant les vacances. Après chacune des représentations est proposé un atelier pour traduire les émotions en jeu, avec costume et maquillage, et s’exprimer sur les thèmes qui ont été évoqués. Peu à peu les enfants apprennent à devenir des spectateurs actifs et réactifs ! Par ailleurs des cours et des stages de théâtre et d’initiation au cirque sont régulièrement dispensés ; les enfants abordent les notions de jeu, de scénographie et participent complètement à la préparation d’un spectacle de fin d’année, y compris par la pratique d’ateliers d’écriture. En septembre, pour la 2e année, le Bada fait son Boum et propose un mini festival de spectacles invités qui témoignent de la diversité et de la richesse du théâtre Jeune public. CHRIS BOURGUE

Le Vilain petit canard © X-D.R

Le Bada fait son Boum jusqu’au 25 sept : 4 propositions très différentes dont un spectacle marocain de la Cie Arta créé et joué par des enfants Badaboum Théâtre, Marseille 04 91 54 40 71 www.badaboum-theatre.com


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SPECTACLES

AU PROGRAMME

Des équilibres

Rébellion ! Le Petit chaperon Uf © Cie Punchisnotdead

Dans la version très moderne de Jean-Claude Grumberg du conte de Perrault, Le Petit Chaperon n’est pas rouge, elle est Uf, ne doit pas porter de capuchon rouge, ni posséder certains aliments, la loi l’interdit ; quant au loup,Wolf, c’est en fait un caporal nazi : la loi, il la fait appliquer. Le texte de Grumberg, ainsi que les marionnettes de Cyril Bourgois et la musique de Philippe Orivel revisitent avec humour les pages terribles de l’histoire. Une relecture qui permet aussi de lancer un avertissement aux spectateurs : «Demain, si l’on n’y prend garde, les loups s’attaqueront peut-être aux enfants Ifs ou Gnifs ou Gnoufs, les loups seront toujours les loups et vous savez comment ils savent dissimuler leur bave et leurs grandes dents sous de belles et trompeuses paroles avant de se mettre à hurler et à mordre.»

La Piste Là du 15 au 31 octobre Parc des lices,Toulon 04 94 98 12 10 www.polejeunepublic.com

Chorépictural

Allégorie ludique et poétique autour de la création, Henriette et Matisse est une chorégraphie de Michel Kelemenis qui s’élabore avec l’artiste, son modèle, le pinceau du trait et celui de la couleur. Quatre danseurs qui incarnent l’œuvre du peintre, son geste précis, ses tableaux qui se dessinent dans l’espace et laissent intacte l’imagination des enfants qui regardent. Cette rencontre de deux arts du mouvement, la danse et la peinture, invente une œuvre singulière, lumineuse. Henriette et Matisse dès 4 ans 6 oct 15h Théâtre des Salins, Martigues 13 oct 14h30 Théâtre du Jeu de Paume, Aix 0 820 000 422 www.lestheatres.net

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Le Petit Chaperon Uf dès 7 ans 6 oct 14h30 et 18h30 à l’Odéon Théâtre de Nîmes 04 66 36 65 10 www.theatredenimes.com

Après le cirque Romanès et Les Têtes en l’air, le PôleJeunePublic récidive en ouvrant sa saison sous chapiteau avec le premier spectacle en circulaire du Cirque Aïtal, La Piste là. Un titre en forme de «manifeste» pour dire leur attachement au cirque traditionnel tout en s’en moquant gentiment… Sur cette piste là, il y a un grand costaud et une petite blonde, voltigeuse et finlandaise, une incompatibilité physique entre «deux corps en trois D» d’où naît un comique poétique… et périlleux car les comédiensmusiciens sont aussi d’incroyables acrobates ! Dans un décor sobre, contrebasse, trompette, tuba, accordéon et banjo sont prétextes au jeu, accompagnent leurs prouesses soulignées par une lumière électrique.

Henriette et Matisse © Agnès Mellon

En boîte

C’est l’histoire d’une histoire d’amour tendre et poétique entre Olivia qui traverse le monde dans une boîte, et Milos qui fait tout pour éviter d’avoir des pépins… Une histoire au cours de laquelle s’envolent chaussettes et autres objets incongrus, où s’enchevêtrent boîtes, échelles et valises, où l’on jongle avec des objets lumineux. Les personnages excentriques de Klinke font partager leurs émotions dans un rythme soutenu qui mêle adroitement théâtre, cirque et danse. Klinke dès 5 ans 24 sept 19h au Citron Jaune Espace Gérard Philipe, Port-Saint-Louis du Rhône 04 42 48 52 31 www.scenesetcines.fr

Tourbillonnant

Et le malade ? Imaginaire… Vue par Teresa Ludovico et sa compagnie Il Teatro Kismet, la pièce de Molière a pour décor l’Italie du sud, peuplée de personnages de la commedia dell’arte. Fidèle au texte, enrichie d’une mise en scène inventive, Il Malato immaginario place Argan au centre de cette comédie pétillante et burlesque : c’est le Molière du théâtre dans le théâtre, des farces et de la dérision face au «ridicule de l’humanité» qui a séduit la troupe, bien décidée à partager son enthousiasme. Spectacle présenté dans le cadre de la manifestation Les Pouilles à Marseille Il Malato immaginario dès 12 ans 13 et 16 oct 20h La Cartonnerie, Friche Belle de Mai Théâtre Massalia 04 95 04 95 70 www.theatremassalia.com

Désopilant

Encore un artiste qui nous vient du Québec, Fred Pellerin, mais qui atterrit à Briançon avec un conte à la langue inventive : L’Arracheuse de temps qui mêle comme par enchantement le vrai et l’impensable, l’aujourd’hui et l’hier, le forid de dehors et la tendresse humaine de dedans. Dans ce conte qui ne tient qu’à un fil, il « brodeurise » à souhait, tord les mots, multiplie les digressions fantaisistes et les images avec un semblant de légèreté que son physique d’éternel adolescent ne saurait contredire. Bref, on est tour à tour la Stroop, sorcière énigmatique, le décoiffeur, le curé neuf, le forgeron surhormoné, le voisin Jacques sans croire un instant que le rideau va bientôt tomber. L’arracheuse de temps 20 oct 20h30 Le Cadran, Briançon 04 92 25 52 52 www.theatre-le-cadran.eu

Révélation

Il suffit d’un grain de sable issu des étoiles, et de marionnettes, pour que l’on entame un long périple depuis le sud du Liban jusqu’aux rives du SaintLaurent, là-haut au Québec. Et que l’on assiste à une rencontre merveilleuse avec un vieil homme… Inspiré de l’histoire d’Antonio Youssef Zacharia, immigrant libanais installé au Québec et père de l’auteure et marionnettiste Agnès Zacharie, le spectacle-conte est un moment de pure poésie, aussi intime et insolite que le bus itinérant dans lequel la Cie Ubus Théâtre nous invite à monter. On y grimpe d’autant plus volontiers que le voyage est inoubliable. Le Périple dès 5 ans 13 oct 14h30 et 18h30 Callas, 14 oct 18h30 Claviers, 15 oct 18h30 La Motte, 16 oct 14h30 et 18h30 Châteaudouble Théâtres en Dracénie, Draguignan 04 94 50 59 59 www.theatresendracenie.com


SPECTACLES 59

Troublant

Dans une pénombre mystérieuse, Étienne Saglio est magique, adroit et manipulateur ! C’est que ce jeune prodige a plus d’un tour dans son sac et qu’il sait transformer le réel sous nos yeux ébahis. Son spectacle de magie nouvelle Le soir des monstres surprend, déstabilise parfois, fascine, enchante par ce qu’il offre de poétique et d’irréel : avec lui, les objets ont une deuxième vie, ils ensorcellent et se transforment. Ils sortent du placard comme on sortirait de l’enfance, doucement… Etienne Saglio nous ouvre les portes de l’étrange et du fantastique avec une économie de gestes et une grande force évocatrice.

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Le soir des monstres dès 8 ans 3 oct 18h30 Théâtres en Dracénie, Draguignan 04 94 50 59 59 www.theatresendracenie.com

Lumineux

Drôle d’histoire que celle de Mama Luna qui, une nuit, décide de traverser la fenêtre de sa chambre pour redonner vie à sa vie et à celle de ses sœurs restées trop longtemps endormies, grises et oubliées… Au point que leur chambre était devenue grise et oubliée ! Un seul rayon de lumière et hop ! la pièce s’illumine et les visages rayonnent. Ce spectacle est comme une lueur d’espoir racontée au jeune public par la Cie Cerchio di Gesso qui en a fait ses spectateurs privilégiés depuis 20 ans. Spectacle présenté dans le cadre de la manifestation Les Pouilles à Marseille Mamma Luna dès 4 ans 20 oct 15h La Gare franche, St Antoine Théâtre Massalia 04 95 04 95 70 www.theatremassalia.com

Le soir des monstres © Elsa Revol

Rêves d’ados

Nouvelle scène

S’en est fini du nomadisme pour la Cie Equivog qui, après 25 ans, a désormais un camp de base à Marseille, le Théâtre des Chartreux ! Il sera inauguré le 29 septembre en lieu et place d’une boîte de nuit, équipé d’un plateau avec gradins, d’un espace d’accueil et d’exposition, et d’un jardin dont l’aménagement est prévu en 2011… D’ici aux beaux jours, Equivog présentera ses créations «maison» (Tartuffe(s) la Répétition, spectacle de théâtre clownesque et d’humour), poursuivra ses tournées dans les communes de la région tout en gardant la porte ouverte aux compagnies en mal de diffusion. La couleur de cette première saison est plutôt tendance clown et musique, tout public et jeune public, avec la Cie Eponyme et son récital poétique Voyage en Pouésie ou le cabaret-théâtre de la Cie La Cohue Trois lunes sur un fil… Théâtre des Chartreux, Marseille 4ème Le 25 septembre, présentation de saison en présence des compagnies invitées et extraits de spectacles 04 91 50 18 90 http://theatredeschartreux.free.fr

La Cité a pour particularité de s’adresser aux ados de tous les milieux et tous les quartiers. Depuis octobre 2008, en partenariat avec Karine Fourcy et la Cie Traversée(s) nomade(s), elle a convié des adolescents pour des temps de recherches et de travail de plateau. 25 jeunes, entre 15 et 20 ans, ont travaillé à la création d’un spectacle dont ils sont les co-auteurs et les acteurs. Ils ont construit à partir de leurs mots, de leurs questions, de leur jeu, dans divers lieux, les soirs, les samedis et pendant les vacances scolaires. Partir de soi, de son univers, familial, culturel, social, observer, mettre en jeu. Regarder l’autre. Autre travail avec des centres sociaux : deux cinéastes Anne Alix et Aurélia Barbet, l’artiste multiforme Till Roeskens ont, dans trois quartiers, réalisé Ça part de là... entre documentaire et fiction vie réelle et vie rêvée. Le(s) pas comme un(s) 30 sept et 1er oct 20h30, 2 oct 18h Ça part de là... 2 oct 20h30 Réouverture le 24 sept à 19h La Cité, Maison de théâtre www.maisondetheatre.com

Fils d’Ulysse

Rendez-vous au Gyptis si vous n’avez pas encore vu le délicieux spectacle que Josette Baïz a ranimé en 2007 avec les enfants de son groupe Grenade ! Créée en 1981 par Jean-Claude Gallotta cette pièce, qu’elle a interprétée, a été adaptée par les deux chorégraphes pour 15 jeunes enfants. Une belle énergie, un plaisir évident de danser dans un décor blanc et des costumes immaculés. Josette Baïz estelle fée ou un peu sorcière pour parvenir à tant d’excellence avec de si jeunes enfants ! Ulysse 7 oct 19h15, 8 oct 20h30 Le Gyptis 04 91 11 00 91 www.theatregyptis.com

Virtuose

C’est un spectacle qui nous vient du bout du monde, d’Australie précisément, par la Cie Circa qui flirte avec le théâtre, la danse et le mime. Sur les accords d’une bande son éclectique (de Jacques Brel à Radiohead !), leur création C!irca marie voltiges, acrobaties, portés et ballet au sol et au trapèze pour dessiner «un fantastique voyage autour de nos sentiments gardés secrètement». Envol immédiat pour le ciel austral à bord d’un ovni séduisant… C!irca 25 sept 20h30 Théâtres en Dracénie, Draguignan 04 94 50 59 59 www.theatresendracenie.com

La rentrée du Petit cinéma

Dans le cartable de Fotokino, plein de nouvelles résolutions - perpétuer son rendez-vous mensuel au cinéma Les Variétés à Marseille - et de nouveautés : emprunter les routes du département à la rencontre du public. Dès le 6 octobre donc, et tous les 1ers mercredis des mois pairs (octobre, décembre, février, avril et juin), Fotokino organisera son Petit cinéma avec une projection à 10h et un atelier au pied de l’écran à 9h. Avant sa sortie nationale en salles le 27 octobre, le jeune spectateur pourra découvrir en avant-première Capelito, le champignon magique (42 mn, à partir de 3 ans). Mais qui est Capelito ? Un bolet bai reconnaissable à son chapeau brun et à son pied jaune, entouré d’une grande famille et de nombreux amis (6 très exactement !), qui parfois perd son chapeau à force de jouer avec son nez magique… Quant aux mois impairs, le Petit cinéma sera en itinérance dans plusieurs salles des Bouches-duRhône (horaire à définir), dont l’Institut de l’Image à Aix et le Renoir à Martigues. M.G.-G.

Capelito, le champignon magique mercredi 6 octobre atelier à 9h, projection à 10h Les Variétés, Marseille 09 50 38 41 68 www.fotokino.org © X-D.R


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LIVRES

Des mots pour le dire

En 10 ans, près de 40 histoires se sont constituées de classe en classe au gré de l’imaginaire de jeunes lecteurs et de jeunes illustrateurs, qui composent désormais la collection Histoire de mots. Derniers-nés de cette œuvre collective coordonnée par l’ICEM-pédagogie Freinet : Cannelle, une petite fille qui trouve une jolie coccinelle et l’adopte avant qu’elle ne s’envole ; Dans mon école qui regorge de livres habités par une flopée de gentils monstres ; Je suis, je suis… qui opte pour la devinette afin de dire toutes les facettes du clown ; Les gros mots, qui parvient à n’en dire aucun tout en évoquant les situations les plus propices (quand papa se tape sur les doigts avec un marteau ou quand maman casse un verre…). Les clefs de cette longévité ? Un petit format carré bien

adapté aux mains des tout-petits, le choix d’un vocabulaire simple, des thèmes familiers, des mots répétés comme une ritournelle et trois niveaux de difficulté selon que l’on est apprenti lecteur ou débutant désireux d’enrichir son vocabulaire. D’ailleurs un logo figure sur chaque livre pour guider les parents dans l’achat du volume le mieux adapté. Seul petit bémol : l’iconographie, parfois un peu gnangnan, mériterait plus de peps !

M.G.-G.

Collection Histoire de mots Éd. Pemf, 7,95 euros chacun

Un p’tit coup d’vitamines !

Après les sorcières qu’on ratatine sans état d’âme (voir Zib’32) voici que les Dinosaures envahissent les pages de la collection Vitamine (Éd. P’tit Glénat). Pas de texte, mais des dessins aux détails multiples permettent aux enfants d’inventer une histoire à partir du choc du noir et des couleurs. Insectes légers, animaux aquatiques, petits êtres humains témoignent de l’univers fertile de Christophe Bataillon. Il imagine une rencontre entre les hommes et les dinosaures qui bouscule l’harmonie d’un monde vierge. Les petits cœurs aussi vont chez le docteur dédramatise les visites chez le médecin et permet d’apprivoiser toise et stéthoscope. On rencontre aussi de drôles de personnages dans la salle d’attente : le capitaine Haddock et Titeuf vont aussi chez le docteur ! Retour à l’imaginaire avec un petit Prince qui a un défaut de langue.Tandis que le texte d’Alice Brière-Haquet

joue sur le rythme et les rimes, les dessins de Camille Jourdy sont délicieusement surannés et offrent une charmante galerie de portraits. Une histoire qui fait l’apologie de la différence. CHRIS BOURGUE

Nos cousins les dinosaures Christophe Bataillon 11 euros Les Petits cœurs aussi vont chez le docteur Géraldine Collet & Roland Garrigue 10 euros Le Petit Prinche Texte Alice Brière-Haquet, dessin Camille Jourdy 11 euros

L’apprentissage de la finesse

Océan jeunesse édite de délicieux albums, dans lesquels textes et illustrations se complètent, entraînant les jeunes lecteurs dans leur univers avec un rare bonheur. Les sujets abordés s’attachent à des problèmes simples, empruntent au quotidien ou au conte, appréhendent le monde avec sensibilité. C’est la petite Amélia qui veut un chien. Réussira-t-elle à convaincre son père en usant de faux caprices pour arriver à ses fins ? Chaque illustration couvre une double page, immersion garantie ! mer de fantaisie pour la baleine, trompe à rayures démesurée de l’éléphant, cheval au galop, référence discrète à Lascaux… Sans compter l’inénarrable petit guide pour bien s’occuper de son chien en fin de volume ! Bonne idée aussi que d’éditer La montagne fleurie, conte japonais paru en 1969. L’illustrateur y ose le noir, qui emplit parfois des pages entières avec juste ce qu’il faut pour qu’une larme soit la rosée d’une fleur. Un conte du don de soi, pour dépasser l’égoïsme de l’enfance, et entraîner les enfants loin du consu-

mérisme ambiant… Réussir sa vie, posséder une Rolex ou faire pousser une fleur ? Les livres apprennent la liberté… Une collection superbe sur papier glacé ! MARYVONNE COLOMBANI

La montagne fleurie Ryunosuke Saito et Jiro Takidaira Océan jeunesse, 15 euros Amélia veut un chien Tim Bowley et André Neves Océan jeunesse, 15 euros

Le ciné pour grandir

Un récit d’enfance de plus ? Celui de Guillaume Guéraud est aussi un hommage au cinéma, et cela ajoute à son charme : chacun des courts chapitres est suivi d’un extrait de scénario. Dans une langue parlée proche de la confidence, l’auteur livre sa rage de ne pas avoir la télé et ses éblouissements devant certaines images cinématographiques qui le poursuivent. Pendant que ses copains s’extasient sur Dallas, nouvelle série à la mode, sa mère l’emmène voir La dame aux camélias ou Mon oncle d’Amérique. Et à la récré il raconte ce qu’il a vu, transforme, brode à l’envie et se taille un grand succès. Cette découverte du cinéma accompagne celle de la vie, avec l’arrivée de la drogue dans les cités, les premiers émois sensuels… et le cinéma encore qui l’amène à l’écriture. CHRIS BOURGUE

Sans la télé Guillaume Guéraud Éd. du Rouergue, coll. DoAdo, 9,50 euros



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CINÉMA

RENDEZ-VOUS D’ANNIE

Le 21 septembre, à 20h, au cinéma Le Mazarin, à Aix, projection du film de Mariana Otero, Entre nos mains : une entreprise de lingerie en faillite, des salariés, surtout des femmes qui prennent leur destin professionnel en mains… Mariana Otero, qui les a filmés durant plusieurs mois, sera présente et rencontrera le public après la projection. Le Mazarin, Aix 04 42 49 25 42

Du 15 au 28 septembre, l’Institut de l’Image, à Aix propose Hitchcock- la suite, une demidouzaine de films du maître du suspense : Les 39 marches ; Jeune et innocent avec son célèbre plan-séquence qui dévoile le coupable à la fin du film ; Une Femme disparaît ; L’Ombre d’un doute ; Lifeboat, un «huis clos» en pleine mer ; L’Inconnu du Nord-Express, adapté d’un roman de Patricia Highsmith et Le Crime était presque parfait, avec la belle Grace Kelly. The Lodger - A Story of the London Fog, film muet réalisé en 1926 qu’Hitchcock considère comme son premier vrai film dans ses entretiens avec François Truffaut, sera accompagné, jeudi 16 septembre à 21h, par le musicien multiinstrumentiste Christian Paboeuf. Du 6 au 19 octobre, l’Institut de l’Image profite de la sortie du dernier film de Jean-Luc Godard, Film Socialisme, et de la réédition en copies neuves d’À Bout de souffle, pour revenir sur l’œuvre du cinéaste, auquel Hollywood rend hommage : l’occasion de (re)voir sur grand écran, Bande à part et Pierrot le fou avec Anna Karina ; Week-end ; Passion, etc. Le 8 octobre à 20h30, Film Socialisme sera présenté par le critique Nicolas Feodoroff, et la séance sera suivie d’un débat.

Les 1er et 2 octobre, à l’Alhambra Cinémarseille, États du doc en région PACA : comment filmer un territoire ? Le 1er à 20h30, Terre d’usage de Marc-Antoine Roudil et Sophie Bruneau en présence de Sophie Bruneau. Le 2 à 14h 30, Plan de situation Joliette en présence de son réalisateur, Till Roeskens. La projection sera suivie à17h 30 d’une table ronde avec Till Roeskens, Natacha Cyrulnik et d’autres invités. Durant les deux jours, projection en continu de 14 films récents dont un portrait de Lucien Clergue, des films de la série Voyages sur des villes… Puis le 6 octobre, l’Alhambra accueille FFM : projection de deux films. À 14h30, Le Défi, une comédie musicale hip hop de Blanca Li, et à 20h 30 Parures pour dames en présence de la réalisatrice, Nathalie Joyeux.

Cinépage, Marseille 04 91 85 07 17 www.cinepage.com

Le 2 octobre, au cinéma Variétés, de 21 heures à minuit, dans le cadre des Rencontres FilmsFemmes et Méditerranée, une soirée consacrée au court métrage, 13 en Courts : treize films réalisés par des femmes venues du Liban, de Grèce, d’Italie, de France… Un prix du public sera décerné et de nombreux lots offerts aux spectateurs. Films-Femmes et Méditerranée www.films-femmes-med.org

Fotokino 09 50 38 41 68 www.fotokino.org Nanouk de Flaherty

Alhambra, Marseille 16e 04 91 46 02 83 www.alhambracine.com

Le 7 octobre, à 20h, les Rencontres Films Femmes Méditerranée font escale à Martigues au cinéma Renoir et proposent un documentaire de Nathalie Joyeux, Parures pour dames : douze femmes participent à «l’atelier de la désobéissance» proposé par la créatrice de mode Sakina M’sa. Malika, Sara, Adriana, et leurs camarades se racontent à travers leurs vêtements… Cinéma Jean Renoir 04 42 49 25 42 Parures pour dames de Nathalie Joyeux

Le 15 Octobre à 18h 30, la Médiathèque Louis Aragon et le Cinéma Jean Renoir à Martigues proposent Irlande : Autopsie d’un conflit : une rencontre avec le reporter Sorj Chalandon suivi de la projection à 21h de Hunger de Steve McQueen, Caméra d’Or à Cannes en 2008. Le débat après le film sera animé par Sorj Chalandon et Antoine Thirion, critique de cinéma.

