Zibel104

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11.02 >11.03.2017

N°104

ZIBELINE

Mensuel culturel & citoyen du Sud-Est

LE FN

E ET LA CULTEUR1 ÉPISOD

2€


09 au 12 MARS 16h 20h dim jeudi au samedi +

L’ÉPAISSEUR

www.theatredeshalles.com Rue du Roi René - 84000 Avignon

DU

Réservations

Si vous marchez dehors, à cette heure et en ce lieu, c’est que vous désirez quelque chose que vous n’avez pas, et cette chose, moi, je peux vous la fournir. Création 2017 Cie Alain Timár

DANS LA SOLITUDE

DES CHAMPS DE COTON Bernard-Marie Koltès

Mise en scène et scénographie Alain Timár Avec Robert Bouvier, Paul Camus et Pierre-Jules Billon (batterie) Production Théâtre des Halles – Compagnie Alain Timár en accord avec Les Déchargeurs / Le Pôle diffusion Production déléguée Le Pôle buro, Ludovic Michel

Le Théâtre des Halles - Compagnie Alain Timár est soutenu par le ministère de la Culture et de la Communication / D.R.A.C. P.A.C.A., le Conseil régional Provence-Alpes-Côte d’Azur, le Conseil départemental de Vaucluse et la Ville d’Avignon

Le spectacle bénéficie du soutien du Théâtre du Passage (Neuchâtel, Suisse) Avignon centre, 26 Rue de la République - 84 000 Avignon

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Photo David Mign&rat / conception et réalisation @ Le Pôle media - graphisme @ iFou pour Le Pôle media - licence 1-1079040 & 2/1029375

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DU 2 MARS AU 1 AVRIL ER

2017

Renseignements & réservations • 04 96 11 11 20 • compagnie@kelemenis.fr • www.kelemenis.fr

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FÉVRIER MARS 2017

CULTURE ET SOCIÉTÉ Mensuel payant paraissant le deuxième samedi du mois Édité à 30 000 exemplaires, imprimés sur papier recyclé Édité par Zibeline BP 90007 13201 Marseille Cedex 1 Dépôt légal : janvier 2008 ISSN 2491-0732 Imprimé par Riccobono Imprim’vert - papier recyclé Crédit couverture : © Alouette sans tête Conception maquette Tiphaine Dubois

Directrice de publication & rédactrice en chef Agnès Freschel agnes.freschel@gmail.com 06 09 08 30 34 Rédactrice en chef adjointe Dominique Marçon journal.zibeline@gmail.com 06 23 00 65 42 Secrétaire de rédaction Anna Zisman anna.zisman.zibeline@gmail.com

ARTS VISUELS Claude Lorin claudelorin@wanadoo.fr

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LIVRES Fred Robert fred.robert.zibeline@gmail.com MUSIQUE ET DISQUES Jacques Freschel jacques.freschel@gmail.com CINÉMA Annie Gava annie.gava@laposte.net

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Maquettiste Philippe Perotti philippe.zibeline@gmail.com

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WRZ-Web Radio Zibeline Marc Voiry marcvoiry@hotmail.com Directrice Commerciale Véronique Linais vlinais@yahoo.fr 06 63 70 64 18 La régie Jean-Michel Florant laregie@gmx.fr 06 22 17 07 56 Collaborateurs réguliers : Régis Vlachos, Dan Warzy, Frédéric Isoletta, Yves Bergé, Émilien Moreau, Christophe Floquet, Pierre-Alain Hoyet, Aude Fanlo, Thomas Dalicante, Marion Cordier, Marie Michaud, Amélie Raux, Chiara Forlani, Louis Giannotti Administration Catherine Simon admin@journalzibeline.fr Houda Moutaouakil contact@journalzibeline.fr

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La culture, un thème électoral ? Les élections approchent, les candidats discourent et les programmes se précisent, les révélations se succèdent, et certains masques tombent. Fillon, droit dans ses bottes et père la vertu, est dans la tourmente, le Front national tente de camoufler ses divisions, Macron n’a toujours pas l’ombre d’un programme, et aucun d’eux ne parle de la société dans laquelle nous aspirons à vivre. Seulement de ce qu’il faut couper, casser, admettre. La France, faut-il le rappeler, est un pays libre, et riche, où il devrait faire bon vivre. À quel titre devrait-on renoncer au progrès ? À gauche le thème est de retour, comme une urgence soudain retrouvée, la possibilité d’un avenir... Notre futur écologique et culturel enfin s’évoquent, et le ciel semble pouvoir s’éclaircir : il est question de construire la société de demain, et non plus d’agiter les terreurs et les renoncements sécuritaires et identitaires. Benoît Hamon comme Jean-Luc Mélenchon veulent augmenter 104 massivement le budget du ministère de la Culture, veiller à sa démocratisation, s’occuper de la rémunération des auteurs et des artistes, introduire un solide enseignement artistique à l’école... Déclarations d’intention qui n’engagent à rien ? Même au plus fort des promesses intenues de 2012, la culture n’était pas un thème de campagne. On se souvient, par la suite, de Manuel Valls regrettant la baisse de son financement par l’État. Filippetti en avait démissionné, et Macron l’avait rétabli : c’est que tailler dans les budgets culturels n’est pas sans impact électoral... Le thème revient donc sur le devant de la scène : l’occasion pour les professionnels de la culture de rappeler leurs besoins. L’occasion pour chacun de lutter contre la disparition des moyens publics, la marchandisation des productions, la raréfaction de l’offre, la difficulté des pratiques. Il reste quelques mois pour se faire entendre, sinon écouter !

ÉDITO

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AGNÈS FRESCHEL


SAISON 2016 // 2017

MARS

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Michel Kelemenis ouvre, avec autodérision et humour, son journal d’artiste. Dans COLLECTOR, quatre danseurs traversent six pièces écrites entre 1984 et 2017, et ravivent en quelques duos les pages historiques ou décalées du parcours d’un danseur devenu chorégraphe. Des années charnières et décisives qui invite Bagouet et Preljocaj à ses côtés, à ses dernières créations, l’écriture gestuelle évolue, tout en affirmant la même détermination à rapprocher performance et organicité.

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MARS 2017


sommaire 104

société

Le revenu universel (P.6-7) La culture en ville FN (P.8-9)

Éducation

L’Institut d’Études Politiques d’Aix (P.10) Les formations de l’ERAC (P.11)

Politique culturelle

Antoine Le Menestrel en train de gravir la façade de l’IEP, lors de la première journée portes ouvertes organisée pour la culture, le 27 février 2016 © Service communication Sciences Po Aix

Le Théâtre Joliette (P.12) La Plateforme aixoise (P.13) Entretien avec HK (P.14) Entretien avec Nicolas Bourriaud, exposition à la Panacée, Montpellier (16-17)

événements

+ de danse à Klap, Big bang à Montpellier (P.18-19) Festival russe, Régions en scène (P.20-21) Mars en baroque, Avec le temps (P.22) Détours en région-Prodig’Art (P.23)

critiques

Rencontres, spectacles, musiques (P.23-43) Marseille, Aix, Cavaillon, Ouest Provence, Arles, Toulon, Ollioules, Château-Arnoux, Montpellier, Sète

Mars en Baroque, du 1er au 31 mars, Concero Soave © Robert Ayache

AU PROGRAMME DU MOIS Musiques (P.44-47) Spectacles (P.48-64)

Exposition En toute modestie - Archipel Di Rosa, au MIAM, à Sète. Régis Perray, les ponsées, 2013-2017, peinture sur toile et bois © AZ

Rencontres du cinéma écocitoyen de Gardanne, projection de La Bataille de Florange © Human Doors Films

cinéma [P.66-73] Arts visuels [P.74-79]

Marseille, Martigues, Aix, Arles, Graveson, Nice, Montpellier, Sète

livres [P.80-86]


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société

© G.C.

La valeur travail LA QUESTION DU REVENU UNIVERSEL, AU CŒUR DE LA CAMPAGNE PRÉSIDENTIELLE, EST UN SUJET COMPLEXE, QUI MÉRITE UNE RÉFLEXION APPROFONDIE. ELLE MET EN ÉVIDENCE LE PARADOXE D’UNE CIVILISATION FONDÉE SUR LA VALEUR TRAVAIL ALORS QU’ELLE TEND À RENDRE LES TRAVAILLEURS OBSOLÈTES

L

e revenu universel est un sujet à la mode. Politiciens et médias se sont emparés, comme si elle était neuve, d’une idée théorisée au fil des siècles et que l’on peut faire remonter à L’Utopie de Thomas More (1516), île régie par les mathématiques, où il n’y a pas de pauvres. Bizarrement, elle séduit des gens de sensibilités très différentes, depuis la gauche radicale jusqu’à la droite libérale, inspirée par l’économiste américain Milton Friedman (1912-2006). La représentation concrète que les uns et les autres s’en font est évidemment très contrastée. Le plus petit dénominateur commun entre ces diverses conceptions est le suivant : une somme allouée régulièrement à chaque individu, jusqu’à sa mort. C’est sur les montants que les divergences commencent : selon certains, il faudrait qu’ils soient suffisants

pour couvrir les besoins de base en terme de logement, santé, alimentation, quand d’autres imaginent un revenu minimum, impliquant que l’on ne puisse se passer d’emploi. On pourrait penser que les tenants de la gauche viseraient plutôt la fourchette haute (autour de 1000 €), ceux de la droite la fourchette

basse (entre 300 et 500 €), mais les choses ne sont pas si simples, car le revenu universel a la particularité de favoriser les rapprochements contre-intuitifs : Christine Boutin, présidente d’honneur du Parti Chrétien Démocrate, et tenante d’une rémunération de la femme au foyer, soutient ainsi ouvertement le candidat PS aux élections présidentielles, Benoît Hamon, sur ce sujet. Dans un tweet du 25 janvier 2017, elle le remercie d’avoir lancé un débat de fond.

Homme superflu et valeurs à la carte

Au delà de savoir si ce revenu de base servirait de subvention aux employeurs, leur donnant l’occasion de baisser les salaires,


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enclencherait le démantèlement de la protection sociale (retraites, chômage, assurance-maladie) ou se substituerait simplement aux minima sociaux, reconnaissons que le concept soulève des questions philosophiques majeures. Car la valeur travail, sur laquelle reposent nos sociétés, est bien ébréchée. Dans un article intitulé Droite, gauche : à chacun son revenu universel (Le Monde, 20 octobre 2016), Patrick Roger évoque un « risque accru d’individualisation et d’affaiblissement des ressorts collectifs ». Une personne sur sept vit sous le seuil de pauvreté en France, le taux de chômage est à 9,7% selon les derniers relevés de Pôle Emploi. Et l’automatisation de la société menace de remplacer massivement les travailleurs humains par des robots ou des algorithmes : un rapport de l’université d’Oxford estime que 57% des emplois actuels des pays de l’OCDE risquent de disparaître d’ici à 2025. Nous débouchons sur un paradoxe : le système crée les conditions d’un chômage structurel, avec des êtres humains qui deviennent rapidement superflus en tant que travailleurs, mais dont il a encore besoin pour consommer. Dans cette perspective, un revenu universel n’est pas inconcevable, il peut même donner bonne conscience à peu de frais. Le problème est qu’il bute sur une pensée aux racines profondes, qui articule la valeur d’un être humain au travail. « Si quelqu’un ne veut pas travailler, qu’il ne mange pas non plus » écrivait Saint Paul aux Thessaloniciens il y a fort longtemps. Le système lui-même ne se prive pas de culpabiliser les chômeurs, les « assistés », les « profiteurs » : tout ce qui rend docile lui est utile. Mais si rémunérer toute la population sans contrepartie protège les marchés, et que l’on économise le coût du

contrôle, corollaire des prestations soumises à condition, alors cela vaut le coup de changer son fusil d’épaule...

Débats d’idées

La vogue du revenu universel titille les intellectuels. Dans la matinale de France Culture le 26 janvier 2017, Jacques Attali disait pencher plutôt vers un revenu universel de formation, « pour reconnaître que le fait d’apprendre mérite rémunération ». L’économiste Thomas Piketty écrivait le 13 décembre dernier que « le problème du débat sur le revenu de base, c’est qu’il passe le plus souvent à côté des vrais enjeux, et exprime à dire vrai une conception au rabais de la justice sociale ». Depuis, avec un collectif de chercheurs, il a signé une tribune pour soutenir Benoît Hamon face à ses détracteurs, où il affirme qu’« économiquement et socialement, le revenu universel d’existence peut être pertinent et innovant ». Nul doute que les économistes et les algorithmes s’emploieront à ce qu’ils savent si bien faire, des calculs savants pour déterminer s’il est envisageable selon telle ou telle modalité, tandis que les politiques rabattront les chiffres à eux. Quant à nous, nous pourrions plutôt nous consacrer à ce que nous seuls pouvons encore entreprendre, en attendant que l’intelligence artificielle ne nous rattrape : réfléchir entre humains au monde dans lequel nous voudrions vivre. Si le tapage médiatique autour du revenu de base pouvait servir au moins à cela, un levier de réflexion, ce ne serait déjà pas si mal.

Derrière le sujet à la mode

Car la question de rémunérer l’existence n’est pas simplement un sujet à la mode, ou un thème

destiné à faire ressortir des clivages idéologiques et politiques ; par delà les joutes oratoires auxquelles se livrent des candidats en quête de suffrages, elle révèle l’ampleur croissante d’une tension provoquée par l’élargissement de la « fracture sociale » et la montée du paupérisme, que des gouvernements acquis aux idées économiques libérales feignent de combattre en misant sur les vertus des marchés livrés à eux-mêmes. Historiquement, la proposition de subvenir aux besoins des indigents est souvent émise dans ces moments critiques où les pauvres représentent une menace pour la cohésion de la société en place. Les débats actuels autour du revenu universel annoncent peut-être un nouveau mouvement de balancier : certains analystes* pensent que nous nous trouvons dans une situation comparable par certains aspects à celle des années 1930. Rémunérer l’existence ne répondrait pas simplement à un objectif de justice sociale ; il s’agit de prévenir un risque d’implosion. En somme, faire passer la pilule de la mondialisation, de la révolution numérique, et étouffer les ferments de populisme... pour que la machine capitaliste puisse continuer à tourner sans être perturbée. Est-ce notre désir ? GAËLLE CLOAREC

* Ainsi le Collectif Roosevelt, mouvement citoyen d’action et de formation politique créé en 2012 par Stéphane Hessel, Edgar Morin, Susan George, Cynthia Fleury, Pierre Larrouturou…

Le Revenu universel selon Benoît Hamon

L

e candidat à la Présidence de la République, s’il est élu, veut établir ce revenu progressivement. Dès 2018 il se substituerait au RSA, l’augmentant de 10% pour les bénéficiaires (passant à 600 €) et le généralisant automatiquement aux ayants droits, ainsi qu’à tous les jeunes de 18 à 25 ans (revenu d’existence sans condition de ressources). Il n’est pas question pour le candidat socialiste qu’il remplace les allocations chômage, ou la retraite, et n’impacterait sur les allocations familiales que lorsqu’il serait généralisé, c’est à dire que 750 € seraient perçus par tous les citoyens, de la naissance à la mort. Son financement ? Il serait mécanique d’une part, par l’augmentation des revenus, donc des impôts sur le revenu, mais aussi par l’augmentation de la consommation, donc de la TVA, et de l’activité, donc des impôts

sur les entreprises. Il tiendrait lieu également de politique nataliste, et entrainerait de notables économies des systèmes de contrôles (du RSA, et à terme des allocations, minima vieillesse et handicap, impôts retenus à la source). Mais il passerait aussi par une réforme des impôts sur le patrimoine (refonte de l’ISF, des droits de succession et des taxes foncières en un seul impôt fortement progressif), ainsi que de l’impôt sur le revenu (+ CSG), avec une augmentation des tranches hautes. Une taxation sur les robots également, concurrents des travailleurs, viendrait compléter le dispositif fiscal. Que les économistes s’accordent à juger réaliste... sinon souhaitable ? A.F.


La culture en ville

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société

NOTRE SUD-EST A LE TRISTE PRIVILÈGE DE COMPTER DEUX TIERS DES MUNICIPALITÉS REMPORTÉES PAR L’EXTRÊME DROITE

I

l y a quatre autres villes FN en France : Hénin Beaumont, où Steeve Briois a été élu au premier tour, Mantes-La-Ville, Villers-Cotterêts et Hayange. Toutes les autres sont ici. L’histoire n’est pas nouvelle : Toulon et Vitrolles furent de malheureux précurseurs, qui se sont rapidement débarrassés de leurs maires après des gestions catastrophiques qui ont plombé leur ville. Aujourd’hui les maires sont plus circonspects et gèrent leurs villes en évitant

soigneusement de contrevenir aux lois. Leur but : dépasser l’échelle municipale, et conquérir départements, régions, état. Mais les débordements sont nombreux, en particulier dans le traitement de la question culturelle. Comment s’en étonner ? Marion Maréchal Le Pen, lors du discours de soutien au candidat Joris Hébrard, affirmait son credo local : « La Provence est une terre d’identité et de résistance. Résistance des princes provençaux face à l’invasion sarrasine,

résistance face à la terreur révolutionnaire, face à la réforme protestante, face à l’occupant allemand, face au funeste projet de l’Union européenne en 2005. » Car pour le FN et la Ligue du Sud, la Culture est un terrain de bataille : il faut y éliminer l’ennemi et imposer la pureté blanche, catholique et hétérosexuelle. Par la censure, la main mise sur les programmations, ou les coupes de subventions. AGNÈS FRESCHEL

Beaucaire sous l’ère identitaire Division et régime de faveur

© Alouettes sans tête

E

n mars 2014, Julien Sanchez, jeune pousse du Front national, fraîchement parachuté, s’empare de la mairie de Beaucaire. Sur les rives du Rhône, les victoires de Gilbert Collard à Saint-Gilles (30) ou Valérie Laupies à Tarascon (13) sont attendues. Elles ne viendront pas. Dans ce triangle entre Gard, Vaucluse et Bouches-du-Rhône, c’est à Beaucaire (30) et au Pontet (84) que le FN s’impose. Près de trois ans après son élection, quel constat établir sur l’administration de Julien Sanchez ? Comment la politique culturelle est-elle menée ? À Beaucaire, le patrimoine et les traditions sont une composante culturelle indéniable. Ainsi, en ces terres de Camargue, les associations taurines subventionnées entrent dans la ligne budgétaire « culture ». « Beaucaire ville de traditions » annonce en page d’accueil le site Internet

de la mairie, avec une photo de deux jeunes femmes en costume folklorique provençal. Cette imagerie de la culture provençale figée au XIXe siècle, très marquée dans cette région par la figure de l’Arlésienne, est régulièrement mise en avant. Ce n’est pas un fait nouveau. Mais le FN en a accentué la revendication identitaire et traditionaliste. Au-delà d’un ancrage local patrimonial, il s’agit de signifier que les valeurs qui y sont liées sont en péril, « mises à mal par nos gouvernants par lâcheté, compromission, clientélisme ou goût pour le communautarisme », selon les mots du maire. Loin de faire de cette culture d’oc une passerelle d’ouverture, le but est d’en exacerber la notion de repli et de la transformer en outil de confrontation. Y compris contre ceux qui défendent cette tradition sans avoir les mêmes visées idéologiques.

Dans la ville, depuis l’élection du nouveau maire, la tendance est au clivage parmi la population. « Diviser pour mieux régner », résume une habitante. « Il y a ceux qui sont avec eux et les autres », renchérit une autre. Un exemple, qui peut sembler anecdotique, est en fait révélateur de ce climat. L’association Soie et Velours d’Argence, qui promeut la tradition et les costumes provençaux, est présente depuis 10 ans à Beaucaire. Début 2016, elle a dû recomposer son bureau, certains de ses membres rejoignant L’Escolo de Tradicioun, tout récemment créée, et « qui a le soutien de la municipalité » avec laquelle « de nombreux projets sont d’ores et déjà envisagés en collaboration avec la ville ». De fait, la création de cette association est à l’initiative de Mireille Fougasse, adjointe à la culture et aux traditions. En décembre, une subvention exceptionnelle lui a été attribuée par le conseil municipal. Soie et Velours d’Argence, qui a déposé un projet de « petit musée du costume » et sollicite l’usage d’un local, attend un accord depuis deux ans. La proximité avec les idées du FN semble donc le meilleur passeport pour obtenir les faveurs de la mairie. L’expérience vécue par Les Têtes à clap en est une autre illustration. Beaucaire ne dispose pas de salle de cinéma, mais cette association, née en 2006, s’efforce d’y valoriser le 7e art. Elle organise notamment un festival d’été réputé (Jacques Perrin ou Jean-Pierre Jeunet


FN en ont été les invités d’honneur) à Beaucaire et à Tarascon, et un festival de cinéma scolaire, également dans les deux villes et en lien avec le Festival Itinérances d’Alès.

Censure et intimidation

En 2014, l’association, dont les valeurs sont incompatibles avec celles du FN, craint une récupération politique et renonce à la subvention municipale. La présence durant plusieurs mois, en tant que directeur adjoint de la communication de la mairie, de Damien Rieu, très lié à Génération Identitaire, confirme cette incompatibilité. Par la suite, la mairie décide de ne plus attribuer de bus pour emmener les élèves aux projections à Tarascon. Les classes se rendent donc à pied dans la ville voisine. « C’est une heure de marche en tout, on ne peut pas le faire avec les maternelles », explique Ludovic Duplissy, le président. L’association

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Épisode 1 Beaucaire résiste mais a subi beaucoup d’hostilité, initiée notamment par Valérie Laupies, élue FN d’opposition à Tarascon, où elle est directrice d’école et vice-présidente du Collectif Racine, le rassemblement d’enseignants lié au FN. Fin 2014, en particulier, invectives et menaces envers l’association se propagent sur Internet, avant que l’affaire se tasse. Mais Valérie Laupies refuse que les enfants de son école participent au festival. Pour Julien Sanchez, Les Têtes à Clap est une association politisée qui « n’a pas le monopole du cinéma à Beaucaire. On n’a pas besoin d’eux et la mairie organisera prochainement des projections de films pour les enfants de la ville sans avoir à passer par cette association ». Pour beaucoup de Beaucairois, pressions et intimidations sont devenues le lot quotidien. Parmi les agents municipaux également, qui sont nombreux à avoir choisi de quitter leurs fonctions. Ou qui s’adaptent tant bien que mal. À la bibliothèque, le maire, qui a fait de

l’absentéisme des fonctionnaires un axe de sa communication et de sa politique, a fixé l’ouverture au public à 35 heures par semaine. Une amplitude excessive pour une ville de 16 000 habitants, qui a fait décroître la fréquentation (ce que conteste le maire) et supprimé le côté forum qu’avait le lieu avec des horaires plus resserrés. La mairie tente aussi de poser son empreinte en sollicitant l’achat d’ouvrages. Quant au rayon presse, il a déjà nettement évolué. D’emblée, Julien Sanchez a demandé d’en « élargir le spectre ». Minute, Valeurs Actuelles ou Présent sont désormais en bonne place dans la salle des périodiques. Pour veiller à l’équilibre, les services de la bibliothèque ont proposé de coupler ces nouveaux abonnements à un autre titre : Charlie Hebdo, L’Obs et L’Humanité. Demande accordée pour les deux premiers. En revanche, le bon de commande de L’Humanité n’a toujours pas été signé. Comme un symbole... JAN-CYRIL SALEMI

Nos villes FN ou Ligue du Sud Marseille, 1er secteur. 150 000 habitants Stéphane Ravier, FN, élu en triangulaire avec 35% des voix Qualifié de « dictateur Nord Phocéen » par Antoine Maggio, un de ses adjoints démissionnaires, il exige de valider la programmation du Centre culturel Busserine.

Béziers, Hérault. 75 000 habitants Robert Ménard, FN, élu en triangulaire avec 47% des voix « Etre Français, c’est être Européen, blanc et catholique ». Matinale de LCI le 5 septembre 2016

Fréjus, Var. 52 500 habitants David Rachline, FN, élu en triangulaire avec 45,60% des voix Coupe drastique des subventions aux associations, en particulier celles du centre social Villeneuve : sa directrice avait constaté dans le Monde « l’augmentation des actes racistes depuis l’élection de David Rachline ».

Orange, Vaucluse. 31 000 habitants Jacques Bompard, Ligue du Sud, réélu au

premier tour avec 59,82% des voix « Je trouve scandaleux le financement public du pipi-caca des spectacles d’Avignon ». « Pas de création contemporaine, c’est subversif ». « Votre littérature bolchévique et pornographique n’intéresse personne. » Propos cités dans Télérama, 2015.

Le Pontet, Vaucluse. 15 600 habitants Joris Hébrard, FN, élu en triangulaire avec 42,60% des voix A augmenté ses indemnités de 44% mais a supprimé la gratuité dans les cantines pour les familles les plus démunies.

Beaucaire, Gard. 16 000 habitants Julien Sanchez, FN, élu en quadrangulaire avec 39,80% des voix A promulgué à la veille du ramadan un arrêté interdisant l’activité « des épiceries, primeurs et commerce de distribution de 23h à 8h »

Bollène, Vaucluse. 14 000 habitants Marie-Claude Bompard, Ligue du Sud, réélue au second tour en duel avec 55,40% des voix A interdit le Chant des Partisans lors de la

commémoration du 18 juin 2013 et refusé de marier un couple d’homosexuelles

Cogolin, Var. 11 000 habitants Etienne Lansade, FN, élu en duel avec 53,10% des voix « Si je disais tout ce que je pense de la Seconde Guerre mondiale, je serais inéligible trois fois en cinq secondes. »

Le Luc, Var. 9500 habitants Philippe de la Grange puis Patricia Zirilli puis Pascal Verelle, FN, élu en quadrangulaire avec 42% des voix « Je démissionne à cause des pressions d’une équipe qui me reproche de ne pas être assez FN. Leur seule motivation pour Le Luc : augmenter leurs indemnités. » Patricia Zirilli

Camaret-sur-Aigues, Vaucluse. 3500 habitants Philippe de Beauregard, Ligue du Sud, élu en triangulaire avec 36,30% des voix A fait retirer les affiches du film La belle saison de Catherine Corsini parce qu’il « est émaillé de scènes érotiques ». Homosexuelles


10 éducation

Sciences Po opérateur culturel

Antoine Le Menestrel en train de gravir la façade de l’IEP, lors de la première journée portes ouvertes organisée pour la culture, le 27 février 2016 © Service communication Sciences Po Aix

ROSTANE MEHDI, QUI A REPRIS LA DIRECTION DE L’INSTITUT D’ÉTUDES POLITIQUES D’AIX DEPUIS 18 MOIS, VEUT ÉCRIRE UNE NOUVELLE PAGE DE SON HISTOIRE

O

n se souvient du scandale qui a secoué l’Institut : l’ancien directeur, Christian Duval, outre le fait qu’il employait sa famille et noyautait le Conseil d’Administration, a signé des partenariats plus que douteux avec des instituts de formation, qui facturaient des frais d’inscription 20 fois plus importants que ce que percevait l’IEP, pour délivrer des masters à des étudiants qui payaient, mais n’avaient pas le niveau initial... une « crise de gouvernance d’une gravité exceptionnelle », qui aujourd’hui encore entraîne l’IEP dans une procédure judiciaire pour gestion de fait, et un contentieux administratif qui lui fait courir un « risque financier considérable ». Mais, affirme Monsieur Mehdi, la logique est bien celle d’une « sortie de crise » : la direction précédente, coupable de ces faits, n’est plus aux commandes, le Conseil d’Administration a été renouvelé, et le projet pédagogique est mené par une équipe d’enseignants exceptionnels, en concertation constante avec les étudiants et tous les personnels. Rostane Mehdi affirme avec conviction qu’il dirige « un établissement de service public, qui doit respecter l’intérêt général, qui dans tout établissement d’enseignement est d’abord celui des étudiants. » De fait, miraculeusement dans ce contexte, les inscriptions n’ont pas décru : avec 1934 étudiants en formation initiale, 516 étudiants en formation continue et 442 qui préparent les concours administratifs, SciencesPoAix reste une marque qui attire, et fabrique 430 vrais diplômés par an, avec 9 spécialités de

Master. Ainsi les lauréats du Concours commun (Sciences Po Aix, Lille, Lyon, Rennes, Strasbourg, Toulouse et Saint Germain en Laye) continuent d’élire Aix pour y vivre leurs études, reconnaissant la qualité toute particulière du projet.

