Zibel108

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10.06 > 15.07.2017

N°108

ZIBELINE

Mensuel culturel engagé du Sud-Est Entretiens

exclusifs

Jean-Luc

Mélenchon

Bernard

Foccroulle

3€ Tous les programmeset nos conseils



JUIN JUILLET 2017

CULTURE ET SOCIÉTÉ Mensuel payant paraissant le deuxième samedi du mois Édité à 20 000 exemplaires, imprimés sur papier recyclé Édité par Zibeline BP 90007 13201 Marseille Cedex 1 Dépôt légal : janvier 2008 ISSN 2491-0732 Imprimé par Riccobono Imprim’vert - papier recyclé Crédit couverture : © Alouette sans tête Conception maquette Tiphaine Dubois

Directrice de publication & rédactrice en chef Agnès Freschel agnes.freschel@gmail.com 06 09 08 30 34 Rédactrice en chef adjointe Dominique Marçon journal.zibeline@gmail.com 06 23 00 65 42 Secrétaire de rédaction Anna Zisman anna.zisman.zibeline@gmail.com

ARTS VISUELS Claude Lorin claudelorin@wanadoo.fr

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Que ferons-nous au temps chaud ? Notre été de festivals, de repos et de plage, de lecture et d’apéro au soleil, d’expositions et de promenades vespérales, notre saison espérée s’annonce, au terme d’une séquence électorale qui a bouleversé notre ordre politique. Notre nouveau Président veut, à tout venant, gouverner par ordonnances, et sa majorité parlementaire va lui en donner le droit. À moins d’un sursaut législatif improbable, notre Code du travail sera en morceaux lorsque la bise reviendra. Devrons-nous crier famine ? Hurler que les salariés ont besoin d’un Code du travail protecteur ? Que les licenciements abusifs doivent être décemment indemnisés ? Que nous ne pouvons pas travailler jusqu’à 70 ans en entretenant nos enfants qui n’ont pas accès à l’emploi, et nos parents dont la dépendance n’est pas financée ? Que nous avons besoin de nourriture plus saine, d’un air qui ne nous asphyxie pas ? Ne voient-ils pas les files devant les soupes populaires, les hébergements d’urgence, les discounts aux produits périmés ? Ne voient-ils pas que le désespoir social augmente ? Savent-ils, 108 ces politiques qui veulent nous gouverner par ordonnances, que le désespoir du peuple entraîne le fascisme, ou la révolution ? Le Front national n’a jamais été aussi haut. Alors que le refus de la loi travail est massif, que la politique libérale menée par le gouvernement socialiste a été vigoureusement sanctionnée par les urnes, le Gouvernement s’apprête à soumettre les intérêts des citoyens à la loi capitaliste du profit de quelques-uns. Et au lieu de s’unir pour lutter contre ce qui advient, la Gauche, plus irresponsable que jamais, multiplie les investitures et les étiquettes, et prépare sa déroute. L’été sera chaud. Les Festivals 2017, très politiques et internationaux, parlent de migration, d’altérité, mais peu de pauvreté et de chômage. Les artistes ont-ils conscience du réel ? Si rien n’advient, le 20 septembre, après la trêve estivale et la rentrée peu propices aux mouvements sociaux, un nouveau Code du travail sera adopté. Son joug pèsera lourd sur tous les travailleurs, tous les chômeurs, les retraités, les fonctionnaires. Et sur l’avenir de nos enfants. Certains étés les artistes se sont levés pour défendre leurs droits. Cet été, au temps chaud, faudra-t-il déchanter ? Ou demain, pauvres cigales, danser de désespoir devant des frigos épuisés ?

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AGNÈS FRESCHEL


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15 JUILLET En vente 3€ chez 1858 marchands de journaux du Sud-Est

À écouter sur WRZ Marie-José Mondzain et «Confiscation», Paul Otchakovsky-Laurens et les éditions POL, Le Graff en Méditerranée, Léon Telvizian et la crise des ordures de Beyrouth, Bernd M. Scherer et l’anthropocène, Grand Corps Malade et «Patients», «Les aventuriers des mers» au MuCEM...

À voir sur WebTV Zibeline Le festival de Chaillol et le Fabien Mary trio, Jan Goossens et le Festival de Marseille 2017, «La question subsidiaire», les derniers épisodes de la websérie «Poubelle C’est la Vie !»...


sommaire 108

politique culturelle Le paradoxe du Gouvernement (P.6) La gauche aux législatives (P.8-9) Entretien avec Jean-Luc Mélenchon (P.10-11) Représentation politique en philosophie, épisode 2 (P.12-13) Entretien avec Bernard Foccroulle (P.14-15)

Bêtes de scène, Emma Dante - Festival d’Avignon © Masiar Pasquali

festivals Théâtre, danse, arts de la rue (P.16-35) Musiques (P.36-55) Images (P.56-63)

Guillaume Perret - Jazz des cinq continents © Guillaume Saix

Avignon, Marseille, Aix, Lambesc, Montpellier, Vitrolles, Aubagne, Port-St-Louis, Mallemort, Alès, Vaison, ChâteauArnoux, Toulon, Gréoux, Ste-Cécile-les-Vignes, St-Martinde-Castillon, St-Rémy, Istres, Miramas, Arles, Pourrières, St-Cézaire-sur-Siagne

AU PROGRAMME DU MOIS Spectacles (P.64-65) Musiques (P.66-67) Marseille, Aix, Port-St-Louis, Ollioules, Sète, Montpellier, Pays de Fayence

Kalakuta Republic, Serge Aimé Coulibaly - Festival de Marseille © Doune Photo

critiques Spectacles, musiques, littérature, cinéma (P.68-71)

Exposition Les Éclaireurs, Avignon - Ousmane Sow, Le lanceur Zoulou, 1990-1991, résine, matériaux divers, 230 x 250 x 105 cm © Grégory Quittard, Christophe Aubry

cinéma [P.80-85] Arts visuels [P.86-98] Marseille, Aix, Nîmes, Châteauneuf-le-rouge, Arles, Toulon, Avignon, Montpellier, Sérignan


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politique culturelle

ON S’ÉTAIT HABITUÉS DEPUIS 5 ANS AU PARADOXE SOCIALISTE/LIBÉRAL. MAIS LE PREMIER GOUVERNEMENT MACRON INCARNE MIEUX ENCORE L’OXYMORE…

En Marche… arrière ?

Françoise Nyssen, ministre de la Culture, devant l’œuvre Le monde durable de demain sera culturel, réalisée dans le cadre de la Semaine du Développement Durable par le collectif Mousse Graffiti © Ministère de la Culture

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n reproche communément à celui que nous avons élu d’être un produit des médias, de la finance, de l’oligarchie, du dessein mondial d’assujettissement des classes populaires, et de tout projet politique de gauche. Pourtant son élection interroge surtout notre désir de paradoxe, et d’entre-deux. Comment ce Gouvernement qui programme la fin de la sécurisation sociale par la loi, et par le code du travail en particulier, peut-il être perçu comme rassurant ? Le premier Gouvernement d’Emmanuel Macron est un paradoxe. Emmené par un Premier ministre de droite, ex-cadre pensant d’Areva, et lobbyiste, il offre un poste de ministre d’État à Nicolas Hulot. Comment penser la « transition écologique », comme l’indique son poste, dans un gouvernement dirigé par un Premier ministre qui a voté contre la transition énergétique, défend le nucléaire, et prône le maintien dans sa ville du Havre d’une centrale à charbon extrêmement polluante ? Comment Nicolas Hulot se sortira-t-il de ce paradoxe, et quelles marges de manœuvre aura-t-il ? Nul ne le sait. Mais la nomination d’un ministre si populaire participe à éteindre nos peurs écologistes légitimes, et à convaincre les électeurs écologistes de voter République en Marche aux législatives. La nomination de Françoise Nyssen, directrice d’Actes Sud, éditrice estimée, femme de talent et de goût, suit sans doute le même

« On nous a dit que le marché allait nous sauver, alors que notre dépendance au profit et à la croissance nous fait sombrer chaque jour davantage. On nous a dit qu’il était impossible de sortir des combustibles fossiles, alors que nous savons exactement comment nous y prendre -il suffit d’enfreindre toutes les règles du libre marché : brider le pouvoir des entreprises, reconstruire les économies locales et refonder nos démocraties. » Naomi Klein, Tout peut changer, Actes Sud 2015

dessein : le monde de la culture, qui reprochait à Fleur Pellerin de ne pas lire (assez), connaît les qualités de sa nouvelle ministre. Dont un

des premiers actes est d’ailleurs de s’engager auprès de Nicolas Hulot pour la semaine du Développement durable. Sa nomination est très rassurante pour un monde culturel qui avait plutôt voté pour Jean-Luc Mélenchon, ou Benoît Hamon. Pour la région cette femme, ancrée au Sud, professionnelle, éditrice de Stéphane Hessel, de Pierre Rabbhi, mais aussi d’Olivier Py ou Barbara Cassin, semble garantir par sa seule présence au Gouvernement que la pensée aura sa place, le rhizome, le local, la contestation, voire la radicalité de Naomi Klein. Mais comment cela serait il possible, dans un Gouvernement où l’éducation est confiée à Jean-Michel Blanquer ? L’ancien directeur de l’ESSEC veut que les établissements soient gérés comme des entreprises, dans un esprit de rentabilité, avec une autonomisation des lycées. Mais que veut dire la rentabilité d’une école ? Quel est son objet ? Fabriquer des citoyens, éduquer des êtres humains, ou coûter moins cher et s’adapter au marché du travail et à ses courtes vues ? De plus le choix à la carte d’une partie des enseignements dispensés va accroître les différences entre établissements, et la fracture scolaire. La difficulté d’y vivre, aussi, du moins dans les moins performants. Comment concilier cela avec une quelconque ambition culturelle ? À moins de cultiver l’entre-soi et d’acter la fracture, par l’éducation et la culture, entre les classes sociales, on ne voit pas comment Françoise Nyssen et Jean-Michel Blanquer pourraient avoir une vision commune... Nicolas Hulot et Françoise Nyssen seraient-ils des leurres, des miroirs aux alouettes recrutés en vue d’un consensus aux législatives ? Cela n’est pas certain. Le premier Gouvernement de Macron est si composite qu’on ne sait quelle en est l’intention directrice. Sauf peut-être celle de casser les anciens « partis de gouvernement » en recrutant dans leurs rangs ? L’intention de gouverner par ordonnances et de casser le code du travail est en tous les cas clairement énoncée. Les revendications des Nuits debout sont déniées, la gauche est en lambeaux, mais celle qui a édité La Stratégie du choc et Tout peut changer est ministre de la Culture. AGNÈS FRESCHEL


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politique culturelle

À gauche,

le suicide ou le sursaut ? LES ÉLECTIONS LÉGISLATIVES QUI ONT LIEU LES 11 ET 18 JUIN S’ANNONCENT PÉRILLEUSES POUR LA GAUCHE, EN PARTICULIER DANS NOTRE RÉGION. L’ENTREPRISE EN MARCHE A INDISCUTABLEMENT RÉUSSI SON OPA

S

’il n’est pas garanti qu’En Marche obtienne la majorité absolue au parlement, elle est parvenue à fragiliser la concurrence. Alors qu’Emmanuel Macron n’est arrivé en tête du premier tour que dans 2 de nos 57 circonscriptions (voir Zib 107) et qu’il a fait des scores nettement plus bas ici que sa moyenne nationale, les candidats présentés par la République En Marche peuvent remporter de nombreux sièges. Le produit REM est tout neuf, et même s’il se fonde sur de vieilles recettes, la campagne marketing a été efficace et a su séduire de part et d’autre. Chez Les Républicains comme au Parti socialiste, l’attraction vers ce centre de gravité autoproclamé a eu de l’effet. Maintenant que les rivaux directs sont morcelés, la sphère d’influence du président ne cesse de s’amplifier. Reste désormais à connaître comment s’organisera son opposition. À droite de LR, le retrait de Marion Maréchal le Pen affaiblit le FN local, en désaccord avec Marine le Pen. Qu’en est-il pour la gauche ? Scénario impensable quelques semaines auparavant, elle a bien failli être présente au second tour de l’élection présidentielle. Quelles sont aujourd’hui ses perspectives ?

Des électeurs déboussolés

Dans nos régions, une candidature a focalisé toute l’attention médiatique : celle de JeanLuc Mélenchon (lire son interview pages suivantes), venu affronter Patrick Mennucci, élu PS sortant dans la 4e circonscription de Marseille. Fort d’un score élevé dans le centreville lors du premier tour de la présidentielle, le candidat de la France insoumise a décidé de faire de Marseille « un enjeu national ». Le choix de se présenter dans cette circonscription a pourtant surpris : avant son arrivée dans la course, elle semblait acquise au député sortant

Affiches électorales © Christian Perry-Giraud - Creative Commons Flickr

et pouvait donc être considérée comme un territoire de gauche, sans risque de bascule ni à droite, ni au FN. Durant son mandat, si Patrick Mennucci, est resté ambigu sur la Loi Travail, qu’il a votée, il ne l’a pas été sur la déchéance de nationalité, à laquelle il s’est fermement opposé. Contrairement à d’autres dans son parti, il n’a pas cédé aux sirènes macronistes et, s’il est réélu, il entend s’inscrire dans la ligne prônée par Benoît Hamon d’une opposition affirmée au nouveau Président. Mais pour Jean-Luc Mélenchon, l’étiquette « socialiste » n’est plus un label de gauche. « Je ne veux pas affaiblir le PS, je veux le remplacer », déclarait-il sans détour lors de l’annonce de sa candidature à Marseille. Cette stratégie est-elle la bonne ? Il est probable qu’elle soit risquée. Parmi l’électorat de gauche, la position de

Jean-Luc Mélenchon est souvent mal comprise. Tout en annonçant vouloir s’affranchir de « la vieille tambouille politicienne », la FI y retombe, d’une autre manière, tant il semble que ses adversaires soient les candidats socialistes ou communistes plutôt que les libéraux ou les nationalistes. Ainsi, alors que le Parti communiste a retiré son candidat face à JeanLuc Mélenchon (et face à Sarah Soilihi, qui affrontera Stéphane Ravier (FN) dans la 3e circonscription de Marseille), la FI a maintenu le sien contre Jean-Marc Coppola (PC), dans la 7e. Élu de terrain, bien implanté dans ces quartiers, un éparpillement des voix dû à la présence du candidat FI pourrait l’empêcher de l’emporter sur Henri Jibrayel, le député PS sortant. Ayant réuni, contre toute attente, 7 millions d’électeurs lors de la présidentielle, FI dispose d’un tremplin pour s’ancrer dans le


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nouveau paysage politique en tant que force majeure d’opposition. Mais quelle pérennité de cet élan aux législatives s’il se heurte à de telles querelles fratricides ? Le défaut d’entente entre les différentes composantes de la gauche risque de provoquer son échec tout entier. Une tendance au sabordage qui se confirme au niveau national : dans de nombreuses circonscriptions, les candidats se revendiquant de gauche seront au moins quatre (PS, PC, FI et Ecologistes). FI espère obtenir plus de députés que le PS, et le PS redoute de perdre son groupe parlementaire. Plus encore que de les déboussoler, il y a là de quoi décourager les électeurs.

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Division et confusion

Cette division des candidatures implique une dispersion des suffrages qui favorisera l’élection de députés REM, LR ou FN. D’autant plus qu’à cette désunion s’ajoute la confusion entretenue par le label « Majorité Présidentielle ». Devenue un véritable fourre-tout, cette appellation a été récupérée par des candidats de tous horizons. Dans la 14e circonscription des Bouches-du-Rhône, Jean-David Ciot, le premier secrétaire de la fédération PS du département, a sollicité l’investiture de la REM. Il ne l’a pas obtenue, a déclaré publiquement en être déçu et il aura face à lui une candidate macroniste. Qu’importe, il a gommé toute référence au PS pour sa communication de campagne, préférant apposer le fameux passe-partout « Majorité Présidentielle ». La tactique est rodée, elle est utilisée aussi bien par des candidats PS que LR, et elle peut conduire à des situations grotesques. Ainsi, Anne-Yvonne Le Dain, députée PS sortante de la 2e circonscription de l’Hérault, affichant son soutien à Emmanuel Macron (mais devant affronter une candidate REM) a été désinvestie par le PS. Elle a décidé alors de poursuivre en justice son propre parti.... C’est déjà grotesque, cela pourrait même être drôle si les perspectives n’étaient pas si préoccupantes. À la différence de François Hollande, Emmanuel Macron n’a pas caché ses intentions. La réforme du code du travail qu’il entend mener très rapidement s’annonce brutale. S’il obtient une majorité absolue à l’assemblée, peu importe qui de FI ou du PS aura le plus de députés. Ils ne pourront pas infléchir les décisions du Gouvernement. La dégradation de la situation sociale, entamée sous le quinquennat précédent, ne ferait que s’amplifier. Pour la gauche, si le sursaut ne vient pas des urnes, l’issue pourrait alors se trouver dans la rue. Les appels au front social, qui déjà se multiplient à travers le pays, semblent le signe que les citoyens de gauche ont anticipé un échec électoral. Et qu’ils sont prêts à se mobiliser sur le terrain pour défendre leurs droits et leurs acquis. JAN-CYRIL SALEMI

DU 30 JUILLET AU 8 AOÛT 2017 25e ÉDITION

LES MEILLEURS SOLISTES AU MONDE SE RETROUVENT À SALON

ERIC LE SAGE, PAUL MEYER, EMMANUEL PAHUD, CORENTIN APPAR AILLY, GILBERT AUDIN MAJA AVR AMOVIC, LISE BERTHAUD, FR ANK BR ALEY, THIBAULT CAUVIN, EMMANUEL CURT, BENOIT DE BARSONY, SALON (MUSIQUE À L’EMPÉRI), UN FESTIVAL D’ARTISTES FONDÉ ROMAIN DESCHARMES, CARLOS FERREIR A, EN 1992 PAR ERIC LE SAGE, PAUL MEYER, PIERRE FOUCHONNERET, ELSA GRETHER, EMMANUEL PAHUD AMIHAI GROSZ, DAISHIN K ASHIMOTO, FR LELEUX, FR ANÇOIS MEYER, 22 ANÇOIS CONCERTS, 30 ARTISTES. À SALON ET AIX ROGER MUR ARO, FLORIAN NOACK, AURÉLIEN PASCAL, R APHAËL PERR AUD, ZVI PLESSER, SAMY R ACHID, BÉATRICE R ANA, ALMA SADE, ELODIE SOULARD, CAROLINE SYPNIEWSKI, BILLETTERIE ET RENSEIGNEMENTS OLIVIER THIERY, JORDAN VICTORIA, ALEX ANDRE VU, JEAN-FR ANÇOIS ZYGEL

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10 politique culturelle

La question culturelle et les Insoumis JEAN-LUC MÉLENCHON SE PRÉSENTE DANS LA PREMIÈRE CIRCONSCRIPTION DES BOUCHES-DU-RHÔNE, SIÈGE DE ZIBELINE. L’OCCASION DE L’INTERROGER SUR SA VISION DE LA CULTURE Zibeline : La question des politiques culturelles a été largement absente du débat présidentiel, ou en tous les cas très peu médiatisée. Elle est pourtant présente dans votre programme. Jean-Luc Mélenchon : Oui ! Je ne suis pas le meilleur spécialiste pour répondre à cette question, j’ai toute une équipe qui y travaille, mais je peux vous donner un symbole parlant. Pour Macron, faire une politique culturelle c’est donner un chèque de 100 euros aux jeunes. C’est-à-dire qu’il consumérise l’usage. Moi je me place du côté des créateurs, artistes, auteurs, compositeurs, et je voudrais instaurer un mode de financement social à partir des œuvres du domaine public. Une taxe, une fois que les droits d’auteurs et des ayants droit sont tombés, qui aille directement aux auteurs vivants. C’est une vieille idée, de Victor Hugo... Cela reviendrait donc à faire payer ce qui relève actuellement du domaine public. Comment concilier cette remise en cause de l’accès gratuit aux œuvres avec le « domaine commun informationnel » que vous défendez par ailleurs ? D’abord en ne confondant pas création et information, ensuite en arrêtant l’hypocrisie : le versement des droits d’auteur aux ayants droit jusqu’à 70 ans après la mort de l’auteur se pratique non, pourquoi pas une taxe après ? Parce qu’elle ne serait pas un héritage, mais une redistribution ? Et puis cela remettrait un peu dans le circuit les œuvres d’aujourd’hui, qui sont payantes et donc en concurrence avec les œuvres du passé, gratuites.... Vous vous êtes pourtant emparé avec détermination de la question des arts numériques, qui aiment la gratuité et l’accès libre...

Oui, ce domaine-là me passionne. C’est l’art d’aujourd’hui, du XXIe siècle, il y a une créativité incroyable là-dedans, et tous pensent que c’est l’art des ados mais non, c’est l’art des adultes de 35 ans... Mais je pense qu’il faut le règlementer, pas le contraindre non, mais le cadrer pour que les artistes qui créent des jeux vidéo aient des droits. Il y a une vraie nécessité d’un Centre National du Jeu Vidéo comme il y a un CNC (Centre National du Cinéma ndlr), avec des aides à la création redistribuées à partir des droits perçus. Un financement... Vous pensez donc qu’il faut un cadre à la révolution numérique... Oui, j’ai vécu l’ouverture des radios libres. On pensait que la liberté, le fait d’ouvrir le droit de diffuser, ferait naître de la diversité, de la liberté, de la nouveauté. C’est l’inverse exact qui s’est produit, à quelques exceptions près, une uniformisation incroyable, et la mainmise des grands groupes. Sans cadre, dans une société capitaliste, c’est ce qui se produit. Pour ce qui est du service public de la culture, il est peu développé dans votre programme. Est-ce que cela vous intéresse moins ? Non, je suis sans doute moins au point personnellement, mais surtout ils s’engueulent entre eux… Qui ? Mon équipe qui a fait le programme et les livrets. C’est l’endroit où ils ne sont pas d’accord tout à fait, et nous quand on n’est pas d’accord tout à fait, on s’engueule ! Non plus sérieusement on est d’abord pour la nationalisation des écoles d’art. Au sens large, musique, danse et

théâtre aussi. Pas de raison qu’il y ait un tel écart territorial, et de tels dysfonctionnements. On pense aussi qu’il faut réfléchir la question de l’équilibre patrimoine/création en les mettant en dialogue. Vous ne parlez pas de décentralisation, question cruciale quand on se présente ici, et qu’on sait que l’essentiel des dépenses du ministère va à Paris. Vous ne parlez pas non plus de spectacle vivant, de théâtre public, de théâtre populaire... Mais vous connaissez mieux mes livrets que moi ! On a travaillé ces questions, pour lesquelles on est en accord avec les communistes, sauf sur un point. Je crois qu’il faut porter un regard critique sur les contenus. Quand je dis cela ils lèvent les bras au ciel, ils disent pas de censure, on a donné avec Staline. Eux oui, mais pas moi ! Je sais, parce que j’ai fait un peu de philo, que l’art esthétise des valeurs. Par nature ! Le capitalisme esthétise la violence et la soumission, l’enrichissement, la misogynie. Pour s’y opposer il faut favoriser un art, une littérature, qui esthétise la tendresse, le bonheur, la gratuité, l’égalité, la lutte, la diversité. Il faut qu’on sache quel art on veut, sans le leurre d’une liberté de création qui n’existe pas si on ne la finance pas, si elle ne touche personne et si le contexte social ne lui permet pas d’éclore. Vous parlez beaucoup en revanche, de la spéculation sur les œuvres d’art dans votre programme... Effectivement. L’art contemporain rapporte aux capitalistes, ils spéculent et il est vraiment immoral que tant d’artistes soient dans la misère quand des œuvres s’échangent à ces prix-là. Plus globalement, et là je sais que c’est impopulaire, je suis contre le mécénat.


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Jean-Luc Mélenchon © Pierre-Selim Huard - Creative Commons

Les entreprises échappent à l’impôt ainsi, et si on récoltait et redistribuait correctement cet argent cela serait plus efficace et plus juste que les mécénats et les fondations qui blanchissent leur image en se faisant protecteurs des arts. Ils ne leur appartiennent pas. À qui appartiennent-ils ? Au peuple ! C’est pour cela qu’une politique culturelle ne se pense pas sans éducation à l’art. Mais ça n’est pas avec le ministre de l’Éducation actuel qu’on va pouvoir travailler à cela... Jean-Michel Blanquer veut autonomiser les écoles. C’est-à-dire, et ça les enseignants le savent bien, transformer les écoles en entreprises, avec des enseignements choisis. Dans ce contexte, difficile d’imaginer une ouverture à l’art pour d’autres que pour les enfants des classes supérieures. Et le chèque de 100 euros n’y changera rien... Et pensez-vous que vous allez pouvoir contrer cette politique ? Je l’espère ! Le pays est très volatile, on est

dans un contexte politique où tout change constamment. Malgré la campagne orchestrée contre moi, où on m’a accusé de vouloir sortir de l’Europe, d’être l’ami de Poutine, puis de faire du ni-ni quand je disais qu’aucune voix ne devait aller à Le Pen, et que j’étais pour le vote obligatoire, et contre la consigne de vote parce que les électeurs ne m’appartiennent pas... Bon je sais qu’ils vont inventer autre chose, là ; sur mon hégémonie ou je ne sais quoi, j’ai appris à faire avec la calomnie... Je disais ? Malgré la campagne orchestrée contre vous… Oui. J’ai réuni 7 millions de voix. Je dirige un mouvement puissant, formé de gens qui fonctionnent à l’enthousiasme et ne veulent plus des arrangements électoraux, de salades de sigles. Je ne suis pas un Don Quichotte contrairement à ce qui se dit, je suis un stratège. Je pense qu’il y a une grande culture politique dans ce pays, une vraie envie de politique. Et que Marseille est l’endroit où quelque chose qui ressemblera à un Front Populaire peut naître. Pas un rassemblement des gauches, ni une

extrême-gauche, je n’ai rien d’extrême regardez mon programme, ce n’est pas parce que j’ai le sang chaud que je suis un leader maximo. Je crois qu’une gauche nouvelle peut naître ici des aspirations du peuple, pas de l’union des vieux partis. Mais si le résultat des législatives est décevant, la lutte sociale et politique restera-t-elle possible si les partis sont à bas ? Un mouvement est né, massif. Il va continuer, à partir d’ici et au-delà de moi, quel que soit le résultat électoral. ENTRETIEN RÉALISÉ PAR AGNÈS FRESCHEL


12 politique culturelle

Représentation politique, la philosophie et la sociale

Affiche notifiant le décret du 29 mars 1871 sur la loyauté des fonctionnaires

Récapitulatif

Nous envisagions dans le numéro précédent un rapide parcours de l’idée de représentation politique : comment des citoyens pouvaient être représentés dans la Cité. Pour Platon il s’agissait d’imiter la cité idéale : c’est le philosophe roi. Pour Aristote, la mimésis autorise un décalage entre le représentant et le représenté : toute forme politique est légitime, c’est la tragédie humaine. Et puis la Cité est une donnée première, l’homme est politique, tout va bien. Mais avec les philosophes du Contrat Social plus rien ne va de soi. Hobbes abolit le politique et le social comme données premières : seule existe la guerre de tous contre tous et le souverain devra représenter l’ordre et la sécurité. Pour Rousseau c’est la liberté de l’état de nature que la société, accident historique, devra amplifier grâce à la volonté générale ; qui ne se délègue pas. Pas de démocratie possible avec des représentants politiques. Nous voilà bien avancés ! Nos démocraties politiques modernes doivent beaucoup à ces penseurs politiques, on le sait ; puisque justement nous sommes en démocratie et que tout va bien ! Mais l’heure de la crise politique a sonné depuis bien longtemps : les citoyens ne se sentent plus représentés, une

suspicion généralisée frappe nos élus, etc., on le sait aussi. Cette crise sur les douze années qui viennent de passer peut se cristalliser sur deux évènements. Le référendum de 2005 : près de 55% des électeurs se sont prononcés contre ; alors que plus de 80% des élus étaient pour. L’élection présidentielle de 2017 et l’éviction des deux grands partis de gouvernement. Comment représenter le peuple ? Et puis qu’est-ce que un peuple ? Quelle réflexion philosophique à ces sujets ? Eh bien on s’en gardera !

Philosopher ou justifier

Hegel disait que la philosophie est comme la chouette de Minerve qui ne prend son envol qu’à la tombée de la nuit. Elle ne vient qu’après les évènements. On pourrait lui donner doublement tort. Car philosopher n’est pas simplement formaliser abstraitement le réel. Tel Kant (« Le grand chinois de Königsberg… le plus difforme des estropiés de l’intellect » disait Nietzsche) s’enthousiasmant sur la Révolution Française et dissertant sur la sortie de l’homme de son état de minorité. Philosopher c’est souvent répéter en un autre langage le réel, mettre en forme en un langage technique ce qui n’est souvent

rien d’autre que le discours de la domination. Or philosopher c’est aussi (et surtout ?) voir jusqu’où il est possible de penser autrement comme disait Foucault. À la charge de la philosophie de s’emparer de cette subversion. Peu nombreux ont été les philosophes subversifs. Alors que l’on dissertait sur les avancés en terme de liberté de la Révolution Française, il faudra, pour schématiser, attendre Marx (et donc laisser passer Kant et Hegel) pour y déceler, tout en admirant sa radicalité historique, une révolution bourgeoise. Et analyser correctement les bases matérielles et économiques de ses conditions de possibilité. Il faudrait alors trouver un autre oiseau de la mythologie, plus méchant, pour filer la métaphore avec la philosophie ! Hegel a doublement tort nous disions ; car c’est en plein jour de la Commune de Paris, à distance, sans attendre son soir sanglant, que Marx y analysa tous ses mécanismes ; à chaud. Et sa guerre civile en France reste un ouvrage d’une rare documentation et pertinence historiques et politiques.

Retour à Marx

Nous y voilà. La représentation politique -dans sa forme de la démocratie représentative-, après la Révolution Française, après son massacre de la Commune, ne fit que signifier ce qu’elle est encore aujourd’hui : une représentation parlementaire bourgeoise. En 2005 elle vient encore confirmer sa défense des intérêts du libre échange et de la finance contre les peuples. Par son concept de dictature du prolétariat, de dissolution de l’État, on a cru comprendre chez Marx une résolution de la crise de la représentation politique par une dissolution du politique dans le social. À savoir que toute représentation politique étant par nature destinée à s’abstraire des citoyens qui l’avaient élue, la solution marxiste était d’en finir et que ce soit aux travailleurs de décider par eux-mêmes sans passer par des représentants. C’est oublier La guerre civile en France et les analyses que fait Marx à chaud (et à froid : lire ce livre, il est passionnant !) des constructions politiques à l’assaut du ciel que font les communards. Il peut


épisode 2 :

2017 2018

y avoir une représentation politique où le lien entre représentant et représenté n’est pas coupé. Car ce n’est pas la nature même de la représentation politique qui en cause -comme le croyait Rousseau qui disait que seul un peuple de Dieu pouvait avoir une démocratie-, mais l’organisation économique qui en est à la base. Les vices de la représentation politique reflètent les vices de la séparation du travailleur d’avec l’outil de production. En gros, une société d’exploitation et de consommation ne peut que générer une organisation politique injuste. La Commune inventa une organisation du travail où le travailleur n’est plus exploité ; ce qui en un fait un citoyen conscient et impliqué. Et rend possible une représentation politique qui n’est plus délégataire et indifférente. Une utopie continue à dire certains… Mais les communards inventèrent autre chose : la révocabilité des élus. Ce mandat révocable assujettit fermement le représentant au représenté, sans les identifier pour autant, mais en conférant à leur liaison la nature d’une médiation efficace. Tiens, ça ne vous rappelle pas un programme ? Ici point d’utopie ! Point d’utopie ; mais « populisme » dit le discours dominant. Telle est ainsi qualifiée toute solution politique, humaniste et rationnelle aux grands problèmes sociaux. Bourdieu le pointait déjà il y a longtemps.

Scène Nationale de Sète et du Bassin de Thau

Découvrez la nouvelle saison

« Le champ politique exerce un effet de censure en limitant l’univers du discours politique et l’univers de ce qui est pensable politiquement, à l’espace fini des discours susceptibles d’être reproduits dans les limites de la problématique politique »

mardi 13 juin à 18h30 au Théâtre Molière

(La représentation politique, Éléments pour une théorie du champ politique)

RÉGIS VLACHOS

Licence : N°1069366 (I) – 1063799 (II) – 1063798 (III)

Mais un populisme de gauche se construit, qui vient gagner du terrain sur le populisme d’extrême droite et tenter de prendre le leadership sur les populations dominées par le ressentiment. C’est un dépassement du clivage droite/gauche par celui peuple/élite, des luttes éparses mais stigmatisant de nouveaux désirs d’émancipation, la construction de blocs d’hégémonies, des activités post productivistes, etc. Et cela de la part de citoyens aux appartenances diverses, transclassistes. Dans ce grondement de la bataille, nouvelle et bariolée, se construit un autre monde sur celui qui se meurt.

Abonnez-vous ! Ouverture des abonnements : sur internet à partir du mercredi 14 juin à 13h au Théâtre Molière à partir du samedi 17 juin à 13h Ouverture exceptionnelle : dimanche 18 juin de 13h à 18h www.scenenationale-sete-bassindethau.com


14 politique culturelle

L’opéra,

lieu de distinction sociale ? L

e Directeur Général, Bernard Foccroulle, a profondément changé l’esprit du Festival d’Aix, qu’il dirige. Il ne renouvellera pas son mandat fin 2017, mais préparera la programmation 2018, son successeur, Pierre Audi, entrant en fonction en septembre 2018. Zibeline : Que signifie être Directeur général du Festival International d’Art Lyrique d’Aix-en-Provence ? Bernard Foccroulle : Être à la tête d’équipes magnifiques, 70 personnes permanentes et, au plus haut de la saison, 900 emplois, saisonniers et artistes. L’institution a une très forte image nationale et internationale, renforcée ces dernières années par ses créations. Aux productions lyriques, cœur historique du festival, se sont ajoutées des missions, incluant musiques de concert, activités éducatives, sociales. Il s’agit aujourd’hui d’une véritable entreprise, avec un budget de 23 millions d’euros, dont seulement 30% de subventions publiques, le reste provenant essentiellement des 80 000 billets vendus. Lorsque vous en avez pris la direction, il n’y avait pas d’Opération Passerelle, d’Académie… L’Académie existait déjà, initiée par mon prédécesseur, Stéphane Lissner. Mais j’ai créé les Passerelles qui, avec les services éducatifs et socio-artistiques, permettent de découvrir l’opéra par ses métiers, du décorateur au chanteur… Vous avez hérité d’un festival profondément élitiste, en quoi a-t-il changé avec vous ? J’avais deux grandes priorités : d’abord, renforcer la dimension de la création. Pour être un art vivant, l’opéra ne peut se recroqueviller sur le passé. Chaque année le Festival accueille une vingtaine de compositeurs vivants, mais aussi des écrivains, des plasticiens… Il s’agissait aussi d’élargir le public, et ce travail n’est pas terminé : il est nécessaire que le Festival rassemble la population du bassin, diverse et jeune, qu’il soit un lieu de rencontres culturelles. J’ai eu à cœur de développer une dimension

Bernard Foccroulle © ArtcomArt - Pascal Victor

méditerranéenne avec l’OJM, né il y a plus de 30 ans sous l’impulsion de Michel Pezet. Et cela parce que la richesse des musiques de transmission orale nourrit le présent et la création contemporaine ; mais aussi parce qu’à Aix-Marseille, il serait ridicule de ne pas valoriser les cultures dont sont porteuses les personnes issues d’une immigration ancienne ou récente ; la Méditerranée est aujourd’hui un tombeau, le cœur d’une tragédie, alors qu’elle devrait être le lieu de rencontres humaines. La mission du Festival est de donner un

contrepoids, modeste, aux rejets que l’on vit. La musique est un moyen merveilleux de partager la richesse de l’autre. L’opéra au Sud était un art populaire… Tout à fait, et l’on constate en Italie que le monde de l’opéra est en crise, car il ne se renouvelle pas. La crise menace l’opéra partout s’il devient muséal. Verdi parlait de ce qui touchait ses contemporains. Au XXe, les salles se sont vidées un peu partout et ont retrouvé le public en invitant de grands créateurs, parfois avec des débats, des discussions. Au XXIe, il


15 dépassement. J’aimerais que tous les enfants puissent expérimenter la dimension créatrice. Mais c’est comme escalader une montagne, la vue se mérite. La culture est-elle devenue un outil de distinction sociale ? Trop souvent la culture peut diviser, faire obstacle au lien alors qu’elle contient la capacité à faire se rencontrer, de rassembler. L’exclusion culturelle est vécue comme une mutilation, elle est au moins aussi douloureuse que l’exclusion matérielle. Il est certain que les classes privilégiées se créent, par la culture, des lieux de l’entre-soi. Mais toutes les formes d’art authentique ont un pouvoir de reliance, ne serait-ce que par l’émotion qui nous traverse tous. L’œuvre d’art nous déplace, on en sort différents, il faut parvenir à inclure les exclus de la culture : ce n’est pas l’art qui les maintient dehors, mais des processus sociologiques complexes. Quelle est la relation du Festival avec le territoire ? Il est fortement épaulé, par tous les niveaux de pouvoir, Ville, Agglo, Métropole, Département, Région, État, Europe. Les pouvoirs

FestIval De MaRseIlle.com 04 9 1 99 02 50

15 JuIn › 09 JuILLeT 2017

publics accordent une attention très soutenue au Festival qui apporte une plus-value au territoire, avec un rayonnement international, des retombées économiques de toutes sortes de l’ordre de 10 pour un ; il rapporte plus qu’il ne coûte. Les équipes techniques sont celles de la région. Le Festival sert aussi de plateforme pour de jeunes interprètes comme Benjamin Dupé… Il est vrai que son image a été celle d’un Festival de et pour les parisiens. Son ancrage local est devenu très fort avec la création de services éducatifs, son implication dans le monde associatif, le club Campra, la convention signée avec l’Université, le rapprochement avec les partenaires provençaux. Que restera-t-il après vous ? La mémoire des spectacles, par les enregistrements, les DVD ; les équipes du Festival vont continuer à proposer la même qualité d’accueil, de créativité… Sans doute l’esprit ? ENTRETIEN RÉALISÉ PAR MARYVONNE COLOMBANI

© Karla Kalife

faut toucher les publics les plus divers, et pour cela trouver ce que les œuvres ont encore à nous dire aujourd’hui. Retrouver l’innocence des enfants sans doute, renouer avec le goût, l’énergie vitale de Carmen. L’art lyrique est-il élitiste ? L’art lyrique est le plus coûteux des arts vivants par le nombre de ses participants. Au Festival, les places les plus chères ont augmenté, mais les autres ont diminué, le tarif jeune (jusqu’à 28 ans) est de 9€ avec l’opération « Opéra On » : 500 jeunes inscrits aux activités de sensibilisation bénéficient de ce tarif pour de très bonnes places. La gratuité est accordée aux groupes scolaires et aux mineurs. Sur la question de l’élitisme, il y a deux faces. Je n’aime pas l’élitisme social, et l’opéra ne doit pas en devenir l’otage, mais la recherche de l’excellence n’est pas une forme d’élitisme. Notre but en tant qu’artiste c’est la sublimation, l’inaccessible étoile. L’opéra n’est pas un fast-food culturel. Dans un monde qui privilégie la consommation, tout projet artistique doit tendre vers l’excellence. Même avec des amateurs, surtout avec des amateurs, il y a une notion essentielle qui est celle du


16 festivals

Bêtes de scène, Emma Dante © Masiar Pasquali

Avignon,

De nouveaux noms dans la programmation d’Avignon ! Aux côtés de Katie Mitchell, Guy Cassiers ou Tiago Rodrigues, des nouveaux venus au Festival : des femmes, des jeunes, et tout ce que l’Italie, la Grèce et l’Afrique ont à nous dire

jeune, nouveau, au Sud 42

spectacles, 9 sujets à vif sans compter les expositions et les rencontres, 257 représentations, 120 000 places à la vente : la 71e édition du Festival d’Avignon propose, en trois semaines, un incomparable tour du monde théâtral. Plus international que jamais : plus de la moitié des propositions viennent de l’étranger, surtitrées lorsqu’il le faut.