Institut de l’Image 04 42 26 81 82 www.institut-image.org

Le 30 septembre à 20h, en partenariat avec le cinéma Prado, l’association Cinépage reprend son cycle de «ciné-club» : projection de Bright Star de Jane Campion. À Londres, en 1818, le jeune poète John Keats, qui doit faire face aux derniers jours de son frère, est soutenu par sa voisine, Fanny Brawne. Petit à petit, un amour naît entre eux. Mais des obstacles se dressent…

Le 13 octobre, au CRDP, à Marseille, aura lieu un Ciné-concert, proposé par La Meson en partenariat avec La Cinémathèque de Marseille et Fotokino, Nanouk de Flaherty, avec le musicien Uli Wolters. Créé pour Laterna magica en 2007, il sera repris pour la première fois à Marseille à l’occasion du Festival Jazz sur la ville.

Médiathèque et Cinéma Renoir 04 42 44 32 21 `

Le 9 octobre, de 14 h à minuit, à la salle Emilien Ventre de Rousset, Courts-Bouillons projection de 25 courts métrages internationaux, dont une séance en partenariat avec La Maison du Film Court, en présence de Richard Sidi, réalisateur et scénariste, responsable du département Scénario. Les Films du delta 04 42 53 36 39 www.filmsdelta.com

En ces temps troubles, heureuse initiative que la réédition (soutenue par le CG 13), du DVD réalisé par le collectif 360° et même plus, RESF, un réseau de résistances, autour des luttes menées par le Réseau Éducation Sans Frontières des Bouches-du-Rhône. Agathe Dreyfus, Christine Gabory et Ivora Cusack ont

Le 16 octobre à la MJC de Cavaillon, deuxième Festival du film émergeant qui permet à de jeunes réalisateurs de présenter leurs films. Trois séances de courts métrages : à 15h, une «spécial ados», à 18h et 21h30. Entrée gratuite sur réservation. MJC, Cavaillon 04 90 71 65 33 www.mjccavaillon.fr

suivi des actions menées entre novembre 2006 et mars 2007, mobilisations antiexpulsions, parrainages… pour résister à une politique d’exclusion des sans papiers. Cinq films entre documentaire et reportage. www.360etmemeplus.org


FFM | BEST OF SHORTS

CINÉMA 63

Promesses de femmes Du 28 sept au 6 oct à Marseille, puis du 7 au 15 à Hyères, La Ciotat, Miramas et Martigues, l’association Films Femmes Méditerranée propose, pour la 5e édition de ses Rencontres, une semaine de rendez-vous avec actrices, réalisatrices, techniciennes méditerranéennes. Treize longs métrages pour la plupart inédits, une compétition de courts métrages, organisée aux Variétés dans la soirée du 2 oct et dotée d’un prix de 500 euros décerné par le public. Ouverture légère le 28 sept au cinéma Le Prado avec une comédie de Francesca Archibugi, Questione di cuore, ou «quand un jeune carrossier romain et un scénariste en vogue se rencontrent en salle de réanimation». Le lendemain, présenté par la réalisatrice tunisienne Raja Amari, un huis clos troublant et cruel, Les secrets où on retrouve avec plaisir Hafsia Herzi. Le 30, en partenariat avec AFLAM, Niloofa, film libano-irako-français de Sabine El Gemayel qui rappelle la condition de jeunes filles privées d’éducation, vendues par leur père, dans des pays où «l’honneur» de la famille passe par l’oppression des femmes. Suivra la séance de «rattrapage» pour La Révélation dont l’auteur H-C Schmid, homme et allemand (comme quoi FFM n’est pas sectaire !), rend

La Ciotat I love you C’est sur le film collectif, commandé par Emmanuel Benbihy, New York, I Love You, que s’est ouvert le 9e International Best of short films festival. Les spectateurs qui «cherchent l’amour» ont d’ailleurs été invités à occuper les deux premiers rangs. Le ton est donné : loin de tout protocole, Yvan Le Moine, «Président des généralités», a présenté ses collaborateurs aux amateurs de courts métrages qui ont commencé, dès le matin du 10 sept, à voir les 82 films sélectionnés, répartis en 8 programmes. 18 heures de projection, en trois jours et un seul lieu, le cinéma Lumière. Une séance de courts c’est, en une heure et demie, l’excitante succession d’univers et d’émotions. Mais le cinéma reflétant l’état du monde on ne rit pas souvent, comme devant The New Tenants de Joachim Back, l’histoire de deux hommes qui emménagent dans un appartement dont ils découvrent sur un rythme endiablé, le passé terrible. Ou le film de Frédérick Vin, où Paul Rondin est atteint d’une déformation professionnelle qui l’empêche de trouver l’’âme sœur ! Notons pourtant la réjouissante interprétation de Nanou Garcia dans Annie

Pieds nus sur les limaces © Marcel Hartmann-Le Bureau

hommage au courage féminin contre les bourreaux serbes et les compromis internationaux. Du 1er au 4 oct, au cinéma Variétés, on pourra voir Pieds nus sur les limaces de Fabienne Berthaut (Zib 31), Le regard de Sepideh Farsi, Edouart d’Angeliki Antoniou (un «crime et châtiment» avec rédemption) et deux films traitant de la transmission familiale : Racines d’Eileen Hofer et Le temps des femmes de Firuz Turkuaz. En avant-première, le documentaire social de Mariana Otero Entre nos mains et, temps forts de la

de Francia, un road movie, alerte de Christophe Le Masne. On sort souvent la gorge serrée devant la souffrance, mise en scène dans certaines fictions. Sinner de Meni Philip soulève le voile sur la pédophilie dans les yeshiva (écoles juives ultraorthodoxes) et la souffrance de Yotam, au visage fragile et pâle, superbement interprété par Lior Shabtai, suscite une réelle émotion. De même que Darek, jeune garçon, au visage ingrat qui décide de rentre visite à son père, dans sa nouvelle famille, le soir du réveillon, dans le film du polonais Jonas M Gulbrandsen, qui met en scène les difficiles relations familiales. Tout comme Anna, de Rúnar Rúnarsson qui semble avoir été fasciné par le visage superbe, qu’il filme en gros plans, de Marie Hammer Boda, qui interprète une adolescente au tournant de sa vie. Quant à Kavi de Gregg Helvey, il nous conte l’histoire d’un jeune garçon en Inde, forcé de travailler dans un four à briques alors qu’il voudrait aller à l’école et jouer au cricket. Enfances volées comme celle d’Ella, violée par des soldats, devenue pute, dans le film de la Norvégienne Hanne Larsen. Vieille alcoolique, elle se régale à rendre folles ses auxiliaires de vie jusqu’à ce qu’arrive une jeune Russe. Impossible de rendre compte de tous ces films, aux qualités reconnues par les jurys des plus grands festivals ! En animation, signalons Madagascar, carnet de voyage de Bastien Dubois qui

programmation, deux premières nationales : Le choix de Luna de Jasmila Zbanic, Women whitout men de Shirin Neshat, lion d’argent 2009. À ne pas rater le 5, à la Maison de la Région, la projection d’extraits du web-feuilleton d’Arte : deux minutes de la vie ordinaire de gens ordinaires à Gaza et à Sdérot, filmées en parallèle pendant trois mois. Le même jour Susanna Nicchiarelli présentera Cosmonauta, aventures d’une jeune communiste rêvant d’étoiles et de justice dans l’Italie des années 60. À l’Alhambra le 6 seront proposés Le Défi, une tonique comédie musicale de la chorégraphe Blanca Li et le délicieux documentaire de Nathalie Joyeux, Parures pour

dames. Une sélection exigeante, variée, des débats, des buffets, de la tarentelle napolitaine et du hip hop. Promesses d’une semaine stimulante ! ÉLISE PADOVANI

Films Femmes Méditerranée Du 28 sept au 15 oct 04 91 47 37 14 www.films-femmes-med.org

Palmarès du 9e International Best of Short Films Soleil d’Or Vacsora de Karchi Perlmann

Sable d’argent Annie de Francia de Christophe Le Masnec

Mer de Bronze et prix du public Donde Esta Kim Basinger de Edouard Deluc

Cochonnet d’Or La Carte de Stefan Le Lay

Prix des internautes Meilleure vidéo mobile Connected de Steve Remen

utilise de très nombreuses techniques dont une superbe broderie animée ; Chienne de vie de Serge Avédikian, inspiré d’un fait historique: la déportation massive de milliers de chiens errants sur une île déserte à Constantinople en 1910 et Mei Ling de Stéphanie Lansaque et François Leroy, l’histoire étrange d’une jeune chinoise qui, attendant son amant, décide d’adopter un petit poulpe qui se met à grandir… ANNIE GAVA


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HISTOIRE

LUSSAS | AVIGNON | RUSTREL

Lussas, le village documentaire Comme chaque année, pour la 22e fois, ce petit village d’Ardèche a réuni cinéastes, producteurs, tous ceux qui apprécient les documentaires et permettent qu’ils soient vus. Projections, rencontres, échanges se succèdent dans une ambiance estivale et très conviviale. Pas de palmarès aux États Généraux du Documentaire : des films et deux séminaires, l’un sur les écritures numériques, l’autre sur des expériences radicales autour de films d’Avi Mograbi et Wang Bing. En prenant La Route du Doc, on arrive en Russie et Histoire de doc est consacrée au Danemark, avec pour prolonger un focus sur Jørgen Leth. Une journée SACEM, une journée SCAM avec quatre documentaires dont Nostalgia de la luz de Patricio Guzman (cf Zib 32). Un hommage à Lévi-Strauss et, bien sûr, des films venus d’Afrique, choisis par JeanMarie Barbe, le «créateur» de Lussas.

La région à Lussas C’est dans la sélection Incertains Regards que le public a pu voir deux films venus de Marseille : le premier, produit par Shellac est le travail de Jean-François Neplaz et

Mario Rigoni Stern dans Alpini de Jean-Francois Neplaz

Elisa Zurlo ; le second, produit par l’équipe d’Alexandre Cornu des Films du tambour de soie (Zib 31), est réalisé par Ginette Lavigne. Ces deux films, sur et avec des écrivains sont passionnants parce qu’ils plongent dans leur monde, pas seulement intellectuel, mais sensible et sensuel. C’est ainsi qu’on découvre avec J. F. Néplaz de Film Flamme, l’espace et le temps de Mario Rigoni Stern, un écrivain italien disparu en 2008, à

Asiago. Le film, construit en chapitres, résonne avec l’œuvre de l’«homme de guerre et de paix» rarement filmé, amoureux de la nature, qui, incorporé dans un régiment de chasseurs alpins, prisonnier en Russie dans les années 1940, évoque ses souvenirs, les sentiers sous la neige, ses lectures. On croise aussi Ermano Olmi, Primo Lévi, un berger et ses chiens, un chasseur. Avec Alpini, J. F. Neplaz nous convie à une belle promenade à travers le

territoire de cet écrivain, peu connu en France dont le nom a été a été donné à l’astéroïde (12811) Rigonistern, découvert en 1996. Ginette Lavigne connait Christian Prigent depuis son adolescence et nous propose sa lecture de quatre ouvrages, les plus autobiographiques (Commencement, Une phrase pour ma mère, Grand-mère Quéquette, Demain je meurs). La belle journée, dont le titre renvoie aussi bien à son premier livre qu’à la structure de son écriture, nous montre l’écrivain dans son quotidien, lisant et scandant ses textes, classant ses fragments, en vélo sur son territoire, autour de St Brieuc. Il évoque un drame passionnel, son père, militant communiste, et confie : «Qui on est? J’écris pour savoir ça». La caméra est à la bonne distance, les images en résonnance avec les mots. Un documentaire sensible, qui donne envie d’approcher l’écrivain. ANNIE GAVA

États généraux du film documentaire www.lussasdoc.com

Gens d’ici et d’ailleurs

Histoire du vent est une installation de Joana Hadjithomas et Khalil Joreige que les festivaliers d’Avignon ont pu découvrir à L’École d’Art. Présents déjà en 2009 avec Tels des oasis dans le désert, ils se sont intéressés cette année aux traces du spectacle vivant et c’est à partir du vent qui transforme les scènes qu’ils nous font revivre les grands spectacles de la Cour d’honneur du Palais de Papes. Alternent durant près d’une heure et demie, projetés sur une photographie de 3 m sur 2, extraits de captations et interviews de metteurs en scène, de critiques, de comédiens : vent, métaphore de la passion amoureuse, de l’éphémère, du temps qui passe, de l’esprit des dieux, de la rencontre avec le divin, mistral qui rend fou. Témoignent ainsi de leur rapport au vent Jean-François Sivadier, Frédéric Fisbach, Romain Castellucci, Thomas Osterer, Jacques Lassalle, Wajdi Mouawad ou Antoine de Baecque, et revivent les comédiens de Macbeth, du Prince de Hombourg ou d’Inferno confrontés aux bourrasques et nous renvoyant à notre expérience de spectateurs échevelés… Une belle œuvre qui fixe paradoxalement, par l’image mouvante, la mémoire du vent qui passe...

L’association Pays d’Apt en vidéo, née il y a six ans, a organisé la première édition de Les gens d’ici font leur cinéma, à Rustrel, petit village niché au pied du Colorado provençal : trois journées pour voir des films, penser ensemble et dehors. «Nous sommes des passeurs», ont précisé les organisateurs, et c’est en tant que passeur que JeanPierre Jeunet, dont on a projeté le film Foutaises, a claqué le clap d’ouverture. Se sont succédé films d’amateurs et de professionnels, en particulier, une série de courts métrages, joliment choisis par l’association Cinambule, partenaire de la manifestation. Table ronde autour de l’acte créatif, instants musicaux, apéritifs, sans oublier Les 4 saisons d’Espigoule, en présence de Christian Philibert, qui a clôturé ces rencontres. Une première édition fort conviviale. Les gens d’ici et d’ailleurs ne s’y sont pas trompés; plus une seule place libre sur les gradins devant la salle du château-mairie de Rustrel !

A.G. Histoire du vent © Christophe Raynaud de Lage

Jean-Pierre Jeunet © A.G

Vent à Avignon

A.G.



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ARTS VISUELS

ART-O-RAMA | MAV PACA

Notre Salon expérimental Pour sa 4e édition, Art-O-Rama monte en puissance dans l’espace agrandi et rénové de la Cartonnerie à la Friche de la Belle de Mai. Pour le bénéfice des œuvres et du public Depuis sa création en 2007, Gaïd Beaulieu et Jérôme Pantalacci ont su faire mûrir à chaque édition leur petit format de salon d’art contemporain international. Art-0-Rama 2010 démontre que ces jeunes collaborateurs de la regrettée galerie Roger Pailhas étaient en mesure de créer leur propre projet : un évènement maîtrisé d’ambition internationale. Preuve s’il en faut : autour de l’évènement se fédèrent chaque année d’autres structures marseillaises liées à la création contemporaine, et les partenaires publics et privés impliqués depuis les origines (voir p 10). Et suscitent l’intérêt des collectionneurs. Par la commande de la fondation d’entreprise Vacances Bleues, Boris Chouvellon propose avec Small Illusions et un certain humour acidulé d’allier performance et lit à baldaquin (les montants en bois sont remplacés par des empilements de trophées en forme de coupes). Artiste invité, Pascal Martinez a bénéficié des compétences du Cirva (Centre international de recherche sur le verre, installé à Marseille). Une centaine de blocs de verre translucides renferment entre deux plaques de mica les secrets inscrits sur un bout de papier par des amis. Sa Bibliothèque des secrets

souffre un peu du dispositif didactique (exposition des objets qui ont servi à l’écriture) et de n’avoir pas assez exploité les possibilités plastiques du verre pour asseoir chacun de ces secrets. Une des œuvres marquantes du salon est sans conteste Floating Garden de Motoi Yamamoto présenté par la galerie parisienne L MD. Vaste installation éphémère constituée uniquement de linéaments de sel blanc déposés au sol. Une forme d’expression peu rencontrée jusqu’à maintenant dans le

salon. Par contre, certaines propositions passent un peu inaperçues ou manquent de présence malgré les questionnements retenus : M. Rosler /J.Meckseper/B.Owens (les violences aux Etats-Unis), Lincoln Tobier, Fabrice Samyn (critique sociale), l’exposition de groupe proposée par Triple V très formaliste. Mais on n’échappe pas à Selkirk’s Black Box structure hétéroclite et poétique du collectif belge Projet Diligence ! Cette 4e édition gagne en maturité pour se rapprocher du format des foires d’art contemporain, tout en perdant en retour un peu de ce qui faisait l’identité d’origine d’Art-O-Rama : un grain plus brut et expérimental, qu’elle conserve néanmoins, et qui ne lui interdira pas de grandir encore.

Sculpture installation de Sandro Della Noce pour le show room, 2010 © C. Lorin/Zibeline

CLAUDE LORIN

Artorama Salon international d’art contemporain jusqu’au 19 septembre

À voir également à la Friche L’exposition Exposée Astérides a réuni des œuvres qui interrogent la présentation et la transmission de l’art contemporain jusqu’au 16 octobre nocturnes durant les Journées du patrimoine La Cartonnerie, Friche de la Belle de Mai 04 95 04 95 36 www.art-o-rama.fr Motoi Yamamoto, Floating garden, sel, installation pour Art-0-rama, 2010, galerie L MD, Paris © C. Lorin/Zibeline

De l’inconsistance éléments de l’image se présentent frontalement sans hiérarchie, sans effet de pathos, couleurs contenues, contrastes réduits, lumière étale. Les choses sont là, comme ça, sans motif

évident : un littoral que nous ne voyons plus, livré sans qualités (à la différence de sa précédente série, Variations modernes, sur la Villa Noailles et la côte varoise). «Ca ne m’intéresse pas

de sublimer. Je suis dans un engagement politique, pour revaloriser les codes : je me bats contre le manque de culture de ces espaces». Avec Olivier Ansellem, même l’inconsistance est photographiable. La poétique du bord s’inscrit dans un programme de création photographique et patrimoine avec le soutien du Conseil général des Bouches-duRhône, coordonné par Le Factotum. L’ouvrage éponyme est édité chez Funny Bones. CLAUDE LORIN

Sans titre, 2010 © Olivier Ansellem

Olivier Ansellem a exploré pendant deux années le littoral de La Ciotat aux Saintes Maries-de-la-Mer pour en extraire sa poétique du bord désenchantée. D’apparence décevantes, déceptives selon la récente terminologie, ces photographies de Lieux sans sublime rappellent les froides procédures iconiques de l’école de Düsseldorf et évitent scrupuleusement le pittoresque de carte postale lié au genre du paysage. Les Calanques et la Camargue n’ont donc pas été retenues. Quant aux autres sites, il s’agit plutôt d’une forme de portraits. De portraits d’espaces où toute présence humaine est physiquement absente mais trahie par ses aménagements hasardeux et imparfaits (bordure orpheline, terrain presque vague, restaurant absurde, palissade idiote entre deux vides, installations industrielles immobiles, cabanons improvisés…). Cadrés systématiquement dans de grands formats horizontaux (seule concession académique), les

La poétique du bord Olivier Ansellem jusqu’au 9 octobre Maison de l’Architecture et de la Ville Paca, Marseille 04 96 12 24 10 www.ma-lereseau.org/paca http://lefactotum.blogspot.com


ISTRES | AVIGNON

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Simulacres Les sculptures équivoques de Laurent Perbos ont envahi le Centre d’art contemporain d’Istres. Les œuvres récentes ouvrent sur de nouvelles formes de court-circuitage Comme nombre d’artistes contemporains Laurent Perbos retravaille les mythologies populaires, leurs artefacts, tout en instillant des références plus nobles comme les mythes anciens. Il nous avait habitués à ses détournements de matières (les parpaings en caoutchouc ou en inoxydable, les souches en tuyau d’arrosage…). On retrouve ici ces objets disséminés un peu partout - ce qui dilue malheureusement le propos - et des œuvres nouvelles utilisant toujours des matériaux/objets banals (sandows, crayons…) mais d’une autre facture, marquant peut-être un virage vers d’incertaines figurations. Son Calydon (sanglier mythique) rejoint aussi bien le fantastique des dragons asiatiques que la Tarasque ou le Cheval de la Saint Eloi (Muséon Arlaten) ; dans

une posture humaine rampante il pourrait bien s’agir par ailleurs d’une tournure de Saint Sébastien. Mais de quels maux nouveaux nous protègerait cette forme prophylactique percée de javelots ? D’une certaine forme d’imbécillité matérialisée par une autre de ses dernières créations : un Weebles gigantesque, clinquant, crémeux et dégoulinant, habillé d’astrakan et oscillant pâteusement en culbuto idiot. Dans l’art du réemploi et de l’assemblage Perbos cultive tout autant l’énigme de la représentation confuse : tube métallique, potence de vélo, grip, crayons de couleur rechignent à construire un objet au sens cohérent. Le cartel apposé à côté désigne cependant une chose connue, mais d’une autre

Laurent Perbos, Calydon, 2010, structure metallique, sandows, javelots © X-D.R

nature : «Sans titre (Yucca) 2010». Cela va sans dire. CLAUDE LORIN

Tout l’univers Laurent Perbos jusqu’au 13 novembre

Petite maison dans la prairie D’après nature… les œuvres de 27 artistes et designers se confrontent au domaine du Château d’Avignon. Des propositions singulières, parfois très discrètes Questionnement porteur et d’actualité (l’environnement, l’écologie) la nature passe à la question de l’art contemporain avec une sélection intéressante et variée, même si l’ensemble laisse un sentiment mitigé, par manque d’œuvres décisives. Comment prendre le dessus face à un domaine très présent tant par son site qu’à travers son histoire ? Ici la nature est naturellement partout, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur. Le château est à lui seul une ode à la nature (boiseries, décorations, tentures, ferronneries…) à laquelle répondent avec plus ou moins de bonheur les pièces de design (M. Lehanneur, E. Fouin) et plusieurs œuvres Didier Petit, Les époux, installation pour l'antichambre, 2010 © C.Lorin/Zibeline

peu accessibles (Garouste et Bonetti, L. Aegeter) ou trop discrètes (L. Pelen, P. Navarro). C’est dans leur relation à l’intime qu’elles imposent leur prégnance poétique certaines conçues en correspondance des lieux - (A.L. Sacriste, D. Petit, B. Bauer, M. Ducaté). Dans les bâtiments techniques, les propositions de P.J. Chaussonnet et L. Suchy en restent au jeu alors que Le Chardon, drame filmique de S. Ristelhueber impose sa rugosité sur les pierres lustrées du lavoir. Les vastes espaces du parc ont été peu exploités hormis les installations de Nicolas Boulard, Gilles Desplanques et Richard Nonas (voir p. 75). Quand ce dernier poursuit une esthétique minimaliste datée (deux longs alignements de pierres taillées blanches du Lubéron jalonnant le sous-bois soulignent l’idée de passage), Gilles Desplanques propose un ovni surprenant entre émergence et disparition dans la grande prairie. Marée Haute est conçue en rapport avec l’omniprésence de l’eau (l’herbe comme inondation ?) et interroge plusieurs relations esthétiques et sociales en regard de la demeure du XVIIIe et de son parc paysager : végétal/bâti, château/maison de lotissement, matériaux nobles/pauvres, bourgeois/populaire, luxe/bon marché, parc/jardinet, beau/laid… et achevé/inachevé : les quatre murs de parpaing brut sans toiture à mihauteur d’élévation surgissent-ils du pré, menaçant de défiguration la beauté des lieux par l’esthétique pavillonnaire, ou à l’inverse, son enfoncement dans le sol désigne-t-il une ruine récente promise à l’abandon ? Marée haute serait une vanité moderne… CLAUDE LORIN