Un projet culturel

C’est que SciencesPoAix bénéficie d’un « environnement régional exceptionnel ». Est-ce à dire que les étudiants cherchent le soleil ? Pas exactement, mais la Méditerranée et les relations internationales tissées avec le Sud, certainement. Il y a 200 étudiants étrangers, et une relation de confiance et de partenariat s’est nouée avec Aix Marseille Université, mais aussi avec les universités de Toulon et d’Avignon, et l’École Centrale, qui délivrent les Masters. Mais l’environnement aixois, c’est aussi une vie culturelle, artistique et patrimoniale, exceptionnelle. L’accès à la culture des étudiants, qui est une priorité, est facilité et encouragé. Mais l’IEP peut il pour autant devenir un opérateur culturel ? « Sciences Po ne peut pas être une formation technique, elle doit s’adosser à une formation culturelle, sociale et éthique. Dans cette cité culturelle phare, SciencesPoAix peut affirmer la singularité de son projet culturel. » C’est-àdire devenir une force de proposition, et de programmation ? Malgré la faiblesse du budget consacré au projet culturel, il est déjà à l’œuvre. « Nous

avons, dans un contexte budgétaire contraint en raison de nos difficultés judiciaires, pu dégager une ligne budgétaire de 15 000 euros. » Mais aussi désigner un enseignant référent, Roxana Nadim, qui anime le projet en lien constant entre étudiants et opérateurs culturels. Ainsi, en dehors des conférences publiques fréquentes dans les amphis de l’IEP, et qui attirent un public régulier, l’IEP organise des événements en lien avec le MuCEM (voir p 24), avec les Écrivains du Sud (création d’un prix littéraire SciencesPoAix décerné par les étudiants et les personnels) et avec le Festival d’Aix : Benjamin Dupé, compositeur qui sera en création au Festival International d’Art Lyrique 2018, est en résidence à l’IEP, et y organise conférences et ateliers. Par ailleurs l’IEP est déjà sur les rangs pour être partenaire de MP2018... et est partenaire de Zibeline, mensuel culturel et citoyen ! Chacun de ces projets repose sur une participation active, et intelligente, des étudiants, qui apprennent à animer des débats, à écrire des critiques, s’intéressent aux politiques culturelles, à la création contemporaine, à la vie des idées et des arts. Une future marque SciencesPo ? AGNÈS FRESCHEL

04 42 17 01 60

sciencespo-aix.fr


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Comédiens à la barre ! UN NOUVEAU DIPLÔME D’ÉTAT (DE) DEVRAIT RATIONNALISER LES DIFFÉRENTES FORMATIONS DE THÉÂTRE PROPOSÉES DANS LES ÉTABLISSEMENTS D’ENSEIGNEMENT ET LES CONSERVATOIRES

D

idier Abadie dirige l’ERAC (École Régionale des Acteurs de Cannes et Marseille) depuis sa création en 1990. Une école de comédiens, désormais installée en partie à la Friche, dans le très bel équipement de l’IMMS (Institut Méditerranéen des Métiers du Spectacle), qui affiche une belle réussite Son accès sur concours offre la gratuité d’une formation exceptionnelle, l’obtention du DNSP (Diplôme National Supérieur Professionnel de Comédien) trois ans plus tard, et la possibilité de bénéficier du FIJAD (fonds destiné à financer l’embauche de jeunes comédiens diplômés dans les productions dramatiques). Pour présenter le concours d’entrée dans les écoles nationales, les postulants doivent faire preuve d’une formation de base dispensée essentiellement par les Conservatoires, dont les professeurs sont titulaires du DE de professeur de théâtre. Or cette formation, que gérait le ministère de la Culture et de la Communication, avait été supprimée depuis 2009. De sorte que, depuis, le manque d’enseignants se faisait sentir, et que les classes fermaient... C’est pourquoi, en 2015, le Ministère a demandé aux 13 écoles nationales de formation d’acteurs d’imaginer un dispositif d’études débouchant sur l’obtention du DE, comme les enseignants de musique ou de danse des conservatoires. Trois écoles (l’École Supérieure d’Art Dramatique de Paris, la Comédie de Saint-Étienne et l’ERAC) sont désormais habilitées à la formation de comédiens désireux d’enseigner leur art.

Pédagogues de la parole

Ce DE, formation de niveau III financée par le Ministère, attend des candidats de profils différents mais justifiant de solides prérequis spécifiques. En fonction des qualifications et compétences déjà acquises et d’heures de travail rémunérées déjà effectuées, quatre parcours différents sont possibles : formation initiale ou continue, examen sur épreuves et VAE (validation des acquis de l’expérience) pour l’instant uniquement organisée par l’ERAC. D’ailleurs, les premiers reçus après la VAE viennent d’être désignés par l’ERAC : sur 20 qui se présentaient, 11 ont obtenu le DE. Mais comment transmettre une expérience d’’enseignement initial quand les comédiens,

L’équipe de l’ERAC à l’IMMS © Chris Bourgue

contrairement aux musiciens et aux danseurs, se sont souvent formés d’abord sur le tas ? Comment concevoir des cycles d’enseignement, des modules destinés aux futurs professeurs de théâtre ? Quelle technique de jeu faut-il enseigner, dans un métier où on a souvent fait ses premières gammes inconsciemment ? Les titulaires du DNSP, dispensés des épreuves d’interprétation mais sans expérience pédagogique, seront formés à la transmission de leur art. Chaque participant retenu suivra jusqu’à 5 modules de 400 h et 100 h de stage pratique avec les divers publics des établissements scolaires et des Conservatoires. Le Rectorat d’Aix-Marseille a déjà sélectionné les 60 classes qui accueilleront dès le mois d’avril les élèves/ enseignants à Marseille, Toulon et Aix

la prise de parole, d’écoute, et de lecture des textes… Leur diplôme en poche, ces nouveaux enseignants pourront aussi assurer la conduite d’ateliers, participer à la vie culturelle locale, en dialogue constant avec l’enseignant de la classe ou du groupe dans lesquels ils interviennent. Un diplôme d’Etat bienvenu : oui, l’art dramatique s’enseigne et se transmet comme les autres. Oui, pratiquer en amateur avec des professeurs diplômés est une garantie. Et il est certain qu’il manque un peu partout de véritables professeurs de théâtre : dans les conservatoires et les écoles, mais aussi dans les cours privés et les centres culturels, les lycées et les universités. C’est en formant des enseignants qu’on répondra à cette demande insatisfaite, et en veillant à ce que ces professeurs continuent d’exercer leur art pour l’enseigner au mieux... CHRIS BOURGUE

Artiste dans la cité et l’école

En situation pratique d’enseignement, chaque stagiaire sera placé devant des auditoires variés selon un dispositif joliment baptisé « Parole en acte ». Dans le cadre strictement scolaire il assurera des activités d’éveil, d’initiation à

Régionale des Acteurs de Cannes et Marseille 04 93 38 73 30 erac-cannes.fr 04 93 IMMS - Institut méditerranéen des métiers du spectacle, Marseille 04 88 60 11 75 lafriche.org


12 politique culturelle

Enjoleuse Joliette LE THÉÂTRE DE LA MINOTERIE DEVENU JOLIETTE POURSUIT DEPUIS 2013 SON PROJET REMARQUABLE. FAISANT, PAS À PAS, TOUT CE QUE LES MINOTIERS AVAIENT PRÉVU. ET AU-DELÀ !

L

e Théâtre Joliette accueille les coqueluches de la scène contemporaine internationale (de TGStan à Bouchra Ouizguen), donne une grande place à la création régionale, surtout la plus jeune (Charles Eric Petit, voir p 34, Vincent Franchi, mais aussi Christian Mazzuchini ou Philippe Boronad), propose des créations maison qui partent ensuite en tournée (Fuck America, Papa part, Trois Perrault), s’engage à la hauteur de ses moyens dans de véritables coproductions... Et accueille en résidences longues des compagnies pour « donner à vivre le lieu et le quartier au-delà des spectacles », explique la directrice Pierrette Monticelli. C’est-à-dire ? Il s’agit de proposer des formes bistrot à ceux qui fréquentent le restau à midi, de travailler avec les établissements scolaires, l’hôpital européen et les entreprises, de proposer des ateliers de pratique... Mais aussi d’inscrire la création dans la réalité d’un « quartier qui n’en est pas un » : Euromed. Après Renaud Marie Leblanc (Didascalies) et Alexandra Tobelaim (Tandaim) accueillis pendant 3 ans, ce sont La Paloma et les Pas perdus qui sont installés en résidence depuis septembre et jusqu’en 2020, et s’apprêtent à livrer leurs premières formes.

Les résidents

Le choix des Pas perdus, collectif d’artistes qui inventent des installations plastiques bidouillées avec les habitants, peut étonner : leur travail en espace public est a priori éloigné des pratiques d’un théâtre. Mais il colle au projet des Minotiers : « ce qu’ils engagent dans ce quartier prend par un autre bout le travail que nous y faisons », explique Haim Menahem, l’autre directeur du lieu. « Nous essayons d’amener les passagers du quartier, ceux qui y travaillent de 10h à 18h, à rester le soir et à nouer un rapport avec l’art. D’un autre côté on essaie de faire traverser la rue à ceux qui vivent dans le quartier plus pauvre de l’autre côté du tram. Les Pas perdus, eux, vont vers eux, pour poétiser le réel, transformer leur vision, s’installer dans leur espace. » Guy André Lagesse en effet travaille sur le rêve, le songe éveillé, l’échappée mentale : comment se rêve-t-on dans cet univers urbain dont la vie commune est absente, dans ce quartier bord de mer où la mer est cachée,

La Joliette des Songes © Les Pas Perdus

ce monde du travail tertiaire dont les enfants, les pauvres et les retraités sont absents, où les commerces sont standardisés ? Ce quartier diurne, sans habitants, génère-t-il des rêves ? Les Pas perdus affirment que oui, les recueillent en baladant leur « studio volant », photographient les rêves des habitants et fabriquent des affiches qui les matérialiseront, et seront exposées sur des colonnes Morris en juin... Rachel Ceysson et Thomas Fourneau (La Paloma) travaillent aussi sur le quartier. Avec un projet de film, Extérieur nuit / Intérieur jour, qui explore les extérieurs nocturnes déserts, beaux et désincarnés, et par contrastes les bureaux standardisés où les employés impriment la trace intime de leur présence... Un projet de spectacle aussi, qui sera créé en novembre : Trust de Falk Richter s’attache aux sociétés en faillite après les krachs boursiers.

La fusion

Mais les entreprises culturelles subissent elles aussi la réalité économique, et la volonté politique. Marseille Provence 2018 ? « Ils n’ont pas

songé à nous inclure dans le projet, apparemment le travail que nous faisons avec les compagnies d’ici et les habitants d’ici ne les intéresse pas. Pas plus qu’en 2013, on a l’habitude... » déclare Haïm Menahem. Pourtant la réussite du projet Joliette a amené les collectivités à leur confier aussi le Théâtre de Lenche. La fusion sera effective dès septembre 2017, mais tout est à penser : il faut programmer sur les deux lieux, avec un budget qui n’est pas arrêté (« on sait ce qu’on a demandé, on ne sait pas ce qu’on aura »), une équipe actuellement sans activité dont il va falloir intégrer ceux qui voudront rester, un organigramme général à repenser.... « On n’a que trois ans, et en septembre il faut que notre nouveau projet prenne corps. C’est beaucoup de travail...» La fatigue des directeurs et de toute l’équipe, trop petite pour tant d’activité, est visible sur les visages. Presque autant que leur enthousiasme intact, et la fierté du chemin accompli... AGNÈS FRESCHEL


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La culture en jeu DANS LE CONTEXTE DES RÉFORMES TERRITORIALES, DE LA DISPARITION PROGRAMMÉE DES DÉPARTEMENTS ET DE LA MISE EN PLACE DE LA MÉTROPOLE MARSEILLAISE, LA PLATEFORME AIXOISE1 TÉMOIGNE DE SES INQUIÉTUDES, MAIS EXPOSE AUSSI AVEC DÉTERMINATION SES CONVICTIONS COMMUNES

Q

ui sont-ils ? Initiée par le Groupe des 27 (regroupement informel de compagnies et de programmateurs du spectacle vivant fondé en 2004), qu’elle élargit en intégrant des structures du livre et de l’audiovisuel, la Plateforme aixoise compte 23 structures, dont 19 ont répondu à une enquête. Ces 19 sont toutes en association loi 1901, créées entre 1959 et 2005. La conférence-débat proposée à l’amphithéâtre de la Verrière à Aix-en-Provence a fait salle comble : acteurs culturels, personnalités politiques de divers partis et de diverses institutions. À l’éloquence des différents porteurs de parole, d’une exemplaire collégialité, qui posent les principes philosophiques qui sous-tendent leurs actions, s’ajoute celle des chiffres2 et l’inquiétude face à l’évolution tendancielle entre 2014 et 2016 : une baisse des financements publics de 9% (-16% pour la Ville d’Aix, -14% pour la CPA, le CT et la Métropole, -21% pour le CD13), même si l’on peut noter la hausse de la part de la Région PACA, +5%, et la stabilité de l’État… Le nombre des manifestations baisse de 6%, mais celui des heures d’ateliers augmente de 21%, la masse salariale baisse de 12%, les cachets d’artistes de 33%... Un constat commun, même si la réalité de chaque structure est très contrastée.

Entre public et privé

L’enjeu est de taille. Certes, s’insinue avec insistance l’idée de financements privés, de mécénats pour financer la culture. De nombreux avantages sont d’ailleurs offerts aux entreprises (déductions fiscales et image positive), mais le nombre de mécènes a tendance à baisser. Et la question des devoirs de l’État se pose : le financement public est une reconnaissance du

caractère essentiel de la culture, sa pratique, sa diffusion, sa conception, nécessaire au domaine public, participant à la construction de chacun et de la société. La culture nous fonde et en cela se doit d’appartenir à tous, et par l’effort de tous, au même titre que l’éducation. La subvention n’est pas une solution de fainéant, mais la matérialisation d’un pacte qui lie les institutions et les collectivités locales à un réseau associatif indépendant, qui trouve sa logique dans des objectifs partagés : la culture est alors véritablement un enjeu de service public. On peut se demander si le mécénat aurait sur le long terme, et s’il devient la seule source de financement, la volonté ou même la capacité de soutenir une culture libre, exigeante et diverse. La manière d’envisager la façon de financer la culture est essentielle. Faut-il la lier à un exercice de charité (octroyé selon le bon vouloir de mécènes plus ou moins éclairés) et la faire par ce biais entrer dans un système de marchandisation (avec toutes les compromissions que cela implique), ou à un dû car estimée nécessaire par l’ensemble du corps social ?

Cette conférence-débat s’est tenue le 23 janvier, dans l’amphithéâtre de la Verrière, à la Cité du Livre d’Aix-en-Provence

MARYVONNE COLOMBANI

Pendant les vacances au théâtre Massalia La plateforme culturelle aixoise : Les Vagues à Bond, Images de Ville, Ad Fontes, Airelles Vidéo, Ainsi de Suite, Institut de l’Image, Les Écritures Croisées, Débrid’Arts, Théâtre du Maquis, In Pulverem Reverteris, Virgule et Pointillés, La Variante, le 3bisf, Théâtre Antoine Vitez, l’Auguste Théâtre, ATP d’Aix-en-Provence, Opening-Nights, Cie Bernard Menaut, Traffic d’Arts, Sennaga, Théâtre des Ateliers, Les 4 Dauphins, Fragments.

11 > 13 février

1

2

6+ ans

Skappa ! & aSSoCiÉS

Activités 2016 des 19 structures ➝ 1 175 manifestations (dont 943 sur Aix, 165 sur le Pays d’Aix, 64 au niveau national et 3 à l’étranger) ➝ 64 903 entrées, 15 737 scolaires, 4501 participants d’atelier (11 441 heures) ➝ 54 créations ou œuvres nouvelles Données économiques cumulées des 19 structures en 2016 : ➝ Budget global TTC : 2 552 064 € ➝ Subventions publiques : 68% ➝ Aix : 22% des subventions ➝ CT, métropole : 18% ➝ CD des Bouches-du-Rhône : 16% ➝ Région Paca : 17% ➝ État : 19% ➝ Europe : 1%

\/ arts visuels

24 et 25 février

7+ ans

Cie de l’Énelle

\/ conte théâtral

Friche la Belle de Mai 41 rue Jobin 12 rue François simon 13003 marseille

Billetterie 04 95 04 95 75 www.theatremassalia.com


14 politique culturelle

HK, saltimbanque

mé-ch’ti-terranéen

O

L’AUTEUR DE ON LÂCHE RIEN, HYMNE DU MOUVEMENT SOCIAL ET DE CERTAINS MEETINGS PRÉSIDENTIELS, VIENT RÉGULIÈREMENT EN PROVENCE. POUR Y CHANTER, MAIS PAS SEULEMENT !

riginaire de Roubaix, Kaddour Hadadi, plus connu sous le nom de scène HK (avec ou sans les Saltimbanks) a tissé des liens forts avec ceux qui ne baissent pas les bras dans la région. Celui qui se définit comme un Citoyen du monde (titre de son premier album en 2011) s’en prend aujourd’hui à L’empire de papier, son cinquième opus. Au-delà de la musique, HK aime avant tout les mots, la langue. Son dernier roman, Le cœur à l’outrage (Riveneuve éditions), sort également en librairie. Rencontre. Zibeline : Les Fralib, Nuit Debout, RESF, Emmaüs et la Fondation Abbé Pierre… Vous venez souvent soutenir des mouvements de résistance dans la région. La lutte est-elle plus festive au soleil ? HK : On est content quand on nous appelle. À chaque fois, on le fait avec fierté. Mon truc, c’est la musique, la poésie et elles portent leur part de combat. Le combat social au sens large. On soutient les exclus, qu’ils viennent de l’intérieur ou de l’extérieur. Tout cela fait partie d’un seul et même questionnement sur notre société, notre humanité : HK © Vincent Bouvier qui sommes-nous ? Qui est l’autre pour nous ? tonalité blues, pas dans la forme mais dans Vous avez également écrit la musique du l’esprit. Je voulais faire un album avec une documentaire J’ai marché jusqu’à vous – récits âme, dans une approche un peu plus univerd’une jeunesse exilée, du réalisateur aixois Rachid selle, moins franco-française. L’engagement Oujdi. Que vous évoque la situation des réfugiés citoyen est toujours présent, avec une dimension et des migrants ? plus humaniste. L’empire de papier est notre Nous sommes tous des réfugiés. Ils sont nous, société : une forteresse sur un socle de billets. nous sommes eux. Dans notre propre histoire, On s’enferme pour protéger ce bien devenu si nous n’avons pas un parent ou un grand le plus sacré, l’argent. Un monde basé sur la parent qui l’a été, nous aurons sans doute un compétition et la finance ne peut pas être un enfant qui le sera un jour. Que ce soit pour des projet humain, qui doit reposer sur la solidarité, raisons climatiques, de guerre ou d’oppression. la fraternité, la bienveillance. L’histoire de l’humanité est celle de la quête Vous sortez également un nouveau roman, d’un refuge. On peut essayer de se voiler la Le cœur à l’outrage. Est-ce la version littéraire face mais la réalité est celle-là. du disque ? Quelle est la tonalité de L’empire de papier, Dans l’album, il y a le morceau Ce soir nous votre nouvel album ? irons au bal que j’ai écrit au lendemain des Cela reste du HK, avec un côté world plus attentats du 13 novembre 2015. Le livre est assumé, des sonorités folk et reggae. Et une le prolongement de la chanson. Sous un état

d’urgence permanent, on veut nous faire avoir peur de notre voisin. Il nous faut garder cette envie de danser avec l’autre, en restant tel que l’on est, individuellement et collectivement. Plus fort que le « vivre-ensemble », mon roman invite au « danser ensemble ». Vous ne lâcherez toujours rien au printemps 2017 ? En 2012, deux candidats à la présidentielle (Philippe Poutou et Jean-Luc Mélenchon, ndlr) ont utilisé la chanson On lâche rien pour leur campagne. Nous avons pris le parti de ne soutenir personne en 2017. J’ai l’impression que l’on a quelques soucis démocratiques. Les grands médias, qui appartiennent à des groupes financiers, industriels ou militaires, choisissent la tonalité de la campagne. Et ils ont décidé de faire de Macron leur poulain. Un enfant du système qui galvaude le mot « révolution ». La communication a fini par vider les mots de leur substance. PROPOS RECUEILLIS PAR THOMAS DALICANTE

HK participait à la soirée d’hommage à l’abbé Pierre, le 21 janvier au Dock des Suds, Marseille L’empire de papier, dans les bacs et Le cœur à l’outrage, en librairie au mois de mars


FESTIVALRUSSE Abonnez-vous ! 04 91 02 54 54

Vendredi 10 > Samedi 25 Mars

Sur-titrages en français + d’infos > www.toursky.fr

Les clowns Semianyki Cabarets russes Récital Exposition Le Dragon Journées cinéma Ballet Igor Moïsseïev Université populaire

Accompagnement et conseil en ingénierie culturelle Première tournée de médiations et de concerts du dispositif « Détours en région » de janvier à avril 2017. 9 concerts de l’Ensemble Café Zimmermann, 24 temps de rencontre avec les publics organisés par Prodig’Art en partenariat Café Zimmermann, la Garance-Scène Nationale de Cavaillon, l’Espace Culturel de Chaillol, le Centre Culturel René Char de Digne-les-Bains et le Forum des Jeunes et de la Culture de Berre l’Etang.

Les Clowns du Semianyki / Théâtre Toursky 2016

Depuis 2012 Prodig’Art propose une approche innovante du rapport au territoire et aux publics autour des musiques savantes.

www.prodigart.org

« Détours en région » reçoit le soutien de Prodig’Art est subventionné par

MARSEILLE


16 politique culturelle

NICOLAS BOURRIAUD, FIGURE PENSANTE ET ACTIVE DE L’ART CONTEMPORAIN MONDIAL, EST ARRIVÉ DEPUIS UN AN À LA TÊTE DE LA FUTURE STRUCTURE TRICÉPHALE, MONTPELLIER CONTEMPORAIN (MoCo) : LA PANACÉE, L’ÉCOLE DES BEAUX-ARTS ET L’HÔTEL MONTCALM, DONT L’OUVERTURE EST PRÉVUE EN JUIN 2019. UN PROJET QUI AFFIRME LA VOLONTÉ DU MAIRE, PHILIPPE SAUREL, D’ANCRER SA VILLE DANS LE PAYSAGE DE L’ART DU XXIE SIÈCLE Exposition Retour sur Mulholland Drive : Huma Bhabha, Sans titre, 2006, argile, fil, plastique, peinture. Saelia Aparicio, Introdenouement, core, 2017 © AZ

Montpellier la contemporaine Zibeline : Comment vous sentez-vous sur le terrain culturel local ? Nicolas Bourriaud : Ce qui y est remarquable, c’est qu’on peut vraiment travailler en équipe. Le climat de coopération, et la volonté politique de synergie qui y règnent, permettent d’aller plus loin dans les projets. Dans d’autres villes, des raisons structurelles empêchent parfois les de s’entendre. Ici, on peut anticiper et faire des projets intéressants, qui se développeront sur les trois prochaines années. Comment la prise de contact s’est faite avec les artistes locaux ? Je ne suis pas un homme de dossiers. Ce qui m’intéresse, c’est la vie, ici. C’est-à-dire les gens qu’on croise dans les vernissages, dans la rue, dans les cafés, c’est beaucoup plus important que de passer des conventions. Ici, le rapport à l’autre est beaucoup plus décontracté qu’à Paris, où des tensions naissent de la concurrence organisée. Y a-t-il « assez » d’artistes ici ? Y aurait-il un courant local ? Le seul handicap de Montpellier pour le moment, c’est l’absence de grands ateliers d’artistes, de résidences d’artistes. C’est un dossier sur lequel on discute avec la Métropole, j’ai bon espoir que ça débouche sur des choses intéressantes. Je reste persuadé que le pouvoir d’attractivité de la ville fait qu’on a les moyens de faire venir des artistes de l’extérieur. Je pense que Montpellier a les moyens et les atouts nécessaires de devenir LA grande capitale du Sud de l’art contemporain.

Le public local est-il assez aguerri à l’art contemporain pour absorber et fréquenter une nouvelle grosse structure ? Les chiffres de fréquentation de Montpellier n’ont absolument rien à envier à ceux des expositions pointues et équivalentes de la capitale. Par exemple, je pense qu’il y a eu plus de visiteurs à l’exposition de Barthélémy Toguo au Carré Sainte-Anne que dans cette même exposition qui aurait eu lieu à Paris. Donc, c’est l’inverse : il y a plus de visiteurs ici ! En plus ici, c’est gratuit, c’est un outil formidable. Cette volonté de synergie pourrait éventuellement inquiéter certaines structures déjà en place… Synergie ou phagocytage ? Je suis là pour construire et ajouter, voire multiplier l’impact que peut avoir l’existant. Je ne veux pas enlever quoi que ce soit à qui que ce soit. J’ai tout de suite pensé à une institution horizontale, qui ressemble justement à ce qu’est Montpellier à mon avis, une institution qui épouse les formes de la ville. Je pense que toute cette énergie bénéficiera aux autres structures, avec lesquelles on est partenaires très étroits. Quelles sont les orientations de La Panacée, qui ouvre donc sur une nouvelle ère ? C’est devenu un centre où on montre l’art d’aujourd’hui, de manière généraliste. Sans restriction de medium. On sort de la niche multimédia, numérique, dans laquelle se situait le lieu. Lorsque Montcalm ouvrira, la programmation va de nouveau changer. Ce sera plus interdisciplinaire, axé sur la découverte

d’artistes émergents, en lien avec l’École des Beaux-Arts. Que verra-t-on à Montcalm ? L’idée sera de faire un musée sans collection. La programmation sera constituée d’expositions extraites de collections existantes, privées ou publiques, françaises ou étrangères, monographiques ou thématiques. Ce sera le hub, à vocation internationale, des collections existant dans le monde. Et on réfléchit, avec l’université Paul Valéry, à la création d’un centre de recherche sur la question de la collection. Comment s’intégrera le MoCo à l’arc contemporain du territoire ? Il y a en effet un arc qui se dessine entre Nîmes, Arles, Montpellier, Sète et Sérignan. Pour moi, c’est une sorte de Californie française en termes de culture. Je crois beaucoup en la fertilité artistique de ce territoire. Et les prochaines années seront cruciales pour son destin. C’est à cette aventure-là que je suis venu participer. ENTRETIEN RÉALISÉ PAR ANNA ZISMAN

Le futur Centre d’art contemporain investira l’Hôtel Montcalm, bâtiment du XIXe de 3500m2, dont 2300 m2 seront dédiés aux présentations d’œuvres. L’équipe lauréate au concours d’architectes sera désignée le 15 février, avec une enveloppe d’environ 6 M d’euros.


Triplé gagnant

A

vec ses trois nouvelles expositions, c’est un lieu à la fois apaisé et densifié qui s’ouvre à La Panacée. Trois espaces pour trois voyages, initiés par le nouveau directeur Nicolas Bourriaud. Un parcours unifié autour du patio du bâtiment, qui semble plus grand, plus sobre, plus concentré sur les œuvres présentées. Auparavant dédié à l’art numérique, le lieu proposait une entrée en matière souvent participative, voire ludique et un peu frénétique. La Panacée est aujourd’hui la première avancée du projet MoCo (voir l’entretien ci-contre). Pas de lien direct entre les trois expositions inaugurées en janvier. L’artiste irano-américaine Tala Madani rassemble pour la première fois en France une sélection de ses tableaux troublants. Des hommes, grotesques et nus, sont sources de lumières, halos vifs et surnaturels, projections de craintes ou de désirs. Parfois scatologiques, triviales, les petites histoires que chaque tableau distille parlent du « Ça », et ça libère. Intérims convie neuf artistes autour de la question du travail. Installations, photographies, textes, avec en particulier quelques-unes des Lettres de non-motivation de Julien Prévieux, assorties de l’offre d’emploi correspondante. Un travail ironique et militant au long cours, débuté en 2000, rafraichissante mise en cause de l’inanité de certaines annonces, véritables insultes envers les « profils recherchés ». Le troisième espace, le plus vaste, accueille une vingtaine d’artistes, réunis autour de l’esthétique du cinéaste David Lynch. Retour sur Mulholland Drive convoque tout ce qui fait que quelque chose dérape, déstabilise la banalité du quotidien. Belle idée, parfaitement offerte à la sensibilité du visiteur. Le choix opéré par Bourriaud ménage une rêverie inquiète parmi des œuvres qui dialoguent avec le film. La variété des supports et des langages s’harmonise dans cette « familière étrangeté » freudienne, qui laisse advenir une narration inattendue, et pourtant tellement puissante que chaque fois on est emporté par une évidence. Beaucoup de très belles pièces : Cold War Dishwaher, de Max Hooper Schneider, une machine à laver la vaisselle béante, avec des verres fluorescents ; The somnobulist (Wendy Jacob), deux présences semblent respirer sous une couverture ; la merveilleuse série commandée au photographe Yohann Gozard, lancé à la recherche de signes lynchiens dans les rues de Montpellier. Tout fait sens et encourage à laisser l’inconscient faire surface, guidé par la clairvoyance des artistes. A.Z.

Retour sur Mulholland Drive – Le minimalisme fantastique Tala Madani Intérims, Art contre emploi jusqu’au 23 avril La Panacée, Montpellier 04 34 88 79 79 lapanacee.org Tala Madani, Picture frame, 2016 Collection privée


18 événements

L’étendard de la danse flotte sur Marseille

Louis Pi-XIV © Simonne Rizzo

À

peine a-t-on franchi le cap de 2016 balisé par Question de danse, Dansem et FestivAnges qu’un nouveau rendez-vous se profile à l’aube de 2017 : + DE DANSE à Marseille ! Cette cinquième édition, portée par Le Merlan - scène nationale de Marseille et Klap Maison pour la danse, s’annonce comme une explosion d’expressions, d’écritures, de questionnements et de recherches chorégraphiques. Pour fêter le 30e anniversaire de sa compagnie, Michel Kelemenis offrira la primeur de sa création Collector, pensée « non sans autodérision ni sans humour » comme un journal d’artiste. Il proposera également des « découvertes dansées » et reprendra à Cavaillon sa célèbre adaptation de La Barbe bleue de Perrault. Arthur Perole, présent en 2015, présentera une version ludique de sa pièce Rock in Chair sous la forme d’un jeu de cartes à danser interactif. Fait rare et donc remarquable, le festival embrassera les multiples regards de la danse au féminin : celui

Big Bang à Montpellier

I

l est rare de voir un spectacle sans soustitres à hTh. Rodrigo Garcia choisit une programmation très internationale, et les langues se multiplient sur le plateau du CDN. Comme pour faire amende honorable, ou plutôt pour dialoguer avec la création régionale, la présenter, la développer, Big Bang propose six créations locales, des chantiers de travaux en cours, et une journée professionnelle centrée sur la création régionale (2 mars). Si l’on tire les fils des propos des différentes pièces, on pourrait y voir une attention particulière à considérer le temps présent dans une perspective historique et très politique. Conscience d’un « nous » aux prises avec une actualité débordée par les empreintes du passé, d’un « je » qui tente de se désengluer d’un présent tyran ? Six sujets graves et militants. Hélène Soulié adapte le roman de Lola Lafon Nous sommes les oiseaux de la tempête qui s’annonce. Suspendues dans l’attente du réveil d’un coma de l’une d’entre elles, trois femmes se révèlent à elles-mêmes. Dans une célébration des corps qui s’assument, la mise en scène affirme un féminisme libérateur.