L’Afrique et le monde Un focus Afrique en particulier, conçu avec le Festival de Marseille (voir p 24-25) renouvelle la programmation danse et musique du Festival, en s’attachant à un théâtre qui parle avec et aux corps. Avec en particulier Kalakuta Republik et The last King of Kakfontein programmés avec le Festival de Marseille, mais aussi Dorothée Munyaneza pour un nouvel opus sur le génocide rwandais, Unwanted, qui s’attache à la guerre faite aux corps des femmes, et aux enfants des viols ; des pièces phares de la danse contemporaine africaine (Kettly Noël, Nadia Beugré et Nina Kipré, Seydou Boro et Salia Sanou), du cinéma (Timbuktu

d’Abderrahmane Sissako) des ateliers de la pensée, Rokia Traoré qui chante l’épopée mythique de l’empereur Soundiata Keïta, un hommage à la Femme noire de Senghor, des rencontres avec RFI à la Maison Jean Vilar (voir p 20)... Mais d’autres territoires sont autant de points névralgiques de ce Festival qui témoigne des tensions politiques du monde, et des entredeux. Avec Caroline Guiela Nguyen, qui cherche la mémoire de Saïgon, entre la France d’aujourd’hui et le Vietnam d’hier ; avec Radhouane el Meddeb, qui se place Face à la Mer, sur ce littoral tunisien qui a le regard tourné vers l’Europe, entre désir et rancœur ; avec le chorégraphe plasticien Dimitris Papaioannou, qui dans The great Tamer interroge la tragédie, l’enterre et la fait renaître dans les corps qui se heurtent au réel. La grande saga des Atrides, sera le marathon absolu de ce Festival, d’après Euripide, Sophocle et Eschyle : Antonio Latella, nouveau directeur de la Biennale de Venise, met en scène cette histoire de meurtres et de

vengeances familiales, de Tantale au sacrifice d’Iphigénie et à la vengeance d’Electre, et interroge la place du père, du meurtre d’État, de la trahison... Un mythe fondateur confié à 7 jeunes dramaturges, revisité en 8 épisodes, soit 16 heures de représentation. En deux jours ! Autres tragédies européennes, plus récentes, mais venues du même coin du monde : Julie Bertin et Jade Herbulot, avec le Birgit Ensemble, compagnie de jeunes comédiens, proposent les deux derniers volets de leur tétralogie Europe : Dans les ruines d’Athènes, où des Grecs s’enferment dans une émission de téléréalité sur fond mythologique dans l’espoir d’effacer la dette ; Memories of Sarajevo, ou la lente destruction d’une cité multiculturelle, du point de vue des assiégés, à l’heure où l’Union européenne révèle son impuissance. Guy Cassiers, quant à lui, mettra en scène Le Sec et l’humide de Jonathan Littell, ou comment on devient nazi ; ainsi que Grensgeval (Les Suppliants) d’Elfriede Jelinek (chorégraphie Maud Le Pladec), où comment les réfugiés se heurtent au refus de les accueillir


de l’Europe, à l’encontre des Suppliantes d’Eschyle. Et puis Lemi Ponifasio sera de retour : l’artiste samoan met à nouveau en scène, en chants, à nu, des femmes maoris. Standing in time ne cherchera pas plus que I Am (Festival d’Avignon 2013) ou Stone in her mouth (Festival de Marseille 2016) à témoigner du monde, mais à en faire une cérémonie, universelle et poétique.

Arts poétiques Car le théâtre, en ce moment, s’interroge souvent sur sa propre nature, et son rapport au réel et au pouvoir : ainsi l’Impromptu 1663 (de Versailles) de Molière mis en scène par Clément Hervieu-Léger, ou Claire, Anton et eux, par François Cervantes : ces metteurs en scène ont travaillé avec les élèves du Conservatoire Supérieur de Paris, pour savoir ce que ces jeunes gens cherchent au théâtre. Yann-Joël Collin les mettra aussi en scène, avec Roberto Zucco de Koltès, et ils interprèteront également Juliette ou le commencement, un travail d’élèves sélectionné pour le Festival. Mais les élèves ne seront pas les seuls à mettre le théâtre en abyme : Die Kabale der Schleinheiligen s’appuie sur un jeu de miroir imaginé par Frank Castorf, qui explore les rapports de l’artiste avec le pouvoir, en prenant appui sur le Roman de Monsieur Molière, écrit par Boulgakov censuré par Staline, à propos de Molière censuré par Louis XIV... De théâtre il sera question aussi dans Les Parisiens d’Olivier Py, à travers deux personnages de poètes dramatiques confrontés au milieu et à ses miroirs aux alouettes, ses compromissions, ses ridicules et ses joies. Autre art poétique, celui d’Emma Dante : ses Bestie di scena interrogent la nécessité du théâtre, à nu, sans décor ni costumes, sans musique, en confrontant les acteurs au surgissement inattendu, à la sauvagerie, à l’ivresse...

Enfances et autres stars Le Festival d’Avignon poursuit sa programmation de pièces jeune public, avec en particulier Tristesse et joie dans la vie des girafes de Tiago Rodrigues et Thomas Quillardet, L’Imparfait d’Olivier Balazuc et C’est une légende de Raphaël Cottin. Mais l’Enfance sera également questionnée dans et à travers des textes de Romain Gary, Proust, Rimbaud, Michaux... par Robin Renucci, et dans Les Grands, de Pierre Alféry mis en scène par Fanny de Chaillé, où une génération de quarantenaire revient sur son adolescence. Il y aura aussi Hamlet mis en œuvre par des détenus du Centre pénitentiaire du Pontet (voir p 20), Juliette Binoche qui dit Barbara, Christiane Taubira qui se colle au feuilleton de midi au Jardin Ceccano avec Anne-Laure Liégeois, pour faire sonner des textes politiques d’Olympe de Gouges à Toni Morrisson. Et de grands textes comme La princesse Maleine de Maeterlinck mis en scène par Pascal Kirsch, La Fille de Mars de Von Kleist par Jean-François Matignon, ou Les Bonnes (Die Meiden), de Genet, par Katie Mitchell. Sans oublier Israel Galván dans la Cour d’Honneur, les Ateliers de la pensée, la Nef des Images, du cinéma et des musiques sacrées, une exposition de Ronan Barrot, Sopro de Tiago Rodrigues, des sujets à vif qui s’annoncent passionnants, les marionnettes de Rezo Gabriadze à la Maison Jean Vilar. Bref trois semaines haletantes, mondiales, politiques et nouvelles !

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18 festivals

Migraaaants..., Gérard Gélas - Théâtre du Chêne Noir © Manuel Pascual

Le Festival Off poursuit la réforme entamée l’été dernier, en s’engageant dans la création d’un fonds de soutien pour les artistes et en incitant à de bonnes pratiques

Off, phénomène de société L

e virage de la transformation semble être pris cet été, avec l’annonce faite par Pierre Beffeyte, président du Festival Off, élu cet hiver à la tête de l’association AF&C, d’un fonds de soutien aux artistes, et de nouveaux modules de formation, gratuits, pour leur permettre d’administrer leur compagnie. La commission accorde 1000 euros par artiste (4000 euros maximum par projet), et ce pour 250 des dossiers déposés, à condition que soient respectées les conventions collectives et que le projet soit présenté pour la première fois à Avignon. Il est financé à hauteur de 112 000 euros par les organismes professionnels -SACD, Sacem, CNV et Audiens-, 160 000 euros par AF&C (fonds de réserve, vente de cartes professionnelles, billetterie en ligne). L’affichage pléthorique dans la ville, qui fait aussi l’identité du Off, est questionné : AF&C propose la prise en charge de l’impression des affiches, en utilisant des supports respectueux de l’environnement, sur du papier recyclé et

recyclable, dans une démarche d’équité et d’éco-responsabilité. Véritable lieu de rencontres, Le Village du Off accueille le public et les professionnels, organise des tables rondes, rencontres, colloques et débats, mais aussi des soirées live et le bal de clôture. Autant d’initiatives qui ambitionnent l’amélioration des conditions d’accueils des compagnies, si nombreuses à laisser des plumes dans la marmite avignonnaise. La Charte du Off, visant à sécuriser les rémunérations des artistes et techniciens, et l’accueil du public, n’est pas signée par tous les lieux, et n’est pas respectée par tous les signataires. Ainsi, il est toujours aussi difficile de savoir quelle est la part de recettes qui revient aux compagnies, et quels théâtres apportent un soutien en communication, en technique... Mais l’on peut compter : un créneau horaire se monnaye parfois jusqu’à 18 000 euros, et dans certains lieux transformés en théâtre il y a 4 salles, avec 5 créneaux horaires

chacun... Juteux ! Avignon rapporte, mais pas aux artistes, et la nouvelle direction d’AF&C semble vouloir rééquilibrer cela.

Au choix ! Avec 1480 spectacles annoncés cette année, le choix toujours aussi hasardeux ! En voici quelques-uns, piochés chez les Scènes permanentes qui offrent une programmation réfléchie. Aux Halles, Alain Timar jouera sa dernière création, Dans la solitude des champs de coton (à lire sur journalzibeline.fr) ; par ailleurs beaucoup de créations d’auteurs, souvent très jeunes, sont à retenir : Juliette et les années 70 de, et avec la clown tragédienne Flore Lefebvre des Noëttes dans une autobiographie psychédélique ; Vingt ans, et alors ! dans laquelle le jeune metteur en scène Bertrand Cauchois questionnent l’état de révolte à l’orée de l’âge adulte ; À 90 degrés, de Frédérique Keddari-Devisme avec Elizabeth Mazev dans un texte sensible qui donne chair à la


19 dépression et ses corollaires ; Cap au pire de Samuel Beckett mis en scène par Jacques Osinski, avec Denis Lavant, seul et immobile face à une radicale déclaration d’amour aux mots ; Logiquimperturbabledufou mis en scène par Zabou Breitman sur un mélange de textes qui explorent la folie, le surréalisme, la poésie ; Esperanza d’Aziz Chouaki, qui nous embarque pour Lampedusa avec des migrants qui rêvent d’un voyage sans retour, espoir fou qui mêle leurs attentes à leurs peurs… Mais aussi le revigorant F(l)ammes d’Ahmed Madani, une ode à la France d’aujourd’hui qu’incarnent 10 jeunes femmes rêvant d’égalité, de visibilité et de tolérance (voir journalzibeline.fr) ; Jésus de Marseille, texte réjouissant de Serge Valletti, mis en scène par Danièle Israël, qui révèle au cours d’une épopée délirante la vérité sur la vie de Jésus ! Le Chêne Noir fêtera ses 50 ans pendant le festival. Gérard Gelas, à la tête depuis ses débuts de ce lieu créateur du Off, a prévu une soirée anniversaire le 18 juillet au Village du Off (réservée aux invités). À partager : le livre édité pour l’occasion, tout en images, conçu par Lys-Aimée Cabagni et Jean-Louis Cannaud. Côté théâtre, 12 spectacles. On découvrira la Cie Manual Cinema, venue de Chicago pour une première apparition en France, avec Ada/Ava. Deux sœurs jumelles arrivées au point de séparation imposé par la vie. Le dispositif de la compagnie utilise les outils du cinéma en direct, mais aussi des marionnettes, des musiciens -et des comédiens. Daniel Mesguish à la mise en scène et sur le plateau d’Au bout du monde (texte Olivier Rolin) dans un bistrot désert, la nuit, télé allumée, fera se mélanger les langues ; celle d’un client qui a roulé sa bosse habité par la littérature, celle de la jeune serveuse qui rêve avec la liberté de qui n’a pas de références, et celle, vulgaire, du présentateur de télé… Gérard Gélas reprendra son Migraaaants (on est trop nombreux sur ce putain de bateau), de Matéi Visniec : qui sont-ils ces millions d’humains, qui tentent d’arriver jusqu’ici, de ce côté-ci du monde ? Électrochoc théâtral et salutaire (voir critique sur zibeline.fr). Du nouveau aux Carmes, où on se pose des questions : on s’interroge sur tout ce qui fait tourner notre drôle de société, en replaçant les repères dans un ordre qui fait sens, avec beaucoup de délicatesse, de pertinence, d’ouverture à ce monde dont on ne sait plus trop comment il tourne. Comment va le monde ?, se demande Marie Thomas, endossant le personnage de clown philosophe mis en scène par Michel Bruzat (voir critique sur journalzibeline.fr). Une toute jeune compagnie descend des Metallos pour montrer La Violence des

Dans la solitude des champs de coton, Alain Timar - Théâtre des Halles © Thomas O’Brien

Riches, constat sociologique révoltant des Pinçon-Charlot. Que faire ?, alors ! C’est dans un hôtel isolé quelque part en Europe de l’Est qu’un petit groupe se retrouve pour remettre à plat tout ça et, pourquoi pas, soyons fous, inventer une nouvelle utopie. Avant de bousculer le monde entier, c’est d’abord dans l’espoir de donner un sens à leur existence que chacun des personnages mis en scène par Joëlle Cattino (texte Michel Bellier) se lance sur la piste des idéaux à inventer. Un texte d’André Benedetto, l’Auteur avec un acteur dans le corps, monté par Roland Timsit et interprété par Mathias Timsit, donne la parole au rap, au théâtre, à la création, et interroge, ici encore, par la voix de ce rappeur enfermé dans un corps de scène, la place des uns et des autres dans ce monde qui tourne parfois dans tous les sens. Artéphile propose une programmation réunie sous la thématique des « futurs antérieurs » avec la volonté de présenter des spectacles qui se répondent dans une cohérence enrichissante. 16 spectacles, et des soirées OFFicieuses : rencontres avec des auteurs, lectures de textes inédits, performances théâtrales et musicales, présentation de projets (à signaler le 13 juillet François Bégaudeau auteur de Contagion, présenté durant le festival, pour une « autocritique en public). Beaucoup de choses dans ce lieu exigeant : l’adaptation du récit d’Annie Ernaux, L’Autre fille, où elle écrit une lettre à sa sœur, morte deux ans avant sa naissance, sur qui elle n’a jamais posé de questions, mais qui dans la bouche de la mère était « plus gentille que celle-là », phrase attrapée au vol, où l’auteur découvrait à 10 ans qu’elle était celle-là… Contagion, donc, évoquant l’étau qui se resserre sur un professeur d’histoire, pris dans la nasse de la parano et de l’agressante montée de la radicalisation supposée de certains de ses élèves. Fille du Paradis, d’après le texte

écorché de Nelly Arcan, Putain, mis en scène par Ahmed Madani (voir journalzibeline.fr), autobiographie d’une escort girl assumée, violente et lumineuse, en guerre contre l’icône dévastatrice de la femme parfaite. Au Balcon, deux spectacles parmi les huit proposés ont été vus durant la saison (voir critiques sur journalzibeline.fr) : Pompiers et Les Règles du savoir vivre dans la société moderne. Le premier (Jean-Benoit Patricot pour le texte, Serge Barbuscia à la mise en scène) est l’histoire d’une trahison amoureuse. La pièce de Jean-Luc Lagarce, mise en scène par Agnès Régolo est un bijou d’observation de notre société : le mariage, les contrats, le choix du nom, la taille du cercueil, tout est passé au scanner, avec tant de finesse et d’humour que pour un temps nous en sommes libérés. À l’Entrepôt il ne faudra pas manquer la tragédie à l’antique que met en scène François Cervantes autour du mythe de Médée, l’adaptation, par la Cie Peanuts, des Aventures d’Huckleberry Finn de Mark Twain, qui interroge notre capacité actuelle à remettre en cause les préjugés moraux et sociaux, et le jouissif spectacle de Jeanne Béziers, La Chapelle Sextine, qui parle avec beaucoup d’humour et de dérision d’un sujet « grave », le sexe… (lire nos critiques sur journalzibeline.fr). À ne pas manquer non plus, la nouvelle création du Collectif 8, Marginalia, qui propose une nouvelle immersion dans l’univers d’Edgar Allan Poe ! Ils jouent aussi par ailleurs La Religieuse de Diderot, création du Off en 2016, à La Condition des soies : magnifique adaptation qui prend aux tripes, et secoue nos envies de liberté, physiques et morales ! DOMINIQUE MARÇON, ANNA ZISMAN ET AGNÈS FRESCHEL

Festival Off Avignon avignoleoff.com


20 festivals

Une Maison vivante La Maison Jean Vilar change de costume, avec une programmation partenaire et complémentaire du Festival d’Avignon et du Off, en quête d’un nouveau théâtre populaire...

N

ommée en février 2017 directrice de l’Association jean Vilar (lire l’entretien dans le Zib’ 106), Nathalie Cabrera veut faire de la Maison Jean Vilar « la maison du public », dans la droite ligne de celui qui voulait ouvrir le théâtre à tous, « le petit boutiquier de Suresnes et le haut magistrat, l’ouvrier de Puteaux et l’agent de change, le facteur des pauvres et le professeur agrégé ». Son projet, ancré dans le présent, et en particulier autour du Festival d’Avignon, s’inscrit dans l’idée de partage : elle veut susciter chez chacun le désir de théâtre, notamment en faisant appel à des projets portés par des artistes qui interprètent cette histoire théâtrale, qui nourrissent les réflexions et offrent des modes de lecture différents des œuvres, fondés sur une approche sensible.

une troupe d’acrobates circassiens (11 au 17 juillet) ; Hamlet, mis en scène par Olivier Py, est la poursuite de l’aventure entamée l’année dernière avec les détenus du centre pénitentiaire d’Avignon-Le-Pontet inscrits à un atelier de création théâtral dirigé par le metteur en scène. C’est sur cette scène qui leur est dédiée que joueront les détenus permissionnables de cette aventure (21 et 22 juillet)

Avec le In C’est dans cet esprit qu’est recréée pour la Maison Jean Vilar l’installation de Katie Mitchell, Five Truths. La metteure en scène anglaise a conçu une œuvre exceptionnelle et singulière qui propose une immersion dans le théâtre de Shakespeare autour de la célèbre scène de la folie d’Ophélie dans Hamlet, au travers des vérités théoriques délivrées par cinq grands dramaturges Tournage d’Antigone, Festival d’Avignon, 1960 © Maurice Costa européens : Jerzy Grotowski, Constantin Stanislavski, Bertolt Brecht, Peter Brook et Antonin Artaud. Dans une Autour de livres boîte noire où chaque surface reflète le même Au cœur du Jardin de la rue de Mons sont visage jouant la même scène, le visiteur se accueillies des lectures : avec l’Adami ce sont retrouve au cœur même de l’essence intime Les Écrits d’acteurs, qui ont lieu sous la direction de la représentation. Une installation d’artiste de Frank Vercruyssen (tg STAN) avec huit sur le théâtre, représentative du nouvel élan comédiens qui s’emparent d’un texte original de Jean-Christophe Dollé et d’autres écrits ; et que prend la Maison Jean Vilar. Outre Five Truths, le Festival d’Avignon pro- avec RFI, dont le cycle de lectures Ça va, ça gramme deux spectacles dans la Maison : va le monde ! s’inscrit dans le focus Afrique Ramona, du géorgien Rezo Gabriadze, est une subsaharienne du Festival et est entièrement fable marionnettique qui met en scène, et donne dédié aux auteurs africains (Convulsions de une âme, à deux locomotives amoureuses, Hakim Bah, Kalakuta dream de Kofi Kwahulé, Ramona et Ermon, à l’amour contrarié à cause Tram 83 de Fiston Mwanza Mujila, Les d’aiguillages différents, qui vont rencontrer sans… de Ali Kiswinsida Ouédraogo et

Le ventre de l’atlantique de Fatou Diome (15 au 20 juillet). Par ailleurs la Maison Jean Vilar remet à disposition du public, pour un prix correspondant à la somme symbolique où Vilar les mettait en vente, la Collection des Répertoires du TNP, c’est-à-dire les textes intégraux illustrés par les photos de représentation d’Agnès Varda. Elle accueille aussi la librairie du Festival d’Avignon et du Off, initiée par la Chartreuse, à laquelle se joint la librairie L’Eau Vive avec un fonds d’ouvrages pour le jeune public. Ainsi, le programme Un jour, un éditeur propose quotidiennement, du 7 au 26 juillet dans la cour de la Maison, des rencontres avec des auteurs de théâtre, des chercheurs et des éditeurs, en lien avec la programmation ou les thématiques du Festival d’Avignon et du Off.

Et aussi… L’unique antenne en France de la BNF est à la Maison Jean Vilar ! Sa bibliothèque, ouverte à tous gratuitement, conserve la mémoire des Festivals In et Off, et propose une sélection d’ouvrages en écho à l’installation de Katie Mitchell et d’ouvrages sur le théâtre africain. Pour faire écho au spectacle d’ouverture du Festival dans la Cour d’honneur, Antigone de Satoshi Miyagi, costumes, maquettes, photos et vidéos de la création qu’en fit Jean Vilar en 1960 seront exposés au rez-de-chaussée de la Maison. Enfin, pour compléter cette roborative nourriture de l’âme, cinq Food Trucks occuperont successivement la cour de La Calade, avec des menus aux saveurs diverses mais aux produits locaux. Sans champagne ni cocktails, dans un esprit... populaire ! DOMINIQUE MARÇON

04 90 86 59 64

Maison Jean Vilar Avignon maisonjeanvilar.org


Aventuriers des mers

Mucem


22 festivals

En parallèle d’Avignon du 10 au 22 juillet, la 21e édition du festival Villeneuve en Scène. Du théâtre, mais aussi de la musique, du cirque ou des arts de la rue, une douzaine de spectacles au total, en plein air ou sous chapiteau. Deux sites pour accueillir les artistes : la Plaine de l’Abbaye et le centre historique de la ville. La manifestation de Villeneuve se définit comme « l’autre festival », un « slow festival », celui où le temps et l’espace se savourent tranquillement. Pour découvrir par exemple Place de l’Itinérance, une installation théâtralisée d’un campement nomade, relatant la vie spécifique des troupes itinérantes. Rayon spectacles, à retenir notamment : A, la création 2017 de Skappa!, sur le thème des racines et de ce que nous en faisons ; du tango argentin et des marionnettes avec Preuves d’amour, par la Cie Emilie Valantin ; La DévORée, par la Cie Rasposo de la formidable funambule Marie Molliens ; du cirque encore avec les équilibres sur objets de Sébastien Le Guen et les déséquilibres sonores de Jérôme Hoffmann dans Fall, Fell, Fallen ; la version en marionnettes du Mahâbhârata par la Cie Jeux de Vilains ou celle d’Ivan le Terrible, par le Théâtre du Rugissant.

L’île et les enfants Preuves d’Amour, Cie Emilie Valantin © Cie Emilie Valantin

A

u mois de juillet, les rues d’Avignon fourmillent de visiteurs à la recherche de la pépite théâtrale. Les comédiens rivalisent d’inventivité pour séduire et convaincre les festivaliers de venir découvrir leurs spectacles. En s’écartant un peu de ce bouillonnement du centre-ville, d’autres propositions émaillent les alentours. D’autres festivals qui, s’ils n’ont pas la notoriété du In ou du Off d’Avignon, y sont reliés et font aussi la part belle au théâtre de qualité. Voici quelques pistes à suivre pour sortir de la ruche intra-muros.

Gard et spectacles Première étape, quittons la ville, et même le Vaucluse. Sans aller bien loin, quelques kilomètres à peine et nous voici dans le Gard. À Villeneuve-lez-Avignon, la Chartreuse est célèbre notamment pour accueillir des auteurs en résidence d’écriture. Du 7 au 23 juillet, la splendide bâtisse et ses jardins seront le cadre des Rencontres d’été. Au programme, spectacles, lectures, expositions, un espace laboratoire des rencontres professionnelles et également deux créations du Festival

d’Avignon : du 7 au 13 juillet Unwanted, de Dorothée Munyaneza. Artiste complète, originaire du Rwanda, à la fois comédienne, auteure ou chorégraphe, elle livrera sa dernière œuvre, qui plonge au cœur des violences subies par les femmes lors du génocide des Tutsis ; du 17 au 23 juillet, c’est le metteur en scène sud-africain Boyzie Cekwana qui présentera The Last King of Kafontein, où il met en question le fonctionnement démocratique de nos sociétés (lire aussi p24-25). Parmi les spectacles programmés par les Rencontres : Nu dans le bain, texte d’Andrea Kuchlewska, mis en scène par David Géry, qui tentera de percer ce qui se passe dans la tête d’un modèle lorsqu’il pose nu face au peintre ; ou Plus grand que moi, un « solo anatomique » qui questionne la notion de liberté, signé, au texte et à la mise en scène, par Nathalie Fillion, et interprété par Manon Kneusé. À noter également les Textes Nomades, découvertes en lectures d’un nouvel auteur chaque jour, avec notamment Nadège Prugnard, Francesca Garolla ou Joël Maillard. À quelques pas de la Chartreuse se tiendra,

Retour ensuite à Avignon, plus précisément entre Villeneuve et Avignon, sur l’Île de la Barthelasse. Là se tient le festival Contre Courant, 16e du nom, à l’initiative du CMCAS et de la CCAS, les deux entités organisant des actions sociales et culturelles pour les employés d’EDF/GDF. Mais la manifestation est bien évidemment ouverte à tous et en partie gratuite, seuls les spectacles prévus à 22h sont en entrée payante (10 €) pour le grand public. Du 14 au 20 juillet, une vingtaine de spectacles seront à l’affiche. La Cie Pernette se chargera de la soirée d’ouverture, d’abord avec Ikche Wishasha L’homme nouveau, un solo dansé de Nathalie Pernette. Puis, 14 juillet oblige, elle animera un grand bal populaire, où les danseurs de la compagnie viendront s’immiscer pour quelques éclats inattendus. Le lendemain, place au Théâtre de l’Argument, avec une pièce dérangeante, L’abattage rituel de Gorge Mastromas de Dennis Kelly. L’histoire est celle d’un personnage cynique et cruel, « prototype du héros libéral : un être sans scrupule, le genre de manipulateur que sacralise aujourd’hui notre société ». Tout un programme ! Le 16, la pièce To burn or not ? sera présentée en association avec le Théâtre


23

de La Cité à Marseille. Le spectacle est né d’un processus de quatre ans, pendant lesquels des amateurs ont suivi des ateliers auprès de Michel André et mené une réflexion sur le monde du travail et ses métamorphoses. Parmi les autres propositions, à retenir également : le 18, une programmation en partenariat avec le Festival d’Avignon, Dream Mandé Djata par la chanteuse malienne Rokia Traoré ; clôture le 20 avec les polyphonies de Mécanique Vivante. Dernière escale enfin, à la Maison du théâtre pour enfants pour le Festival Théâtr’Enfants. Organisée par L’Eveil Artistique du 11 au 28 juillet, la manifestation proposera une quinzaine de spectacles, pour les petits comme pour les plus grands. Le programme se déroule sur une journée et alterne selon les styles et les âges concernés. Citons pêle-mêle : dès 2 ans, de la marionnette avec Un mouton dans mon pull du Théâtre T, ou une fable musicale, Duokami, par la Cie La Ravi ; autre fable musicale, dès 6 ans, avec Les amours sous-marines par la Cie d’A ! ; du théâtre gestuel pour les plus de 3 ans avec Chut ! Je crie par L’Ebouriffée ; Moun, du théâtre d’ombre dès 5 ans par le Teatro Gioco Vita ; Edgar Paillettes, du théâtre dès 7 ans par La Manivelle Théâtre ; ou encore, à partir de 15 ans, Maintenant que je sais par le Théâtre du Phare. Et toute la journée, la Cie Alfred de la Neuche proposera un village sensoriel pour les moins de 2 ans ainsi qu’un jardin sonore ouvert à tous. Bons festivals ! JAN-CYRIL SALEMI

La Louve © Photo Lot

Théâtre sur cour

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orté par une nouvelle équipe de bénévoles passionnés, le festival salonais Théâtre Côté Cour reste fidèle à une volonté certaine de proposer au plus grand nombre une programmation populaire et de qualité. Au Château de l’Empéri, c’est le cadre enchanteur de la Cour Renaissance qui accueillera les trois pièces de la 28e édition, les 8, 10 et 12 juillet. La Louve de Daniel Colas, qu’il met aussi en scène fait l’ouverture. Cette comédie savoureuse et bouillonnante fait s’entremêler les coulisses du pouvoir et les intérêts personnels à la Cour de François 1er, en 1515, lorsque la mère de ce dernier, Louise de Savoie alias La Louve, contrarie ses folies amoureuses… Féroce et déterminée, elle ne laissera pas s’échapper la couronne royale, au prix de nombreuses et délectables manigances ! Dans la grande tradition de la commedia

dell’arte, la Cie Alain Bertrand joue L’École des femmes de Molière, dans une mise en scène et une adaptation de Carlo Boso. Ce dernier a épuré le texte de façon à le rendre plus moderne, et a créé le personnage d’une conteuse-chanteuse qui présente et cadre le récit, accompagnée d’un limonaire (orgue mécanique). Dans un décor très épuré, tout est fait pour laisser la part belle au jeu des acteurs qui incarnent avec brio Arnolphe, aspirant au mariage avec l’ingénue Agnès tenue à l’écart du monde, Horace, jeune premier qui fait découvrir l’amour à celle-ci, Alain et Georgette, rusés valets qui déjouent les projets... Le tout émaillé de chants polyphoniques allant de la Renaissance à l’Âge baroque. Enfin, c’est la vie d’Yves Montand, de son vrai nom Ivo Livi, que revisitent Ali Bougheraba et Cristos Mitropoulos, dans une mise en scène de Marc Pistolesi (Molière du meilleur spectacle musical). Quatre comédiens, et un accordéoniste qui joue en direct sur la scène, remontent le temps pour raconter comment un fils d’immigrés italiens va devenir un artiste majeur et un citoyen engagé dans les grands moments de l’histoire du XXe siècle. De Marseille à Hollywood, des chantiers de la jeunesse aux théâtres de Broadway, de la guerre froide au communisme, tout se joue, se danse et se chante, sans artifice et avec une énergie follement communicative ! DO.M.

Théâtre Côté Cour 8, 10 et 12 juillet Château de L’Empéri, Salon-de-Provence 04 90 56 00 82 theatre-cote-cour.fr

Les Rencontres d’été 7 au 23 juillet Villeneuve-lez-Avignon 04 90 15 24 24 chartreuse.org

Festival Théâtr’Enfants 11 au 28 juillet Avignon Eveil artistique, Avignon 04 90 85 59 55 eveilartistique.com Festival Contre Courant 14 au 20 juillet Avignon ccas-contre-courant.org

Festival Cello Fan

WWW.CLINECAST.COM

Villeneuve en Scène 10 au 22 juillet Villeneuve-lez-Avignon 04 32 75 15 95 festivalvilleneuveenscene.com

17Ème festival de violoncelle de Callian Pays de Fayence

BEETHOVEN AND CO. du 30 juin au 4 juillet

RÉSERVATION : 04 94 39 98 40 et CELLO-FAN.COM

BILLETTERIE : FNAC, CARREFOUR, GÉANT, SYSTÈME U, INTERMARCHÉ


24 festivals

Kalakuta Republic, Serge Aimé Coulibaly © Doune Photo

Marseille est le monde Jan Goossens, directeur du Festival de Marseille, l’affirme : Marseille est une ville monde, et mérite un Festival à sa mesure. Tout en créations !

City ont déjà donné la parole aux habitants de 25 villes. Le 100% Marseille réunira 100 Marseillais, de tous âges et de toutes origines sociales, pour brosser un paysage composite (et toujours drôle) à travers l’expertise quotidienne des habitants.

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Découvrir le Sud

our le nouveau directeur du Festival de Marseille il n’y a pas d’opposition entre local et international : les artistes d’ici viennent de tous les horizons, et ceux d’ailleurs rencontrent la ville. Le meilleur exemple en est Dorothée Munyaneza, qui habite Marseille, et danse dans Samedi Détente le génocide rwandais. Jamais vu à Marseille, le spectacle a tourné partout, et vient de bouleverser le Théâtre de la Ville après Nîmes et Toulon (voir Zib’ 95). D’autres artistes Marseillais seront là, de ceux qui puisent leur art dans le multiculturalisme de la ville : la réalisatrice Bania Medjbar, et son Crime des anges qui suit les petits trafics d’Akim, marseillais en déroute ; Georges Appaix qui poursuivra son parcours alphabétique en créant What do you think, avec toujours le même amour des mots qui dansent et des corps qui pensent et conversent ; et les directeurs du Ballet National de Marseille

qui proposeront 7even, par sept danseurs du Ballet et sept chorégraphes invités à créer sept séquences autour du corps intime (Ula Sickle, Faustin Linyekula, Eric Minh Cuong Castaing, Nacera Belaza, Ayelen Parolin, Joeri Dubbe et Amos Ben-Tal). Et trois metteuses en scène d’ici liront, en musique, des textes africains : Dorothée Munyaneza a choisi Anguille sous roche, un roman époustouflant du jeune comorien Ali Zamir, Eva Doumbia lira Communauté de Léonora Miano, et Julie Kretzschmar Tram 83 de Fiston Mwanza Mujila. Mais Marseille sera présente au delà de ses créateurs. Les Marseillais seront sur scène, et dans les œuvres. À l’ouverture d’abord, où José Vidal reprendra son Rito de Primavera (Sacre du printemps) avec ses interprètes chiliens, et des Marseillais : 40 danseurs pour affronter l’élan vital de Stravinsky. Puis à la Criée, avec le collectif Rimini Protokoll : leurs 100%

Mais le Festival de Marseille sera aussi l’occasion de découvrir de grands artistes internationaux : ainsi le Grupo de rua Niteroy de Bruno Beltrão, qui viendra présenter à Marseille la première française de sa dernière création : le chorégraphe brésilien et sa troupe issue des rues de Rio réinvente un hip hop politique, poétique, d’une incroyable énergie. Dans cette création il sera question des migrants « ces pionniers d’un monde ouvert »... Migration encore et monde en mouvement avec Sanctuary, de Brett Bailey : l’artiste sud-africain a recueilli des témoignages de réfugiés en Europe, en particulier à Marseille, et invite les spectateurs à s’enfermer avec eux dans le sanctuaire de leurs récits d’exil. Un événement percutant, venu d’Afrique du Sud : avec The last King of Kakfontein, Boyzie Cekwana danse la protestation,


pulvérise les abus de pouvoirs, dans son pays mais aussi chez Trump. Partout où les tyrans ridicules ont mis à bas la démocratie. Car le Festival de Marseille s’associe au Festival d’Avignon pour présenter un focus sur l’Afrique Subsaharienne : Serge Aimé Coulibaly, incroyable interprète de Platel et de Sidi Larbi Cherkaoui, propose avec Kalakuta Republik de faire entendre le désir de liberté de la jeunesse du Burkina Faso. Sur la musique de Fela Kuti, une danse effrénée et libératoire. Musique encore avec la Caravane du Festival du désert : depuis 2013 le grand festival du Nord Mali ne peut avoir lieu à Tombouctou. La caravane en exil passera cette année par Marseille, avec Terakaft, un groupe de rock touareg, les Marseillais MaClick, et le Ali Farka Touré Band (voir p 44).

37e Festival International de Piano L a R o q u e d ’ A n t h é ro n www.f est i val -pi ano .com

Retrouver les grands Rabih Mroué se met à la danse ! Le metteur en scène libanais, comédien, plasticien, qui collabore souvent avec Lina Majdalanie (anciennement Lina Saneh) fera danser le Dance on Ensemble, ce groupe de danseurs de plus de 40 ans qui passe commande aux plus grands. Rabih Mroué a accepté d’écrire Water between Three hands pour eux, avec eux, pourvu qu’ils parlent, de leurs souvenirs, de leurs corps, en dansant... Il présentera également, avec Lina Majdalanie, un spectacle plus habituel de son style, qui joue sur la vérité décalée d’un théâtre faussement documentaire : So little time met en scène un martyr libanais qui n’est pas mort… Nacera et Délia Belaza occuperont la rue : la chorégraphe et sa sœur, qui inventent depuis une vingtaine d’année une danse lente, répétée, proche du recueillement sinon de la transe, veulent faire Procession afin de lover leurs gestes précautionneux dans la réalité de la ville. Comme elles, on l’a souvent vue grâce à Dansem : Bouchra Ouizguen reprend Corbeaux, avec ses danseuses marocaines vêtues de noir, et propose une installation vidéo, Corbeaux-traces, créée pour le Festival, et qui puise aux sources des histoires entrevues dans sa pièce maîtresse créée en 2014. Meg Stuart est invitée en coréalisation avec Marseille objectif danse, qui sait jeter un œil expert sur la danse américaine, en particulier celle des femmes. Until your hearts stop est une performance créée en 2015 pour six danseurs et trois musiciens, entre jazz et rock, rencontres et évitements. Et puis il y aura Julien Gosselin : le jeune metteur en scène (30 ans) fait vibrer les plateaux de fureur et d’invention. Ses Particules élémentaires donnaient au roman de Houellebecq une force de vie qui en détournait le propos délétère. Son 2666 renversant de talent, a enthousiasmé le Festival d’Avignon 2016. Il met ici en scène, avec 12 comédiens de l’école supérieure de Strasbourg, une création d’Aurélien Bellanger. Sur l’accélération des particules, le tunnel sous la manche, la jungle de Calais. Tous ces endroits de transformation radicale des frontières... Une programmation riche, diverse, engagée et haletante, qui laissera place à des fêtes régulières, des ateliers de la pensée, et qui a su créer des réseaux avec les grands festivals européens et les acteurs du territoire, en suscitant des créations, et en coproduisant la plupart des spectacles. Chapeau !