D’après nature jusqu’au 31 octobre Domaine départemental du château d’Avignon 04 90 97 58 60 www.cg13.fr

Centre d’art contemporain Intercommunal, Istres 04 42 55 17 10 www.ouestprovence.fr Laurent Perbos expose également à Marseille, VIP Art galerie jusqu’au 13 octobre


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ARTS VISUELS

AIX-EN-PROVENCE

Dialogue mystique Du vivant de Cézanne, l’atelier du maître aixois accueillait déjà Charles Camoin, Émile Bernard, Maurice Denis ou Georges Rouault ; depuis 2006

souffle encore puissant de Cézanne. On découvre, si on est perspicace, le Spot vert orange accroché au mur face à l’entrée, puis on distingue Èdre assis nonchalamment sur le rebord du meuble à dessins avant d’entrapercevoir par-delà la verrière Amour surgissant du feuillage : trois sculptures irradiant de couleur (œuvres rémanentes du prisme cézannien) et de densité (l’épaisseur des matières superposées entretient l’énigme). Trois œuvres spectrales qui trouvent leur prolongement dans le cabanon du jardinier transformé en «chapelle» par un artiste qui a longtemps entretenu une relation fine avec le mouvement théosophique. Là, un autre Spot jaune bordeaux illumine les murs enduits de gris d’où émergent trois Astral et une Sainte-Victoire d’une épure particulièrement bouleversante. Impossible de ne pas ressentir les ondes mystiques qui vibrent entre les œuvres. Formé au métier de ciseleur à l’école Boulle puis designer, Vincent Beaurin développe un langage formel où peinture et sculpture ne font qu’un. Les promeneurs du Jardin des Tuileries ou les visiteurs de la Fondation Cartier pour l’art contemporain à Paris en ont eu récemment un aperçu magistral, déambulant entre des masses monumentales… quand ceux de l’Atelier Cézanne ont eu une version intimiste et minimaliste.

la tradition se perpétue avec Vincent Bioulès, Yves Klein, Ben, Jean Amado, François Mezzapelle qui ont investi le jardin et la cabane du jardinier Vallier. Aujourd’hui c’est Vincent Beaurin qui, sacrilège(?!), installe deux de ses œuvres à l’intérieur même du «lieu saint». Pas sûr cependant que les visiteurs amassés sous la verrière s’interrogent sur cette présence aussi inattendue que discrète ! Par respect pour la vie silencieuse qui s’épanouit ici Vincent Beaurin se met «en retrait», pour mieux faire entendre le

Le Spectre dans l’Atelier de Cézanne, vue générale. Èdre 2010, Amour 2010. courtesy Vincent Beaurin © Gregory Copitet

MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

À cette occasion, les éditions Skira Flammarion publient la première monographie de l’artiste (voir page 74) L’exposition a été présentée du 4 juillet au 29 août à l’Atelier Cézanne, Aix-en-Provence

La chevauchée de Cane frêle équipage composé d’un ange en plâtre libello-tracté par un essaim d’insectes, tirant un chariot rempli de 526 pastels. Le tout en route pour le paradis, n’en doutons pas ! Louis Cane s’amuse avec le sacré, l’enfance, l’histoire, la

mémoire à l’ombre des figures du passé, Picasso, Les Ménines, Cézanne. Ou Monet dont il a peint sur tissu chinois brodé un remarquable Nymphéas sur le motif. Avec la série des Chasubles, il tisse un fil invisible avec les collections, détournant l’art sacré au profit d’un geste profane qui célèbre la peinture. Sans outrager pour autant les vêtements cérémoniels dont on peut lire encore l’évocation biblique sous l’aplat de peinture. Mais Cane c’est aussi des peintures abstraites sur grillage inox, et une Tresse d’une délicatesse inouïe, précieuse chevelure féminine en résine et fil de pêche : une vague de larmes. MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Nympheas, 1995 © X-D.R

Après que l’on a traversé le musée des Tapisseries, la présence de Louis Cane devient une évidence. Parce qu’il rassemble un ensemble de Chasubles en résonance avec l’ancien Archevêché ; parce que ses œuvres récentes ont à voir avec la trame, le tissu, le textile, les toiles imprimées ou brodées. Des tapisseries anciennes à la bâche ou au grillage… peu importe le support, il y a l’exaltation de la couleur et le travail d’orfèvre. Depuis les années 70 et le groupe Supports/Surfaces, Louis Cane n’a cessé de développer son langage en abordant la résine, le bois, la pâte de verre, le plastique ou le fer. Un ensemble d’œuvres se découvre ici dans une mise en espace astucieuse qui privilégie l’effet de surprise, particulièrement pour les sculptures. Dès l’entrée un vent de fraîcheur ironique fouette le regard et invite à jouer. D’abord avec la Poussette aux jumeaux sculptée en bois de chêne peint dont le visage maternel aurait pu être dessiné par Picasso, puis à La balançoire plastique composée comme un jeu d’enfant dans une cour d’école. Avant d’être saisi par l’envol gracieux de L’ange Gabriel apporte les couleurs au groupe Supports/Surfaces mais surtout à Louis Cane : un

Louis Cane jusqu’au 20 septembre Musée des Tapisseries, Aix-en-Provence 04 42 23 09 91 www.aixenprovencetourism.com/aix-tapisserietipi.htm Ouvrage édité par l’Abbaye Saint André, la Ville d’Aix et la galerie Bernard Ceysson, 28 euros


LA CIOTAT | LE LAVANDOU

ARTS VISUELS

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Une vitrine vivante 20 photographes, plasticiens et peintres s’étaient donné rendez-vous durant un mois à la chapelle des Pénitents bleus à La Ciotat pour le festival Les Arts en chantier qui, en trois éditions, a gagné son pari : permettre à tous les publics d’accéder à l’art d’aujourd’hui. Exposition gratuite, marché de l’art en plein air ouvert aux professionnels et aux amateurs, 5 spectacles en nocturne à 5 euros l’entrée, programmation éclectique (musique, danse, performance, théâtre…) : tout avait été mis en œuvre par l’association Artistic promotion et la Ville de La Ciotat pour que cette «manifestation populaire soit un moment de partage en famille». Dans la chapelle d’où émergeait en son centre la sculpture-totem de Robert Moro, les grands formats de Jacqueline Bilheran-Gaillard aux formes enchevêtrées ont tiré leur épingle de l’accrochage, tout comme les volutes de métal sculpté d’Éric Jaine. En contrepoint aux plasticiens, un nouvel espace dédié à la photographie était imaginé par Philippe Oddoart -lui-même photographe- autour du thème du paysage. C’est le road-movie urbain d’Éric Principaud qui a retenu notre attention avec sa série D’une ville…à l’autre, lentes pérégrinations à cette heure trouble du jour, entre chien et loup… Dedans-dehors, les micro-événements ont rythmé

le festival. On pense notamment au spectacle de Caravane pirate qui offrit le soir de l’inauguration un interlude musico-théâtral en noir et blanc du plus burlesque effet, d’agréables saynètes qui revisitaient les fameuses Histoires sans paroles de notre enfance servies par un talent généreux. Ou encore la pièce de théâtre Le grain et l’ivraie jouée par Arnaud Zemichod qui, sur les improvisations du musicien Benoit Bottex, fit résonner d’entre les œuvres une belle complainte poéticoécologique. Dans un décor astucieux de bric et de broc, le comédien interpréta tour à tour, et avec justesse, l’oracle, le rouspéteur, le jardinier, la mer qu’on voit danser le long des golfes clairs et mille autres encore… Enfin, dans «Le festival fait salon», les dessins de Jocelyne Bouvard ont vite attiré notre regard, référencés par ailleurs dans l’édition 2010 de l’Art du nu publié chez Patou. Des œuvres réalisées «dans l’urgence» par une artiste vauclusienne qui a su saisir l’opportunité du festival pour tenter une première approche de la ville. En attendant de figurer bientôt dans le «In», à la chapelle… MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Le 3e festival Les Arts en chantier s’est déroulé du 27 juillet au 15 août à La Ciotat

Caravane Pirate en ouverture du festival Les Arts en chantier © Dan Warzy/Zibeline

À venir À voir jusqu’au 26 septembre, toujours à la chapelle des Pénitents bleus, la rétrospective et les peintures récentes de Gilbert Ganteaume dont l’œuvre s’inscrit dans l’histoire de La Ciotat (fresque dans la salle des fêtes, monument pour la Paix, mémorial dédié aux victimes de l’amiante…).

Un souffle flamboyant C’est la rencontre de deux astres : Marcel Van Thienen, «Marcel le Flamboyant», sculpteur et musicien, et Lalan, peintre, chorégraphe, musicienne. Un couple mythique qui partagea son temps entre Paris et le Var jusqu’à l’accident mortel de Lalan en 1995, et la volonté de Van Thienen de léguer à la ville du Lavandou l’intégralité de ses sculptures et une partie des peintures de son épouse. Ainsi naquit le Réseau Lalan animé par le photographe Raphaël Dupouy, chargé par Van Thienen - disparu en 1998 - d’entretenir la flamme et de faire vivre leurs œuvres… Aujourd’hui les voici à nouveau réunis pas la magie d’une exposition pensée comme un dialogue silencieux, une correspondance sensuelle entre les mobiles sonores de l’un et les toiles abstraites de l’autre. Des œuvres inédites choisies dans «la collection du Lavandou» par Raphaël Dupouy qui réalisa un court-métrage émouvant où l’on voit Lalan danser dans son atelier quatre jours avant sa disparition… Ce n’est pas tant la qualité des œuvres, irréfutable, que la combinaison des deux univers qui

enchante. Celui des sculptures animées de Van Thienen, fascinantes par leur aspect ludique : «d’un mouvement simple comme la rotation, souligne Raphaël Dupouy, il créait un aléatoire voulu, souvent programmé», attachantes par leur musicalité réelle ou évocatrice ; celui éthéré des paysages évanescents de Lalan, muse de Zao Wou-ki et amie d’Henri Michaux. Comme la

complémentarité entre un autodidacte passionné de technologie qui composa notamment «une mise en scène sonore» d’un texte d’Henri Michaux et une artiste au confluent de deux cultures qui participa à de nombreux spectacles pluridisciplinaires. En regard les unes des autres, les œuvres trouvent ici une juste résonance. Face à cet événement éphémère, Expo Lalan VanThienen au Lavandou © R.D.

une question se pose : pourquoi ne pas offrir une visibilité permanente à la collection du Lavandou, riche de quelque 200 pièces confondues ? Quand on a un tel «trésor», il est bon de le partager. M.G.-G.

L’exposition Lalan, Van Thienen, la collection du Lavandou a été organisée du 6 juillet au 12 septembre à l’Espace culturel du Lavandou

À venir Le Réseau Lalan propose au Musée arts et histoire de Bormes-les-Mimosas l’exposition Baigneuses consacrée aux œuvres picturales réalisées sur ce thème dans la cité balnéaire, des grands noms classiques aux artistes contemporains. Un catalogue est édité dans la collection «Le Regard de la mémoire» (63 pages, 25 euros). jusqu’au 17 octobre 04 94 71 56 60


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ARTS VISUELS

TOULON | LE THORONET

Morandi en camaïeux Et si Giorgio Morandi était aussi metteur en scène ? Si l’irréalité de ses natures mortes tenait à ce théâtre d’objets dont il est le grand ordonnateur ? Dans ses compositions géométriques très élaborées -dont la gamme chromatique tranche avec la réalité- les objets deviennent ses «personnages». Comme s’il écrivait une pièce à une voix, coupée de longs silences (camaïeux de blancs aux tonalités sourdes) et sensuelle (harmonie des courbes et des formes).

Troublantes questions qui viennent à l’esprit à l’issue de l’exposition proposée à l’Hôtel des arts. À force de chercher «à exprimer ce qui est dans la nature, c’est-à-dire dans le monde visible», Giorgio Morandi est paradoxalement parvenu à l’abs-traction du réel qu’il a sublimé. Et le visiteur attentif à la fausse banalité des objets, les découvrira immortalisés par la peinture : bouteilles, cruches, outils, livres, chevalet… Des objets aimés qu’il ne reproduit pas mais qu’il réinterprète ! Du

théâtre, là encore, dans l’ordonnancement architectural des formes sur la toile, le mariage subtil des tons, des matières et de la lumière malgré la pauvreté du thème (notamment les bouquets de fleurs), les recherches minimalistes… Un vocabulaire élaboré à l’ombre de Maîtres dont on découvre l’influence à travers une sélection d’ouvrages personnels : Rembrandt, sa grande référence pour la gravure, plus inattendu le douanier Rousseau qui l’influença pour les bouquets, Cézanne qui marqua sa jeunesse. D’autres encore, révélés dans des livres que la commissaire d’exposition a ouvert aux pages si souvent feuilletées… Introduite par 10 photographies de Luigi Ghirri réalisées dans les ateliers de l’artiste -dans une intimité confondante et une précision telle que l’on peut lire les références des crayons à papier qu’il utilisait- la conversation avec le Maître de Bologne s’achève sur 4 des 10 toiles peintes à l’identique en 1952. Même cadrage central, même fond découpé en bandes horizontales, mêmes objets neutres, sauf que tout y est différent : «la vérité, écrit Morandi, ne peut pas être appréhendée d’un seul coup d’œil».

Giorgio Morandi, Nature morte avec noix, 1963, Huile, Collection privee Milan (Italie) ⓒ ADAGP, Paris 2010

MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

L’abstraction du réel Giorgio Morandi jusqu’au 26 septembre Hôtel des arts, Toulon 04 94 91 69 18 www.hdatoulon.fr

Quelle leçon ! Lux Sonus, installation de Patrick Berger au Thoronet © Guy Antonietty-MAV

Initiées en 2007 par la Maison de l’architecture et de la Ville Paca, le Centre des monuments nationaux et la Drac, Les Leçons du Thoronet 2010 nous plonge dans un grand désarroi. Pourtant l’idée «de proposer à un grand nom de l’architecture de mener une réflexion sur le bâtiment cistercien et de réaliser une intervention réversible» est judicieuse, et le trait d’union entre patrimoine et art contemporain pédagogique. Mais de l’intention à la réalité, le fossé est immense : in situ le public est livré à lui-même dans un labyrinthe qu’aucune signalétique ne vient guider (sauf à suivre les visites commentées), et passe sans s’en apercevoir devant les bancs de John Pawson, la flèche d’Alvaro Siza et le mur oublié de Luigi Snozzi au-dessus duquel figure un panneau fléché «W.C.» ! Quant à la toute nouvelle réalisation de Patrick Berger, Grand prix national d’architecture 2004, elle a été reléguée sans autre forme de préavis dans l’armarium ! Inaugurée officiellement en juin dernier dans le transept sa destination originelle - avec tapis rouge et vraie mise en scène, Lux Sonus la bien nommée a été remisée dans un espace contigu entre l’église et la salle capitulaire. C’est dire si cette œuvre pensée par Patrick Berger en écho à «l’architecture de l’église [qui] n’a pas été dessinée pour le

regard mais pour créer le dispositif d’une dynamique d’effets transformant la lumière en son» tombe à l’eau. Qu’en pense l’artiste ? On n’en saura rien : il n’est pas au courant… Et l’hostie figurée à l’intérieur ? Et le savant réfléchissement avec les vitraux de l’église ? Rien de tout cela puisque Lux Sonus, plongée dans l’obscurité (un comble !), ne laisse aucun regard l’embrasser dans sa totalité. Bref, d’une intervention majeure il ne reste que les effets contraires à ceux escomptés : ignorance de l’œuvre, détournement du public vis à vis de l’art contemporain et mécontentement de tous ceux qui souhaitaient la voir. Seul l’ouvrage publié à cette occasion permet de saisir, entre notes et croquis, la rencontre entre Patrick Berger et un site religieux, sa marche dans et autour du Thoronet, l’émergence de l’œuvre «Lux et Sonus, la lumière se transforme en son». Ici invisible et inaudible. MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Lux Sonus Patrick Berger jusqu’au 31 octobre Abbaye du Thoronet, Le Thoronet 04 94 60 43 90 www.monuments-nationaux.fr


© Agnes Mellon

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En coulisse

Face à la richesse de la vie, à la beauté d’un corps ou d’un sentiment, Agnès Mellon a «décidé à l’aide d’un appareil photo de remplacer la parole par l’image» : aujourd’hui photographe indépendante, notre collaboratrice livre une part d’elle-même en dévoilant 12 portraits réalisés lors de séances de maquillage d’artistes. Une exposition joliment nommée Intime coulisse à découvrir dans le hall d’un théâtre qu’elle connaît bien, Les Salins. M.G.-G.

Intime coulisse Agnès Mellon du 13 septembre au 15 octobre Théâtre des Salins, Martigues 04 42 49 02 00 www.theatre-des-salins.fr

Intemporel Entre natures mortes et paysages, le travail de Michel Graniou est marqué par le temps, la mémoire, comme s’il s’agissait de laisser à tout prix une trace… Rien d’étonnant s’il est actuellement en charge de l’iconographie photographique du patrimoine des Alpes-Maritimes pour les services départementaux de l’inventaire, et s’il use de procédés techniques traditionnels. Sauf qu’il invente un vocabulaire neuf et pose un regard résolument contemporain sur les choses. M.G.-G.

Les âges de la mémoire Michel Graniou du 5 octobre au 23 novembre Galerie du théâtre La Passerelle, Gap 04 92 52 52 52 www.theatre-lapasserelle.eu

> © Michel Graniou


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ARTS VISUELS

AU PROGRAMME Hommage Pour sa première édition, Aix Itinéraires de l’art, organisé par quelques galeries appartenant au GUDGI, met au jour l’œuvre de l’artiste aixois Jean-Marie Sorgue disparu cette année. Un parcours-expositions conçu comme un témoignage de l’homme et de l’artiste par la galerie Alain Paire avec la complicité de la galerie Ardital qui fut la dernière à promouvoir son travail… Au total, quelque 18 lieux intra et extra-muros composent cette partition ponctuée de moments de rencontres à la Cité du livre, et en point d’orgue, d’une «Conversation entre amis» à la galerie du Lézard (13 octobre). M.G.-G

Hommage à Jean-Marie Sorgue (1924/2010) du 14 septembre au 16 octobre Parcours-expositions, Aix-en-Provence 04 42 24 03 03

© Jean-Marie Sorgue

Naturellement ? Il ne faut pas s’y tromper : les dispositifs de Valère Costes à la Galerieofmarseille ne sont pas de même nature… Les uns sont des constructions hybrides entre faune, flore et robotique ; les autres, sous forme d’un bricolage expérimental, font sienne la théorie de Clément Rosset selon laquelle «l’idée de nature ne serait qu’une erreur et un fantasme idéologique». Dans les deux cas ils sont nés d’une immersion prolongée de l’artiste en forêt tropicale. M.G.-G.

Dumping Nature Valère Costes du 11 septembre au 30 octobre Galerieofmarseille, Marseille 09 53 10 15 26 www.galerieofmarseille.com

Valere Costes, Clouding Process, 2008 © X-D.R

En marge Influencé par le Surréalisme, auteur de collages (un jeu de l’oie surprenant sur Paris pendant l’occupation), photomontages et travaux publicitaires, co-auteur d’éditions avec Cocteau de La Mort et les statues ou Plain-Chant, Pierre Jahan (1909-2003) est resté dans l’ombre de l’histoire photographique du XXe siècle. L’exposition du musée Réattu et un catalogue avec un texte inédit de Michel Frizot chez Actes Sud viennent combler ce quasi oubli. C. L.

Pierre Jahan, Libre cours jusqu’au 31 octobre Musée Réattu, Arles 04 90 49 37 58 www.museereattu.arles.fr Etude 125 pour Plain-Chant Jean Cocteau, 1947. courtesy galerie Michele Chomette, Paris © Pierre Jahan Roger-Viollet Stock Exchange de Sylvie Reno, l’une des lauréats 2009 © X-D.R

Les lauréats 2010 Au Palais de la Bourse, seuls quelques heureux élus parmi 78 prétendants auront la chance d’exposer leurs œuvres sélectionnées pour le 3e Concours artistique de la CCI Marseille Provence. Mais le secret est bien gardé : leur nom sera connu le soir même de l’inauguration le 24 septembre… Pour les plus chanceux, la CCI pourrait acquérir quelquesunes des œuvres qui constitueront au fil des éditions sa collection permanente. M.G.-G.

3e Concours artistique de la CCI Marseille Provence du 24 septembre au 17 décembre Galerie Temporaire du Musée, Palais de la Bourse, Marseille www.ccimp.com


ARTS VISUELS 73 Inspirations taurines Manet s¹était-il déjà inspiré du Soldat Mort attribué à Velasquez ? Chambas, Koshlyakov, Di Rosa, Fanti, Lacroix, Le Gac et Louisgrand proposent ici leur interprétation personnelle du Toréador mort du même Manet. L¹emprunt facteur de renouvellement artistique ? Jean-Paul Curnier pointe ces enjeux dans le livre édité chez Actes Sud. L¹exposition est complétée des photographies de Léa Crespi. Ces projets s¹inscrivent dans la préfiguration du futur Centre d¹Art Contemporain consacré au territoire arlésien. C.L.

Le toréro mort jusqu¹au 31 octobre Saint-Laurent-Le-Capitole, Arles 04 90 96 95 25 www.lemejan.com

Herve Di Rosa, Un autre torero mort, 2010 © X-D.R

Jumelles Le 50e anniversaire du jumelage Aix avec la ville de Tübingen favorisant aussi les rapprochements esthétiques, photographes outre-rhin et du territoire provençal confronteront leurs regards sous les cimaises du musée des Tapisseries et à la galerie de la Fontaine Obscure. Le Off à découvrir en divers lieux de la ville aux plus curieux des passants. Vernissages commentés par Jean Arrouye, itinérants avec Alain Marsaud.