Tumultes © Sonia Bacet

Tumultes, de Marion Aubert, mis en scène par Marion Guerrero, avec la verve qu’on connaît à l’auteure de la Cie Tire pas la nappe, fait un pont entre les luttes du Front Populaire et celles des jeunes artistes

d’aujourd’hui. Les acteurs, issus de la Comédie de Saint-Etienne, ont nourri l’écriture de la pièce de nouvelles questions, intimes et actuelles : « De quoi avons-nous besoin pour échapper au cynisme de notre époque ? »


de Simonne Rizzo sur la sacralité de l’homme (Louis Pi / XIV), de Lucie Eidenbenz sur la tradition suisse des Tschägättaä dont elle dépasse l’exotisme (Tschägg), de Patricia Apergi sur la crise grecque et la résistance d’une génération sacrifiée (Cementary) ; de la danoise Andreas Constantinou sur les frictions entre l’homme et le masculin (The Womanhouse), de Valérie Costa sur la topographie du quartier de Saint-Mauront (projet participatif Dédale ensemble), de Joanne Leighton (9000 pas) ou encore de Louise Lecavalier qui fait de la scène un ring où se livrent Mille batailles. Canada, Suisse, Danemark, Grèce, mais aussi Portugal avec Marco Da Silva Ferreira qui plonge son quatuor dans une boucle musicale répétitive (Hu(r)mano). Cette édition est un temps béni pour les paroles venues d’ailleurs à l’heure où la surdité se propage sans honte… et fera se connecter l’art et la pensée pour emplir de sens notre société. Ce serait dommage de rester sourd. M.G.-G .

+ de danse à Marseille ! 2 mars au 1er avril Klap Maison pour la Danse, Marseille 04 96 11 11 20 kelemenis.fr

LES CINÉMAS

Julien Bouffier continue son exploration de la limite entre documentaire et fiction avec l’adaptation du roman du grand reporter Sorj Chalandon, Le quatrième mur. Cela se passe au Liban, dans le camp de Chatila. Le journaliste avait besoin de se détacher du réel pour témoigner. Le dramaturge appelle des comédiens libanais pour instiller du vécu dans la représentation. Les deux metteurs en scène Stefan Delon et Mathias Beyler s’associent dans une réflexion sur la mélancolie contemporaine dans le troublant melankholia. Alain Béhar développe son univers poétique et virtuel dans un voyage au-delà des frontières avec Vagabondes. Parallèle, de Bruno Geslin, questionne le culte du corps, façon idéologie fasciste. Sujet délicat, où l’esthétisme flirte avec la terreur, dans une composition scénique qui se concentre sur l’image de deux barres parallèles.

D' EXTRÊME ORIENT

10 19 MARS

2017

ANNA ZISMAN

FOS-SUR-MER MIRAMAS

Big Bang, créations en région 21 février au 3 mars hTh et Théâtre d’O, Montpellier 04 67 99 25 00 humaintrophumain.fr

GRANS

ISTRES

PORT-SAINT-LOUIS-DU-RHÔNE

TOUTE LA PROGRAMMATION SUR WWW.SCENESETCINES.FR


20 événements

Dans la grande tradition rus

C

’est toujours au sortir des frimas de l’hiver que le Festival russe apporte son atmosphère de fête au théâtre Toursky, avec des représentations, des expositions, des cabarets (animés cette année par la troupe du Théâtre sur la Pokrovka et la troupe Koliada)… Évidemment avec un nom russe, le théâtre se devait de… Rappelons qui était Alexandre Toursky : un poète du XXe siècle (1917-1970), né à Cannes, mort à Marseille, mère provençale et père russe qui abandonna femme et enfant dès les premiers mois de vie de ce dernier. Restent de celui-ci, outre le nom d’un théâtre, des textes sensibles, aimés de Joë Bousquet, publiés par Seghers (entre autres). « J’écris en toutes langues ; / je sais dire l’amour/ en rose, en alouette ; / causer flambeau ; // je peux traduire l’homme / dans un vocabulaire / de couteaux ; faire en nuit / le mot à mot du jour ». Ce 22e festival est dédié à Sergueï Artsybachev, acteur, metteur en scène et fondateur du Théâtre sur la Pokrovka, dont on pourra voir la comédie burlesque Le dragon, interdite

Famille Semianyki © Maria Mitrofanova

en son temps par Staline qui devait craindre les personnages comme le Lancelot de ce conte humaniste : tuer le dragon qui opprimait un village et par là conquérir sa belle n’empêche pas un nouveau tyran de s’installer (17 et 18

mars)… Une exposition de photographie lui est par ailleurs consacrée (10 au 27 mars). Et puis on rira avec le train du Semianyki Express et les clowns du Licedeï qui nous emportent dans un voyage cocasse et

Le temps des (re)découvertes

E

manation du Cercle de Midi -une des huit fédérations régionales (elle couvre ProvenceAlpes-Côte d’Azur et Corse) du réseau Chaînon/FNTAV (Fédération des Nouveaux Territoires des Arts Vivants) qui « a pour objet de contribuer au Zoom © Raphaël Arnaud développement culturel national et international en soutenant la création et la diffusion artistiques dans l’intérêt général »-, le Festival Régions en scène vise à soutenir l’émergence artistique sur les territoires, promeut la diffusion des artistes sélectionnés tout en étant un vivier de repérages de compagnies. Après une itinérance dans les Bouches-duRhône l’an passé, il s’installe cette année à

Avignon (les 1er et 2 mars). C’est un marathon des plus agréables qui vous attend, les représentations se succédant à un rythme effréné sur ces deux jours, émaillées de repas (au restaurant La Manutention) et de deux « Goûter des créations », dont le but est de parler de projets en cours d’écriture, voire de recherche, de compagnies ou groupes

musicaux implantés dans la Région Paca : le premier concerne le spectacle vivant (le 1er mars à 14h au Conservatoire du Grand Avignon), le second la musique (le 2 à 15h45 à l’Ajmi). Avant et après, place au théâtre et à la danse : avec la Cie aubagnaise Théâtre Désaccordé qui propose Ombul, un voyage pour les tout-petits aux confins de l’endormissement et du rêve ; la Cie marseillaise 7e ciel Zoom, qui dresse le portrait d’une mère-courage d’une bouleversante justesse (à lire sur journalzibeline.fr) ; la Cie marseillaise Item Da Capo, duo chorégraphique et théâtral qui fait se confondre danse et objets, musique classique et contemporaine ; la Cie bas-alpine Havin’Fun Mauvais rêves de bonheur, solo qui explore la langue des signes au travers de la danse hip hop ; la Cie corse Spirale T-Rex, qui s’empare avec humour de l’univers du travail avec un dinosaure impitoyable qui s’invite dans l’histoire ; avec Lamine Diagne Destination Tunisie pour un spectacle inspiré de contes accompagnés de chants des tisseuses berbères et des paysages sonores


sse fantastique (10 et 11 mars) ; on goûtera le piano puissant et virtuose de Lovro Pogorelich dans les monuments que sont Les tableaux d’une exposition de Modeste Moussorgski et la Sonate n°8 en Si bémol Majeur op.84 de Serge Prokofiev (14 mars). Trois jours de cinéma (gratuit cette année pour les abonnés), du 21 au 23 mars, donneront une petite idée de la foisonnante production russe contemporaine, que ce soit Coup de soleil de Nikita Mikhalkov, sélectionné Meilleur Film Étranger aux Oscars 2016, le bouleversant Neuf jours d’une année de Mikhaïl Romm, L’Équipage d’Alexandre Mitta, premier film catastrophe soviétique, l’humoristique La fin d’une magnifique époque de Stanislav Govorouline ou, du même auteur, Verticale avec Vladimir Vyssotski…. Enfin, évènement exceptionnel les 24 et 25 mars, le Ballet Igor Moïsseïev, légendaire troupe de danse folklorique ! MARYVONNE COLOMBAN I

Festival russe 10 au 25 mars Théâtre Toursky, Marseille 04 91 02 58 35 toursky.fr

www.marsenbaroque.com

recueillis par la Cie L’Omnibus, suivi d’une exposition ludique qui propose de s’interroger sur le sens ou le son d’une image. La musique n’est pas en reste, et la première journée se termine avec un plateau fourni ! Trois groupes se succèdent, dans des répertoires très différents : Berline dans un spectacle de reprises de chansons françaises (Brel, Brassens, Piaf, Gainsbourg…) sur des arrangements de Louis Winsberg, les Grandes Mothers dans un duo de contrebasses et voix à la croisée du rock acoustique et de la chanson folk, et L’Anima Lotta qui dépeint la Sicile en métissant les styles, entre Taraf de Haïdouks et les Pink Floyd (à lire sur journalzibeline.fr). Pour clôturer la manifestation, Bone (Yann Engelbrecht) offre sa « tasse de textes » léchés, en bon bousculeur des mots qu’il est ! Enfin, programmé hors sélection, le spectacle Trait d’union de la Cie belge Trou de Ver aborde, avec humour, le thème du divorce et les dommages collatéraux qu’il inflige à un jeune adolescent devenu obèse…

CORPI

INGRATI

LES BALLI DE MONTEVERDI

DOMINIQUE MARÇON

Régions en scène 1er & 2 mars Divers lieux, Avignon cercledemidi.com

OPÉRA DANSE

9 AU 12 MARS 2017 AU BALLET NATIONAL DE MAREILLE

©Alwin Poiana

billetterie marsenbaroque.com


22 événements

Un quart de siècle

baroque

U

n quart de siècle, déjà, que le claveciniste Jean-Marc Aymes et la soprano Maria Cristina Kiehr ont fondé Concerto Soave, conçu comme « un écrin de solistes enchâssant la voix unique de la soprano », se vouant plus particulièrement à la musique italienne du Seicento. Le nom de l’ensemble est inspiré du père de l’opéra, compositeur de subtils Madrigaux, Claudio Monteverdi, « Che soave armonia fareste, cari baci… » (« Quelle suave harmonie feriez-vous, chers baisers… »). Programme tenu : délicatesse des interprétations, justesse des choix avec des concerts de par le monde, des enregistrements plébiscités par la critique, un répertoire qui s’attache à la musique baroque mais n’hésite pas à aborder les rives contemporaines, et à se mêler à d’autres formes d’art… Ancré depuis 2007 à Marseille, ce bel ensemble y organise le festival Mars en Baroque, du 1er au 31 mars, qui permet aux publics d’arpenter les suaves mystères des musiques sacrées et profanes. Lors du 15e anniversaire du festival, une conférence illustrée musicalement donnée à l’Alcazar (18

Concerto Soave © Robert Ayache

mars) rappellera l’histoire de cette formation. Le programme est d’une richesse et d’une variété remarquables. Création avec le BNM d’Il Ballo delle Ingrate de Monteverdi avec la chorégraphie contemporaine des directeurs du Ballet, Emio Greco et Pieter C. Scholten (voir p 48), première participation à Sirènes et Midi net de Lieux Publics avec des sirènes vénitiennes et des instruments baroques sur la place de l’Opéra, rapprochement entre musique ancienne et contemporaine avec un cycle de Lamentations italiennes du XVIIe entrelacé à la dernière création de Zad Moultaka ou encore, aux côtés de l’ensemble Musicatreize, autour de Carlo Gesualdo. Conférences, concerts se

succèderont, apportant un éclairage nouveau aux merveilles auditives : violon du talentueux Francesco d’Orazio sous les voûtes de l’abbaye Saint-Victor, hommage à Sainte Marie-Madeleine (avec le tableau restauré de son apothéose de Michel Serre), musique vocale de chambre de Monteverdi, flamme vive aux ABD, soupirs alanguis, amours veloutées de mélismes… MARYVONNE COLOMBANI

Mars en Baroque 1er au 31 mars Marseille 04 91 90 93 75 marsenbaroque.com

Quand vient le temps des chansons…

I

Fishbach © Melanie Bordas Aubies

l y a du Ferré dans le titre éponyme du festival Avec le temps qui depuis des années célèbre la musique et les mots, essaimant dans divers lieux de Marseille. La Mesón, l’Espace Julien, Le

Poste à Galène, le Gymnase, le Merlan, le Dock des Suds, le Cabaret Aléatoire et Montévidéo accueillent tour à tour les multiples spectacles qui sont autant de manières de chanter le monde : légèreté, poésie, cris, mélancolie, douceur, violence… goûtant la beauté, dénonçant les exactions et les turbulences, épousant les remuements de la société et des êtres. On retrouvera avec plaisir Vincent Delerm dans la lignée de son premier album et son travail photographique, la pop intimiste et envoûtante de Pierre Loustaunau, Petit Fantôme, la tendresse du rappeur Iraka, la plume acérée de Kery James, Miossec et son dixième album, Mammifères, aux couleurs tournoyantes, les chansons d’amour et de ténèbres de Fishbach, les rockers amoureux de la langue française, Radio Elvis, la pop claire et mélodique de François and The Atlas Mountain ou Requin Chagrin et son inoubliable Atlas… On découvrira le premier album d’Adrien Soleiman, voix neuve de la pop française, on se laissera charmer par les

textes-contes de Facteurs Chevaux qui convoquent esprits de la forêt et légendes des montagnes, avant d’écouter la délicate précision du multi-instrumentiste O (Olivier Marguerit), on « évite les naufrages » avec le duo Pépite ; on ne s’y « attendait pas » sans doute, mais on pourra applaudir Cléa Vincent, et sa voix addictive, puis The Pirouettes, ce duo pince-sans-rire, qui nous mène dans l’escalier et nous voit « dans la glace ». On rêvera d’avalanches avec La Maison Tellier, Beautiful again ! Enfin, né sur l’orgue de Sainte Marguerite (Marseille), glisseront les accords du dernier album de Charlie O. Les enfants seront gâtés, eux aussi, avec Pouët, spectacle ludique et sensible d’une des figures incontournables de la scène alternative française des années 80, François Hadji Lazaro & Pigalle. M.C.

Avec le temps 6 au 12 mars Marseille 04 96 17 57 26 festival-avecletemps.com


critiques rencontres

«

Les musiques savantes peinent à trouver leur place dans les programmations des scènes généralistes ce qui empêche leur diffusion au plus grand nombre. L’objectif de Détours en région est de démontrer qu’une médiation adaptée peut changer le rapport au public de ces musiques ». En deux phrases, le ton est donné : l’élitisme musical n’aura plus lieu ! Grâce à l’audace créative du projet Détours en région, les musiques savantes, qu’elles soient baroques ou contemporaines, sortent de leur territoire et des préjugés sur leur pseudo complexité. Pour être comprises, ces partitions anciennes ou résolument modernes doivent être diffusées sans crainte des programmateurs, parce qu’on peut les raconter, les expliquer… au delà du cercle des initiés. Comment cette histoire a-t-elle commencé ? Une première rencontre en 2015 autour du Festival Les Musiques (Gmem) a permis de développer le dispositif l’année suivante au théâtre de Grasse en passant à la phase de production (treize programmateurs présents dont une scène nationale, un centre de création national, le Festival de Chaillol, onze ensembles de la région…). L’objectif ? Organiser une tournée autour d’un ou plusieurs

« Impacter la diffusion des musiques savantes et placer les publics en son centre », le credo du dispositif Détours en région, porté par Prodig’Art et son directeur Maxime Wagner, innove et lance un pari sur l’avenir souvent international ? Maxime Wagner veut œuvrer pour des rencontres humaines, des médiations adaptées aux spécificités des territoires autour des dates de concerts. Trois temps de rencontres, encadrés par le compositeur Jean-Christophe Marti et le metteur en scène Pablo Volo, sont ainsi destinés à des groupes de publics identifiés en amont de chaque concert. Afin d’appréhender au mieux la musique baroque proposée par l’ensemble Zimmermann, un travail sur le corps est proposé jusqu’à la rencontre avec les musiciens. La rencontre, la médiation deviennent alors l’élément central, qui construira et consolidera les passerelles entre des mondes qui peuvent se côtoyer si on leur en donne la possibilité, et surtout l’habitude.... © Maxime Wagner

Prodiguons la musique !

23

ensembles, associée à un important dispositif de médiation. Le premier ensemble sera le Café Zimmermann avec une tournée de 9 dates en région (du 23 mars au 7 avril) mais surtout 24 temps de médiation organisés par Prodig’Art. Acte militant d’ouverture sur le long terme, ce projet est simple : permettre aux ensembles de musiques savantes de la région d’être davantage programmés dans leur territoire et de rencontrer le public, placé au centre du projet de création. Est-ce la fin de la frilosité des programmateurs autour d’ensembles régionaux au rayonnement

FRÉDÉRIC ISOLETTA

06 60 93 19 49

prodigart.org

La métropole entre territoires et réseaux obsolète, rattrapée par la technologie des échanges en réseaux. Les réseaux (sociaux, de transports, de services etc.) sont partout, ils tissent des liens entres les hommes, sans aucune contrainte d’espace, ils remodèlent le monde, mais leurs profonds enjeux politiques Martin Vanier © Amélie Raux

G

éographe et professeur à l’école d’urbanisme de Paris, Martin Vanier était en janvier l’invité de la Villa méditerranée, pour s’exprimer et débattre autour de l’idée d’une métropole entre territoires et réseaux, en lien avec son dernier ouvrage Demain les territoires, capitalisme réticulaire et espace politique, paru chez Hermann (2015). Martin Vanier confronte la notion et l’usage des territoires à celles des réseaux. Le territoire est littéralement un espace au sol occupé par un groupe d’hommes et/ou régi par une autorité. Il est politique, se construit autour de codes, de règles, de frontières, de limites, il rassemble et rassure. Pour le géographe, si la notion de territoire a évolué avec le temps, elle est en train de devenir quasiment

ne sont pas encore réellement pris en compte. De plus en plus présents dans les différentes strates de la société, ils posent la question de la légitimité et l’utilité en l’état des territoires. Ce que propose Martin Vanier est de repenser la construction des métropoles en intégrant pleinement l’esprit des réseaux, pour redonner vie et efficacité aux territoires. En somme, « augmenter la capacité des uns en acceptant la politisation des autres, pour ne pas s’adresser qu’à des usagers connectés, mais bien à des citoyens ». AMELIE RAUX

Martin Vanier est intervenu à la Villa Méditerranée, Marseille, le 17 janvier, dans le cadre des Mardis de la villa


24 critiques rencontres

Éloge de la rencontre

Le MuCEM organisait, à l’occasion de l’exposition Après Babel, traduire, un cycle de cinq « grands entretiens ». L’occasion pour les intellectuels conviés de dialoguer avec de jeunes gens...

D

epuis trois ans ces entretiens sont menés en partenariat avec SciencesPoAix (voir p 10) et des lycées Marseillais*, qui lisent les œuvres et posent des questions aux intervenants. La parole y est différente, le public plus jeune, et les questions souvent inhabituelles. Il s’agissait d’abord de Traduire la parole de Dieu : Nurith Aviv, cinéaste franco israélienne, put ainsi expliquer les rapports complexes des Israéliens à l’Hébreu, langue poétique, pour laquelle les plus anciens ont souvent « assassiné » leur langue maternelle. Elle regretta que l’Arabe ne soit pas enseigné en Israël, parla aussi de son cinéma, mais peu du thème du soir, c’est-à-dire des liens entre la langue et le sacré. Frédéric Boyer, traducteur de la Bible, expliqua ses choix parfois controversés, comment la « résurrection » y devient « l’éveil », parce qu’il faut remettre en cause une tradition d’interprétation qui nous éloigne du texte sacré. Quant à Souleymane Bachir Diagne, philosophe de l’Islam, il fut d’une loquacité et d’une chaleur rares, émaillant ses propos sur la traduction du Coran d’anecdotes personnelles, faisant entendre loin des clichés le rapport que les musulmans entretiennent avec l’Arabe, avec leurs autres langues, avec les philosophes grecs et avec l’interprétation. Les deux autres conférences, autour de Savoir

Temps fort proposé par Sciences Po Aix, le MuCEM et Zibeline, le 2 février 2017 sur le thème Savoir-faire avec les différences : penser entre les langues, avec Heinz Wismann (philosophe et philologue) et Martin Rueff (philosophe, poète et traducteur) en conversation avec Clara de Amorin, Manon Rieutord, Charlotte Bon et Manon Carbonne (étudiantes à Sciences Po Aix) © X-D.R

faire avec les différences, réunissaient Heinz Wisman, philologue et éminent traducteur de grec, avec Martin Rueff, poète et traducteur d’italien : face aux lycéens et étudiantes, le professeur eut du mal à répondre sur la hiérarchie des langues (Le Comorien vaut-il moins que le Grec) et sur le caractère sélectif de l’enseignement des langues anciennes. Le lendemain, Barbara Cassin sut mieux sortir du questionnement universitaire pour dialoguer avec Magyd Cherfi, qui raconta avec beaucoup d’allant le bonheur d’apprendre le français à l’école, mais aussi le sentiment de trahir sa famille et ses amis en voulant s’élever

dans une France qui a renoncé au vote des immigrés, parle de déchéance de nationalité, et s’habitue à voir le FN au second tour. « Chez soi, c’est là où on se sent accueilli », concluait Barbara Cassin. Là où l’on sait inventer et penser dans sa langue, apprendre celle des autres, et les rencontrer. AGNÈS FRESCHEL

*Les lycées Yavne, Ibn Khaldoun et Saint Joseph les Maristes ont travaillé sur le thème Traduire la parole de Dieu, les lycées Artaud et Saint Charles sur Savoir faire les différences. Ils ont été filmés lors de rencontres avec Zibeline

Ces conférences, conçues en partenariat avec SciencesPoAix et Zibeline, ont eu lieu au MuCEM, Marseille, du 27 janvier au 3 février Vous trouverez les films des rencontres avec les lycéens, ainsi que les cinq comptes-rendus des étudiants, sur journalzibeline.fr

Courir au MuCEM

P

our prolonger l’exposition Après Babel, traduire, le facétieux Pierre Giner propose un Avant Babel, panorama multimédia déployé en 3D, dans le Hall du J4 (jusqu’au 20 mars). Jusqu’au 20 février, on peut encore suivre les Évolutions élastiques de Johann Le Guillerm, installation du circassien-plasticien, dans le cadre de la Biennale internationale des arts du cirque. À partir du 4 mars, le Fort Saint Jean accueillera les œuvres de la photographe Anne-Marie Filaire, qui travaille sur les zones de conflit au Moyen Orient : Israël, Palestine, Liban, Yémen... Avec une approche politique du paysage, paradoxalement non dénuée de poésie (lire p78). Les 24 et 25 février, le cycle Construire Détruire Reconstruire invite le metteur en scène libanais

Rabih Mroué et la réalisatrice allemande Hito Steyerl à œuvrer « au croisement de l’archive, la mémoire et la création ». Leur performance Probabilité zéro évoque les disparus de la guerre civile au Liban, entre 1975 et 1990 ; elle s’accompagne d’une installation en accès libre, visible jusqu’au 6 mars. Autre rapprochement entre artistes et musée, la 3e table ronde Sources et création se tiendra le 25 février, avec la participation du Ballet National de Marseille, du thésaurus d’instruments de musique MIMO, et de la fondation Camargo. Les combats féministes d’hier sont ceux d’aujourd’hui : le 8 mars, pour la journée de la femme, le Printemps du film engagé, Les amis du Monde Diplomatique et le Ravi suscitent le débat, assorti d’un film des

années 1970, mordant à souhait, Maso et Miso vont en bateau (de Nadja Ringart, Carole Roussopoulos, Delphine Seyrig et Iona Wieder). GAËLLE CLOAREC

MuCEM, Marseille 04 84 35 13 13 mucem.org Retrouvez sur notre WebRadio Zibeline la Traversée mensuelle du MuCEM, avec sa Chronique des libraires, la Nuit vernie du 10 février, une visite en famille, 1,2,3 collecte, le spectacle Probabilité Zéro de Hito Steyerl et Rabih Mroué, et la préparation de la prochaine exposition (sur le thème des cités idéales) au Centre de Conservations et de Ressources, par le collège Versailles


cirque

cirque

All the Fun

All the Fun

A

jeu 02 + ven 03 mars 19:00

jeu 02 + ven 03 mars 19:00

jeu

ThéâTre

ThéâTre

Les enfanTs c’esT moi

Les enfanTs c’esT moi

mer 08 mars 16:00

mer 08 mars 16:00

compagnie ea eo

cie TournebouLé

04160 Château–arnoux Saint–auban

compagnie ea eo

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cie TournebouLé

infos résa 04 92 64 27 34 www.theatredurance.fr

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26 critiques rencontres

Une journée pour la liberté

L

a romancière et chroniqueuse turque Asli Erdogan est aujourd’hui en liberté provisoire. Ce qui ne signifie pas qu’elle soit libre. Elle va être jugée, risque la prison à vie ; à moins qu’on ne lui propose l’exil, en Allemagne, aux États-Unis ou en France, comme on l’a déjà proposé à nombre de ses compatriotes Patrick Coulomb, Bruno Richard, Jean Kehayan, Olivier Bertrand lors de l’une des lectures intellectuels et artistes, enga- faites par les étudiants de l’Erac © Damien Bouticourt gés pour une Turquie libre et Bâtiment de pierre, ainsi que de ses dernières muselés par le régime actuel. Asli Erdogan a chroniques tout récemment parues sous le donc été libérée, grâce aux nombreux sou- titre évocateur Le silence même n’est plus tiens dont elle a bénéficié, grâce à sa notoriété à toi. Des rencontres étaient également préinternationale. Mais qu’en est-il de tous les vues. Les organisateurs d’Obsession textuelle, autres ? Enseignants, magistrats, fonctionnaires Patrick Coulomb et Bruno Richard, n’ont moins célèbres qui, toujours plus nombreux pas hésité à bouleverser le programme de leur (on parle de 123 000 personnes démises de émission-rencontre mensuelle en invitant deux leurs fonctions depuis juillet 2016), croupissent journalistes spécialistes de la Turquie, afin actuellement dans les geôles turques, victimes d’évoquer la dérive totalitaire du pays. « Etre des purges ? Plusieurs soirées de soutien et coincé dans un immeuble en feu, sans doute de lectures ont déjà eu lieu en décembre à est-ce une métaphore de la Turquie. » C’est par Marseille. La librairie Maupetit a poursuivi cette citation de l’écrivaine que P. Coulomb a l’action en proposant tout un samedi de lectures, ouvert le débat. Et à écouter Jean Kehayan rencontres et débats pour Asli Erdogan, et et Olivier Bertrand, on ne peut que frémir. plus largement pour la liberté d’expression. Qu’ils évoquent l’identité turque, construite Toute la journée, des étudiants de l’ERAC se autour de l’idée d’un ennemi commun et sur sont succédé pour offrir aux clients de la librairie plusieurs génocides, les relations de la Turquie des extraits de son œuvre, particulièrement de avec l’Europe (aujourd’hui rejetée par la plupart

Ouverture et traduction

S

ouvenez-vous de ce bel épisode du Pantagruel de Rabelais : il pleut des cordes ; le géant sort sa langue pour protéger son armée ; l’auteur en profite pour l’escalader et entrer dans sa bouche où, émerveillé, il découvre tout un monde, voire un univers. Gageons qu’il arrivera la même chose à tout habitant du quartier qui poussera la porte du lieu tout neuf, tout pimpant, très accueillant : couleurs claquantes, coussins, canapés, des livres couchés et debout… et trois jeunes dames accortes (Pauline Fougère, Émilie Berto et Chiara Pancotti, venue en voisine du restaurant le Baron Perché) qui ont bien raison de penser que la langue est la meilleure des choses à partager. « Le client idéal pour moi, c’est un lecteur qui va me faire découvrir des choses et qui est prêt à tout » confie

des Turcs) ou son leader, qui depuis le coup d’état manqué a éliminé tous les opposants et s’apprête à modifier la constitution turque à son avantage, tout semble mener au même constat : la Turquie est en train de sombrer dans la dictature, sous la férule de son président, Recep Tayyip Erdogan, qui « navigue au gré des événements », pratiquant « la diplomatie d’un homme perdu ». Inquiétant… Les deux intervenants ont toutefois rappelé que des voix continuent à se faire entendre, malgré les risques ; que la France a un rôle essentiel à jouer dans l’accueil des universitaires et intellectuels turcs menacés ; que la lutte pour la liberté d’expression de « ceux qui mettent la plume dans la plaie », comme l’a dit Olivier Bertrand, n’est jamais terminée. FRED ROBERT

Cette journée d’hommage a eu lieu le 14 janvier à la librairie Maupetit, Marseille

à lire Le silence même n’est plus à toi (recueil de chroniques traduites du turc par Julien Lapeyre de Cabanes) Asli Erdogan Éditions Actes Sud, 16,50 euros

Les Faits et Prouesses de la (bientôt) très renommée librairie Pantagruel … sise dans le 7e arrondissement de la bonne ville de Marseille Emilie, et à l’inévitable question des lectures du moment « le polar ,bien sûr, puisque c’est l’hiver ». Imparable ! Animations, ateliers, ouverture le dimanche matin et surtout des rencontres : le 19 janvier la salle était archi comble pour accueillir le grand et prolifique « traducteur-auteur de l’ombre » Brice Matthieussent dont on connaît le rôle dans la diffusion en France de Jim Harrison ou Richard Ford. Précis, concret, drôle et foisonnant d’exemples qui font mouche, le dialogue s’installe vivement, mené par Luce Michel de l’Association des Traducteurs Littéraires de France. Comment traduire les mots-valises ? Les jeux de mots ? Rendre les assonances ? Toute question sur l’intraduisible trouve réponse pragmatique et stimulante : « éliminer la tentation de la note en bas de

page / rééquilibrer en faisant circuler l’anomalie entre son et sens / la déplacer dans le corps du texte en la faisant émerger ailleurs / injecter le plus d’étrangeté possible / tirer le français vers ses limites, le bousculer, le faire sortir de ses gonds. » On traduit d’ailleurs plus un auteur, une voix, qu’une langue et le traducteur doit avoir l’oreille aux aguets. Ainsi de l’américain tout pétri de pop, de jazz, de rap, et de « plein air, comme un cri dans le paysage. » Alors oui, puisque c’est l’hiver, tous à l’abri dans la bouche de Pantagruel !!! MARIE JO DHO

Cette rencontre a eu lieu le 19 janvier à la librairie Pantagruel, Marseille


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Enfance et chimères

Sorj Chalandon © JF Paga

Maison d’arrêt de Luynes, il retrouve le public de la bibliothèque Méjanes à Aix-en-Provence. Deux ou trois questions suffisent à libérer une parole généreuse : écrire des romans permet de panser ses blessures, comme la souffrance d’être bègue (Le petit Bonzi), la haute trahison d’un ami irlandais (Mon traître), la confrontation insoutenable dans son métier de journaliste à des événements tragiques comme les massacres de Sabra et Chatila (Le quatrième mur). Dans Profession du père, Sorj Chalandon évoque sa sidération d’enfant face à un homme fou. Son père se disait agent secret, pasteur presbytérien, meilleur ami du Général De Gaulle, aimé d’Edith Piaf, membre de l’ombre de l’OAS… Tout cela aurait pu être cocasse, une aventure de tous les instants pour un enfant, s’il n’y avait eu la violence physique et une mère qui jamais ne réagit pour le protéger. Vivant en circuit fermé, son père lui racontait que son oncle était chef de la CIA, que pendant la crise de Cuba un des missiles était dirigé sur eux ; il fit de lui son

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uel succès et pour cause ! C’est la deuxième fois que l’écrivain/journaliste Sorj Chalandon est sélectionné pour participer au Prix littéraire des lycéens et apprentis chapeauté par l’Agence Régionale du Livre. Le 13 janvier, après avoir rencontré les élèves du Lycée Vauvenargues et les détenus de la

LES UNES AVEC LES AUTRES ... A SHIRLEY JAFFE Exposition du 3 février au 25 mars 2017 Avec les artistes Marie-Claude Bugeaud, Claire Colin-Collin, Nathalie Da Silva, Armelle de Sainte-Marie, Marie Ducaté, Yifat Gat, Julia Scalbert, Betty Woodman et Marie Zawieja Commissariat : Romain Mathieu, sur une proposition de Béatrice Le Tirilly et Barbara Satre, Galerie Béa-Ba

GALERIE DU 5E • Galeries Lafayette Saint-Ferréol • 5e étage, 40 rue Saint-Ferréol, 13001 Marseille Entrée libre • Du mardi au vendredi de 14h à 18h, le samedi de 10h à 13h et de 14h à 18h

complice, lui apprenant à marcher du côté des rétroviseurs pour déjouer les filatures soviétiques, à espionner leur voisin qui écouterait radio Moscou et, poussant la terreur à son comble, lui faisant suivre un entraînement physique intensif pour assassiner De Gaulle ! Sorj, Emile dans le livre, a vécu dans la peau d’un futur meurtrier pendant trois mois… La « guerre que son père a semée » en lui, il l’épuisera plus tard, en tant que reporter en Irak, Afghanistan, Somalie, avant de devenir père à son tour. Ce roman ne verra le jour qu’à la mort du père en 2014. La rencontre est forte et sensible. L’auteur bouleverse et, à bien des égards, ne laisse pas le public indemne. Il rappelle à quel point il aime échanger avec les élèves des lycées professionnels avec qui il parle « de ventre à ventre » et « de cœur à cœur » ; que rien ne vaut un gamin de CAP qui donne un prix Goncourt, et un détenu qui lui confie : « moi c’était pas mon père, c’était ma mère, merci ! » (Lire aussi la chronique sur journalzibeline.fr). MARION CORDIER

La rencontre a eu lieu à la Méjanes, à Aix-en-Provence, le 13 janvier

à lire Profession du père Sorj Chalandon Grasset, 19 euros, Livre de poche, 7,60 euros


28 critiques rencontres

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e 14 janvier, la Nef Ouest de la Méjanes accueille un large public venu participer à la première Nuit de la lecture, où petits et grands assistent aux festivités dans une ambiance conviviale et bon enfant. Après une présentation d’une sélection de livres, dans une mise en lumière de la rentrée littéraire, faite par les librairies Goulard, de Provence, Le Blason et Oh Les papilles, la Cie Abalone ouvre la soirée avec un spectacle féérique autour de la figure classique et poétique d’un Pierrot lunaire qui saisit le regard par sa gestuelle, sa danse, ses jeux de balançoire. Un concert réalisé par l’Ensemble Musical du Sud interprète les bandes musicales de films mythiques : de Star Wars à Dune, en passant par 2001, l’Odyssée de l’espace, on se plaît à réentendre des airs incontournables, reconnaissables à la première note, composés par John Williams, Richard Strauss... Un intermède permet à tous de se retrouver autour d’un buffet généreux et d’échanger, de discuter, d’apprendre à se connaître, car la Médiathèque, c’est aussi le lieu des rencontres ! C’est au tour des lecteurs d’occuper la scène : une

Mission bien accomplie à la bibliothèque Méjanes à Aix, pour une première Nuit de la lecture… intergalactique !