BORIS BEREZOVSKY EVGENY KISSIN JEAN RONDEAU BEHZOD ABDURAIMOV BERTRAND CUILLER JOEY ALEXANDER YOANN MOULIN THOMAS ENHCO DAVID KADOUCH PIERRE GALLON RICHARD GALLIANO JAN LUNDGREN PAVEL KOLESNIKOV STANISLAV IOUDENITCH PIERRE QUEVAL PHILIPPE GIUSIANO RÉMI GENIET BRICE SAILLY MARC LAFORET PLAMENA MANGOVA ANDREI KOROBEINIKOV MATHIAS ALGOTSSON ALEXANDRE KANTOROW CHRISTIAN ZACHARIAS RAY LEMA LAURENT DE WILDE KIT ARMSTRONG YARON HERMAN JONAS VITAUD NICHOLAS ANGELICH MARIE-ANGE NGUCI VIKINGUR OLAFSSON MAROUSSIA GENTET ALEXANDRE THARAUD FRANCESCO TRISTANO JEAN-FRÉDÉRIC NEUBURGER SHANI DILUKA SEONG JIN CHO BRUCE BRUBAKER WILLEM JANSEN FLORENT BOFFARD SANJA BIZJAK LIDIJA BIZJAK CLAIRE DÉSERT EMMANUEL STROSSER GUILLAUME COPPOLA HERVÉ BILLAUT ALEXANDRE LORY JEAN-PAUL GASPARIAN OLIVIER HOUETTE MATAN PORAT MOMO KODAMA FRANÇOIS-FRÉDÉRIC GUY JEAN-CLAUDE PENNETIER NATHANAËL GOUIN NIKOLAÏ LUGANSKY PALOMA KOUIDER PIOTR ANDERSZEWSKI NATHALIA MILSTEIN YULIANNA AVDEEVA VINCENT COQ IDDO BAR-SHAÏ PHILIPPE HATTAT LARS VOGT PIERRE HANTAÏ NELSON GOERNER LUIS FERNANDO PÉREZ GASPARD DEHAENE ANNE QUEFFÉLEC ADAM LALOUM CHRISTIAN IVALDI NELSON FREIRE CHARLES RICHARD-HAMELIN ARCADI VOLODOS GUILLAUME BELLOM LUKAS GENIUSAS MARIEJOSÈPHE JUDE LUCAS DEBARGUE ABDEL RAHMAN EL BACHA

AGNÈS FRESCHEL

04 91 99 00 20

Festival de Marseille 15 juin au 9 juillet festivaldemarseille.com

Réservations: +33 (0)4 42 50 51 15


26 festivals

Du 9 au 26 juillet, le CDC - Les Hivernales accueille sept compagnies nationales et internationales selon le principe d’une programmation quotidienne en continu sur le plateau. Un concentré de danse contemporaine de 10 heures à 21h45…

Le marathon de l’Été danse

Le Récital des postures, Yasmine Hugonnet © Anne-Laure Lechat

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our les artistes le marathon en vaut la chandelle, car nombre d’entre eux volent haut dans le ciel après avoir touché le sol de L’Été danse, tremplin et vitrine de premier plan. S’y frotteront successivement Yasmine Hugonnet (Cie Arts mouvementés), Fabrice Ramalingon (Cie R.A.M.a), Sylvain Bouillet, Mathieu Desseigne et Lucien Reynès (Naïf Production), Nans Martin (les laboratoires animés), Ayelen Parolin, Bruno Pradet (Cie Vilcanota) et Hsiao-Tzu Tien. Sept propositions agrémentées, du 23 au 26 juillet, de la création C’est une légende de Raphaël Cottin (Cie La Poétique des signes) qui marque la première collaboration entre le CDC - Les Hivernales et le Festival d’Avignon. Dans son solo Le Récital des postures, la chorégraphe et interprète Yasmine Hugonnet utilise son corps comme d’un instrument. Elle joue sur les notions de temps, de résistance et d’immobilité « pour donner à voir les

bascules » et les postures de son corps dans ses imperceptibles mouvements. L’absence est au cœur de la pièce de Nans Martin, D’œil et d’oubli, qui puise dans son histoire intime matière à une écriture personnelle faite de silence et d’immuabilité. Avec pour seule constante la fuite du temps, Hsiao-Tzu Tien transpose sa réflexion sur le sentiment de flottement inhérent à l’époque en une série de tableaux comme « les fragments d’une mémoire retrouvée». Temps suspendu, silence, immobilité sont le ciment de ces trois pièces introspectives. À l’opposé, My (petit) pogo de Fabrice Ramalingom, Nativos d’Ayelen Parolin et People What People ? de Bruno Pradet s’inscrivent dans l’énergie et la performance. Ayelen Parolin part des singularités de quatre danseurs de la Compagnie nationale de danse contemporaine coréenne pour construire un opus né d’une expérience chamanique collective. Quitte à

À Montpellier toute la ville danse De la postmodern danse aux écritures actuelles, le paysage chorégraphique présenté par Montpellier danse est l’exact miroir d’un art qui ne cesse de se recréer, de s’interroger, de s’entremêler d’un continent à l’autre

L

e 37e festival Montpellier Danse est une édition « disons, bigarrée » pour reprendre l’expression de son directeur Jean-Paul Montanari. Mais cela ne signifie pas qu’il s’agit d’un patchwork ou d’un festival puzzle. Au contraire ! La programmation, abondante et intergénérationnelle, tend un fil rouge entre les imaginaires et les esthétiques, depuis la pionnière américaine Lucinda Childs et le néerlendais Hans van Manen jusqu’à Daniel Linehan ou Sharon Eyal, en passant par les désormais « classiques » Angelin Preljocaj, Mathilde Monnier ou Marie Chouinard. À l’instar de la Biennale de Lyon, Montpellier danse est devenu une « école du spectateur » qui peut oser le répertoire comme la création expérimentale dans un souci d’exigence permanent. Ainsi les festivaliers suivent depuis de nombreuses années le travail d’Angelin

Glass), de Fabrice Ramalingom accueilli d’abord avec La Camionetta puis avec R.A.M.a (également présent à L’Été danse des Hivernales, voir ci-dessus) ou encore de Bernardo Montet de retour à Montpellier danse après onze ans d’absence pour sa dernière création Carne. Car Montpellier danse est un véritable chaudron à créations, plébiscité par Dance, Ballet de l’Opéra de Lyon-Lucinda Childs © Jaime Roque de la Cruz les chorégraphes de tous Preljocaj (reprise de Spectral Evidence et La horizons ! Put your heart under your feet… Stravaganza), de Mathilde Monnier (création and walk du sud-africain Steven Cohen avec Alan Pauls d’une pièce pour 12 danseurs dédiée à son âme-sœur perdue Elu ; Endo El Baile), du Ballet de l’Opéra de Lyon (Dance de David Wampach qui revisite l’histoire de de Lucinda Childs sur une musique de Philip la performance et des pratiques d’art action ;


bousculer le rite et à écrire « une forme chorégraphique forcenée et obsessionnelle ». Fabrice Ramalingom s’interroge sur le chemin qui conduit de l’idée originelle à la forme spectaculaire dans My (petit) gogo, et esquisse une réponse à l’attention du jeune public en donnant à voir les rouages gardés secrets. Entre didactisme et sensibilisation, tout son talent est d’intégrer le spectateur dans sa performance. Pulsations, musique électro, danses rituelles et transes collectives, People What People ? de Bruno Pradet entraîne ses interprètes dans un tourbillon vertigineux qui fait d’eux un groupe compact. Une matière unique et bouillonnante. Énergie toujours, mais dissemblable dans l’écriture, La mécanique des ombres du collectif Naïf Production mêle danse hip hop et cirque contemporain, ses trois danseurs-acrobates multipliant les prouesses pour raconter « l’histoire d’une petite humanité qui balbutie ». MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

L’Été danse 9 au 26 juillet CDC – Les Hivernales, Avignon 04 90 82 33 12 hivernales-avignon.com

Création Chêne Noir

Théâtre du Chêne Noir Productions en accord avec la Cie Clin d’œil

Migraaaants (On est trop nombreux sur ce putain de bateau) de Matéi Visniec mise en scène : Gérard Gelas Avec Aurélie Audax, Gérard Audax, Mouloud Belaïdi, Mickaël Coinsin, Anysia Deprele, Liwen Liang, Damien Rémy

Duos d’Emanuel Gat avec sa compagnie et Tenworks (for Jean-Paul), clin d’œil au maitre des lieux, avec le Ballet de l’Opéra de Lyon ; Autoctonos de l’argentine Ayelen Parolin ; Bacchantes, Prélude pour une purge de la cap verdienne Marlene Monteiro Freitas ; Dança Doente du brésilien Marcelo Evelin ; ou Tapis rouge de l’ivoirienne Nadia Beugré pour n’en citer d’une infime partie. Des occasions rares de se frotter à des pratiques du corps qui s’inscrivent dans des histoires et des traditions extra européennes. En amont ou en aval des spectacles, films et vidéos de (et sur) la danse se taillent une place de choix dans la programmation concoctée, pour partie, avec la collaboration d’Arte. Cette année, le focus « Un demi-siècle de création chorégraphique en image » rendra hommage à Merce Cunningham. Si toutefois le spectateur n’est pas rassasié, il peut encore suivre des leçons de danse, participer à des forums, naviguer entre les interventions urbaines… car ici on parle danse, on pense danse, on vit la danse à chaque instant. C’est une formidable leçon de danse à l’échelle de la métropole. M.G.-G.

Ils viennent des quatre coins du monde, là où la vie n’est plus compatible avec l’idée d’avenir. Ils sont des millions. Combien de millions ? On ne sait pas. On les appelle « migrants » et ils ont une seule chose en tête : la volonté d’arriver en Europe… Après plusieurs mois d’enquête en tant que journaliste pour RFI, Visniec signe une comédie noire sur l’une des plus grandes tragédies de notre temps. Il confie à Gelas (Confidences à Allah Molière 2010, Riviera, Histoire vécue d’Artaud-Mômo…) la mise en scène de cet électrochoc salutaire... France 3 • Un spectacle d’utilité publique, à l’humour ravageur ! L’avant-scène théâtre • Un implacable et fort drôle accéléré d’une tragédie du temps présent. Une magistrale force de percussion. WebThéâtre • Une comédie des plus féroces, au rythme qui tient de la déferlante, mais infiniment respectueuse, amoureuse des êtres humains…

à 17h15

du 7 au 30 juillet 2017 LOCATIONS

04 90 86 74 87 (par CB) et www.chenenoir.fr Sur place de 9h30 à 22h

37e festival Montpellier danse 23 juin au 7 juillet Divers lieux, Montpellier 0800 600 740 montpellierdanse.com

www.fnac.com / 0 892 68 36 22 (0,34€/min) www.theatreonline.com / 0 820 811 111 (0,12€/min) Théâtre du Chêne Noir • Direction Gérard Gelas – Scène d’Avignon 8bis, rue Sainte-Catherine • AVIGNON


28 festivals

De l’antique au contemporain

Barock © GTG - Gregory Batardon

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endez-vous incontournable de l’été, Vaison Danses, malgré les restrictions et une 22e édition limitée (quatre soirées au lieu de huit en 2016), propose une programmation de haute volée. Le festival débute par deux soirées ouvertes aux talents du territoire dans l’écrin du théâtre antique : univers éclectique des élèves du PULSE, mêlant, hip-hop, classique, jazz, salsa, rock, kizomba et celui des écoles intercommunales de danse et musique de la COPAVO (de Bach aux variétés comme Mercy ou The Girl). La danse se lovera ensuite dans les chorégraphies de compagnies internationales, par des pièces empreintes de classicisme et de modernité. La Compañia Nacional de Danza d’España, dirigée par José Carlos Martinez, ancienne Étoile de l’Opéra de Paris, interprètera trois œuvres de chorégraphes contemporains : The vertiginous Thrill of Exactitude de William Forsythe, qui s’attache à célébrer la capacité du danseur à transcender la technique classique, Hasta Siempre… ? de Sharon Fridman, où la danse devient « pulsion vitale », et Minus 16 d’Ohad Naharin, conjuguant musiques traditionnelles israéliennes et cubaines avec

une tellurique énergie. Le Ballet du Grand Théâtre de Genève se glissera dans les partitions baroques de Scarlatti et Rameau, chahutées par l’inventivité du jeune chorégraphe Jeroen Verbruggen, ancien premier danseur des Ballets de Monte-Carlo : résolument avant-gardiste, son écriture transgresse les codes sur un mode brillant dans Ba\rock. Malandain revient pour le plus grand bonheur des festivaliers, avec le Ballet Biarritz et sa création Noé sur la Messa di Gloria de Rossini, où le personnage de Noé et l’Arche fondatrice incarnent une rupture dans l’histoire de l’humanité… Enfin « la bombe de folie joyeuse » du Cirque Le Roux, entre cirque, théâtre et cinéma hollywoodien, suscite émerveillement et distorsions zygomatiques par la précision des acrobaties et l’humour de la troupe déjantée pour un désopilant The Elephant in the Room ! MARYVONNE COLOMBANI

Vaison Danses 24 juin au 29 juillet Théâtre Antique, Vaison-la-Romaine 06 49 42 02 88 vaison-danses.com

Communauté dansante

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e Pôle 164 (co-dirigé par les Cie Itinérrances et MEAARI depuis 2015), situé dans le 14e arrondissement de Marseille, est dédié à la danse contemporaine, et remplit la double fonction de lieu de création et de sensibilisation des publics. Lieu de diffusion, le Pôle 164 donne l’occasion à un public varié de découvrir des chorégraphes émergents ainsi que de plus confirmés. Point d’orgue de la saison, le nouveau rendez-vous de l’été : Faîtes de la danse. Pôle 164 investit le centreville de Marseille et célèbre la danse place Bargemon. Pas d’esthétique surplombante, chacun, danseur ou pas du tout, et peu importe l’âge, est invité à participer au studio à ciel ouvert, à déambuler, regarder, agir. Après une séance d’échauffement collectif avec Léa Canu Ginoux, et le spectacle Dans le rétro de la Cie Artmacadam, on est prêts pour les ateliers en miroir, Parents-Enfants (Léa Canu Ginoux), et/ou l’atelier de Capoeira/ Hip-Hop, animé par Gatinho Angola et Wilfried Ohouchou qui vous entraîneront ensuite dans une Battle Hip-Hop versus Capoeira. On reprend sa respiration en applaudissant

le spectacle des élèves du Conservatoire de Martigues, le spectacle Octobre Rose de Marco Becherini et la performance menée par Léa Ginoux et Wilfried Ohouchou. On suit avec délectation Les Studios du Cours dans leur déambulation, puis le spectacle de Christine Fricker avec le groupe Octet de Pulsion qui lancera par la suite un Bal Moderne. Emportés par le Dans le rétro © Geoffrey Fages - Artmacadam mouvement irrésistible de la danse, on se lance spectacle de Michael Whaites. La perfordans l’atelier Danse contact avec le Collectif mance collective JAM avec Léa Canu Ginoux Contact Impro de Marseille, puis peut-être et le collectif Contact Impro de Marseille, dans Magma, le projet participatif porté par et Planetary Dance d’Anna Halprin avec la Cie Bissextile de Nantes et Stéphane Yoann Boyer clôturent la fête. Quel beau Fratti. Les élèves de l’association Pulsion partage! M.C. d’Istres reprendront Mammame de JeanFaîtes de la danse Claude Gallotta. Yendi Nammour offrira 25 juin Time to share again, et Davide Finelle My Place Bargemon, Marseille name is. On vient de loin pour cette journée : 04 91 64 11 58 pole164.com/faites-de-la-danse Link Company arrive d’Autralie pour un


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Vendredi 28 et samedi 29 juillet

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11e édition

LES NUITS FLAMENCAS pa

7 – 30 Juin 2017

CONCERTS SPECTACLES PARADE[S]

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direction artistique Juan Carmona EVA YERBABUENA CASA PATAS - FRANCISCO HIDALGO JOSE MAYA ba l

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30 festivals

Les plaisirs du mercredi Spectacles et petits plats, Les Mercredis du port du mois de juillet sont toujours aussi alléchants !

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ésormais intégrés aux Soirées du port / Côté Dock qu’organise la ville de PortSaint-Louis dont ils sont partenaires (et qui transforment le port de plaisance « en restaurant à ciel ouvert »), Les Mercredis du port proposent une 8e édition toujours basée sur les plaisirs de découvertes multiples ! Voir, écouter, déguster, participer sont les maîtres mots de cette manifestation réjouissante concoctée par le Citron Jaune, Centre national des arts de la rue installé dans la ville. Chaque mercredi de juillet, dès 19h, face au port, le soleil se couchant tranquillement, les festivités peuvent commencer. Attablés face aux plats locaux proposés par les restaurateurs Saint-Louisiens, ou déjà attentifs aux spectacles, tout le monde peut profiter de cette scène à ciel ouvert qui propose cirque, danse, théâtre, musique et entresorts, qu’animera chaque soir la fanfare tout terrain Bandakadabra dont le répertoire va des Balkans au jazz, en passant par le klezmer et le rock steady.

Avec le Cirque Rouages qui aborde, dans Ôm’Taff un point de vue décalé, ludique et drôle, sur Pelat, Joan Català, ZAT 2017 à Montpellier © A.Z. les absurdités du monde du travail ; le Duo chant, ses interprétations fantasques oscillant Bonito et ses Chansons à risques, surtout du burlesque à l’absurde ; La Folle allure des pour la pétillante et naïve chanteuse, soumise circassiens Gaëlle Esteve et Guillaume aux réactions de l’étrange homme-orchestre Bales, étranges locataires d’un cirque sans âge qui l’accompagne ; la délicate mise à mort qui parle de prouesse, de petits riens, d’enfance, d’une utopie dans l’arène fermée de La Ferme, de jeu et d’étrangetés diverses ; et, une fois de la Cie Antipodes, un lieu dans lequel les n’est pas coutume, un grand concert ! Avec humains ne sont que marchandises, asservis, Moussu T e lei Jovents le blues aura des mais prêts à devenir libres ; la relation particu- accents occitans, la Provence sera toujours lière d’un homme, Joan Català, avec un mât aussi cosmopolite et il suffira d’embarquer de bois sur lequel il finira par se hisser grâce sur leur dernier album, Navega !, pour le vivre à une communauté de spectateurs complices ensemble pleinement ! DOMINIQUE MARÇON et unis ; le Bal Trap des acrobates de la Cie La Contrebande, pensé comme un ballet de corps et d’objets déguisés avec lancés et propulsions de toutes sortes ; un opéra 5, 12, 19 et 26 juillet de plein air qui donne un Coup de balai à la Quais du port, Port-Saint-Louis-du-Rhône 04 42 48 40 04 lecitronjaune.com Scala avec une diva défiant les techniques du

Renversant Mallemort ! le mois de janvier avec la participation de bénévoles et d’associations. Porté par la commission culture de la municipalité de Mallemort et par l’Association d’Aide à la Diffusion Interrégionale du Spectacle Vivant, le projet se veut créateur de liens et source d’autres possibles. Le dispositif « Faire village ensemble » en est une des illustrations. Conçu par les Déambulation avec des enfants de Mallemort marionnetisés © Studio Collin associations La Parole aux eux jours de fêtes, de délire, de spectacles, citoyens et Scen’As’Photo, il consistera en de concerts, d’animations ou d’ateliers en une installation participative. Au programme, tout genre, les rues et places de Mallemort exposition de photos, fresque collective réalisée vont se transformer en territoires artistiques. en temps réel et « portage de parole » sur le Le Festival Sens Dessus Dessous, s’an- thème du village et de la place de village. À nonce même littéralement renversant, fidèle noter encore une multitude d’ateliers pour à son nom et à sa réputation ! Pour cette petits et grands, un marché des créateurs ou 9e édition, les habitants ont été associés de un salon des arts en plein air, rassemblant près à l’organisation, qui se prépare depuis les œuvres d’artistes régionaux. Quant aux

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spectacles, plusieurs rendez-vous à ne pas manquer. En ouverture, l’église du village accueillera les 50 choristes de La Clé des Chants de la Durance. Puis, pour les plus téméraires, une initiation au cirque sera proposée par la compagnie Ska barré, avec tout l’équipement nécessaire aux prouesses de jonglage, d’acrobaties ou d’équilibrisme. Le spectacle Trapèze Flamenco sera le point d’orgue de l’animation. Enfin, ambiance foraine et festive avec les baraques de la compagnie Kalderas. Sur la place du Bicentenaire, les artistes offriront plusieurs éclats saltimbanques : tissu aérien dans les arbres, spectacle de marionnettes ou encore La quête du Râle d’un drôle de clown préhistorique ! JAN-CYRIL SALEMI

Festival Sens Dessus Dessous 30 juin et 1er juillet Mallemort 04 90 57 41 62 mallemortdeprovence.com


SAISON 2017 2018 ROMÉO CASTELLUCCI DELAVALLET BIDIEFONO CALYPSO ROSE BLANCA LI HOFESH SHECHTER SLAVA’S SNOWSHOW ... BILLETTERIE JUSQU’AU 13 JUILLET en ligne et au guichet, uniquement pour les cartes de fidélité Grain de Sel, Fleur de Sel. HORAIRES DE LA BILLETTERIE du mardi au vendredi de 13H à 18H le mercredi de 10H à 12H & de 13H à 18H. Billetterie hors cartes de fidélité à partir du 5 septembre à 13H. 04 42 49 02 00 WWW.LES-SALINS.NET 19 QUAI PAUL DOUMER - MARTIGUES


32 festivals

Surfaces de rue

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aut lieu du cirque, galvanisé par La Verrerie d’Alès, Pôle national des Arts du cirque, et la scène nationale Le Cratère, la capitale des Cévennes est fière d’avoir été la première à accueillir un festival d’Arts de la rue en Languedoc-Roussillon. Cela fait maintenant bientôt 20 ans que la structure théâtrale porte, parfois contre vents, des fois même contre marées, une programmation enlevée et novatrice, qui essaime sur plusieurs jours. Pour cette 19e édition de Cratère Surfaces, on aura la chance de découvrir une majorité de créations. Plaisir de retrouver certaines compagnies avec leur dernière production, curiosité d’en rencontrer des nouvelles, et satisfaction d’assister à des spectacles déjà classiques venus de l’étranger. Au rayon des retrouvailles, la Cie Yann Lheureux, qui avait fait sensation l’an dernier avec Gravity.0, revient avec une création franco-coréenne, pour une première en France de son dernier spectacle Red Circle. Les 12 danseurs viennent de la Korea National University of Arts. Le chorégraphe les a enfermés dans un cercle posé au sol, d’où,

La Cuisiniere © Tout En Vrac

à force d’énergie, d’alliances, de chaos, d’invention, ils tenteront de s’échapper. Un élan communicatif. Co-création Verrerie et Cratère, Zéro degré, de la French freerun Family, fera se déplacer les spectateurs la tête en l’air. Ils défient l’espace urbain, qu’ils franchissent au-delà des limites : d’un immeuble à l’autre, en sautant,

grimpant, dévalant à mains nues les façades et les toits. C’est une relecture poétique de notre environnement quotidien, qu’ils éclairent par leur performance et rhabillent de leur regard théâtralisé. Nathalie Pernette, chorégraphe qui s’adresse à tous les publics, c’est-à-dire aux parents avec leurs enfants (ou l’inverse, au choix),

qui porte la manifestation, il s’agit de « répondre à une commande de Provence Alpes Agglomération, donc de trouver une formule festive, conviviale, qui permette de toucher toute la population ». Ce qui n’empêche pas la structure de prendre « l’air de rien les gens par la main, pour les emmener un peu plus près du Sortie de secours © Theatre de Caniveau projet artistique du alée sur le calendrier des vacances sco- théâtre ». Dans ce but, quelques changements laires, l’édition 2017 des Escapades ont été opérés cette année : jusqu’ici, Les s’avance vers l’été (l’an dernier, le coup Escapades avaient lieu dans le pré d’un beau d’envoi avait eu lieu le dernier week-end de bâtiment, une ferme du XVIe siècle, ce qui juin). Avec une programmation des plus cha- entraînait des contraintes techniques et de leureuses : selon Marie Rouge, responsable sécurité non négligeables. Elles se tiendront de la communication du Théâtre Durance désormais principalement dans le quartier des

Lauzières, le pôle culturel de Château-Arnoux/ St Auban qui compte, outre le théâtre Durance, une médiathèque et un cinéma d’Art & Essai. Le festival investira les pelouses, visibles de la route, et supprime la billetterie pour offrir un accès entièrement libre.

On s’échappe ?

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Musique et cabaret Les festivités commenceront toutefois à Peyruis le 6 juillet, où le boulodrome accueillera « en préambule » les comédiens très engagés du Théâtre de Caniveau. Une compagnie à l’approche clownesque -et, partant, subversive- qui entend donner la parole aux marginaux et exclus du système. Leur Cabaret psychiatrique, drôle, pertinent, et sensible, est réputé renvoyer ses spectateurs à leur propre fragilité. Comme le disait un certain Sigmund Freud, nul besoin d’être fou pour savoir que le Moi n’est pas maître chez lui ! Les deux soirées suivantes (à Château-Arnoux/St Auban, donc) seront consacrées à la musique. World, le 7 juillet, avec le « bazar »


propose le deuxième volet de son triptyque Une pierre presque immobile : La figure du baiser. C’est donc l’immobilité qu’elle célèbre, avec ici trois couples de danseurs statufiés, qui jouent les gestes de l’amour. On se déplace entre ces statues vivantes, on observe les gestes arrêtés, on se projette. Et puis les poses changent, et tout est alors possible à nouveau. La Cuisinière viendra nous présenter sa cuisine dernier cri, où tout se déglingue, les objets se rebellent et la recette ne manque pas de sel. La Cie Tout en Vrac a décroché la Palme d’or du rire au dernier Festival d’Aurillac. Un spectacle aux petits oignons. Artistes désormais associés à la Verrerie, le collectif G. Bistaki, après le remarqué Baïna Trampa Fritz Fallen l’été dernier, invente, à coup de jonglerie, d’acrobaties, de danse, de poésie, une variation autour de la tuile provençale (et oui !), dite « canal ». Chutes de dominos, jonglage avec tuile, jeux de mots, rêverie de toi à toit, c’est un spectacle total qui nous attend. Et d’autres univers, d’autres pays, fables, facéties et gestuelles seront encore et aussi à traverser pendant ces cinq jours dans la rue. ANNA ZISMAN

Cratère Surfaces 4 au 8 juillet Alès, Anduze, La Bambouseraie, La Grand Combe 04 66 52 52 64 cratere-surfaces.com

très inventif de Babel Büech Madam’ en première partie, truffé d’anglais de contrebande, de charabia classique, et de chant-yaourt. Dans leur sillage, offrant une délicieuse fusion de cumbia et de reggae, les joyeux drilles du groupe Kumbia Boruka. Indéniablement, ça promet de chalouper sur les pelouses... Le dernier soir, place à la chanson française, avec Les Têtes de Linettes, en concert-spectacle mariant trois voix -celles de Fanette Bonnet, Julie Buttolo, Floriane Dénarié- sur des rythmes variés, du gospel au swing en passant par la bossa. La tête d’affiche sera assurée par les angevins de Lo’Jo, portant un nouvel album, [Fonetiq Flowers], et toujours aussi vaillants après trois décennies de tournées à travers le monde. Comme le souligne Marie Rouge avec malice, « des plateaux de qualité, festifs et pourquoi pas dansants, mais pas la stratosphère de la notoriété ». On ne sait pas pour vous, mais chez Zibeline, on apprécie beaucoup cette approche ! GAËLLE CLOAREC

Les Escapades 6 au 8 juillet Divers lieux, Château-Arnoux/Saint-Auban, Peyruis 04 92 64 27 34 theatredurance.fr


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Escales en poésie

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escendant des sources vives de la Provence verte, les Eauditives de la ZIP de Barjols arrivent à la mer et font escale au port de Toulon, depuis de nombreuses années partenaire du Festival par le biais des travaux des étudiants de l’ÉSADTPM, guidés par leur professeur plasticien, poète et performeur, Patrick Sirot. Embarquement pour quatre jours de poésie dans divers lieux du centre-ville, du 15 au 18 juin avec des artistes venus de Grèce, d’Irak, d’Espagne, du Liban, de Sardaigne, du Québec, de Turquie, de France, du Var… et une poésie vivace, profonde, ancrée dans le monde, lui accordant des lectures nouvelles, dans la fulgurante évidence de ses images, de ses frottements de mots et de sens. Lectures, performances, vidéo, musique, exposition d’art plastique, tout se conjugue en un partage ouvert à tous. On goûtera Les Poèmes du Silence en langue des signes française avec Levent Beskardes et Aurore Corominas, parcours poétique sur les créations (et les mains) Rouge et Kosovo du premier, et la voix de la seconde : le verbe se fait geste ou l’inverse, on voit les mots, on entend les arabesques visuelles… On se délectera des Lectures en mer, sur les lignes 28 M et 18 M des navettes maritimes du réseau Mistral avec les textes de Maxime Hortense Pascal, Patrick Sirot, Sébastien Lespinasse et Nicolas Vargas. À ces houles

© X-D.R

poétiques répondront sur la terre ferme les Poésies en Méditerranée avec les lectures et performances de Sapho, Kadhem Khanjar (traducteur Antoine Jockey), Carlos Avila (traduit par Amadeo Aranda), Démosthène Agrafiotis. Les étudiants de l’ÉSADTPM proposeront leurs Poéssonies, (vous pouvez déjà rêver à tous les jeux linguistiques possibles en déclinant paronymes et acrobaties verbales !), installations et performances emplies de leur jeune verve créatrice. La poésie sera aussi à Ciel ouvert avec Démosthène Agrafiotis, JeanPierre Bobillot, Laurent Cennamo, Antoine Simon, Carlos Avila, Cédric Lerible, les étudiants, et la musique de Barre Phillips que l’on retrouve avec les lectures et performances

de Patrick Sirot, Sébastien Lespinasse, Nicolas Vargas, Jean-François Bory, Kadhem Khanjar pour une Poésie en Liberté. La plupart de ces poètes se livreront à la mise en voix de leurs textes lors des Poésies Plurielles. Enfin, Le film des visages, animé par la voix de Sapho et réalisé par Franck Smith, sera projeté au théâtre Liberté. Chaque édition des Eauditives est un moment fort des éditions Plaine Page qui éditent les poètes que l’on va rencontrer lors de tables rondes, Philippe Jaffeux, Nicolas Vargas, Franck Smith, Sébastien Lespinasse, Kadhem Khanjar et Jean-François Bory : six parutions, réparties dans les différentes collections, Les Oublies, Connexions, Calepins. Deux expositions commentées complètent avec intelligence la manifestation, l’une autour de Elles exposent, femmes artistes du XXe siècle, l’autre, Les Savonnières et les femmes artistes du XXIe siècle, où imaginaire, fantasmes et traditions empruntent au savon de subtils glissements poétiques… MARYVONNE COLOMBANI

15 au 18 juin Centre-ville, Toulon 04 94 72 54 81 plainepage.com

Gryséliennes estivales rafraîchissante et sensuelle : cocktail d’énergie et d’humour, revigorant ! En première partie de son concert, le Trio Combo Brazil, enclave de Rio de Janeiro en Provence (installé depuis 10 ans à Marseille) avec Wallace Negao, David Walters, et Pierre Sibille (27 juillet). Auparavant, on aura applaudi le père de la world music, Manu Dibango et son saxophone, qui nous transportera par ses sonorités groove. Autre voix, le 17 août, celle superbement généreuse et travaillée de Liane Foly : une couleur jazz séduisante par la « crooneuse » sans doute la plus talentueuse du moment. Théâtre et performances seul-en-scène apporteront leur verbe à la cour du château : Pascal Légitimus et son humour ravageur dans un Legitimus Incognitus de haute volée jubilatoire (11 juillet). Autre grand nom de l’humour, l’ambassadeur du « Défi pour la Terre », Marc Jolivet, sera Distributeur d’oubli, dialoguant avec Victor Hugo, liant des liens d’amitié avec via Coelho © Youri Lenquette

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inquième édition pour les Soirées du Château de Gréoux-les-Bains et une qualité éclectique toujours au rendez-vous. L’affluence est en progression constante depuis 2013, et l’évènement est soutenu avec passion par la mairie et le département des Alpes de Haute-Provence principalement. Une équipe de bénévoles passionnés renforce le dispositif. Cette année, une fée marraine solaire, Flavia Coelho, avec sa voix qui sait glisser entre les tempos samba, ragga, hip-hop, afro-brésilien,

un drone, se désignant lui-même comme un « utopitre » désopilant (3 août). La Compagnie Antoine, des Alpes de Haute-Provence nous entraîne, grâce à Audrey Stahl-Truffier et Marion Nanca, dans un « road trip » déjanté avec Délire de fuite, sur un rythme trépidant (10 août). Dans un autre registre, André Neyton fait revivre le procès de l’affaire qui bouleversa les chroniques judiciaires de 1952 avec Moi Gaston Dominici, Assassin par défaut. « Total malentendu de syntaxe » dira Jean Giono, « accusé privé de langage » soulignera Roland Barthes… Pour l’anniversaire des cinq ans du Festival, l’inspiration brésilienne d’une partie de la fête sera développée avec marchés, tournois, danses… Gréoux de Janeiro est né ! M.C.

Les Soirées du Château de Gréoux-les-Bains 6 juillet au 24 août Château de Gréoux-les-Bains 04 92 78 01 08 greoux-les-bains.com


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Un partage de culture

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l semblerait qu’il fasse bon vivre à SainteCécile-les-vignes… Ses vignobles, la beauté des paysages du Haut-Vaucluse, certes, mais pas seulement ! Il y a aussi un salon du livre au nom délicieux, Lire entre les vignes, qui fête cette année ses 10 ans ! Une équipe de bénévoles passionnés et très motivés, est à l’origine de la manifestation : regroupés autour de la magnifique librairie du village, Feuilles de vignes (qui a obtenu le label Librairie Indépendante de Référence en 2011), ils se sont associés au Café Littéraire qui œuvre pour la promotion de la littérature sous toutes ses formes en organisant, entre autres, des rencontres avec des auteurs tous les deux mois, aux Amis de Phidias qui a pour objet la création et le développement d’œuvres dans le domaine de la sculpture et des arts plastiques en général, à la bibliothèque François Mitterrand, au cercle de lecture… autant de forces vives et complémentaires qui partagent leur passion de la lecture et la font vivre ! Durant toute la journée du 18 juin, autour de l’invité d’honneur Alain Guyard, « philosophe forain » qui mettra la discipline dans tous ses états lors de sa carte blanche, et des invités de la librairie -Fabrice Puléo (scénariste de la BD Verre’s, Yil édition), Marido Viale (auteure de Raconte encore grand-mère !, éditions Ricochet), André Deyrieux (auteur

Lire entre les vignes, 2015 Claire Bresolin

de À la rencontre des cépages modestes & oubliés, Dunod) et Claire Gilbert (auteure de Au bout du tunnel, éditions de la Rémanence)-, 32 éditeurs indépendants (beaucoup viennent de la région, et plus particulièrement du Vaucluse) et 39 auteurs, seront présents, « les nouveaux comme ceux qui reviennent maintenant depuis des années, heureux de retrouver le village qui les accueille dans un grand moment de convivialité » souligne Pascal Marrou, directeur de l’équipe organisatrice. Et de la convivialité il y en aura ! Lectures musicales, dédicaces, atelier de création artistique

tout public, de calligraphie florale spontanée, exposition de planches botaniques… le tout accompagné de dégustations et d’échanges proposés par de nombreux vignerons, tous (ou presque) ayant leur domaine à Sainte-Cécile. Résisterez-vous longtemps à cette invitation alléchante ? DOMINIQUE MARÇON

Lire entre les vignes 18 juin Salle Camille Farjon, Sainte-Cécile-les-Vignes 04 90 60 67 95 salon.du.livre.free.fr

Gourmandises Berdinoises

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’Association Bergerie de Berdine accueille des personnes en grande difficulté, souvent liée à la consommation de drogues ou d’alcool. Elle les aide à se reconstruire, notamment par l’accès à la culture. Et porte les Estivales de Berdine, un festival d’arts vivants au Les Estivales de Berdine, 2016 © Chris Boyer service du lien social, dont la 5e édition se tient Yann Engelbrecht, des Balkans avec les cette année à Saint-Martin-de-Castillon. Sur musiciens du Conservatoire du Pays d’Apt, une journée complète, la manifestation propose ou via la lecture musicale et dansante d’un un joli programme, malgré l’annulation de roman de Kaddour Hadadi dit HK, Le cœur la conférence La famille zéro déchets... ou à l’outrage. presque. On y écoutera beaucoup de musique : Beaucoup de théâtre également, sous forme en fanfare avec Haut les mains !, classique de brèves de comptoir avec les comédiens de grâce au Trio Emé, les chansons à texte de l’ADAPEI du Var, ou dans le registre classique,

une adaptation des Misérables de Victor Hugo par l’Atelier Arès. La troupe locale de Berdine ne sera pas en reste : elle interprétera une pièce de Jean Cocteau, Le bel indifférent, ainsi que le Tartuffe de Molière, mis en scène par Philippe Combenègre. Au fil de la journée, on profitera de la guinguette avec produits locaux au menu, du stand de la librairie Le petit pois (Manosque), et on pourra participer à une tombola. Clou de la soirée, le célèbre parrain des Estivales, Jean-Louis Trintignant, se livrera à une performance littéraire, sur des textes de Jacques Prévert, Robert Desnos et Boris Vian, et la musique d’Astor Piazzolla. GAËLLE CLOAREC

Les Estivales de Berdine 17 juin Bergerie de Berdine, Saint-Martin-de-Castillon 04 90 75 13 08 berdine.fr


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Jazz tous terrains

2017, année du centenaire du Jazz ?

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l fallait bien une date pour ancrer l’apparition de cette musique libre et sans limites… On l’a trouvée : c’est le 26 février 1917, jour de l’enregistrement du premier disque de jazz de l’histoire. L’Original Dixieland Jazz Band gravait deux titres sur un 78 tours en vinyle : Dixieland Jass Band One-Step et Livery Stable Blues. Mais… Le groupe est constitué de cinq musiciens blancs ! Cette naissance est une fausse naissance, basée sur les critères d’une industrie qui s’ouvrait à d’autres sons que ceux de l’opéra, et engluée dans la ségrégation raciale. Le jazz était né bien avant, dans le Sud américain, à La Nouvelle-Orléans, dans les plantations, dans le cœur et les tripes des esclaves afro-américains qui avaient inventé les rythmes du nouveau siècle en revisitant ceux de leurs ancêtres.

flamme Cent ans plus tard, laissons-nous voguer, en dehors des artifices anniversaires, dans le présent de cette musique qui sait se réinventer et cultiver ses racines, toujours modernes, toujours nourries de son histoire. Le Marseille Jazz des cinq continents célèbre pour sa 18e édition un déferlement musical qui s’est désormais ancré très fort dans la ville, offrant un rayonnement international à notre capitale du Sud, qui se dévoile dans 4 lieux emblématiques pour la programmation des 10 jours du festival, et s’implante dans une multitude de rendez-vous gratuits et étendus sur tout l’été, avec Marseille Heure Jazz, qui investit toute la cité, et au-delà, puisque pour la première fois, le festival résonnera dans les communes de la Métropole (Aubagne, Aix-en-Provence, Salonde-Provence, Trets…). Début d’un mouvement qui s’étendra un peu plus chaque année, dans une volonté d’essaimage affirmé par la capitale départementale de la culture. En 2017, il faut « entretenir la flamme » : Hughes Kieffer, directeur délégué du festival, s’inscrit dans la continuité de la manifestation initiée par Roger Luccioni et Bernard Souroque. Il revendique une « programmation d’excellence » et loue le tout nouveau rapprochement avec Aix-Marseille Université, avec une convention pour la création d’un Big Band, workshop dirigé par le trompettiste Nicolas Folmer. Plus de 130 musiciens sont invités au cours de l’ensemble des manifestations organisées cette année. Des pointures, des incontournables, des nouveaux, des héritiers passeurs de flambeau. Et, parmi tous, l’un des plus grands pianistes

Guillaume Perret © Guillaume Saix

de jazz contemporain, Ahmad Jamal, viendra donner deux concerts en première mondiale à l’Opéra municipal les 12 et 13 juin (voir Zib’ 107). Pour la première fois de sa vie, le légendaire et vénérable (86 ans) interprète a composé un « opus », qu’il a intitulé Marseille. Hommage sera rendu à son propre hommage de la ville.

partout, tout le temps Comme l’an dernier, les premières notes sonneront sur le toit-terrasse de la Friche de la Belle de mai, le 19 juillet, avec un concert gratuit des anglais Sons of Kemet. Ouverture, déjà, puisque le groupe revendique son appartenance à plusieurs champs musicaux. Son leader Shabaka Hutchings mêle influences caribéennes à une éloquence presque féroce et un jazz récompensé en 2013 par le MOBO Awards of Best Jazz Act. Les soirées suivantes se dérouleront au théâtre Silvain. Le Branford Marsalis 4tet accueillera le 20 juillet Kurt Elling en special guest. L’alliance entre une formation typiquement jazz classique et un crooner : un mariage tout en douceur. Le lendemain, le pianiste Roberto

Fonseca, évoqué comme le nouveau pape du jazz cubain, emportera, comme il le fait sur les scènes du monde entier, un public prêt à succomber à son art du live… Des talents dits émergents investiront le MuCEM le 21 juillet. Mais ils sont déjà largement au-dessus du niveau de la mer : Guillaume Perret, habitué du festival, Coup de cœur du Conseil départemental des Bouchesdu-Rhône, évoluant habituellement en solo avec son saxophone ténor, emmènera cette fois un ensemble d’élèves de la classe jazz du Conservatoire à Rayonnement Régional de Marseille et les apprentis de l’IMFP de Salon-de-Provence. Dialogue intime entre Cyril Achard (guitare) et Géraldine Laurent (saxophone alto) ensuite. Sur une autre scène, Piers Faccini viendra distiller ses mélodies folks, accompagné de Simone Prattico (batterie, xylophone midi) et Malik Ziad (mandole). Dans le sillage de Léonard Cohen et Ben Harper. Et Yonathan Avishaï viendra jouer son album Modern Times. La grande scène du Palais Longchamp, lieu de naissance du festival, accueillera les 12 concerts suivants (2 par soir, du 24 au 29


Une création de Aymeric Duchemin > adgraph.fr, inspirée de l’univers de Rémy Donnadieu

juillet). Norah Jones, voix qui a su conquérir un public si nombreux qu’il traverse les frontières de genres et d’habitudes auditives (45 millions de disques vendus dans le monde entier), sans s’aliéner la critique, viendra pour la première fois à Marseille présenter son sixième album Day Breaks. Résolument jazzy et porté par son instrument fétiche, le piano, il rassemble 12 titres originaux et trois reprises, d’Horace Silver, de Duke Ellington et de Neil Young. Du jazz venu de tous les horizons habitera les soirées du parc. Du Vietnam, avec Nguyên Lê, jazzman internationalement connu, et Ngô Hông Quang, interprète de musique traditionnelle vietnamienne, pour un duo riche et novateur. De Serbie, avec Ana Popovic, blueswoman reconnue jusque dans la patrie des légendes du genre. Des États-Unis, bien sûr aussi. Robert Glasper avec Artscience, son dernier album, Kamasi Washington et son « jazz côte ouest », la rencontre entre le mythique bluesman Taj Mahal (« d’abord africain, puis jamaïcain, et enfin américain ») et le guitariste Keb’ Mo’, George Benson (on le présente ? non !), Herbie Hancock (non, lui non plus !)… Imany sera là aussi, qui revient dans sa région natale avec son dernier album, The Wrong Kind of War : elle met sa belle voix rauque au service de l’état malmené du monde… Sans oublier, donc, en amont et en aval des dates du festival, dedans et dehors, en ville ou dans des lieux plus excentrés, before ou after, à Marseille ou ailleurs, les déclinaisons de Marseille Heure Jazz.