Phot¹Aix 2010 Regards Croisés Tübingen-Aix du 4 octobre au 7 novembre divers lieux, Aix 04 42 27 82 41 www.fontaine-obscure.com

Bargoni Pensieri e colore, 2010, Huile sur toile, Collection particuliere © X-D.R

Expressions

© Alice Angeletti

C.L.

Ses premières œuvres abstraites furent exposées en 1958, nourries de l¹expressionnisme abstrait américain et de l¹art informel. Pour l¹heure, ce seront près de quarante toiles de grand format que présentera Giancarlo Bargoni pour la première fois depuis leur conception dans son atelier de Castell¹Aquarto, en Emilie, où la lumière est dit-on si particulière. Catalogue, vernissage le 18 septembre, conférences sur l¹art contemporain avec Elisa Farran. C.L.

Sur les pavés En containers et à l¹air libre, Place aux Huiles et alentours : peintures, sculptures, photo, installations et performances, street art et musique baroque, danse, peintures urbaines participatives, contes lyriques, vente aux enchères informelle et œuvre collective des lycéens de La Cabucelle. Et les POC (Portes Ouvertes Consolat) s¹associent à l¹évènement. C.L.

Mouvart 2010/ Rêver la ville du 6 au 10 octobre Cours d¹Estienne d¹Orves, Marseille 06 20 97 63 01 www.mouv¹art.fr Portes Ouvertes Consolat du 8 au 10 octobre Quartier Consolat, Marseille www.assopoc.org

Perception, volume éphémère, ébauche du projet pour Mouv’art 2010 © Richard Aiguier

Giancarlo Bargoni du 18 septembre au 28 novembre Musée Estrine, Saint Rémy 04 90 92 34 72 www.ateliermuseal.net


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LIVRES/ARTS

Dans l’atelier de Cézanne

La première monographie de Vincent Beaurin, publiée à l’occasion de son exposition à L’Atelier Cézanne (voir page 68), permet une immersion originale dans son univers. On y appréhende ses motivations profondes comme on chemine dans les méandres de sa pensée grâce à un entretien à plusieurs bandes, à la manière d’une partie de billard ! Après la préface de Michel Fraisset rappelant «le rôle du muséeatelier » qu’il dirige, place à un dialogue croisé avec Samuel Dubosson, Sonia Beaurin, Delphine Coindet et le peintre Jean-Michel Alberola. Le sculpteur se révèle un conteur talentueux : sur la couleur et les liens qu’il tisse avec elle, sur son activité favorite qui consiste à «faire des statues», sur le trompe-l’œil qui sied particulièrement à son intrusion cézanienne… À ces interviews réunies sous le vocable Brassage, Vincent Beaurin répond par une évocation poétique et tendre de son enfance, de ses années de formation dans un atelier de ciselure de l’école Boulle, sa découverte de la peinture, Malévitch et le Suprématisme. De ses années design et de son immersion dans une certaine

intelligentsia parisienne… Tantôt imagées ou réalistes, souvent piquantes, ses paroles passent de la sphère intime aux événements collectifs qui dépeignent la vie d’une époque. Avant que Jean-Michel Alberola ne le rappelle à Cézanne en l’interrogeant d’un «L’Atelier d’Aix est-il à l’intérieur ou à l’extérieur ?»… Trois courts textes de 2007 et 2009 signés de l’artiste ponctuent ce recueil d’œuvres : Basilic dans lequel il évoque ses sculptures organiques, Creuset en regard de sa pièce réalisée à partir de ramures de renne rapportées de Sibérie, et Spectre qui dit sa découverte de l’Atelier. Là où il s’est assis naturellement et est resté «tranquille comme une nature morte». À l’ombre de Cézanne qu’il compare à «un astre». MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Le Spectre dans l’atelier de Cézanne Éd. Skira Flammarion, 40 euros Ouvrage publié avec le soutien de Mécènes du Sud

Le dur repos Saluons la belle initiative des Éditions Parenthèses de publier l’émouvante analyse de l’œuvre du peinte abstrait Nicolas de Staël par son ami et homme de lettres Guy Dumur. Remarquablement écrit il y a 35 ans, cet essai qui a vu le jour grâce au concours de la sœur de l’auteur a été agrémenté de documents iconographiques de grande qualité et de correspondances idoines au sentiment de dualité envers la peinture qui torturait intérieurement l’artiste, au point de se donner la mort tragiquement à 41 ans. Reconnu comme un artiste majeur de son temps, le peintre serait-il le dernier chainon manquant d’une histoire débutant avec les mosaïques de Ravenne pour

s’achever avec les abstraits des années 50 ? Son œuvre située «au confluent du passé et du présent» est mise en lumière à travers un regard saisissant ou Le combat avec l’ange se substituerait à l’œuvre de sa vie. FRÉDÉRIC ISOLETTA

Nicolas de Staël, Le combat avec l’ange Guy Dumur Éd. Parenthèses, 13 euros

Porte-folio : vingtième !

Avec vingt années et quelques broutilles d’existence, l’Artothèque du lycée Antonin Artaud poursuit résolument la promotion et diffusion de l’art contemporain auprès de son jeune public et bien audelà de ses murs. Pour cette rentrée ? Expositions, rencontres, édition des Cahiers de l’Artothèque et de son troisième porte-folio. Selon la formule des précédents publiés pour les anniversaires des 10 puis 15 ans d’activité ininterrompue «Chers artistes, donnez-nous de vos nouvelles» - volume III réunit les estampes originales créées pour l’évènement par 45 des artistes qui ont fréquenté cette structure unique dans un établissement scolaire. L‘impression a été confiée de nouveau à l’atelier de sérigraphie de JeanPaul Portes sis à Marseille. La souscription de 200

euros court jusqu’au vernissage… et sera de 300 euros ensuite. Vernissage le 5 oct à 18 heures, exposition des œuvres jusqu’au 22 oct. Voici une belle opportunité de soutenir ce travail précieux de service public. C.L.

Chers artistes, donnez-nous de vos nouvelles, volume III Porte-folio et exposition jusqu’au 22 octobre Artothèque Antonin Artaud, Marseille 04 91 06 38 05 www.lyc-artaud.ac-aix-marseille.fr/artothèque Didier Tisseyre, l’un des 45 artistes du Porte-folio © X-D.R


LIVRES/ARTS75

Clarté et confusion

Ce livre est publié dans le cadre d’un projet de créations sur trois ans du sculpteur américain Richard Nonas en région Provence-Alpes-Côte d’Azur avec l’Atelier Archipel en Arles et le Musée Gassendi de Digne. Il a débuté cette année avec une installation dans le cadre de la manifestation D’après nature au Domaine du Château d’Avignon (voir p 67). Cependant Fieldwork ne vous livrera aucun détail sur ces projets puisqu’il est entièrement consacré à l’atelier new-yorkais de l’artiste. 150 photographies en noir et blanc réalisées par l’artiste lui-même comme les quelques lignes sur ses propres intentions en anglais et en français. Un ouvrage émouvant où l’univers de l’atelier se partage et se parcourt à la manière d’un paysage selon différents focus, le regard à multiples hauteurs et distances des objets qui constituent cet espace intime et subjectif de la création.

Pour ceux qui ont pu voir ses sculptures, le contraste est saisissant entre le capharnaüm du lieu d’invention et l’esthétique dépouillée de ses œuvres qui en proviennent, trop facilement rangées par certains dans la catégorie du minimalisme. «C’est la tension que je veux ; le malaise que même des lieux familiers peuvent susciter - les significations complexes qui s’échappent, mais pas trop loin». Pour rencontrer ces prochaines créations il faudra donc se rendre en 2011 au hameau des Viaires dans la Réserve Géologique de Haute Provence, et au théâtre antique d’Arles en 2012. C.L.

Fieldwork Richard Nonas Éd. Analogues, 29 euros

Sauvageons de l’art Édité à l’occasion de l’exposition de Mathieu Clainchard (Triangle France, Friche de la Belle de Mai, Marseille 2010), Outskirting constitue le premier catalogue raisonné des Bad Beuys Entertainment pour lesquels l’art était aussi un mode de vie. Survêt’/basket/casquette à l’envers, abribus, hip-hop et banlieue pour les stéréotypes mais aussi l’école d’art de Cergy Pontoise et Joseph Beuys, Art&Language, l’Esthétique Relationnelle entre autres modes référentiels, afin de détricoter les mythologies de leur époque, du conditionnement par le divertissement en particulier, c’est-à-dire de notre société du spectacle version banlieues. Non sans humour et dérision. Une première partie de l’ouvrage situe le travail de ce collectif/entreprise artistique à géométrie variable dont il ne subsiste que très peu d’œuvres - avec les

textes de Dorothée Dupuis (Triangle), Hanne Mugaas qui collabora avec le groupe, Keren Detton. La seconde constitue le catalogue raisonné appuyé sur de nombreux documents, textes critiques et photographies. Enfin, il faut parcourir le lexique pour appréhender cette posture critique et facétieuse des BBE. Exemples : «2ème% : réplique grossière. Voir 1% artistique» ou les définitions suivantes de Disney, Survêtement, Ville Nouvelle… En français et en anglais. CLAUDE LORIN

Outskirting Bad Beuys Entertainment 1999-2007 Monogragik éditions/Triangle France, 25 euros

L’art à la machine

Espace public, théâtralité, mouvement, prouesses, émotion. Les arts de la rue ont leurs prophètes. Ancien compagnon de rue des Royal de Luxe, actuellement directeur artistique de la compagnie La Machine à Nantes, auteur des présents textes et dessins, François Delarozière nous fait entrer de plain pied dans la fabrication de son univers phantasmatique et fabuleux à partir de ses projets récents : du croquis d’après nature aux esquisses préparatoires et dessins techniques annotés, en alternance avec de nombreuses photographies de plusieurs auteurs… On se prend ainsi aux extravagances ingénieuses de cet art un peu forain de la machine, toujours conçue à l’échelle monumentale de la ville. «Elles [les machines] ont

pour unique mission de provoquer des émotions et du rêve». On ajoutera volontiers la fête ! Qui pourrait oublier le Grand Eléphant à Nantes, le Manège Carré Sénart ou l’Araignée géante qui fit sensation à Liverpool, capitale de la culture en 2008 ? À relire du même auteur chez le même éditeur Le Grand Répertoire des machines de spectacle (2003). En français et en anglais. C.L.

Carnets de croquis & réalisations François Delarozière Éd. Actes Sud/La Machine, 29 euros


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DISQUES/LIVRES

MUSIQUE

Variations classiques C’est l’une des raisons d’exister de la maison Lyrinx, conçue comme une vraie mission, que de promouvoir des pianistes. La collection «Talents» qu’édite la famille Gambini en révèle régulièrement, comme c’est le cas pour Chara Iacovidou. Après un CD Schubert-Ravel en 2002, elle propose un programme consacré au principe des «Variations», modifiant, en plusieurs étapes, un thème par différents procédés d’ornementation mélodique, de changements rythmique,

Réédition

Brigitte Engerer, cheville ouvrière du festival de La Roque d’Anthéron, que les mélomanes ont pu apprécier à nouveau cet été (voir p 24), est sans conteste l’une des pianistes françaises les plus impressionnantes. Sa technique sûre, son jeu puissant et généreux en fait l’une des virtuoses les plus présentes sur les scènes mondiales. On rappelle que, surdouée, il y a une trentaine d’années, elle fut lauréate des trois concours parmi les plus prestigieux : Long, Tchaïkovski et

«Chosta» révélé

Il est fascinant de constater comment Chostakovitch, qui autour de 1950 subit une pression extrême du régime soviétique, parvient à livrer un tel monument de l’histoire du clavier. Ses 24 Préludes et Fugues prennent modèle chez Bach bien sûr, mais sont conçus comme un cycle d’une richesse sonore, polyphonique, tonale et esthétique fabuleuse. Les Préludes se souviennent de passacailles anciennes ou flirtent avec l’École de Vienne, les Fugues, aux thèmes parfois

harmonique, dynamique… jusqu’à le rendre parfois méconnaissable. La Grecque focalise son beau travail sur des opus du trio classique viennois (Mozart, Haydn et Beethoven) composés à la fin du 18ème siècle pour clavecin ou pianoforte, ici joués avec beaucoup de finesse et de goût sur un Steinway moderne. J.F.

CD Lyrinx LYR 260

Reine Elisabeth. Dans la foulée, en 1983/84, elle livrait les 3 Klavierstücke D.949, la Mélodie hongroise en si mineur, les 4 Impromptus de l’op.90, D.899 et des Lieder transcrits par Liszt une dizaine d’années après la mort du Viennois. Des 33 tours réédités et des inédits en CD. J.F.

CD Decca 4803475

improbables, sous leur aspect volontairement spartiate, développent des univers d’une variété ahurissante. Sous les doigts d’Alexander Melnikov (voir p 24), ce chef d’œuvre, méconnu ou sous estimé, crève le rideau de l’histoire et éclate au grand-jour. J.F.

2CD + DVD bonus interview, Harmonia Mundi HMC 902019.20

Les bons tuyaux

Voici un livre passionnant sur une histoire de Marseille, vue par le prisme de ses orgues actuels, disparus, aménagés, déplacés ou rénovés durant plusieurs siècles… Jean-Robert Cain et Robert Martin, tous deux organistes grandement impliqués dans l’inventaire et la restauration des instruments régionaux, en collaboration avec les Editions Parenthèses, livraient en 2004 le fruit d’un labeur impressionnant, de recherche scrupuleuses dans un ouvrage grand format, richement illustré de commentaires instructifs, de photographies et documents d’archives. Ce travail ne s’adresse pas seulement aux organistes et amateurs de tuyaux, claviers

et autres pédaliers (des détails techniques sont fournis pour chaque instrument répertorié), mais offre un véritable guide touristique aux flâneurs qui, de quartiers en arrondissement, aimeraient découvrir des trésors souvent ignorés. C’est un précieux témoignage du développement social, culturel, religieux, architectural de la cité phocéenne et un hommage aux grands facteurs d’orgues, à leurs interprètes. On y trouve même un «éphéméride» qui relate tous les évènements recensés, liés aux orgues régionaux depuis… 1274 ! Depuis 2004, quelques orgues marseillais chantent de nouveaux, ont heureusement retrouvé éclat et couleurs comme à St Julien, Montolivet, Notre-Dame du Mont, les Réformés, St Michel grâce à l’effort

conjugué de passionnés et les finances municipales. Reste au curieux à découvrir les magnifiques instruments de St Théodore (1er arr. - XVIIIe siècle), le Cavaillé-Coll de St Joseph I.M. (6e arr. - XIXe siècle), celui de St Victor (reconstruit entièrement en 1974 sur des tuyaux des XVIIe et XVIIIe siècles) et tant d’autres… Outre leur attrait sonore (lors de concerts programmés dans ces lieux) ce sont également de magnifiques constructions, finement travaillées et sculptées qui ravissent l’œil (voir festival de Rocquevaire p45). JACQUES FRESCHEL

L’orgue dans la ville Éd. Parenthèses, 49 euros

Êtes-vous Funky ? Composé sur un livret d’Alberto Manguel, Un retour d’Oscar Strasnoy invoque un univers sonore moderne faisant la part belle aux percussions, au piano, à un duo de cuivres qui, en compagnie de solistes et d’un chœur minimaliste, illustre le retour d’un homme en Argentine après trente ans d’absence. Dans la mise en scène de Thierry Thieû Niang, cet opéra a été l’une des réussites du festival d’Aix au Grand Saint Jean cet été (voir Zib 32). Comme à son habitude, Musi-

catreize (dir. Roland Hayrabedian) publie un livre-disque qui permet de suivre texte et musique au fil de planches illustrées (signées Antonio Segui). Un monde étrange sur la mémoire et l’oubli, la permanence, les fantômes, l’exil et l’errance à l’antique, l’éternel et irréaliste renouveau ! J.F.

Livre-CD aux éditions Actes Sud, 25 euros


DISQUES 77

Complètement Dada S’il était judicieux d’établir un lien entre l’histoire de l’art et les si peu orthodoxes Sexy Sushi, un seul mot ferait tilt : Dada. Bien loin de considérations phraséologiques cérébrales, le duo nantais le plus fou du monde, exilé dans la capitale, n’en a pas fini de faire parler de lui. La découverte du nouvel opus intitulé tout simplement Cyril ne pourra que confirmer ces paroles sensées. Electro-déjanté et provocateur à souhait dans le texte, la bête sauvage et indécente aux quatorze titres se dompte après quelques écoutes et une concentration accrue. Et bien

que l’accoutrement inqualifiable du binôme séditieux nous invite à nous cacher les yeux (des perruques aux lunettes, il faut choisir…), la désacralisation réinventée et poussée à l’extrême fait un bien fou aux oreilles. Et pour les chanceux (ou les curieux), leur performance scénique se vit, elle ne se raconte pas ! FRÉDÉRIC ISOLETTA

Cyril Sexy Sushi Scandale Records

Fraîcheur de vivre

Entre le sérieux des sujets abordés et la légèreté des quatorze chansons qui composent le nouvel album des Tit’Nassels, ils ont trouvé un juste équilibre avec une platine qui n’aime pas les extrêmes. Très à l’aise avec des airs entrainants et festifs, le duo atypique sonne plus que bien et donne un coup de fraicheur au paysage chansonnier français avec ses instruments qui revigorent : mélodica, accordéon, xylo, kazou... Même pas mal n’affiche pas des grands airs affectés mais nous parle de nos existences, de ce qu’on vit, tout en respirant une belle gaité musicale. Prévu pour octobre

Rock & folk

Originaire de la ville éponyme de Caroline du Nord, le leader et compositeur de Chapel Hill a bien roulé sa bosse de son Amérique natale à la conquête outreAtlantique, et cela s’entend. Un timbre de crooner qui transpire les onze titres du nouvel album If these Wings Should Fail Me, un fond bien folk limite country mais relativement sombre, sans l’être autant que l’album précédent Songs to Die. D’ailleurs, les corbeaux évoqués dans le titre par leurs ailes ne sont pas des oiseaux de malheur pour les Chapel Hill mais des protecteurs, à l’image des messagers des dieux dans certaines civilisations. Authentique et sans artifice, enregistré dans les conditions du live, la nature brute des sonorités donne un côté presque expressionniste, limite cabaret (Tu es mon Faust chanté en français par la sensuelle Yasmine Carlet) mêlé avec bonheur aux

2010, tout juste un an après le best-of des dix ans de carrière, le nouveau né reçoit l’appui de deux Ogres de Barback (Mathilde et Fred) et s’avère être une belle réussite. Elle aura pour garant une tournée dans toute la France en automne. F.I.

Même pas mal Les TIT’Nassels At(h)ome

accords dépouillés qui selon les titres se rapproche du bon vieux rock’n roll. À découvrir. F.I.

If these Wings Should Fail Me Chapel Hill Cosmopolite records

Infernal retour

Si les rues étaient équipées de baffles suspendues afin de mettre un peu de «groove» au cœur d’une vie urbaine répétitive et monotone, les dix titres qui composent le premier album Like a monkey des lyonnais de Sfonx feraient à coup sûr danser les passants de tous âges et de toute sensibilité musicale ! Sans aller jusqu’à tenter cette expérience comportementale, se procurer le premier opus de ces neuf agitateurs qui investissent l’espace «groove’n roll» (groll pour les intimes) est déjà un pas en avant dans la «funkattitude» qui vous envahit dès les premiers riffs. Bercés aux Funkadelic de Georges Clinton, Kool & the Gang ou FFF, Sfonx n’a besoin de personne pour tracer sa route (qui ondule de préférence…) et vous invite sur un dancefloor psychédélique carrefour de l’afrobeat, de la soul, du rock et de la funk. Rien que ça ! F.I.

Like A Monkey Sfonx Grolektif - Anticraft


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LIVRES

ESSAIS

Têtes nues des deux rives Le Chèvre-feuille étoilée porte depuis 10 ans un projet éditorial original. Ancrée solidement à Montpellier et à Alger, la double maison repose sur quatre femmes : Behja Traversac, Edith Hadri, Maïssa Bey et Marie-Noël Arras veulent défendre, dans un espace qui habituellement les opprime, l’égalité et la liberté des femmes. Elles ont donc confié à Wassyla Tamzali l’Algérienne, et à Claude Ber la Française, le soin d’écrire un double essai qui interroge le surgissement du voile intégral dans les rues et l’actualité françaises, mais aussi, par extension, le sens de ces Burqas ici et ailleurs, et plus généralement le voile. Wassyla Tamzali est passionnante en conférence, affirmant haut et clair sa détestation de ces signes de soumission, elle qui petite a vu comment ses parentes s’en sont débarrassé ; Claude Ber sait quant à elle dire la douleur d’un sexe amputé, d’un corps malade de soi, perçu comme impur, infernal, dangereux. Au fil des deux essais successifs quelques paroles essentielles sont dites, que l’on pourrait résumer à cela : voiler une femme, ne serait ce que sa tête est, dans toutes les religions, un signe de soumission à l’homme - le Coran mais aussi l’Épître de Paul le prescrivent clairement comme tel. Toute société qui défend l’égalité des sexes - et toute société le doit - ne peut accepter cela. C’est la leçon de base, incontournable. Wassyla Tamzali rappelle que le voile, et plus encore le Nikab, est imposé

À table !