© Marion Cordier

Sous les étoiles

petite fille sonne la reprise en déclamant un extrait du Petit Prince de Saint-Exupéry ; un homme poursuit avec un extrait de Bivouac sur la Lune de Norman Mailer ; les lectures

s’enchaînent pour la joie de tous grâce à un répertoire à bien des égards commun. Si la thématique de ce soir est axée sur l’Espace, c’est en avant-propos de la manifestation Là-Haut l’astronomie dans tous ses états, qui comprend conférences, expositions, ateliers, projections et spectacles autour de ce sujet passionnant (à la Méjanes jusqu’au 25 mars). Evénement impulsé par le ministère de la Culture et de la Communication, cette première édition a rassemblé sur tout le territoire plus de 250 000 personnes, des auteurs comme Magyd Cherfi, Véronique Ovaldé, Leila Slimani,... à travers 1500 manifestations aux propositions innovantes : cafés littéraires, speedbookings, lectures en pyjama, déambulations insolites… Une belle réussite qui présage le meilleur pour les éditions à venir ! MARION CORDIER

Dans la Région, la première Nuit de la lecture s’est déroulée à la bibliothèque Méjanes à Aix-en-Provence le 14 janvier

D’autres vies que la sienne y aborde un autre ton que celui auquel ses précédents ouvrages nous avaient habitués ; il y parle une langue nouvelle. Celle de ce personnage vierge de tout contact avec les hommes, mutique (un vrai défi littéraire). Celle de l’époque aussi : pas d’anachronismes dans cet ouvrage. Une écriture toujours très musicale, axée sur le rythme, le son, évoluant au fil de l’évolution du personnage. Un beau roman d’amour et d’amitié. Un roman engagé également, contre la barbarie de la guerre, contre le regard mauvais porté sur l’étranger, le « Sauvage » (chronique à lire sur journalzibeline.fr). Après la rencontre, place au concert littéraire. Et retour à l’ambiance polar que Marcus Malte a longtemps privilégiée. Les harmoniques, ce sont les notes fantômes, celles qui se cachent derrière la mélodie. C’est aussi le titre d’un de ses romans. L’écrivain dit (plutôt qu’il Marcus Malte et Pascal Jourdana © Patrick Box

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e soir-là, dans l’auditorium de la BDP, Marcus Malte commence par lire le début de son roman Le Garçon, qui lui a valu le Prix Femina 2016. Une lecture inspirée, qui donnait à voir la silhouette du garçon portant sur son dos sa mère moribonde, telle qu’elle lui est apparue à lui, l’auteur, et qu’il a laissée s’installer… Une existence si différente de la sienne. Cette lecture a plongé le public dans l’atmosphère singulière de ce grand « roman romanesque », à la fois intemporel -l’emploi du présent de narration joue beaucoup, le travail de description également- et très ancré dans une époque, le début du XXe siècle. Malte

ne lit) des extraits de la tragique histoire de Véra ; et là encore on plonge dans un récit prenant, sur lequel plane l’ombre de Vukovar et des atrocités de la guerre de Bosnie. Les modulations de Virginie Teychené -jazz classique mais aussi une très belle bossa nova et une étonnante reprise de Help des Beatles-, les accords de Gérard Maurin (à la guitare ou à la contrebasse) accompagnent la voix du lecteur, donnent chair à l’odyssée nocturne des deux personnages…et envie de (re)lire ce roman moins connu d’un auteur-musicien au charme et au talent incroyables. FRED ROBERT

Cette soirée a eu lieu le 13 janvier à la Bibliothèque Départementale, Marseille

à lire Le Garçon, Éditions Zulma, 23.50 euros Les Harmoniques, Folio Policier, 8.20 euros


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Vite et (très) bien L a 7e édition du Festival Parallèle, qui s’est achevée le 29 janvier, a montré une fois de plus en une courte semaine la vitalité et la dynamique des jeunes artistes engagés dans le projet phare de la plate-forme Komm’Act, dont Lou Colombani est la directrice. Le 28 janvier, au MuCEM, la voix de Pier Paolo Pasolini faisait vibrer ces marges dont il a salué inlassablement la « vitalité indomptable » en ouverture d’un beau moment de réflexion sur l’apport de la périphérie au centre, en particulier à travers les danses urbaines au Brésil. La chorégraphe Ana Pi, via Skype, évoquait la réécriture du territoire par le mouvement et c’est bien peut-être un des chemins suivis par des propositions très diverses aux échos indéniables.

Chercher sa place dans les marges... ...ou occuper celle des autres, c’est ce que fait le chorégraphe franco-brésilien Volmir Cordeiro dont on découvrait RUE, corps offert à la transe et aux incarnations multiples, porté par les percussions de Washington Timbô ; bancal, saisi, vigoureux, possédé, le danseur hypnotique excelle à redessiner l’espace par le déploiement de ses tableaux éphémères. En top-départ pour saluer l’énergie à l’œuvre, la danseuse grecque Katerina Andreou nous a subjugués par son solo de pur plaisir : sauterelle fragile, petit rat dézingué, se recréant sans cesse par le son, la lumière, le rapport tactile au plateau (comment faire naître la souplesse d’un sol rigide en tâtonnant des orteils ?) ou la contrainte sur soi (des baguettes de tambour glissées sous le tee-shirt et voilà une raideur sacrificielle installée). Les trois interprètes de Michele Rizzo eux, lentement et méthodiquement, comme dans une boîte de nuit engourdie qui réveille ses spots et convoque une musique d’outre-tombe, posent leurs pas, amènent doucement leurs gestes à l’unisson dans un crescendo d’intensité fascinant. Peut-être déjà fait, déjà vu, avec ici ce tragique de toutes les solitudes qui pointe. Loin du clubbing, le syrien Mithkal Alzghair impose aussi sur scène dans Déplacement sa traversée de gestes qui viennent de loin, décapés pourtant de tout folklore par la violence visuelle des bras levés, des piétinements de bottes, des chutes du corps exténué ; une danse de signes et de linge blanc déployé plus efficace dans la

Apologies 4&5 © Marylena Stafylidou

première partie en solo que dans la seconde où le trio dilue un peu les effets visuels .

Se trouver au centre Avec King Kong Théorie, Virginie Despentes explorait la reconquête de soi après le viol, l’investissement des territoires de la prostitution et ébauchait les contours d’un féminisme singulier. L’adaptation d’Emilie Charrot pour deux comédiennes, Julie Perazzini et Géraldine Chollet, est d’une grande délicatesse ; le texte (ses aspects les plus intimes) est amené par un monologue sensible sur l’échec, la difficulté à trouver sa place, le sentiment d’être toujours un peu à côté de la vie. Un monologue après l’autre sur plateau nu, l’ombre de celle qui se tait comme discrète présence, touchent exactement à l’endroit juste. Simplicité dont manquait justement le très attendu Dans le Nom de Tiphaine Raffier, où la réalité paysanne la plus prosaïque rencontre le sortilège, où l’empêchement d’être côtoie la tragédie de l’origine et révèle surtout le nœud de la langue. Magnifique sujet traité de manière trop grandiloquente, avec une débauche de technologie qui a fasciné davantage la metteure en scène que

les spectateurs un peu perdus au milieu de ce chaos. Indéniablement, c’est encore une fois le travail impeccable et d’une rigueur bouleversante d’Argyro Chioti, avec sa Cie Vasistas, qui a fait mouche : d’abord un texte poétique d’une étrangeté et d’une densité absolues, Apologies 4&5, une scénographie au cordeau -un décamètre négligemment déroulé sépare un chœur de femmes en mouvement et chant continu de l’espace monumental d’une froide dalle levée, devant laquelle un « archéologue » brandit sa propre culpabilité comme appel glaçant à la confession des deux autres personnages ; « Si je ne suis pas sincère ce soir je ne suis pas digne de me présenter devant vous ce soir. ». Figure des Enfers ? Société excluante et mécanique qui condamne l’homme à l’effroi d’être soi ? Le spectacle est beau, sans grand artifice et envoûtant de mystère préservé. On est bien là au cœur de cet indomptable dont on espère que le Festival Parallèle va brandir encore longtemps la bannière ! MARIE JO DHO

Le Festival Parallèle était présenté du 24 au 29 janvier dans divers lieux de Marseille


30 critiques spectacles

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« Le cirque va sauver le C’est ainsi que Raquel Rache de Andrade et Guy Carrara présentent la deuxième édition de la Biennale Internationale du Cirque. Ont-ils tort d’y croire ?

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n tous les cas elle est belle, leur Biennale ! Ces casse-cous, qui programment sans savoir si leur budget sera bouclé, ont su fédérer leur territoire devenu régional, et trouver des capitaux publics et privés : 1 million de budget, plus 1,8 million encore apportés par les programmateurs associés. Le mécénat est là, celui de la fondation BNP Paribas (80 000 €) et d’une foison d’autres entreprises (200 000 €). Seule manifestation créée en 2013 qui aujourd’hui survit, la Biennale est dorénavant confortée, associée aux Elancées, au CIAM d’Aix, à toutes les scènes nationales et au Théâtre d’Arles. Et à mi-parcours de sa 2e édition, le public répond présent. Les théâtres affichent complet, tout comme les chapiteaux. Le prix des places assez élevé (20 € en moyenne) n’a pas freiné la fréquentation,

même si de tels tarifs sont sans doute un obstacle pour beaucoup de budgets. Mais vraiment, changer le monde ? La funambule Tatiana-Mosio Bongonga affirme que son art est une métaphore : il n’y a pas de vie sans risque, et si l’on cesse d’avancer on ne peut que tomber. Quant à Johann le Guillerm, qui dans ses expositions comme dans ses spectacles cherche à revenir au point originel, à l’essence des objets, des gestes et des formes, il démontre que le mouvement, l’inattendu et le désordre gouvernent notre monde. En prendre conscience ne peut que changer, poétiquement, notre regard. Puisque le cirque s’adresse à tous, peut-être que son succès peut changer notre monde ! A.F.

Marseille, sensations risque est rodée, mais sans cesse renouvelée par ces trois dingues qui jouent de l’outrance et de la répétition du comique de répétition avec un immense talent. Les artistes sont déjà en piste dès l’entrée du public, et le ton est donné. Ils placent et déplacent les spectateurs, s’approprient leurs vestes ou leurs sacs. Puis ils déroulent un mélange d’absurde, de musique et de poésie. Un petit souffle d’anarchie flotte Super Sunday © Petter Hellman également quand, après une ur cinq spectacles vus lors de cette prepluie de chapeaux tombée sur le mière quinzaine marseillaise, un seul public, les enfants sont invités à se précipiter laisse un goût d’inachevé : Benja, par la sur la piste pour les ranger dans une malle. troupe brésilienne Borogodo, conte l’histoire Le trio conclut son délire par une pyramide d’un fils d’esclave, qui deviendra le premier humaine, mais pour plus de sécurité, elle sera clown noir brésilien. Les effets visuels, en réalisée au sol. vidéo et numérique, sont réussis, et la samba Les Finlandais de Race Horse Company donne le rythme. Le reste est un peu court. ne prennent pas tant de précautions. Leur De la contorsion, de l’acrobatie au tissu, et spectacle Super Sunday est une succession un univers de clown qui mériterait d’être de prises de risque de haut vol. Avec cette bien plus développé. capacité qu’ont parfois les circassiens de Celui des Nouveaux Nez, en revanche, est nous faire complètement oublier le danger, plus qu’abouti. Dans Triiio, Felix, Fritz et les artistes se propulsent avec une bascule, Piola ne fixent aucune limite à leur art du virevoltent d’un trampoline à l’autre, se cataclown. Un blanc et deux Auguste, la recette pultent littéralement dans une bâche tendue

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en l’air ou défient l’attraction terrestre sur une roue de la mort lancée à pleine vitesse. La prise de risque au trapèze, cerceau, mât chinois ou fil de fer, est élevée également pour Les Colporteurs et Sous la toile de Jheronimus. Inspiré par Le Jardin des Délices de Jérôme Bosch, le spectacle, qui repose sur l’animalité, alterne harmonie et chaos, douceur et agressivité. L’effet reste cependant parfois confus et les intentions pas toujours lisibles. Et malgré ce qu’indique le livret de la BIAC, le spectacle n’est pas accessible dès 6 ans. Certains enfants de classes de primaire qui y ont assisté en ont été choqués. Cela ne peut pas être le cas avec Réversible des 7 Doigts de la Main, véritable féerie de beauté, d’émotions et de grâce profondes. Le niveau technique de la troupe québecoise est complet et exceptionnel. Dans un décor mouvant, d’un côté la rue, de l’autre la maison, les artistes évoquent leurs racines, leurs ancêtres et toutes les sensibilités humaines. Amour, joie, colère, tristesse, tous ces états sont traduits en mouvements : danse, acrobaties, tango jonglé, chorégraphie au skate, portés, sauts périlleux, équilibre, de ces quatre femmes et quatre hommes émanent une harmonie, une solidarité, une intensité, que seul le cirque peut offrir. JAN-CYRIL SALEMI


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monde » L

Sirène

a Sirène de février avance d’un pas sûr, sereine. Elle est sur un fil tendu au dessus des visages ; le Parvis de l’Opéra de Marseille est plein : tous ceux qui ont eu vent de sa traversée sont venus y assister. On ne voit qu’elle, la funambule Tatiana-Mosio Bongonga, qui évolue souplement, s’allonge en suspension, se redresse avec vivacité, chaussée de bottines gauloises. On entend chanter Pascale Valenta, « joueuse de voix » puissante, accompagnée d’un musicien,

Jérémy Manche, mais ils sont dissimulés parmi la foule. Pour ce rendez-vous coutumier de Lieux Publics, la compagnie Basinga -créée à Sauve (Gard) en 2014- a choisi la sobriété d’un dispositif tout simple, qui met en relief la forte personnalité de ses artistes. Un câble, un lourd balancier, et surtout un sourire éclatant, complice, conduisant chacun à penser qu’il n’est adressé qu’à lui seul... GAËLLE CLOAREC

Aix, aux sources des rêves

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e cirque d’aujourd’hui aime échapper à l’esthétique de numéros dont le but est d’amener le spectateur à s’exclamer devant l’exploit. Certes, la performance fait partie intégrante des nouveaux spectacles, mais l’essentiel obéit à une autre poétique, interroge nos imaginaires, notre appréhension du monde, à travers une représentation sensible du merveilleux, au sens premier, qui nous étonne. Dans cette forêt de sens possibles et cette refondation d’un genre, éclosent des projets dont la Biennale du Cirque donne un bel aperçu. La jeune compagnie niçoise, Les Hommes de Main (quels beaux portés !), jongle entre les supports, avec City. Les cubes de différentes tailles deviennent écrans porteurs de paroles, témoignages, réflexions, parfois cocasses, recréent une idée de ville dans laquelle la rencontre avec l’autre est ambigüe. La vidéo devient décor grandeur nature dans lequel évoluent les deux protagonistes, Joris Frigerio (auteur du projet) et Matthieu Renevret. Quelle distinction entre le réel et l’illusion ? « Ovni entre cirque, théâtre et film documentaire », cette prometteuse création devrait sans doute resserrer son propos pour gagner en densité. Nettement plus confirmé, et devenu un classique, L’Homme de Hus. Camille Boitel s’empare du thème du clown auquel les objets résistent, pour composer un spectacle (créé en 2003) où l’acrobate se débat, lutte avec l’énergie du désespoir contre une horde de tréteaux qui, mus d’une vie propre, s’acharnent sur le personnage qui sombre dans la folie. On rit, et on se laisse emporter dans cette interrogation existentielle de la place de l’homme qui ne sait où il se situe.

Santa Madera © Christophe Raynaud De Lage

Cercle sacré de la roue Cyr, alors que la terre ocre dessine l’arène circulaire dans laquelle virevoltent, tournoient jusqu’à l’épuisement, à la mort, pour une renaissance, une communion mystique avec l’essence même du monde, Juan Ignacio Tula et Stefan Kinsman. Leur nouveau spectacle, Santa Madera, inspiré d’un rituel sud-américain pratiqué par les peuples indigènes (Incas et Quechuas) qui utilise le Palo Santo, un bois odorant aux multiples vertus (chasser les mauvais esprits,

unir les êtres), est bouleversant de poésie, de beauté. L’acrobatie devient ici évidence, signifiante… grâce du pas de deux dans le cercle mouvant devenu personnage, éclosion des formes dans les éclats de lumière qui accordent à l’ombre la spiritualité de son mystère. La vie, l’amour, la mort, tout se joue là, anneaux concentriques accompagnés des sonorités du hang, autre figure du cercle… MARYVONNE COLOMBANI

suite p.32


32 critiques spectacles

Le Cirque poussière © Philippe Laurençon

Ailleurs, partout, la Biennale

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u Théâtre d’Arles, Kitsou Dubois créait R+O, son premier spectacle pour enfants. Poursuivant son travail sur l’apesanteur, c’est une immersion dans l’air et l’eau qu’elle propose, appuyée par des vidéos captées et réalisées en gravité zéro ou dans l’eau. Les images projetées, retravaillées pour ne plus figurer que des ombres pâles, fantasmagoriques, induisent l’imaginaire et rythment les différents tableaux ; en premier plan, Pauline Barboux et Jeanne Ragu, les deux acrobates, vont se laisser porter par les sons envoûtants joués par Cyril Hernandez qui frotte, tape, scande, fait d’une goutte d’eau un instrument sidérant. Ces étranges jumelles évoluent lentement, fragiles dans leurs mouvements, se frôlant dans des équilibres qui semblent précaires mais se complètent parfaitement, suspendues à des cordes ou dansant au bout d’un élastique. Est-ce dans l’eau, est-ce dans l’air ? On aimerait que la confusion perdure, qu’un vertige durable s’empare de nos sens, dessus dessous… Aux Salins, c’est dans l’univers épuré de Jérôme Thomas et Martin Palisse que s’immergent les imaginaires, au cœur d’un cercle à peine éclairé qui accueille sept jongleurs et une chanteuse lyrique. HIP 127 la constellation des cigognes est un étrange ballet jonglé. Sur la musique de Roland Auzet, le chant monte doucement, a cappella, enveloppant les sept interprètes et leurs mouvements mesurés qui laissent apparaître, comme par enchantement, plumes, cannes, balles et anneaux. Chacun de ces agrès participe de la création d’un

songe, engage différemment les corps des jongleurs, couchés, dressés, bondissants ou ralentis, rythme leurs déplacements et leurs interactions. S’en dégage une poésie d’une infinie délicatesse… À Cavaillon et jusqu’à Gap les scènes nationales accueillent Bestias, sous chapiteau. La Cie le Baro d’Evel est une famille, avec animaux. Dressés ? Si la pie attrape des papiers au vol, si les chevaux galopent et tournent et portent, ils sont surtout caressants, et comme humanisés. L’acrobatie, saut périlleux, portés et main-à-main, devient danse très souvent, envol d’oiseau, prétexte à rire. Il est question de construire un monde nouveau, harmonieux, entre les humains, les animaux et les choses. Aux portes communes de l’exploit discret, de l’enfance et de l’intimité offerte.

Tandis qu’aux Élancées… À Istres, sous leur chapiteau, les quatre artistes de la Cie La Faux populaire- Le Mort aux dents s’affairent. Sur un plateau de bois tournoyant, au milieu de caisses vides, c’est tout un monde fait de bric et de broc qui saute aux yeux. Un manège au cœur duquel des styles improbables vont se croiser, faits d’ingéniosité, de trouvailles hilarantes et inattendues ! On y trouve pêle-mêle un tango dansé sur des assiettes, un solo de violoncelles et de tintements de bouteilles savamment placées sur le bord tournant, un contreténor vélocipédiste, une porteuse au cadre aérien qui joue de la trompette, un

monsieur loyal aux airs ahuris, un numéro de voltige final d’une grâce sidérante… Le tout enrobé d’un humour très pince-sans-rire, qui n’est pas s’en rappeler les Monty Python ou Jacques Tati ! À Cornillon un autre chapiteau saisissait le regard… Une petite chose en réalité, une piste d’1,50 m de diamètre seulement. Dans Le Petit cercle boiteux de mon imaginaire, un clown (Michel Gibe), plein d’espoir, de projets, va essayer de faire en sorte que ses numéros réussissent, si tant est que ça ait un sens. Là, un chien, une poule, un rat, et des musiciens de bois vont l’y aider, ou pas… sans oublier le public, invité à devenir acteur-responsable. Si le propos se veut léger, c’est une toute autre partie qui se joue-là : serait-on capables de lâcher-prise, de « faire le clown » par moment, ne serait-ce que pour aller voir ailleurs si une autre réalité est possible ? Il se trouve que oui… Enfants et adultes, ensemble. DOMINIQUE MARÇON ET AGNÈS FRESCHEL

La Biennale Internationale des Arts du Cirque se poursuit jusqu’au 19 février à Marseille et dans 25 autres villes de Provence-Alpes-Côte d’Azur


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La Canebière en liesse. Pour qui ?

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Les Girafes - Cie Off © David Gentili

uel est cet étrange troupeau de girafes rouges qui attend au pied de la mairie du 1/7 de Marseille ? Karwan, pour le coup d’envoi du premier Dimanche de la Canebière (il en est prévu un par mois), a prévu les choses en grand, et en spectaculaire, en invitant ce spectacle historique de la Compagnie Off : une Casta Diva élevée dans les airs, bergère d’un troupeau de girafes rouges, secondée par des grooms qui grimpent aux lampadaires et dirigent la foule mine de rien... Un véritable succès pour cette ouverture : le soleil est là, les échassiers camouflés donnent aux piétons leur allure alanguie, la circulation est fluide malgré les poussettes et la foule, et ces girafes, ces pluies de confettis colorés poétisent indéniablement l’artère légendaire, et si délaissée. Las, la volonté affichée de la mairie (de secteur) et du département 13 de reconquérir la Canebière est accompagnée de l’habituelle récupération politique : le déroulé de la journée n’est communiqué au public que le matin même, et les ateliers numériques, sur inscription, ne sont pas accessibles ; le départ annoncé à 11h a lieu à 11h35 parce qu’on

attend Monsieur Gaudin qui vient couper le ruban, et faire un discours que personne n’est venu écouter ; c’est long quand les enfants ont faim ! Mais surtout, la communication regorge de déclarations d’intention officielles, oublie les artistes et le contenu culturel réduit à quelques lignes. Le programme du cinéma Variétés, concocté conjointement par toutes les associations de cinéma qui veulent renouveler l’expérience chaque mois, apparaît sur le programme en une ligne... Celui de la Méson, le soir, aux Danaïdes, était électrisant : 100% féminin, et formidable, pour écouter puis pour danser. Ces soirées Le Son se renouvelleront aussi chaque mois. Seront-elles mieux annoncées, et leur communication servira-t-elle les artistes et le public, et non les seuls intérêts électoraux ? (Voir les comptes-rendus de concert de la Méson et du Dimanche des Variétés sur journalzibeline.fr). AGNÈS FRESCHEL

Le premier des Dimanches de la Canebière s’est déroulé le 29 janvier

L’étrangère

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vec Face à Médée, François Cervantes crée une véritable tragédie à l’antique. Il y retrouve l’essence du mythe par sa forme particulière : Médée n’est pas là ; mais trois femmes sont sur scène qui racontent et éprouvent l’effroi. Celui de l’instant où la femme délaissée traine ses enfants égorgés au devant leur père. L’Exposition, le Moment Tragique par excellence, qui met un terme, définitif, à tout. La tragédie antique est retrouvée, avec son mode indirect, ses lamentations, son épure, ses flash-back qu’on nommait alors anamnèses. François Cervantes est pétri de culture classique, et cela se sent, par ce choix de trois femmes seules et toujours en scène qui racontent plutôt que d’incarner, mais éprouvent pourtant, jouent l’émotion, portent la voix du monde. Reste que le poids est lourd pour les comédiennes, sans artifice et sans relais. Si l’immense talent de Catherine Germain la préserve de tout ridicule dans l’excès, dans l’hybris, et lui permet de porter intacte

© C. Raynaud de Lage

l’émotion indirecte, Anna Carlier choisit joliment de rester effacée, et en joue ironiquement. Mais Hayet Darwich pousse des cris arrachés à côté des entrailles, comme forcés. Un déséquilibre du jeu qui nuit au trio choral. Et puis qu’est ce que Médée ? L’actualisation discrète, par l’évocation de l’auto et du parvis de l’église, déplace un peu le mythe, mais le personnage apparaît pourtant dans toute sa monstruosité… fantasmatique. Car qu’est-ce que cette femme étrangère qui égorge son frère

et tue ses enfants par passion amoureuse ? Qu’est-ce que cette Africaine, cette incarnation de la barbarie féminine, sinon le fantasme absolu des hommes grecs, des hommes blancs, des garçons qui ont peur de leur mère, et des étrangères ? François Cervantes veut expliquer le geste de Médée comme l’envers de la passion amoureuse, la réponse à la trahison. Mais Médée, symbole de l’étrangère, participe de l’imagerie de la barbare sauvage venue des contrées lointaines. Image qu’il est urgent d’interroger autrement, dans la création contemporaine… AGNÈS FRESCHEL

Face à Médée a été créé au Merlan, Marseille, les 19 et 20 janvier


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Qu’est-ce qu’idéalisme ?

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n écrivant son Looking for Quichotte, Charles Eric Petit pose la question de l’action politique. Car le personnage de Cervantès est aujourd’hui universellement méconnu : son image romantique de noble pourfendeur des pragmatismes modernes magnifie son ridicule, que Charles Eric Petit réinstalle. Quichotte, homme médiéval, est avant tout un inadapté, un fou, dont la Quête n’a rien de grandiose. En se demandant quels combats le chevalier à la triste figure mènerait aujourd’hui, l’auteur affronte l’obstacle, et en fait un pourfendeur magnifique et ridicule, qui attaque McDonald mais ne sait qu’arracher les hamburgers de la bouche des enfants. Moraliser la finance et réenchanter le réel ? Son personnage en a le désir, mais son combat s’exerce en dépit du bon sens, et il erre d’asile psychiatrique en cellule de dégrisement. La société hypermoderne de consommation fabrique un fou qui lui ressemble, campé par Roger Atikpo secondé par Tommy Luminet, perdu dans des images vidéo qui ne figurent rien, babillant un discours insensé et pompeux. Sa révolte contre la folie du monde, et son acharnement au combat, restent ses seuls atouts. Justes, mais dérisoires, et si inutiles.