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ANNA ZISMAN

Marseille Jazz des cinq continents 19 au 29 juillet Marseille Marseille Heure Jazz jusqu’au 26 août 04 95 09 32 57 marseillejazz.com

Chucho Valdés © Francis Vernhet

Jazz à Fontblanche

C’est la 20e édition du Charlie Jazz Festival qui annonce une programmation alléchante : le 7 juillet avec la fanfare Wonder Brass Band, le Rémi Charmasson Quartet, Shabaka And The Ancestors et Pharoah Sanders Quartet ; le 8, place à Ozma, la Fanfare Big Butt Foundation, Jowee Omicil Quartet et Chucho Valdés Quartet ; et le 9 Pj5, Le Bus Rouge, Naïssam Jalal & Rythms Of Resistance et Dhafer Youssef Quartet. Charlie Jazz Festival 7 au 9 juillet Domaine de Fontblanche, Vitrolles 04 42 79 63 60 charliejazzfestival.com

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38 festivals

Jazze ! Jazzons ! Jazzez ! à découvrir à l’heure de l’apéritif. Un live revenant aux racines du jazz sera offert par Roots ; les cinq musiciens de Groovology produiront une prestation survoltée ; le Shoeshiners band fera danser le lindy hop des anciens bals populaires ; enfin, le quintet Claude Basso et le quartet Sadana Jazz vous feront découvrir leur répertoire dont les influences parcourent l’histoire du jazz. À destination de tous, le festival propose aussi des animations en journée : des déambulations musicales en centre-ville et une scène ouverte tenue par le groupe Jazz in City pour «boeuffer» en toute liberté, peu importe son niveau et son style. Natalia M. King © Bertrand Fèvre

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u 15 au 23 juillet, Jazz à Toulon revient pour une 27e édition. Toujours gratuite et itinérante, la manifestation partira à la rencontre du public sur les places principales de la ville et s’étendra même jusqu’aux plages du Mourillon. Que ce soit à l’heure de l’apéritif ou sous le ciel étoilé d’été, ce festival réussit à marier une programmation locale, nationale et internationale comprenant aussi bien des artistes de renom que de nouveaux talents. Côté têtes d’affiche, huit groupes et artistes partageront la scène en soirée. Rappelant les anciens dancings de La Havane, Richard Bona et le Mandekan Cubano présenteront leur Heritage, unissant la musique populaire et traditionnelle de l’Afrique Occidentale à celle de Cuba ; accompagnée d’un nouveau quintet, la chanteuse et guitariste Natalia M. King exposera son dernier album Bluezzin T’il Dawn où l’émotion de son chant s’accorde à des accents de soul et de blues ; l’harmoniciste Olivier Ker Ourio et son quintet offriront une musique directement inspirée de son enfance passée à La Réunion ; la violoniste et chanteuse Yilian Cañizares exprimera son univers musical riche et hybride, teinté de jazz et de musique afro cubaine, en chantant en espagnol, yoruba et français. À l’affiche également, Yannic Seddiki et son trio donneront à entendre et à voir leur

style mêlant classicisme et modernisme, en faisant découvrir leurs compositions où s’entremêlent jazz, pop et hip-hop ; accompagnée de musiciens de Nashville, Jo Harman, chanteuse de soul and blues aux multiples récompenses, fera découvrir son nouveau répertoire à l’univers soul, blues et pop ; le trompettiste Roy Hargrove et son quintet reviendront au jazz acoustique post-bop teinté de groove ; enfin, le festival recevra un trio inédit rassemblant trois grandes personnalités du jazz : Jean-Luc Ponty, Biréli Lagrène et Kyle Eastwood. Côté nouveaux talents, cinq groupes seront

FAUSTINE AUPAIX

Jazz à Toulon 15 au 23 juillet Divers lieux, Toulon 04 94 09 71 00 jazzatoulon.com

Une étoile du jazz à Saint-Rémy Manu Dibango © Edmond Sadaka

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epuis dix ans, Saint-Rémyde-Provence est le point de rassemblement de tous les curieux et amateurs de jazz, grâce à son festival automnal Jazz à Saint Rémy. Ayant pour ambition de faire découvrir au plus grand nombre toutes les facettes de ce genre musical, les organisateurs s’attachent à élaborer une programmation aussi pointue qu’accessible. Sur son site, l’association explique que le festival a pour vocation à « traduire l’esprit, le swing du jazz, tout en s’ouvrant aux musiques du monde ». En prélude de la nouvelle édition organisée du 13 au 16 septembre, un concert exceptionnel aura lieu le 15 juillet dans le cadre

de la soirée Jazz sous les Etoiles. Et cette année, direction l’Afrique, en compagnie du septet entraînant et festif l’Africadelik band emmené par la légende du jazz Manu Dibango. Se produisant sur scène depuis plus de cinquante ans et connu du grand public grâce à ses différentes collaborations (Serge

Gainsbourg, Gilbert Bécaud, Janis Joplin, Herbie Hancock...), l’éclectique saxophoniste offre un jazz métissé, nourri d’afrobeat, de funk et de groove. À l’occasion de cette nuit estivale, Manu Dibango proposera, en compagnie de cette équipe de quatre musiciens et deux chanteuses, une orchestration plus épurée de son répertoire habituel ; le groove sera à l’honneur. Et puis, pour joindre l’agréable à l’agréable, un apéro-swing-dînatoire s’ouvrira dès 19h30 sur le parvis de l’Alpilium et restera ouvert tout au long de la soirée. F.A.

Jazz sous les étoiles 15 juillet Alpilium, Saint-Rémy-de-Provence 06 83 47 50 65 jazzasaintremy.fr


saison

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40 festivals

Marsatac voit rouge… Et ça déménage

Ç

a devait les démanger. Le plus nomade des festivals phocéens change une nouvelle fois d’écrin. Et comme si ça ne suffisait pas, Marsatac change aussi de dates. Fini ce fameux dernier week-end de septembre qui faisait passer la pilule de la rentrée en prolongeant l’été. Terminé aussi l’ambiance postindustrielle de la Friche la Belle de Mai. Espérons que la froideur des halls du parc Chanot, cumulée au choix d’un des week-ends les plus chargés de la saison en événements culturels, ne fera pas vaciller le vaisseau. Faisons confiance à une équipe qui fait du renouvellement perpétuel son moteur et de la prise de risque son adrénaline. Chacune des trois scènes et les esplanades alentours confient leur habillage à un collectif de plasticiens. Chaque année, le festival se pare d’une identité visuelle qu’il décline dans toute sa communication. En 2017, Marsatac a décidé de marquer les esprits au fer rouge. Quant à la programmation, elle continue de reposer sur les deux dominantes traditionnelles

Nouveau lieu, nouvelles dates, le festival de musiques actuelles, tendance hip-hop et techno, ne cesse de se réinventer

de la manifestation, le hip-hop et les musiques électroniques. Et promet d’être à la hauteur de l’événement de cette édition : la reformation exclusive d’un mythe, la Fonky Family, entrée dans l’histoire du festival en essuyant les plâtres de la première cuvée, en 1999. Les Marseillais auront affaire à deux grosses pointures américaines : les indétrônables House of Pain, auteurs de l’incontournable Jump around De La Soul © X-D.R et De La Soul, accompagnés d’un live band. Plus sombre, le rap des Ecossais Young Fathers n’en est pas moins dansant. Celui de Nova Twins se frotte au rock, quand AllttA le fait fricoter avec l’électro pour finir avec un zeste de punk chez les Sud-Africains de Die Antwoord. Nouveaux talents de la scène marseillaise, les Guirri Mafia sont à l’image de leur ville, inévitablement intrigants.

Deux autres curiosités du genre à écouter : l’Estonien Tommy Cash et les effrayants $uicideboy$. Citons enfin le flow acerbe et percutant du compatriote Vald et le rap féministe de Princess Nokia. Douze ans après leur premier passage, le trio Birdy Nam Nam revient encore plus fédérateur. La prestation live du duo belge

Un été en Friche Sur le toit ou sur le sol, en musique, en danse ou sur grand écran, l’été s’annonce réjouissant à la Friche de la Belle-de-Mai

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remier grand rendez-vous de la belle saison, le Festival de Marseille y prendra ses quartiers du 15 au 18 juin (lire p 24-25). Sous l’intitulé Ouvertures !, ces quatre jours seront consacrés à la danse, au théâtre et aux performances artistiques, avec quelques perles au programme. Trois spectacles présentés pour la première fois en France seront notamment à l’affiche : les 15, 16 et 17 juin, Rito de Primavera, du chorégraphe chilien Jose Vidal, rassemble 40 danseurs sur scène et se vit comme une véritable fête à laquelle se mêlent le public et les interprètes ; Sanctuary, qui se jouera jusqu’au 21 juin, est un parcours théâtral conçu par le metteur en scène sud-africain Brett Bailey, évoquant, à

Sur le Toit-terrasse de la Friche, 2016 © Caroline Dutrey

partir de témoignages, la situation des migrants en Europe ; les 17 et 18 juin, Water between three hands, par le Dance On Ensemble, est une chorégraphie signée Rabih Mroué, qui porte un message simple et universel : « la danse n’a pas d’âge ». À noter également que le Festival fera une incursion sur le toit-terrasse, en lien avec la programmation de On Air. Deux ateliers de danse, gratuits et ouverts

à tous, auront lieu, le 16 avec Hippolyte Bohou et le 17 avec Jose Vidal. Ces deux soirs-là, les sessions platines seront assurées par Ntone Edjabe et sa fusion africaine (le 16) et par le DJ chilien El Dorado (le 17). Quand le Festival aura quitté la Friche (mais il se poursuivra ailleurs à Marseille jusqu’au 9 juillet), les soirées On Air occuperont le toit-terrasse chaque week-end jusqu’à fin août. Avec une incursion en semaine, le 21 juin, pour la Fête de la Musique et trois DJ Sets au programme : la pop électro d’Agar Agar, le son techno et funk de Cracki Soundsystem et celui house et jazz de D-Mood Records. Le 24 juin, une programmation du Festival du Jazz des


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Les nuits de juillet Soulwax, accompagné de trois batteries, devrait être redoutable. Comme ces derniers, Nicolas Jaar vient présenter son nouvel album, Electronica, encensé par la critique. Moment de grâce attendu. Conceptuelle et provocatrice, la techno d’Actress peut en devenir inquiétante, à l’instar de celle de Powell qui est un style à elle toute seule. À ne pas manquer, La Meute qui vous fera peut-être découvrir que cette musique peut aussi être interprétée par une fanfare allemande. Le festival convie également le facétieux porte-drapeau de la french touch Mr Oizo. Rencontre choc en prévision entre le vétéran des transes technoïdes Humantronic et Margot Maccario, jeune activiste de la scène locale. Difficile d’évoquer tous les noms de cette 19e édition qui semble vouloir rester dans les mémoires. Citons toutefois le classieux Michael Mayer, le maître Dubfire, le sombre Little Simz ou encore l’électropop désuète de Whomadewho. THOMAS DALICANTE

Marsatac 23 & 24 juin Parc Chanot, Marseille marsatac.com

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réées en 1992, Les Nuits d’Istres fêtent cette année leur 25e anniversaire. Ayant un goût marqué pour l’éclectisme, le festival accueillera quatre artistes aux univers musicaux bien différents. Rendez-vous est donné les 7, 8 et 10 juillet dans l’intime et historique Parc du Pavillon de Grignan. Roger Hodgson ouvrira le bal le 7 juillet. Co-fondateur de Supertramp, il a écrit et arrangé une grande partie des standards, tels que School, qui firent la renommée internationale du groupe. En le quittant en 1983, le multi-instrumentiste se lance dans une carrière solo dont les débuts sont couronnés de succès. Absent de la scène depuis plusieurs années, il viendra jouer les succès de Supertramp ainsi que ses propres chansons. Déjà venue faire une escale au Nuits en 1996, la chanteuse et pianiste Véronique Sanson reviendra le 8 juillet pour présenter son album Dignes, dingues, donc... parcourant les rives du jazz, de la pop et de la bossa nova. La soirée du 10 juillet sera composée de deux concerts : les allemands de Milky Chance dévoileront leur deuxième album Blossom, dans lequel le trio joue une musique folk alternative nourrie de pop et d’électro où l’on peut entendre quelques notes de reggae. Plus fouillé que le précédent, cet opus conserve un côté « fait maison » qui leur est cher ; Morcheeba prendra ensuite le relais, et plus exactement la chanteuse Skye Edwards et le guitariste Ross Godfrey, formant nouvellement le duo Skye/Ross. Revenu aux couleurs musicales de Big Calm (1998), le groupe offre des sons mêlant downtempo, trip hop, rhythm and blues et pop. Les britanniques viendront ici interpréter plusieurs titres de l’album duo, mais aussi les plus grands tubes de Morcheeba : Otherwise, Rome Wasn’t Built in a Day, Blood Like Lemonade, etc. FAUSTINE AUPAIX

Cinq Continents (lire p 36-37) s’invitera sur le toit, avec le collectif What The Funk. Le 1er juillet, place au Festival Africa Fête, à l’affiche également en divers lieux de Marseille du 30 juin au 8 juillet (voir p 44). Le Village associatif s’installera pour la journée à la Friche, avec concerts (Amnomad), spectacles (Guinée Akrobat’s) ou stage de danse mandingue, avec Saly Diédhiou. Le soir, retour sur le toit-terrasse avec le son fusion trad-électo-urbain de Balani Show Business, suivi du DJ set world et cosmopop de Big Buddha. À cocher encore sur les agendas, tous les dimanches de juillet et août, toujours sur le toit-terrasse, Belle & Toile, le rendez-vous cinéma en plein ciel, dont la programmation, concoctée par Le Gyptis, est en cours de finalisation. Avec une thématique qui reste mystérieuse : Derrière la porte... Notons enfin, au rayon gourmet, le Grand Marché, le 3 juillet. Une cinquantaine d’agriculteurs locaux proposeront leurs productions, entourés de multiples animations, dont un plateau radio animé par Radio Grenouille sur la thématique du bien manger. En Friche certes, mais sûrement pas à l’abandon !

Les Nuits d’Istres 7, 8 et 10 juillet Pavillon de Grignan, Istres 04 42 81 76 00 istres.fr

JAN-CYRIL SALEMI

Le Bel été de La Friche juin, juillet, août La Friche, Marseille 04 95 04 95 95 lafriche.org

Véronique Sanson © Stéphane de Bourgies


42 festivals

Mondialité musicale

«

Comment consentir à l’autre, sans renoncer à soi ? » À la question d’Edouard Glissant, la directrice des Suds à Arles, Marie-José Justamond, répond par un festival et une programmation minutieusement construits. Et qui, comme y appelle l’auteur martiniquais, mettent à l’honneur « des cultures en relation, sans peur ». « Toi, qui que tu sois, Je te suis bien plus proche qu’étranger. » C’est ce vers de la poétesse Andrée Chedid qui a été choisi pour illustrer

La 22e édition du festival Les Suds à Arles se déroulera du 10 au 16 juillet, avec entre autres M et Calypso Rose

la première grande soirée au théâtre antique dont le personnage central n’est autre que son petit-fils, le très populaire - M -, qui présentera son nouveau projet, Lamomali. L’intérêt de Matthieu Chedid pour le continent africain n’est pas une nouveauté, mais il se concrétise avec ce spectacle aux côtés de trois artistes maliens : le BCUC © Laura McCullagh griot et joueur de kora Toumani Diabaté, son fils Sidili et la chanteuse Fatoumata Diawara. En première partie, Alsarah & the Nubatones, originaires du Soudan, proposeront une synthèse sonore entre Afrique noire et du Nord. Le lendemain, le Nigérien Bombino, nouveau porte-drapeau du blues du désert, précèdera la doyenne du calypso primée aux Victoires de la musique, Calypso Rose. Enfin, l’espagnole Sílvia Pérez Cruz revient quatre ans après son premier passage à Arles, cette fois accompagnée d’un

quintet à cordes. Elle partagera l’affiche avec le chanteur soufi Nourredine Khourchid et les derviches tourneurs de Damas. Mais on le sait, aux Suds se limiter aux têtes d’affiche revient à passer à côté de l’essentiel du festival : les artistes en découverte, ceux plus pointus ou plus rares, d’autres encore qui bousculent, défrichent et décloisonnent. C’est le cas de Niño de Elche qui pulvérise le flamenco à coups d’onomatopées, de poésies contemporaines, de krautrock. Le bouillonnement musical en Corée du Sud irrigue de nombreux festivals occidentaux. Cette année, Arles ne fera pas exception. Dans la lignée de Jambinai, Black String puise dans la musique traditionnelle pour créer un post-rock onirique. Leur compatriote Youn Sun Nah est devenue un phénomène international. Sa voix exceptionnelle explore aussi bien le jazz, la soul, le scat que sa propre culture. En coproduction avec le festival d’art lyrique d’Aixen-Provence, la création du oudiste Thimios Atzakas, Udopia -dont ce sera la première date en France- est un vagabondage entre les musiques modale et d’improvisation de Grèce

Des Nuits voyageuses et généreuses La 24e édition des Nuits Métis a lieu du 21 au 24 juin à Miramas. Parmi les invités, Bonga et Chinese Man. Et c’est toujours gratuit

L

es Nuits Métis durent bien plus que le temps d’un festival. C’est toute l’année que l’association intervient auprès des publics, en lien avec les acteurs du territoire. Ateliers de pratiques artistiques, rencontres avec les artistes programmés, parcours éducatifs, projets culturels participatifs... Toutes les actions menées visent à promouvoir mixité sociale et diversité culturelle, pour favoriser le lien social comme l’accès à la culture. À l’arrivée du solstice, toutes les énergies se

Chinese Man © Leo Berne

retrouvent, décuplées, pour faire vivre l’un des événements les plus attachants de l’été musical. Après une après-midi dédiée aux minots -celle du mercredi 21 juin-, les trois soirées suivantes sont consacrées aux sonorités mondiales, talents régionaux compris. À commencer par Radio Babel Marseille. Le quintette vocal jongle

avec les langues et les rythmes. S’appuyant sur les poèmes marins de Louis Brauquier, Gil Aniorte Paz et ses complices inventent une polyphonie portuaire, qui s’accommode aussi bien au beat box qu’aux mélodies latines ou arabes. Pour ne pas s’éloigner de la Méditerranée, écoutons Lalala Napoli, porté par François Castiello, l’accordéoniste de Bratsch. Une incursion dans les artères bouillonnantes de Naples, emplies de gouaille populaire, de tarentelles intrépides et de transes volcaniques. Curiosité et instant poétique avec Le piano du lac, un spectacle mêlant cirque, musique classique et envolées oniriques. Les musiques


et des Balkans. Autre odyssée, au Maghreb cette fois, avec Amel Brahim-Djelloul et l’Ensemble Amedyez qui mêle une soprano et ensemble arabo-andalou pour revisiter nouba algéroise, maalouf tunisien, traditionnels kabyles ou séfarades. Le cadre post-industriel du parc des anciens ateliers SNCF continueront d’accueillir les nuits des forges à la programmation à la fois très actuelle et novatrice. À retenir, la révélation sud-africaine BCUC et l’unique date en France de The Ex, pionniers néerlandais de l’underground. Enfin, deux événements particuliers tels que sait les concocter le festival arlésien sont à noter : l’escale de La caravane culturelle syrienne avec un concert de Khaled et Mohanad Al Jaramani inspiré par la musique classique d’Alep et la première date en Europe d’Orpheus XXI, projet réunissant des artistes réfugiés autour du violiste Jordi Savall. Car y a-t-il meilleure définition non pas des mais de la musique du monde que celle proposée par les Suds : « la musique que fait et qui fait notre monde aujourd’hui ». THOMAS DALICANTE

04 90 96 06 27

Les Suds 10 au 16 juillet Arles suds-arles.com

voyageuses se déclineront tout au long du festival avec Zoulouzbek Band pour danser sur de la chanson française festive et métissée, avec Tin’fa pour dialoguer et s’aimer par-delà la Méditerranée, ou encore avec Ashkabad, à la croisée des chemins entre influences jamaïcaines et Bass Music. Mais nous ne doutons pas que c’est le doublé Chinese Man et Bonga qui feront se déplacer les foules. Les premiers sont passés maîtres dans le maniement du hip hop, du scratch et du breakbeat, bâtissant leur empire à coups de samples facétieux, d’atmosphères groovies et d’évocations orientales savamment inoculées dans les black-musics. Le second a été élevé au titre de légende de la musique afro-lusophone. Interprète originel du fameux Sodade repris par Cesaria Evora, cet angolais aux accents mélancoliques dans sa voix éraillée élabore depuis 35 ans une alchimie entre verve contestataire et musicalité ciselée aux semba et blues luso-africain. T.D.

Nuits Métis 21 au 24 juin Plan d’eau de Saint Suspi, Miramas 04 90 58 98 09 festival.nuitsmetis.org


44 festivals

Afrique en fête, Afrique en tête

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arseille, ville-monde, a en son cœur l’Afrique. Toute l’Afrique. Cette présence, cette imprégnation culmine à l’arrivée de l’été avec Africa Fête. Un festival crée en 2005 par Mamadou Kondé, disparu il y a dix ans et auquel un hommage sera rendu à l’occasion cette 13e édition. La grande épopée des musiques africaines dans le monde est à l’honneur d’une programmation de prestige. Se produisent des artistes internationaux comme Manu Dibango, Ray Lema, les frères Touré Kunda et Cheick Tidiane Seck, ces quatre monuments sont réunis pour une longue et chaude soirée au Dock des Suds, le 7 juillet. La joyeuse bande de l’Afrique enchantée, bien connue des auditeurs de France Inter, y donne également son bal qui fait depuis quelques années le bonheur de nombreux festivals. Autre célébrité, le Guinéen Sékouba Bambino se produira en ouverture, le 30 juin. Pour l’anecdote, il est un rescapé de l’attaque terroriste d’un grand hôtel de Bamako en novembre 2015. La soirée de clôture, le 8 juillet sera, à n’en pas douter, un temps fort de la manifestation. Elle réunira à la fois le Festival de Marseille (lire p 24-25), dont l’ouverture à la création africaine continue de se confirmer, et le Festival au Désert, basé dans la région de Tombouctou mais devenu

Amnomad © X-D.R.

nomade en raison de la situation politique au Mali. Un beau partenariat pour une affiche de légende avec Ali Farka Touré Band, formation qui fait perdurer le nom et la musique de cette figure incontournable, décédée en 2006. Terakaft et son blues touareg ainsi

que Justin Adams, guitariste anglais de rock qui s’est laissé séduire par la musique africaine, viennent grossir la caravane. Le festival offre aussi l’opportunité à des artistes locaux de rencontrer un plus large public. Cette année, PéPé Oleka, MaClick,

Résistance berbère

«

Il n’y a pas de sous-langue autant qu’il n’y a pas de sous-homme. » Ces mots sont du chanteur occitan Claude Sicre, fondateur du Forum des langues à Toulouse. De l’occitan au berbère, il n’y a qu’un pas, celui du combat contre le centralisme qui écrase la diversité. Parfois dans la violence. Car qui

dit langue dit culture, dit citoyenneté et, au final, dit égalité. C’est en filigrane le message porté par le festival Tamazgha, dont l’ambition passe par la valorisation du patrimoine musical et culturel nord-africain, en particulier berbère. Entre mémoire des traditions et métissages actuels, Tamazgha réuEzza © pixbynot nit valeurs montantes et artistes confirmés, transcendant frontières et générations. Le 23 juin, Azal Belkadi et Ezza se partagent l’affiche. Le premier est artiste peintre et chanteur lyrique en même temps. Issu d’une histoire de souffrance, exilé de sa terre kabyle à Paris, il chante les très anciens chants

avec une force et dans une communion quasiment mystique, passant du grave au festif, des montagnes de Kabylie au pays amazigh dans les Aurès. Les seconds invités de la soirée ont grandi en écoutant le blues du désert de Tinariwen. Se détachant de ses illustres prédécesseurs, Ezza amène la musique touareg hors des sentiers convenus, mêlant sonorités rock, pulse africaine, rythmiques transes et groove implacable. Originaire du Niger, Omar Adam, voix principale du trio, chante la résistance autant que l’espoir. Le lendemain, Lounis Aït Menguellet, l’un des artistes de culture berbère les plus populaires, célèbre son demi-siècle de poésie en chansons. Auteur-compositeur, il est à l’origine de plus de 200 chansons qu’il interprète d’une voix chaude. Déjà à l’honneur du festival pour ses 40 ans de carrière, il perpétue la tradition orale des montagnes kabyles à la manière d’un troubadour. Parfois surnommé


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La Moline fait son festival Amnomad sont les preuves vivantes du dynamisme des musiques d’inspiration africaine dans notre quotidien. Mais bien au-delà de la musique, Africa Fête propose une immersion dans la société et la culture du continent avec du cinéma, des conférences, de la danse, des ateliers de pratiques artistiques, un village associatif. Le cycle de conférence, installé au théâtre des Bernardines, débute dès le 26 juin et reçoit de grands noms de la pensée critique africaine en mouvement. Car si l’Afrique danse, elle n’en oublie pas de penser et même de repenser le monde par la voix et l’esprit d’intellectuels tels que Achille Mbembe et Felwine Sarr, invités à Marseille, en partenariat avec le Festival d’Avignon. Sans oublier un éclairage sur l’héritage musical africain dans la black music américaine mené par Martin Grizzell. Africa Fête, c’est aussi l’occasion de pousser les portes de lieux alternatifs de la diffusion culturelle à Marseille, de l’Embobineuse au Videodrome en passant par Dar Lamifa. La diversité, il n’y a que ça de vrai. THOMAS DALICANTE

Africa Fête 30 juin au 8 juillet Divers lieux, Marseille africafete.com

« l’olivier kabyle », il est devenu le porte-voix d’une culture bâillonnée, dont le combat a pris une dimension universelle. Dans sa langue maternelle, il défend la reconnaissance et le respect de la différence culturelle, en tant que droit et devoir à l’égard de l’humanité. Dénonçant l’oppression, la violence ou la haine d’un frère, Menguellet met autant de force dans son verbe pour évoquer l’amour, la liberté, l’altérité, la complexité des rapports humains. Toujours avec humilité. S’il réfute le titre d’artiste engagé, il commence par accepter celui de poète. Surtout quand il lui fut attribué par une référence en la matière, le grand Kateb Yacine en personne.

Dos Amigos & co quartet © X-D.R.

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ix bougies déjà pour le Festival de la Moline, et ce cap de la décennie sera dignement fêté ! L’édition 2017 s’annonce de haute qualité, éclectique, conviviale et bien sûr gratuite. Dans l’écrin de verdure du parc de Montolivet, six soirées auront lieu, chacune suivant une thématique. Ouverture classique, le 30 juin, avec les vingt violoncellistes du Rondo di Cello, et les choristes de l’ensemble vocal Philharmonia. Double ambiance le lendemain : sud-américaine d’abord avec Dos Amigos & Co, la rencontre de Joselo Gonzalez, Chilien, et Luis Pousa, Argentin, auxquels se greffent quelques compagnons de route qui nous embarquent sur les rives de la musique latine, en samba ou cumbia ; rythmes flamencos ensuite, avec Gitano Family, la formation de Juan Romero, qui allie sur scène la musique et la danse. Le 2 juillet, nouveau détour classique et même sacré : le répertoire de l’ensemble vocal Les Voix de Phocée est en effet essentiellement composé de chants religieux. L’Association des Interprètes Lyriques Marseille-Provence prendra la suite avec de grands airs d’opéra, puis le Divin’ Gospel Music conclura cette soirée consacrée aux voix. À noter également, deux dates en connexion avec le Festival Jazz des Cinq Continents (lire p24-25) : le 3 juillet, en première partie, Les Impatients du Jazz, groupe formé par des personnels et des patients de l’hôpital Valvert occuperont la scène de la Moline ; puis, ce sera l’un des événements du festival, avec la venue de la diva du R’n’B à la française, China Moses. Soirée à thème électro funk le lendemain, toujours en lien avec le FJ5C : le groove de I Mean Funk Power ouvrira la session, suivi de l’autre événement de la programmation, le concert d’Electro Deluxe et sa rythmique funky envoûtante. Clôture des festivités le 5 juillet, avec la soirée de la mairie des 11-12. À l’affiche de ce dernier rendez-vous, un show hommage au film mythique The Blues Brothers. Ils seront huit artistes à interpréter les rôles pour une reprise live du film qui s’annonce vibrante !

T.D.

Festival Tamazgha 23 et 24 juin Théâtre de la Sucrière, Marseille 06 95 51 04 72 festivaltamazgha.org

J.C.S.

04 91 14 62 39

Festival de La Moline 30 juin au 5 juillet Marseille marseillemairie11-12.fr


46 festivals

Un été en Guinguette

Arles en partage

C

C

’est désormais une tradition qui se perpétue depuis des années. Chaque été, l’Espace Culturel Busserine organise sa Guinguette dans les 13e et 14e arrondissements de Marseille. L’élection en 2014 d’un maire Front national, Battement de feu, Cie LunAtypiK © X-D.R Stéphane Ravier, n’y a rien changé. Malgré toutes les entraves et pressions subies, l’équipe de l’ECB tient bon et le festival aura bien lieu. Gratuit, comme toujours et avec une programmation variée et de grande qualité. Notons pêle-mêle, le 5 juillet, cité les Olives, le Baleti Social Club par le mythique groupe Quartiers Nord. Le 10 à Fontvert, le 11 aux Flamants et le 18 à la cité SNCF de St Barthélémy, le Chant traditionnel Gnawa-Saharien des Danseurs du Sud. Le 18, également à la cité SNCF, Battement de Feu, un spectacle de danse enflammé par la compagnie LunAtypiK. À l’affiche encore, le Théâtre Chignolo, le cirque Moreno del Patrocinio, le flamenco de la Gitano Family ou le ciné plein-air de l’association Tilt. Et final en beauté le 20 avec le concert scène ouverte hip-hop animé par DJ Djel (Fonky Family) et parrainé par Imothep (IAM). J.C.S.

onvivència. Le mot n’existe pas en français, mais ils se comprend. « Art du partage et partage de l’art », résume le sous-titre sur l’affiche du festival arlésien qui porte ce nom. Pendant une semaine, ces notions de vivre ensemble, d’échange et de partage seront le cœur de cet événement. Deux lieux d’Arles accueilleront la Gaspar Claus et Marion Cousin © M. Lefrebvre manifestation : l’espace Léon Blum, pour l’essentiel de la programmation, et le quartier Griffeuille. Au menu, spectacles et concerts, bien sûr, mais aussi toutes sortes d’animations, comme les Feuillets d’écriture, qui se tiendront sur les deux sites, avec bloc-notes à disposition pour la libre expression. Ou encore le Marché-Village des initiatives et alternatives durables, qui rassemblera une trentaine d’acteurs locaux engagés sur des démarches écologiques et citoyennes. Quant aux spectacles, il y en aura un par soir. À retenir notamment, le Balèti Social Club des légendaires rockers marseillais Quartiers Nord, le 10 juillet, Zaragraf, le cabaret tzigane le 11 ou la voix d’oc et d’ailleurs de Cylcée, le 14. J.C.S.

La Guinguette 5 au 20 juillet dans les 13e et 14e arrondissements de Marseille Espace Culturel Busserine, Marseille 04 91 58 09 27 mairie-marseille1314.com

Convivència 10 au 15 juillet Divers lieux, Arles convivencia.over-blog.net

Sous le soleil électrique Rocky © René Habermacher

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es grandes vacances n’auront pas encore commencé lorsque les 30 juin et 1er juillet le Vitrolles SUN Festival reprendra ses quartiers d’été au Domaine de Fontblanche. Pour cette 4e édition, les organisateurs proposent une programmation toujours aussi festive et éclectique. Quatre concerts sont prévus le vendredi soir : le trio déjanté des Naïve New Beaters ouvrira le bal avec sa musique mélangeant pop, électro, disco, rock et hip-hop ; suivra le duo formé par LeYan et Skoob le Roi, avec son DJ set hip-hop à quatre platines ; le groupe lillois Rocky, coup de cœur de l’équipe cette année, viendra ensuite présenter son premier album Soft Machines mixant pop nineties, dance eighties et compositions gospel et africaines ; pour finir, Soom T réussira le pari de faire danser sur des textes exprimant l’égalité des sexes et des classes en mixant des sons reggae, hip-hop, folk et dub. Le samedi soir ne s’arrêtera qu’au petit jour. Premier arrivé, le MC Biga Ranx, inspiré du rub-a-dub venu de Jamaïque, mélangera la mélodie lancinante du reggae au flow rapide

band. Enfin, la jamaïcaine Jah9, issue de la nouvelle scène reggae, viendra envoûter le public avec sa musique jazzy et sa voix douce et puissante. En parallèle, une seconde scène accueillera les DJs du Soleil qui auront pour mission de faire danser (et de tenir le choc) tout au long de la nuit. Une fois le calme revenu, une journée familiale, Le SUN Day, sera organisée le 4 juillet en partenariat avec le Festi’Pitchou (voir Zib’ 107). De nombreuses activités parents-enfants sont programmées : jeux, éveil au théâtre et à la danse, chants traduits en langue des signes, ateliers d’expression corporelle et de jardinage, Do It Yourself... Alangui à l’ombre des platanes ou en train de danser au cœur de la foule, ce festival à taille humaine sera une très bonne manière d’entrer dans l’été. FAUTINE AUPAIX

du hip-hop. Parrain du festival, Papet J, issu de Massilia Sound System, présentera ensuite son dernier album Raggamuffin Vagabond, accompagné par les musiciens reggae du 149

Vitrolles SUN Festival 30 juin, 1er et 4 juillet Domaine de Fontblanche, Vitrolles 09 51 00 65 43 www.vitrolles-sunfestival.com


Chinese Man I Bonga The Sunvizors I Lalala Napoli I ASHKABAD Radio Babel Marseille I Caravane NamastÊ Le piano du Lac I Zoulouzbek Band I Wilko & NDY Tin'Fa I A Spurious Tale I Le Califourchon La Batucada de la famille GÉANT I la Cie Caramantran mercredi 21 juin : le mercredi des minots

infos : 04 90 58 98 09 / nuitsmetis.org / miramas.org


48 festivals

Un caravansérail de talents marseillais

Fado Rebetiko © Jo Vervoort

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ncore un nouveau festival à Marseille ? Oui et on s’en réjouit. À double titre. D’abord parce qu’il est le fruit d’une réflexion collective et d’un travail coopératif entre plusieurs structures et acteurs marseillais. Ensuite parce que sa programmation valorise

la diversité et la qualité de la scène locale et régionale dans le registre des musiques du monde. Sans oublier le cadre choisi pour écouter les artistes. Ce nouveau rendez-vous se nomme Caravansérail, a lieu au théâtre Silvain et nous le devons à la Cité de la

musique, la Maison du chant, Arts et musiques et MCE productions/L’éolienne. Les organisateurs proposent « deux soirées durant lesquelles se croisent les influences, les sonorités et les héritages d’artistes pleinement acteurs d’une époque en mouvement et d’un temps qui, plus que jamais, nous invite au rassemblement ». L’accueil est assuré par Alerte rouge, la bande de cornemuses d’Aix-en-Provence et Marseille, dirigée par Eric Montbel. Au programme, bourrées, marches, scottishs, mazurkas, farandoles, musique carnavalesque. La Méditerranée est le terrain de jeu du reste de la soirée. Avec tout d’abord Enco de Botte. Le quatuor polyphonique revisite depuis une dizaine d’années le répertoire traditionnel corse et occitan en le colorant au gré des rencontres et complicités musicales. Leurs chants voyageurs, du Brésil à l’Orient, sont interprétés avec une finesse vocale dont toute l’élégance peut s’écouter dans l’album Castèls en l’aire. Il fallait y penser, mais au fond quoi de plus logique que de croiser les deux genres musicaux de Méditerranée, populaires et mélancoliques, que sont le fado et le rebetiko. L’idée vient de la chanteuse grecque Kalliroi Raouzeou qui, pour donner corps à ce projet, est accompagnée de musiciens reconnus dans les cercles de jazz manouche et autres

Entre cordes et frettes

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rance, Russie, Brésil, le Festival International de Guitare de Lambesc nous a habitués depuis sa fondation à parcourir le monde avec les plus grands artistes. La 17e édition promet une semaine enchanteresse, dans un nouveau lieu, le parc Bertoglio de Lambesc, grâce à l’efficace équipe de bénévoles qui, chaque année, seconde Charles Balduzzi, Directeur du Festival et Président de l’association AGUIRA. La direction artistique est assurée de nouveau par la compositrice et interprète Valérie Duchâteau qui fut repérée par Alexandre Lagoya alors qu’elle n’avait que onze ans. Depuis, une carrière jalonnée de prix la mène à Nashville mais aussi au poste de guitare solo de l’Opéra de Paris. Elle ouvre le Festival aux tout jeunes talents qui nous éblouiront par leur virtuosité, aux master classes dirigées cette année par Judicaël Perroy, à un salon de lutherie qui rassemble parmi les meilleurs luthiers de la région, Sylvain Balestrieri, Marc Bodula,

Valérie Duchâteau © X-D.R

Renaud Galabert, Rémi Larson, Olivier Pozzo, Gaëlle Röffler. Chaque soirée s’articule en deux temps de concert, permettant d’écouter deux formations. Est-il besoin de citer tous les prix des participants ! La fine fleur de la guitare se donne rendez-vous à Lambesc. On écoutera ainsi Johan Smith qui

vient d’être nommé Révélation Guitare Classique 2017 par le magazine Guitare classique. Ne le croyez pas si sage, il est aussi compositeur et interprète du groupe suisse de black/ death métal Stortregn. Autre Révélation Guitare Classique (2016), Antoine Boyer puise son inspiration dans le jazz tsigane pour lequel il a déjà des enregistrements remarqués et étudie aussi la guitare classique. Judicaël Perroy a déjà plusieurs CD à son actif, notamment une transcription de Bach ou encore des œuvres du compositeur mexicain Manuel Maria Ponce. On l’entendra en soliste mais aussi dans le duo Antipode, car ils viennent de deux mondes fort éloignés, qu’il a créé avec Natalia Lipnitskaya, grande soliste, elle aussi, saluée pour sa musicalité et l’intelligence


49 musiques tsigane et des Balkans. Quand trois des plus bouillonnantes cités de l’Europe méridionale -Marseille, Athènes, Lisbonne– se retrouvent sur un même plateau, le cocktail ne peut décevoir. Pour terminer la première soirée, Caravansérail propose d’éveiller notre latinité, tendance afro-cubaine avec Chévéréfusion sous la direction de Ruben Paz. Salsa, rumba, conga, timba, cha-cha-cha… Classique mais efficace. Le lendemain le Trio Crosswind nous transporte vers des rythmes plus occidentaux, ancrés dans les traditions musicales de chacune des rives de la Manche et de l’Atlantique : cajun, bluegrass, swing, country-blues, folk. Allergiques aux uilleann pipes (cornemuses irlandaises) et sonorités celtiques s’abstenir. Comment prétendre donner à voir l’éventail des artistes marseillais du monde sans évoquer le flamenco ? C’est Tchoune Tchanelas, un de ses plus respectés représentants, qui s’y colle avec un tablao mêlant cante puro et rumba flamenca. Retour en Amérique du Sud, mais version jazz, avec le spectacle Quantos queridos, présenté par le Trio Simon Bolzinger et le conteur Victor Cova Correa lequel déclame des chants ancestraux traduits en français. Dernier rendez-vous avec la Compagnie Rassegna de Bruno Allary qui fermera cette première édition par un tour du patrimoine des musiques populaires de Méditerranée. La boucle est bouclée. THOMAS DALICANTE

Festival Caravanserail 16 et 17 juin Théâtre Silvain, Marseille festival-caravanserail.com

de son jeu. Professeur au CNR de Marseille, Romain Gratien s’attache à la composition d’un nouveau répertoire pour la guitare, avec des œuvres de Daniel Tosi, François Jeanneau, Jean-Yves Bosseur, François Rossé, Arturo Rodas… Le duo Franco-Brésilien des deux guitaristes classiques Frédéric Bernard et Pauliste Giacomo Bartoloni a été fondé en 1993. Complicité qui a mené à plusieurs CD, des conférences... Les deux musiciens ont un insatiable appétit pour les découvertes musicales, et savent transmettre leur art avec une belle humanité. Pour le concert de clôture, les artistes du Festival 2017 auxquels se joindront Murielle Geoffroy, Arnaud Sans et ses élèves iront avec émotion « sur les pas de Roland Dyens» (disparu le 29 octobre 2016), le grand guitariste, baptisé par la presse espagnole « El mago de la guitarra » (le magicien de la guitare), que le festival a eu le privilège d’accueillir l’an dernier…

Le flamenco pour art de vivre

Patricia Guerrero, Catedral © Óscar Romero

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our la troisième année consécutive, Aubagne se met à l’heure andalouse. Le festival Les Nuits Flamencas revient les 8 et 9 juillet au Parc Jean Moulin, avec toujours la même ambition : faire découvrir à un large public le monde et la culture du flamenco, cette expression artistique unissant le chant, la danse et l’accompagnement musical. À cette occasion, de grands noms seront à l’affiche de ce festival : Patricia Guerrero, considérée comme une véritable révélation de la danse flamenca, et Guadalupe Torres qui produit maintenant ses propres spectacles. Autres figures majeures de l’événement : l’étoile montante Pedro Córdoba et Rocío Molina, qui réussit à marier tradition et modernité. En dehors des spectacles, les quatre danseurs vedettes proposeront des master-class Sensibles à la démocratisation de cet art, inscrit au Patrimoine Mondial de l’Humanité par l’UNESCO au titre des biens culturels immatériels, les organisateurs ont programmé un ensemble d’activités auxquelles curieux et passionnés sont invités à participer. Les différentes écoles de flamenco de la région -Acento Flamenco, Aire Andaluz, Centre Solea et Sevillanas y Compas- organiseront trois flash mobs lors desquels les visiteurs seront invités à apprendre la chorégraphie. Autres réjouissances, des ateliers d’initiation à la danse sévillane seront aussi proposés par les professeurs des associations Aire Andaluz et Acento Flamenco. S’ensuivra un bal sévillan animé par le groupe Giraldillo. En parallèle de ces animations participatives, le cinéma Le Pagnol présentera Flamenco Flamenco (2011) de l’espagnol Carlo Saura. Musical et chorégraphique, le film offre un riche portrait du flamenco contemporain. Enfin, deux expositions, l’une photographique et l’autre liée à l’univers du flamenco -luthiers, peintres, créateurs de vêtements, etc.- seront mises en place. Une troisième édition qui annonce un programme aussi riche que festif. FAUSTINE AUPAIX

MARYVONNE COLOMBANI

Festival International de Guitare de Lambesc 3 au 8 juillet Parc Bertoglio, Lambesc 06 09 58 47 13 festivalguitare-lambesc.com

04 42 03 72 75

Les Nuits Flamencas 7 et 8 juillet Divers lieux, Aubagne lesnuitsflamencas.com


50 festivals

Prélude de juin

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’est désormais un classique du début de l’été aixois ! Aix en juin, vendu depuis cinq ans comme « l’antichambre du Festival d’Aix », offre un programme ambitieux, populaire, explorant des univers musicaux variés avec (ce n’est pas négligeable au vu des tarifs des représentations d’opéras !) des accès gratuits ou au moyen d’un Pass (15€), permettant aussi d’assister aux événements publics de l’Académie du Festival d’Aix en juillet. De fait, le public s’y rend nombreux, si bien qu’il est parfois difficile d’obtenir une entrée sans faire de longues queues à l’avance. Une quarantaine de manifestations sont affichées, permettant d’apprécier des artistes de renom comme de jeunes talents, mais également les créations proposées par « Passerelles » (service éducatif et socio-artistique du Festival). On débute avec Panorama, soirée présentant la nouvelle édition d’Aix en Juin et du Festival d’Aix en musique. On termine avec la traditionnelle Parade[s] et son grand concert gratuit sur le cours Mirabeau avec, cette année, des extraits de... Carmen ! Le programme court du 7 au 30 juin et s’articule autours de

Parades, 2013 © Patrick Berger

L’Académie du Festival

vecteurs que sont l’Académie du Festival, des concerts des Lauréats HSBC, des Voix de Silvacane, de Passerelles et de répétitions publiques des opéras de juillet (Erismena, The Rake’s Progress, Don Giovanni, Carmen et Pinocchio).