Il y a comme une analogie tenace, un rapport évident, mystérieux pourtant, entre la scène, l’écriture et la table. Tous les soirs à 20 h précises la cuisine de Coco à Villeneuve-lezAvignon a réuni visiteurs et pensionnaires accablés de mistral, d’inspiration ou de canicule, dans l’ancienne cellule d’un moine chartreux. Pendant 20 ans l’hôtesse-cuisinière a nourri une armée de poètes, dramaturges, créateurs d’images et de rêves en résidence. Fondée au XIVème siècle la Chartreuse est devenue Centre national des écritures du spectacle (CNES) à la fin des années 80, laboratoire pour toutes les écritures. En 1988 on a proposé à Colette Seren de gérer une table d’hôtes ; ses séjours en Tunisie, Corse, Crête ou à Madagascar, lui ont inspiré des recettes originales. Autour d’une table chaleureuse les palais s’enchantaient et les cœurs s’ouvraient : la table de Coco devenait un lieu de délices où

violemment à la plupart des femmes dans les pays musulmans ; que porter la Burqa en France rattache à une histoire, à un mouvement sectaire islamiste qui, ailleurs, lapide les femmes, les vitriole, leur interdit le statut d’humain. Ainsi elle refuse que les femmes françaises se voilent au nom de leur libre arbitre. Claude Ber aborde cette affirmation d’un désir d’être voilée, cette identité qui prend le voile pour mieux se révéler et dévoiler la singularité de l’oppression des musulmanes, dans une société qui reste raciste. Et elle démonte ce triomphe du «c’est mon choix» comme ultime définition de la liberté individuelle néolibérale, et du relativisme culturel : «il y a des choses que non», dit-elle. Cependant les deux écrivaines, malgré la pertinence de ces paroles, en restent à des impressions vagues, philosophiques ou ressenties, qui n’étudient le phénomène ni dans sa réalité sociologique, ni dans sa représentation médiatique et politique. Face aux surgissements noirs qui promènent leurs spectres inhumains dans nos rues, comment agir ? que leur dire ? La question reste entièrement posée. AGNES FRESCHEL

Burqa ? Éd. Chèvre-feuille étoilée, 15 euros Wassyla Tamzali et Claude Ber seront présentes à Mouans Sartoux (voir p 84) puis aux Littorales à Marseille

la parole se partageait autant que les nourritures. Ainsi rassasié de gigot mariné ou de pâté créole, de moussaka ou de lasagnes, enchanté de marquise ou d’îles flottantes, chacun repartait rasseréné à sa table d’écriture ! Ce petit livre des Scènes de cuisine se présente donc autant comme un recueil de recettes que comme un hommage attendri et reconnaissant à leur auteure, avec des textes et des photos des résidents. On croise dans ces pages Jean-Yves Picq, Claudine Galea, Sylvie Chenus, Rémi Chechetto ou Jacques Rebotier... Quelque chose qui les a nourris est-il passé dans leurs mots ? CHRIS BOURGUE

Scènes de cuisine Recettes de Coco et mélanges d’artistes Éd. Espaces 34, 16 euros

Histoire vraie d’un suicide en cours

Et si nous vivions nos derniers jours en tant qu’espèce? L’auteur n’est pas définitivement pessimiste mais il lance une mise en garde qui ressemble à un chant du cygne. Reprenant les travaux de nombreux scienti-fiques, il dresse le constat d’un «éocide» en train de se produire : en détruisant notre environnement, c’est notre propre existence que nous mettons en cause. Cet effrayant constat n’est pourtant pas une élucubration. C’est le résultat de l’histoire de l’homme. Après les grandes disparitions d’espèces du secondaire, l’homme a fait son apparition. Fragile, menacé par les autres prédateurs, il a su mettre en place des stratégies pour survivre. Son intelligence lui a rapidement per-mis de maîtriser son environnement. Il s’est mis à conquérir et à détruire. Les grands fauves ont disparu, incapables de lui résister. Ainsi en Australie, grâce aux feux, les aborigènes ont exterminé toute la méga-faune, des lézards géants aux crocodiles de terre. Partout

dans le monde il a répété la même leçon. Avec la maîtrise de l’agriculture et l’élevage, il a modifié son milieu pour satisfaire ses besoins. Il a alors contribué à sa pro-pre ruine. Des civilisations, telle celle des Anazasis du Chaco qui vivaient dans les pueblos, ou les Mayas ont disparu par tarissement de leurs ressources. Aujour-d’hui, le triomphe du capitalisme et du profit ont accéléré et multiplié les menaces : les forêts sont détrui-tes, la biodiversité menacée... Au delà de la forme parfois un peu fruste de l’écriture, cet ouvrage nous aide à saisir les dangers qui pèsent sur notre avenir par une analyse du passé et du présent. RENÉ DIAZ

Une brève histoire de l’extinction en masse des espèces Franz Broswimmer Éd. Agone, 12 euros


LITTÉRATURE

Reprendre souffle «C’est une nuit sans lune et c’est à peine si l’on distingue l’eau du ciel, les arbres des falaises, le sable des roches. Seules scintillent quelques lumières, de rares fenêtres allumées, une dizaine de lampadaires le long de la plage […].» Dès les premières lignes, tout ce que distille Olivier Adam de roman en roman est là : la difficulté d’être, le deuil, la solitude mais aussi l’espoir, loupiote persistant dans le noir ; l’omniprésence de la nature et des éléments (l’eau en particulier), comme autant de points d’ancrage pour les humains perdus, et de métaphores de leurs états d’âme ; la primauté accordée à la sensation avec des mots simples qui touchent juste et fort. Sarah, la narratrice, a échoué dans une petite station balnéaire japonaise au bord du Pacifique, sur les traces de Nathan, son frère mort depuis peu, qui y avait trouvé refuge avant elle. Dans ce village du bout du monde, plus qu’avec son frère tant aimé, c’est avec elle-même qu’elle a rendez-vous. Vulnérable et forte à la fois, elle a osé s’ «extraire» de sa propre

vie pour mieux la voir, en changer avant que l’inanité de son quotidien bourgeois ne l’étouffe, en assumer les failles aussi. Ainsi, de souvenirs en rencontres, parviendra-t-elle à retrouver le battement d’un «cœur régulier». Car cette histoire, comme souvent chez Adam, est celle d’un retour à la vie, d’une traversée de la nuit jusqu’à l’aube où «le soleil rose éclairait un monde refait […]». Olivier Adam signe ici l’un de ses plus beaux textes, émouvant, sensuel, tellement humain. FRED ROBERT

L’auteur sera présent aux Correspondances de Manosque (voir p 84) Le cœur régulier Olivier Adam Éd. de l’Olivier, 18 euros

Ouvrage d’art Naissance d’un pont confirme magistralement le talent que Maylis de Kerangal avait révélé avec Corniche Kennedy. Les rochers de Marseille et les plongeons adolescents disaient déjà l’audace nécessaire et l’énergie vitale et la sensualité brute et la rencontre d’univers incompatibles. Dans un style aux rythmes étonnants, riche d’une poésie concrète, à fleur d’eau et de lumière, à fleur de peau. Tout cela se retrouve dans son nouveau roman. À la puissance dix. L’intrigue en deux mots : le maire mégalomane de Coca, une ville imaginaire située sans doute sur la côte ouest des ÉtatsUnis, veut désenclaver la cité en faisant bâtir un énorme pont autoroutier qui reliera les rives du fleuve. C’est l’histoire de ce pont, du projet à l’inauguration, que Kerangal retrace. Elle l’ancre dans un décor contemporain, qu’elle peuple d’une foule de précisions techniques et de personnages d’aujourd’hui, politiciens, chef de projet, contremaîtres et ouvriers, militants écologistes et Indiens expropriés. Pourtant, malgré les aspects documentaires, on est loin, bien loin, du rapport de chantier. La fiction, nourrie des précédentes illustres, de la Bible aux grands romans américains, prend des allures de fable épique pas vraiment à la gloire du libéralisme

triomphant ni de la mondialisation. Des personnages aux noms étranges, Summer Diamantis, ou évocateurs, Georges Diderot, Katherine Thoreau ; des passés simples parfois, comme des scansions, qui confèrent au récit des allures de légende ; une construction complexe, qui suit l’avancée du chantier mais s’octroie de nombreux arrêts sur personnages et retours en arrière… l’ouvrage est mené de main de maître et dès les premiers mots, on est pris. Charrié, ravi par une langue composite, comme le béton du pont, comme les gens venus de partout pour y trimer ; une langue qui extrait les mots rares, malaxe la syntaxe, abonde en juxtapositions incandescentes. La langue, comme un fleuve à draguer, un sous-sol à sonder, un pont à ériger. FRED ROBERT

L’auteure sera présente aux Correspondances de Manosque (voir p 84) Naissance d’un pont Maylis de Kerangal Éd. Verticales, 18,90 euros

Humanités et humanité

Il n’y a pas de médiation réussie. Mais chacune, par son échec même, ouvre la voie à une autre, plus large, qui va échouer à son tour. C’est par leur enchaînement inlassable que s’écrit l’histoire courageuse de notre espèce. Dans son essai autobiographique, Danse avec le siècle, Stéphane Hessel renoue avec le genre des mémoires, en retraçant une vie humaine mesurée aux dimensions d’un siècle historique. C’est le parcours d’un humaniste éclairé, fils d’un écrivain un peu lunaire pétri d’antiquité et d’une mère fantasque et solaire gravitant dans les milieux de l’avant-garde intellectuelle et artistique européenne ; d’un jeune normalien qui grandit avec la poésie et les arts, et qui, devenu haut fonctionnaire, aura mis ses «humanités» au service des droits de l’homme. Né à Berlin en 1917, il immigre en France à 8 ans, est naturalisé à 20, s’engage dans la Résistance, est

déporté à Buchenwald puis à Dora avant de s’échapper. Après guerre, il entre dans la diplomatie, est nommé en Asie, en Afrique, à New York, Alger, Genève, et consacre l’essentiel de sa carrière à œuvrer à l’essor de l’ONU, aux relations nordsud, à l’aide au développement, à la défense des immigrés. Hessel n’aura jamais cessé de traverser les frontières. Et c’est avec le même détachement élégant et courtois qu’il parle des honneurs politiques et de ses exigences éthiques, des tribulations du monde et du deuil des proches, et de sa vocation infatigable d’intercesseur et de médiateur. AUDE FANLO

Stéphane Hessel sera l’invité principal de la fête du livre des Écritures Croisées, Aix (voir p 84) Danse avec le siècle Stéphane Hessel Éd. du Seuil, 22 euros

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LIVRES

LITTÉRATURE

Écrivains au cœur des fictions L’expansion de l’écriture autobiographique a habitué les lecteurs à découvrir au centre des récits le personnage de l’écrivain, ses affres et son monde, forcément intellectuel, souvent parisien, ou alors de type Rêveries du promeneur solitaire et autres menus plaisirs. C’est souvent un peu agaçant, parce qu’on y retrouve le même apprentissage de l’écriture, le même rapport à l’école, la même révérence au livre, et la même ignorance des autres réels, que ce soit les autres mondes du travail, l’ailleurs géographique, l’écrasement politique, ou la douloureuse sensation de l’échec intellectuel. Si cette année l’abondante rentrée littéraire propose bien des dépaysements, on y retrouve également de ces livres d’hommes qui se décrivent écrivant, ou plantent au centre de leurs fictions des écrivains qui leur ressemblent. Charles Juliet, qui avec Lambeaux a écrit une autobiographie déchirante à la portée de tous, livre le 6e volume de son Journal, peuplé de pages inoubliables, mais de fort oubliables aussi, dont on aimerait qu’il nous épargne le tri (voir ci-contre). D’autres font bien pire : le médiatique Didier van Cauwelaert livre un roman écrit à la va-vite, accumulant les clichés autour d’un écrivain gourou forcément don juan, et d’une chinoise faussaire qui vient semer la zizanie dans le cœur d’une bande de vieux copains décatis. Dont une copine, lesbienne. On y regarde LCI, y habite à l’hôtel, y roule en Rolls, s’y habille Chanel. Avec des fins de chapitres à suspense grossier -comme dans les séries avant les coupes publicitaires- , des changements de points de vue attendus, des images infantiles, un style à couper au coutelas (elle balance son string d’un coup d’orteil, presse ma queue comme une courgette à l’épicerie…). Visiblement van Cauwelaert ne sait pas inventer plus loin que le bout de son nez, qu’il a court, quoique fort joli (un portrait en noir et blanc, regard et cheveux

flous, s’affiche sur sa quatrième de couverture, à l’endroit où trône habituellement le pitch commercial). Le nez d’Arnaud Cathrine est nettement plus long. Lui aussi conçoit une fiction centrée autour d’un écrivain qui lui ressemble, et meurt. Lui aussi écrit un livre qui tourne autour d’un mystère indévoilé, avec quatre narrateurs qui se succèdent et disent le charme d’un homme, Benjamin Lorca. Même si la construction à rebours et les changements de narrateurs sont un peu systématiques, ils proposent une réalité diffractée intéressante. Et les questions littéraires posées sont vraiment celles de la biographie : le problème de l’intimité, du posthume, des traces laissées par un écrivain, de la construction a posteriori d’une fiction qui ne circonscrit pas le réel d’un homme. Le personnage du frère mal aimé, ancré dans un quotidien loin du monde de l’écriture, est particulièrement attachant. Et puis il y a Écrivains. De Volodine. Une chose qu’il intitule roman et vous happe immédiatement dans la force de son écriture. Et qui n’a rien à voir avec cela. Ou tout plutôt, puisqu’il les retourne. Se présentant comme une série de textes courts, Écrivains brosse ce qui pourrait ressembler à une galerie de portraits en actes, images d’écrivains parvenus au moment précis où l’écriture surgit. Sauf qu’ils n’écrivent pas. L’une meurt et discourt nue, dans le noir, devant une assemblée de fantômes ; l’autre passe la nuit à compter à rebours, un pistolet à la main, retardant le terme de sa souffrance, qui ne viendra pas ; un enfant déverse un flot de mots incontrôlés, une détenue explique tout ce qu’écrire n’est pas, un désespéré «récrit» la réalité de sa naissance devant un monceau de débris mis en scène… Tous ces «écrivains post-exotiques» sont paradoxalement parvenus, sans jamais l’accomplir, au bout de l’acte d’écrire, là où il ne sert plus parce que le monde est un amas de ruines, parce que le moi a vacillé et s’est éteint, parce que créer du lien n’a plus de sens quand l’humanité a disparu, et que la fiction elle-même, l’exotisme, n’a plus de raison de surgir. Parfois le monde post-nucléaire, post-stalinien, postexotique de Volodine a sonné un peu vain, d’un désespoir peuplé de douleurs et de ruelles trop fantastiques. Ici, dans ces textes courts qui commencent par un revolver sur une tempe, et s’achèvent par un «Et il se pend», tout sonne vrai, et tout fait mal. Sauf le récit central, suite de

Un Lion humaniste !

Curieux personnage que ce Jean-Baptiste Capeletti, né en Algérie, établi comme meunier dans l’Aurès, pas comme colon mais de manière «indigène», époux amoureux et chéri d’une jeune fille de bonne famille du cru, qui lui donna un fils. Autodidacte ingénieux, il découvrit un site archéologique de premier plan dont il garda le secret pendant 30 ans avant de le confier, par sympathie, à un jeune chercheur, Robert Laffite. Il n’hésitait pas à affirmer son amitié avec un bandit d’honneur réputé dans toute l’Algérie et, fut lui-même surnommé Chawiya, le «Lion de l’Aurès». Loin de se borner à tracer une galerie de portraits baroques de ses personnages, Fanny Colonna, sociologue, s’attache à rendre «la puissance des liens entre ceux qui ont vécu ensemble du fait de la dureté de ce pays», à

restituer leurs échanges avec humour et à léguer leurs expériences comme patrimoine commun. L’enquête de terrain rigoureuse, les archives consultées, les témoignages recueillis, les superbes photos et les croquis précis permettent de démêler l’écheveau des récits «légendaires», de mieux cerner ce «héros qui haïssait la guerre», comme l’attestent ses poèmes émouvants et savait respecter les cultures d’autrui et offrir une belle image de fraternité! JEAN-MATHIEU COLOMBANI

Le meunier, les moines et le bandit Des vies quotidiennes dans l’Aurès du XXe siècle Fanny Colonna Éd. Actes Sud, collection Sindbad, 25 euros

remerciements drolatiques d’une belle efficacité comique. Même là Volodine est magistral. AGNÈS FRESCHEL

Antoine Volodine sera présent à Manosque et à Mouans Sartoux, Didier Van Cauwelart à Mouans Sartoux, Arnaud Cathrine à Manosque Les témoins de la Mariée Didier van Cauwelaert Éd. Albin Michel, 19 euros

Le Journal intime de Benjamin Lorca Arnaud Cathrine Éd. Verticales, 16 euros

Écrivains Antoine Volodine Éd. du Seuil, 17,50 euros


LIVRES 81

L’aventure intérieure

Exercice périlleux que de publier un journal, par définition intime, ce qui faisait écrire à Michel Tournier son Journal extime ! Charles Juliet publie cette année le sixième tome de ses journaux, Lumières d’automne qui couvre la période 1993-1996. L’ouvrage par moments relève d’un journal vraiment intime : notations brèves, relation de rencontres anodines, impressions fugitives, le tout en un style apparemment relâché, mais qui laisse sourdre parfois une délicate poésie - ainsi, la description de Lyon, le 2 mars 95. Et puis par instants la conscience de la destination réelle du journal, la publication, surgit : passages de justification, comme à la réaction de l’éreintage sur France Culture, ou, loin de toute polémique, la réflexion sur le pourquoi de l’écriture. On navigue ainsi entre légèreté et profondeur, avec un ancrage souvent bouleversé dans le siècle, évocation des guerres, des drames qui secouent l’humanité. Mais tout ceci posé ensemble, au fil des jours, constitue le

terreau même du poète. Qu’il expose abondamment ou taise ses goûts, la matière première de l’écriture réside là. Juliet évoque les livres qui l’ont marqué, les lieux, les personnes, il glisse quelques poèmes impromptus, d’incertaines pages, une nouvelle demandée par la revue Autrement… Quête de soi à travers l’écrit, lutte d’encre et de papier contre le temps ? L’automne, saison des récoltes… De nombreux fruits à cueillir dans ce livre qui se lit «à gambades», et dans le flot duquel on se plait à trouver quelques pépites de la poésie de Juliet. MARYVONNE COLOMBANI

L’auteur sera présent aux Correspondances de Manosque (voir p 84) Lumières d’automne (Journal VI 1993-1996) Charles Juliet Éd. P.O.L., 14,90 euros

Récits partagés Bulbul Sharma nous avait déjà régalés de récits gastronomiques avec La colère des aubergines qui donnait vraiment des recettes indiennes ; elle réitère avec Mangue amère. Cette fois 9 récits s’enchaînent au cours de la préparation du repas d’anniversaire de la mort du patriarche. Seules les femmes de la famille ont le droit de préparer ces repas de deuil, et selon un ordre précis, sous la direction de la chef cuisinière. Toute la journée elles découpent potiron, aubergines, taillent le basilic et le gingembre. Selon un rituel immuable le repas se prépare et les langues se délient. À travers les récits que parfois elles connaissent déjà se dessinent en filigrane les histoires d’amour, de jalousie, de trahison. Il y a l’histoire de Maya qui a trop de personnalité et que sa belle-mère fait amadouer par un charlatan qui

la drogue au pavot ; celle de Bibiji dont le mari découvre le jardin secret, un vrai jardin de légumes et de jasmin dont elle n’avait jamais osé parler... Des histoires d’exil aussi car nombreux sont les indiens partis aux États-Unis ou en Angleterre qui, revenus en visite, jettent un regard critique sur les traditions, et ne supportent plus les currys trop épicés ! Au fil des pages les civilisations et les dialogues des vivants et des morts se mélangent, entre traditions et modernité. CHRIS BOURGUE

Mangue amère Bulbul Scharma Éd. Picquier, collection Contes et Légendes d’Asie, 16,50 euros

L’apesanteur et la garce Un roman français de 345 pages porté par une intrigue fort ténue (les affres répertoriées d’un trio amoureux) mais un présent de l’indicatif si ample qu’il donne le vertige et ôte immédiatement l’envie de ricaner… Expansion et profondeur aussi d’une source inépuisable de moments singuliers, un temps qui est avant tout l’espace d’une narration-circulation… Un roman simple comme la métaphysique et beau comme un haïku (voir le titre !), si ce n’est l’inverse. De l’indolence à la douleur ou comment s’assurer tranquillement de la catastrophe : l’amante anglaise, c’est Nora qui vole épisodiquement du trader londonien au traducteur parisien, se rêve en Nina, mouette tchékhovienne, reste jusqu’au bout aussi énigmatiquement désirable que Manon Lescaut ; les amoureux alternativement plaqués, forcément, ne sont pas à la hauteur : Louis Blériot (oui , elle est pleine de malice cultivée et de signifiants errants l’écriture de Patrick Lapeyre !) adultère et falot, manque d’énergie autre que sexuelle pour comprendre, et le pessimiste Murphy aux lunettes bleues (cherchez Beckett, vous le trouverez ) souffre trop pour sortir de lui-même. Les

deux ne cessent de payer comptant ce qui ne s’achète pas! Les rayons obliques, les nuages qui filent, les ombres ou les miroirs qui ne réfléchissent guère dessinent tout un monde flottant de personnages campés pourtant vigoureusement avec un humour fou et une virtuosité soufflante ! La légèreté apparente suspend et fixe le malaise tout à la fois : indulgence attristée, sympathie navrée pour les personnages et tendresse cruelle, l’auteur pratique une écriture «de profil»: «fraîchement rasé, froidement désespéré » semblant d’équilibre désinvolte entre le haut et le bas qui ne protégera pas de l’écrasement. Et pour le même bonheur de lecture à l’infini il permet de comprendre Leibniz ! MARIE-JO DHO

L’auteur sera présent aux Correspondances de Manosque (voir p 84) La vie est brève et le désir sans fin Patrick Lapeyre Éd. P.O.L, 19,50 euros


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LIVRES

LITTÉRATURE

La ballade de Bill et Jim Comme son titre l’indique, le premier roman de Lionel Salaün raconte l’histoire d’un retour. Celui de Jim Lamar dans sa ville natale Stanford, Missouri, un bled perdu du Midwest. Comme beaucoup d’autres jeunes Américains, il a «fait» le Vietnam. Sauf que lui, après sa démobilisation, a mis 13 ans à rentrer au bercail. Alors, forcément, lorsqu’il réapparaît enfin, quand plus personne ne l’attend et que la ferme familiale est en déshérence, cela intrigue, cela choque même. Brassens le chantait justement : «Non, les braves gens n’aiment pas que / l’on suive une autre route qu’eux» ; particulièrement à Stanford, Missouri, sur les bords du Mississipi. Seul Bill, le narrateur, est curieux de connaître ce revenant. Entre l’adolescent un peu sauvage et le vétéran hanté, le courant passe ; doucement, Jim se confie. Le récit, rétrospectif, relate un double apprentissage, celui de Jim au contact de ses camarades d’infortune sur les rives du Mékong, celui de Bill dont la vie sera changée par cette rencontre sur les berges du Mississipi. Entre gouaille

Tout sur sa mère

«Et l’histoire de ma vie quand est-ce que tu vas l’écrire ?»… «Tu n’es pas curieuse de connaître mon enfance ni de savoir pourquoi je vous ai quittées ?». Hanan el Cheikh a mis longtemps avant de céder à l’insistance de sa mère. Peur de rouvrir de vieilles blessures, rancune souterraine… Cela a vraiment été toute une histoire, que le prologue et l’épilogue présents dans les éditions anglaise et française expliquent. Mais elle l’a fait malgré ses réticences, et grâce à elle Kamleh reprend vie. Et quelle vie ! Tous les ingrédients du roman pathétique y sont : abandon du père, indigence extrême, mariage forcé à 11 ans, analphabétisme, violences en tous genres… Sauf que Kamleh est une sorte de picaro à la libanaise et qu’elle affronte l’existence avec une vitalité et une rouerie exceptionnelles, et un sens de la dérision tout aussi remarquable. Dès le plus jeune âge, elle passe maîtresse en «fables et larmes». Quel autre choix dans le Liban des années 40-50 où les femmes, interdites de tout, n’ont que la ressource du mensonge pour vivre et respirer un peu ? Dans une société corsetée dans ses

rugueuse et lyrisme nostalgique, ce roman touchant est surtout un hymne à «ce bout d’Amérique propre à chacun, ingrat ou généreux, ensoleillé ou glacé qui constituait tout notre héritage, le terreau de notre vie, notre seul refuge». Dans une langue vive, rythmée, Lionel Salaün rend hommage à son Amérique mythique et adorée, berceau du blues et du grand fleuve ; à ce territoire immense où tout reste possible, les cataclysmes les plus violents, les aubes les plus magiques. FRED ROBERT

Le retour de Jim Lamar Lionel Salaün Éd. Liana Levi, 17 euros L’auteur sera présent à Manosque (voir p 84) le 24 sept à 18h00 pour une rencontre croisée avec Thomas Reverdy

traditions, la jeune femme fera de sa vie un film sentimental, à l’image de ceux qu’elle voit en cachette. Le récit de Kamleh est enlevé, son énergie communicative et son humour ravageur même quand elle relate des horreurs. Et puis, il y a cet amour de l’imaginaire, ce sens de la métaphore inattendue, triviale ou poétique. Bref, on ne peut qu’être séduit par cette mère insoumise et drôle et admirer le talent de sa fille à lui rendre parole, justice et hommage. FRED ROBERT

Toute une histoire Hanan el Cheikh Traduit de l’arabe (Liban) par Stéphanie Dujols Éd. Actes Sud, 22,80 euros Hanan el Cheikh est reçue en librairie les 14 et 15 septembre dans le cadre des Itinérances littéraires. Elle sera présente au festival du livre de Mouans-Sartoux.