© X-D.R

Après le spectacle un karaoké politique enthousiasmant permettait une autre forme d’action : les discours de Jaurès, Victor Hugo, Césaire, Sankara et Jaurès tapaient incroyablement fort, et juste. Depuis deux siècles des harangues incroyables contre le colonialisme, pour l’égalité et l’éducation de tous, contre la pauvreté et la misère, ont été prononcées. Le public s’en emparait dans un dispositif

malin qui incitait à l’action. Non contre des moulins à vents ou des fastfoods, mais contre ceux qui nous gouvernent si mal. Idéalisme, ou pragmatisme raisonné ? AGNÈS FRESCHEL

Looking for Quichotte a été joué au Théâtre de la Joliette, Marseille, du 26 au 28 janvier, et au Théâtre de Grasse le 31 janvier

Cette obscure clarté…

L’instant décisif © Jean-Louis Fernandez

La Beauté du geste (À mains levées), fresque qui interroge les relations de l’action théâtrale et de l’action politique. Nous assistons à la gestation, riche de multiples apports, irisée de sens, de jeux… tâtonnements des commencements, où l’on goûte les mots, leurs significations innombrables, autant de déguisements qui nous enserrent en un réseau insidieux… tout est politique, jusqu’au dictionnaire qui renvoie les mots les uns aux autres, emprisonnant les définitions dans un filet aux mailles étroites… La poétique théâtrale devient alors politique au sens noble du terme, avec une construction qui tient plus du chant que de la pièce. Et si le langage (acteur lui aussi, par essence) est un masque, propre par là-même au jeu théâtral des personnages, il est intiment lié au temps qui lui accorde son épaisseur, sa densité. Analogies, bousculements impromptus ! On croise

U

ne disposition bi-frontale, proximité avec le plateau, large ruban sur lequel sont disséminés des objets hétéroclites, une brouette contenant un motard gainé de cuir, une porte, un siège… On est bien installés ? Alors on peut commencer. Pas de rupture entre le moment du jeu et celui de l’incipit de la pièce. D’ailleurs s’agit-il vraiment d’une pièce ? Elle est à venir dans le deuxième volet du triptyque

Hamlet, la Bande à Bader, le public suit avec passion, reprend certaines phrases scandées, se retient parfois d’intervenir. Le titre, L’instant décisif, est dû à Henri Cartier-Bresson, qui définissait ainsi « la fraction de seconde au cours de laquelle un photographe, appuyant sur le déclencheur, capture l’instant unique qui vient de naître et de mourir sous ses yeux ». Instant décisif qu’est l’entrée sur scène, dans la lumière pour laquelle on souhaite de « ne pas manquer de clarté » ! Nathalie Garraud et Olivier Saccomano nous offrent ici un texte lumineux jouant sur tous les registres, porté par la virtuosité des cinq comédiens de la Cie du Zieu. MARYVONNE COLOMBANI

La Beauté du geste 1 a été joué au Bois de l’Aune, Aix, du 25 au 27 janvier


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Jeunes et abstraits

L

e Ballet Preljocaj accueille depuis septembre 2016 une nouvelle promotion de la Cellule de professionnalisation pour des danseurs issus des formations supérieures. Ces six jeunes gens, très jeunes, ont été formés pour la plupart dans la région ! L’un au Conservatoire Supérieur de Paris, une autre à celui de Madrid, mais trois viennent de l’École Supérieure Rosella Hightower de Cannes, et un de l’ENSD de Marseille. Et leur technique irréprochable, leur présence, leur façon d’habiter la scène et d’entrer dans les œuvres, fait plaisir à voir. Ils dansaient un double programme extrêmement difficile : Peur Bleues d’Angelin Preljocaj est aussi une pièce de jeunesse, sa toute première. Mais le plus frappant est, déjà, sa maîtrise d’écriture, et son style accompli : les six danseurs se glissent dans cette écriture rapide, qui procède par phrases enchaînées à l’unisson puis en décalages ; les placements dans l’espace, les angles, les dynamiques, sont précises et la mécanique imparable. Les tableaux se succèdent sur les élans romantiques de Beethoven, entrecoupés de perturbations électroniques. Les filles et les garçons, habillés du même noir, dansent

Peurs Bleues © Eric Lucas

pareillement, loin des clichés genrés, évoquant, en sortant un moment du tourbillon abstrait, les terreurs enfantines... Même androgynie chez les danseurs de ChaCha, création d’Hervé Chaussard ancien (merveilleux) danseur du Ballet en résidence actuellement au Pavillon Noir. Mais ici les costumes sont blancs, jupe pour tout le monde mais trop moulant, faisant des plis et montrant leurs coutures... La musique aussi est gênante, un cha-cha sur une boite à rythme de DJ

Wheel qui manque vraiment de subtilité, et de nostalgie. Car la danse, virtuose, joue de ce rapport au passé, de ce pas suranné adopté puis délaissé par les couples, par les danseurs solitaires, mais revenant parfois. Et quatre et un, comme un réflexe boiteux agitant des corps qui veulent danser autre chose... A.F.

ChaCha et Peurs bleues ont été dansés au Pavillon Noir, Aix, du 2 au 4 janvier

L’action politique

© Pierre Grosbois

L

e Lorenzaccio mis en scène par Catherine Marnas commence par une fête électro. Explosive et décadente : cette Florence renaissante ressemble à notre temps, et c’est bien de notre réalité politique que l’on nous parle. Le sexe des puissants y est sans plaisir, hormis celui de faire plier l’autre. Le peuple est hébété, soumis, les opposants effrayés se calfeutrent ou s’exilent, acceptent

l’injustice, la violence, les constants abus de pouvoir. La république florentine n’est plus qu’un souvenir, et la Chambre obéit à l’arbitraire. La reprise de ce Lorenzaccio, privé depuis la création du personnage idéaliste du peintre, a la noirceur d’un constat désabusé. On y sent pourtant une force vitale, dans la recherche effrénée du plaisir, l’attrait de toutes les ivresses. Julien Duval habite Alexandre avec légèreté et cynisme, bêtise et malignité. Tyran détestable, par la place qu’on lui donne, il se comporte en enfant sans limites, inconscient des autres, abominable et charmant. Mais si Lorenzo est contaminé par ses « vices », la perruque blonde qui le dissimule recouvre seulement son humanité,

et la passion politique. La scène centrale, entre Strozzi et Lorenzo, est le pivot de la pièce, magistralement interprété par Franck Manzoni, qui prend la mesure de son échec, et par Vincent Dissez, un Lorenzo époustouflant d’idéalisme déçu. Qui sait que le meurtre du tyran est inutile, et ne croit plus comme Strozzi en l’efficacité de « la douce violence de la raison sur les hommes » (Marnas truffe son Lorenzaccio d’un peu de Brecht). Il accomplit son acte inutile, puisqu’un Médicis pire encore qu’Alexandre, pantin terrifiant, prendra sa succession. L’action politique est-elle vaine ? Se battre pour la république, la justice, contre la tyrannie, reste le seul acte possible. L’attentisme de Strozzi, puis sa fuite, est tout aussi suicidaire. Autant agir ? AGNÈS FRESCHEL

Lorenzaccio a été joué aux Salins, Martigues, les 26 et 27 janvier


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Dissertation sur un champ de ruines

S

ouvent les pièces théoriciennes pêchent par une démonstration trop appuyée. C’est le cas avec Le vent se lève de David Ayala, fruit d’une écriture scénique collective, sous-titrée habilement (Les idiots / Irrécupérables ?). Histoire de comprendre ce dont il retournera durant trois heures : une chevauchée enragée de militants et activistes rédigeant un manifeste contre l’oligarchie de la finance qui domine et anesthésie les peuples. Mais le « Think tank » est néanmoins traversé de luttes intestines, de prises de bec violentes, de franches engueulades philosophiques et d’empoignades physiques. Comme quoi la bataille idéologique et la révolte qui gronde font quelques victimes dans leurs rangs ! Le coup de patte du metteur en scène évite ainsi un manichéisme facile. Pour étayer sa démonstration, il fractionne la pièce d’une succession de saynètes inégales, parfois assommantes, parfois dynamiques. Des temps de dissertations politiques, somme de collages de textes référentiels évoqués, projetés sur écran ou lus au micro : La société du spectacle de Guy Debord, Les lucioles de Pasolini, Marx, Bond, le Comité invisible. Des sketches jubilatoires où les idiots, dissimulés

© HG

derrière des tentures transparentes (un nouvel espace théâtral), sont pris au piège de situations foutraques prétextes à passer à la moulinette critique la pensée formatée et les éléments de langage. Prétextes également à ridiculiser le petit monde des médias, du « Charity Business », du showbiz hystérique, de l’art contemporain et le jargon superfétatoire de la caste culturelle. Tiens, pas le théâtre ?! Le tout agrémenté de séquences filmées autofictionnelles, d’extraits de films et d’archives

qui alourdissent l’argumentaire déjà volubile. On se relève de ce brûlot théâtral un peu K.O., partagé entre le plaisir et l’abattement. Trop de blablabla et patati et patata… M.G.-G.

Le vent se lève (Les idiots / Irrécupérables ?) a été jouée le 31 janvier au Liberté - scène nationale de Toulon

Comme suspendu aux lèvres

M

arie Vialle est un diamant taillé sur mesure par la main experte de Pascal Quignard. En fine connaisseuse de ses pièces -elle a mis en scène Le nom sur le bout de la langue et Triomphe du temps-, elle s’est laissé polir par le rythme de ses mots

pour mieux en épouser le souffle baroque, traversée par la puissance des sentiments et la cruauté de la vie, entre désir et abandon, viol et repentir, mélancolie et colère, sexe et remords. Avec sa voix délicate au phrasé chaloupé, elle occupe le plateau tout entier de sa présence sensuelle, silhouette gracile et regards profonds. De sa gestuelle maniérée mais jamais minaudière. Troublante Marie Vialle qui porte sans frémir sur © Richard Schroeder ses frêles épaules le destin de toutes les princesses et de toutes les « vieilles reines » peuplant l’imaginaire de l’auteur : amoureuses, épouses, amantes, concubines aux doux noms exotiques. Aimées à la folie, jalousées, esseulées, répudiées, admirées, bannies... leurs trajectoires sont

étincelantes et sombres à la fois car les contes sont trompeurs. La mort toujours rôde autour de l’amour. La comédienne rend hommage à ces héroïnes intemporelles par sa beauté, son jeu juste, ses gestes suspendus, son chant. Et les précieux détails de son langage corporel : une main qui tremble, une volte-face, un croassement nocturne, une épaule dénudée. Elle s’habille et se déshabille, se coiffe et se décoiffe à chaque « renaissance », change de parures au gré des contes et des princesses, farfouillant dans un vieux ballot quelques pièces de tissu miroitantes, des piques pour cheveux ou des corsets. Dans une sorte de ballet perpétuel. Princesse, Vieille Reine ressemble à une toile abstraite de Zao Wou-Ki avec ses blancs et ses respirations intimes, ses nuages colorés et sa calligraphie lyrique. C’est un magnifique éloge de la femme. M.G.-G.

Princesse, Vieille Reine a été joué les 3 et 4 février au Liberté, scène nationale de Toulon


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Ça plane pour eux !

C

réé en 2013 sur le petit plateau des Abbesses à Paris, Borderline n’a rien perdu de sa force physique ni de sa grâce juvénile sur la grande scène de Châteauvallon. Cela tient de l’alphabet chorégraphique écrit par Sébastien Ramirez, hip-hopeur bardé de récompenses, et la danseuse allemande d’origine coréenne © Frank Szafinski Honji Wang. Un mélange détonant de tableaux de danse contemporaine teintée de tradition coréenne, de hip hop graphique et aérien, d’acrobaties fulgurantes et de gréage qui suspend la danse dans son envol. Mélange qui demande aux cinq interprètes de trouver une synergie tout en restant singuliers ! En apesanteur, empêchés dans leurs déplacements au sol, ils sont parfois obligés de courir sur place, vainement, tantôt au

ralenti suspendus dans les airs. Leur complicité millimétrée -tout se joue dans une tension et une précision extrêmes- et leur plaisir à « jouer » ensemble sautent aux yeux, clef de leur réussite et de leur succès. Mais au-delà de la prouesse technique, Borderline est un spectacle généreux qui interroge la réalité du vivre ensemble dans nos démocraties. Par le truchement d’une structure tubulaire

modulable, à la fois cage, cadre, paroi, il parle d’appartenance et de frontières : dehors-dedans, en haut-en bas, ouverture-fermeture. Les danseurs doivent s’approprier l’espace déconstruit, le contourner, s’en échapper, s’y lover parfois ; les gréeurs leur permettant d’entrer dans cette troisième dimension. Ce sont des marionnettes attachées les unes aux autres par des fils invisibles où chaque mouvement dépend du précédent ; ce sont des pantins désarticulés se jouant des cadres imposés, quitte à les transgresser, toujours au bord du déséquilibre. Ou carrément en rupture. L’humour se fraye un chemin au milieu de cette virtuosité quand Honji Wang et Jann Gallois apparaissent juchées sur des talons vertigineux, arc-boutées vers l’arrière, prêtes à défier les lois de la gravité en tentant des figures de break dance ! Une audace immédiatement récompensée par la clameur du public. M.G.-G.

Borderline a été donné les 3 et 4 février à Châteauvallon - scène nationale, Ollioules

Climat hic

2

022, Île Maurice. Dans quelques semaines aura lieu à Shanghai la COP 28, celle de la dernière chance. Le réchauffement climatique ne cesse de s’accroître. L’urgence est absolue. L’ultime espoir de sauver ce qui peut encore l’être tient entre les mains des dirigeants de la planète. Un air de déjà vu peut-être ? Plutôt, oui. Le discours est rôdé, comme un vieux disque rayé. Aucun cynisme dans cette appréciation. Un simple constat. Celui que dressent également la compagnie Vertical Détour et son metteur en scène, Frédéric Ferrer. Les délégués des différents pays rassemblés sur cette île ont tous une préoccupation commune : finaliser le texte qui sera présenté à Shanghai et engagera le monde vers la mutation qui le préservera. Ils ont tous la même volonté : limiter la hausse des températures sur la terre. La seule difficulté étant que chacun envisage cet objectif selon sa propre perspective. Et malgré la prise de conscience générale, trouver un accord s’annonce complexe. En guise d’indice, la table des négociations est en pente. Passer des mots aux actes sera pourtant indispensable.

© Baptiste Klein

Encore faudrait-il s’entendre sur les mots. Les débats tournent vite à l’absurde. Les délégués se querellent sur la place d’une virgule ou la suppression d’un terme dans le préambule. Faisant le constat lucide de leur lenteur, ils estiment, statistiques à l’appui, la vitesse à laquelle ils devraient travailler pour être efficaces. Mais la bataille continue, et pas seulement pour des détails. Réduire les

émissions toxiques, tous d’accord. Sans renoncer à son confort pour les USA, sans sacrifier sa productivité pour la Chine, sans entraver son développement pour le Congo. La gravité de la situation et le réalisme froid des comédiens contrastent avec le burlesque de discussions stériles vouées à l’échec. Le spectateur, lui, oscille entre rire et malaise. Accompagnés de l’étrange sensation d’être dans l’impasse du futur. JAN-CYRIL SALEMI

Kyoto Forever 2 a été joué le 21 janvier au Théâtre Durance à Château-Arnoux / Saint-Auban


38 critiques spectacles

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Deux corps enchantés

D

eux maîtres de la scène, deux fous du plateau, deux étoiles du ring. Deux corps au-delà du mouvement chorégraphié. Ils ne dansent pas, non, c’est bien plus que ça. Ils habitent et offrent chacun de leurs gestes. La danse advient au bout d’un doigt, dans un pied qui tressaute ; en fait elle était là bien avant, d’un seul bloc, toute contenue dans le corps de ces deux hommes venus ce soir-là à hTh à Montpellier. Boris Charmatz, seul et nu, sans musique, lumière en plein feux, enchaine 50 minutes d’un solo qui déroule une histoire de la danse du XXe siècle, chorégraphié par Tino Sehgal -(sans titre) (2000), sa dernière pièce conçue avec séparation entre public et artiste, avant d’inventer ses fameuses expositions dématérialisées. Avec des fragments de gestes devenus mémoire collective (mieux vaut tout de même être du sérail si l’on veut s’intégrer à la ronde), Charmatz reprend ce récit qui tisse les mouvements de Nijinski, Cunningham, Bausch, Fabre, Le Roy… C’est en quelque sorte déjà une exposition. Ou son catalogue. Au début, tendus, on essaie de tout reconnaître : « ah, c’est Le sacre du Printemps ! », on se rengorge d’avoir trouvé avant le voisin. Mais Charmatz incarne et dépasse tous ces souvenirs, fait voler en éclats toute velléité de langage savant : il bouge, il est là, et la somme de ces courbes, de ces sauts qu’il ressuscite, devient un choral anonyme à savourer dans la puissance de l’instant. Puis, deux bus convoient le public dans un

Radio Vinci Park © Erwan Fichou

parking souterrain du quartier Antigone. Radio Vinci Park a déjà commencé. Sous l’oppressant plafond bas, Marie-Pierre Brébant est au clavecin. Petit chien de mémère à ses pieds, chandeliers baroques, tapis vieillot. Purcell, Mozart, Haendel. Quelques fausses notes par-ci par-là nous rappellent que tout cela est vrai. Plus loin, une moto et son chauffeur en cuir, casque intégral. Immobilité inquiétante. Au clavecin, les fausses notes se sont échappées, ne reste plus que la présence métallique des partitions qui s’enchainent. Musique de parking : rassurer pour oublier l’angoisse de ce qui pourrait arriver. Talons hauts, grelots de coquillages aux mollets et aux bras, cheveux bouclés platine, François Chaignaud, dans toute sa splendeur, est prêt

à affronter l’objet de son désir. Au fond de ce parking, c’est une histoire d’amour extrême qui va se jouer. On connaît l’extravagance du danseur, son goût du risque, sa précision ébouriffante, son charme troublant. Mais dans cette mise en scène de Théo Mercier, ballet motomachique, il est encore plus fragile, plus amoureux, plus exacerbé que jamais. Sa danse investit des terrains enfouis, hors limites : dans les tréfonds de cette parade qui vire au duel, il nous entraine si loin que la mort en devient presque belle, elle aussi. ANNA ZISMAN

(sans titre) (2000) et Radio Vinci Park ont été joués du 10 au 12 janvier à hTh, Montpellier

Molína mouline

Rocio Molina © Jean-Louis Duzert

A

près un rock tonitruant exécuté par les quatre hommes qui l’accompagnent, Rocío Molina arrive sur scène, dans un silence épais qui imprègne chacun de ses gestes. Sa robe blanche et froufroutante souligne la sobriété des mouvements. Les topics flamencos naissent de cette présence immaculée. Des poignets qui vrillent, des palmas lentes et muettes. La danseuse et chorégraphe maintient le public dans l’attente. Elle est l’une des meilleures bailaora d’aujourd’hui, elle entraîne ses spectacles hors du cadre, et il faudra patienter pour vibrer au son des zapateados. La Molina tient tout le monde par le bout du nez. Quand José Ángel Carmona débute son premier chant a capella, c’est une avalanche

de virtuosité qui déferle. Rocío Molina en impose. Pas millimétrés, rythmes si précis qu’ils échappent à l’oreille, on est effarés de tant de perfection. C’est d’ailleurs peut-être pour s’excuser d’être si performante, pour s’échapper de ces codes qu’elle domine si bien, que la chorégraphe pratique un pas de côté, vers une dramaturgie plus théâtrale, plus contemporaine. S’ensuit une série de tableaux plus ou moins convaincants, à la narration lourde. L’interprétation sans faille, morceaux de bravoure en sus, emportent l’ensemble, balayant l’émotion au passage. A.Z.

Caída del Cielo a été joué les 12 et 13 janvier en ouverture du 27e Festival Flamenco au Théâtre Bernadette Lafont, Nîmes


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Un Ui pas irrésistible

«

Va, pensiero, sull’ali dorate… » Arturo Ui, vautré dans son fauteuil face à six écrans qui retransmettent le chœur des hébreux, jouit de la grandiloquence de Verdi. C’est le long début de La résistible ascension d’Arturo Ui. Puis il se tourne vers le public, il a les cheveux plaqués, la mèche sur le côté, Mein Kampf affiché sur le buste. Bien. Philippe Torreton est donc Hitler. Les cours de la bourse ont remplacé les esclaves juifs sur les télés. Bien. C’est donc la crise, et des pantins sinistres et lénifiants en profitent grassement. Ui ne tardera pas à s’immiscer de plus en plus dangereusement dans les affaires économiques et politiques de ce monde corrompu jusqu’à la moelle. Les différents tableaux de la pièce de Brecht s’enchainent, les transitions appuyées par du gros et gras rock allemand. Bien. On est donc en Allemagne. D’ailleurs sur les écrans, c’est Auschwitz qui apparaît, modélisé façon Minecraft. La mise en scène de Dominique Pitoiset interroge. Le jeu des acteurs est si vieillot que le texte disparaît sous la poussière : ton

© Cosimo Mirco Magliocca

déclamatoire, face public ; Torreton pérore sans conviction ; petits pas et chants de comédie musicale cabotine sur le mot Corruption… Il y a trop et pas assez sur le plateau. Trop de subterfuges (écrans – caution de modernisme, décor imposant réduit à un dispensateur d’accessoires), trop de sens surlignés. De douteux amalgames : des images des violences commises pendant ce qu’on suppose être les manifestations contre la Loi travail (casseurs et CRS sont présentés à égalité) se terminent par une archive de l’incendie du Reichstag. Et

l’inquiétude ne monte pas, rien ne surgit qui puisse nous plonger dans cet abîme de noirceur ironique de l’écriture de Brecht. Tous pourris. Tous risibles. En cette période électorale, serait-ce le constat de Pitoiset ? L’intention était de produire un parallèle avec la situation mondiale actuelle. Le message est brouillé. Un discours muet de Ui, sous un bleu-blancrouge numérique, conclue la pièce. Au son des éculés Carmina Burana. ANNA ZISMAN

La résistible ascension d’Arturo Ui a été jouée les 25, 26 et 27 janvier au Théâtre Molière, à Sète

Flamboyant désespoir

I

l y a un sentiment de vivre un moment un peu magique et grave, comme lorsqu’on soulève le couvercle d’une malle oubliée dans un grenier. Ce soir, Cassavetes nous livre son dernier texte, jamais joué depuis 30 ans pour cause de mort de l’auteur, puis des deux comédiens pressentis (Ben Gazzara et Peter Falk). Créé pour la première fois en 2014 par Jan Lauwers et sa Needcompany à Vienne, il nous propose une recréation de Begin the beguine à hTh, avec les acteurs de la troupe permanente de la scène © MarcGinot nationale de Montpellier. Deux copains, revenus de tout, prêts à tout, dans un cul de sac existentiel que seule l’amitié désenchantée pourra peut-être déblayer. Quelle émotion de retrouver les images, l’atmosphère, la folle irrévérence de l’auteur américain, là, devant nous, si vivantes et tellement vraies. Et très vite, le travail contemporain de Lauwers s’émancipe de l’icone. Bel acte de liberté. Gito et Morris (Gonzalo Cunill et Juan

Navarro) ont décidé, on ne saura pas réellement pourquoi, de brûler ce qu’il leur reste de désir et d’espoir. Ils s’engouffrent dans une spirale en huis clos, ils monologuent plus qu’ils ne parlent, trop tournés déjà vers leur fin toute proche. Les filles, commandées par téléphone comme on se fait livrer une pizza, défilent. Elles sont pré pubères, japonaises, grosses, soixantenaires, mannequins,… Des femmes, quoi. Les performeuses Romy Louise Lauwers et Inge Van Bruystegem les

incarnent toutes, sans jouer sur l’âge ou le physique. Ce sont finalement toujours les mêmes femmes, qui écoutent, s’étourdissent et plongent avec Gito, chasseur d’arcs-enciel, et Morris, en quête d’un amour qu’il ne parvient plus à éprouver. Le vide est trop plein de tout ce que chacun a laissé échapper, on ne sait comment, on ne sait quand. La très élégante mise en scène de Lauwers et les quatre comédiens inspirés entrainent le texte logorrhéique dans une impressionnante frénésie désespérée. Des images vidéos tournées en direct maintiennent le lien avec le cinéaste, la temporalité est fluide, l’intermittente réverbération sonore est tout sauf gadget, les hors-champs scéniques creusent le propos, et le sexe s’impose comme ludique, frais, tragique, et sinistre à la fois. « Quel est l’intérêt de ce jeu ? » demande l’un des personnages. Jouer et rejouer la vie, jusqu’à plus soif. A.Z.

Begin the beguine a été joué à hTh les 26, 27, 28, 30, 31 janvier et 2, 3 et 4 février. En tournée dans la région, le 16 mai au Cratère à Alès.


40 critiques musiques

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© Guy Vivien

De la forme et du fond...

A

u Grand Théâtre de Provence, l’ensemble Musicatreize pratiquait un exercice fort apprécié des mélomanes, à la fois attachés à une tradition classique et ouverts à la musique d’aujourd’hui. C’est l’ombre

romantique de Schubert qui est apparue dans le Miroir présenté par Roland Hayrabedian, les pièces de Philippe Hersant et la création mondiale proposée par Michel Petrossian pour une très belle soirée d’un Hiver en musique à Aix. On fut d’emblée surpris par l’effectif : seize voix d’hommes pour des chœurs de Schubert, épique Nachtgesang im Walde avec son atmosphère chasseresse de sonneries de cors, fantastique Gesang der Geister über den Wasser et ses oppositions de lumières embrumées de cordes graves sans violon… L’homogénéité des pupitres, filant de la basse profonde au ténor aérien, a marqué les esprits, à l’image des Illuminations (2000) de Philippe Hersant épousant volontairement la formation atypique de Schubert, opus qui laisse filer l’imagination de son auteur au gré des poèmes de Rimbaud. Chez le musicien français, la langue romantique est un socle dont on s’écarte naturellement. L’écriture contemporaine est ici abordable, oscille entre apaisement et secousses, soutient ponctuellement la virulence d’un propos anticolonial

avant de glisser vers une harmonie positive. Dans les Amours sidoniennes, Michel Petrossian synthétise la formation cors, cordes et voix égales, pour jouer sur le double-sens d’une inscription funéraire découverte en Israël sur un site sémitique sidonien. Serait-ce une épitaphe poétique… ou un message d’amour codé entre deux amants séparés ? La musique, subtilement, présente des motifs courts qui s’égarent et se rejoignent, se diluent en écho, canons resserrés, se désynchronisent... Les appels vocaux sont lumineux, la déclamation scandée parfois brutale, en grec, s’apaise et trouve une belle parenthèse sensible (et didactique !) lors d’un remarquable dialogue en français des ténors Xavier de Lignerolles et Olivier Coiffet, avec un accompagnement instrumental en faux écho, épousant à souhait le propos… Comme on aime lorsque la forme épouse le fond ! JACQUES FRESCHEL

Schubert en miroirs, concert donné par Musicatreize le 21 janvier au GTP, Aix

Danses avec des stars... d’autres musiciens, en dialogue complice et chambriste, que l’artiste est le plus beau à voir. Magnifiquement secondé par le Quatuor Ardeo, son exceptionnelle violoniste Mi-Sa Yang entraînant dans son geste généreux ses consœurs Carole Petitdemange (violon), Yuko Hara (alto) et Joëlle Martinez (violoncelle), ils ont livré une version rare, sensuelle, jubilatoire du Quintette pour piano et cordes en mi bémol majeur op. 44 du même Schumann. Mémorable ! Quatuor Ardeo © Franziska Strauss

E

n 2017, la Folle Criée, organisée au Théâtre National de Marseille en partenariat avec le CREA (Nantes) a, comme lors des éditions précédentes, généré l’enthousiasme des Marseillais. On s’est déplacé en nombre pour assister, butiner et faire son choix parmi les treize concerts de format court proposés sur deux jours. C’est à la danse et son usage dans la musique dite « savante » que Le Rythme des peuples était dédié. Le 28 janvier, Emmanuel Rossfelder, l’un de nos plus grands guitaristes actuels, faisait le plein, en solo dans le Petit Théâtre. Au naturel dans son contact avec le public, autant que virtuose semblant se jouer avec une facilité déconcertante des difficultés techniques, l’artiste a rapidement conquis l’assistance avec ses valses, barcarolles, tangos, danses espagnoles et andalouses à faire tourner les têtes. Elles furent signées en leur temps par Barrios, Piazzolla, Tarrega, Granados… autant d’opus que le guitariste a présentés avec une passion visible, suscitant un intérêt qui donna envie de l’entendre encore après deux fameux bis.

Le lendemain, c’est dans la grande salle que nous nous sommes retrouvés pour entendre celui qui, quelques jours après, fut officiellement consacré « Soliste instrumental de l’année » aux Victoire de la musique : Adam Laloum. Avec quelle verve expressive, technique et sensible, il a interprété le grand cycle poétique les Davidbündertänze op.6 de Schumann. Mais c’est peut être quand il se trouve avec

J.F.

La Folle Criée Le Rythme des peuples, s’est déroulée les 28 et 29 janvier à la Criée, Marseille


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Mostrarium : à vue et à l’ouïe !