Dans le cadre de la Résidence Mozart des jeunes artistes, ce sont des Master classes de chant qui sont proposées au public et des Concerts en tournée : Mozart et papa Haydn ou Et c’est ainsi que l’obscur temps

Au Festival d’Aix ! Boesmans, dont on avait apprécié Julie donnée à Aix en 2005. Joël Pommerat, après sa participation en 2011 à Thanks to my Eyes d’Oscar Bianchi, y revient également et met en scène l’histoire du pantin de bois. Parmi l’équipe des chanteurs, on retrouve au Grand Théâtre de Provence, Stéphane Degout et Chloé Briot. On attend la Carmen mise en scène par Théâtre de l’Archevêché © Vincent Pontet

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our sa 69e édition, le Festival d’Aix affiche les classiques Carmen et Don Giovanni, The Rake’s Progress de Stravinski, la baroque Erismena de Cavalli, Pinocchio une création contemporaine de Philippe Boesmans, ainsi qu’Eugène Onéguine en version de concert. Ce sont aussi seize rendez-vous de concerts qui sont proposés du 1er au 22 juillet. Pinocchio est la nouvelle création de Philippe

Dmitri Tcherniakov, créateur inventif et parfois controversé (comme lors de sa relecture de Don Giovanni en 2010) ! Ce dernier adopte, comme chez Mérimée, le point de vue de Don José. À la tête de l’Orchestre de Paris, Pablo Heras-Casado retrouve la fosse du GTP après y avoir dirigé La Flûte enchantée en 2014. Stéphanie d’Oustrac, à l’instar de Glyndebourne, incarne la célèbre gitane. The Rake’s Progress ou « La carrière du Libertin » est un opéra marquant du XXe siècle. Dans le cadre du « Cycle Stravinski », les représentations aixoises marquent le retour de Daniel Harding à Aix (depuis ses débuts avec Don Giovanni en 1998 à 22 ans !). La mise en scène est signée Simon McBurney (La Flûte enchantée en 2014). La distribution comprend Paul Appleby, Julia Bullock et Kyle Ketelsen (Leporello en 2010 et 2013 et Figaro en 2012). La distribution de Don Giovanni réunit une équipe jeune emmenée par le duo maître-valet Philippe Sly et Nahuel Di Pierro (Guglielmo en 2016), mais aussi Julie Fuchs (Zerlina) ou Pavol Breslik (Don Ottavio). Jérémie


s’achève.... Dans le cadre du cycle Stravinski, on découvre un spectacle conçu à partir de la correspondance du compositeur avec Ernest Ansermet : Au plus fort de l’orage. Les chanteurs de l’Académie participent également à un spectacle/performance autour du mythe d’Orphée, Phone call to Hades, aux Master classes de Philippe Boesmans pour sa création Pinocchio et de la metteuse en scène Katie Mitchell, une habituée du Festival. Le Trio Sōra, enfin, explore les tangos traditionnel et contemporain. Le déjà remarquable Quatuor Arod (Lauréat HSBC 2016) offre plusieurs concerts autour de Webern, Schubert et Mendelssohn et le baryton John Chest (Lauréat 2015) chante La Belle Maguelone de Brahms. Outre Mozart et papa Haydn, on découvre dans l’Abbaye de Silvacane les Visages de la Vierge, musiques sacrées interprétées par la Maîtrise des Bouches-du-Rhône et un programme autour de la musique médiévale de Guillaume Dufay (XVe siècle). Dans le cadre des concerts Passerelles se succèdent Benjamin Dupé dans son étonnant solo Comme je l’entends, le Chœur

Ibn Zaydoun qu’on retrouve avec à sa tête Moneim Adwan, le Festival Choral Académique et ses 160 choristes issus d’établissements scolaires d’Aix-Marseille qui, sous la houlette de la violoncelliste Sonia Wieder-Atherton revisitent l’antique Odyssée, une projection du film de Comencini Les aventures de Pinocchio (1972) et une manifestation amateur à Marseille, encadrée par Raphaël Imbert et Rara Woulib, autour du jazz et de l’improvisation (dans le cadre des Dimanches de la Canebière). Deux concerts clôturent le mois : l’un met à l’honneur le lauréat du prix Gabriel Dussurget (Alphonse Cemin au piano) avec les Orchestres du Conservatoire Darius Milhaud et d’Aix-Marseille Université, l’autre chante l’héritage de la musique grecque avec le Trio Tatavla.

Rhorer revient à Aix à la tête du Cercle de l’Harmonie (Les Noces de Figaro en 2012, L’Enlèvement au sérail en 2015 et Così fan tutte en 2016). Jean-François Sivadier (après La Traviata en 2011) instille à sa mise en scène toute l’énergie du célèbre libertin. Leonardo García Alarcón et la Cappella Mediterranea avaient redonné vie à Elena de Cavalli en 2013 au Festival d’Aix. Ils font de même, au Jeu de Paume, avec Erismena (1655), opéra typique de l’ère baroque avec ses situations mêlant tragique et comique, ses travestissements… Jean Bellorini (sa « Soirée Satie » tourne sur les scènes françaises depuis 2012) met en scène ce bijou oublié. On n’aura qu’une seule représentation d’Eugène Onéguine de Tchaïkovski, en version de concert, avec les artistes du Bolchoï dirigée par Tugan Sokhiev… à ne pas manquer au GTP !

Beethoven). De même Leonardo García Alarcón et la Cappella Mediterranea proposent des musiques du XVIIe siècle avec « Les Muses italiennes du Roi-Soleil ». C’est aussi une pléiade d’artistes en tous genres qu’on suit : Sonia Wieder-Atherton pour « A voix nues », le Quatuor Béla, le Quatuor Van Kuijk et l’ensemble Klangforum pour des répertoires contemporains, des créations mondiales par des musiciens de l’Académie ou des récitals des Lauréats HSBC (« De l’Extase aux soupirs », « Life Story », « L’instinct lyrique »). L’Orchestre des Jeunes de la Méditerranée se produit à Aix et Marseille et des propositions mêlent Jazz et Musique du monde comme Cairo Jazz Station, Saltana Quartet (Raphaël Imbert, Moneim Adwan…) ou revisitent les Balkans : Udopia ou Aka Moon (Fabrizio Cassol)…

Côté concerts On profite de la présence de l’Orchestre de Paris et de Daniel Harding pour un grand concert symphonique (Stravinski, Schubert,

JACQUES FRESCHEL

Aix en juin 7 au 30 juin Aix-en-Provence 0820 922 923 festival-aix.com

J.F.

Festival d’Aix 3 au 22 juillet Divers lieux, Aix-en-Provence 0820 922 923 festival-aix.com


52 festivals

Entre mer et montagne

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enouant avec une formule inaugurée l’an passé pour le plus grand nombre d’amateurs mélomanes, le Festival estival de musique de Toulon et sa région proposera cette année encore des concerts gratuits et des soirées prestigieuses dans les lieux emblématiques et historiques qui ont fait sa réputation. En préambule, le traditionnel concert Pharmacie Humanitaire Internationale Var éveillera les oreilles des Festivaliers à la Collégiale de SixFours (16 juin) grâce au Chœur de chambre Kallisté et à l’Ensemble Instrumental de Toulon et du Var placés sous la direction de René-Pierre Faedda. En partenariat avec le CNRR de Toulon, élèves et professeurs du conservatoire viendront fêter la musique lors d’une soirée consacrée aux anches doubles au Théâtre de Verdure du Mont Faron (24 juin) en accès libre. Gratuites, les soirées suivantes seront consacrées au quintette de cuivres Ad Libitum place Victor Hugo en centre-ville de Toulon (7 juillet), suivi par les membres du Quatuor de saxophones Zahir place Pierre Puget (8 Juillet). Le Festival prendra ensuite ses quartiers au sein de l’écrin majestueux de la Tour Royale où l’on entendra Laurent Korcia et Élodie Soulard dans un duo diabolique violon-accordéon

Quatuor Zahir © Sandro

autour d’un programme intitulé Danses (4 juillet). Schubert sera ensuite à l’honneur lors de deux soirées (6 et 7 juillet) sous les doigts merveilleux d’Adam Laloum, seul le premier soir autour des Moments musicaux, op.94 et de la Sonate n° 13, et accompagné de son trio Les Esprits autour de la Sonate Arpeggione et du fameux Trio n° 2 en Mib

Majeur, le lendemain. Pour terminer en beauté, la Collégiale ouvrira ensuite ses portes à l’excellent Ensemble Matheus dirigé par le sémillant Jean-Christophe Spinosi en résidence d’été dans la commune. Lors d’une soirée « Monteverdi 2.0 », les sopranos Emily Rose Bry et Zoe Nicolaidou seront à leur côtés ainsi que le

Nadine Sierra © Merri Cyr.

Une nouvelle direction aux Chorégies d’Orange !

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aymond Duffaut, passionné et grand connaisseur d’art lyrique qui a tenu 35 ans ce grand Festival, a jeté l’éponge à la suite de tensions avec la municipalité d’extrême-droite (voir Zib 106). Mais le nouveau directeur, Jean-Louis Grinda, s’inscrit dans la dynamique de productions grand public et de qualité, avec quelques surprises : la baisse des prix de 20%, sauf le Carré d’Or qui sera en grande partie amélioré, un ciné concert, des images de la Nasa projetées pendant un concert symphonique, la Cour Saint Louis retrouvée, et un concert choral pédagogique audacieux ! Musiques en fête, le 19 juin, réunira 200 personnes sur le plateau pour des airs d’opéras, de comédies musicales, de chansons, et sera retransmis en direct sur France 3. Pour Pop The Opera, 600 élèves de la Région ProvenceAlpes-Côte d’Azur seront réunis autour des orchestres d’Avignon et de Monte-Carlo :

Didier Benetti dirigera cette imposante formation, le 22 juin. On quittera l’immensité du Théâtre antique pour les récitals dans la Cour Saint-Louis de Florian Sempey, sublime baryton qui chantera Mozart le 8 juillet, Bryn Terfel, autre baryton magnifique, dans des grands airs romantiques le 10 juillet, ainsi que pour le Concert des Révélations Classiques de l’Adami, voix et instruments le 11 juillet. Pour les productions lyriques, deux Verdi ! Rigoletto avec l’inusable septuagénaire Leo Nucci dans le rôle-titre et Nadine Sierra (Gilda), jeune surdouée américaine, Mikko Franck à la baguette, les 8 et 11 juillet. Aïda, avec Sondra Radvanosky et Marcelo Alvarez, dans une mise en scène de PaulEmile Fourny direction musicale Paolo Arrivabeni, les 2 et 5 août. Puis seront donnés la IXe Symphonie de Beethoven et son Hymne à la joie emblématique,


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Révolution(s) contre-ténor David DQ Lee pour un hommage commémorant le 450e anniversaire de la naissance du célèbre transalpin (19 juillet). Son ultime opéra, Le couronnement de Poppée, servira d’apothéose impériale à l’ensemble ainsi qu’à une pléiade de chanteurs solistes de haut vol (Benedetta Mazzucato, Filippo Mineccia, Anna Sohn, Francisco Fernández-Rueda, Matthieu Toulouse, François Héraud et Raffaele Pe) pour une prometteuse soirée baroque à souhait (21 juillet). Le point d’orgue « en forme de » et avec feu d’artifice s’épanouira autour du truculent spectacle Barock’n’roll (22 juillet) : ayant déjà fait la preuve de sa qualité et de son efficacité après avoir été rodé sur de nombreuses scènes prestigieuses, cette production sera en entrée libre au Parc de la Méditerranée à Six-fours et risque, à coup sur, de déplacer les foules. Spectateurs, à vos coussins ! EMILIEN MOREAU

Festival estival de musique de Toulon et sa région 24 juin au 22 juillet Toulon, Six-Fours-les-Plages 04 94 18 53 07 festivalmusiquetoulon.com

avec l’Orchestre Philharmonique de Radio France sous la direction de Myung Whun Chung, le 16 juillet ; Le Fantôme de l’opéra, d’après le roman fantastique de Gaston Leroux, réalisé par Rupert Julian, ciné-concert où Jean-François Zygel improvisera au piano sur la projection le 25 juillet ; et Les Planètes de Holst, poème symphonique en 7 mouvements, avec la projection d’images sublimes de la Nasa ! Jesko Sirvend y dirigera l’Orchestre National de France et l’Ensemble vocal des Chorégies, le 4 août. Un soirée doublement sous les étoiles ! YVES BERGÉ

Chorégies d’Orange 19 Juin au 5 Août 04 90 34 24 24 choregies.fr

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u 10 au 28 juillet, le Festival Radio France Occitanie Montpellier propose autour de la thématique Révolution(s) une programmation explosive et alléchante. La Russie et son histoire tourmentée jalonneront ce parcours musical singulier avec le très populaire Chœur de l’Armée Rouge. De Plaine ma plaine aux Yeux noirs, le célèbre ensemble décimé à la fin de l’année dernière dans un accident d’avion interprètera ses grands classiques, avec des thèmes tombés depuis longtemps dans le répertoire tzigane (13 juillet). Dans un esprit de révolte, la soirée « Année 1917 » s’annonce intense avec la symphonie éponyme de Chostakovitch et le concerto pour violoncelle de Dvorak par Edgard Moreau et l’Orchestre National du Capitole de Toulouse sous la direction d’Andris Poga (17). Au confins de l’Empire (19) mettra à l’honneur Moussorgski, Tchaïkovski et Khatchatourian avec l’Orchestre National de France (dir. E. Krivine) et le violoniste Renaud Capuçon, avant de laisser place le lendemain au Piano russe sous les doigts magiques de Lukas Geniusas (Prokofiev, Rachmaninov, Zaderatsky) et du renommé Boris Berezovsky (Rachmaninov, Balakirev, Liapounov). De Moscou à Rome (21) nous fera voyager de Prokofiev (3e Concerto avec Simon Trpceski) aux Fontaines de Rome de Respighi sous la baguette d’Alexandre Bloch avec l’Orchestre National de Lille. Si Giordano n’est pas russe, c’est bien son opéra Sibéria qui sera donné le 22 en version de concert avec l’Orchestre National et le Chœur de l’opéra de Montpellier auxquels se joindra le Chœur de la Radio Lettone Fazil Say © Marco Borggreve

sous la direction de Domingo Hindoyan. La Révolution d’Octobre complète ce programme à l’accent russe (25) avec des œuvres rares comme Le Boulon de Chostakovitch et la Cantate Octobre de Prokofiev (Chœur de Radio France, Orchestre Philharmonique de Radio France, dir. V. Fedosseyev). L’âme russe n’est d’ailleurs jamais très loin pour la soirée jazz Das Kapital (25 juillet) avec une formation saxophone guitare batterie très « Internationale ». Sous les doigts du pianiste Andrei Korobeiniko, c’est la Révolution du piano et de l’esprit de Liszt qui se jouera (23) alors que le Chœur de la Radio Lettone interprètera des pièces de la renaissance jusqu’à Arvo Pärt (16). Dans le même esprit et pour la soirée d’ouverture du festival, Le voyage en polyphonie d’Hervé Niquet à la tête du Concert Spirituel nous invite à découvrir le compositeur Benevolo, un génie oublié de la polyphonie (10). En miroir de ces moments très forts, difficile de passer sous silence, entre autres, la 3e symphonie de Mahler, le duo violon/piano Soumm/ Kouider, la sublime voix d’I. Georges accompagnée par F. Steenbrink, le show Fazil Say dans Mozart, la soirée de clôture autour du duo violon/piano Dautricourt/ Dumont, l’Ensemble Contraste, le clavecin magique de Justin Taylor… Un programme incroyablement dantesque autour d’une thématique explorée sous toutes ses coutures! FRÉDÉRIC ISOLETTA

Festival Radio France Occitanie Montpellier 10 au 28 juillet Région Occitanie 04 67 02 02 01 lefestival.eu


54 festivals

Indiana Jones et les partitions perdues

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a dynamique association de Pourrières, L’Opéra au Village, est indissociable depuis des années du paysage des festivals, avec une programmation qui s’échelonne sur l’année mais garde un temps fort l’été. L’édition estivale 2017 jette un regard en arrière et dresse un bilan sous forme de florilège des raretés qu’elle a fait découvrir à un public toujours passionné et enthousiaste. Bernard Grimonet, le metteur en scène des diverses productions passées, concocte pour l’occasion un scénario dans lequel un « archéo-musicologue » accompagné de son équipe découvre des partitions dans un couvent lointain et oublié. Le Couvent des Minimes avec son architecture délicatement romane devient le cadre de cette quête aussi captivante qu’un film d’Indiana Jones. Au cours de cette « Fantaisie Lyrique », l’explorateur rencontre les artistes qui ont interprété les pièces exhumées. Retour sur les petits bijoux que le Festival a eu l’intelligence de sortir de l’oubli : délicieuses merveilles d’Offenbach, de Claude Terrasse, Pauline Viardot, pour ne citer qu’eux. Et, miracle du spectacle, les voici revenus, les talentueux interprètes des saisons passées, Yete Queiroz, Anne-Claire Baconnais,

Mikhaël Piccone dans Vent du soir (2015) © X-D.R

Sous le signe de Terpsichore

À

l’initiative de la Mairie qui l’accueille, l’Académie-Festival des Rencontres de St-Cézaire propose spectacles et concerts, mais aussi des classes de perfectionnement, destinées à de jeunes musiciens issus des divers conservatoires régionaux, nationaux et européens. Œuvres majeures travaillées avec les musiciens de l’Ensemble Calliopée et la compositrice en résidence, Graciane Finzi pour cette seizième édition, titrée Musica Femina. Sera interprétée sa nouvelle œuvre, Par-delà les étoiles, concerto pour violon (Christophe Giovaninetti) et orchestre. Sera aussi évoquée la danseuse Isadora Duncan (1877-1927) qui révolutionna les codes de la danse en s’inspirant de la statuaire antique, et en osant danser sur les œuvres du répertoire, Chopin, Beethoven… Le lien entre danse et musique est fait, grâce à la voix de l’actrice Clotilde Courau accompagnée par l’Ensemble Calliopée, dans un journal intime illustré par la création vidéo de Christian

Boustani. On (re)découvrira avec Barbara Scaff, spécialiste du doublage de dessins animés, l’un des premiers comic-strips américains, Ensemble Calliopée © Jeff Ropars (2011)

Krazy Kat, lors d’un ciné-concert aux sons de la clarinette et du piano qui alterneront classiques du jazz, chansons américaines


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Guilhem Chalbos, Mikhael Piccone, Denis Mignien, Cyril Costanzo, Luc Coadou, Isabelle Terjan, avec leur phrasé, leur éloquence, leur vivacité… pour cet Off N’ Back débridé et jubilatoire. On se remémorera Le dernier sorcier de Pauline Viardot, Les deux vieilles gardes de Léo Delibes, La bonne d’enfant d’Offenbach, Faust en ménage de Claude Terrasse… Auparavant, on aura pu déguster un repas servi par les bénévoles (cheville ouvrière de l’ensemble) sous les grands marronniers, en rendant grâce aux vins des domaines alentours, Jacourette, Pinchinat, Roquefeuille, Sacaron, Saint-Hubert, Château de Pourcieux. En prémices de juillet, on aura eu le privilège d’entendre le piano d’Anne Queffélec et son fils Gaspard Dehaene (24 juin) dans un programme Schubert, Liszt, Scriabine, Mozart, et une nouvelle adaptation de L’Arlésienne de Bizet, entrecroisée d’extraits des Lettres de mon moulin d’Alphonse Daudet… Opéra au village pour ce spectacle s’associe à Pertuis et Saint-Maximin. La première sera donnée à Pertuis le 30 juin et Saint-Maximin recevra cette œuvre en 2018. Que de bonheurs en perspective ! MARYVONNE COLOMBANI

L’Opéra au village 14 & 15 juillet Couvent des Minimes, Pourrières 06 98 31 42 06 loperaauvillage.fr

Piccolo champêtre

A

vec l’été, le parfum des lavandes, la chaleur du mois d’août, revient le délicieux festival Flûtes & Lavandes auquel nous invite l’association Musiques dans les Alpes de Haute Provence avec en cheville ouvrière celui que son maître, Joseph Rampal, avait surnommé le « Paganini du piccolo », Jean-Louis Beaumadier. Cette manifestation de la première semaine d’août nous mènera de la cour du Château des Templiers de Gréoux-les-Bains à Sainte Croix du Verdon, Thoard, Saint-Vincent-sur-Jabron, la cathédrale de Riez. Deux compositeurs abordés selon les concerts, Bach et Mozart. Le spectacle Mozart pour tous sera animé par le musicologue et conférencier Lionel Pons, qui permettra au grand public d’approcher par ses anecdotes et ses commentaires l’œuvre du père de La Flûte enchantée. Airs d’opéra, extraits de concertos, sonates, trouveront leur expression juste grâce à l’interprétation rigoureuse et élégante de la soprano Lucile Pessey, la violoniste Ventzislava Choykova, la pianiste Véronique Poltz et le piccolo de Jean-Louis Beaumadier. Les deux derniers instrumentistes offriront aussi un programme autour des sonates pour flûte et clavier de Jean-Sébastien Bach, Back to Bach, qui laisse percevoir la grande modernité du compositeur tout en respectant l’esprit de ses œuvres. Ces deux formules de concerts font partie aussi du festival de juillet, Les soirées étoilées de Cabris et Saint-Vallier-de-Thiey, « Fête internationale de la flûte », et on pourra les entendre les 16 et 17 juillet en l’église de Cabris. (et ce pour 10 €). Profitez-en, Jean-Louis Beaumadier est très demandé ! En juillet, il reviendra du Costa Rica et il laissera les lavandes provençales en août pour l’auditorium du Centre des Congrès de Minneapolis aux USA ! M.C.

et une création originale du jeune compositeur Jules Matton. En souvenir du centenaire de l’entrée dans la Première Guerre mondiale des troupes américaines, des pièces de Scott Joplin, Jim Europe, Georges Gershwin, Walter Damrosch (…) seront interprétées en quintette à vent, écho des brass bands américains. L’écrin de l’église de Saint-Cézaire accueillera le concert de clôture, réunissant étudiants et musiciens, pour des extraits de Franz Schubert, Felix Mendelssohn, Claude Debussy, César Franck et Graciane Finzi. Enfin, lors du « Concert hors les murs », ce sera l’église de Mouans-Sartoux qui recevra Quatuor, Octuor (Schubert, Mendelssohn) et Quintette à vent, Quand le jazz débarque ! M.C.

16èmes Rencontres musicales de St-Cézaire 9 au 16 juillet Saint-Cézaire-sur-Siagne 04 93 60 84 30 saintcezairesursiagne.fr ensemblecalliopee.com

Festival Flûtes & Lavandes 1er au 7 août Alpes de Haute Provence 06 07 60 88 53 piccolo-beaumadier.com 16 & 17 juillet Église de Cabris 04 93 60 55 63


56 festivals

Photosensible Fréquentation toujours en hausse, offre pointue et variée : zoom sur les Rencontres de la Photographie

L

a photo est assez nette : on y distingue une femme, elle a maintenant 42 ans, cinq de moins que la dernière fois. Tel est le portrait du, en l’occurrence, de la visiteuse type des Rencontres d’Arles. Elle a donc presque le même âge que l’événement, qui présente cette année sa 48è édition. Les courbes se croisent dans le bon sens : longévité et rajeunissement. Son directeur Sam Stourdzé, à la tête de la manifestation depuis fin 2014, avoue sa gourmandise de chiffres, et c’est avec malice qu’il en égrène quelques-uns, en effet plutôt doux à savourer : l’édition 2016 a vu pour la première fois le nombre de visiteurs passer le seuil des 100 000, avec une augmentation de 12% en un an (la fréquentation s’est multipliée par 10 en 15 ans). Chiffre symbolique, assorti d’un petit dernier, le plus gros : 22

millions, la somme en euros des retombées directes et indirectes injectée dans l’économie arlésienne, selon une étude réalisée en 2016. Voilà donc, pour la légende de la photo, que n’a certainement pas manqué de décrypter la nouvelle ministre de la Culture, arlésienne largement investie dans cette prise de vue…

Amérique Latine Entre les lieux (25, dont 2 nouveaux), les thématiques (8), les photographes (250), les événements, les prix (le Nouveau Prix découverte récompense un photographe de moins de 45 ans, décerné par un jury de galeristes), les fonds exposés des collectionneurs, inlassables médiateurs entre amateurisme et art, et le Grand Arles Express (délocalisation à Avignon,

Toulon, Nîmes et Marseille) les trajets sont multiples, avec découvertes et retrouvailles, chocs, constats, aiguisement du regard et mises en perspective. Les Rencontres 2017 célèbrent l’Année France/ Colombie, en initiant un programme Latina !, pointé sur ce pays en pleine reconstruction politique, et élargit la focale à toute l’Amérique latine. Les deux commissaires Alexis Fabry et María Wills ont puisé dans l’extraordinaire collection de Leticia et Stanislas Poniatowski plusieurs centaines d’images issues de travaux de photographes latino-américains des 50 dernières années et composent une série de Pulsions urbaines. Tout un pan d’histoire apparaît dans les cadres d’un quotidien multi facettes, toujours plus encerclé par la minéralité des villes, avec comme horizon une certaine forme de liberté arrachée aux modèles imposés. La Vuelta (commissariat Carolina Ponce de León et Sam Stourdzé) présente 28 photographes colombiens, sous la double signification de son titre. En argot, il évoque le vol, le meurtre, le trafic ; en langage sportif, il s’agit d’une course par étapes autour d’un pays. L’écart est grand entre ces deux prismes, où pourront s’exprimer la force de chaque image témoin de la création contemporaine colombienne.

Terrains sensibles

Стансы - Кавголовo (Stance - Kavgolovo), 2017. Avec l’aimable autorisation de l’artiste, de OSL Contemporary, Oslo, et de Kamel Mennour, Paris/Londres © Rencontres Arles

La thématique L’expérience du territoire regroupe une large palette d’expositions, dont les Stances de Marie Bovo (Marseille). Depuis le début de l’année, elle entreprend des voyages au long cours, à travers l’Europe orientale et la Russie. En train. A chaque arrêt, elle est postée devant la porte, qui s’ouvre sur un morceau de paysage, un nom de ville, un quai, une personne qui en attend une autre… Elle déclenche la prise de vue. Série d’instantanés argentiques, voyage en pointillés, trajet linéaire et symbolique, le dispositif opère comme une ponction de visions et d’impressions. Raphaële Bertho et Héloïse Conésa ont réuni les travaux de 15 photographes Dans l’atelier de la mission photographique de la DATAR. Témoins (mais pas retenus à l’époque) du vaste chantier entrepris entre 1983 et


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Jeff et Tracey Waters, Staines-upon-Thames, Surrey, Royaume-Uni, février 2014, série Portraits submergés. Avec l’aimable autorisation de l’artiste. © Rencontres Arles

1989 par la Délégation à l’aménagement et du territoire, qui proposait un état des lieux du paysage français des années 80, ils seront ici présentés en dialogue avec des archives personnelles inédites. Somme de regards à la fois neutres (on photographie ce qui est là, juste là, parce que justement c’est là) et particuliers, la Mission est devenue culte dans l’histoire de la photographie contemporaine. Autre approche du lieu, avec Levitt France, une utopie pavillonnaire. Dans la banlieue francilienne, il existe un quartier calqué sur les suburbs américaines, initiées par l’entrepreneur américain William Levitt. Au début des années 70, il représentait un rêve de maisons faciles à construire, puisque toutes sur le même modèle, et donc accessible à beaucoup. Cinq photographes (Julie Balagu, Vincent Fillon, Bruno Fontana, Jean Noviel, Camille Richer, réunis par Béatrice Andrieux) ont capté, avec chacun leur angle, le caractère hautement photogénique – et angoissant, et questionnant, et vertigineux - du lieu. Christophe Rihet (travaille entre New York et Paris) a entrepris un voyage sur le chemin

de la mort (Road to death). Ici et là, des stars sont mortes dans un accident de la route. Sur le lieu précis de leur disparition, il capte ce quelque chose, cette aura (un peu malsaine, un peu mystique, mais surtout terriblement romantique) et constitue un mausolée immatériel qui questionne le pouvoir de fascination des célébrités.

Poésie visuelle Dans Les désordres du monde, on retient les travaux de Gideon Mendel (artiste sud-africain vivant à Londres). Un monde qui se noie (commissariat Mark Sealy) rassemble trois séries du photographe : le changement climatique à hauteur d’homme. Portraits submergés, personnes posant devant leur maison inondée. Ligne de crue, traces laissées par la catastrophe sur les meubles, les objets, dans un silence pesant d’après tempête. Et Traces d’eau, photographies familiales retrouvées abimées, ou données par leur propriétaires, sauvées du déluge puis agrandies : les stigmates se muent en érosion

du temps, des souvenirs, de la matière, et tout devient plus flou, peut-être plus doux. Iran, année 38 occupe la thématique Je vous écris d’un pays lointain. Les deux commissaires iraniens Anahita Ghabaian et Newsha Tavakolian expliquent que « la version moderne de la poésie est évidemment la photographie. » Ils ont ainsi invité 66 photographes iraniens, qui, pour exprimer leur pays depuis la révolution islamique en 1979, déclinent et enrichissent cette nouvelle forme de poésie. Il y a aussi Mise en scène (de soi), où Audrey Tautou dévoile des autoportraits argentiques plein d’autodérision, The house of the ballenesque de Roger Ballen, voyage intérieur inquiet et onirique parmi les objets quotidiens de sa maison, Le spectre du surréalisme (prêt du Centre Pompidou), Nains, Hercules et géants issus de la collection Claude Ribouillaut. Et aussi,… et aussi,… ANNA ZISMAN

Les Rencontres de la Photographie 3 juillet au 24 septembre Arles rencontres-arles.com


58 festivals

Caged Heat, Roger Corman © X-DR

plan large sur le fid marseille C

ette année, pour la 28ème édition, une quarantaine d’œuvres seront présentées, toutes compétitions confondues, tant documentaires que fictionnelles, « pour la plupart en première mondiale ou internationale. Car il s’agit de se risquer à défendre le cinéma qui se fait aujourd’hui, cinéma exigeant, cinéma vivant. » La manifestation se déploiera du 11 au 17 juillet, avec au total environ 150 films diffusés sur différents sites : au MuCEM et à la Villa Méditerranée, en plein air au Théâtre Silvain, dans l’auditorium de la Bibliothèque de l’Alcazar, ainsi que dans les salles des cinémas Variétés, Le Miroir et Vidéodrome2.

Prix d’honneur, rétrospective et jurys Lors de la cérémonie d’ouverture, en accès libre le 11 juillet au Théâtre Silvain, le Prix d’honneur sera remis au réalisateur et producteur Roger Corman, « ange sauvage » de Hollywood. Un virtuose de la Série B, à qui le FID consacre une rétrospective foisonnante, articulée autour de tables rondes, master class et projections. À commencer ce soir-là par son film L’Halluciné, une version fantastique de la retraite napoléonienne de Russie, avec le mythique Boris Karloff. La Compétition Internationale sera présidée par

Sharunas Bartas, dont le dernier film Frost, l’histoire d’un jeune homme lituanien confronté à la guerre, a été récemment présenté à Cannes lors de la Quinzaine des réalisateurs. Son projet Sparrow est par ailleurs sélectionné au FIDLab (plateforme de soutien à la coproduction). L’acteur et militant d’extrême gauche Lou Castel assurera la présidence de la Compétition française ; on est curieux de découvrir le regard de cet irréductible sur la création contemporaine. Parmi ceux qui l’ont vu, nul n’a oublié sa prestation dans Les poings dans les poches, premier film rageur de l’italien Marco Bellochio au mitan des années 1960.

Écrans Parallèles et séances spéciales Hors compétitions, cinq Écrans parallèles sont prévus, dont à l’heure où nous écrivons ces lignes un seul, centré sur Franz Kafka, est connu. L’écrivain estimait que le cinéma est un « jouet magnifique », mais qu’il « contraint l’œil à endosser un uniforme » ; l’acteur allemand Hanns Zischler s’est efforcé de retrouver, en courant les archives et les cinémathèques, les films qu’il pu voir et qu’il évoquait dans ses Correspondances et son Journal d’avant-guerre. Quatre séances spéciales retiendront l’attention du public : guettez la projection des films La Chambre bleue de Mathieu Amalric

(en sa présence), et I called him Morgan de Kasper Collin, dont les dates ne sont pas encore confirmées, ni les lieux (MuCEM ou Villa Méditerranée). La première est assurée en partenariat avec la SCELF (Société Civile des Éditeurs de langue Française), la seconde avec le Festival Marseille Jazz des 5 Continents : le documentaire porte sur le meurtre du trompettiste Lee Morgan par sa femme, en 1972. Le 15 juillet, le fort Saint-Jean accueillera la Nuit de la Radio, une expérience d’écoute collective sur le thème de la ou des Liberté(s), organisée avec la SCAM (Société Civile des Auteurs Multimédia). Le 16 juillet, en entrée et à l’air libre, on pourra voir au Théâtre Silvain une œuvre de Jonathan Demme, le réalisateur américain disparu en avril dernier. Son film Stop Making Sense, capté lors d’un concert des Talking Heads en 1983, est réputé l’un des live musicaux les plus puissants de l’histoire. GAËLLE CLOAREC

FIDMarseille 11 au 17 juillet Divers lieux, Marseille 04 95 04 44 90 fidmarseille.org


saison iv 2016-2017

scène conventionnée pour les expressions contemporaines

« Des crapauds morts s’animeront à nouveau »

C

installation urbaine, plastique & sonore

Groupe artistique les pas perdus

Guy-André Lagesse, Nicolas Barthélemy, Jérôme Rigaut & les 40 Songeurs

15 > 18 juin

En accès libre sur la place Henri Verneuil - 13002 Marseille

theatrejoliette.fr / 04 91 90 74 28

18 juillet au 12 août 2017

MARIE-JOSÉ DHO

la Joliette des songes

festivaldechaillol.com

omment ne pas être séduit par une si formidable perspective ouverte par la 17è édition du Festival International de vidéo expérimentale Images contre Nature ? Mais que l’on ne s’y méprenne pas : il n’y aura aucune métamorphose du batracien mal-aimé en prince charmant ; ce n’est pas le genre de la maison ! Ce festival singulier ne fait pas dans le conte de fées et revendique même le refus de la fiction. Alors quoi ? Il s’agira de raconter autrement « la poésie, l’humour, la politique, les corps, la nature et la violence » Vaste programme qui se déroulera cette année en association avec le Festival Tous Courts d’Aix-enProvence tout au moins pour la soirée d’ouverture qui reprendra le thème du Corps Scientifique / Corps Fantastique avec une série de 8 films tous plus saisissants les uns que les autres issus du patrimoine comme Le Vampire de Jean Painlevé (1945), ou plus contemporains comme le Macula de Carole Arcega (2004) ; et comment ne pas avoir envie de s’aventurer du côté des Documents sur une langue sifflée turque de René Guy Busnel (1967), qui offrent certainement des révélations inédites ! La clôture offrira aussi à 4 structures (Data, Dodeskaden, le MUFF et Videodrome 2) une carte blanche hybride et cinémusicale puisque le son y est l’invité –surprise, dans un traitement inhabituel puisque deux réalisateurs / performers « joueront », tels des instruments de musique, l’un du projecteur et de ses accessoires (Xavier Quérel pour Quelques minutes de soleil après minuit), l’autre des perceptions et peut-être des nerfs des spectateurs (Pouvoir érotique des sirènes de Jean-Luc Gergonne). Excitant on vous disait ! Mais pas de festival sans sélection –près de 85 films répartis comme chaque année sur 8 programmes rigoureusement cadrés et nommés Temps, Espace, Mouvement, Perception, Sens, Identité, Long, Animé. On y trouvera sans aucun doute « la vie, la profusion et la saturation » et aussi « beaucoup de lumière et de couleurs », qui sont, avec la liberté du prix d’entrée, avouons-le, les plus belles promesses que l’on puisse faire quand on a 17 ans !

FESTIVAL DE CHAILLOL Entre Alpes et Provence, une itinérance musicale en territoire rural de montagne. Musiques d’aujourd’hui, contemporaines et traditionnelles, d’ici ou d’ailleurs.

Towards the Hague © Sylvia Winkler & Stephan Koerper

Images contre nature 4 au 8 juillet Videodrome 2, Marseille 04 91 42 75 41 p-silo.org

Golan / Hubert Dupont - Sofiane Saidi & Mazalda invitent Manu Théron - Gemme / Ensemble De Caelis - Chesapeake Youth Symphony Orchestra - Mardis de l’Orgue - Académies #1 #2 - Céline Frisch - Ciné Concert - Ensemble CBarré - Création jeune public / Le petit garçon qui avait envie d’espace - Three Horns Two Rythm / Fabien Mary - Quatuor à plectres de France Balades Musicales - Marie Vermeulin & Noémi Boutin - Los Lobos del Tango - Pierre Fouchenneret & l’ensemble opus 71 + Romain Descharmes.

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illustration

Pascal

Colrat


60 festivals

Passé contemporain Pour sa 6ème édition, In Situ élargit le spectre. Soutenue depuis 2012 par la Région LanguedocRoussillon, la manifestation s’étend au territoire de la nouvelle Région Occitanie / Pyrénées – Méditerranée.