Juste pour jouer Perpignan au plein cœur de l’été. La ville est brûlante, la clim’ du commissariat plus souvent en panne qu’à son tour et les affaires en cours pas vraiment passionnantes. Un assassinat, une disparition et un enlèvement vont heureusement mettre un terme à cette torpeur poisseuse. Et l’inspecteur Gilles Sebag oublier un temps l’ennui de la routine et le vide d’une maison désertée par les siens partis pour les vacances. Malgré ses doutes existentiels et sa vision désabusée des choses, ou peut-être à cause d’eux, Sebag aime jouer. Alors il joue. Au bluff parfois, à l’inspiration souvent, il avance ses pions dans une partie pas évidente, un jeu gratuit et cruel imaginé par un esprit malade. « Qui fait quoi, qui attrape qui ? Qui est le chat, qui est la souris ?» Vous le saurez si vous lisez ce premier opus de Philippe Georget, qui semble s’être bien

amusé à l’écrire en jouant avec les contraintes et les poncifs du thriller tant au plan de la trame narrative que des personnages (celui du psychopathe est un summum). En baladant son enquêteur aussi. Dans une sorte de dérision du genre en général et de cette histoire en particulier qui, si elle correspond bien au caractère décalé de Sebag, enlève hélas au lecteur le délice du vrai frisson. FRED ROBERT

L’été tous les chats s’ennuient Philippe Georget Éd. Jigal, 18 euros L’auteur était invité au 9e festival Blues et Polar qui s’est déroulé à Manosque du 23 au 28 août



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RENCONTRES

LIVRES

Rentrez en toutes lettres Vous avez festivalé tout l’été ? Vous n’êtes pas rassasiés ? Tant mieux, ça va continuer… Parmi les nombreux événements littéraires qui jalonnent la rentrée, il en est 3 dans notre région que nous vous recommandons particulièrement. Afin que votre automne aussi soit saison d’enthousiasme, et que la chaleur de l’été y flamboie continûment…

Mouans-Sartoux, festival militant «Les signaux d’alerte se multiplient. […] Allons-nous continuer à foncer dans le mur à grande vitesse ?» MarieLouise Gourdon, commissaire du Festival du Livre de Mouans-Sartoux s’inquiète. En intitulant la 23e édition États d’urgences, elle entend bien mettre cette interrogation au centre des nombreux débats qui animeront comme de coutume ce festival dédié à tous ceux qui résistent à la pensée unique, aux idées reçues, au creusement des inégalités… Au programme donc, une cinquantaine de débats et conférences au Forum, centre névralgique de la manifestation. Mais le festival est aussi un vrai rendez-vous littéraire et cinématographique, avec des entretiens, des projections et quelque 200 exposants invités (éditeurs et libraires). Et parce que la prise de conscience n’attend pas le nombre des années, l’événement s’adresse largement aux jeunes. 8500 élèves, de la maternelle au lycée, seront accueillis dès le 1er octobre sur ce qui est devenu le plus important espace de littérature jeunesse de la région PACA. 25 ateliers leur seront proposés sous la houlette de 34 écrivains, conteurs et illustrateurs. Le Prix des Pitchouns, qui récompense un ouvrage imaginé, écrit et illustré par des enfants pour des enfants, sera également décerné ce jour-là. Quant au rituel concert littéraire, offert par les 40 musiciens de l’Orchestre Régional de Cannes PACA sous la direction de Philippe Bender, il accompagnera cette année la déclamation du célèbre Matin brun de Franck Pavloff. Une exhortation supplémentaire à la vigilance. FR

23ème Festival du Livre du 1 au 3 octobre Mouans-Sartoux (06) www.lefestivaldulivre.fr

Manosque à mots ouverts

Pour leur 12e édition, Les Correspondances conservent leur ambition de donner une dimension nouvelle à la lecture publique en faisant, comme l’écrit leur directeur Olivier Chaudenson, «découvrir des auteurs et des œuvres à travers un moment collectif.» Dans une ambiance festive et sous des formes sans cesse renouvelées. Du 22 au 26 septembre prochains, tandis que la ville sera investie par les désormais traditionnels Écritoire © F-X. Emery Écritoires, que les vitrines se couvriront de calligraphies, que les ateliers d’écriture fleuriront sur les places et dans les jardins, les mots dits seront rois ! Grands entretiens, rencontres croisées, apéros littéraires, lectures rencontres, lectures en scène, mais aussi lectures musicales, vidéo, dessinées, opéra parlé, balades littéraires… Le programme, alléchant et chargé, propose comme toujours des rencontres avec des «stars» de la plume et de la scène, mais laisse, cette année tout particulièrement, une large place aux nouveaux venus (voir chroniques p80 et 82). Autre nouveauté très attendue: la présentation d’un objet textuel inédit, le bookflyer, format court apparenté à la bande annonce de film ou au clip musical, sorte de lecture apéritive d’un texte semble-t-il. Grande première à voir et à entendre le 25 à 11h30 sur les textes d’O.Adam, N. Kuperman et O. Rosenthal. Car Manosque, c’est aussi cela, la littérature hors de ses sentiers battus : une tension féconde entre l’écrit et son oralité, tradition et modernité. FRED ROBERT

Les Correspondances Manosque La Poste du 22 au 26 sept Manosque (04) www.correspondances-manosque.org

Acteur du siècle

À l’heure où les Journées du Patrimoine célèbrent les Grands Hommes, les Écritures croisées invitent Stéphane Hessel à venir partager sa Danse avec le Siècle. L’homme est en effet un témoin formidable des idées qui ont construit notre monde d’aujourd’hui : Truffaut fit un film autour de la liberté d’aimer de ses parents -l’enfant de Jim et Catherine, une fille dans le film, c’est lui. Il est né à Berlin en 1917, a été élevé à Paris, et déporté à Buchenwald durant la Seconde Stéphane Hessel © X-D.R

Guerre. Diplomate, il a participé en 1948 à la rédaction de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme aux côtés de René Cassin, a été Membre du cabinet de Mendès France… Son œuvre littéraire (voir p 79) renoue avec le genre des Mémoires : loin du narcissisme analytique de l’autobiographie, c’est l’inscription des Idées et de l’Histoire dans un parcours personnel qui y est en jeu, et le rapport au réel de l’écriture. Autour de lui il ya aura d’autres témoins du siècle, et des artistes, des débats d’idées, qui interrogeront ces rapports entre histoire, littérature, parcours personnel et narration. À l’heure où nous imprimons la liste des invités n’est pas arrêtée… mais les rencontres des Écritures croisées sont toujours passionnantes ! AGNÈS FRESCHEL

Danse avec le Siècle Fête du livre Du 1er au 3 oct Cité du livre, Aix 04 42 26 16 85 www.citedulivre-aix.com


BARJOLS | AU PROGRAMME

RENCONTRES 85

Quel chantier !

Il n’est pas innocent que ce soit avec Cologne, célèbre pour l’eau du même nom que Barjols et ses tanneries aient établi des liens privilégiés. Les industries parfumées viennent souvent contrebalancer des effluves difficilement supportables: ainsi Grasse fut une ville de tanneries avant de devenir le temple des parfums ! Le 7 août dernier, les artistes des Tanneries recevaient donc ceux de Cologne qui les avaient accueillis le 25 avril. Cette manifestation conviviale permettait de découvrir les œuvres croisées des peintres et des poètes. Sur les murs bruts des anciennes tanneries étaient mis en écho des univers des deux collectifs, le Lichthof de Cologne et la ZIP de Barjols. JeanCharles Monleau au piano animait avec un jazz tout de légèreté les déambulations des visiteurs. Une performance poétique unissait les deux langues, allemand et traduction française, avec la lecture du poème avant-gardiste Anna Blum de Kurt Schwitters dans une mise en scène drôle et spirituelle. Les œuvres exposées jouaient avec le thème du Chantier Mo-

bile: travail de la matière, empâtements, inclusions géométriques de Anne Wöstmann, alors que Hölger Schnapp livre un travail sur de larges coulées, un chantier qui se forme en se délitant ; puzzles de photos du monde urbain, dont une remarquable vision fragmentée de la nuit, de Dieter Korte ou distanciation de la ville par le biais de photos prises par un portable (Patrick Aubert), jeu entre matière brute des murs et toile lisse (une belle réussite rouge) de Cathy Posson ; Günter Vossiek traite le thème de la mobilité en jouant sur les effets de transparence de plaques de plexiglas suspendues, multipliant les points de vue, dans une évocation graphique du voyage d’Ulysse ; Claudie Lenzi met en scène un chantier du langage avec des briques de mots, tandis qu’Eric Blanco retrace avec humour le chemin de l’eau entre Cologne et Barjols… Un petit ouvrage rassemble les étapes du projet et les œuvres principales exposées. MARYVONNE COLOMBANI

Libraires du sud /Libraires à Marseille - 04 96 12 43 42 Rencontres avec Susan Sellers, auteur, traductrice, éditrice, le 16 sept à 17h30 à la librairie Book in Bar (Aix) ; Mickael Attal pour La légende des épées (éd. La Bruyère), le 17 sept de 14h à 17h, Des livres et vous (Marseille) ; Paule Brahic, professeur d’histoire de l’art à Aix, pour une découverte de Miguel Barcelo à qui Avignon consacre trois expositions jusqu’au mois de novembre, le 24 sept à 19h, librairie de l’Horloge (Carpentras) ; Alan Mets, le 25 sept à 15h à Maupetit (Marseille) ; Jean Contrucci pour Les nouveaux mystères de Marseille T.9 (éd. Lattès), le 25 sept à 15h, Des livres et vous (Marseille) ; Jérôme Charyn autour de The Secret Life of Emily Dickinson, le 28 sept à 17h30 à la librairie Book in Bar (Aix) ; Jacqueline Assaël pour Petit traité du fol espoir, l’espoir dans le Nouveau Testament (éd. Olivétan), le 29 sept à 18h30 à la librairie Saint-Paul (Marseille) ; Guy Dana pour Quelle politique pour la folie ? (éd. Stock), le 29 sept à 18h45, Les Genêts d’or (Avignon) ; Huguette Senia-Badeau, le 5 octà 18h30 à la librairie Saint Paul (Marseille). Itinérances littéraires : rencontre avec Craig Johnson pour Le Camp des morts et Little bird (éd. Gallmeister), le 15 sept à 18h30, Le Grenier d’abondance (Salon) ; Andreï Dmitriev et Valeri Popov à l’occasion de l’année de la Russie en France, le 21 sept à 17h30, Prado Paradis (Marseille), le 22 sept à 19h, Aux vents des mots (Gardanne) ; Hanan El-Cheikh pour Toute une histoire (voir p 82), le 15 sept à 18h30 à L’Alinéa (Martigues) ; Bernado Carvalho pour Ta Mère (éd. Métailié), le 24 sept à 19h à L’Attrape Mots (Marseille) ; Gary Victor pour Le Sang et la mer (éd. Vents d’ailleurs), le 6 octà 19h, Aux Vents des mots (Gardanne) et le 8 octà 17h30 à L’Alinéa (Martigues). AIX Association Art eco vert – 06 08 51 00 64 Ecofestival Lez’arts verts sur le thème de la forêt : chasse au trésor, concerts, accrobranche, performances… Du 2 au 9 oct, à Aix et Venelles. APT Vélo Théâtre – 04 90 04 85 25 12e édition des Cris poétiques durant laquelle des auteurs lisent leurs textes sur scène : Marina Cedro (auteur franco-argentine), Guillaume Boppe, Mathias de Breyne et Denis Frajerman. Le 8 oct à 20h30.

À venir Le dynamisme, la volonté créatrice, la capacité de renouvellement de la ZIP font de Barjols un pôle artistique tout à fait singulier. Un nouveau rendez-vous est à prendre le 18 septembre lors des Journées du patrimoine. Le nouvel ouvrage des éditions Plaine Page ENTRE PEAUX Des tanneurs aux artistes, sera présenté. On pourra y trouver un écho du très beau film consacré à l’histoire des tanneries, de son passé ouvrier et de son exploitation artistique contemporaine, lieu de vie et de création. Plusieurs performances et interventions auront lieu à partir de 15h, dont une conférence sur Les Nouveaux Territoires de l’Art Friches industrielles et lieux culturels par Fazette Bordage chargée de mission interministérielle auprès de l’Institut des Villes. Présentation du livre, Lectures et Conférence ZIP 185, Barjols 18 sept à 15h

ARLES Muséon Arlaten – 04 90 93 58 11 Ethno’ balade à Tarascon autour de la légende de la Tarasque. Le 2 oct à 15h. FORCALQUIER Editer en Haute Provence – 04 92 79 40 00 Pour fêter l’ouverture de la maison des métiers du livre à Forcalquier, Éditer en haute Provence organise, du 16 au 19 sept, quatre jours de rencontres autour de deux axes : l’utopie communautaire et la passion artistique, avec l’écrivaine Simone Debout, la chanteuse Angélique Ionatos, la peintre Marie Morel et la comédienne Annie Rhode. LA CIOTAT Librairie Au Poivre d’Âne – 04 42 71 96 93 Rencontres : avec Joëlle Gardes, auteur, Martine Rastello, graveur, et Patrick Gardes, photographe à l’occasion de la parution de Par-delà les murs (éd. de l’Amandier, 2010). Le 30 sept à 18h30 ; avec Sara Vidal et Pierre Guéry pour la présentation de la collection …de vos nouvelles (éd. L’Une et l’Autre). Le 12 oct à 18h30. MARSEILLE Regards de Provence – 04 91 42 51 50 Exposition Les trésors cachés du Sacro Monte Di Orta, du 2 oct au 16 janv. Syndicat des Architectes 13 – 04 91 53 35 86 Exposition, organisée avec l’Alcazar et la librairie Imbernon, Voyage à la rencontre de Claude Ponti, du 15 sept au 15 nov. Institut Culturel Italien – 04 91 48 51 94 Dans le cadre de la représentation à l’Opéra de Andrea Chénier, projection du film opéra Andrea Chénier avec Placido Domingo, le 30 sept à 18h. Dans le cadre de la manifestation Les Pouilles à Marseille, rencontre avec l’auteur Gianrico Carofiglio, après la projection du film Il passato é una terra straniera, le 6 oct à 18h. ABD Gaston Deferre - 04 91 08 61 00 3e Rencontres départementale de l’édition indépendante avec une trentaine de maisons d’édition qui sont accueillies selon le principe «un éditeur de la région invite un éditeur d’ailleurs». Au programme lectures, remise du prix de la 4e édition du concours

Chantier Mobile © Claudie Lenzi

Les Entre Peaux, Barjols des tanneurs aux artistes 37 auteurs, 132 pages, 300 photos Ed Plaine Page, 15 euros

Jeune illustration en région Paca, atelier d’écriture et rencontres avec des auteurs et éditeurs. Les 17 et 18 sept de 10h à 19h dans l’auditorium. Exposition photographique de Patrice Terraz, Les cent visages du vaste monde, du 15 sept au 11 déc. BMVR Alcazar – 04 91 55 56 34 Expo Itinéraires persans, Pascal Coste 1839-1840, du 18 sept au 30 oct ; conférence de Rémy Labrusse, professeur d’histoire de l’art à Nanterre, Une renaissance orientale ? L’Europe du XIXe s en quête des arts de l’Islam, le 18 sept à 17h. Dans le cadre d’ActOral, rencontre-lecture avec François Beaune, le 29 sept à 17h. Les mardis du Mucem : Barbarie et Civilisation, rencontre et débat avec Tzvetan Todorov, autour de son livre La Peur des barbares, paru en 2008 chez Laffont (2010 Livre de Poche, Biblio Essais). Une magistrale réflexion sur la notion de barbarie à travers l’analyse de l’histoire européenne. Le 12 oct à 18h30. L’écrit du sud – 06 09 18 00 11 Semaine Noire, du 1er au 10 oct, avec un auteur en résidence, Gianrico Carofiglio : création d’un conte polar à La Baleine qui dit «Vagues», élection du 7e Prix marseillais du Polar, conférences, Les Terrasses du Polar à Marseille (crs Julien le 2 oct) et à Septèmes-les-Vallons (le 3 toute la journée)… Musée d’histoire – 04 91 90 42 22 Colloque Est-Ouest l’art de toutes les Russies, avec L. Védrine, J.N. Bret, J.-C. Marcadé, M. Rutschkowsky, O. Kachler, P. Sers, J.-P. Arrignon, N. Smirnova, R. Gayraud et O. Makhroff, le 8 oct de 9h30 à 18h. Librairie Maupetit – 04 91 36 50 50 Rencontre avec Alan Mets, parrain du square de l’Ecole des Loisirs nouvellement installé dans le secteur jeunesse, le 25 sept à 15h. PORT-DE-BOUC Médiathèque Boris Vian – 04 42 06 65 54 Café-lecture autour du livre de Robert McLiam Wilson (éd. Bourgeois), Eureka Street, le 17 sept à 14h ; conversation autour du livre de Saïd Bouamama et Claudine Legardinier (éd. Presses de la Renaissance, 2006), Les clients de la prostitution : enquête, le 30 sept à 14h.


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PATRIMOINE

JOURNÉES EUROPÉENNES DU PATRIMOINE

Chaque année le mois de septembre célèbre les Journées du patrimoine en Europe. On le sait, cette initiative française a trouvé un écho si vif que l’UE en a fait une de ses manifestations traditionnelles, un reflet de civilisation commune. L’Europe possède donc un patrimoine propre, et c’est fort bien ! De la colonnade du Bernin à Rome à la porte de Brandebourg ou l’abbaye de Westminster, l’Europe est traversée de grands courants intellectuels et artistiques communs.

Qui se rêve Grand ? Cette année, alors que jusqu’ici l’aspect matériel du patrimoine l’emportait, le thème retenu est : Les grands hommes : quand femmes et hommes construisent l’histoire. L’idée est de célébrer les hommes à travers les lieux qu’ils habitèrent. Pourtant, les manifestations ordinairement organisées en France reposent sur une litanie de héros locaux ! Au nationalisme de clocher, il faudra donc ajouter la volonté de l’Europe d’accentuer la cohésion de ses populations autour de personnalités exceptionnelles et emblématiques. Et par les temps qui courent, les groupes de populations mal intégrées n’auront pas de place dans ce concert ! Et puis, qui sont ces «grands hommes» ? Doit-on imaginer que la patrie reconnaissante illustre son propos par les figures honorées au Panthéon ? L’affaire est

AIX Centre aixois des Archives départementales des Bouches-duRhône – 04 42 52 81 90 Visite libre sam et dim de 10h00 à 18h00. Découverte du bâtiment, des réserves et des collections qui y sont conservées, exposition Aix ville ouvrière du jusqu’au 29 janv, concert, le dim à 11h30 de l’Harmonie municipale d’Aix sur le parvis des Archives. Théâtre du Jeu de Paume – 04 42 99 12 00 Visites guidées et théâtralisées, sam et dim à 11h et 14h ; visite du théâtre de 10h à 12h30 et de 14h à 18h. Fondation Vasarely – 04 42 20 01 09 Visites guidées (sam et dim à 10h30, 11h30 et 14h), ouverture de l’atelier (sam de 10h30 à 13h et de 14h à 16h), récital de piano de Maria Stembolskaya (sam à 16h), parcours chorégraphique par le GUID (dim de 15h à 18h). ARLES Museon Arlaten – 04 90 93 58 11 Soirée exceptionnelle dédiée au Brésil avec la formation brésilienne Paulo Da Luz, sam à 19h45 ; projection en plein air de Orfeu Negro de Marcel Camus (1959) à l’Espace Van Gogh, sam à 21h ; conférence gourmande de Patricia Payn-Echalier, Docteur en Histoire, et Bernard Marécaux, marinier de père en fils sur Vivre avec le Rhône, histoires de mariniers, dim à 11h sur le Boatel. Musée Départemental Arles Antique – 04 90 18 88 88 Ouverture du jardin d’inspiration romaine, Hortus, sam et dim à partir de 10h ; Autour de l’exposition César, le Rhône pour mémoire, lecture en musique avec Marie-

intéressante car on constaterait combien les femmes ne sont que fort peu de grands hommes ! La pauvre Marie Curie, résidante depuis 1995, y est bien seule Sophie Berthelot ne doit sa résidence qu’à la volonté de son mari de l’avoir à ses côtés ! Passons encore sur ces «héros ordinaires du patrimoine [...] maires, autorités religieuses, châtelains, collectionneurs, propriétaires» qui conservent, parfois avec les deniers de l’État, une mémoire socialement marquée. Arrêtonsnous, un instant, sur la relation du grand homme à son monument. À Marseille le lycée Thiers doit son nom à cet ancien élève, chef de gouvernement et premier président de la République Française. En 1968, les lycéens débaptisèrent pourtant l’établissement pour rappeler la mémoire des victimes, les Communards,

Christine Frezal sur une création sonore et basson de Didier Malbec, sam à 18h30. AVIGNON Hôtel de Ville –04 90 80 80 80 Point d’accueil des Journées du Patrimoine, de 9h30 à 18h. Pont Saint-Bénezet Visite du pont construit en 1177 et la Chapelle St-Bénezet. De 9h à 19h. Palais des Papes – 04 90 27 50 00 La résidence des souverains pontifes et le siège de la Chrétienté au XIVe s. Exposition Terra Mare, Miquel Barcelo. De 9h à 19h. Musée du Petit Palais – 04 90 86 44 58 Peintures et sculptures du Moyen Age et de la Renaissance. Exposition Terra-Mare, œuvres gothiques des XIV et XVe s, provenant de la cathédrale et du musée de Palma. Projections de films autour de l’œuvre de Miquel Barcelo, présentation de son travail sur la Divine Comédie de Dante. Conférence imagée de l’exposition par le conservateur à 11h. De 10h/13h et 14h/18h. Archives départementales – 04 90 86 16 18 Situées dans le «palais vieux», elles occupent l’aile des Familiers, la tour de la Campane, deux ailes du cloître Benoît XII, la tour de Trouillas et la chapelle Benoît XII transformée en magasin d’archives. Visite découverte et expo Soignés, soins, soignants - la prise en charge de l’homme malade du Moyen Âge au XXe siècle. De 14h à 18h. Archives municipales – 04 90 86 53 12 Exposition historique de l’institution du Mont-de-Piété qui fête cette année son 400e anniversaire. De 14h à 17h. Basilique Métropolitaine Notre-Dame-

que notre héros fit massacrer. Héros ou démon, la limite est ténue… Peut-on créer du consensus sur des étiquettes aussi fluctuantes ? Et les grands hommes ne sont-ils pas le produit de l’histoire d’une société autant qu’une exception individuelle ? Le patrimoine est un enjeu de la mémoire et de l’histoire. Faire comme si la désignation de sujets extraordinaires allait de soi relève d’une volonté éducatrice peu pertinente. Il est vrai que lorsque la réussite sociale se mesure à l’ampleur du compte en banque, on peut s’attendrir sur des «héros ordinaires»... que l’on n’oubliera pas de remercier. RENÉ DIAZ

des-Doms – 04 90 82 12 21 Visite : Peintures murales du XIVe s, chaire épiscopale en marbre, tableaux de N. Mignard, tombeau du pape Jean XXII. De 12h à 19h. Office de Tourisme d’Avignon – 04 32 74 32 74 Visites découvertes et visites à thème. «Histoire, histoires», «Artistes célèbres, héros ordinaires» et «Avignon côté fenêtres». APT Lieu-dit du Forum –04 90 16 11 87 Visites des vestiges du forum par Patrick de Michèle, archéologue départemental. sam de 15h à 17h. BONNIEUX Musée de la Boulangerie – 04 90 75 88 34 Le grand rôle des petits mitrons : histoire du pain racontée par Pascale Masera le samedi à 16h30 et dimanche à 10h30. CASSIS Office de tourisme – 0892 259 892 Visite guidée de la Villa Estaïado construite par Fernand Pouillon (sam à 10h) ; visite guidée des expositions du Musée Sur les traces du Cassis Antique et Centenaire du Musée (sam à 10h30 et dim à 15h) ; visite guidée de la Fondation Camargo - Patrimoine d’hommes célèbres (sam à 15h30) ; Visite guidée du Château de Cassis (dim à 10h). CAVAILLON Hôtel d’Agar – 04 90 76 29 69 Exposition Le cabinet de Sylvain Gagnière, visite guidée par groupe de 20 personnes.