C

création sonore, comme dans cette ville un peu angoissante où des figurines, manipulées avec virtuosité, simulent un dialogue énigmatique entre des personnages humains ou animalesques, le tout enrobé de sonorités urbaines. Un théâtre d’ombre conclut le spectacle : de grands oiseaux inquiétants, manœuvrés en coulisses, apparaissent et disparaissent dans un ciel azuréen. Un étrange voyage qui a visiblement stimulé l’imaginaire des bambins pour une production du GMEM – CNCM Marseille (commande musicale (2015), coproduite par le Théâtre Massalia et les ABD Gaston Defferre, avec le PIC (Pôle Instrumental Contemporain) dans le cadre du festival Grande Musique pour Petites Oreilles ! © Pierre Gondard

oté jardin, le musicien Nicolo Terrasi joue à l’aide d’un intrumentarium minimaliste, appeaux, objets divers ou guitare électrique dont les sons sont traités en direct grâce à un programme informatique approprié. Il fabrique un décor sonore. Coté cour, la plasticienne Loïse Bulot établit un univers visuel qui se projette au centre du plateau sur un grand écran visible d’un public composé d’enfants et d’adultes. Les images, figures au pinceau qu’elle produit en direct, sur sa planche à dessins, ou sur de vastes panneaux transparents (tel Picasso peignant sur ses pans de verre) qui établissent des profondeurs de champ devant l’écran, fascinent petits et grands. Ces deux artistes, sous le regard extérieur d’Isabelle Hervouët, créent des mondes oniriques, une réalité transformée, fantasmée, mêlant étroitement les pratiques visuelles et sonores, peuplant la scène de créatures monstrueuses et de sons inouïs. C’est Mostrarium ! Quatre tableaux mouvants se succèdent pour un format temporel adapté aux plus jeunes : une nature vibrante ou se nichent

des oiseaux exotiques, un monde aqueux, bleu s’obscurcissant à l’encre noire auquel on superpose algues et poissons bigarrés. À la proposition visuelle, en parallèle, répond la

JACQUES FRESCHEL

Mostrarium à été représenté le 28 janvier au Théâtre Massalia, Marseille

Cordes sensibles

R

évéler l’univers d’un artiste au-delà de son esthétique de prédilection : les cartes blanches initiées régulièrement par la Mesón sont toujours des rencontres au sommet entre la grâce et la générosité. Celle proposée à Malik Ziad ne fait pas exception, à l’image du musicien marseillais aux nombreuses influences et collaborations. On connaissait les cordes multiples de son arc : oud, guembri (petite guitare au long manche) et mandole. On savait moins qu’elles empruntaient des chemins musicaux aussi variés. Ceux explorés par deux de ses formations aux horizons métissés, le temps de deux soirées sous le signe des cultures partagées. Le Trio Sabâ a l’art de brouiller les repères. Autour de Malik, Agathe Di Piro au piano et Mehdi Laifaoui (Radio Babel Marseille) aux cajon et bendir (tambours) tissent leurs compositions avec le fil de la tradition orientale, méditerranéenne ou africaine. De la rencontre des personnalités et des patrimoines musicaux respectifs naît une alchimie qui dessine un espace commun bordé de mélodies raffinées.

Une odyssée d’harmonies à laquelle prendra part une pléiade d’invités de renom : Antoine Girard à l’accordéon, Christian Fromentin au violon, Gil Aniorte Paz ou encore Tchoune Tchanelas au chant flamenco. Porté par l’interprétation habitée, voire exaltée, de la chanteuse Carine Lotta, Anima Trio explore le répertoire d’une grande voix de

Sicile, Rosa Balistreri. Au tuba ou à la conque (mollusque dont le coquillage est utilisé comme instrument à vent), le souffle de Daniel Malavergne s’ajoute à l’atmosphère de folie légère qui nous transporte jusqu’aux îles éoliennes de cette terre de caractère. Mais l’Orient n’est jamais loin, suintant des notes du maître Ziad qui s’adapte décidément à tous les vents. À noter la participation espiègle de la chanteuse et comédienne de formation, Adrienne Winling,. THOMAS DALICANTE

La carte blanche à Malik Ziad a eu lieu les 6 et 7 janvier à la Mesón, à Marseille


42 critiques musiques

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Juxta crucem Le Stabat Mater de Dvorák dirigé par Laurence Equilbey à l’Opéra de Montpellier dispense une émotion profonde

I

l faut dire qu’elle la connaît, cette œuvre, qu’elle a enregistrée avec son chœur Accentus et Brigitte Engerer au piano, puis joué avec l’Orchestre de chambre de Paris. Elle sait que son chemin, qui débute au pied de la croix dans une douleur absolue, passe par la tentation du désespoir, par l’affliction, la compassion, la salvation et la rédemption, en fait une œuvre dramatique, opératique, qui lui permet d’être transposée en tableaux. Elle sait aussi rendre chacune des émotions, en modulant les tempi et les équilibres entre les solistes et les chœurs, mais aussi en laissant enfler l’orchestre quand il doit impressionner, en le colorant subtilement lorsqu’il est d’un romantisme plus intime, en faisant entendre les structures dans les passages plus abstraits. À Montpellier, c’est l’Orchestre National qui joue, et on croirait entendre Engerer, son toucher analytique, ses emportements, ses piani : un instrument unifié, qui dispense la musique pensée ensemble. Les deux chœurs associés, celui de l’orchestre et Accentus, ne

© Marc Ginot

forment qu’une voix tout aussi homogène, et puissante. Les solistes très internationaux (la soprano finlandaise Helena Juntunen, l’alto polonaise Agata Schmidt, le ténor turkmène Dovlet Nurgeldiyev et la basse biélorusse Ilya Silchukov) ont des voix jeunes, lyriques sans excès de pathos, se fondant dans la masse chorale lorsqu’il le faut, dialoguant à merveille dans les quatuors et trios, laissant le champ libre à l’émotion dans leurs morceaux de bravoure : un plateau de rêve ! Quant à la mise en scène, elle a le mérite d’exister : dramatiser le Stabat Mater, son cheminement, est une idée formidable. Surtitrer son latin et procéder par tableaux qui évoquent les états émotionnels est un choix juste. Les

deux metteurs en scène, Sandra Pocceschi et Giacomo Strada, formés avec Romeo Castellucci, fabriquent des images surprenantes, très éloignées des conventions opératiques. Parfois superbes, comme au début où une femme nue traverse très lentement la scène mouvante agitée par les chœurs qui, dessous, chantent ; parfois kitchissimes, comme lorsque le quatuor de chanteurs, pour figurer le nihilisme, débarque en punks, crêtes rouges, tee-shirts No future et kilts à carreaux. Les vidéos sont déconcertantes, au sens propre : on y perd l’attention au concert, et les voix, en coulisses durant tout le sublime premier mouvement, sont étouffées. Alors que le dernier mouvement, où les chœurs et les solistes s’assemblent à l’avant-scène, fait véritablement frissonner : parce que l’Amen qui se ralentit et s’éteint, en attente du paradis évoqué, est enfin entendu à pleines voix... AGNÈS FRESCHEL

Le Stabat Mater de Dvořák a été créé à l’Opéra de Montpellier du 31 janvier au 3 février

Verdissimo !

© Frédéric Stéphan

E

n cette fin janvier, l’Opéra de Toulon programmait Un Ballo In Maschera (Un bal masqué), un ouvrage de Giuseppe Verdi dans une production du Teatro Fraschini de Pavie. Daté de 1859, période de pleine maturité pour le compositeur, cet opéra moins connu n’a pourtant rien à envier aux

autres. Doté d’un livret riche en rebondissements, librement inspiré de l’assassinat du Roi de Suède en 1792, l’histoire oscille entre le comique et le tragique pour finir en drame romantique transposé outre-Atlantique. Pas de Verdi sans chœurs et ils ont ici un rôle primordial aux côtés des solistes, très bien servis par des airs et des ensembles impeccables, où l’on retrouve les immenses talents d’un mélodiste doué aussi pour l’art de la citation, avec des emprunts à Donizetti et Bellini. La mise en scène de Nicola Berloffa reconstituait une Amérique de carte postale dans des décors manquant parfois de cohérence, tandis qu’il était difficile d’adhérer à la pertinence des costumes dont

les accessoires trahissaient le livret. Heureusement, la direction de Rani Calderon, très investi physiquement, rendait grâce à une écriture orchestrale variée qui soulignait le récit et mettait sur orbite des chanteurs impeccables : un plateau luxueux où triomphaient la puissance et l’équilibre d’Alex Penda (Amelia), l’ample vibrato d’Enkelejda Shkosa (Ulrica) et le timbre très pur et plein d’espièglerie d’Anna Maria Sarra (Oscar) chez les femmes. Chez les hommes, le ténor Gaston Rivero (Riccardo) était opposé au baryton profond de Dario Solari (Renato) dans des joutes vocales mémorables. Un spectacle presque sans fautes ! ÉMILIEN MOREAU

Un Ballo In Maschera a été représenté du 27 au 31 janvier à l’Opéra de Toulon


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Tamer, le père et la fille Retour sur les concerts de Tamer Abu Ghazaleh et du duo Pradal, au Revivre des Suds, à Arles

E

n attendant Les Suds, en hiver, nouvel événement annoncé pour 2018, le festival de musiques du monde d’Arles a innové pour son Revivre, en étalant sa programmation sur trois jours et trois villes. Invité en juillet 2014 pour son premier concert en France, Tamer Abu Ghazaleh avait conquis le public arlésien au cours d’un « Moment précieux » détonnant. Cette fois sur la scène du Cargo de nuit, le oudiste multi-instrumentiste a confirmé qu’il était un des talents les plus inventifs de la nouvelle scène arabe. Né en exil au Caire, le musicien palestinien allie musique d’avant-garde, textes poétiques et piques politiques. Comme le sort de son peuple, son jeu est violent, sa voix sur le fil du rasoir, pinçant ses cordes avec accélération, provoquant des silences comme des trêves inattendues. Enragée, puissante, frénétique et lumineuse, la musique de cet auteur-compositeur-interprète fusionne avec sa voix rugueuse, qui ne peut que renvoyer aux aspérités de l’histoire du Proche-Orient. Accompagné aux piano, basse et batterie,

Tamer Abu Ghazaleh livre une prestation cinglante, humour compris. De la musique arabe au flamenco, il n’y a souvent qu’un pas, ou plus exactement plusieurs dizaines d’encablures, au fil du Rhône. Dans ce qui est considéré comme la forteresse médiévale du XVe siècle la mieux conservée de France, le château de Tarascon, le Centre d’art René d’Anjou a mis sa Salle des festins et son tout Paloma et Vicente Pradal © Florent Gardin - Les Suds, Arles nouveau tapis conçu par Christian Lacroix, aux couleurs de du chant hispanique, parfois antérieure au l’Andalousie. Paloma et Vicente Pradal, la flamenco lui-même : des compositions de fille cantaora et le père guitariste ont offert un Vicente sur des poèmes de grands auteurs récital d’une poignante finesse. C’est d’abord dont Federico Garcia Lorca, inclassable et dans un registre de cante jondo -le plus primitif intemporel. THOMAS DALICANTE du flamenco- que l’interprète a pu révéler l’amplitude de son timbre vocal, pur, profond et tout en nuance. Chants d’amours intenses et alegrias plus festives ont laissé place à un Le Revivre des Suds s’est déroulé les 3, répertoire plus personnel mais qui repose 4 et 5 février à Saint-Martin-de-Crau, également sur une pratique traditionnelle Arles et Tarascon

Fine

T

rois compositeurs successifs pour cette matinée musicale du dernier dimanche de janvier à la Chapelle du Méjan d’Arles, avec une formation, le Quatuor Fine Arts, qui s’étoffe en évoluant du duo (Beethoven, Sonate n°7 op 30) avec Pierre Fouchenneret (violon) et Romain Descharmes (piano) au Sextuor (Ernest Chausson, Concert en ré majeur), en passant par le quatuor (l’intemporel Fine Art fondé en… 1946) dans Ravel. On ne se lasse pas de ce dernier déjà centenaire malgré les réserves du maître Fauré : « Au nom des dieux de la musique et au mien, ne touchez à rien de ce que vous avez écrit de votre quatuor » dira Debussy… avant la rupture définitive entre les deux enfants terribles qui se suivaient à la trace dans les histoires d’eau et les espagnolades, si ce n’est leur quatuor respectif. Tout le long de l’œuvre, nous serons paresseusement bercés par la récurrence motivique déclinée sur le

Fine Arts Quartet © X-D.R.

modèle franckiste et dans des modes de jeux et d’écriture variés. Beethoven avait introduit une matinée classique sous le tact et le bon goût de nos deux premiers interprètes, c’est dans Chausson que notre petit monde réuni au complet se libérera pour révéler un talent malheureusement écourté par une stupide et mortelle

chute de bicyclette. Une œuvre propice à développer des épanchements lyriques et des accents libérateurs au sein de motifs cycliques déjà éprouvés précédemment sur un ton néanmoins plus romantique. Le public, intarissable n’en démordra pas et exigera un bis nous gratifiant de la répétition du mouvement de Sicilienne. Fine… PIERRE-ALAIN HOYET

Ce concert a été donné le 29 janvier à la chapelle du Méjan, à Arles


44 au programme musiques bouches-du-rhône

Nicolas Courjal

Nino Rota, Vladimir Cosma, Ennio Morricone, Jean-Claude Petit, Michel Legrand… que de grands musiciens dont l’œuvre a connu des détours par le cinéma. Combien de films nous sont restés en mémoire grâce à leurs musiques ? L’originalité du programme qui leur est consacré à la Criée tient à la présence de la mandoline, jouée ici avec virtuosité par Vincent Beer Demander et les solistes de l’Académie de Mandoline de Marseille, accompagnée par le Quintet à Cordes de l’opéra de Marseille et la soprano Lucile Pessey.

L’Ouverture du Corsaire de Berlioz et la Symphonie n°3 en mi bémol op.97, dite « Rhénane » de Robert Schumann offriront une riche palette à l’Orchestre Philharmonique de Marseille. Mais aussi une œuvre contemporaine, Concerto pour violon et orchestre de Bruno Mantovani, compositeur qui accumule les prix et distinctions -de la Sacem à l’Académie Charles Cros, en passant par le prix Claudio Abbado de la Philharmonie de Berlin ou la Victoire de la Musique du « compositeur de l’année » (2009) ; il sera lui-même à la baguette et Da-Min Kim au violon soliste.

Le piano délicat d’Antoine Palloc, Clair de lune, Les Berceaux, l’Automne, de Fauré, temps suspendus… Glissez là-dessus la voix de basse de Nicolas Courjal, large, puissante, sensible et s’incarnent sur scène les personnages de Verdi (Simon Boccanegra, I Vespri siciliani), de Mozart (Don Giovanni)… Complétez avec des extraits de Tchaïkovski, Berlioz, Francesco Paolo Tosti et votre bonheur sera complet ! 11 mars Opéra de Marseille 04 91 55 11 10 opera.marseille.fr

28 février La Criée, Marseille theatre-lacriee.com

Café Zimmermann

Tsar de Russie de 1598 à 1605, Boris Fiodorovitch Godounov inspira à Pouchkine une tragédie, qui n’est pas sans évoquer Macbeth, transformant « un peu » l’histoire et faisant de l’empereur l’assassin du fils d’Ivan le Terrible pour accéder au trône. S’emparant à son tour du sujet, Modeste Moussorgski compose un opéra en sept tableaux dans lequel fleurissent les thèmes de la musique populaire russe. Alexey Tikhomirov interprètera le rôletitre sous la direction de Paolo Arrivabeni. 14 au 21 février Opéra de Marseille 04 91 55 11 10 opera.marseille.fr

Da-Min Kim © X-D.R.

Marie-Ange Todorovitch © Carole Parodi

Boris Godounov

10 mars Opéra de Marseille 04 91 55 11 10 opera.marseille.fr

Princesse Czardas Certes, « l’amour est bête », mais avec un brio tel qu’il lui sera beaucoup pardonné ! L’intrigue de Princesse Czardas est rocambolesque à souhait, échafaude plans et stratagèmes multiples pour perdre ou seconder les protagonistes. Il est question de mésalliances, de Princes amoureux de chanteuses, de mariages, de promesses, d’honneur… Tout finit au mieux, et « les hirondelles bâtissent leur nid » finalement, dans cette opérette en trois actes d’Emmerich Kalman, sous la houlette de Bruno Membrey. 4 mars L’Odéon, Marseille 04 96 12 52 70 odeon.marseille.fr

© JB Millot

04 91 54 70 54

Concert Orchestre philharmonique

© Neil Gillespie

Vincent Beer-Demander © X-D.R.

Cinéma mandolino

En résidence depuis 2011 au GTP, Café Zimmermann ne cesse de nous enchanter avec une justesse d’interprétation tout aussi subtile qu’enlevée. Le baroque, répertoire de prédilection, offre ses richesses, depuis les compositeurs les plus connus, à ceux que l’on a oubliés. Aux côtés des clavecins d’Andreas Staier et Céline Frisch, ce bel ensemble visitera la famille Bach, Johann Sebastian bien sûr, mais aussi deux de ses fils, le sensible Carl Philipp Emanuel et le virtuose Wilhelm Friedemann. 2 mars GTP, Aix-en-Provence 08 2013 2013 lestheatres.net


au programme musiques bouches-du-rhône alpes var vaucluse gard

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Noémie Boutin

Prenez deux quatuors talentueux, qui conjuguent vivacité et subtile légèreté, faites-les se rencontrer et vous obtiendrez un octuor d’exception. Ainsi, le Quatuor Talich et le Quatuor Akilone (lauréat du Concours international de quatuors à cordes de Bordeaux 2016), offriront un concert de choix où se croiseront des Quatuors de Mozart et de Chostakovitch avant l’interprétation de l’Octuor en mi bémol majeur op.20 de Mendelssohn. Une pépite concoctée par le Festival de Toulon.

Trio George Sand Jean-Michel Verneiges se plaît à souligner les « affinités esthétiques » entre Proust et Wagner, ce dernier étant le musicien le plus cité de la Recherche. Le Trio George Sand (Virginie Buscail, violon, Nadine Pierre, violoncelle, Anne-Lise Gastaldi, piano), accompagné de Marianne Denicourt en récitante, met en écho les mots de l’écrivain et les phrases musicales de Wagner, Debussy, Fauré, Messager, pour un Temps retrouvé.

23 février Église, Saint-Eusèbe 24 février Église, La Bâtie Neuve 25 février Église, Rabou 26 février Église de Manse, Forest Saint-Julien 06 82 81 87 42

festivaldechaillol.com

© Bernard Richebé

La Fille du régiment

12 février Le Méjan, Arles 04 90 49 56 78 lemejan.com

Une intrigue rocambolesque, improbables reconnaissances, sauvetage de jeune fille, mariage imposé et heureusement annulé, le tout sur fond de guerres napoléoniennes… L’opéra-comique en deux actes de Donizetti, sous la direction musicale de Roberto Rizzi Brignoli, pétille et offre une partition acrobatique à la soprano (Daniela Fally) et au ténor (Juan José De León) qui doit affronter « l’Everest de l’art lyrique » avec les neuf contreuts de « Ah ! mes amis, quel jour de fête ! ». 28 février au 5 mars Opéra de Toulon 04 94 93 03 76 operadetoulon.fr

04 94 92 70 78

7 mars Palais Neptune, Toulon festivalmusiquetoulon.com

Les amants magnifiques Lors du carnaval de 1670 et pour les festivités du Divertissement royal, une comédie ballet en cinq actes, Les amants magnifiques, composée par Lully et Molière, offrait le tableau d’amours princières, où la valeur octroyait finalement la meilleure noblesse et où l’on apprenait à se méfier des charlatans astrologues. Cette pièce, baroque à souhait dans ses thèmes, n’a jamais été reprise intégralement depuis. Beau pari tenu avec brio par l’Opéra Grand Avignon sous la houlette d’Hervé Niquet.

Lucie Roche © A. Régis

La grande violoncelliste Noémie Boutin vient présenter quatre récitals en solo autour des Suites pour violoncelle seul (n°1 & 2 ou 3 en alternance) de Benjamin Britten et des Suites de Jean-Sébastien Bach (n°1 & 3) qui ont inspiré le compositeur anglais. Clin d’œil à la création contemporaine, deux pièces de Lior Navok (Nono Cello Emoi) et de Jean-François Vrod (Élégie) ajouteront leurs fulgurances à ces programmes d’une vibrante poésie.

2, 16 & 30 mars Salle Robert Hossein, Grans 04 90 42 74 76 musiquealaferme.com

Akilone © Damien Richard

Quatuors Talich et Akilone

Trois concerts, trois voyages par la grâce de grands interprètes. Le 2, et pour la première fois dans le cadre d’Un piano à Grans, un concert à quatre mains (Célimène Daudet et Jérémie Honnoré) offrira parmi les plus belles pages romantiques dédiées à cet instrument, de Schubert à Grieg (et son Peer Gynt) en passant par Rachmaninov. Le 16, Aline Piboule s’inscrira dans le sillage de Chopin avec Séverac, Debussy et Dutilleux. Enfin, le 30, Simon Ghraichy nous entraîne à la suite de Liszt et les Amériques : l’on entendra Liszt, Lecuona, Granados, Debussy, De Falla, Guarnieri, Marquez… et tout cela avec seulement 88 touches, gratuitement !

© Hélène Bozzi

Un piano à Grans

19 & 21 février Opéra Grand Avignon 04 90 14 26 40 operagrandavignon.fr


46 au programme musiques vaucluse gard

hérault alpes-maritimes

Back to BACH

Tosca

Vous connaissez sans aucun doute les sonates de Jean-Sébastien Bach pour flûte et clavier. Si l’on substitue souvent dans les interprétations contemporaines le piano au clavecin, la flûte ne connaît guère de variantes. L’originalité de Jean-Louis Beaumadier est de jouer ces œuvres au piccolo, avec la complicité du piano de Véronique Poltz. Un retour vers Bach respectueux de d’esprit initial dans une étonnante modernité !

Armida

9 mars Temple Saint-Martial, Avignon 12 mars Temple de l’Oratoire, Nîmes

© Opera 2001

L’opéra de Rossini, tiré de La Jérusalem délivrée du Tasse, offre l’un des rôles les plus difficiles du Bel Canto au personnage titre, Armida (la soprano Karine Deshayes). Sorcière, elle vole leur force vitale à tous ceux qui tombent amoureux d’elle. Mais la voilà amoureuse elle-même (et d’un sentiment réciproque) de son ennemi, le chevalier Rinaldo (Enea Scala). Une mécanique infernale est en route, sous la direction de Michele Gamba dans une mise en scène de Mariame Clément.

Karine Deshayes © Aymeric Giraudel

piccolo-beaumadier.com

L’ombre de Venceslao

26 février au 5 mars Opéra de Montpellier 04 67 60 19 99 opera-orchestre-montpellier.fr

Elle l’aime, il est jeune égoïste, il la rejette, tue en duel son meilleur ami. Quelques années plus tard, la belle Tatiana est mariée ; il la courtise alors, elle le rejette, fidèle à ses engagements d’épouse et malgré l’amour qu’elle lui porte encore ; il part, désespéré. Eugène Onéguine, symbole d’une époque finissante, roman en vers de Pouchkine, opéra sublime de Tchaïkovski, sera dirigé par Daniel Kawka dans une mise en scène d’Alain Garichot. 15 au 21 février Opéra de Nice 04 92 17 40 79 opera-nice.org

Les quatre violons

© X-D.R

Ziad Nehme © Rana Massaad

10 & 12 mars Opéra Grand Avignon 04 90 14 26 40 operagrandavignon.fr

Irrésistible, inventif, malicieux, les qualificatifs laudatifs pleuvent sur ce concert qui conjugue les sonorités de la flûte, du hautbois, de la clarinette, du cor et du basson. Considéré par le Washington Times comme le « meilleur quintette à bois français », le Concert Impromptu décline les musiques de Bach, de la Belle Époque ou de Franck Zappa avec un talent jubilatoire. Les lumières de Paris s’illumineront avec Berlioz, Debussy, Bizet, Ravel et Rameau.

3 mars Le Cratère, Alès 04 66 52 52 64 lecratere.fr

12 mars Théâtre Molière, Sète 04 67 74 66 97 theatredesete.com

Eugène Onéguine

Le concert impromptu

Le livret d’opéra de Jorge Lavelli, d’après une pièce de Copi, nous entraîne dans monde déglingué où la mort inévitable ne rend pas plus nobles les personnages misérables et minables qui la subissent. Violence, humour amers s’emballent dans un rythme échevelé, dans la mise en scène inventive de Lavelli, sous la direction inspirée d’Ernest Martinez Izquierdo. Les interprètes sont exceptionnels dans l’enchaînement époustouflant des séquences.

L’opéra en trois actes de Puccini, sur un livret de Giacosa et Illica d’après la pièce de Victorien Sardou, sait mettre en scène les passions les plus exacerbées… Complots, trahisons, évasions, perfidie, portent leurs ombres sanglantes. La belle Tosca, aveuglée par la jalousie, tombera dans le piège du sombre Scarpia, chef de la police secrète. Tout s’achève tragiquement au Castel San Angelo de Rome, sous la direction musicale de Martin Mázik dans une mise en scène de Roberta Mattelli.

Quatre virtuoses pour une découverte du violon brillante, légère, érudite, sans jamais être pontifiante ! Min Suck Huh, Fumika Konishi, Marie Fraschini, Mateusz Dutka apportent l’élégance et la finesse de leurs interprétations à des œuvres aussi variées que le Concerto pour quatre violons en sol majeur TWV40 :201 de Telemann, Moz-Art pour deux violons de Schnittke, le Quatuor pour quatre violons op.107 de Lachner, la Sonate pour deux violons en do majeur op.56 de Prokofiev ou le Quatuor pour quatre violons de Bacewicz… 7 mars Théâtre Alexandre III, Cannes 04 92 98 62 77 palaisdesfestivals.com


au programme musiques

bouches-du-rhône

hérault

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Le voyage de Mehmet

Erik Truffaz quartet

Donner à entendre Les Sonnets de Shakespeare comme s’il était un de nos contemporains, en chansons et en musique qui plus est, c’est ce que proposent, avec une énergie débordante et généreuse, la comédienne Norah Krief et les trois musiciens (Frédéric Fresson au piano, Philippe Floris à la batterie et aux percussions et Philippe Thibault à la basse) qui l’accompagnent sur scène. Richard Brunel met en scène ce minicabaret qui fait résonner sur des rythmes de rock, de jazz ou de blues ces vers qui défient les âges.

Fidèle à une tradition établie depuis de nombreux albums, le quartet a ajouté de nouvelles sonorités à ce tout nouvel opus, Doni Doni : il s’ouvre à l’Afrique en invitant la chanteuse malienne Rokia Traoré qui posera son timbre doux et chaud sur trois chansons, et Oxmo Puccino pour un titre. Une fois encore, les quatre musiciens réinventent les codes du jazz en alliant le son, le sens et les sensations.

9 & 10 mars Théâtre Joliette-Minoterie, Marseille 04 91 90 07 94 theatrejoliette.fr

© Hamza Djenat

3 mars Les Salins, Martigues 04 42 49 02 00 les-salins.net

8 mars Cité de la musique, Marseille 04 91 39 28 28 citemusique-marseille.com

Big Ukulélé Syndicate

Lo Cor de la Plana

Maria Simoglou

© X-D.R

© Augustin Le Gall

La chanteuse grecque, qui vit à Marseille, chante le rébétiko (musique populaire des quartiers déshérités des grandes villes de Grèce) de Smyrne (rebaptisée Izmir), puisant ses chansons dans un répertoire –dans de nouveaux arrangements plus contemporains- dont les thématiques naviguent entre poésie amoureuse orientale et protestation sociale. Avec Stefanos Dorbarakis au qanun (cithare), Stratis Psaradelis à la lyra, Periklis Papapetropoulos au lafta et au saz (luths), Harris Lambrakis (à la flûte ney) et Kostas Meretakis (aux percussions).

3 mars Cité de la musique, Marseille 04 91 39 28 28 citemusique-marseille.com

À la manière des contes soufis, l’histoire de Mehmet, jeune musicien plein de rêves et d’ambitions se développe au fil des rencontres qu’il va faire à la recherche de l’inspiration… Sur la mythique route de la soie, de la Perse aux Indes en passant par l’Empire Afghan, le garçon apprendra à devenir un artiste et un homme accompli. La chanteuse et danseuse Maria Robin est accompagnée de Shadi Fathi, soliste classique iranienne qui excelle autant dans les instruments à cordes que dans les percussions.

Après une résidence de création à la Cité de la musique, Lo Cor de la Plana y présente sa nouvelle création, Tafòri, vacarme qui fait entendre leur ville, Marseille, et « la vision qu’elle peut offrir du monde qui l’entoure comme de celui qui la peuple ». « Un tourbillon qui jette dans [ses] rues les migrants de toutes les mers et les espoirs les plus tenaces, ceux que même la misère ne parvient pas à étouffer. » Les voix s’allient à des percussions corporelles (mains, pieds, cœurs) pour faire surgir la poésie, la fantaisie de cette ville, ses débordements et sa lutte contre l’uniformisation. 10 mars Cité de la musique, Marseille 04 91 39 28 28 citemusique-marseille.com

Ambiance survoltée assurée avec ce groupe hors norme de dix musiciens, et deux chanteurs, qui réarrangent de façon surprenante et déjantée de grands standards de la pop et du rock, de Nirvana à Police, en passant par The Cure… avec dix ukulélés ! Ce syndicat-là est à n’en pas douter celui de la gaieté et de la bonne humeur !

© G. Coulon-Tendance Floue

© Jean-Louis Fernandez

© X-D.R

Les Sonnets de Shakespeare

14 février Domaine d’O, Montpellier 0800 200 165 domaine-do-34.eu


48 au programme spectacles bouches-du-rhône var

Mon fric

Énée

Le flouze, les pépettes, la caillasse... le fric, quoi ! Ce qui, dit-on, est le nerf de la guerre, constitue le thème unique de cette pièce créée à l’automne dernier. Un héros auquel on s’identifie très vite, Moi, raconte sa vie sous l’angle de son rapport à l’argent. Une existence qui court de 1972 à 2040, et voit se déployer un libéralisme économique toujours plus puissant. La mise en scène de Cécile Backès, sur un texte de David Lescot, aborde avec humour la grande question de notre temps, à travers une série de saynètes et de personnages hauts en couleurs. Tout public à partir de 12 ans. 2 au 4 mars La Criée, Marseille theatre-la-criee.com

Les guerriers Massaï

© P.Geslin

04 91 54 70 54

Après les Inuits et les Soussous, l’ethnologue Philippe Geslin se focalise, dans le troisième volet de son triptyque Les Âmes Offensées, sur les guerriers Massaï. Ce peuple qui vit « en Tanzanie, entre le Rift et le Kilimandjaro, au cœur de la savane », et qui lui « donne le sentiment de renouer le fil avec les origines. Celles d’une humanité rêvée ». Un spectacle mis en scène par Macha Makeïeff, à la confluence entre approche scientifique et théâtre de l’ailleurs. Le 4 mars, Philippe Geslin fera visiter les collections du MuCEM ; pour les parisiens, une intégrale du triptyque aura lieu au Musée du Quai Branly le 11 mars.