C

haque été, l’association Le Passe Muraille (Montpellier), qui depuis 20 ans œuvre à sensibiliser les publics au paysage et au bâti, confie à Marie-Caroline Allaire-Matte le commissariat général de cette exposition multi sites, et instaure un dialogue itinérant entre Patrimoine et art contemporain. Parfois, la communication est un peu ardue, et des médiateurs sont présents sur chacun des lieux pour traduire, introduire, suggérer une façon d’appréhender les propositions artistiques. Cette année, 11 sites seront investis par 10 artistes, dans 4 départements, et avec 6 créations inédites produites pour et dans le lieu même de leur installation –In Situ, donc. Chaque fois, la rencontre entre les pierres chargées d’un passé –religieux, économique, politique– et les œuvres –souvent très conceptuelles– des artistes contemporains produit

un questionnement riche en sensations et découvertes. Il s’agit ici à la fois d’exacerber le contraste et de gommer une certaine propension à pousser des hauts cris d’accusation d’iconoclastie. Les deux mondes s’interpénètrent d’autant mieux que la réflexion et l’investissement des artistes et commissaires (Emmanuel Latreille, directeur du FRAC Languedoc-Roussillon, et Christa Vyvey, commissaire d’exposition, sont associés à cette manifestation pour deux des lieux investis) se font en harmonie avec les implications esthétiques et mentales qui ne manquent pas d’en découler. Quels lieux patrimoniaux (tous classés ou inscrits à l’inventaire des Monuments historiques) se verront ainsi pénétrés par le contemporain ?

Nick Ervinck APSAADU, 2012-2013 Polyester 300 x 180 x 120 cm Courtesy de l’artiste

Joliette des esprits

I

© Les Pas Perdus

maginez. Imaginez un projet au long cours, nourri depuis un an et demi. Imaginez 40 songeurs s’emparant tout à coup d’un espace urbain et le transformant au gré de leurs rêves et leur art. Imaginez une Joliette plongée dans un délire à la Fellini. Imaginez des brebis sur les rails du tramway. Imaginez des œuvres monumentales fondues dans le décor de la ville. Imaginez une forêt de colonnes qui sonnent de bruits bruts ou de mots doux. N’imaginez plus. Venez du 15 au 18 juin sur la place Henri Verneuil à Marseille. Là, et tout autour, Joliette des Songes vous attend et vous mènera vers des territoires improbables et inattendus. A l’origine de ce projet hors norme, il y a Les Pas Perdus. La devise de ce collectif d’artistes pourra donner un indice sur l’état d’esprit qui les anime : « une cuisine pour les yeux avec

les restes du monde. » Le groupe, initié par le plasticien Guy-André Lagesse il y a une quinzaine d’années, rassemble deux autres artistes d’horizons et d’expressions divers, Nicolas Barthélemy et Jérôme Rigaut. Pour Joliette des Songes, le collectif est resté en longue résidence au Théâtre Joliette-Minoterie. Une expérience inédite pour l’équipe de la Minoterie. « Cette résidence est née d’une réflexion globale sur l’implantation du théâtre dans ce quartier en pleine mutation et des personnes qui le traversent et le vivent au quotidien. Au cœur de ce projet, se pose aussi la question de la mixité sociale des populations de ce quartier et de leur accès à l’art », expliquent Pierrette Monticelli et Haïm Menahem, co-directeurs du lieu. Autour de ces réflexions est né « un espace de création collective » dont l’aboutissement


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18 Quels artistes apporteront leur(s) histoire(s) à celle que l’on vient écouter dans nos visites touristiques estivales ? On pourra suivre 4 circuits pensés pour orienter le public depuis les sites les plus connus jusqu’aux plus secrets. Dans l’Hérault, l’abbaye de Gellone à Saint-Guilhem-le-Désert accueillera dans son musée lapidaire une imposante sculpture en bois et polyester de Nick Ervinck. Le château de Baulx à Saint-Jean-de-Buèges verra son donjon surmonté d’un étendard de Dominique Gauthier (réalisation in situ). Et l’hôtel Flottes de Sébasan à Pézenas sera habité par une installation en volumes faite de tôle pliée et thermolaquée de Suzy Lelièvre (réalisation in situ). Dans l’Aude, deux installations à Narbonne : dans le palais des Archevêques, des peintures de Claude Viallat, et dans l’abbaye de Fontfroide, une sculpture de grand format (un bronze à patine blanche) de Jaume Plensa. À Lagrasse, le dortoir de l’abbaye accueillera une installation de Christian Jaccard (réalisation in situ). Rainer Gross investira le château et les remparts de la cité de Carcassonne, avec une installation sculpturale (réalisation in situ). À Decazeville dans l’Aveyron, deux installations sonores réalisées in situ (Emma Dusong et Arno Fabre). En Ariège enfin, le château de Foix accueillera en extérieur une grande sculpture en polyester de Nick Ervinck, et l’abbaye de Combelongue à Rimont se parera d’un hibou vidéo de Bertrand Gadenne. ANNA ZISMAN

les deux pieds sur terre, la tête dans les nuages 04 92 64 27 34 www.theatredurance.fr

04160 Château–Arnoux—Saint–Auban

Scène conventionnée Pôle régional de développement culturel Pôle transfrontalier

In Situ – Patrimoine et art contemporain 17 juin au 17 septembre patrimoineetartcontemporain.com

verra le jour lors de ce mois de juin. Pendant leur résidence, Les Pas Perdus ont exploré le quartier, rencontré ceux qui y habitent, ceux qui y travaillent, pour aller cueillir le rêve dans les esprits et préparer l’installation plastique et sonore à venir. Avec leur « studio volant », une cabine qui a arpenté les rues entre novembre 2016 et mars 2017, ils ont réalisé un « audit songial », fait d’images et de sons, qui seront mis en scène. Avec des enfants de maternelle et leurs parents, ils ont conçu un « orchestre de bouche », reproduisant les sons qui émaillent l’environnement de leur quartier, et qui seront diffusés pendant la manifestation. Beaucoup d’autres surprises animeront la place du Théâtre Joliette-Minoterie, dont un déjeuner des songes, le 16 à midi, ou un Bal à Fond, rumba non-stop, le 17 à partir de 22 h. Prêts ? Rêvez ! JAN-CYRIL SALEMI

Joliette des Songes 15 au 18 juin Place Henri Verneuil, Marseille Théâtre Joliette-Minoterie, Marseille 04 91 90 74 28 theatrejoliette.fr

WWW.FESTIVAL-CARAVANSERAIL.COM


62 festivals

On plonge dans l’été Que faire cet été au Musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée ?

P

as de nouvelles grosses expositions prévues au MuCEM pendant la période estivale, mais outre les espaces consacrés aux collections permanentes, Vies d’Ordures se poursuit jusqu’au 14 août, Graff en Méditerranée jusqu’au 2 octobre, et Aventuriers des mers jusqu’au 9 octobre (lire nos critiques sur journalzibeline.fr). S’ouvre toutefois une double exposition plus légère, répartie entre le Fort Saint-Jean et le Centre de Conservation et de Ressources du musée, à la Belle de Mai, Document bilingue. Les artistes Yto Barrada, Omar Berrada, Érik Bullot, Uriel Orlow et Abril Padilla y proposent une « activation » d’objets issus des fonds de l’ancien Musée national des Arts et Traditions populaires. En prenant en compte leur double statut, « esthétique ou poétique, mais aussi témoignage à valeur ethnographique ». © Diego Ravie

Rencontres Le cycle La voix des objets, consacré à l’histoire coloniale de la France en Algérie, se poursuit deux lundis par mois. Le 12 juin, l’écrivain Alexis Jenni et l’historien Fouad Soufi évoqueront la place de la guerre dans les mémoires ; le 19, il s’agira de Dépasser 1962, avec Boris Cyrulnik et les historiens Benjamin Stora et Ahmed Djebbar. Les 17 et 18 juin, le MuCEM accueille une poétesse et artiste, Etel Adnan, qui présentera Le poids de la lune, série de toiles inédites. Dans le cadre du cycle Nature, culture, ordures,

c’est un philosophe, Bernd Scherer, qui questionnera L’âge de l’homme, un défi pour la culture et la connaissance. Par ailleurs, l’Institut Méditerranéen des Métiers du Patrimoine consacre deux journées d’études, les 12 et 30 juin, aux arts de l’islam en France, puis à l’île, comme révélateur de l’état du monde (en accès libre, sur inscription : i2mp@ mucem.org). Enfin au CCR de la Belle de Mai, les commissaires de l’exposition Document bilingue Sabrina Grassi et Érik Bullot invitent à une visite-discussion le 6 juillet.

Jeunesse Tout l’été, le MuCEM a prévu de quoi occuper les enfants, avec des propositions d’activités liées aux expositions en cours. Un espace ludique est dédié aux 6-12 ans au Fort SaintJean, en partenariat avec le service éducatif de l’Institut du monde arabe. Les plus jeunes se régaleront à larguer les amarres pour de petites aventures en mer, à l’occasion de multiples jeux et récits, ou feront connaissance avec les spécificités de l’agriculture méditerranéenne, à travers des jeux d’observation,

L’homme deux fois sage Le philosophe Dominique Bourg est intervenu le 16 mai à la Bibliothèque Départementale des Bouches-du-Rhône, dans le cadre du cycle de conférences Quel(s) monde(s) habiter aujourd’hui ? proposé par Opera Mundi. Le jour même, on apprenait que son compagnon de route et de réflexion (il est vice-président de la Fondation Nicolas Hulot) devenait ministre de la transition écologique et solidaire. Si ce dernier conserve son portefeuille, on peut espérer qu’il aura quelque latitude pour défendre les dossiers brûlants de l’environnement, si peu évoqués pendant la campagne présidentielle. Dominique Bourg s’est montré bon vulgarisateur, pour traiter de la « Terre qu’il nous faut habiter, loin des rêves de transhumanisme et de vie extra-planétaire ». Celle où l’artificialisation des surfaces galope, la fonte des glaces s’accélère, la biodiversité s’effondre, où l’on ne trouve plus un endroit sans traces de notre activité, nous,

les représentant de l’espère homo sapiens sapiens, les hommes deux fois sages... « L’humanité est vraiment devenue une force géologique, et au lieu de s’en glorifier, on devrait réaliser qu’on ne domine rien du tout, on n’a rien prévu de tout cela. » Le constat est glaçant, mais paradoxalement, le philosophe et son discutant, François Gemenne, sont tombés d’accord ce soir-là pour trouver que l’époque est stimulante, parce que pour la première fois dans l’histoire de l’humanité, nous risquons de disparaître entièrement si nous ne changeons pas de modèle... « On ne maintiendra de croissance qu’en ratiboisant la Terre, ça ne tient pas sur le long terme : on n’aura plus rien à manger. » G.C.

La conférence Habiter en terriens à l’Anthropocène a eu lieu le 16 mai à la BDP13, Marseille


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de toucher et d’odorat. Tandis que les plus grands participeront à un atelier Do it yourself pour suivre le parcours des objets que l’on recycle, ou vivront une chasse au trésor en famille dans les espaces du musée.

Festivals De nombreuses manifestations sont régulièrement accueillies au MuCEM, dans le cadre de partenariats féconds. Cet été, le Festival de Marseille (lire p.24) revient avec plusieurs spectacles de danse -dont celui de clôture, Kalakuta Republik, de Serge Aimé Coulibalyet une installation vidéo de la chorégraphe Bouchra Ouizguen, visible du 30 juin au 9 juillet, en accès libre. Le FidMarseille sera également présent du 11 au 17 juillet (lire p.58), pour de nombreuses projections, mais également à l’occasion de la 17ème Nuit de la Radio, programme d’écoute libre et collective d’archives sonores (conjointement avec l’INA,

France Culture et Radio France). Le festival Jazz des cinq continents (lire p.35) propose quant à lui une affiche exceptionnelle : quatre concerts le soir du 22 juillet, de Yonathan Avishaï, Cyril Achard et Géraldine Laurent, Piers Faccini et le saxophoniste Guillaume Perret.

Plan B

GAËLLE CLOAREC

Si avec tout ça vous ne trouvez pas votre bonheur, pas d’inquiétude, le musée a prévu un Plan B ! Du 25 au 29 juillet sur la plage du Prado, tous les jours de 16h30 à 21h, les enfants retrouveront une bibliothèque jeunesse, des jeux de société ou des conteurs, pendant que les adultes prendront l’apéro (zéro déchets) à la guinguette, avec DJ set, performance ou concert. Les journalistes d’Urban Prod seront présents pour animer Radio MuCEM : interviews, dédicaces, quiz, et siestes sonores. Le tout gratuit.

GRAND CORPS MALADE

ZABOU BREITMAN

Du 1er au 5 août au Fort Saint-Jean en revanche, le Plan B est payant et son prix de 11 à 15 € comprend l’accès aux expositions, une promenade sonore, et divers spectacles (notamment de cirque, avec le collectif La Bascule et El Nucleo) et concerts, souvent électro mais aussi folk-rock (Oh ! Tiger Mountain) ou opéra-théâtre (Rara Woulib).

Retrouvez Comme au MuCEM, notre traversée webradiophonique mensuelle du musée, sur journalzibeline.fr/zibelineweb-radio, avec sa Chronique des libraires, l’architecte Léon Telvizian sur la crise des ordures à Beyrouth, le philosophe Bernd Scherer sur l’anthropocène, et la chorégraphe Bouchra Ouizguen.

mucem.org

KERY JAMES

2017 SÉVERINE CHAVRIER

RAPHAËL PERSONNAZ

DOROTHÉE MUNYANEZA

MICHA LESCOT

PAULINE BAYLE

LAETITIA CASTA EMMA DANTE

NASSER DJEMAÏ

2018 OLIVIER MARCHAL MAËLLE POÉSY

FARIDA RAHOUADJ

JANE BIRKIN

• | L E L I BE R T É , SC È NE NATIO NA LE DE TO ULON — 0 4 9 8 0 0 5 6 7 6 — WWW.T HEAT RE-LIB ERT E . FR — # TLI B

JÉRÔME DESCHAMPS

CYRIL TESTE

Illu st ra ti o n — Zos en & M i n a Hama da

AMIRA CASAR


64 au programme spectacles bouches-du-rhône var

La Fresque

Les Trois sœurs

La dernière création d’Angelin Preljocaj s’inspire d’un conte chinois : un guerrier fatigué trouve refuge à l’intérieur d’un temple et se laisse absorber par une fresque. Dans cet univers parallèle il trouve l’amour... Jouant d’un peu d’orientalisme et de beaucoup de superpositions temporelles, d’étirements, d’accélérations et de chocs, cette Fresque dit aussi la rencontre (impossible ?) du masculin et du féminin, du plaisir et de l’interdit...

Suite à une résidence de création en février et juin au 3bisf, Danielle Bré propose son adaptation d’Anton Tchekhov à l’ère contemporaine, en invitant les spectateurs à « jouer aux Trois sœurs avec les quatre acteurs et le musicien présents sur le plateau ». Une façon pour elle de sonder les impasses d’une société frappée de morosité, en dressant le parallèle entre l’univers du dramaturge russe et le nôtre.

15 au 17 juin La Criée, Marseille theatre-la-criee.com

Adaptation Zone

© Nicholas Pettit

Dieu est mort. Et moi non plus j’me sens pas très bien ! 29 juin au 1er juillet Quai du rire, Marseille 04 91 54 95 00 lequaidurire.com

Nicholas Pettit et Corinne Rochet signent une chorégraphie pour dix jeunes danseurs, en abordant ce qui fait d’eux, justement, des artistes : le moment où, en posant le pied sur scène, ils s’offrent à leur public. Une Découverte dansée de la Cie Junior Le Marchepied, venue de Suisse. Le même soir aura lieu une présentation du travail de Georges Appaix avec les élèves de Coline, formation du danseur interprète à Istres.

30 juin 3bisf, Aix en Provence 04 42 16 17 75 3bisf.com

© Wendy Mottard

04 91 54 70 54

Avant de s’installer au Théâtre des Barriques, à Avignon, durant le Festival Off (voir p 18-19), la Compagnie du Grand Soir débarque à Marseille pour donner trois représentations de Dieu est mort. Entre les règlements de compte avec l’enfance, la religion imposée, les premières fois, les chansons de Michel Sardou, les séances chez le psy (Woody Allen n’est pas loin), les cours de philo qui dégénèrent… Régis Vlachos (interprète et auteur du texte) et Charlotte Zotto nous régalent ! Pour l’occasion, de belles surprises nous attendent, pendant le spectacle et après la représentation du 29 juin, avec un débat (Faut-il avoir peur des croyants ?) animé par les Philosophes Publics en présence de Marc Rosmini et Denis de Casabianca.

© Norbert Ghisoland

© Jean-Claude Carbonne

Dieu est mort…

Flash mob La chorégraphe Josette Baïz collabore régulièrement avec l’équipe de Scènes&Cinés. Cette fois, elle mettra son talent au service d’une flash mob, ces dispositifs de rassemblement dans l’espace public, en apparence spontanés mais convenus à l’avance, pour livrer une performance artistique au grand plaisir des passants, avant de se disperser. En collaboration avec les associations de danse de Port-Saint-Louis-du-Rhône, lors du festival #PSLAtoutjeunes.

Les Oiseaux Selon son metteur en scène Laurent Pelly, Les Oiseaux, cette pièce d’Aristophane vieille de 2 400 ans, « est une comédie musicale avant la lettre », avec pour thème principal « la nature tout court, et la nature humaine ». Tout en offrant une satire virulente du système démocratique, c’est vous dire si elle est encore d’actualité ! 18 comédiens sont sur scène, dont 16 incarnent des volatiles : corneilles, geais, huppes ou rossignols.

1e juillet Hors les murs Espace Gérard Philippe, Port-Saint-Louis-du-Rhône 04 42 48 52 31 scenesetcines.fr

© Polo Garat

24 juin Klap Maison pour la Danse, Marseille 04 96 11 11 20 kelemenis.fr

13 au 17 juin Le Gymnase, Marseille 08 2013 2013 lestheatres.net


65

Le cas Sneijder Habitué des adaptations d’œuvres littéraires, Didier Besace revient avec la mise en scène du livre de Jean-Paul Dubois : Le cas Sneijder. Survivant à un accident dramatique, Paul Sneijder pose un nouveau regard sur l’univers qui l’entoure. Pierre Arditi – acteur fétiche du metteur en scène – joue ici un homme fragile, cherchant à comprendre le monde moderne écrasant dans lequel il vit. Aussi profond que drôle, le héros oscille entre désenchantement, amertume et hypocrisie.

© Nathalie Hervieux

15 au 17 juin Châteauvallon-Scène Nationale, Ollioules 04 94 22 02 02 chateauvallon.com

Les duos du ballet Preljocaj Pour ce spectacle interprété à la nuit tombée, le chorégraphe Angelin Preljocaj offre une sélection des inoubliables duos de danseurs, parmi ses plus belles pièces : Spectral Evidence, Le Parc, La Stravaganza, Roméo et Juliette, Les Nuits, Suivront mille ans de calme... À l’image de nos vies amoureuses, les amants se cherchent, se trouvent, se déchirent, se mélangent et rencontrent tour à tour le plaisir, la douleur, la perte, la mort. Dans ces corps-à-corps, la passion éclate dans toute sa splendeur.

Roméo et Juliette © Jean-Claude Carbonne

1er juillet Châteauvallon-Scène Nationale, Ollioules 04 94 22 02 02 chateauvallon.com

Réversible La Cie Les 7 doigts de la main propose une nouvelle création circassienne mêlant musique, danse et théâtre, dans laquelle les artistes remontent le temps pour rencontrer leurs aïeux et découvrir leur vie. Le dévoilement de leur histoire passée pourrait nous aider à comprendre notre présent et à répondre à nos universelles interrogations : Qui sommes-nous ? Quelles sont nos racines ? Comment entendre nos voix intérieures ? Parce qu’il n’est jamais trop tard pour prendre en main son avenir... 7 & 8 juillet Châteauvallon-Scène Nationale, Ollioules 04 94 22 02 02 chateauvallon.com © Jerome Guibord


66 au programme musique bouches-du-rhône var hérault

Récital Juan Diego Florez

Trio Mazzotta Fathi Fernandez

16 juin Opéra de Marseille 04 91 55 11 10 opera.marseille.fr

Croquefer De son titre complet, Croquefer ou le dernier des Paladins, on pourrait se croire dans un conte médiéval… Il s’agit d’une de ces raretés que Jean-Christophe Keck a plaisir à faire découvrir au public de l’Odéon lors des Dimanches d’Offenbach à l’Odéon. Guerre picrocholine entre Croquefer (Frank T’Hézan) et Mousse-à-mort (Maxime Cohen) avec une fin qui renvoie librettiste et compositeur à l’asile et les belligérants à la débâcle de leurs intestins… Inénarrable et jubilatoire avec le piano de Diego Mingolla !

04 96 12 52 70

18 juin Odéon, Marseille odeon.marseille.fr

© Sébastien Normand © X-D.R.

Au cœur de ce trio né à Marseille, un dialogue d’une intensité rare se noue entre Maria Mazzotta (aussi au tamburello) et Shadi Fathi, soliste virtuose de shourangiz (sorte de sitar) dans un répertoire qui unit les cultures traditionnelles du sud de l’Italie influencées par l’Albanie et la Grèce, d’Iran, du Kurdistan et du Tadjikistan. Accompagnées du percussionniste Michael Fernandez, elles proposent une nouvelle interprétation de ces chants, nourries de sonorités actuelles.

3 juillet Abbaye Saint-Victor, Marseille 04 91 54 70 54 theatre-la-criee.com

23 juin Cité de la musique, Marseille 04 91 39 28 28 citemusique-marseille.com

Voix nomades

OJM La Méditerranée en partage Dans le cadre de l’Académie du Festival d’Aix, la traditionnelle session symphonique de l’OJM offre à cent jeunes musiciens une expérience professionnelle unique au cœur de la vie d’un orchestre. Cette année, ils auront le privilège de jouer et d’être formés par des chefs comme Pablo Heras-Casado et les musiciens du London Symphony Orchestra. La figure de Shéhérazade sera lumineuse dans la Suite symphonique de Rimski-Korsakov et l’œuvre éponyme de Maurice Ravel, clôture enlevée du Festival d’Aix, avant une tournée en Méditerranée. (voir p 50-51)

Ensemble Musicatreize © Guy Vivien

Il est sans doute l’un des ténors belcantistes les plus demandés sur les scènes internationales. Juan Diego Florez fait escale à l’Opéra de Marseille, accompagné par le piano de Vincenzo Scalera, et interprètera des extraits d’opéras de Mozart, L’enlèvement au sérail, Mithridate, roi du Pont, Puccini, Gianni Schicchi, La Bohème, Massenet, Werther, Verdi, I Lombardi, La Traviata, Rossini, Semiramide et des airs de Leoncavallo, Aprile, Mattinata, Vieni amor mio,... Irrésistible !

Il y a trente ans déjà que Marseille Concerts proposait avec la Messe de Sainte Cécile (la patronne des musiciens), de Gounod, sa première édition. À l’occasion de cet anniversaire, l’œuvre sera reprise, précédée de la Symphonie n°1 de Bizet (œuvre de jeunesse, Bizet n’a alors que 17ans !). Le Chœur régional PACA et l’Orchestre Régional Avignon Provence accompagneront de talentueux musiciens de la région en l’abbaye Saint-Victor, Lucile Pessey (soprano), Luca Lombardo (ténor), Florent Leroux-Roche (Baryton).

© Vincent Beaume

Juan Diego Florez © Kristin Hoebermann

30 ans ! Marseille concerts

20 juillet GTP, Aix-en-Provence 08 2013 2013 lestheatres.net

04 91 54 70 54

21 juillet La Criée, Marseille theatre-la-criee.com

Création 2017, sur une co-commande de l’Ircam Centre Pompidou, du Festival Messiaen au pays de la Meije et de Musicatreize, Voces Nόmadas (Voix Nomades) d’Alberto Posadas explore l’idée du nomadisme sur trois niveaux de lecture : déplacement grâce au traitement acoustique des voix des douze chanteurs, texte dont l’agencement des lettres forme de nouveaux mots, et métaphore du sort des populations tragiquement confrontées aux exils. Un petit bijou ciselé et bouleversant. 13 juin Salle Musicatreize, Marseille 04 91 00 91 31 musicatreize.org


LAMOMALI DE -MAVEC TOUMANI & SIDIKI DIABATÉ

Jazz à Sète

France-Mali

CALYPSO ROSE

OPPA Tournée d’été

Youn Sun Nah © Dan Warzy

21 juin au 9 juillet Pays d’Aix 08 2013 2013 lestheatres.net

Jazz à Sète, c’est 15 concerts sur 7 soirées au Théâtre de la mer, avec des musiciens issus des scènes du monde entier (Ed Motta, Donny McCaslin, Tord Gustavsen +Youn Sun Nah, le Hot 8 Brass Band, le trio exceptionnel constitué de Jean-Luc Ponty, Biréli Lagrène et Kyle Eastwood, Maïcee ), mais aussi des concerts gratuits en ville, tous les jours de 11h30 à 13h30, des rencontres avec les artistes invités en matinée, de 11h à 12h15, des siestes musicales à Balaruc-les-Bains, des expositions De quoi nourrir une semaine bien copieuse !

Festival Cello Fan Le Pays de Fayence pour la 17ème année consécutive retrouve le beau Festival de violoncelle Cello Fan. Pour cette édition, la figure emblématique de Beethoven, un florilège de ses symphonies, son Triple Concerto, mais aussi des compositeurs marquants dans l’histoire du violoncelle, Berteau, Doport, Romberg, Kraft, un hommage à Philip Glass, un détour par le bandonéon de Juan Jo Mosalini et le tango, des concerts narratifs (Sur Les Pas de Lise avec M-T Grisenti et J-P Raymond), les Fantaisies Musicales de Valérie Aimard, les violoncellistes fondateurs du Festival (Florent Audibert, P-A de Rocca Serra…), de superbes pianistes, des surprises… Un régal !

13 au 20 juillet Théâtre de la mer, Sète jazzasete.com

Juan José Mosalini © Hervé Le Gall

La chauve-souris

30 juin au 4 juillet Pays de Fayence 04 94 47 75 77 caillan.fr cello-fan.com

De la fête, du champagne, de la valse, viennoise, bien entendu, des crinolines, des masques, des histoires de vanité blessée et de vengeances Et des airs que l’on n’oublie pas. Le monde n’est plus qu’un tourbillon de notes dans la partition de Strauss sur le livret de Meilhac et Halévy. Le Chœur de l’Opéra national Montpellier Occitanie et l’Orchestre national Montpellier Occitanie sont placés sous la houlette de Jérôme Pillement, aux côtés du Collectif 1B2P/TragédieMonstre dans une mise en scène de Benoît Bénichou. 5 au 6 juillet Domaine d’O, Montpellier 08 00 200 165 domaine-do-34.eu

Conception & réalisation : Christophe Alglave, Anaïs Bellot / Licences cat. 2-140355 et 3-140356

Trinidad & Tobago

Le Beethoven de la Symphonie n°3 en mi bémol majeur, op. 55, dite Héroïque et son Ouverture de Coriolan (opus 55 en do mineur) se lovent dans la tournée d’été de l’Orchestre Philharmonique du Pays d’Aix, dirigé avec enthousiasme par son chef, Jacques Chalmeau. La Symphonie Héroïque dédiée au départ à Bonaparte devint plus laconiquement « à la mémoire d’un grand homme » lorsque ce denier fut couronné. À l’inverse, Coriolan renonce à la bataille, ému par les supplications de sa famille. L’été ne manque pas de réflexions

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68 critiques littérature

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Aux premiers beaux jours

Pour sa première édition, le nouveau festival littéraire marseillais a visé juste ! En voici quelques traces en éclats...

D

urant ces très beaux jours la littérature s’est frottée aux formes contemporaines les plus diverses, dans un esprit d’ouverture et d’exigence toujours joyeux. Oh les beaux jours ! Un nom décidément bien choisi pour ce rendez-vous avec les livres et les auteurs.

Match d’ouverture La manifestation a démarré fort, par une soirée entièrement consacrée au football. Pas évident, quoiqu’on soit à Marseille. Les amateurs de littérature répondraient-ils présents pour Le match des matchs, mis en espace par Alexandra Tobelaim au théâtre du Merlan ? Eh bien oui, ils l’ont fait, et avec enthousiasme, jouant le jeu à fond, comme s’ils étaient au stade. Devant une salle comble, sur une scène transformée en pelouse -mi table de lecture, mi tribune- et peuplée d’écrans, huit auteurs passionnés de ballon rond se sont renvoyé la balle avec une maestria qui n’avait d’égale que celle des joueurs mythiques évoqués au cours de cette performance. En direct ou en différé (Garcin et Bertina, absents, avaient envoyé leur contribution vidéo), ils ont lu les textes écrits pour l’occasion -dommage d’ailleurs qu’aucune édition n’en soit à ce jour prévue-, prouvant, si c’était nécessaire, qu’un club, un joueur ou un match peuvent « faire récit ». Splendeur et décadence de Garrincha, le « moineau des bidonvilles » (Jean-Paul Delfino), douceur de Lionel Messi (Sylvain Prudhomme), triangle magique des Girondins de Bordeaux (Mathieu Larnaudie) ou club de lose (Kris), deuxième mi-temps d’un Liverpool-Milan d’anthologie (Maylis de Kerangal) ou OM/ PSG « reptilien » (Philippe Pujol), chacun a su amener le public sur son terrain ; tous ont marqué.

Marseille, cité inspirante Parmi les propositions du festival, Regards sur Marseille. Avec un plein feu à La Criée sur Claude McKay qui arpenta le Marseille interlope des années 30 et en tira le magnifique Banjo. Une journée entière était consacrée à la (re)découverte de cet auteur jamaïco-américain : rencontres, ballade musicale et littéraire et surtout concert dessiné. Looking for Banjo ou les affres de la création, en dessin et en musique. Pas un mot, pas une bribe du texte de Mc Kay ; pourtant en sortant, on avait tout compris. Le principe ? Simple. Côté jardin, cinq dessinateurs ; côté cour, le saxophoniste Raphael Imbert et son quartet ; au centre un grand écran, sur lequel se croque, feuillet après feuillet, la genèse d’un roman devenu culte. Tandis que s’élancent les improvisations musicales d’une grande richesse mélodiques, les dessinateurs s’affairent, à deux, à trois, à tous….et l’histoire prend forme, prend vie. Du grand art pour un hommage mérité.

Hip hop Où mieux qu’à La Friche, l’un des lieux qui a accompagné la naissance du rap à Marseille, s’interroger sur les liens entre littérature et hip-hop ? Sur les 40 ans d’histoire de ce mouvement polymorphe et bondissant, de son jaillissement dans le Bronx à son ancrage dans le Dirty South marseillais ? Dans l’effervescence du mercredi, skateurs et flâneurs se mêlent au public plus classique autour du plateau de Radio-Grenouille où se succèdent des tables rondes animées par Simon Morin, partiellement inaudibles sur place, ambiance festive oblige, opportunément relayées par les ouvrages présents comme l’anthologie du rap new-yorkais de Pierre-Jean Cléraux ou le puissant Captain Rugged BD- MP3 du graffeur

Native Maqari associé au rappeur Keziah Jones ; le roman documentaire de Laurent Rigoulet Brûle, présenté par son auteur en dialogue avec Tewfik Hakem met en mots cette insurrection musicale non-violente (la battle défie par l’énergie de la langue et de la danse) née dans les ruines du rêve américain, nourrie de l’art oratoire des prédicateurs et de la scansion funky des marches pour la liberté ; pas de pensée politique au départ mais la rage d’exister. Quant au « micro français » si généreux depuis les années 80, il fait un bout de chemin avec une littérature de l’oralité urbaine, une « break langue » imagée et pleine de vie même à l’écrit : en témoignent le roman de Faîza Guène (Un homme ça ne pleure pas ) ou la passionnante analyse de Bettina Ghio Sans fautes de frappe / rap et littérature. Pour abattre définitivement les cloisons, les artistes ont convoqué ensemble prose et poésie, quatuor à cordes (compositions de Issam Krimi ) et DJ, compositions personnelles et patrimoine culturel ; Giorgio « une grandmère qui part, c’est une bibliothèque qui meurt » et S. Pri Noir plus ancré dans sa life « j’croyais pas qu’un jour j’verrai la juge » ont croisé leurs rimes avec celles de Baudelaire ou de Desnos ; force est de constater que le lyrisme s’accommode bien des lyrics rap et de leur vigoureux expressionnisme !

La bibli de Brigitte Denis Lavant a remplacé Brigitte Fontaine, souffrante, et lu les textes qu’elle avait choisis. Vêtu comme un clochard céleste, il bondissait sur scène et faisait (trop ?) sonner sa voix à la grave intensité. Le choix des textes est éclectique et sensible, d’Alice au pays des merveilles aux Misérables et sa Tempête sous


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Le match des matchs, avec Maylis de Kerangal © Pierre Morales

un crâne, un conte de Mme d’Aulnoy, Nedjma de Kateb Yacine, les Liaisons dangereuses…. Lunettes noires et ombrelle de dentelle blanche, Brigitte Fontaine interpelle directement Rimbaud dans une vidéo : « Cher Arthur, (…) Tu as mis les pieds là où les anges n’oseraient pas s’aventurer. » Son texte Chute et ravissement lui est adressé comme un hommage fraternel au-delà de la mort. Car il est question de la disparition de ce monde, souligné par les musiques demandées à Raoul Lay, chef de l’Ensemble Télémaque ; l’ouverture avec l’air du Commandeur de Don Juan, puis les Funérailles de la Reine Marie de Purcell. On retrouve aussi les musiques composées par Areski Belkacem dont Raoul Lay a réécrit les partitions magistralement interprétées par ses musiciens. Natalie Dessay a, quant à elle, proposé une divine récréation avec L’air des bijoux de Faust en réponse aux éructations du capitaine Haddock. Une soirée intense, qui aurait sans doute gagné à installer des silences, et un meilleur équilibre sonore entre la musique et les textes.

La langue, une fenêtre Le samedi 27 mai, la grande salle de La Criée débordait de lecteurs enthousiastes, venus écouter Russell Banks et Kamel Daoud. Chacun dans son style -avec une belle voix profonde pour le sémillant américain, un débit de mitraillette et l’air de quelqu’un qui n’a

jamais été naïf pour l’auteur et chroniqueur algérien- ils ont évoqué la question de la langue. Russell Banks, qui travaille depuis 25 ans avec le même traducteur de l’anglais au français, a l’impression de faire « œuvre commune » avec Pierre Furlan. Kamel Daoud, lui, évoquait son choix d’écrire en français et non en arabe par un apprentissage nourri de désir. « D’autres l’ont vécu dans la soumission, je l’ai vécu dans la dissidence, par effraction, avec des livres clandestins où je cherchais les passages érotiques. En Algérie le clergé s’exprime en arabe, c’est notre latin, la langue de la liturgie, de la caste dominante, pas une langue vivante. » Pour expliquer à son fils l’importance d’apprendre différents langages, il lui dit qu’une maison avec plusieurs fenêtres est mieux éclairée. Voilà une belle métaphore qui pourrait s’appliquer à toute la littérature, à chaque livre découvert par un esprit curieux. Voilà aussi peut-être ce que ces deux écrivains pourraient expliquer à Donald Trump, dont Russell Banks déplore qu’il soit un « ignorant assumé, capable de commettre des crimes », tandis que Kamel Daoud estime que de toutes façons les USA dans leur ensemble sont un « pays sans métaphore ».

la traduction française du troisième volume, enfin disponible. Les extraits se concentraient sur l’enfance des deux petites écolières dans le Naples des années 50. La lecture, trop ou trop peu théâtralisée, hésitait entre deux partis, et, comme le roman, semblait entrainer l’adhésion des femmes et moins celle des hommes. Pourront-ils un jour lire des romans peuplées d’héroïnes comme les femmes lisent depuis l’enfance des romans peuplés de héros ? La rencontre avec Maylis de Kerangal rappelait que ce clivage peut s’effacer : seule autrice pendant la soirée foot, dans un festival dirigé par des femmes mais où elles furent finalement assez rares sur scène, sa littérature et sa façon modeste et ferme d’en parler touchent chacun. Une rencontre simple, entrecoupée de lectures et de vidéos de son prof de philo, de lectures de Corniche Kennedy, Réparer les Vivants ou Naissance d’un pont. Dans l’intimité, rendue possible, de la grande salle de la Criée ! FRED ROBERT, MARIE JO DHO, CHRIS BOURGUE, GAELLE CLOAREC ET AGNÈS FRESCHEL

Femmes Natalie Dessay a lu L’amie prodigieuse d’Elena Ferrante, dont le monde entier se délecte et dont nombre de lectrices attendaient

Oh les Beaux jours ! s’est déroulé à Marseille du 23 au 28 mai


70 critiques spectacles

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Pour la deuxième année la Scène Nationale a proposé un week-end de petites formes, hors de ses murs. Dans la Cité des Flamants, au Nord de Marseille

Envol aux Flamants de textes contemporains accompagnés de musique concrète qu’ils fabriquent avec des jouets d’enfants. Un grand plaisir, littéraire et musical, inaccessible aux enfants de moins de 10 ans qui trépignaient devant la porte, comme devant les confessionnaux de In-Two : on les fit dessiner, écrire des poèmes, et ils reçurent la promesse qu’on ferait des Lectures et des Confessions rien que pour eux...

Opéra différent

Opéra 22 de Marianne Suner © Vincent Castelin

O

n le dit, et certains le font. Pour offrir la culture à tous il faut la déplacer, dans ses pratiques et dans ses espaces. Et, conjointement, nourrir les œuvres des rencontres avec ceux qui restent habituellement à la porte des théâtres. Le temps des Envolées s’est implanté le 13 mai au cœur de la Cité des Flamants, dite « prioritaire » ou « difficile », où le chômage et les faibles revenus sévissent en masse. Et les propositions artistiques ont réuni un public composite, fait d’habitants de la cité, de familles, d’enfants et de femmes surtout, mêlés à quelques échappés du centre ville venus goûter aux spectacles proposés, à la paella géante partagée, aux gâteaux maison du Centre social... Une convivialité qui persista malgré la petite pluie, bien au-delà des horaires prévus. Au programme ? Une performance délirante de Camille Boitel, qui opère ici une métamorphose radicale de son art : habituellement acrobate muet et virtuose, voici qu’il déplace son comique, s’empare de la parole et ne la lâche plus ! Son adversaire n’est plus la matérialité têtue des objets mais un conférencier qui

le malmène, le pousse dans ses retranchements par son mutisme acharné... Une Conférence sur la jubilation jubilatoire. Vincent Martinez (Cie Mauvais Coton) proposait un exercice plus classique, autour et sur un mât planté sur un socle sphérique. Un Culbuto Tangage poétique qui impressionna les enfants, avec lesquels l’acrobate instaurait une complicité faite de proximité, et d’admiration pour l’exploit. Une intimité que l’on retrouvait également dans les récits susurrés au spectateur unique des confessionnaux d’Alexandra Tobelaim. Dans In-Two on vous raconte une histoire, à vous, et vous sentez le regard de l’acteur, que vous entrevoyez par bribes, et il vous tend la main que vous serrez. Un rapport étrange, intimidant, de trois minutes dispensées entièrement à chacun, et qui mettent en jeu le spectateur sans qu’il y échappe. La proposition dura tard dans la soirée, tant les spectateurs voulaient goûter chaque expérience, au-delà de la première histoire racontée. Même succès pour Muerto Coco : dans leur caravane on entre à 20, bien serrés, et on écoute leurs Lectures (Z)électroniques, montages

La veille d’autres enfants « des quartiers » étaient sur scène. Marianne Suner depuis des années associe sa pratique de compositrice et de chef avec un travail de fond dans les écoles, les collèges, les centres sociaux, et un atelier de chant pour jeunes adolescents. Tous ceux-là étaient sur scène, et d’autres encore, qui avaient fait la bande électronique, dans la salle. Plus d’une centaine d’enfants, d’ados, de retraités, venus des quatre coins de la ville, surtout du Nord. Avec quatre musiciens pour les accompagner, et Marianne Suner pour les diriger tous. Son Opéra 22 dispense une musique qui sait allier une contemporanéité exigeante avec des mélodies chantantes, des répétitions et des jeux de rythmes adaptés aux capacités des enfants. Les jeunes solistes donnent de la voix, les chœurs se déplacent savamment, on ne comprend pas très bien les paroles mais on saisit l’histoire de cette société futuriste qui n’admet plus la différence, et où la perfection s’est transformée en uniformisation morbide. Ce formidable éloge de la différence, de la couleur et de la vie, mériterait plus de moyens pour fabriquer des costumes, pour concevoir une scénographie et une mise en scène à la hauteur des énergies et du talent musical mis en œuvre. Lorsqu’on ne les délaisse pas, nos « quartiers » aiment l’art ! AGNÈS FRESCHEL

Les Envolées se sont déroulées les 12 & 13 mai au Théâtre du Merlan et au Centre Social Les Flamants Iris, Marseille



72 critiques musiques

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La musique contemporaine en partages

Le festival Les Musiques a réussi son pari, et sorti la musique contemporaine de l’entre-soi

P

ortes ouvertes au Module, large place faite aux musiques improvisées programmées par Jean-Marc Montera, dispositif interactifs, croisements avec la danse et le théâtre dans les lieux emblématiques marseillais, et programmation des ensembles du territoire : l’ouverture esthétique généreuse du GMEM, Centre national de création musicale, porte ses fruits. Le public est là, varié, du curieux à l’expert, des enfants aux plus âgés en passant par les jeunes amateurs de musiques actuelles. Quelques retours d’un festival riche en sons...