Visites de 10h à 12h et 14h à 18h. Archives municipales – 04 90 71 94 38 Fonds du XIIIe au XXIe s à découvrir à travers une présentation tactile et sonore, Des Archives plein les mains, des archives plein la tête. Visite libre samedi et dimanche de 9h30 à 12h30 et 14h30 à 18h30 ; Lecture d’archives, Du côté de l’en-tête au théâtre de verdure Georges Brassens, déclamation d’en-têtes de lettres ou de factures par la cie Atipicc qui plonge l’auditoire dans l’atmosphère vivante, pittoresque et cocasse, du monde du petit ou du gros commerce vauclusien entre XIXe et XXe s. FONTAINE-DE-VAUCLUSE Musée d’histoire Jean Garcin 04 90 20 24 00 Samedi à 14h30 : Exposition Que nuages… Histoire et propos d’artistes : fragments littéraires et témoignages de Beckett, Deleuze, Boltanski… Visite commentée par Frédérique Mérie ; dimanche à 17h : lecture publique de textes extraits des livres de Jean Garcin et Willy Holt, deux grands résistants réunis dans une œuvre commune, la création du Musée d’histoire 39-45 de Fontaine-de-Vaucluse : Nous étions des terroristes et Femmes en deuil sur un camion par Frédérique Mérie, accompagnement en musique. LA BARBEN Château – 04 90 55 25 41 Conférences : de Françoise de Forbin, conservateur honoraire à la bibliothèque municipale d’Avignon, fille d’Henri, dernier marquis de Forbin (1908-2000) sur Une famille : les Forbin( XVe-XXe s.) chaque après-midi ; de Yannick Frizet, historien de


PATRIMOINE l’art sur l’annexion de La Provence par le Roi Louis XI avec la collaboration de Palamède Forbin, dim ap m; de Michel Fraisset, conservateur de l’atelier Cézanne sur l’histoire de la Révolte des Cascavéoux en Provence en 1630 et les liens entre Gaspard de Forbin et le Roi Louis XIII relatés sur le plafond à la française de la Galerie des tableaux, sam ap m. MARSEILLE ABD Gaston Deferre - 04 91 08 61 00 Visites du bâtiment et de ses réserves habituellement fermées au public, sam et dim de 10h30 à 18h30 ; ateliers thématiques pour adultes ; spectacle de la cie La Naïve Comment ils écrivent l’histoire? à travers des sources intimes (lettres échangées entre les soldats et leur famille, des carnets de tranchées), des slogans et articles de journaux, des courriers administratifs, sam à 12h. Hôtel du département – 04 91 21 36 91 Visites guidées du bâtiment de 10h à 12h et de 14h à 18h. BMVR Alcazar - 04 91 55 56 34 Expo Itinéraires persans, Pascal Coste 18391840 (18 sept au 30 oct), visites guidées à 11h, 14h30 et 16h sam ; initiation à la calligraphie ornementale à 15h sam ; conférence Une renaissance orientale ? L’Europe du XIXe siècle en quête des arts de l’Islam à 17h sam. Sur le Ferry Boat – 06 07 36 91 98 A l’occasion de la parution de son livre Nouvelle adresse, le port (La Petite Edition), Christian Gorelli dira un poème de son livre à chaque traversée, sam entre 15h et 16h. La Friche – 04 95 04 95 08 Tours & Détours : spectacle Le défilé de marques parla cie T. Public, ven et sam à 20h30 ; D’ici la – Le toit vu d’en haut, installations lumineuses en via cordata par le goupedunes, ven et sam de 21h30 à 0h30 ; ateliers de découverte urbaine, sam de 14h à 17h. GMEM - 04 96 20 60 10 Visite libre sam et dim de 14h à 19h, parcours découverte, pédagogique et ludique dans les studios du GMEM, séances d’écoute et d’enregistrement, salle de projection, bornes interactives son et vidéo, archives documentaires et exposition, salle d’expérimentation ; concert : présentation de la création musicale Itinérances d’Olivier

Stalla avec les collégiens du collège Monticelli à Marseille (sam à partir de 16h) ; concert/projection autour de la vie et de l’œuvre de Pierre Schaeffer (dim à partir de 16h). MARTIGUES Fort de Bouc – 04 42 42 31 10 Visites guidées sam et dim à 10h, 13h30, 15h30 et 17h30 des différents espaces du fort : demi-lune, pont-levis, place d’armes, pavillon des officiers, cantine, tour fanal, casemates, etc. Présentation de scènes historiées à l’intérieur de l’édifice invitant le visiteur à un voyage à travers l’histoire de la ville et du fort. Musée Ziem – 04 42 41 39 50 Visite guidée sam à 11h, 15h, 16h, 17h et dim à 11h, 16h, 18h de l’exposition tem-poraire Zhu Hong, pièce de collection, et des œuvres de Félix Ziem de la collection permanente ; dim de 15h à 17h Aline Raynaud, restauratrice d’œuvres d’art, agréée par les monuments historiques et par les musées de France, interviendra pour parler de son métier et du travail de la restauration d’une peinture, Portrait de la veille femme en coiffe (1855) par Jules de Vignon (1815 -1885) ORANGE Théâtre antique – 04 90 51 17 60 Sam : découverte de la vie quotidienne des femmes du 1er s et de leurs enfants à travers la reproduction d’objets du musée (10h30 à 11h30 et 15h à 16h), fabrication de lampe à huile (13h30 à 14h30 et 16h30 à 17h30) ; dim : apprentissage des écritures antiques (10h30 à 11h30 et 15h à 16h), atelier art du textile (13h30 à 14h30 et 16h30 à 17h30) ; conférence de Didier Repellin, architecte en chef des monuments historiques sur le thème Restauration des théâtres antiques (dim à 15h30). RÉGION PACA Voyons Voir – 06 14 69 65 94 L’association propose deux itinéraires en présence des artistes : Sam : visite de l’expo L’aplomb d’un tueur de Francis de Hita au jardin des cinq sens à St Marc Jaumegarde (rendez-vous au parking des Trois Bons Dieux à 10h) ; Visite de l’exposition Paysa-ges chavirés. 2 et inauguration

de la 2e partie du diptyque de Didier Petit L’avers au domaine de Saint Ser à Puyloubier (12h) ; Exposition automobile Liquidations de Vincent Bonnet (14h30) ; Rencontre avec l’artiste sur le parking des écoles à Rousset (D56 - face à la boulangerie leFournil à 15h) ; Visite de l’exposition Entre [Elle(s)] à Arteum, Châteauneuf le Rouge (16h) ; concert de l’ensemble Télémaque au cou-vent des Minimes à Pourrières (19h). Dim: Rendez vous à Arteum à Châteauneuf le Rouge, pour la visite de l’exposition Entre [Elle(s)] (10h) ; Visite de l’exposition Paysages chavirés. 2 au domaine de Saint Ser à Puyloubier (11h30) ; Découverte de l’ins-tallation d’Isa Barbier au couvent des Minimes à Pourrières (12h30) ; Exposition automobile Liquidations de Vincent Bonnet (14h30) ; Rencontre avec l’artiste sur le parking de Carrefour Market à Trets (zone commerciale – D12 à 15h) ; Visite de l’exposition « Paysages chavirés. 1 » au domaine de Château Grand Boise à Trets et inauguration de l’installation Silence exposi-tions, Total de Noël Ravaud. Participation à la figuration d’un film performance de Noël Ravaud qui sera présenté le 16 octobre (16h). ROGNES Office de tourisme – 04 42 50 13 36 Visites libres du village sur le thème Rognes insolite : samedi à 15h visite de la Chapelle St Marcellin et dimanche à 10h visite de l’Eglise Notre Dame de l’Assomption et bénédiction des vendanges.

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VERS-PONT-DU-GARD Site du Pont du Gard – 0 820 903 330 ArchéoBalade : Au fil des siècles… l’empreinte des Hommes sur le site du Pont du Gard, marche de 2h30 le samedi à 14h30; conférence La Grotte ornée Baume Latrone: la 3D remonte le temps illustrée de photos, vidéos et 3D par Marc Azéma, chercheur, Bernard Gély, service régional de l’Archéologie de la DRAC Rhône-Alpes et David Lhomme, société ATMD, le dimanche à 16h30 ; atelier enfants Bâtisseurs en herbe, si nous reconstruisions le Pont du Gard ! qui inaugure sa nouvelle salle pédagogique, le dimanche à 14h30 ; entrée libre au Musée et Ludo et à l’exposition d’art contemporain Casanova forever, samedi et dimanche de 10h à 11h30 et de 14h à 17h ; inauguration du nouveau Centre de ressources, dimanche à 17h30. VITROLLES Hôtel de ville – 04 42 77 90 00 Visites du village et de l’église Saint-Gérard commentée par Elisabeth Baudin, archiviste municipale (sam 18 et 25 à 15h); visite de la Maison de maître de Fontblache commentée par E. Baudin (mar 21, ven 17 et 24, à 14h) ; spectacle Paroles d’écrits par la cie Teatropera (ven 24 à 20h30 à la Maison de maître de Fontblanche) , conférences : de Laure Verdon, maître de conf à l’Université de Provence sur Les droits seigneuriaux à Vitrolles durant le Moyen Age (mar 21 à 18h) et de Gérard Boudet, ancien responsable des Salins de Camargue (jeu 23 à 18h).

SAINTES-MARIE Château d’Avignon – 04 90 97 58 60 Visites libres du château de 10h à 12h30 et 14h à 17h30 ; expo D’Après nature (jusqu’au 31 oct.) ; ateliers artistiques pour les petits de 10h à 12h30 et de 14h à 17h30 ; Nos patrimoines : contre-visite par les Chanteurs de sornettes à 11h, 15h et 16h30, découverte décalée du domaine, agrémentée de chansons, d’expériences participatives, d’humour et de poésie. VAISON-LA-ROMAINE Théâtre antique –04 90 36 50 49 Dimanche à 15h : Le Monument et sa restauration, visite du théâtre antique par Jean Marc Mignon.

Résister pour vivre Des grands hommes oubliés ? La beauté des paysages ruraux, les produits authentiques que vous avez ramenés de vacances doivent leur existence au travail permanent des paysans, des bergers, qui ne sont pas là pour la couleur locale, mais vivent, résistent, et qui par leurs choix de production, conditionnent nos existences. Métiers en voie de disparition : la définition du sous développement tient dans le pourcentage de paysans, et nous sommes si avancés ! Pourtant, seule la présence de paysans maintient le tissu rural… Comment aujourd’hui être berger en Corse ou dans

le Larzac ? Pourquoi le choix d’un métier de la terre ? Les films de Marianne Thibout-Calandrini constituent une base de réflexion passionnante. Certes la photographie est superbe, plans larges sur de splendides panoramas, ou rapprochés sur le murmure d’une source, cadrages, couleurs, organisés avec une grande sensibilité, remarquable illustration musicale ; mais les interviews (dont celles de José Bové) apportent des analyses remarquables. Sans misérabilisme : un constat, une vision progressiste et responsable quant à l’avenir de notre planète. Un paysan qui fait

son fromage résiste à la mondialisation, au rouleau compresseur… Transmission de savoirs, mise en perspective des fins de nos choix. Hymne aussi à la liberté. Le berger, en serait-il le dernier symbole ? On attend avec impatience le troisième volet Produire pour vivre. MARYVONNE COLOMBANI

Les deux premiers DVD Les bergers ne prendront pas le maquis et Résister c’est créer, de U Paghjolu, éd Liberta production, 25 euros, disponibles sur demande à m.calandrini@yahoo.fr


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HISTOIRE

MARSEILLE AU MOYEN ÂGE

Marseille invisible

Installées dans les vastes bâtiments de l’ancienne usine de la SEITA, les archives municipales ont organisé une exposition sur la Marseille médiévale, période peu visible architecturalement, mais d’un très grand intérêt historique Deux oriflammes marquent le début du parcours. Une large banquette affiche les événements de période : 1040, pour la première extension médiévale des remparts ; 1481, pour le rattachement au royaume de France. À noter, dans la vaste entrée, une maquette de la ville d’avant la destruction des faubourgs, en 1357, excellente représentation du site et de son occupation. Déployée en deçà de l’actuel Cours Belsunce, elle est cernée de remparts (extension de 1190) percés de portes et entourés de fossés. Une chaîne ferme le port, la butte du Panier porte ses moulins et, partout, se pressent les édifices religieux. Un aqueduc, encore visible porte d’Aix, ravitaille la ville. Hors les murs, l’abbaye de Saint-Victor, isolée sur son promontoire, est un havre de paix pour la communauté monacale.

de l’intervention du Comte de Savoie auprès de Frédéric II. De même, il faut se concilier le prince. Les actes montrent le rôle de Raymond Béranger, ou de la famille d’Anjou à partir de 1257. Les droits perçus sont un enjeu stratégique : pour le prince, il s’agit de garnir ses finances; pour la commune, de faire prospérer ses marchands ! Les richesses viennent, bien sûr, du commerce. Un cartulaire de Jacques Messier, la «table de la mer», relève pour 13801387 les taxes perçues sur les marchandises. Charles d’Anjou, nouveau souverain après la transition des comtes de Barcelone, récupère la totalité des droits en 1257. Mais, lorsqu’il est incapable de s’acquitter de ses charges (la cure du port ou la solde des gardes), il concède des prélèvements à la Commune. On notera aussi la présence d’un atelier monétaire qui fonctionne jusqu’en 1243 : il frappe des coranats et des menuts que l’on peut voir exposés en vitrine, ainsi qu’un

Mais, ici, les archives ne sont pas les détentrices des documents les plus fameux, qui appartiennent à l’église. De même, si l’on trouve une évocation de l’approvisionnement ou de l’alimentation, la corbeille de fruits exposée en vitrine n’apparaît pas vraiment exceptionnelle ! On notera pourtant un livre de recettes journalières du collecteur de l’imposition sur le poisson frais et salé : rédigé par Hugues Bonecroix, notaire, en 1402. De même un contrat de location du jardin de l’abbaye de Saint-Victor, rappelle l’importance des légumes (pois, fèves, pois chiche, lentilles) ou de l’ortolage (potager) avec le chou, les poireaux, les épinards, courges, oignons, blettes, laitue, concombre, brocolis ou encore bourrache.

Troubles et fin

Une maquette de nef médiévale trône au centre de la pièce, reconstitution incertaine mais très explicite, qui ramène à la La première salle de l’exposition débute par vie troublée de la fin du Moyen Âge. Les un rappel : la ville est un enchevêtrement de tensions commerciales sont restées âpres plusieurs pouvoirs. Le comte de Provence et elles se doublent désormais de troubles réside à Aix, il est représenté à Marseille par politiques. Charles Duras conteste la un vicomte. Au Xe siècle, celui-ci partage ses légitimité de la reine Jeanne. La guerre de fils entre vicomté et l’épiscopat. Mais la réforcent ans provoque l’errance de troupes me de l’Église en occident met un terme à qui pillent le plat pays où elles séjourcette cohabitation familiale. L’indépendance nent. Marseille, unifiée en 1348, apprend épiscopale est sanctionnée par une fausse doalors à se défendre. nation de privilège faite par Benoit IX à Mais elle est saccagée en novembre 1423. l’abbaye de Saint-Victor. Le document exposé Une querelle de succession s’ouvre à la est remarquable, illustré de figures et nanti de mort de Jeanne II : Louis III d’Anjou chassceaux. L’empereur Frédéric Ier, autorité souse les troupes de l’autre prétendant, veraine en Provence, confirme, en 1164, les Alphonse V D’Aragon. La flotte, partie biens et possessions de l’Église de Marseille. de Naples, pille Marseille pendant 3 Au XIIe siècle, l’émiettement du pouvoir jours, pour se venger. La ville mettra un continue lorsque le chapitre épiscopal -les quart de siècle à s’en remettre. La mère chanoines qui assistent l’évêque- devient indéde Louis III, Yolande, intervient pour pendant. La ville, et c’est ce que montre fort concéder des facilités financières. Les bien une carte plaquée sur le mur, est coupée bouleversements économiques et politien trois. ques produisent un changement social Plan de Marseille en 1575, gravure extraite de l'Atlas de Braum et Hogenberg, Civitates Orbis Terrarum En 1178, le comte de Barcelone, souverain de la ville depuis projet de l’imposition sur les maisons appuyées au rempart d’importance : une nouvelle élite urbaine, issue du négoce, son mariage avec l’héritière vicomtale, exempte la cité de (1252). La population est alors estimée entre 10 et 20000 triomphe. Mais l’heure n’est plus au triomphe. Le roi René certains droits. On entre dans une autre période pour la cité: habitants. ne s’intéresse pas à la ville, et la néglige ! Sa mort en 1480 et l’essor du commerce, en liaison avec le renouveau de la La cité s’est organisée. Elle possède des statuts que l’on peut celle de son successeur, l’année suivante, scellent un autre circulation, avec les grands pèlerinages et les Croisades, consulter dans le cartulaire dit «livre rouge» (seulement pour destin pour la cité : elle entre dans le royaume de France. permet l’enrichissement de la ville, son développement la couleur de la couverture !) de 1257. Le comte désigne un Elle devient un appendice de la couronne, qui la traitera urbain et l’épanouissement d’un certain nombre de viguier, chef du conseil de la ville et gouverneur de la cité. comme une province lointaine. catégories sociales. Celui-ci nomme à son tour 6 prud’hommes chargés de désiDès lors, la lutte pour le pouvoir politique se développe entre gner le conseil : même si les Libertés sont garanties, le contrôle Les limites des archives Les archives ont mis à contribution leurs fonds pour préancienne et nouvelle élite. L’émancipation de la Commune politique reste bien présent. senter la ville à l’époque médiévale : la teneur des actes prend la forme d’alliances entre villes voisines, notamment Religion et alimentation explique le centrage sur l’histoire politique. Même si certains entre Arles, Avignon et Marseille. La ville chrétienne est évoquée avec un fac-similé de manus- aspects de la vie matérielle sont présents, on a peine à imaL’autonomie crit d’Arnaud de Villeneuve, un commentaire de l’Apocalypse. giner le quotidien des Marseillais de l’époque. D’autant que Des consuls sont mentionnés pour la 1re fois en 1193, et en De même sont représentés l’abbaye de Saint-Victor (des- la principale lacune provient de l’exposition de documents 1218 la Confrérie du Saint-Esprit permet aux métiers d’être sins), les ordres mendiants ou les confréries, l’activité des qui ne sont pas traduits. Résumer un document ne lui donintégrés dans le gouvernement urbain. Cette autonomie se religieux avec les hôpitaux que les ordres militaires (templiers ne pas de vie : au lieu de dire que le répertoire de Giraud rencontre encore avec le traité signé avec Gaète, autre cité ou hospitaliers de Saint-Jean) organisent. Ces ordres bénéf- Amalric s’exprime dans la langue du port, une spécificité, il Méditerranéenne. Il faut dire que Marseille a désormais de icient du privilège de faire partir deux navires par an pour la aurait fallu en donner l’exemple. vrais concurrents sur mer, surtout les Italiens -dont Gènes- Syrie, chargés de pèlerins. À noter encore que Louis d’Anjou RENÉ DIAZ qui dominent le commerce. Le deuxième grand thème de renonce à ses titres pour l’habit franciscain. Il meut à 23 ans, l’exposition est le port, centre de l’activité et le fondement de inhumé à Marseille dans le couvent de l’ordre, il est canonisé La ville oubliée : Marseille au Moyen-âge la ville. On sait qu’il a gardé son importance depuis l’anti- en 1317, 20 ans après sa mort. Parmi les documents de la Jusqu’au 27 nov quité grecque et romaine. pratique on peut voir un graduel (partition des chants reliArchives Municipales, Marseille L’appui de l’Empereur pour obtenir des privilèges commer- gieux), un bréviaire (livre de poche) pour la liturgie ou encore www.marseille.fr ciaux aux Marseillais est nécessaire : un acte de 1226 atteste des missels.