04 91 54 70 54

3, 7 & 8 mars La Criée, Marseille theatre-la-criee.com

Chant II de l’Énéide : le cheval de Troie est dans la place, la ville saccagée par les Grecs. Énée s’enfuit avec quelques compagnons, portant son père Anchise, trop vieux et malade pour marcher. Voilà des réfugiés errant en Méditerranée qui ont eu un écho prestigieux à travers les siècles ! Miloud Khétib reprend le récit mythique là où il l’avait laissé en 2014 et réunit les Chants I et II de l’œuvre de Virgile. Seul en scène, avec toutefois une souffleuse, Sofy Jordan, comme pour souligner la vulnérabilité du récitant... et celle de tous les êtres humains. 23 février au 4 mars Les Bernardines, Marseille 08 2013 2013 lestheatres.net

© Jean-Claude Fraicher

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Irina Brook met en scène un brûlot dans la veine du film Erin Brockovich : une femme seule contre l’immense pouvoir des multinationales. Sauf que l’histoire, basée sur des éléments réels, se passe en Afrique du sud, où l’on accapare les terres des paysans, et qu’elle est signée Stefano Massini, l’un des dramaturges italiens contemporains les plus prometteurs, connu pour son engagement politique et la férocité de son regard sur les sujets d’actualité.

Miloud Khetib © Pit Goedert

© Thomas Faverjon

Terre noire

9 au 11 mars La Criée, Marseille theatre-la-criee.com

17 mars Théâtre La Colonne, Miramas 04 90 50 66 21 scenesetcines.fr

L’envol des cigognes Dans cette création 2017, « tragi-comédie de quartier », Simon Abkarian complète sa trilogie sur les femmes en Méditerranée, après Pénélope ô Pénélope et Le dernier jour du jeûne. L’histoire se déroule en pleine guerre civile, alors que la vie continue entre les assauts, et même sous les bombardements. En un temps et un lieu où seuls les bras des mères, dérisoirement fragiles, et symboliquement si forts, protègent les enfants. La Trilogie est éditée chez Actes Sud - papiers. 28 février au 4 mars Le Gymnase, Marseille 08 2013 2013 lestheatres.net

15 et 16 mars Théâtre Liberté, Toulon 04 98 00 56 76 theatre-liberte.fr

Braises Premier volet d’un triptyque consacré à l’enfermement, Braises évoque la difficulté pour les adolescentes françaises musulmanes de vivre la liberté amoureuse et sexuelle des autres filles de leur âge, lorsqu’elles sont nées au sein d’une famille traditionnelle. Philippe Boronad met en scène un texte de Catherine Verlaguet, sans éluder les problématiques, complexes, souvent instrumentalisées par le pouvoir, de l’appartenance et des aspérités culturelles. Voir critique sur journalzibeline.fr. 28 février & 1er mars Théâtre Joliette-Minoterie, Marseille 04 91 90 74 28 theatrejoliette.fr 3 mars Le Sémaphore, Port-de-Bouc 04 42 06 39 09 theatresemaphore-portdebouc.com


Un jour, les 6 technocrates chargés de « fixer » tous les problèmes de l’institution européenne partent sur le terrain. ils tombent en panne. en panne d’europe.

du vendredi 3 au dimanche 5 mars

Les Soliloques de Mariette

© Léo Danais

Anne Danais, seule en scène, soliloque. Son personnage de bonne est sorti tout droit du roman d’Albert Cohen, Belle du Seigneur, et elle raconte ce à quoi elle assiste, depuis sa cuisine, en épluchant des pommes de terre : les amours d’Ariane et Solal, comme si on y était. Elle chante aussi : des tubes des années 30, des chansons populaires. Ah, parlez-nous d’amour, Mariette, faites nous rêver !

ColleCtif le Nomade Village et teatro o baNdo

3 & 4 mars Théâtre Toursky, Marseille 0 820 300 033 toursky.fr

14+ ans

Le Tarot du Grand Tout

04 95 04 95 75

Friche la Belle de Mai 41 rue Jobin 12 rue François simon 13003 marseille

Billetterie 04 95 04 95 75 www.theatremassalia.com

© X-D.R

Après La Criée, le Théâtre Massilia accueille le conteur Lamine Diagne, qui nous invite à pénétrer dans l’hôpital de La Timone à Marseille. Un jeune musicien y accompagne son neveu, victime d’un accident de voiture ; il s’aventure dans le dédale des couloirs hospitaliers pour y glaner de fantastiques histoires (le cheval du 8e étage, l’enfant-bulle, l’étage fantôme...), et ainsi stimuler sa guérison. Un spectacle réalisé suite à une immersion dans les services de l’hôpital pour enfants, avec l’aide à la dramaturgie de François Cervantes. À partir de 7 ans. 24 & 25 février Massalia, Marseille theatremassalia.com

Master

© J.-M. Lobbe

Le rap enseigné au collège ! Enfin une réforme de l’Éducation Nationale qui enchante les élèves, parce qu’en passant par l’histoire du courant musical et de son corollaire, la danse hip-hop, on apprend bien mieux. Notamment à questionner l’Histoire avec un grand H, et les rapports d’autorité qui soustendent notre société. Sur un texte de David Lescot, avec Amine Adjina et Rodolphe Blanchet. Pour les 13 ans et plus (représentations scolaires uniquement, dans le cadre des actions éducatives du conseil départemental 13).

04 95 04 95 75

27 février au 3 mars Massalia, Marseille theatremassalia.com

\/ théâtre et arts numériques


50 au programme spectacles bouches-du-rhône vaucluse

Justine

Après La fille des plateformes, le théâtre Massalia présente un deuxième projet conçu dans le cadre du dispositif européen Platform shift+, soutenant des productions artistiques liées au numérique. Création franco-portugaise, Ceci est l’Europe est issue d’une coopération entre Le Nomade Village et le Teatro O Bando. Six technocrates y sont chargés de résoudre tous les problèmes de l’institution européenne, et bizarrement... ils échouent. Pour les 14 ans et plus.

04 95 04 95 75

Orfeo Express Son titre complet est Orfeo Express Sirènes (vénitiennes) et Midi net (baroque) : cette œuvre est présentée par Lieux Publics dans le cadre du festival Mars en baroque (lire p.22). On y entendra douze musiciens exceptionnels dans des extraits de Monteverdi, tandis que les élèves de l’École Nationale Supérieure de Danse de Marseille interpréteront une chorégraphie de David Llari. Orphée sera en bonne compagnie pour sa descente aux enfers !

© Cie Moebius

© Collectif le nomade village

Ceci est l’Europe

Elle est seule, et pourtant a besoin d’exister dans le regard des autres… Exclue, lui restent ses rêves qui s’entremêlent avec ses peurs. Pour échapper à la réalité, Justine se réfugie dans l’univers des songes… Cette histoire nourrie d’expériences vécues permet une mise en scène intelligente de la violence du quotidien, interroge sur les conditions de l’éclosion de la tragédie. La Cie Moebius signe ici une pièce forte sur la question du bouc émissaire.

1er mars Parvis de l’Opéra Lieux Publics, Marseille 04 91 03 81 28 lieuxpublics.com

Corpi ingrati

3 au 5 mars Massalia, Marseille theatremassalia.com

© Pascal Perennec

Je n’ai pas peur

Pour le 450ème anniversaire de la naissance de Monteverdi, Emio Greco et Pieter C. Scholten proposent avec Concerto Soave une création à partir des Madrigaux du musicien né en 1567 à Crémone, et considéré comme l’un des fondateurs de l’opéra. Voici les âmes des femmes ingrates ramenées sur terre par Vénus, (Ballo delle Ingrate), les plaintes de Tircis pour la belle Cloris (Ballo di Tirsi e Clori), ou les virevoltantes évolutions des Nymphes (Ballo delle Ninfe dell’Istro). Musique, chant et danse trouvent là de subtils accords.

04 95 04 95 75

© Alwin Poiana

8 mars La Garance, Cavaillon 04 90 78 64 64 lagarance.com 10 & 11 mars Massalia, Marseille theatremassalia.com

Peau d’âne

© Ronan Thenadey

Adapté d’un roman initiatique de l’écrivain italien Niccolò Ammaniti, ce spectacle aborde la question des violences mafieuses en adoptant le point de vue d’un enfant de 9 ans, Michele. Par la grâce des marionnettes créées par Daniel Calvo Funes, cette histoire à l’humour grinçant permet d’aborder sans traumatisme des questions cruciales pour tout adulte en devenir, sur « le fondement et la portée de nos actes ». Dès 10 ans.

1er & 2 mars Théâtre de Fontblanche, Vitrolles 04 42 02 46 50 vitrolles13.fr

9 au 12 mars Ballet National de Marseille 04 91 32 72 72 ballet-de-marseille.com

Robe couleur du temps, de la lune, du soleil… gages d’amour du roi pour sa fille, jusqu’à la peau de l’âne qui dispensait force écus d’or au royaume. La fuite de la jeune fille, son déguisement la protègent… et son habileté lui fera rencontrer un Prince. Charmant évidemment ! Jean-Michel Rabeux adapte le conte de Charles Perrault, jongle entre passé et présent avec une jubilation que partage le public. À voir en famille ! 10 mars Salle Guy Obino, Vitrolles 04 42 02 46 50 vitrolles13.fr


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Goupil

Sunny

Prix du jury 2015 du Festival Au bonheur des mômes du Grand Bornand, (catégorie Coup de pouce), le spectacle de la Cie Content Pour Peu (CCPP) est accessible à tous les publics, jouant entre l’univers du cinéma muet et le cirque. Corde volante, fil, portés acrobatiques sont de rigueur dans un monde où poésie, ironie et surprise se conjuguent avec tendresse.

Composition pour dix danseurs, la nouvelle création du chorégraphe Emanuel Gat continue d’inventer de nouvelles règles du jeu. Chaque interprète apporte son discours, et chacun est à l’écoute de l’autre. À cette danse nimbée de lumières créées par le chorégraphe lui-même, s’ajoute la présence de l’ancien danseur et nouvelle étoile de la scène électronique, le musicien-compositeur Awir Leon qui se livrera à une performance live.

© Sylvain Caro

Entre le Zist et le Geste

3 mars Théâtre Comoedia, Aubagne 04 42 18 19 88 aubagne.fr

© X-DR

© X-DR

Le grand classique médiéval qu’est le Roman de Renart (avec un t !) n’a pas perdu une ride. Les Compagnons de Pierre Ménard nous entraînent à la suite de Goupil, rusé et facétieux, dans les multiples épisodes au cours desquels il ridiculise Ysengrin, le loup. Musique, paroles, langue des signes se conjuguent avec brio dans la réécriture vive et emplie d’humour de Nicolas Fagart.

14 février Théâtre Comoedia, Aubagne 04 42 18 19 88 aubagne.fr

9 & 10 mars GTP, Aix-en-Provence 08 2013 2013 lestheatres.net

Les vagabondes Jules et Marcel

STIL

28 février Théâtre Comoedia, Aubagne 04 42 18 19 88 aubagne.fr

Le texte d’Alain Béhar, objet d’un Rebonds la saison dernière, de résidences, dont celle au 3bisf, est enfin donné en un spectacle accompli ! L’ouvrage est irrigué par l’amour des mots, des raisonnements par l’absurde, des analyses des formules consensuelles que l’on impose. Chercheurs d’art, société de projet, mort vaincue vers 2043 (quel rendez-vous !) se mêlent à une végétation qui envahit progressivement le plateau, tandis que des créations virtuelles (Jesshuan Diné) s’immiscent dans le discours. Une forme artistique singulière à découvrir ! 7 & 8 mars Le Bois de l’Aune, Aix-en-Provence 04 88 71 74 80 boisdelaune.fr

Le Jugendstil, pendant de « l’art nouveau » à la fin du XIXème siècle en Allemagne, art de la jeunesse, apporte une révolution dans les principes esthétiques. Avec S T I L, le chorégraphe Christian Ubl s’interroge sur les représentations du corps, la censure, le goût… Six danseurs et deux musiciens au plateau effectuent cette traversée poétique qui pose la question des frontières et des limites de l’esthétique en un aller et retour fascinant entre aujourd’hui et 1897. Un étonnant exercice de liberté.

© Fabienne Gras

© Nicolas Pagnol

© Françoise Galeron

Deux prénoms, immédiatement décryptés dans la ville d’Aubagne… Jules, Raimu et Marcel, Pagnol… Un fil conducteur, le cinéma bien sûr. On suit les deux personnages à travers leurs conversations, naissance d’une amitié essentielle, scandée par des moments de fâcherie, de mauvaise foi et d’admiration sincère. Le petit-fils de Marcel, Nicolas Pagnol, met en scène ce spectacle écrit par Pierre Tré-Hardy. Attachante profondeur d’un héritage artistique et humain, avec la Cie Dans la Cour des Grands.

3 & 4 mars Pavillon Noir, Aix-en-Provence 04 42 93 48 14 preljocaj.org


52 au programme spectacles bouches-du-rhône

Ballhaus

Opus 14

Le théâtre Vitez affirme sa place exceptionnelle de lieu inséré dans les locaux de la faculté de Lettres en offrant ses murs aux étudiants. Ceux de la section théâtre de l’AMU, sous la houlette de Carole Errante proposeront Ballhaus, expérience théâtrale et dansée, qui s’interroge sur les rapports hommes/ femmes. Un éternel recommencement qui hante toutes les formes d’art. Les codes sociaux, les conventions esthétiques quant aux corps et aux genres sont questionnés dans la mise en miroir qu’est la scène de théâtre.

Quelle joie de retrouver dans le théâtre du 3bisf qui en a connu quelques prémices, la création de Christian Mazzuchini, Dingo dingue. Entre les textes des poètes Michel Bellier et Tarkos, ceux des psychanalystes Lacan, Bonnafé, Oury et Tosquelles, l’acteur, grimé en Indien des Amériques, joue de l’enfance, de la folie, la seule capable de parler raison ? Un spectacle vivifiant, intelligent et jubilatoire. La première représentation sera suivie d’une « Tchatchade/déconniatrie » en présence de Jacques Tosquelles. À ne pas manquer !

© Michel Cavalca

© Caroline Victor

Dingo dingue

L’un des porte-paroles de la danse hip hop, le chorégraphe Kader Attou, nous éblouit dans sa nouvelle création avec une réflexion sur le groupe, ou comment en sortir, comment le consolider, comment y exister. Le hip hop est une expression qui se définit à la fois par une exacerbation des personnalités et la quête d’appartenance. Démonstration par le mouvement de 16 danseurs sur le son électro de Régis Baillet.

28 février au 4 mars Théâtre Antoine Vitez, Aix-en-Provence 04 13 55 35 76 theatre-vitez.com

14 & 16 février Les Salins, Martigues 04 42 49 02 00 les-salins.net

© Christophe Raynaud de Lage

© Richard Patatut

Ogres

Multipliant les points de vue, victime, agresseurs, parents, témoins, policiers, enquêteurs, Yann Verburgh narre l’horreur, l’enfer, vécu par Benjamin, torturé et laissé pour mort dans un bois de Normandie. Il évoque en écho les autres tragiques manifestations de l’homophobie de par le monde. La cruauté face à l’amour, dans une mise en scène d’Eugen Jebeleanu. Ce spectacle, choisi par les ATP au niveau national, est joué dans toute la France. Il sera suivi d’une rencontre : « L’esprit du théâtre ».

10 & 11 mars 3bisf, Aix-en-Provence 04 42 16 17 75 3bisf.com

Emprise Difficile d’évoquer un des spectacles les plus étonnants qui soient... Viktor Vincent est un mentaliste, et sans doute l’un des plus doués de sa génération. À ceux qui déjà sourient, sceptiques, pensant évidemment à un canular, est aussi destiné ce show bluffant. À quel point sommes-nous crédules, influençables ? Quelles sont les limites entre l’illusion et la psychologie ? La magie se dessine dans cet entre-deux, nous conduisant aux portes du mystère, du fantastique. Une manière exceptionnelle d’interroger notre perception de la réalité.

1er mars Théâtre des Ateliers, Aix-en-Provence 04 42 26 83 98 atp-aix.net 04 42 87 75 00

1er mars Espace NoVa, Velaux espacenova-velaux.com

Collection secrète #3 Troisième des rencontres secrètes initiées par Frank Micheletti et la Cie Kubilaï Khan, celle-ci annoncera peut-être le printemps, à découvrir sur le vaste territoire martégal, qui sait ? Entre fête et promenade, avec de la danse et des performances, laissez-vous tenter par le mystère, en vous inscrivant auprès de la billetterie du théâtre pour recevoir par email ou texto le lieu du rendez-vous 4 mars Les Salins, Martigues 04 42 49 02 00 les-salins.net


au programme spectacles

bouches-du-rhône hérault

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Animal

Un coquelicot crie dans l’orge bleue

C’est bon, alors j’irai en enfer © Pascal Holtzer

Prendre le temps de rêver, de contempler, de s’émerveiller des sons, des couleurs et des mouvements que nous offre la nature, c’est ce que propose Jean-Claude Oleksial et Catherine Morvan (Cie Les Bruits de la lanterne) aux tout-petits dès 18 mois. Avec des jeux d’ombres, de lumières colorées, et des improvisations musicales et vocales qui enveloppent les mots ciselés du poète Jean Grosjean.

Ultime création de la Cie Flash Marionnettes, Animal est une fable grinçante sur l’extinction massive des espèces, due à notre humanité autodestructrice. Ce cri d’alarme écologique est mené tambour battant avec un humour rageur qui fait s’alterner inquiétude et indignation. Dinosaures, éléphants, écureuils, poissons, oiseaux ou encore singes en sont les héros, superbe faune marionnettique à qui Michel Klein et Vincent Eloy donnent vie.

4 mars Les Salins, Martigues 04 42 49 02 00 les-salins.net

24 février Le Sémaphore, Port-de-Bouc 04 42 06 39 09 theatre-semaphore-portdebouc.com

Babel (Words)

© X-D.R

Partant du mythe de la tour de Babel, Sidi Larbi Cherkaoui et Damien Jalet se joignent au plasticien anglais Antony Gormley pour explorer, avec humour et humanité, le langage, l’identité et la religion. Dans le décor imposant d’une ville futuriste, treize danseurs déclinent les langues, les cultures, les croyances, les passions individuelles et collectives, accompagnés par cinq musiciens qui jouent en direct sur la scène.

Le journal de Lulu

04 42 10 23 60

Comment voyager lorsqu’on a en terre deux pieds fictifs qui nous empêchent de bouger ? Lulu, épouvantail de son état, va narrer sa vie, ses impressions, et faire part de ses états d’âme, planté qu’il est dans un champ aux vastes perspectives. Simona Acerbi, à la fois peintre et conteuse, met en scène et en univers sonore le livre éponyme d’Éric Rolland Bellagamba (édition Grandir). Sur des airs de tango, les mots susurrés se faufilent sur une danse d’improvisation fascinante, et viennent compléter un imaginaire visuel fourmillant de possibilités, d’horizons.

04 42 10 23 60

1er mars Forum de Berre forumdeberre.com

De la mise en scène aux costumes, en passant par les décors, Macha Makeïeff revisite intégralement la pièce violemment phallocrate de Molière en posant d’emblée la question de la transgression, de classe et de nature, et en déjouant par le rire le désordre de nos représentations genrées ! Ce vent de folie est porté par des comédiens drôles et gouailleurs qui imposent formidablement le rythme de la comédie.

© Brigitte Enguerand

© Laurent Moulin

23 & 24 mars Scène nationale de Sète 04 67 74 66 97 theatredesete.com

3 mars Forum de Berre forumdeberre.com

Trissotin ou les femmes savantes

© Koen Broos

7 mars Les Salins, Martigues 04 42 49 02 00 les-salins.net

Menacé par son ivrogne de père qui tente de le récupérer après l’avoir abandonné, Huckleberry Finn s’enfuit avec Jim, un esclave noir, faisant croire qu’il a été assassiné. Traversant mille aventures, les deux compères tentent de rejoindre le nord de l’Amérique, abolitionniste… La Cie Peanuts, qui explore depuis ses débuts les mécanismes de violences et d’exclusions au travers de ses spectacles, adapte l’œuvre de Mark Twain en s’interrogeant notamment « sur la banalité des mécanismes de ségrégation ».

3 mars La Colonne, Miramas 04 90 50 66 21 scenesetcines.fr


54 au programme spectacles bouches-du-rhône vaucluse

Les Sea Girls – La revue

Portrait fantôme

Pour leur troisième spectacle, les Sea Girls ont enfin réalisé leur rêve : créer une Revue, dans la grande tradition du Cabaret, avec plumes, paillettes, robes fendues, numéros de magie et escaliers dont les marches clignotent ! La mise en scène de Philippe Nicolle, de la Cie 26 000 couverts, renforce le côté humoristique et digressif de leur spectacle. C’est ainsi que ce quatuor de charme chante et joue l’absurde et le sordide avec légèreté !

04 42 56 48 48

Le danseur et chorégraphe Mickaël Phelippeau ne cesse d’interroger l’altérité et de la mettre en mouvement. Pour la performance éphémère qu’il crée au Théâtre d’Arles, il a passé quelques jours dans des appartements dont les occupants sont absents, sans les connaître ni les avoir préalablement rencontrés, pour en restituer des portraits chorégraphiés lors d’une danse troublante et délicate à découvrir au cours d’une déambulation à travers la ville.

2 mars L’Olivier, Istres scenesetcines.fr

Ce que le djazz fait à ma djambe Comédien inclassable, Jacques Gamblin dit ici son amour pour la musique en général, et pour le jazz en particulier. Il entoure ses textes qu’il parle-rythme-scande – c’est son instrument à lui, les mots - de la musique composée par Laurent de Wilde (au piano) avec saxo, contrebasse, batterie, trompette et un DJ aux platines. « C’est physique, organique, pulsionnel et ça improvise entre les lignes » !

4 mars Théâtre de Fos scenesetcines.fr

Anywhere

© Alain Rico

#Hashtag

04 90 52 51 51

3 & 4 mars Théâtre d’Arles theatre-arles.com

© Vincent Beaume

04 42 11 01 99

Comment se débarrasser d’une maîtresse lorsqu’on prévoit de se marier le jour même avec une riche héritière ? C’est tout le sel de la pièce de Georges Feydeau que met en scène Christophe Lidon, sur le tempo effréné d’une bande-son jazzy qui rendra hommage au faste du Paris des années 50, fait de music-hall et de joie de vivre débridée. Entre crise de nerf et crise de folie, portes qui claquent et gifles qui volent c’est le rire assuré !

© Mickaël Phelippeau

© Marie Vosgian

Un Fil à la patte

04 42 11 01 99

© Christian Ducasse

La Cie Pockemon Crew s’empare d’un phénomène de société très actuel, celui des réseaux sociaux, de ces échanges virtuels devenus indispensables à la vie courante pour beaucoup. Sous la direction artistique du chorégraphe Riyad Fghani, le « tag » s’illustre ici par la danse hip hop virtuose de dix Pockemon, en connexion directe avec le public. 10 mars Théâtre de Fos scenesetcines.fr 04 42 56 48 48

5 mars L’Olivier, Istres scenesetcines.fr

Dans son nouvel opus pour marionnette de glace et matières animées, Elise Vigneron adapte le mythe d’Œdipe à partir du sublime roman d’Henry Bauchau, Œdipe sur la route, un road-movie antique dans lequel le poète fait de l’exil du héros une quête initiatique au terme de laquelle il se fond littéralement dans l’art. En une succession de tableaux oniriques et troublants, le spectateur suit l’errance de cet Œdipe de glace, qui fond jusqu’à finir par s’évaporer dans les brumes…

04 90 52 51 51

8 au 10 mars Théâtre d’Arles theatre-arles.com

15 mars Centre départemental Rasteau, Le Thor 04 90 33 96 80 auditoriumjeanmoulin.com


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Le tour de la dette en 80 minutes Don Quichotte

Durant un voyage à l’étranger, deux frères découvrent qu’ils ont deux autres frères. Lors d’un face à face aussi imprévisible que foudroyant, ces quatre étrangers vont se livrer corps et âmes pour tenter de fraterniser. La pièce, fruit d’une étroite collaboration entre les chorégraphes Christian et François Ben Aïm, Ibrahim Maalouf pour la composition musicale et Guillaume Poix pour la dramaturgie, interroge ce qui conditionne notre destin et notre extravagance à le déjouer.

Après Les Misérables, Pinocchio, Le Chien des Baskerville, le Théâtre du Kronope se lance une fois de plus dans une adaptation littéraire de grande ampleur. Le duo formé par le célèbre chevalier errant, idéaliste, qui se bat contre des moulins à vent et son écuyer prosaïque qui a les pieds sur terre se transforme en quintet comique qui devient une famille gitane au complet. L’occasion pour le metteur en scène Guy Simon de mettre en exergue la communauté rejetée des roms et tziganes face à la dimension révolutionnaire de l’œuvre de Cervantès.

© Asteroids rain -Marcus Møller Bitsch

© Frédéric Dugit

Brûlent nos cœurs insoumis

21 février La Garance, Cavaillon 04 90 78 64 64 lagarance.com

10 mars Auditorium Jean Moulin, Le Thor 04 90 33 96 80 auditoriumjeanmoulin.com

Opus 1 – Blancs Premier volet (qui en comptera trois) du projet (En)quête de notre enfance basé sur « les liens secrets qui unissent l’art abstrait et le territoire de l’enfance », Opus 1 – Blancs s’intéresse au développement du regard et des perceptions. En s’inspirant des livres du designer japonais Katsumi Komagata, et plus particulièrement de First Look, la Compagnie d’À Côté convie les tout-petits à un spectacle dansé et musical, entre vertige et éblouissement.

© X-DR

Les chatouilles ou la danse de la colère

9 au 12 mars Le Chêne Noir, Avignon 04 90 86 74 87 chenenoir.fr

© Karine Letellier © Francesca Torracchi

1er au 4 mars La Garance, Cavaillon 04 90 78 64 64 lagarance.com

Christophe Alévêque le clame et le prouve depuis longtemps, « l’humour est le meilleur remède contre la peur, la culpabilité et l’ignorance ». C’est dans cet esprit qu’il entend analyser et démystifier, avec son complice d’écriture Vincent Glenn et des points de vue d’économistes réputés, les discours les plus obscurs sur les paradis fiscaux, la crise économique, l’austérité, la dette… Soirée organisée en partenariat avec le Secours Populaire français.

Dans la solitude des champs de coton

Chatouille… Un terme qui évoque rires et joie dans l’imaginaire collectif, mais qui dans le spectacle d’Andréa Bescond revêt une autre réalité. Odette a 8 ans lorsqu’elle tombe entre les mains de Gilbert, un copain de la famille. Mains « chatouilleuses » dont elle doit garder le secret. Odette s’en sortira, sauvée par la danse. À mi-chemin entre jeu et chorégraphie, A. Bescond raconte, avec beaucoup de sensibilité et d’humour parfois, son enfance salie et sa lutte pour se reconstruire.

Pour sa nouvelle mise en scène, Alain Timár s’est tourné vers l’œuvre de Bernard-Marie Koltès et en offre une lecture plurielle, faisant du dealer et du client « des archétypes [qui] nous parlent de l’humanité et de la condition humaine, [qui] parlent aussi de la société contemporaine où marchandisation, consommation et produit sont devenus les maîtres mots des échanges ». Robert Bouvier et Paul Camus seront accompagnés sur scène par la musique de Pierre-Jules Billion.

18 février Le Chêne Noir, Avignon 04 90 86 74 87 chenenoir.fr

9 au 12 mars Les Halles, Avignon theatredeshalles.com

04 90 85 02 38


56 au programme spectacles vaucluse alpes

Les enfants c’est moi

Tell me mother Après une résidence de création, Sofie Kokaj propose une répétition ouverte à tous de sa nouvelle pièce, dans laquelle elle questionne l’immigration, « l’une des racines documentaires dont le terrorisme est la conséquence ». Pour ce faire elle a notamment proposé à sa mère de travailler avec elle sur le récit de sa propre histoire d’immigration.

Ferocia La Cie Giolisu, considérée comme une des valeurs montantes de la scène chorégraphique belge, présente sa nouvelle pièce après une résidence de création aux Doms. Écrit et interprété par Lisa Da Boit, ce solo est le cri d’une femme forte qui se bat contre l’absurdité, un solo « politique, engagé, enragé [qui] dresse un tableau mobile et intense de notre monde traversé par une cruauté abyssale ».

16 février Les Doms, Avignon 04 90 14 07 99 lesdoms.be

© Fabien Debrabandere

9 mars Les Doms, Avignon 04 90 14 07 99 lesdoms.be

Barbelés

De la difficulté d’être mère. Après la naissance de son enfant, une femme se laisse submerger par son amour et plonge dans ses contradictions. Sa propre enfance refait surface et la ramène à ce temps où le petit devient grand. En somme, l’adulte et l’enfant sont bien la même personne à des âges différents. Par la Cie Tourneboulé, auteure de l’exceptionnel spectacle Le Bruit des os qui craquent, sur les enfants-soldats.

All the fun Spectacle scientifique ? Spectacle philosophique ? Ou divertissement ? Peut-être un peu les trois. La chute de l’objet est l’angoisse existentielle du jongleur. La gravitation et l’attraction terrestre sont les lois de la nature qu’il essaie sans cesse de défier. Les membres de la compagnie belge Ea Eo sont de doux dingues. Pour eux, le jonglage est plus qu’un art du cirque. C’est le socle d’un délire intense et réjouissant.

8 mars Théâtre Durance, Château-Arnoux/Saint-Auban 04 92 64 27 34 theatredurance.fr

En 2007 André Benedetto écrivait Partout dehors dedans les barbelés fleurissent, un texte sur les migrants toujours très actuel dix ans après, qui met en avant le courage nécessaire mais vital à l’exil. Charlotte Adrien, Claude Djian et Fabrice Lebert, Nouvelle Compagnie d’Avignon, le mettent collectivement en scène, tandis que Sébastien Benedetto en signe la musique.