Massages, plongée, interactivité C’est sur le mode de la promenade que le nouveau Module (voir Zib 106) se visitait durant le week-end d’ouverture : une installation de Charles Bascou et Christian Sébille permettait de faire moduler des sons (hauteur, rythme, volume) avec ses mains, ses bras, son corps. Voir le son et le produire est magique pour les enfants, et pas seulement ! Les Massages sonores de Thierry Madiot et Yanik Miossec, à l’inverse, demandaient de fermer les yeux et de « toucher » le son délicatement dispensé au creux des oreilles... pour redécouvrir notre stéréoscopie naturelle,

et cette sensation indéfinissable de reconnaître quelque chose sans l’identifier. Dans la salle de création une commande des monuments historiques à Christian Sébille. Une de ses Miniatures, portant le chiffre 13, dans cette salle sphérique, faisait enfler et circuler le son, capté et identifiable parfois, faisant surgir la mer, l’isolement, le vent, toute la plastique, l’imaginaire et l’épaisseur du bruit, ses stries et ses trajets...

Ensembles d’ici A l’Opéra pour le traditionnel Matin Sonnant le public était tout autre qu’à la Friche, habitué, musicien, plus âgé aussi, il venait écouter l’ensemble C Barré dans un programme autour de Yamaon. Une figure de prophète mésopotamien inventé par Giancinto Scelsi, qui prédit la destruction de la ville antique Ur. Nicholas Isherwood, basse puissante aux registres variés, faisait rouler les anathèmes, vibrer le sol, trembler les murs... et l’ensemble dirigé par Sébastien Boin l’accompagnait de sa pâte sonore subtile et parfaitement maîtrisée. Les deux autres pièces, création sur le même thème mésopotamien, faisaient entendre très différemment des croisements entre musique contemporaine et influences orientales, Samir Odeh-Tamimi comme

le souvenir d’une langue archaïque, de ses timbres oubliés, Zad Moultaka en intégrant des modes orientaux plus typiques et reconnaissables, et un trajet narratif. L’Ensemble Télémaque sous la direction précise et souple de Raoul Lay, rendait un bel hommage au fondateur du GMEM Georges Bœuf. Des œuvres du maître et de ses élèves dessinaient une touchante filiation. Ils étaient là, avec des pièces qu’ils lui dédiaient, chacun offrant une création anniversaire emplie d’humour, Apibeurf (Régis Campo) et Jojopy (Raoul Lay). Yann Robin, absent, laissait une lettre manifestant son affection complice. Modeste, Georges Bœuf rappelait en souriant l’absence de classe de composition de musique contemporaine à Marseille et donc la nécessité de la créer… « Mes élèves ont tous reçu des diplômes et moi non ! ». Le concert déclinait des compositions intimes ou triomphantes, réduites à un souffle, un battement ou emportées dans une brillante explosion de couleurs. Folie enjouée et théâtrale de Pop-Art (Régis Campo), élégance sobre de Phigures II, diamant taillé d’Éclat (Yann Robin), création 2017 à l’instar des deux pièces anniversaire. On avait aussi le bonheur d’entendre deux pièces de Georges Bœuf : Variasix, magique profondeur du violoncelle, vibration des cordes, irisation de l’instant, (un Ensemble Télémaque © Pierre Gondard


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Installation interactive, de Charles Bascou et Christian Sébille © Pierre Gondard

« Yes » magistral du public salue la beauté de l’œuvre et de son exécution) ; et Risées, composé pour la naissance de l’Ensemble Télémaque en 1994, « toujours aussi mouillé ! » ironise le compositeur… Subtilité des jeux d’eaux, « mélismes liquides » : dans une progression harmonique d’une bouleversante délicatesse la mer doucement s’installe, vaporeuse et aérienne…

Rencontres aléatoires Only One of Many s’inscrit dans le champ des expériences minimalistes nées dans les années 1960-70 à New York. Une proposition chorégraphique radicale pensée comme une équation mathématique : l’addition de 4 séquences autonomes - deux compositions musicales de Sébastien Roux et deux pièces chorégraphiées par DD Dorvillier - dont le résultat est égal à 6 combinaisons binaires.

Structure immuable qui exacerbe le processus de la répétition jusqu’à son niveau maximal. Katerina Andreou, Ayse Orhon et Balkis Moutashar en font l’expérience, aux prises avec le motif musical et le geste chorégraphique, moulées dans deux partitions jouées successivement puis simultanément ! Endurance, concentration, tension : avec Only One of Many, la chorégraphe américaine installée en France depuis 2010 poursuit son travail sur les relations complexes entre l’abstraction, la corporalité et la perception. Elle contraint l’espace de danse par l’incursion des dispositifs sonores, et combine des trajectoires qui, sans se chevaucher jamais, devront cohabiter dans l’ultime séquence. À charge pour les interprètes de réceptionner le son spatialisé pour lui offrir une matérialité toute subjective. L’addition est salée mais l’exercice en vaut la peine, pour les danseuses qui excellent et le spectateur hypnotisé. MARYVONNE COLOMBANI, MARIE GODFRIN GUIDICELLI ET AGNÈS FRESCHEL

Le Festival Les Musiques du GMEM, Centre National de Création musicale, s’est déroulé à Marseille du 12 au 20 mai

Jeune prodige en solo !

R

évélé à l’âge quinze ans au Concours Rostropovitch, puis dès 2013 au grand public aux Victoires de la Musique classique (qu’il remporte deux ans plus tard dans la catégorie « Soliste instrumental »… à vingt ans !) le violoncelliste Edgar Moreau a tout du prodige : technique et virtuosité époustouflantes, musicalité et expression hors-normes ! Devant un public de connaisseurs garnissant toutes les travées de la Salle Musicatreize à Marseille, le jeune homme a donné un magnifique récital en solo. Débutée par la classique Suite n°1 de Johann Sebastian Bach, interprétée au moyen d’une sonorité profonde faisant vibrer l’assistance, sa prestation s’est poursuivie avec deux grandes partitions du vingtième siècle écrites pour le violoncelle. Si les Sonates de Ligeti et Kodály développent leur langage propre, elles s’inscrivent néanmoins dans une lointaine filiation du Kantor de Leipzig, en particulier dans le traitement « harmonique » de l’instrument. La première a été dessinée au moyen d’un contraste parfaitement maîtrisé : du chant poignant et expressif initial à la seconde partie confondante de virtuosité. La seconde (et avant une pluie de bis retournant à Bach), monument pour soliste d’une intensité dramatique rare (exigeant aussi de « désaccorder » le

Edgar Moreau © Julien Mignot

violoncelle), a frappé l’auditoire. Son interprétation d’une puissance physique et virtuose sans limite a, au cœur de la partition, plongé la salle dans une émotion palpable à la fin du mouvement lent, tant la force expressive a été conduite à son sommet. JACQUES FRESCHEL

Le concert de Edgar Moreau a eu lieu le 27 mai à Musicatreize à Marseille


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Quand le Flamenco fascine

«

Le duende aime le bord de la plaie et s’approche des endroits où les formes se mêlent en une aspiration qui dépasse leur expression. » Chaque fois que le spectacle de flamenco enflamme l’âme, les mots de Federico García Lorca, son Jeu et théorie du Duende, reviennent. Comment mieux parler de cela, de cette approche de la mort et du désir, de cet art qui déjoue et satisfait pourtant les attentes, de ce tragique sans dénouement et sans désespoir, de cette beauté rocailleuse et fière, populaire jusqu’au bout des poignets qui se brisent, du menton qui se relève, des pieds qui frappent dans une frénésie si maitrisée qu’elle s’accélère régulièrement, et cesse d’un coup sec ? Le spectacle de flamenco est fragile. Parce que le Duende, indéfinissable, en est souvent absent. Mais lorsqu’il survient, toujours aussi intangible, quelque chose comme l’essence populaire de l’art apparaît. Lorsqu’Olga Pericet et ses musiciens donnent de leurs corps et de leurs voix sur scène, l’émotion surgit aussitôt. Parce que la technique est là ? Sûrement : une guitare virtuose, deux voix d’hommes, basse et aigüe, rauque et plaintive, qui se complètent, une danseuse qui maitrise parfaitement son art, vitesse, impulsion, placement, et un spectacle rodé,

Olga Pericet © Buitriago De Lozoya

minuté, où chaque regard est lentement posé. Parce que l’invention s’y joint ? Évidemment, loin de la tradition et y puisant pourtant, ils installent le temps, quadrillent l’espace, introduisent une bande électronique, et elle, en pantalon ou enroulée dans un châle à longues franges, sait inventer une nouvelle image de la bailerina, échevelée et musculeuse. Mais tout cela ne suffirait pas. Loin de la muse ou de l’ange froids, comme dirait Lorca, la voix du Duende, la danse du Duende plongent dans la plaie, gémissent,

râpent, et tout se tend, s’approfondit, et souffre, et donne. Les spectateurs s’en saisissent, tendus vers eux. Une magnifique soirée flamenca. AGNÈS FRESCHEL

Mosaico d’Olga Pericet a été joué au Chêne Noir, Avignon, le 19 mai dans le cadre des Nuits Flamencas Jeu et théorie du Duende, de Federico García Lorca, a été lu au Théâtre Girasole, Avignon, le 20 mai, par Las Compañeras

Rage d’exister

C

hez les Anges au plafond on joue de tout et avec tous. Comédiens, marionnettes, voire le public, sont au service des spectacles que montent Camille Trouvé et Brice Berthoud, qui sont alternativement à la mise en scène et au jeu. R.A.G.E est le deuxième volet d’un diptyque -commencé avec Les Mains de Camille © Vincent Muteau qui contait l’histoire terrible de Camille Claudel- consacré à la censure. Mais ce sont des biais bien détournés que prend Camille Trouvé, dans la mise en scène de ce spectacle étonnant, pour en parler ! L’acronyme codé du titre dit tout de celui dont il est question, et dont l’histoire sera finement dévoilée ; nous ne divulguerons rien ici, si ce n’est un indice : il est question d’une imposture, de la plus célèbre mystification littéraire du XXe siècle…

Du petit garçon né à Vilnius à l’aube de la Première Guerre mondiale, dont sa mère lui a toujours dit qu’il aurait un destin hors du commun et dont il a scrupuleusement suivi les conseils, au héros de la France libre devenu plus tard diplomate au service de la France, et jusqu’à ses écrits hautement primés, ce personnage fascinant hante la scène et les gradins. Car les points de vue vont se démultiplier dans le jeu très visuel que proposent les sublimes marionnettes de papier et leur

manipulateur (magnifique Brice Berthoud, capable d’alterner les voix, les accents et les déplacements des personnages avec une grande aisance), le décor, très mobile, qui signifie les époques par un déploiement d’immenses feuilles de papier sur lesquelles viennent se plaquer des images de toutes sortes, et les voix, multiples et captivantes. Les vérités racontées ne sont sans doute pas absolues -les bruitages de Xavier Drouault, les musiques de Piero Pépin et les effets magiques de Raphaël Navarro contribuent à les diluer, les brouiller progressivement-, mais, telles qu’elles, sont essentielles dans la construction, la vie !, de cet être qui a passé toute son existence à revendiquer la liberté de création. Le spectacle est total, intime et universel, simplement humain tant il célèbre finalement une seule vérité, celle d’être. DOMINIQUE MARÇON

R.A.G.E a été joué les 12 et 13 mai au Théâtre de l’Olivier, à Istres


Une passion peut en cacher une autre

«

Dire que le corps est au cœur de la danse n’a en soi rien d’original » pourraient s’exclamer ceux qui ne connaissent pas le travail et la recherche d’Emio Greco et de son complice Pieter C. Scholten. Sauf que lorsqu’on examine de plus près leurs projets et leurs chorégraphies on est saisi par la particularité de leurs productions et les exigences qui entraînent l’excellence de leurs interprètes. Dansé par Emio en solo en 2012, créé à l’Opéra de Marseille en 2015 avec 7 danseurs (3 femmes, 4 hommes), Passione est repris cette année dans une nouvelle distribution, avec toujours le musicien Franck Krawczyk qui joue sur scène et participe au spectacle, pris parfois à partie par les danseurs. Son adaptation de La passion selon Saint-Matthieu de Bach pour piano ou accordéon (il joue tantôt de l’un, tantôt de l’autre) les accompagne magnifiquement. Chaque danseur a sa propre « partition » et le spectateur a le temps de détailler ainsi leur talent, leur musculature, leur expressivité. Il y a des moments de grâce absolue, quand le bras ou la jambe se déplie lentement jusqu’à la tension, quand le corps roule et se relève avec légèreté, comme un ballon qui s’élèverait vers le ciel. Le plateau est occupé au tiers de l’espace par le piano, un moment recouvert d’un tissu blanc, tel un linceul. Venons-en d’ailleurs au titre de la chorégraphie. Certes il évoque la Passion du Christ, renié trois fois par Saint-Pierre : le chant du coq trois fois nous le rappelle et un tableau avec le danseur Angel Martinez Hernandez (magnifique ! il chante aussi !), soutenu par deux « larrons » masqués le confirme. Mais il joue aussi sur la polysémie du mot qui évoque l’ardeur de l’amour et des convictions, l’ivresse de vivre, la violence de la création... Et si tout simplement les deux créateurs n’avaient voulu parler que de la passion de la danse, illustrant les sept nécessités du corps « curieux » du danseur qui s’échappe, se multiplie et rencontre l’autre ? CHRIS BOURGUE

©Alwin Poiana

Passione s’est donné du 30 mai au 2 juin à La Criée

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De guerre lasse

T

ous les ingrédients d’un moment de théâtre exceptionnel étaient réunis pour le dernier spectacle de la saison du Liberté, scène nationale de Toulon. Laurent Bazin à la mise en scène, ex-lauréat à la Villa Médicis en 2015-2016, Éric Reinhardt auteur du roman multi primé © Svend Andersen L’Amour et les forêts, la voix et l’image vidéo d’Isabelle Adjani en fantôme délicat de l’héroïne Bénédicte Ombredanne, et de très bons acteurs. Las ! L’adaptation théâtrale transforme l’intrigue en une vulgaire histoire de boulevard où un mari acariâtre, jaloux et violent maltraite sa femme, soumise durant dix ans mais rebelle un jour, parents d’une pré-ado survoltée au visage et aux membres masqués de noir. Pourquoi un tel anonymat ? Mystère… La lourdeur de la

pièce tient, sans doute, à une scénographie prétentieuse : recours abusif des dialogues par voix off interposées au point que les acteurs conservent leurs micros attachés à la taille dans les scènes d’amour dénudées (sic) ; la permanence de la pénombre transpercée de lumières tournoyantes et l’usage de gadgets high-tech (ah, les machinistes, affublés de leurs ridicules hoverboards) ; une création sonore stridente superposée aux voix amplifiées

jusqu’à saturation totale ; les ombres projetées sur le rideau circulaire pour nous signifier la fragilité de la forêt, sa densité inquiétante, métaphore de l’impermanence des sentiments, de la folie des hommes et de la noirceur des âmes. Ce texte sur l’enfer conjugal, avec ses petits mensonges et ses grandes bassesses, dont le lyrisme et le symbolisme –l’auteur évoque littéralement les héroïnes de Villiers de l’Isle Adam– lui ont valu la reconnaissance des lecteurs et de la critique, est mis à mal et résonne sur scène avec la lourdeur d’une enclume. On rêvait d’une évocation à fleuret moucheté de l’expérience émotionnelle d’une femme héroïque, on se noie dans une surabondance d’effets d’ombres, de voix, de technologie superfétatoires. MARIE-GODFRIN GUIDICELLI

L’amour et les forêts a été joué les 30 et 31 mai au Liberté, scène nationale de Toulon

Deux minutes de vérité

«

Bienvenue dans la société occidentale ! » Début du spectacle. Plongée dans une réalité nue. Ici, la banalité est élevée au stade de matière à penser notre quotidien, notre vie de famille, nos loisirs. Western Society, de mises en abîme en mises en questions, offre sens et chair à la comédie humaine contemporaine. Le temps est distendu, les détails surlignés, l’insipide est transfiguré, observé à la loupe, répété jusqu’à ce qu’une vérité affleure. Le collectif anglo allemand Gob Squad, qui depuis 20 ans décrypte le réel en le difractant pour mieux nous le rendre à son état d’origine, a exhumé sur YouTube un concentré de notre société : une vidéo sans qualité, sortie de nulle part, que personne n’avait vue avant eux (seulement 4 vues !). Deux minutes tournées dans un salon, en famille. Gâteau, karaoké, ados sur canapé, bières bues en dansant mollement. Les 5 comédiens performeurs rejouent, et rejouent, et encore, cette séquence. Ils la vident de son non-sens, la remplissent d’une sensibilité potache, provocante, la vie s’invite tout d’un coup dans ce salon, l’ordinaire

© David Baltzer/bildbuehne.de

se pare de paillettes dorées, le banal nous raconte des histoires si vraies qu’elles en deviennent extraordinaires. La séquence de la fête de famille est filmée, projetée, transgressée, recadrée. Une chorégraphie des gestes quotidiens s’écrit, des dialogues s’inventent, des souvenirs s’imposent. Et lorsque quelques spectateurs sont conviés à jouer eux aussi ce morceau de peu qui en dit tant, les comédiens deviennent les vraies personnes, aux côtés des héros de la vidéo. Le réel a changé de

camp. Gros plans sur des couples en devenir. Zoom sur un portrait de famille réinventé par l’un des comédiens, qui s’insère dans un rêve de couple parental qu’il n’a jamais connu. La relecture du quotidien se double d’une introspection qui insuffle encore plus de vérité à ces deux petites minutes attrapées sur la toile. YouTube revisité, appréhendé comme le témoin de notre époque, tel une urne où chacun vient déposer ses propres traces de vie, composant cette gigantesque mosaïque, ce choral d’images, ce lexique sensible documentant ce qui pourrait finalement représenter l’essentiel de nos existences. ANNA ZISMAN

Western Society a été joué à hTh, Domaine de Grammont à Montpellier les 17 & 18 mai.


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Trip first classe

28

septembre 1974, Michigan. À la Brownell High School, la directrice a organisé une « Journée de la Douleur ». Rendez-vous au gymnase. Distribution d’un petit prospectus vert tendre avec le nom de l’infirmière scolaire, on s’installe devant l’estrade, la conférence commence. Toute pimpante, la chef d’établissement remercie les sponsors, et Mrs Conley, « Joe, tu remercieras bien ta maman pour les cakes ! », et se lance d’un ton guilleret dans l’énumération d’une liste de chiffres sur le nombre de suicides en Amérique… Ce soir, dans le gymnase du lycée Jean Monnet à Montpellier, Katia Ferreira présente une maquette de First Trip, son futur spectacle, prévu pour le Printemps des Comédiens 2018, adaptation du roman de Jeffrey Eugenides, Virgin Suicides, si bien rendu sur pellicule par Sofia Coppola. C’est un travail déjà très poussé qu’on a pu découvrir dans ce lieu si opportunément choisi. Dans l’odeur du caoutchouc des tapis de sport, le son qui se perd dans les hauteurs du terrain de basket, nos souvenirs de maillots puant la

sueur à échanger à la mi-temps, les 9 comédiens sont au plus près de cette histoire de mal-être adolescent dans l’Amérique corsetée des années 70. Les quatre sœurs Lisbon, toutes suicidées, reviennent hanter les rêves des garçons du lycée, si belles, si mystérieuses, si inaccessibles… Les flash-back s’insèrent parfaitement à ce présent reconstitué, les espaces mutent naturellement de la cave des sœurs disparues à la salle de bal de promo, le © Marie Clauzade dedans et le dehors s’échangent les places, les âges fluctuent, les acteurs jouent au présent et en souvenirs, dans une atmosphère très marquée US, avec pom pom girls, Plimouth et robes longues à fleurs. Les garçons étudient les moindres traces des quatre filles comme des trésors, les sœurs passent comme des fantômes, et la jeunesse s’éteint avant d’avoir éclot. Les élans sont retenus, les règles, même transgressées, sont des carcans mortels. C’est une belle idée de rendre publique cette

étape du travail, de nous rendre spectateurs privilégiés d’une réflexion en cours, avec ses (petites) faiblesses et ses belles pistes à creuser. ANNA ZISMAN

First Trip, maquette d’un spectacle attendu pour le Printemps des Comédiens 2018, a été présenté dans le cadre de l’édition 2017 du festival, entre le 1er et le 3 juin au Lycée Jean Monnet à Montpellier

La toile de la discorde

A

cheter 60 000 € un tableau blanc parcouru par de fins liserés blancs, perceptibles seulement si l’on cligne des yeux, peut remettre en cause des liens d’amitié que l’on croyait inébranlables, et mener à des discussions au cours desquelles la manière d’appréhender la vie se remodèle, cherche de nouvelles définitions, et renvoie chacun, personnages et spectateurs, à la vacuité de principes établis – par qui ? Telle est la question… Mode, snobisme, verbiage, ou geste artistique… Quelle remise en cause de notre perception de l’art, et de la relation que nous entretenons avec lui ! Le collectif flamand Tg STAN et la compagnie néerlandaise Dood Paard s’emparent du texte théâtral de Yasmina Reza, Art, le retordent avec brio, nouant les fils des thématiques de l’art et de l’amitié, recherchant le rationnel où il n’a pas lieu d’être et l’invoquant dans des domaines qui lui sont étrangers… L’appréciation d’un tableau est-elle liée à sa valeur financière ? « Tu as acheté cette merde soixante mille ! » s’indigne Marc (Frank Vercruyssen). « “Cette merde” par rapport

obéissant à des lois que tu ignores, est une merde ? », rétorque Serge (Kuno Bakker)… Leur amitié de longue date résistera-t-elle à l’art conceptuel ? Et celle qu’ils ont pour Yann le temporisateur (Gillis Biesheuvel), emporté par leur débauche verbale, tandis qu’il se soumet avec désespoir à la convention du mariage, et à un avenir difficile ? Entre l’art et la vie, même interrogation sur la légitimation de telle ou telle approche ! Le parallèle ajoute un inénarrable piquant à la pièce, et une verve ironique et gouailleuse qui contamine tous les sujets abordés. Le public est pris à témoin, interpellé par les acteurs, le décor, espace dessiné par un tapis, des lampes, autorise le passage d’un lieu à un autre, d’une dispute à l’autre, en un rythme alerte et jubilatoire. Le théâtre se met lui-même en question, dans cette esthétique en miroir, où tout prend forme dans le vertige délicieux des mots. © Sanne Peper

à quoi ? (…) tu n’as aucune connaissance dans le domaine de la peinture contemporaine, donc comment peux-tu affirmer que tel objet,

MARYVONNE COLOMBANI

Art a été donné au Bois de l’Aune, Aix-en-Provence du 11 au 13 mai


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Quand l’aventure commence !

L

a 35e édition Festival du Premier Film Francophone a commencé le 31 mai avec une salle comble qui a accueilli Grand Corps malade et un de ses comédiens Moussa Mansaly avec un tonnerre d’applaudissements. Ils étaient là pour accompagner Patients, premier film que Fabien Marsaud alias GCM a coréalisé avec Mehdi Idir alias Minos. Adaptation de son livre éponyme, le film raconte la vie de Ben (Pablo Pauly) qui, après un accident en piscine, se retrouve tétraplégique et va passer une année dans un centre de réadaptation. Tourné en 33 semaines, dans le centre de Coubert où GCM avait été accueilli il y a une vingtaine d’années, Patients nous fait partager ce huis-clos d’où on ne sort qu’une fois ; une superbe séquence avec les « potes » de Ben en fauteuil roulant dans la « forêt amazonienne » des rêves de Toussaint (Moussa Mansaly). La mise en scène et les choix de cadres suivent au plus près

l’évolution de Ben et ses lents progrès. De la caméra subjective des premiers plans qui placent le spectateur en position de tétraplégique jusqu’aux plans plus larges quand, Ben peut circuler, seul, presque autonome en fauteuil, pour retrouver ses amis, tout est fait pour qu’on prenne conscience de la réalité physique du handicap. Sans pathos, Lumière ! L’aventure commence de Thierry Frémaux © Ad Vitam avec l’humour en plus, aussi bien au niveau des situations ait déjà participé à de nombreuses rencontres que des personnages et des dialogues. La avec les spectateurs (le film a fait plus de 1 « vanne » est un des sports favoris ! Bien qu’il million 300 000 entrées !) GCM a répondu

Métaphysique du couple

Pretenders de Vallo Toomla © Amrion, Studio Uljana Kim, Locomotive Productions

L

e lieu est beau. Un domaine surplombant le Golfe de La Napoule, face aux îles de Lérins à 8 km à peine de la frénétique Croisette et des festivalières files d’attente : c’est le Château des Mineurs, un centre CCAS où depuis 20 ans les Activités sociales de l’énergie organisent des Rencontres cinématographiques ouvertes à tous, dont

la programmation « se construit autour des questions sociales et sociétales ». On y soutient le cinéma indépendant. On y voit sans bourse délier des films en compétition, des films d’auteur repérés dans d’autres festivals et ceux du parrain de la manifestation, Stéphane Brizé pour cette édition qui mettait à l’honneur le jeune cinéma européen. Un

cinéma qui ne manque pas de talent ! On a pu ainsi découvrir le premier long métrage du réalisateur estonien Vallo Toomla, Pretenders, remarqué au festival Premiers Plans d’Angers 2017. Un film traversé par les questions de toute une génération née après la chute du Mur, sur les ruines des idéologies du 20e siècle, confrontée à un matérialisme qui ne suffit définitivement pas à faire le bonheur. Ce n’est sans doute pas par hasard s’il prend la forme d’un enfermement claustrophobe et bascule dans le fantastique, genre où tout ce qu’on a cru, construit, est soudainement remis en doute. Vallo Toomla met en scène Anna et Juhan, un couple appartenant à la classe moyenne. Ils vont passer des vacances dans une maison « d’architecte » : béton brut de décoffrage, larges baies vitrées ouvrant sur la forêt, ameublement design chic. Une maison prêtée par un couple d’amis très riches, matérialisation suprême de la réussite. Leur rencontre fortuite sur la plage voisine avec un couple de campeurs, des laissés-pourcompte de la mutation capitaliste, s’aimant malgré l’adversité, va révéler leurs fractures et celles du monde où nous vivons, dans un jeu de faux-semblants. Autour d’Anna et Juhan, le motif du couple se décline en trois


aux questions avec une belle énergie. Le public a pu ensuite assister à l’inauguration officielle de l’Esplanade Berceau du Cinema, une reconnaissance du travail opiniâtre de l’association pour la restauration de l’Eden. La Chorale du Conservatoire de Musique de La Ciotat a offert un intermède musical avant la présentation du Jury, présidé par le producteur et réalisateur Jacques Dorfmann. Et c’est à nouveau une salle comble qui a plongé dans Le Grand Bain, un court métrage de Valérie Leroy qui a mis tout le monde de bonne humeur pour commencer l’aventure : les 108 scènes tournées par les frères Lumière sélectionnées par Thierry Frémaux et présentées par Gilles Trarieux-Lumière : Lumière ! L’Aventure commence. Elle a continué jusqu’au 4 juin. ANNIE GAVA

30 sept.

AL IBA, LE MUSIC

MAD

13 oct.

PIERRE ET LE LOUP LE ROI ET L’OISEAU C (1)Promptu ie

Le Berceau du Cinéma s’est tenu entre le 31 mai et le 4 juin à l’Eden Cinéma, à La Ciotat.

24 nov.

HØMÅJ A LA CHONSON FRANÇAISE

BLØND & BLOND & BLÕND

15 déc. versions : le couple des propriétaires absents, celui des invités impromptus, celui secondaire mais nécessaire des employés chargés de l’entretien. Chacun occupe une place dans la hiérarchie sociale, chacun fantasme sur les autres, chacun ment à l’autre et se ment à lui-même. Le titre est explicite, ce sont des « imposteurs ». Anna, en mal d’enfant - car dans ce monde individualiste et précaire, son compagnon en passe de devenir chômeur n’y songe pas - se glisse dans les élégants vêtements de marque de son hôtesse dont elle usurpe l’identité et se fait maîtresse de cérémonie. Elle se projette dans une fiction qui tient lieu de réalité. Le couple lui-même n’est-il pas fiction ? La villa de « rêve » n’est-elle pas un décor lynchien faussement rationnel, générateur de cauchemars ? Le thème de la « projection » s’inscrit dans la récurrence d’une image où apparaît un puits de lumière corbuséen aux parois de béton, photographié comme avec une camera obscura. L’architecture minimaliste propice aux cadrages et sur-cadrages, les envolées lyriques de la musique dans les scènes de violence, l’énergie explosive des « Basquiat » sur les murs gris, accentuent la distorsion sur laquelle repose ce film à la mise en scène redoutablement efficace, superbement servie par le chef opérateur Erik Põllumaa. Chaque plan dit la séparation, la distance, le malaise, jusqu’au dernier : un non-baiser hollywoodien et une étreinte où chacun regarde de son côté. ÉLISE PADOVANI

Les Visions sociales se sont tenues à Mandelieu-la-Napoule du 20 au 27 mai

ALICE,

6 oct.

BROADWAY, NOUS VOILA Les Comédiens des Quatre Tours

18 nov.

TETE

LES CHRONIQUES DE PIERROT LUNAIRE

1er déc.

TARA SUR LA LUNE 12 janv.

LES CAVALIERS

LA COMEDIE MUSICALE

16 fév.

9 fév.

LE TOUR DU MONDE EN 80 JOURS Cie La Naïve

23 fév.

LE POINT VIRGULE FAIT SA TOURNEE 6 avril

TUYAUTERIE

Charlie Dupont & Tania Garbarski

Espace NoVa Velaux 997 avenue Jean Moulin 04 42 87 75 00

MACHINE DE CIRQUE

24 mars

CANDIDE L’AFRICAIN Cie Marbayassa

20 avril

VOYAGE EN ITALIE

VIVALDI, BELLINI, DONZETTI,

ARDITI

de Orchestre de Chambre Marseille

2 juin

CE QUE LE JOUR DOIT A LA NUIT Cie Hervé Koubi

Tarifs et réservations sur espacenova-velaux.com


80 au programme cinéma bouches-du-rhône

Huis clos

Portrait sensible

La place du cinéma dans la cité

La Permanence © Alice Diop/Athénaïse

Alice Diop a découvert la PASS (Permanence d’Accès aux Soins de Santé), structure à l’intérieur des hôpitaux qui permet une prise en charge médicale et sociale des personnes marginalisées. Dans les locaux de l’hôpital Avicenne à Bobigny, elle est bouleversée par un Pakistanais qui venait là parce qu’il pensait être cardiaque alors qu’il n’était que seul, brisé, halluciné d’angoisse après un parcours traumatisant. Elle décide alors de faire un film de ce lieu, La Permanence, où s’échouent des migrants malades de l’exil, auprès de médecins souvent impuissants. Elle le présentera dans le cadre du Festival de Marseille le 25 juin à 16 h au cinéma Le Gyptis.

Le samedi 24 juin à 11 h, on petit-déjeunera au Gyptis avec Jean-Pierre Daniel (ex directeur de l’Alhambra), Juliette Grimont (Gyptis), Thomas Ordonneau (Shellac), Vincent Thabourey (Cinémas du Sud), Bruno Jourdan (Image de ville) et on réfléchira avec eux à la place du cinéma dans la cité. Quel est l’avenir de la salle de cinéma comme lieu de culture et d’échanges à l’ère de la numérisation ? Comment former le public, aller à la rencontre du non-public, lutter contre les inégalités culturelles ? Une rencontre proposée par le groupe Pensons le matin.

Du regal pour les vautours © Zeugma films

En partenariat avec le cinéma Les Variétés dans le cadre des Mercredis de Montévidéo Hors les murs, le 14 juin à 20 h, rencontre avec le réalisateur Alexandre Barry et le grand metteur en scène de théâtre Claude Régy, à l’occasion de la projection du documentaire Du régal pour les vautours. Le film nous fait cheminer jusqu’au Japon avec Régy, « le maître du silence », au cœur de son travail et de sa vie, dans le surgissement et la superposition des visions : « visages, souvenirs et réminiscences qui remontent à la surface comme des fragments de miroirs superposés ».

© Caroline Dutrey

Le Gyptis, Marseille 04 95 04 96 25 lafriche.org

L’arbre et le requin blanc

L arbre et le requin blanc © Rafaèle Layani

Des alternatives au modèle scolaire traditionnel, il y en a eu beaucoup ! Dans son documentaire joliment intitulé L’Arbre et le requin blanc, Rafaèle Layani s’est intéressée pendant un an à celle proposée par la Freie Schule, une école primaire ouverte en 1979, sous un statut associatif, dans un haut lieu historique de la contestation berlinoise. Caméra à l’épaule, la réalisatrice suit ces enfants qui grandissent dans la liberté du choix, élevée en mode de vie et de pensée. Elle sera au Gyptis le 27 juin à 20 h, lors d’une soirée organisée en partenariat avec l’association Bric à Brac, structure d’éducation populaire multi-âges.

Le Gyptis, Marseille 04 95 04 96 25 lafriche.org

Souvenirs argentiques 1 Nouveau rendez-vous avec la Cinémathèque portugaise le 16 juin au MuCEM. A 18 h, Trás-os-Montes, premier film de Antonio Reis et Margarida Cordeiro, qui captent, à travers des gestes quotidiens et des mythes anciens, l’âme d’une région d’où sont venus beaucoup d’immigrés installés en France. Présenté par José Manuel Costa, directeur de la cinémathèque. À 21 h Pedro Costa viendra introduire son premier long métrage, O Sangue. L’histoire de deux frères de 10 et 17 ans qui vivent dans une maison délabrée avec leur père. Jusqu’à sa disparition…

Des courts l’après-midi

L’Île jaune © Trois Brigands Productions

L’association Des courts l’après-midi propose le 1er juillet à 15h à la Vieille Charité une séance de courts, tournés en Région PACA, en présence de Paul Guilhaume, qui a coréalisé L’Ile jaune avec Léa Mysius. Il y aura aussi Des Millions de larmes de Nathalie Beder, la rencontre, dans un café-restaurant désert le long d’une route, d’un homme mûr et d’une jeune femme. La Fugue de Jean-Bernard Marlin, Ours d’or à la Berlinale 2013 et Aucun Regret d’Emmanuel Mouret. Un programme fort alléchant. Cinéma le Miroir, La Vieille Charité, Marseille descourtslapresmidi.fr

O Sangue © Tropico filmes

Le Gyptis, Marseille 04 95 04 96 25 lafriche.org

Cinéma Les Variétés, Marseille 08 92 68 05 97 cinemetroart.com

MuCEM, Marseille 04 84 35 13 13 mucem.org



82 au programme cinéma bouches-du-rhône vaucluse var hérault

L’Éveil de la permaculture Carte Blanche à Daniel Prévost L’Eden donne une Carte Blanche au comédien et présente trois films importants de sa filmographie. Le 23 juin à 20 h 30, Le Dîner de cons de Francis Veber où on le retrouvera aux côtés de Thierry Lhermitte et Jacques Villeret. Le 24 à 18 h ce sera René Bousquet ou le Grand Arrangement de Laurent Heynemann et à 21h, Les Petits Ruisseaux de Pascal Rabaté, une adaptation fidèle de sa bande dessinée, où Daniel Prévost est Émile, un veuf mélancolique qui se remet à chercher l’âme sœur suite au décès de son grand ami, Edmond. Les rencontres avec le comédien seront animées par Yves Alion, rédacteur en chef de la revue Avant-Scène Cinéma.

« Sois le changement que tu veux voir dans le monde », disait Gandhi. Dans un monde toujours plus dégradé, cette phrase trouve tout son sens. Et la permaculture, pratique qui s’inspire de la logique de la nature pour enfin mieux la respecter, en est une application. « Avec ce film, je montre que chaque personne fait partie de la solution et que tout le monde peut être acteur du changement », explique Adrien Bellay, son réalisateur. François Warlop, agronome et Cédric Isern, maraîcher bio, seront présents à la séance à Avignon. Le groupement des AMAP de Martigues, Fos et Istres, et les Jardins partagés de Martigues animeront le débat au Jean Renoir. 13 juin Cinéma Jean Renoir, Martigues 09 63 00 37 60 cinemartigues.com

Le vénérable W Qui est donc ce « vénérable W » ? Son nom entier est Ashin Wirathu. C’est un moine bouddhiste, vêtu de la robe orange et à l’allure en effet vénérable et respectable. Sauf qu’au fil du discours que tient cet homme se délivre peu à peu un message haineux, raciste, violent. Pour lui, la minorité musulmane de Birmanie (4% de la population) représente le mal absolu qu’il faut détruire. Avec ce documentaire dérangeant, Barbet Schroeder conclut, après ses portraits d’Amin Dada et de Jacques Vergès, ce qu’il nomme sa « trilogie du mal ». Discussion le 19 juin organisée par les Amis du Monde Diplomatique.

15 juin Cinéma Utopia, Avignon 04 90 82 65 36 cinemas-utopia.org

I am not your negro Le vénérable W de Barbet Schroeder © Les Films du Losange

Les petits ruisseaux, Pascal Rabaté © Ad Vitam

04 96 18 52 49

Eden Théâtre, La Ciotat edencinemalaciotat.com

Cinéma Utopia, Avignon 04 90 82 65 36 cinemas-utopia.org

Le Liberté en liberté

Soirée Twin Peaks La série culte signée David Lynch sera au centre d’une soirée spéciale, organisée dans le cadre du cycle 24 images/seconde. À l’heure où sort enfin la saison 3 de Twin Peaks, après 26 ans d’attente, le Renoir accueillera Guy Astic. Professeur de cinéma-audiovisuel et littérature au Lycée Cézanne d’Aix, il est un spécialiste de l’univers du réalisateur, auquel il a consacré deux ouvrages. Il donnera une conférence, accompagnée de la projection de Twin Peaks, fire walk with me.