Le pouvoir



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SCIENCES ET TECHNIQUES

Est-ce la main de Dieu, est-ce la main du Diable… La bibliographie récente montre un questionnement grandissant de l’épistémologie et de l’histoire des sciences sur les rapports qui lient le développement des pratiques techniques, ou artisanales, et celui du savoir scientifique

Un avis motorisé

Déjà Robert Halleux, dans son ouvrage Le Savoir de la main, savants et artisans dans l’Europe pré-industrielle (voir Zib’ 30) s’appliquait à montrer que la révolution scientifique des siècles derniers est consubstantielle à la diversification, la multiplication et la complexification des pratiques artisanales. Le livre de Matthew B. Crawford dans son Essai sur le sens et la valeur du travail, Éloge du carburateur dont la traduction française est sortie aux Éditions de la Découverte en mars 2010- apporte un complément incontournable à cette approche du rapport dialectique entre pratique manuelle et développement de la logique scientifique. Quelle «vespa» a pu piquer ce brillant philosophe pourtant pourvu du très confortable emploi de directeur d’un «think tank» (réservoir de pensée) washingtonien pour virer sa cuti et en réaction ouvrir un atelier de mécanique moto ? Cet ouvrage beaucoup plus concret que le Savoir de la main, et cependant très rigoureusement référencé, n’en apporte pas moins, sur un ton agréable, anecdotique, souvent humoristique, une analyse très fine de l’appropriation du monde, de l’acquisition du savoir par la pratique immédiate. Son étude fait une grande part à la compréhension de l’évolution des stratégies de transmission des

savoirs technologiques, en relation avec les volontés politiques des «penseurs» de l’économie libérale. Il démontre que la société capitaliste tend à priver le savoir technique de sa dimension critique pour transformer les producteurs intelligents et autonomes en consommateurs abrutis et serviles.

l’interprète. Il n’y a pas de hiérarchie culturelle entre intelligence pratique technique et pratique théorique de l’intelligence, la première précède seulement la seconde. Qui perd le savoir-faire, perd le «savoir imaginer». Une société qui méprise son savoir artisanal tue son Art et sa Culture. YVES BERCHADSKY

Du toucher initial à la touche finale M. B. Crawford insiste sur le paradoxe du libéralisme qui ne reconnaît comme culturelles que les activités de management, de gestion et les arts «nobles», alors que sa survie dépend directement du développement de la culture des savoir-faire. La production artisanale est globalement considérée avec mépris dans nos sociétés comme si elle était privée d’intelligence. Il n’est que de voir l’évolution des contenus de formations dans nos écoles d’ingénieurs généralistes où les travaux pratiques d’atelier des années 70 ont été substitués par des heures de marketing, de gestion ou de management. Ce «mépris» de l’intelligence manuelle confine à ce que la majorité de nos jeunes ingénieurs négligent les carrières de production. Comment alors s’étonner que tout ce qui nous permet d’exprimer notre «génie artistique» soit désormais fabriqué… en Chine ? Pianos, violons, synthétiseurs, appareils photos…

chinois. Comment s’étonner alors que les «nouveaux prodiges artistiques» soient aussi… Chinois ? Depuis l’aube des temps la culture se développe sur le «faire», le «tour de main» théorisés ensuite en «savoir faire», en «état de l’art». Il n’est de virtuose du violon sans luthier virtuose. Il n’est pas d’art sans artistes, mais il n’est pas d’artistes sans artisans. Il n’est pas de «toucher de pianiste» sans «touches de piano». L’intelligence du facteur de piano est consubstantielle à celle de

Au Programme Biodiversifiez La 19e édition de la Fête de la Science se déroulera cette année du jeudi 21 au dimanche 24 octobre 2010. Elle sera centrée sur la thématique «BiodiversitéBioéthique, quels défis pour l’avenir». Elle trouve sa place dans l’Année internationale de la biodiversité proclamée par l’Organisation des Nations Unies. Nous reviendrons sur le programme dans Zib 34. http://www.drrt-paca.com

Nourrissez

Faites mouche

Avis de naissance du site Culture science en Provence - Alpes - Côte d’Azur. Ça y est, le site du réseau est né. Toutes les structures membres du réseau régional de culture scientifique, technique et industrielle en Provence-Alpes-Côte d’Azur ont reçu leurs identificateurs afin d’administrer leur espace sur le site www.culture-science-paca.org. Il appartient maintenant à chacun de l’alimenter afin qu’il devienne l’outil majeur de communication du réseau.

L’Écomusée de Gardanne lance un concours de création d’insectes en volumes, les créations qui devront être envoyées ou apportées avant le 30 septembre au musée, seront exposées pendant la Fête de la Science au CMP Charpak. Envoyez vos créations! Regardez les créations sur le site, ça vous donnera des idées et en plus c’est vraiment… chouette? Heu… non, mais pas mo(u)che du tout ! http://www.drrt-paca.com/images/stories/ CSTinformations/concoursinsectes.pdf Y.BC.


MICHEL ONFRAY

PHILOSOPHIE 91

Arrêtez l’Onfray ? Michel Onfray a raison de rappeler (p. 450) que Freud en 1919 continue à appeler sa propre pratique la «psycho-analyse», alors que ses précurseurs reconnus disent depuis longtemps psychanalyse. Mais la machine de guerre et l’hagiographie freudienne feront de lui le grand inventeur-découvreur, le Père. Interdisant par làmême toute objection, toute remise en cause. Or bien des points de son œuvre sont contestables.

Petits arrangements avec le réel Commençons par le moins grave, les arguments ad hominem : Freud trafiquait ses sources. La correspondance ne cesse de contredire les analyses qui sont publiées dans ses œuvres ; il n’avait pas de déontologie : contre l’éthique praticienne qu’il déclarait, il analysait ses proches -femmes ou maîtresses de ses amis et, bafouant le secret du divan, il allait même jusqu’à révéler leur intimité, s’en servant parfois pour manipuler les maris ou amants ; il analysa sa propre fille durant 8 ans, qui ne se débarrassa jamais de l’amour du père et mourut sans avoir eu le moindre rapport sexuel ; il affirme dans une conférence s’appuyer sur dix-huit cas, et dans une correspondance il reconnaît n’avoir abouti aucune de ces analyses présentées. Autre objection d’Onfray, toujours circonstancielle. Freud écrit qu’«une fois le travail psychanalytique accompli, il nous faut retrouver le rattachement à la biologie.» S’appuyant sur une patiente argumentation documentée sur les préoccupations biologistes de Freud, Onfray a raison de préciser : «on aurait aimé que cette thèse si juste soit mise en pratique ; Freud n’a eu de cesse de la nier pour s’engouffrer pleinement dans une thérapie purement verbale et défendre une étiologie exclusivement marquée du sceau du symbolique et du fantasme» ; ainsi Freud serait, du fait de cette négligence, responsable de la mort de trois patients (lire le cas Emma Eckstein p. 342).

Psychanalyse et politique Restons encore dans les objections secondaires, par rapport à une remise en cause des fondements de la psychanalyse : Freud était un conservateur proche du racisme et de la bêtise de classe : «Les pauvres sont, moins encore que les riches, disposés à renoncer à leur névrose parce que la dure existence qui les attend ne les attire guère et que la maladie leur confère un droit de plus à une aide sociale» ; il qualifie le pacifisme d’Einstein de sottise, parle de races moins cultivées qui se reproduisent plus vite... Il y a dans sa pensée une ontologie du mal radical écrit Onfray, à l’opposé de ce qu’on attend d’un héritier des lumières. Là, Onfray dépasse l’attaque de l’homme, et remet en cause sa pensée. On pourrait ainsi passer sur la dédicace à Mussolini, son silence sur le fascisme en regard de ses attaques contre le marxisme, s’ils n’étaient signifiants d’une pensée politique : pour Freud, à l’opposé des Lumières, l’homme est naturellement violent, et l’égalité et la justice sont donc des utopies. Certes la bêtise politique d’un individu ne saurait porter atteinte au prestige de ses écrits, lorsque justement ils se tiennent hors du champ du politique. Le problème est que cette bêtise, c’est-à-dire cet aveuglement sur le fascisme qui s’installe, est d’après Onfray la conséquence de sa pensée : pulsion de mort, horde primitive,

À quoi bon un brûlot sur la vie de Freud ? Est-il judicieux de s’en prendre au père de la psychanalyse à l’heure où la caractériologie a gagné du terrain et réduit les individus à des déterminismes dangereux qui veulent repérer des traits déviants chez le petit enfant ? Et puis en quoi l’acharnement sur un homme va-t-il faire avancer en quoi que ce soit les idées ? Les interventions intempestives et simplificatrices d’Onfray dans le champ médiatique sont insupportables. D’autant qu’il en vient à nier l’inconscient même, jette aux orties la pratique de la psychanalyse en réduisant ses effets à ceux d’un placebo… Mais bon : pour parler correctement d’Onfray l’agacement ne suffit pas, il faut lire son livre. Surprise : cet objet de 600 pages est passionnant, documenté et sans véritable outrance ! Le dossier Freud est à certains égards accablant, et on s’interroge sur la persistance de la psychanalyse à se référer sans distance critique à son initiateur…

Le plus étonnant quand on lit Onfray, au regard de ce qui apparaît dans les médias, est que ses questions n’attaquent en rien la psychanalyse en tant que philosophie révolutionnaire. Freud, dit Onfray, a fait rentrer la sexualité dans la clarté de l’analyse philosophique, ce qui est une révolution. Mais cette philosophie du XXe siècle voulait être une science, et est devenue une métaphysique de substitution dans un monde sans métaphysique. Superbe atelier de psychologie littéraire, elle permet l’écriture par le sujet pensant de sa propre fiction symbolique. Elle accompagne le désinvestissement politique : à défaut de changer le monde, elle enroule théoriquement le repli sur soi. En tant que métaphysique de substitution, il est interdit de la remettre sérieusement en cause. Les attaques contre Onfray, de la part d’Elisabeth Roudinesco entre autres, tendraient par leur violence même -il y est taxé d’antisémite, de pervers, et rapproché de l’extrême droite française- à lui donner raison : s’il n’est pas permis de «déboulonner Freud», c’est bien qu’il est une idole. RÉGIS VLACHOS

Le crépuscule d’une idole, L’affabulation freudienne Michel Onfray Grasset, 22 euros

meurtre du père, races inférieures, besoin d’un chef. Le philosophe médiatique remarque ainsi, sans la haine qu’on le voit afficher sur les écrans, que Freud dénie l’histoire de son temps, et refuse d’inscrire sa pensée dans la trame contemporaine des influences: «Tout ceci installe Freud dans un théâtre d’idées pures dans lequel il anime les marionnettes de ses personnages sans autre souci que celui d’offrir un beau spectacle intellectuel.» On ne saurait mieux dire la polarisation excessive de la psychanalyse sur l’histoire égotique et narcissique.

Foin de la guérison ? Le plus grave serait là : Freud a écrit à plusieurs reprises que dans la psychanalyse la guérison du malade importe moins que l’apport théorique que fournit le cas clinique. Comment continuer à considérer les Cinq psychanalyses comme une œuvre de référence puisque, d’après les patients eux-mêmes, Freud semble écrire n’importe quoi ? Le petit Hans, l’homme aux loups, le cas Dora sont par exemple des affabulations théoriques qui ne correspondent pas à la réalité. Pourquoi la psychanalyse s’appuie-t-elle depuis cent ans sur des bases aussi douteuses ? Pourquoi cette permanente référence dans le discours à Freud ? N’y avait-il pas d’autres choses à forger pour nourrir le concept d’inconscient que de lisser indéfiniment l’Œdipe et la castration ?

Et quoi ? Pas de mauvaise foi d’Onfray dans cet ouvrage ? Si, au moins deux fois. En dix pages (209-219) il résume superbement la déconstruction par Freud de l’hypothèque religieuse et on sent bien qu’il y adhère… mais il ne manque pas de le railler puisqu’il s’agit d’un travail psychanalytique, donc faux ! Par ailleurs Onfray moque la bêtise de Freud critiquant le judaïsme (L’homme Moïse…) au pire des moments. Or Freud s’inscrit dans un mouvement plus vaste de cette critique juive du judaïsme, qui va de Marx à Trotski en passant par Einstein… ce qu’Onfray passe sous silence. R.V.


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PHILOSOPHIE

CHARLIE HEBDO

Rencontre avec Charlie Hebdo Festival d’Avignon, juillet 2010, près de la place Carnot. Un attroupement de festivaliers, de passants à l’écoute assidue : des banderoles, une envolée lyrique mais argumentée contre l’aristocratie d’État en France, contre les réformés du système de santé, contre la gratuité. C’est bien eux, ils sont là : l’équipe de Charlie Hebdo. Vingt ans que je les lis mais je ne les ai jamais vus. Ah si. Sage comme une image, antinomique de ses dessins, je reconnais la coupe inimitable de Cabu. Et l’agité qui parle ; c’est Pelloux me dit-on. Quel talent, même en orateur, lui à la prose si fine chaque semaine sur la détresse des petites gens. Et le moustachu ? Charb! en personne ; ses dessins me font mourir de rire depuis des lustres, ses chroniques aussi, si justes contre la bêtise. Disons le tout net ; il faut que je leur parle, Zibeline ou pas : maintenant que Val est parti, ils sont redevenus mes amis de kiosque. Charlie Hebdo c’est le seul journal indépendant en France avec le Canard Enchaîné. Rare presse écrite populaire qui fait voir le monde autrement ; comme avec les Guignols, la satire légère est une forme de combat pour montrer d’autres vérités que celles qui nous dressent les uns contre les autres, nous aveuglent sur le délabrement social et écologique du monde. Charlie Hebdo, ou penser autrement sans se prendre au sérieux. Je sors de mes réflexions, le débat est fini ; je

On est reconnu comme un journal satirique et de dessins. Moi ce qui m’intéresse dans Charlie, depuis que je suis môme, c’est les dessins et le ton, ce ton indépendant qu’on ne trouve pas ailleurs ; on est sûr en lisant Charlie qu’on ne trouve pas un gros industriel derrière, qu’on ne renvoie pas les ascenseurs… Je connais le fonctionnement de la presse, et il y a beaucoup de ça : on renvoie l’ascenseur à un tel parce qu’il nous a donné telle info, qu’il a rendu tel service… Certes, mais s’il n’y a pas d’info qu’apportez-vous au lecteur ? Il y a de plus en plus d’info, mais ce qu’on fait c’est chercher à étonner le lecteur. Si tu fais un journal pour enfoncer des portes ouvertes, si on écrit exactement ce que pense le lecteur, si on ne le surprend pas ça ne sert à rien. Mais comment vous le surprenez ? En nous surprenant nous-mêmes ! Quand tu te lances dans un texte ou un dessin sur un sujet donné, tu as une idée évidente de ce que tu vas écrire, dessiner. Et puis au fil de la réflexion tu trouves des ramifications, tu vois que le problème est un peu plus complexe que ça ; ou ce que tu trouvais être un enfonçage de portes ouvertes tu peux le transformer. Tu vois un thème qui n’a pas été abordé, que les autres journalistes n’ont pas

saute sur Charb comme Maurice sur Patapon : Zibeline : Qu’est-ce que vous faites à Avignon ? Charb : Un peu comme ce qu’on avait fait au début de Charlie avec Val, d’aller dans les facs, les théâtres, les cinémas… rencontrer les lecteurs pour échanger longuement ; depuis on ne le fait plus que dans les salons du livre mais l’échange est trop rapide… Là les gens ont le temps de s’arrêter, de discuter, d’écouter, de partir quand ils veulent, on n’est pas là pour leur vendre un album. En fait, pendant des années il y a eu une fainéantise de notre part pour la rencontre avec les lecteurs ; ça fait 15 ans qu’on ne l’a pas fait… Pelloux : Ouais, c’est Val qui vous enfermait… Charb : … alors Pelloux a proposé qu’on parte à la rencontre des lecteurs. Et tu en retiens quoi de ces rencontres pour le moment ? Charb : Les gens nous voient plutôt d’un bon œil. C’est marrant, quand Pelloux parle du système de santé ça les passionne, parce que ça les touche. On ne parle pas de politique politicienne ici, parce que ce genre de réflexions les gens peuvent les faire eux-mêmes ; on ne leur apporte aucune info. Mais quel est le rôle de Charlie justement ? L’info ou la satire ?

Satire pour un monde plus juste Charb, Cabu et P. Pelloux © Philippe Hanula

vu. C’est ça l’info finalement, dans la satire. Parlons de choses qui fâchent. Ou pas. Où en est Charlie depuis le départ de Val ? Depuis son départ la perception d’un certain nombre de lecteurs a changé ; il a monté contre lui tout un tas de gens et continue à le faire en prenant les décisions qu’il prend à France Inter ; et les lecteurs commencent à comprendre qu’on est autonome et qu’on n’a plus grand chose à voir avec lui. On a retrouvé des lecteurs: en un an, depuis son départ, on a gagné 4000 lecteurs. Mais ce qui a permis à Charlie de survivre c’est, comme dans toute entreprise en période de crise, de faire des économies, de changer de papier, de négocier avec les banques… Et puis il faut dire aussi qu’aujourd’hui il y a de plus en plus de gens qui sont à 2,50 euros près pour acheter Charlie. Pelloux : Charb, il faut y aller sinon on est en retard pour déjeuner… Ok, on continue en marchant. Explique-moi un peu comment ça s’est passé ces divergences avec Val Charb : Le premier désaccord avec Val c’était le désaccord sur le Kosovo où il soutenait les bombardements de l’OTAN ; pour moi son changement a


PHILOSOPHIE 93

commencé là, il a pris des positions qui n’étaient pas celles de Charlie. Moi je suis rentré à Charlie pour l’humour, la satire : Cavanna, Cabu, etc… mais aussi sur des positions politiques d’antimilitarisme primaires. En plus j’ai connu l’équipe au moment de la Grosse Berta, un journal qui s’était monté contre la guerre d’Irak. Et puis Cabu a eu un procès avec l’armée : sa prise de conscience contre l’armée est venue de la guerre d’Algérie qu’il a vécue de l’intérieur. J’étais nourri de tout ça, pour moi Charlie hebdo était un journal pacifiste quoiqu’il arrive, tu ne défends pas des bombardements sur des populations civiles. Or, en soutenant l’intervention de l’OTAN tu soutenais des bombardements sur des populations civiles serbes : c’était pas le meilleur moyen de mettre un terme à la guerre en massacrant des gens qui n’avaient rien à voir là-dedans. Et du coup, là, on a commencé à se friter un peu beaucoup. Comme ses amis gauchistes de l’époque lui ont fait remarquer qu’il déraillait un peu il s’est vexé et s’est de plus en plus isolé… Pelloux : Bon Charb tu viens manger ? En plus tu parles à un gratuit… Justement, qu’est-ce que tu penses de la presse gratuite ? Charb : Je pense tout simplement que la presse gratuite n’est pas gratuite ; avec 20 minutes ou Métro la pub paye le journal, mais les marques qui font cette pub se remboursent en vendant plus cher leur produit dans le supermarché ; c’est pas la qualité du produit que tu payes en plus mais le budget publicitaire de Danone qui prend des pubs dans 20 minutes. Tu payes pas le journal directement mais en achetant des yaourts ; c’est une espèce de TVA… privée. Et quand c’est la pub qui fait la une du journal, c’est pas du journal quoi ! Au fait, dans… comment ça s’appelle ton truc… oui Zib… quoi… Zibeline… oui, dans Zibeline, là, je vois une pleine page de pub de tel théâtre : et vous allez pouvoir en dire du mal ? Ben oui, on se gène pas. Heureusement les théâtres n’ont pas les mêmes mœurs que Danone, ils

comprennent -en gros- la nécessité de la critique. De toute façon ça ne te regarde pas, et c’est moi qui pose les questions. Pourtant Oncle Bernard (Bernard Maris) défend la gratuité ? Mais lui il défend la gratuité sur Internet, de logiciels, des produits culturels. Mais il faut quand même se demander pourquoi on vivrait dans une société à moitié gratuite, où il n’y aurait que des produits culturels gratuits ; en gros il n’y aurait que les artistes qui n’auraient pas le droit de vivre de leur métier ? et les industriels continueraient à vendre leur yaourt ? Moi je suis pour que tout soit gratuit, qu’on trouve un système dans lequel chacun pourrait se procurer les biens essentiels de manière gratuite. Ce système tu en as une idée ? Oui c’est l’union soviétique, grosso modo. …. !!!!??? Pour moi c’est un modèle, un modèle qui a foiré parce que les gens n’étaient pas volontaires pour le faire. Personne n’a joué le jeu, et certains ont profité pour détourner le système ; c’est comme l’anarchie, tel que certains le décrivent comme Normand Baillargeon

(voir Zib 27, L’ordre moins le pouvoir, Agone 2008, ndlr) : la société qu’ils proposent est parfaitement viable, sauf que ça repose sur la confiance qu’on a dans les gens ; il faut que chacun soit partie prenante de ce système, soit volontaire. Si tu as une opposition c’est foutu d’avance. Il faudrait qu’il y ait un consensus général pour aller dans cette direction là, ça pourrait être une Union Soviétique idyllique ou l’anarchie. À partir du moment où toute la classe ouvrière n’est pas d’accord pour aller dans la même direction, c’est foutu. Faut pas exagérer ! Ce système hyper-centralisé de l’URSS dégénère forcément en bureaucratie… Les traces qu’on a c’est les papiers de la bureaucratie. Mais la vie des gens, c’est-à-dire la volonté des gens de vivre en Union Soviétique ou dans un autre système, on n’en a pas beaucoup d’écho : quelle était la proportion de Russes qui étaient volontaires pour vivre dans une Union Soviétique dans les années 20 ? Il n’y a qu’à voir à Cuba : les gens en ont marre de Castro depuis longtemps mais ils ne veulent pas du système américain; ils sont anti-américains et veulent une société juste où tout ne soit pas confisqué par une minorité. Bon on fait la prochaine interview sur «gratuité et société juste des USA à Cuba en passant par l’URSS» ? Quoi qu’il en soit, bon appétit et vive Charlie ! ENTRETIEN RÉALISÉ PAR RÉGIS VLACHOS ON REMERCIE CHARB POUR SES DESSINS «GRATUITS». CHARLIE HEBDO TOUS LES MERCREDIS EN KIOSQUE.


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Histoire et patrimoine René Diaz renediaz@free.fr

Sciences et techniques Yves Berchadsky berch@free.fr

Ont également participé à ce numéro : Dan Warzy, Yves Bergé, Aude Fanlo, Christophe Floquet, Jean-Mathieu Colombani, Pascale Franchi, Clarisse Guichard, Christine Rey

Photographe Agnès Mellon 095 095 61 70 photographeagnesmellon.blogspot.com Directrice commerciale Véronique Linais vlinais@yahoo.fr 06 63 70 64 18 Chargée de développement Nathalie Simon nathalie.zibeline@free.fr 06 08 95 25 47




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