Twin Peaks Fire walk with me, de David Lynch © Potemkine

19 juin Cinéma Jean Renoir, Martigues 09 63 00 37 60 cinemartigues.com

I am not your negro, Raoul Peck © Sophie Dulac

Est-il besoin de traduire ce titre ? Tout le monde aura compris que le documentaire de Raoul Peck aborde de front la question des discriminations aux États-Unis et la longue lutte menée par les Afro-américains pour la reconnaissance de leurs droits civiques. L’œuvre de l’écrivain noir américain James Baldwin a nourri et inspiré le film, émaillé de nombreuses images d’archives, rappelant l’ancrage profond du racisme qui subsiste encore aujourd’hui. Le 13 juin, en collaboration avec les Amis du Monde diplomatique, discussion avec Jean-Christian Mayordome, médecin généraliste d’origine gabonaise… et viticulteur à Sablet. Cinéma Utopia, Avignon 04 90 82 65 36 cinemas-utopia.org

Le Théâtre Liberté prend ses quartiers d’été. Le festival Hors les Murs se tiendra du 14 juin au 7 juillet dans le centre historique de Toulon. Outre les concerts et spectacles, une part belle sera faite au cinéma avec trois films au programme, plus, en clôture du festival, la retransmission sur écran de Carmen, de Georges Bizet, dans une mise en scène de Dmitri Tcherniakov, en léger différé du Festival d’Aix. Quant aux films, Ceci n’est pas un graffiti, de Jim Gabaret et Samuel Boujnah, fera l’ouverture, précédé d’une performance de trois graffeurs. Cette web série analyse le street art, aux origines subversives et qui se fond peu à peu dans le marché de l’art. Un classique, le 29 juin, Ziegfeld Follies de Vincente Minelli, tourné en 1946, avec Fred Astaire et Judy Garland, dans un show de music-hall envoûtant. Enfin, le 5 juillet, La Graine et le mulet, d’Abdellatif Kechiche, fable moderne, tendre et sociale. Théâtre Liberté, Toulon 04 98 00 56 76 theatre-liberte.fr


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Les pieds sur terre de Batiste Combret et Bertrand Hagenmüller © Les Films des Deux Rives

Comment lutter contre l’État et une multinationale surpuissante ? Comment résister à un projet pharaonique comme celui de l’aéroport de Notre-Dame des Landes ? En gardant les pieds sur terre. Et même dans la terre. Batiste Combret et Bertrand Hagenmüller ont suivi les habitants d’un hameau tout proche de la ZAD opposée à l’aéroport. Eux ont refusé de céder leurs terres à Vinci, ils continuent de les cultiver et ont tissé des liens avec les membres de la ZAD. Les réalisateurs seront présents à la projection. 12 juin Cinéma Utopia, Montpellier 04 67 52 32 00 cinemas-utopia.org

The whole gretty city

The Whole Gritty City de Richard Baber et Andre Lambertson © RV Distribution

En partenariat avec Jazz à Junas et le Festival des Fanfares de Montpellier, l’Utopia organise une soirée spéciale le 22 juin. La fanfare des Loustics du Pic donnera un concert à partir de 19 h, qui précédera le film documentaire de Richard Barber et Andre Lambertson. Les deux réalisateurs ont suivi, à la Nouvelle-Orléans, de jeunes musiciens des rues qui chaque année se rassemblent en fanfares pour animer les festivités du Mardi Gras. La projection sera suivie d’une rencontre avec les organisateurs des festivals de Junas et de Montpellier. Cinéma Utopia, Montpellier 04 67 52 32 00 cinemas-utopia.org

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84 au programme cinéma

Cour(t)s-y-vite ! Ils ont entre 8 et 10 ans, Leïla, Ferielle, Amane, Milan, Rayna, Robinson et les autres. Leurs collègues sont sortis de l’école Bernard Cadenat à La Belle de Mai à 16 h 30. Eux sont restés comme tous les mardis jusqu’à 18 h pour suivre l’atelier de programmation animé par Lucie Girard de l’association TILT dans le cadre d’un accompagnement périscolaire. Ils ont visionné une vingtaine de courts-métrages, ils en ont parlé, ont écrit et dessiné. Et ce mardi 16 mai, ils ont une tâche difficile : supprimer un des films qu’ils ont présélectionnés la semaine précédente : leur programme ne doit pas excéder 90 minutes. Sans compter qu’ils doivent aussi choisir un titre pour un court film d’animation, fruit de leurs dessins sur bandes de praxinoscope (jouet optique donnant l’illusion du mouvement inventé par Émile Reynaud en 1876). Chacun défend son avis avec ténacité. Apprentissage de l’écoute et de la démocratie. C’est d’autant plus difficile qu’il faut également tenir compte de la sélection de l’atelier des voisins collégiens. Tout sera bouclé la semaine suivante, car la date de la projection publique approche. Ils ont déjà conçu l’affiche de Cour(t)s-y-vite ! On est sûr d’y voir, entre autres, L’Épouvantail

Chemin d’eau pour un poisson, de Mercedes Marro © Folimage

de Buster Keaton et Edward F. Cline, Chemin d’eau pour un poisson de Mercedes Marro, Je suis off de Kevin Zonnenberg et Thomas Scohy, Gagarine de Fanny Liatard et Jérémy Trouilh… Est-ce que Molii coréalisé par Hakim Zouhani, Yassine Qnia, Carine May et Mourad Boudaoud, Prix Spécial du Jury au Festival de Clermont-Ferrand en 2014, restera dans

la programmation ? Vous le saurez en allant voir ces cinéphiles en herbe présenter leurs films. Courez-y !

Alger la berbère, la romaine, l’arabe, la colonisée et l’indépendante. Si loin, si proche. Blanche, ou Noire aux pires heures des guerres fratricides. Rebelle, fière, meurtrie, capitale, Alger la vivante s’expose à La Friche du 3 juin au 2 juillet à travers les photos d’Yves Jeanmougin. Le 15 juin à 18 h, dans la Salle des machines, Bienvenue à Madagascar, de Franssou Prenant © Survivance on pourra rencontrer le photographe pour documentaires respectifs : La Traversée à une signature de son livre Alger (éditions 16 h 30 et Dans ma tête un rond point à 20 h. Métamorphoses) dont les textes sont signés Le premier fait entendre, dans le huis-clos Ameziane Ferhani et la préface Thierry d’un ferry, des histoires d’identité déchirée, Fabre. On y retrouvera les réalisateurs Eli- d’allers-retours, d’allers sans retours ou de sabeth Leuvrey et Hassen Ferhani qui retours redoutés. Le second saisit dans le seront également présents le 1er juillet au huis-clos d’un abattoir d’Alger la parole des cinéma Le Gyptis pour la projection de leurs hommes, la confidence de leurs amours, de

leurs espoirs, de leur amertume (pour ces deux films, voir critiques sur journalzibeline.fr). Chaque film de ce focus organisé en partenariat avec AFLAM et Mot à mot sera suivi d’un débat animé par Tahar Chikhaoui. Loin de ces huis-clos, Le Gyptis, Aflam, le collectif 360° et même plus, proposent le 20 juin à 20 h une autre approche de la capitale algérienne, celle de Franssou Prenant dans un long métrage de 2015, inédit à Marseille dont le titre Bienvenue à Madagascar peut dérouter. Film personnel, où la réalisatrice qui a grandi à Alger et est venue y revivre dans les années 2000, mêle sa voix off à d’autres voix présentes ou passées tandis que la caméra parcourt la ville, convoque son histoire, révèle ses métamorphoses. Une expo, un livre et trois films pour aborder ce «rivage fui, perdu, aimé, retrouvé».

ANNIE GAVA

14 juin Cinéma Le Gyptis, Marseille 04 95 04 95 95 lafriche.org

Visions d’Alger

ÉLISE PADOVANI

Le Gyptis, Marseille 04 95 04 96 25 lafriche.org


85

Regards Du 14 au 20 juin se tiendra à Marseille, Aix, La Ciotat et Six-Fours la 18ème édition du festival Regards sur le Cinéma Israélien, sous le parrainage de Radu Mihaileanu. Parmi les films inédits à Marseille que propose Xavier Nataf, le directeur du festival : Petite amie de Michal Vinik suit le parcours de deux sœurs qui ont une vision différente de l’amour. Quand Naama tombe amoureuse Mountain, de Yaelle Kayam © ASC Distribution de la nouvelle du lycée, sa vie va prendre un autre sens. Dans Tikkoun, fable distanciée sur la communauté juive orthodoxe, Avishai Sivan imagine le destin d’un jeune étudiant en yeshiva confronté à une crise spirituelle. Yaelle Kayam étudie dans Mountain « la souffrance physique et morale d’une femme qui est une épouse et une mère. Une femme qui n’est plus désirée par son mari mais qui éprouve encore du désir pour lui… » dans un lieu situé au carrefour des trois religions monothéistes. Invitée au festival : Shani Klein, qui interprète cette femme. On connait le film La Visite de la fanfare, d’Eran Kolirin ; il présente ici son dernier film, Au-delà des montagnes et des collines, qui

croise les histoires individuelles de quatre membres d’une famille, tous chargés de lourds secrets qu’ils espèrent dissimuler aux autres. Dans son nouveau film, À l’ouest du Jourdain, Amos Gitaï filme, d’Israël à la Palestine, ceux qui n’ont pas renoncé à la réconciliation, parcelles de paix toujours plus menacées par la politique actuelle. Les films de patrimoine ne sont pas oubliés : que ce soit Description d’un combat, le documentaire de Chris Marker sur son expérience israélienne dans l’atmosphère de l’époque heureuse du début des années soixante, ou trois films de Uri Zohar, le cinéaste et acteur, icône de la bohème de Tel Aviv et de la culture laïque (depuis devenu religieux !), Trois jours et un enfant, Les voyeurs et Les yeux plus gros que le ventre. ANNIE GAVA

Regards sur le Cinéma Israélien 14 au 20 juin facebook.com/regards.sur.le.cinema.israelien/

Salagon, musée et jardins

28e Festival 11 —17 International Juillet

à Mane, Alpes de Haute-Provence

Marseille

Piotr Klemensiewicz terrestre (paysages) 14 avril - 17 septembre 2017

fidmarseille.org

www.musee-de-salagon.com Retrouvez-nous sur

MuCEM – Villa Méditerranée – Cinéma Les Variétés – Alcazar Cinéma Le Miroir – Théâtre Silvain – Videodrome 2


86 critiques arts visuels

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40 structures publiques et privées, 45 expositions , 220 artistes, 5 jours de lancement suivis de 3 semaines de temps forts et quelque 25 000 visiteurs, le Printemps de l’Art Contemporain a mis en ébullition Marseille, Aixen-Provence, Istres et Châteauneuf-le-Rouge

La magie du PAC Larousse illustré de 1957, il en prélève toutes les images, reconstitue un alphabet visuel et recompose une collection. L’écriture d’origine est en filigrane, en deçà, au-dessus, presque invisible, constituant avec les vignettes un nouveau monde issu de l’ancien.

Les mystères de la production

Les terres rouges, 2017, vidéo, 10’ © Gilles Desplanques

À

l’aune de MP18 et sa cohorte de résidences d’artistes, et de Manifesta en 2020 au rayonnement international incontesté, le PAC s’inscrit dans l’agenda des événements prescripteurs comme Art-O-Rama et Paréidolie. La manifestation portée par le réseau Marseille Expos irrigue le territoire autour d’un seul objectif : montrer au plus grand nombre la vivacité de la création dans le champ des arts visuels. D’autant que tous les partenaires offrent la gratuité durant son lancement ! Quartier par quartier, munis d’un plan détaillé, les publics explorent des terrains souvent méconnus le temps d’une exposition, d’une conférence ou d’une rencontre avec les artistes et les professionnels. Découvertes et échanges garantis.

Quartier CanebièreNational-Belle de Mai Victime de son succès, La Friche la Belle de mai s’est vue obligée de limiter sporadiquement l’accès à la Tour Panorama qui proposait trois immersions dans trois univers radicaux : celui de la vidéo danse tridimensionnelle de Charles Atlas (Tesseract, Triangle France, Zib’107) ; celui de Laurent Faulon, Delphine Reist, Jean-Baptiste Sauvage et Thomas Teurlai

développé à l’identique sur deux plateaux, forcément troublant (Viandes foraines, Sextant et plus / Group), et celui de Marc Augé et Marc Lathuillière au dialogue éclairant (L’anthropologue et le photographe, Les Ateliers de l’image). La galerie Château de Servières ne s’imposant aucune limite lorsqu’il s’agit de produire une exposition, la carte blanche à Gilles Desplanques était un nouveau défi. Non seulement l’éclatement des cimaises, ses ouvertures déplacées, ses perspectives tronquées bousculent l’espace mais l’artiste remet en question notre appréhension de l’architecture domestique -la réplique déstructurée de la chambre de son fils, matrice autour de laquelle gravitent ses projections mentales comme notre réflexion sur notre animalitévidéos de l’artiste masqué, confronté à des zones inhospitalières. Trouble, mystère, folie à l’heure où s’ouvre la Biennale d’architecture de Lyon1 baptisée également Hétérotopia, nul doute que la pensée de Michel Foucault plane sur cette chambre éclatée comme « lieu de projection des fantasmes par excellence ». Fidèle à Porte-Avion, l’écrivain et performeur Anne-James Chaton s’immerge dans la peinture et le dessin des grands maîtres, lui qui n’a jamais dessiné ou peint, par le truchement poétique du collage. Lecteur du

Les lieux de production gardent portes closes, sauf pendant le PAC. À l’Atelier Ni, l’Atelier Tchikébé et au CIRVA, l’expérience était riche d’enseignements sur le processus de fabrication des œuvres. Ainsi les pièces en volume d’Aurélie Pétrel qui a bénéficié de l’accompagnement technique de l’Atelier Ni pour aboutir son projet, depuis l’idée jusqu’au plan et sa réalisation in situ. Ainsi les tirages réalisés pour les lauréats de l’appel à projets de l’Atelier Tchikébé dont la démarche commerciale d’imprimeur et celle, collaborative, d’éditeur lui assurent la reconnaissance des artistes comme des professionnels de la sérigraphie d’art sur papier et sur bois. Au CIRVA, les maîtres verriers déployaient leur savoir-faire au service des artistes et autorisaient la déambulation entre les pièces en cours, les tessons, les pigments et les nuanciers. Une curiosité titillée que seule l’exposition Une maison de verre au musée Cantini2 (Zib’106) pourra contenter pleinement. MARIE GODFRIN-GUIDICELLI 1

jusqu’au 9 juillet

2

jusqu’au 24 septembre

Le Printemps de l’Art Contemporain s’est déroulé à Marseille, Aix-en-Provence, Istres et Châteauneuf-le-Rouge du 25 mai au 11 juin


24 juin 24 septembre 2017 Galerie Jeanne Bucher Jaeger depuis 1925

PASSION DE L’ART

Musée Granet Aix-en-Provence

museegranet-aixenprovence.fr

Direction de l’information et de la communication. Impression : Sérégraphie moderne. Nicolas de Staël, Atelier fond orangé 1955. Huile sur toile, 195 x 114 cm. Collection particulière.© ADAGP, Paris 2017. Photo : Adam Rzepka

PICASSO BRAQUE LAURENS GIACOMETTI KANDINSKY VIEIRA DA SILVA DE STAËL DUBUFFET FROMANGER VERDIER


88 critiques arts visuels

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Mi-temps à Maison Blanche

C

Installation d’Olivier Nattes © Chris Bourgue

lin d’œil à la Capitale Européenne du Sport, la manifestation des Arts Éphémères a présenté sa 9ème édition autour du thème de la détente, choisi avec humour par les deux commissaires : Isabelle Bourgeois

et, pour sa première participation, Martine Robin, directrice du Château de Servières. Celle-ci a loué l’implication des 24 artistes (dont seulement 7 femmes…) jouant sur la polysémie du mot, y répondant avec malice ou émotion avec des œuvres qui évoquent la tension ou le relâchement, le conflit ou le repos, et la liberté imprévue du parc et du plan d’eau. Si certains ont voulu évoquer la relaxation (Hélène Garcia et son espace détente, Laurence Lagier et sa table de ping-pong dans un salon de la bastide), un désir d’évasion se manifeste avec le bateau pneumatique accroché par des élastiques de Laurent Le Forban ou les rames d’une barque installées dans un cèdre par Gerlinde Frommherz. Cependant des pièces plus graves, engagées, évoquent les problèmes sociaux et politiques : on est saisi par la construction flottante de gilets de sauvetage orange d’Olivier Nattes, rappel des naufrages des migrants, par le détournement du drapeau américain en barres de saut hippiques désordonnées de Mounir

Fatmi, tout comme par le portrait de Karim Benzema par Karim Ghelloussi, découpé à la scie sauteuse, qui souligne le racisme latent. Si les matériaux utilisés sont parfois de récupération (frites de piscine de Laurent Perbos, mobilier de Pierre Combelles), ils ont aussi des aspects plus précieux comme les céramiques émaillées de Frédéric Coupet ou de Florence Lenain (première collaboration avec la biennale P’(ART)cours de Bruxelles). La poésie s’impose avec la pièce d’Étienne Rey : son miroir souple sans tain tremble entre les arbres, joue sur les reflets. Soulignons la présence de travaux d’élèves de l’ESADMM, ceux des Ateliers publics, et d’une chorégraphie du Pôle National Supérieur Danse PACA. Enfin un impressionnant duo de sangles et mât chinois de la Cie S’évapore pour l’inauguration. CHRIS BOURGUE

Les Arts Éphémères de Maison Blanche se sont tenus du 18 mai au 9 juin

De la rue aux musées

L

a majorité des 1500 objets de la collection du MuCEM a été acquise dans le cadre d’enquêtes anthropologiques conduites par Claire Calogirou, ethnologue et commissaire des deux expositions Graff en Méditerranée et Hip-hop : un âge d’or (1970-1995). Elles racontent à la fois l’histoire personnelle des graffeurs et les sources historiques du mouvement. La collection se déploie au fort Saint-Jean dans un habitacle obscur, et a contrario, au Mac, dans des travées lumineuses. Au MuCEM le graff se met en scène en habits de lumière : comme dans une malle aux trésors, une panoplie d’objets, de signes, de tags, de dessins, d’outils, d’affiches, de vêtements et d’accessoires de mode disent l’expression d’un mouvement en rupture, parfois violente, avec la société contemporaine. Bidons de gasoil taggés, vidéos, lunettes de la star Zeta, portraits photographiques des groupes marseillais Posse et BVice pris par Jean-Pierre Maéro, bombes, autocollants… L’exposition démontre toutes les facettes d’un mouvement et d’une posture éminemment « politiques », inscrits dans leur temps, tour à tour expressions artistiques (dessins, peintures), propagandes (sérigraphies sur TShirt), supports subversifs

tels des briquets ou des savons de Marseille ! Jusqu’aux institutions qui accrochent à prix d’or les œuvres de Fasim, JBRock, Basto qui grave son nom sur une boucle de ceinture dorée. Au Mac la genèse et son explosion planétaire, véritable phénomène, des pionniers américains aux scènes françaises et internationales qui partagent la même énergie créatrice dans l’expression visuelle, filmique et musicale, le goût des fêtes et des happenings, des battles et des performances. Mouvements, tendances, postures, revendications, inspirations, publications sont passés au microscope. Là encore les clips de Jean-Pierre Maéro sont précieux, témoins de ce que le Hip-hop peut évoquer « de joie, de conviction et de talent ». MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Don’t vote for the dark side, 2011-2012, impression sur papier, collection MuCEM © Jaye, photo Mucem/Yves Inchierman

Graff en Méditerranée jusqu’au 8 janvier 2018 MuCEM, Marseille 04 84 35 13 13 mucem.org

(les affiches du Collectif L’Uzine). Jusqu’à sa « récupération » par le monde marchand et les médias qui ont produit des objets publicitaires

Hip-hop : un âge d’or (1970-1995) jusqu’au 14 janvier Mac, Marseille 04 91 25 01 07 culture.marseille.fr


Tous les jours jusqu’au 17 septembre 2017 35 ter RUE DU DOCTEUR-FANTON,13200 ARLES FONDATION-VINCENTVANGOGH-ARLES.ORG

Alice Neel, Jackie Curtis et Ritta Redd, 1970. Huile sur toile, 154,30 x 108,90 cm The Cleveland Museum of Art, Leonard C. Hanna, Jr. Fund 2009.345. © Succession d’Alice Neel

Vincent van Gogh, Branches de marronniers en fleur, 1890 Huile sur toile, 73 x 92 cm, F 820. Fondation Collection E. G. Bührle, Zurich

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90 critiques arts visuels

plus d’arts visuels sur journalzibeline.fr

Danse au Carré de l’exposition, d’élaborer une réflexion, tant politique qu’artistique, développant le minimalisme comme un nouveau langage, traverser ainsi les expressions, renverser les codes, bouleversant les lieux de présentation, les matériaux. La chorégraphe Yvonne Rainer décrit ce déplacement artistique majeur comme une nécessité de « trouver Peter Moore, photo de Huddle de Simone Forti, 1969. © Barbara Moore/Licensed by VAGA, une manière différente de New York, NY. Courtesy Paula Cooper Gallery, New York bouger ». Gestes quotidiens, sans îmes et son Carré d’Art fêtent, avec 39 emphase, célébrant l’inscription du corps autres villes et structures françaises, les dans un temps à imprégner, à éprouver, à 40 ans du Centre Pompidou, qui pour décompter, à recommencer pour mieux le l’occasion propose un programme inédit sentir passer. d’expositions, de prêts exceptionnels et Sujet déjà historique. Et, gageure : si la d’événements pendant toute l’année. problématique est ambitieuse et pertinente A Different Way to Move s’attache à présen- –montrer que tout se croise, les mouvements, ter le courant transdisciplinaire et radicalement les sons, les images, les matières, dans une innovant qui anima les champs croisés de la volonté commune d’imposer l’art au cœur danse, des arts visuels, et de la musique entre de la cité, pour une critique des rapports de 1960 et 1980 à New York. Il s’agissait, comme pouvoir-, comment raconter cet élan ? En un le rappelle Marcella Lista, commissaire mot, comment exposer la danse ?

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Cinq salles thématiques proposent d’explorer œuvres et réflexions croisées. La première, « Un état de danse », est consacrée au travail de la chorégraphe Simone Forti et au plasticien Simon Morris. Chaque week-end, les élèves du Master Exerce du Centre chorégraphique de Montpellier reprennent deux pièces de la danseuse américaine, Huddle et Hangers. La danse est en effet bien un art vivant, et lorsqu’elle pénètre l’espace muséal, la portée historique est perceptible. Le jour du vernissage, Forti est là, se regardant danser sur un écran. 50 ans séparent l’image et la petite femme frêle, qui, le pas mal assuré mais volontaire, esquisse un mouvement ému. Il faudra plus d’imagination, dans les salles suivantes, pour sentir la fougue qui animait l’ensemble des artistes frondeurs –et prestigieux -, qui y sont exposés. ANNA ZISMAN

A different Way to Move – Minimalismes, New York 1960-1980 jusqu’au 17 septembre Carré d’Art, Nîmes 04 66 76 35 70 carreartmusee.com

Que reste-t-il de nos vies ?

L

a carte postale, De Socrate à Freud et au-delà de Jacques Derrida sous-tend destinerrance qui explore la distance spatio-temporelle entre l’envoi d’une correspondance et sa réception. Au Mac Arteum, les commissaires Christine Courbon et Rindala El Khoury invitent à un « voyage initiatique entre destin(ée) et errance », deux occurrences contradictoires a priori, à travers les œuvres de 23 artistes qui questionnent la migration, la mémoire, la latence de la trace. Des stars et des galeries prestigieuses (Niki de Saint Phalle, Zineb Sedira, Barthélémy Toguo) et des présences singulières, particulièrement les artistes libanais Joana Hadjithomas & Khalil Joreige, nominés pour le Prix Marcel Duchamp 2017, qui ancrent un acte fictionnel - un pyromane brûle une carte postale des années 60 en temps de paix - dans la réalité en reproduisant le geste et en immortalisant le résultat par impression afin de rendre compte de la destruction de leur pays. Ou Walid Raad, chef de file de cette génération, dont les tirages numériques

Nicolas Pincemin qui tissent ensemble une correspondance émouvante entre un père et son fils. Ou encore Yoann Ximenes qui, dans son installation Mantras, transpose des paroles historiques issues de l’actualité politico-sociale en formes sculpturales mouvantes et paradoxalement légères : « Je vous ai compris », « I have a Dream », « Yes we can »... Des décennies plus tard, que reste-t-il de l’Histoire, comment Mantras de Yoann Ximenes, 2015-2017, installation in situ (premier plan), l’homme réagit-il à la présence Olympe de Armelle de Sainte-Marie, 2016 (second plan), Carton pour La tentation de l’artifice de Nicolas Poncemin, 2017 (arrière-plan) © Laure Flores « des âmes errantes qui ne quitteront fabriquent une archéologie de la guerre indé- jamais le monde des vivants » ? Autant d’actes lébile dans l’impact des balles. Deux manières artistiques comme autant d’interrogations d’interroger l’histoire de la mémoire et de et de vérités. MARIE GODFRIN-GUIDICELLI sa trace. D’autres pépites avec Guillermo Moncayo, ex-étudiant à l’École d’art d’Aixen-Provence admis au Fresnoy, dont le film L’horizon des événements est une allégorie Destinerrance jusqu’au 8 juillet silencieuse de l’existence, entre apparition Mac Arteum, Châteauneuf-le-Rouge et disparition. Avec le duo inédit Michel et 04 42 58 61 53 mac-arteum.com


© pablito zago - grégory quittard - service communication ville d’avignon


92 critiques arts visuels

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Clichés de jeunesse

À

la Fondation LUMA Arles, les photographies des débuts d’Annie Leibovitz inaugurent le premier volet d’un projet pluridisciplinaire autour de l’idée d’archives vivantes. L’acquisition faite par Maya Hoffman est conséquente (prix non communiqué), constituée de milliers de pièces : principalement des négatifs, planches contact, tirages contact, tirages avant prise de vue, documentations diverses... Première du Programme Archives Vivantes mené par Matthieu Humery, l’exposition couvre de manière chronologique les années 1970 à 1983, de la période d’apprentissage jusqu’à son départ du magazine Rolling Stone pour le plus chic Vanity Fair. Pas d’originaux ni vintage ici mais une sorte de best of de plus de deux mille tirages principalement noir et blanc réalisés à partir de scans des originaux. La scénographie compacte, simple et brute s’inspire de la méthode de travail de l’artiste dans son studio new-yorkais : punaisage sur panneau

Annie Leibovitz présentant son exposition, LUMA Arles, 2017. © Claude Lorin

isolant brun guidé par des ficelles tendues à l’horizontal, protégé par de larges plexiglas pour l’occasion. On va même jusqu’à simuler une certaine négligence comme ces tirages

suspendus par un des coins. L’ensemble, structuré en neuf murs d’images, produit une gigantesque impression d’immersion dans l’univers de la photographe et constitue une

Approches sensibles des villes

Jardin d’essai © Maude Grübel

É

grené sur plusieurs mois et en plusieurs lieux, Photomed a confié le commissariat de sa 7ème édition à l’écrivain,

photographe et vidéaste Guillaume de Sardes pour évoquer les mutations des villes méditerranéennes. Plongées urbaines, scènes

quotidiennes, portraits, paysages, intérieurs, panoramiques ou petits formats… quelque soit le point de vue de l’artiste, photographier Tanger, Alger, Beyrouth, Eboli ou Marseille revient aussi à parler de soi. À la Villa Méditerranée, deux traversées impactent notre mémoire : Sur la route d’Alger de Franck Déglise et Jardin d’essai de Maude Grübel invités par Soraya Amrane, fondatrice de l’Atelier de Visu à Marseille. Deux autobiographies photographiques dévoilées avec pudeur dans des styles opposés. Franck Déglise emprunte des chemins pénétrés d’un sentiment fugace de nostalgie, comme s’il effectuait un retour sur un monde en passe de disparaitre. Celui de ses origines. Les zones de non retour révèlent les âmes envolées tandis que d’autres, habitées, évoquent la solitude des êtres : une densité émotionnelle fuite à travers le mouvement, l’équilibre précaire entre le net et le flou, le noir et la couleur intenses. Alger, toujours, aux façades décrépies, aux êtres solitaires, au temps arrêté dans un entre-deux indéfinissable, Maude Grübel en offre un portrait plus distancié. D’origine allemande, la jeune photographe


mine d’or documentaire sur cette période essentiellement états-unienne. « On brisait les règles du journalisme (…) je cherchais la photo que personne ne prenait » rappelle Annie Leibovitz avec une certaine émotion. Travail de proximité, que ce soit sur scène, en coulisses, dans les chambres d’hôtel avec les stars du rock mais aussi reportages-images anti guerre du Vietnam, lancement d’Apollo 17, départ de Nixon, ponctué de photos plus personnelles et familiales. Pour les années plus récentes « mon travail est devenu plus conceptuel » constate la photographe, mettant en scène des portraits de célébrités dans la lignée warholienne. Des images en couleur devenues cultes pour certaines comme Demi Moore enceinte nue ou John Lennon nu enlaçant Yoko Ono. Un catalogue est attendu chez Taschen. Celle-ci devance les Rencontres de la photographie qui consacreront une soirée de projection à la mythique photographe au Théâtre Antique le 6 juillet. CLAUDE LORIN

Chaque semaine, un expert

Annie Leibovitz Archive Project #1 : The Early Years jusqu’au 24 septembre Fondation LUMA, Arles luma-arles.org

GÉOPOLITIQUE ÉCONOMIE URBANISME

marseillaise interroge les espaces architecturés ou naturels, les éléments de décor, les visages dissimulés, pour dire son propre rapport à la cité. Objectif et sensible. Un fil invisible relie ces deux artistes, sans doute leur manière d’être au plus près du monde des humains. Bernard Plossu a tiré 135 photographies de son carnet de route pour composer L’heure immobile à l’Hôtel des arts. En voyageant à ses côtés dans ces trains de lumière, l’évidence du titre apparaît en une fraction de seconde, dans la blancheur éclatante de ses photographies tirées au cordeau. Ponctuée de citations d’écrivains qu’il admire tels Tabucchi, Malaparte et Camilleri, sa sélection questionne la manière de photographier la ville. Sa réponse fuse, simple, évidente : « Quand tout est blanc il y a une lourdeur et une transparence, une cruauté ». Pas de flou, ni retouche ni recadrage, des contrastes aiguisés. Bernard Plossu saisit des villes immuables sous un soleil de plomb.

GRAND TÉMOIN

MA RD I S

D E L A V I L L A

T PAPETERIE

e visite, la carte de correspondance et le papier d’entête. MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Photomed jusqu’au 14 août Villa Méditerranée, MuCEM, Friche la Belle de Mai, Frac, Marseille jusqu’au 11 juin Sanary-sur-Mer, Ile de Bendor, Toulon (Hôtel des arts & Le Liberté) festivalphotomed.com

INFORMATIONS ET INSCRIPTIONS SUR

WWW.VILLA-MEDITERRANEE.ORG/FR/MARDIS-DE-LA-VILLA

WAFAW

WHEN AUTHORITARIANISM FAILS IN THE ARAB WORLD European Research Council - www.wafaw.org

II + + ARAP VE ISLAM

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Syrie Liban Jordanie T. palestiniens Irak


94 critiques arts visuels

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La Grande Muraille verte (détail), Ndary Lo, 2002, métal soudé © AF.

La Ville d’Avignon pare son Palais et ses musées de sculptures africaines contemporaines : une révélation !

L

a Collection Blachère est exceptionnelle, et en mouvement depuis 30 ans. Le Centre d’Art situé à Apt, au cœur de l’entreprise Blachère illuminations, expose l’art contemporain africain, accueille des artistes en résidence, organise des ateliers en Afrique... Depuis 2004 la Fondation entretient les œuvres de la Collection, participe à la Biennale de Dakar, passe commande à des artistes du continent africain et de la diaspora en ayant à cœur d’allier esthétique et éthique, et de soutenir l’artisanat et l’économie de l’art africain. Une Fondation exemplaire, loin des mœurs de certains spéculateurs de l’art contemporain. L’initiative de la Ville d’Avignon ne l’est pas moins : elle accueille pour 8 mois la Collection dans une exposition d’envergure. Qui, par hasard, entre en dialogue avec un des pans de la programmation du Festival. Par hasard ou par convergence ? Les artistes africains sont aujourd’hui au cœur même de la création contemporaine. Des Eclaireurs, véritables. Sur la place du Palais des Papes une Prière universelle de 7,50 m de haut : Ndary Lo, en 2002, soude des fers à béton pour construire un

L’Afrique en éclaireur

corps tendu vers le ciel, aux bras infinis. Dans le Palais d’autres œuvres de l’artiste, toujours en fer soudé et peint de rouille : des Hommes qui marchent comme ceux de Giacometti, pour dire que l’Afrique doit se lever ; des femmes élancées sans visage, une Maternité ronde emplie de têtes de poupées brulées, des arbres formant une Grande muraille verte : les branches en sont encore des mains tendues vers le ciel, des têtes, des visages, et cette végétation de fer, ces arbres anthropomorphiques semblent crier leur douleur, rempart souffrant contre la désertification et la mort à l’œuvre.

Nos gisants et les vôtres Dans ces sculptures exposées les cultures s’enchevêtrent, dialoguent avec l’Europe, s’attachent aux arts traditionnels africains. La présence de la figure humaine y est forte : peu d’abstraction, et malgré une grande diversité de matériau et de propos, la volonté de témoigner des souffrances du continent est omniprésente. Ainsi Diagne Chanel, au Musée du Petit Palais, expose quatre gisantes au cœur

des sculptures médiévales. Une Saison au Sud Soudan, en 2006, témoigne du génocide ethnique en dialogue avec les tombes sculptées des religieux et des seigneurs : ces quatre femmes de bronze, petites et bien trop jeunes pour mourir, resteront anonymes... Celle de Colleen Madamombe, My New born baby Child, dialogue elle aussi avec les sculptures médiévales avec lesquelles elle voisine au Palais des Papes : de la pierre serpentine, la plus dure à sculpter, elle fait surgir un visage maternel rond, un bébé lisse, comme une victoire arrachée. Au Musée Calvet le Lanceur Zoulou d’Ousmane Sow, devenu l’emblème de la lutte contre l’Apartheid, attire tous les regards tandis que le Musée Lapidaire abrite L’Eléphant blessé d’Andries Botha : à terre, mourant, animal de bois parmi les pierres froides... Au Palais des Papes d’autres animaux, très réalistes, de Bamadou Traoré : un Gorille et un Buffle faits de matériaux de récupération métalliques, engrenages, clefs à molette, fusibles, bougies, et dont la mécanique fait surgir comme une humanité paradoxale, une proximité déniée.


95

Lumières et chutes Deux œuvres plus abstraites mais tout aussi lyriques attrapent la lumière dans les salles basses du Palais : une tapisserie métallique d’El Anatsui, faite de bandes de cannettes et de capsules de bouteilles recyclées, étale ses ors et ses rouges dans la Chambre Antique du Camérier, pendue comme le manteau d’un Pape. Dans la Salle du trésor, une magnifique installation de Wim Botha, Solipsis 7.4, interprète la chute d’Icare : faite de néons, de bois léger et d’ailes, de miroirs bleus comme la mer Egée, elle produit un tourbillon de lumière, une descente de plumes, un rêve brisé, un doute profond, une éclipse du soleil et de l’espoir, un solipsisme. D’autres œuvres, Egg Fight de Yinka Shonibare qui met en scène les combats religieux des voyages de Gulliver ; une Danse contemporaine de Moustapha Dimé, où trois figures filiformes jouent d’équilibre et de référence à la Danse de Matisse ; une immense tapisserie de Marcheurs vers un autel chrétien d’Abdoulaye Konaté ; chacune dit la diversité et la force de l’art contemporain africain et entre en dialogue/affrontement avec la mémoire des lieux : avec un Palais, une religion, des musées, un art, qui ont ignoré l’Afrique, et qui pourtant aujourd’hui en sont revivifiés.

Confluences, El Anatsui, 2008, bandes d’aluminium et fils de cuivre © Grégory Quittard,Christophe Aubry

Hic ? Pourtant, si la confrontation avec les collections des musées ou l’histoire du monument enrichit le regard, on aurait aimé que les cartels, plongés dans l’ombre, soient lisibles ; que le parcours dans le labyrinthe du Palais soit fléché pour qu’on puisse y trouver les œuvres ; qu’un document spécifique soit remis au visiteur, avec quelques repères ; qu’il puisse acheter son billet à Calvet ou au Petit Palais plutôt qu’au seul Palais des Papes, où l’attente est souvent longue. Autant d’obstacles qui

Honey, I rearranged tHe collectIon Commissaire invité: Miguel Wandschneider

Musée régional d’art contemporain Occitanie / Pyrénées-Méditerranée 146 avenue de la plage, Sérignan, mrac.laregion.fr

risquent de privilégier plutôt des visites de tourisme que de festivaliers ou d’amateurs d’art du territoire. De fait ce serait dommage de se priver d’une telle expo... Alors passons outre les obstacles ! AGNÈS FRESCHEL

Les Éclaireurs jusqu’au 14 janvier 2018 Palais des Papes et divers lieux, Avignon avignon-tourisme.com fondationblachere.org

01.07 → La Palmeraie

Pauline Zenk Gravitation

2017

Neil Beloufa Développement durable

Posters de la collection lemPert En collaboration avec Culturgest, Lisbonne

08.10

→ 22 octobre


96 au programme arts visuels bouches-du-rhône

Anouk Deville Amoureuse de la photographie depuis ses 15 ans, l’artiste marseillaise fouille son intimité et celle de son entourage pour écrire son journal intime où se mêlent photographies et textes issus de ses correspondances. Il en résulte un portfolio grave et sombre à la fois, poétique et sensuel. C’est cru et intense. À découvrir également dans le livre Journal qui vient de paraître chez Zoème éditions. M.G.-G. jusqu’au 8 juillet The American Gallery, Marseille 06 27 28 28 60

Anouk Deville, crédit American Gallery © Anouk Deville

Ramuntcho Matta Aventure singulière à la croisée du mot et de l’image qui entrent en résonance avec les textes et les dessins de Ratchmundo Matta, esquissés quotidiennement « entre réveil et sommeil, instants de latence ou d’absence mentale ». Pour le CipM, il ouvre son carnet dont il recompose les pages, laissant filtrer au jour la force expressive de sa poésie textuelle et visuelle. M.G.-G. Qu’en pensez-vous ? jusqu’au 1er juillet CipM, Marseille 04 91 91 26 45 cipmarseille.com

© Ramuntcho Matta

Scabellon À l’invitation de Margaux Barthélémy et Théophile Calot, 12 artistes présentent une pièce en volume pour répondre à la question du rapport de la sculpture avec son socle. Des « pièces à poser » signées Anton Alvarez, Victoire Barbot, Mara Fortunatovic, Éléonore Joulin, Vincent Lorgé, Thomas Mailaender, Hubert Marot, Manon Recordon, Ugo Schiavi, Eva Taulois, Romain Vicari et Cyril Zarcone. M.G.-G. jusqu’au 1er juillet Double V Gallery, Marseille 06 65 10 25 04 double-v-gallery.com

Fish museum#4, 2017.
 Aquarium, métal, verre. 
60 x 40 x 25 cm.
 Pièce unique © Thomas Mailaender

Sisley l’impressionniste Contre vents et marées, Alfred Sisley a maintenu le cap de l’impressionnisme, se dévouant entièrement aux paysages bien-aimés peints sur le motif. À travers des photographies d’archives des paysages peints par l’artiste mis en regard avec une soixantaine de ses œuvres, l’exposition explore son ascendance artistique et sa relation avec ses compagnons d’art. M.G.-G. 10 juin au 15 octobre Hôtel de Caumont, Aix-en-Provence 04 42 20 70 01 caumont-centredart.com Alfred Sisley (1839-1899), Sous le pont de Hampton Court, 1874, huile sur toile, 50 x 76 cm, Kunstmuseum Winterthur. Don du Dr Herbert and Charlotte Wolfer-de Armas, 1973 © Schweizerisches Institut für Kunstwissenschaft, Zürich, Lutz Hartmann


Kellylee Evans. Photographie : Arnaud Compagne

AIX-EN-PROVENCE 96.2 MARSEILLE 92.8 jazzradio.fr


98 au programme arts visuels bouches-du-rhône hérault

En ville Pour cette douzième édition, suite à résidences de création, les artistes venant d’Europe et de Méditerranée ont dû penser leurs projets in situ et « tout en légèreté » (M. Kundera). Des installations plastiques, sonores ou mouvantes à expérimenter librement dans la ville. C.L. In Situ 1.2 1er juillet au 30 septembre Centre-ville, Arles 04 90 49 89 10 culturesnomades.org

Devant l’enclos Saint-Césaire : les Essais de Montaigne à la craie blanche selon Mike Schertzer/ Cultures Nomades Production, 2017

Trois plus un En attendant la création du MoCo en 2019, La Panacée enrichit sa programmation avec la première exposition de John Bock en France, dont deux créations, et son dernier film Hell’s Bells : A Western ; une série d’études préparatoires de Wim Delvoye pour son œuvre emblématique Cloaca et une exposition collective, Pré-capital, où les artistes expérimentent des modes de production de l’ère pré-industrielle. Et une série photographique d’Olivier Cablat à partir d’une enseigne d’huître à Bouzigues. C.L. jusqu’au 27 août La Panacée, Montpellier 04 34 88 89 89 lapanacee.org

© John Bock-Courtesy Sprüth Magers and Anton Kern

Faste 19e À Montpellier, le dix-neuvième siècle a été de toute évidence la période la plus faste pour la création picturale. Du romantisme à l’impressionnisme, qu’il s’agisse du portrait ou de paysages, Frédéric Bazille, François-Xavier Fabre ou encore Alexandre Cabanel en sont les représentants les plus connus, sans oublier l’importance de collectionneurs visionnaires tels que Bruyas ou Atger. C.L. Le 19e siècle, un âge d’or de la peinture montpelliéraine jusqu’au 3 septembre Espace Dominique Bagouet, Montpellier 04 67 63 42 78 montpellier.fr

Cabanel Pierre, Nymphe surprise par un satyre, 1875 Huile sur toile 146 x 210 cm © Musée Fabre de Montpellier Méditerranée Métropole - photographie Frédéric Jaulmes

Voir et re-voir Au Musée régional d’art contemporain trois nouvelles expositions. Développement durable de Neil Beloufa (sur les représentations fallacieuses du réel), Gravitation de Pauline Zenk (les images liées à notre mémoire collective) et Honey, I rearranged the collection (revisite la singulière collection Lempert constituée de posters d’artistes contemporains tels que Ben, Warhol, Dubuffet, Rauschenberg... ). C.L. du 1er juillet aux 8 et 22 octobre Mrac, Sérignan 04 67 32 33 05 mrac.languedocroussillon.fr Neil Beloufa, Superlative and Resolution, Biennale d’art contemporain de Lyon, 2013


C’est l’imprimerie... Carte

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JUILLET

2017

TAJ MAHAL & KEB’ MO’ KAMASI WASHINGTON HÀ NÔI DUO ANA POPOVIC

ROBERT GLASPER CYRIL ACHARD GÉRALDINE LAURENT

IMANY TONY ALLEN SEUN KUTI & ROY AYERS www.marseillejazz.com

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19•29


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