04 90 82 20 47

4 mars Les Carmes, Avignon theatredescarmes.com

© Ben Hopper

© Franck Ronciere

04 92 52 52 52

2 & 3 mars Théâtre Durance, Château-Arnoux/Saint-Auban 04 92 64 27 34 theatredurance.fr 4 & 5 mars Pôle Jeune Public, Le Revest-les-Eaux 04 94 98 12 10 polejeunepublic.fr

14 & 15 mars La Passerelle, Gap theatre-la-passerelle.eu

Super elle La vie est un grand livre animé pour la Cie Théâtre L’articule. Dans Super Elle, le monde des super héros est abordé, ainsi que le thème difficile de la maladie. Lisa reçoit pour son anniversaire une panoplie de super héroïne, et va ainsi pouvoir faire face à la maladie de sa maman. L’immense livre pop-up, avec ses dessins dépliés en trois dimensions, devient le décor du spectacle puis espace de jeu et de circulation pour Fatna Djahra et Jacques Douplat, les deux marionnettistes qui accompagnent Lisa avec beaucoup de sensibilité.

04 92 52 52 52

28 février & 1er mars La Passerelle, Gap theatre-la-passerelle.eu


au programme spectacles alpes var

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© Roland Plenecassagne Eric Burlet

La coopérative

Retour à Berratham C’est une histoire de guerre et d’amour. La bataille sanglante est terminée. Un jeune homme est de retour dans sa ville ravagée. Où est Katja, son amoureuse ? Au cours de son errance, on découvre ce qui est arrivé pendant son absence. À partir d’un texte commandé à Laurent Mauvignier, le chorégraphe Angelin Preljocaj signe un spectacle total. Quatorze interprètes, danseurs et comédiens, forment un chœur antique et laissent les corps exprimer toute la violence que la guerre cause à ceux qui y ont survécu. Voir critique sur journalzibeline.fr

Comment faire vivre une petite entreprise ? Comment résister aux pressions d’un monde libéral toujours plus avide et cruel ? Les coopératives, ou SCOP, sont peut-être une alternative. La Cie Le Pas de l’Oiseau est allée à la rencontre de ceux qui ont opté pour ce modèle économique. Les deux comédiens, accompagnés d’un guitariste, nous plongent dans l’univers d’une SCOP. Spectacle en itinérance dans cinq communes des Hautes-Alpes, dans le cadre des Traversées.

Pulsions Pour traiter d’un sujet difficile, le harcèlement scolaire, la Compagnie de l’Echo propose une superposition de formes multiples. Mêlant théâtre, concert et performance, le spectacle aborde de front la notion de pouvoir, et toutes ses déclinaisons. Violence, domination, manipulation, pression du groupe, emprise du virtuel, tous ces comportements sont devenus omniprésents pour les adolescents d’aujourd’hui. Avec l’expression artistique pour recours, les trois interprètes tentent de bousculer ces nouveaux codes.

© Jean-Claude Carbonne

1er mars Salle René Monnet, Névache

04 92 52 52 52

4 mars La Passerelle, Gap theatre-la-passerelle.eu

2 mars Salle Le Queyron ou Cinéma Le Riou Bel, Guillestre 3 mars Foyer culturel, L’Argentière-La Bessée Théâtre du Briançonnais, Briançon 04 92 25 52 42 theatre-du-brianconnais.eu

Danbé Le fabuleux destin d’Aya Cissoko, jeune française d’origine malienne, est conté par la Cie (Mic)zzaj – prononcez «mixage» qui propose une expérience particulière de spectacle : le concert sous casque. Une immersion dans une histoire pleine de dureté et de violence, dont la digne Aya s’affranchira en se réfugiant dans la pratique de la boxe et en devenant championne du monde. Du cinéma pour l’oreille, au plus près du son, de la voix et de l’intime pour apprécier l’art radiophonique, sous la plume de Marie Desplechin.

04 92 52 52 52

7 & 8 mars La Passerelle, Gap theatre-la-passerelle.eu

In bloom Ce titre en anglais se traduit par « en floraison ». Et c’est bien de fleurs qu’il s’agit ici, plus précisément de la saison où elles éclosent. Le Sacre du Printemps, grand classique de la danse, est adapté en version hip-hop par la Cie Chute Libre. Outre cette lecture chorégraphique, le metteur en scène Pierre Bolo y adjoint une dimension tribale. L’univers est électrique et industriel, l’ambiance digne d’une rave-party. Le décalage avec l’œuvre originale est net, l’éclat de renouveau l’est tout autant. 10 mars Théâtre du Briançonnais, Briançon 04 92 25 52 42 theatre-du-brianconnais.eu

14 février Théâtre Liberté, Toulon 04 98 00 56 76 theatre-liberte.fr

Vu du pont Cette pièce d’Arthur Miller a d’étranges accents d’actualité. New York, années 50. Dans un quartier populaire près du pont de Brooklyn, un homme, Eddie Carbone, accueille par solidarité Marco et Rodolpho, deux cousins de sa femme qui sont immigrés clandestins. Après un triomphe à Londres, Ivo van Hove adapte en français cette tragédie politique et sociale. Charles Berling, qui tient le rôle principal, a été récompensé d’un Molière en 2016 pour son interprétation.

© Thierry Depagne

28 février Salle St-Paul, Villard-St-Pancrace

© X-D.R.

27 février Salle polyvalente, La Grave

du 1er au 12 mars Théâtre Liberté, Toulon 04 98 00 56 76 theatre-liberte.fr


58 au programme spectacles var

La soucoupe et le perroquet

Mon traître

Deux personnages sortis d’un épisode de la décoiffante émission Strip-tease datant de 1993, un fils cultivateur-constructeur et sa mère amoureuse d’un perroquet empaillé, se lancent dans la mise au point d’une soucoupe volante. Totalement inadaptés à la société, entretenant des rapports empreints d’une sourde violence, ils ont inspiré ce texte à Paul Pascot, qu’il interprète aux côtés de Florine Mullard. Une fable sur notre capacité à adhérer aux rêves de l’autre... sans que ces derniers ne deviennent notre propre cauchemar.

Créée en 2014 à Umea en Suède, alors Capitale Européenne de la Culture, cette chorégraphie est avant tout un dialogue, un accord, une fusion entre la musique et la danse. L’Orchestre Symphonique du Norrlands Operan et le compositeur Peter von Poehl ont accompagné la création, signée Héla Fattoumi et Eric Lamoureux. Dans ce spectacle, la musique est bien plus qu’un support pour les danseurs, elle se diffuse, les irrigue, et finit par transformer leurs mouvements en une véritable vague explosive.

© Mario Del Curto

© Olivier Quero

Waves

© Eric Lamoureux

3 mars Théâtre Liberté, Toulon 04 98 00 56 76 theatre-liberte.fr

Lampedusa beach

Le nom de cette petite île au large de la Sicile est désormais associé aux dizaines de milliers de migrants qui y arrivent chaque année. Pour ceux qui y arrivent. Les côtes de Lampedusa, porte de l’Europe au milieu de la Méditerranée, sont aussi un vaste cimetière où gisent les corps de ceux qui échouent dans leur traversée. Lina Prosa s’est saisie de cette actualité tragique pour livrer la parole d’une de ces innombrables naufragés. Irina Brook la porte à la scène, avec Romane Bohringer à l’interprétation. 7 & 8 mars Théâtre Liberté, Toulon 04 98 00 56 76 theatre-liberte.fr

10 mars Châteauvallon – Scène Nationale, Ollioules 04 94 22 02 02 chateauvallon.com

Mystère et Boul2gom Foehn, à l’Espace Pierre-Bel. Ce spectacle, primé au Festival Fringe d’Edimbourg en 2013 (l’une des références en magie) tourne autour d’un seul accessoire : le sac plastique. A découvrir ! Le lendemain, Le Baron animera des ateliers réservés aux plus de 10 ans, puis, au Marelios, Sébastien Mossière vous invitera à L’Ecole des Magiciens, spectacle accessible dès 5 ans. Enfin, le dimanche, bienvenue aux tout-petits dans Le Jardin de Monsieur Gégé, par Gérard Souchet, qui conclura le week-end avec une prestation au titre prometteur : Ne rien comprendre et aimer ça. Y a un truc....

Magie à volonté pendant tout un week-end à La Valette-du-Var ! Comme chaque année, la ville va se parer des atours fascinants de l’illusion. Spectacles ou initiation à la pratique magique, il y en aura pour tous, les petits comme les grands. En ouverture du festival, la Cie Non Nova présentera L’après-midi d’un

© Jean-Luc Beaujault

© Gaelle Simon

3 mars Châteauvallon – Scène Nationale, Ollioules 04 94 22 02 02 chateauvallon.com

On peut avoir un traître comme on a un chagrin d’amour, occasionnant une blessure colossale qui met longtemps à se refermer, et reste douloureuse. Sorj Chalandon en a connu un lorsque, grand reporter en Irlande, il a suivi pendant des années le destin des membres de l’IRA. Notamment celui de Denis Donaldson, devenu un ami, qui s’est avéré être un informateur des services secrets britanniques. Emmanuel Meirieu adapte son récit de façon poignante, des deux côtés de la trahison : du point de vue de celui qui la commet, et de celui qui la subit.

Mystère et Boul2gom, Festival de magie 3 au 5 mars Théâtre Marelios, La Valette-du-Var 04 94 23 62 06 lavalette83.fr


au programme spectacles var alpes-maritimes

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À l’ombre d’une histoire

Le syndrome de l’Écossais

Avec le texte de Stanislas Cotton, écrit en 2003, la Cie Pop Up Théâtre emmène le spectateur vers des rives sombres. Une guerre fait rage dans les parages de ce théâtre désaffecté ou se tient un concert clandestin devant un public silencieux. Laurent Zneri met en scène un comédien, Thierry Belnei et un musicien, Aurélien Arnoux. Tous trois créent un univers fait de mutisme et de sons, de mots et de silence, mettant en relief une parole manquante : celle des morts.

Il y a un Écossais dans le placard. Enfin c’est ce que croit Alex, Bernard Campan, invité chez son beau-frère écrivain (Thierry Lhermitte), et en bute à son animosité. Il faut dire que l’un et l’autre ont beaucoup bu, de même que leurs épouses respectives (Christiane Millet, Florence Darel), or c’est bien connu, l’alcool délie les langues... Jusqu’à faire émerger des non-dits habituellement bien à l’abri sous une couche d’hypocrisie sociale.

© Sonia Millot

L’humanité plage

Un délicieux spectacle de théâtre d’ombres, à voir en famille dès 3 ans, c’est ce que propose La Petite Fabrique. D’une valise rouge sortent deux histoires, celle de la Chachatatutu, oiselle au physique ingrat, venue demander justice au majestueux phénix parce que le rat a mangé ses œufs, et Le petit bonhomme haut comme trois pommes, qui part au bout du monde en quête de la force dont il est dénué.

© X-DR

© Bernard Richebe

8 & 11 mars Théâtres en Dracénie, Draguignan 04 94 50 59 59 theatresendracenie.com

28 février Théâtre du Rocher, La Garde 04 94 08 99 34 ville-lagarde.fr

24 février Le Carré, Sainte-Maxime 04 94 56 77 77 carreleongaumont.com

Raging Bull

3, 4 & 5 mars Dans le cadre du festival Les Nuits d’Antibes Anthéa Antipolis Théâtre d’Antibes 04 83 76 13 00 anthea-antibes.fr

3 mars Théâtres en Dracénie, Draguignan 04 94 50 59 59 theatresendracenie.com

La vie en dents de scie de Jake LaMotta, boxeur américain, plusieurs fois champion du monde des poids moyens au mitan du XXe siècle, taulard récidiviste, surnommé le « taureau enragé ». Trois artistes – le comédien Mathieu Létuvé, un danseur hip hop, Frédéric Faula, et un musicien sampleur, Olivier Antoncic- cernent la personnalité de la star déchue du Bronx en s’inspirant de son autobiographie, et mettent en scène post mortem une confession tirant le combat intérieur vers la rédemption.

Boutelis Attention, deux représentations le même jour (à 10h et 14h30) pour ce spectacle inspiré de Lewis Carroll. Les sept artistes de la compagnie de cirque Lapsus évoluent sur scène avec un protagoniste invisible : l’air. Ils intègrent à leur discipline d’origine (acrobatie, jonglage, monocycle ou voltige) d’ingénieux cerfs-volants et machines aériennes. Une contrainte supplémentaire qui est aussi un supplément d’âme et de poésie.

10 mars Pôle Jeune Public, Le Revest-les-Eaux 04 94 98 12 10 polejeunepublic.fr

04 93 40 53 00

14 mars Théâtre de Grasse theatredegrasse.com

© Denis Schmidt

© Andréa Dainef

Suite à un atelier mené au Sénégal, d’intenses recherches sur Internet auprès des escrocs en ligne, et en s’inspirant de l’activiste américain Aaron Swartz, Fabrice Murgia a créé une pièce qui plonge dans le « Dark Net ». Il y traite de fracture numérique entre pays du Nord et du Sud, de tourisme sexuel, de manipulation virtuelle, de trafic d’armes, d’organes, de substances chimiques ou d’êtres humains. Une tragi-comédie des réseaux, entre rêve d’émancipation et cauchemar bien réel de l’asservissement.

© Antoine Leclerc , Yann Cielat

Black Clouds

10 mars Le Carré, Sainte-Maxime 04 94 56 77 77 carreleongaumont.com


60 au programme spectacles alpes-maritimes var

La Fontaine / Brassens

La prophétie de l’oubli

Quelques siècles d’écart n’ont jamais empêché les esprits facétieux de se rencontrer. Ainsi de Jean de La Fontaine, auteur des plus irrévérencieuses fables animalières qui aient jamais raillé les puissants, et de Georges Brassens, indépendant chanteur sétois. Le musicien Jean-Pierre Arbon et la comédienne Marie-Christine Barrault réveillent ce duo improbable, célébrant leur amour commun des mots et leur délicieuse légèreté, parfois frivole, mais jamais superficielle.

Librement inspirée des ouvrages de James Matthew Barrie, cette Prophétie revisite l’histoire de Peter Pan, allégorie de l’éternelle jeunesse. L’auteur du texte, Félicien Chaveau, est convaincu que le véritable héros est Wendy, fillette « plongée dans un âge où s’opère le déchirement à son enfance ». Entre les joies et les périls d’un monde imaginaire réservé aux enfants, et ceux de l’âge adulte, que choisira-t-elle ? Tout public dès 8 ans.

Welcome Josette Baïz a demandé à plusieurs chorégraphes – françaises ou non, connues ou pas encore, choisies pour « l’étrangeté, le décalage et l’humour » de leur univers- une des pièces les plus typiques de leur répertoire. Blanca Li, Sun-A Lee, Katharina Christl, Eun-Me Ahn, Dominique Hervieu, et Germaine Acogny ont joué le jeu, et les danseurs de la Cie Grenade interprètent avec leur vivacité coutumière le patchwork tonique et contrasté qui en résulte.

5 mars La Croisée des Arts, Saint-Maximin 04 94 86 18 90 st-maximin.fr

1er, 3, 4, 9, 10, 11 mars Anthéa Antipolis Théâtre d’Antibes 04 83 76 13 00 anthea-antibes.fr

L’envers du décor © Jorge Perez

Le cercle des illusionnistes

Ce spectacle a raflé trois prix aux Molières 2014. Bien mérités, si l’on en croit sa réputation d’humour éclatant et de virtuosité. Alexis Michalik met en scène l’histoire de Décembre et Avril, qui se rencontrent à Paris, dans les années 80, et partent ensemble en quête de deux grandes figures de l’illusion : Jean-Eugène Robert-Houdin, fabricant d’automates au XIXe siècle, et Georges Méliès, cinéaste as des trucages, mort en 1938. Une ode à l’inventivité, nourrie de sons et d’images d’archives.

Une danseuse étoile du Bolchoï attirée par la liberté de la danse contemporaine, Maria Alexandrova, et la chorégraphe Blanca Li qui monte ici elle-même sur scène, se lancent dans un duo ardent. À partir des mythes de l’Antiquité riches en puissants personnages féminins (Gaïa, Déméter, Perséphone, les Érynies...), elles puisent une inspiration nouvelle. En espagnol, russe et anglais, elles vont « surtout parler de la femme ».

27 & 28 février Théâtre de Grasse theatredegrasse.com

L’envers du décor, c’est ce que l’on pense mais ne formule pas, ou approximativement seulement, dans nos relations avec autrui. Daniel Auteuil met en scène une pièce de Florian Zeller où les spectateurs ont accès aux pensées secrètes des personnages, tout autant qu’à ce qu’ils expriment à haute voix... Sur une trame classique d’infidélités conjugales, nourri du décalage entre les deux versions, naît un humour cruel, non dénué de profondeur. © Vincent Pontet

04 93 40 53 00

Déesses et Démones © Céline Nieszawer

© Mirco Magliocca

04 93 40 53 00

3 & 4 mars Théâtre de Grasse theatredegrasse.com

28 février & 1er mars Anthéa Antipolis Théâtre d’Antibes 04 83 76 13 00 anthea-antibes.fr

9 au 11 mars Anthéa Antipolis Théâtre d’Antibes 04 83 76 13 00 anthea-antibes.fr


au programme spectacles alpes-maritimes gard

61

Battlefield

Mes autres

Les six artistes de la Flip Fabrique, qui font partie de la nouvelle génération du cirque québécois, revisitent les disciplines traditionnelles du cirque avec humour, malice et dans une grande complicité. Barres russes, trampoline, cerceau aérien, diabolo, voltige… tout est prétexte à raconter l’histoire explosive d’une bande de copains qui se retrouve enfin après dix ans de séparation.

Sylvie Pabiot danse les « autres », les siens. Seule en scène, nue, passant d’une lumière sculpturale (Guillaume Herrmann) au noir régénérant, elle décline les facettes d’une autobiographie qui multiplie ses « moi ». Chaque geste invite à la contemplation, propose un pas vers l’art plastique. C’est elle qui détient la source lumineuse, elle façonne son corps et ses personnalités, pour mieux se tourner vers nous autres.

© Caroline Moreau

Attrape-moi

18 février Palais des festivals et des congrès, Cannes 04 92 98 62 77 cannes.com

10 mars Théâtre Alexandre III, Cannes 04 92 98 62 77 cannes.com

04 66 36 65 10

20 à 30000 jours

Blast

© Frédérique Cournoyer-Lessard

Ta blessure est ce monde ardent La poésie du Hongrois Attila József est au centre du spectacle de la Cie Flacara mis en scène par Frédéric Grosche. Plusieurs extraits de poèmes ont été choisis en fonction de leur qualité de résonnance au plateau, les deux comédiens naviguant entre deux langues, deux cultures, incarnant par ces mots les obsessions, les exaltations et les craintes du poète qui a traversé en grand témoin la première moitié du XXe siècle.

© Melissa Leroux

28 février au 2 mars Théâtre national de Nice 04 93 13 90 90 tnn.fr

24 & 25 février Le Périscope, Nîmes theatredenimes.com

Blast signifie le souffle après l’explosion, et c’est une véritable déflagration de cirque que proposent Jef Odet et les 18 artistes venus du monde entier qui forment le Cirque Farouche Zanzibar. Trapézistes, funambules voltigeurs, clowns… les acrobates enchaînent les tableaux spectaculaires en apprivoisant le vertige, ou plus intimistes et poétiques, accompagnés par la musique rock et pop jouée sur scène. 10 & 11 mars Scène 55, Mougins 04 92 92 55 67 scene55.fr

Antoine est un enfant qui s’autorise à rêver. Sa ville, personne n’y est jamais allé. Il faut dire qu’on n’y est pas très heureux : les habitants sont pauvres, et surtout, la mer est loin, loin… Et il faudrait pourtant y parvenir, car on dit que son eau est magique. Si on la boit, on devient riche, et peut-être bien immortels aussi. Fanny Buffort pratique un théâtre d’objets avec textes et vidéos. Le récit s’appuie sur le Conte du grand-père de Laurent Javaloyes. En voiture ! A partir de 8 ans.

© S. Diard Véronique Lespérat Héquet

© Michelle Bates

Avec cette ultime création, Peter Brook revient à ses premières amours : le Mahabharata, épopée millénaire indienne, adapté par Jean-Claude Carrière. Après une guerre terrible qui a décimé des millions de combattants, un roi aveugle et son neveu victorieux vont devoir faire face, assumer leurs responsabilités, en maintenant le dharma, l’équilibre de tout ce qui est. Une aventure portée par quatre comédiens et un musicien.

04 66 36 65 10

25 février Odéon, Nîmes theatredenimes.com


62 au programme gard alpes-maritimes hérault

Limen & Anubis

Un incident, qui pourrait sembler mineur. Un homme laisse échapper à sa maitresse qu’il compte l’inviter dans un restaurant que lui a conseillé sa femme… La pièce raconte la soirée qui suit cette erreur originelle. Sur un parking, deux couples, liés par quelque chose à découvrir, se croisent, se défient. Yasmina Reza met en scène son texte, avec Emmanuelle Devos en femme sensible traversée par la vie qui court.

À2PAS2LAPORTE Il y a eu Mooooooooonstres, grand succès pour petits spectateurs, et voilà la suite ! Laurent Fraunié compose ses spectacles avec des gestes, des objets, trois fois rien pour créer un univers immense comme la poésie. Dès 5 ans, les enfants pourront venir trembler et s’émerveiller juste devant cette porte qui matérialise une frontière qui ne demande qu’à être traversée. Deux pas pour découvrir le monde. Avant de progresser encore, dans une troisième création à venir pour compléter ce triptyque.

© J-K Kramer Numen Cie

© Pascal Victor Artcom Press

Bella Figura

1er au 3 mars Théâtre Bernadette Lafont, Nîmes 04 66 36 65 10 theatredenimes.com © Xavier Trouble

8 au 11 mars Théâtre national de Nice 04 93 13 90 90 tnn.fr

28 février & 1er mars Salle d’À Côté, Alès 04 66 52 52 64 lecratere.fr

Songes et métamorphoses

22 & 23 février Théâtre de la Vignette, Montpellier 04 67 14 55 98 theatredelavignette.fr

© e.carecchio

La nuit des rois

C’est une célébration en grand pour le Théâtre, avec un grand T ! Le jeune Guillaume Vincent met en scène le Songe d’une nuit d’été de Shakespeare et quatre des Métamorphoses d’Ovide, qu’il a adaptées. 14 comédiens, 3 h 50, deux spectacles qui se répondent et dialoguent entre patrimoine et écriture contemporaine. Avant un mois de représentations au Théâtre de l’Odéon à Paris, deux soirées exceptionnelles à Alès. 23 & 24 février Le Cratère, Alès 04 66 52 52 64 lecratere.fr

Machine théâtre, compagnie partenaire du Cratère, va promener sa fougue tout autour d’Alès. Nicolas Oton et sa troupe, dans une toute nouvelle traduction réalisée sur mesures par Lyne Cottegnies, s’emparent d’une des pièces les plus loufoques de Shakespeare. On y célèbre le Carnaval, et les rois n’y sont pas toujours couronnés, les genres pas fixés, le pouvoir change de mains. Et l’amour, lui, n’en fait qu’à sa tête. 3 mars Maison pour Tous, Saint-Christol-lez-Alès 10 mars Centre culturel Léo Lagrange, Bagnols-sur-Cèze 14 mars Le Tremplin, Saint-Ambroix 17 mars Théâtre de l’Albarède, Ganges 04 66 52 52 64

Les marionnettes créées et manipulées par Uta Gebert nous entrainent si loin qu’on passe le Styx avec elles, qu’on sent le froid de la neige et des nécropoles s’insinuer dans nos cœurs et nos cols. Navigant toujours entre mort et vie, les spectacles de l’artiste allemande, récompensée par le Prix de l’Institut International de la Marionnette 2015 sont d’une telle puissance qu’ils laissent des traces : l’effroi et l’émerveillement des deux pièces touchent au plus profond. A partir de 14 ans.

lecratere.fr

Science and Friction Le colombien Luis Garay revient à hTh avec deux prolongements de deux pièces antérieures. Science and Friction propose une vision démultipliée de son hypnotique solo Maneries, conçu cette fois pour trois performers. Primitive Future, avec les mêmes plus une, explore la dimension quasi archéologique de son travail d’archive du geste, à travers la confrontation avec les objets et les matières de Cocooning, vu ici en 2015. Avec Ivan Haidar, Bruno Moreno, Leticia Lamela et Flor Vecino. 9 & 10 mars Domaine de Grammont, Montpellier 04 67 99 25 00 humaintrophumain.fr


63

Ubu Roi

Assemblée – Formes brèves

José Montalvo se souvient de ses nuits d’enfance, aux côtés de sa famille réfugiée espagnole. Chants flamencos, danses traditionnelles réinvesties, puissance des réminiscences et imaginaire qui s’autorise tous les mélanges, la pièce invite aussi les seize interprètes à une réinterprétation joyeuse du Sacre du printemps. Le chorégraphe, qui toujours métisse les styles, continue d’affirmer le sien.

La Compagnie provisoire propose un voyage éclaté dans la prose de Victor Hugo. Cinq acteurs s’empareront chacun d’un condensé de cinq romans du maître. Les représentations auront lieu dans cinq Maisons pour Tous montpelliéraines. Le dernier jour d’un condamné, Claude Gueux, Les travailleurs de la mer, L’homme qui rit et Quatre-vingt-treize, cinq formes épurées pour parler au public d’aujourd’hui.

© Patrick-Berger

© Jean-Louis Fernandez

Y Olé !

22 & 23 février Le Corum, Montpellier 0 800 600 740 montpellierdanse.com

La Cie Les Dramaticules débarque avec une refonte de l’esprit ubuesque. C’est qu’en effet, créée en 1896, la pièce de Jarry était une magnifique provocation aux règles sclérosées qui régissaient le théâtre. Mais depuis, comble de l’ironie, la pièce est devenue un classique ! Jérémie Le Louët propose ici une interprétation qui bouscule à nouveau les codes, et la pièce retrouve sa subversion : la troupe, happée par la violence et l’absurde du texte, se déchire en direct.

4, 10, 17, 18 & 25 mars Maisons pour tous, Montpellier 04 67 40 41 39 theatrejeanvilar.montpellier.fr

Un petit brin d’herbe Y a trop de boucan ! On n’entend plus rien ! Lola (la danseuse Chloé Dehu) décide de s’échapper et trouver un petit coin de paradis où elle pourra de nouveau percevoir d’autres sons que ceux des avions ou des haut-parleurs hurleurs. Elle expérimente alors, avec une ambiance sonore mêlant une centaine de sons différents, la danse sur chant du grillon et sur clapotis d’eau lacustre. A partir de 4 ans

1er au 3 mars Théâtre Jean Vilar, Montpellier 04 67 40 41 39 theatrejeanvilar.montpellier.fr

En Chinoiseries Comment moi je ?

1er mars Théâtre de la Vignette, Montpellier 0 800 600 740 montpellierdanse.com

La Cie Tourneboulé adresse ses spectacles à tous, dès le plus jeune âge. Dans celui-ci, les enfants dès 5 ans sont conviés à rêver et réfléchir sur des questions qui plongent dans des abîmes de perplexité : qui suis-je ? où suis-je parmi les autres de ce monde ? Philosophie pour tous et théâtre d’objets permettent de suivre une petite fille qui remonte le fil de sa conscience, entre découvertes et peurs. 8 & 10 mars Théâtre Jean Vilar, Montpellier 04 67 40 41 39 theatrejeanvilar.montpellier.fr

© Alain Tendero

© Vincent Cavaroc

© Cie tourneboulé

Première création de l’interprète I-Fang Lin, admirée dans de nombreux spectacles de Mathilde Monnier, la pièce est un hommage à la chorégraphe, qui créait en 1990 son fameux duo Chinoiseries avec le clarinettiste Louis Sclavis, et une réflexion sur la double culture (Lin arrive de Taïwan en 90). Accompagnée cette fois par François Marry, leader du groupe François & The Atlas Mountains, I-Fang Lin se raconte et dévoile encore de nouveaux trésors d’interprétation.

11 mars Domaine de pierresvives, Montpellier 04 67 67 30 00 pierresvives.herault.fr


64 au programme spectacles hérault

Until the lions

Celui qui tombe

© Martin Wagenhan

Du grand spectacle : le chorégraphe Akram Khan, qui a fait ses débuts dans la mémorable adaptation du Mahabharata de Peter Brook, livre sa propre vision de l’épopée (d’après un texte de Karthika Naïr). C’est lyrique, cela draine des thèmes universels, et l’artiste revient pour l’occasion sur le plateau. Une façon de renouer avec ses racines indiennes.

Nikolaus Holz aime et revendique la débrouille, la récup. C’est la crise ? Qu’à cela ne tienne, on fera du cirque quand même. Sous (et sur !) un chapiteau savamment branlant (belle scénographie de Raymond Sarti), six artistes s’évertuent à rafistoler, dans un bidouillage qui tient de la virtuosité, un monde qu’ils réussissent à apprivoiser à force d’invention et de poésie. Ce spectacle est magnifique, tout simplement.

© Géraldine Aresteanu

© Jean Louis Fernandez

Tout est bien !

21 & 22 février Théâtre Molière, Sète 04 67 74 66 97 theatredesete.com Tout est bien ! Catastrophe et bouleversement 6 au 9 mars Espace chapiteau, Frontignan 04 67 74 66 97 theatredesete.com

Sœurs

10 & 11 mars Scène nationale de Narbonne 04 68 90 90 20 letheatre-narbonne.com

© Pascal Gely

Nederlands dans Theater 2

Wajdi Mouawad, grand nom du théâtre actuel, auteur et metteur en scène, directeur du Théâtre de la Colline à Paris, creuse depuis longtemps la veine familiale : enjeux fratricides, racines disputées, luttes d’influence tragiques. Ici, ce sont deux femmes qui se rencontrent. Des sœurs ? Peut-être. Deux femmes qui se ressemblent et se complètent en tous cas, à tel point qu’elles sont jouées par la même comédienne. Annick Bergeron incarne avec brio ce duo de solitudes désenchantées, dans une mise en scène très High tech.

Depuis 1959, la compagnie fondée aux PaysBas incarne une perfection chorégraphique mondialement célébrée. Ils investissent pour la première fois la scène du Théâtre Molière. Et pourquoi « 2 » ? Parce qu’il s’agit des jeunes, de la relève ! Avec leurs légendaires polyvalence et technique parfaitement maitrisées, les juniors de la compagnie présentent deux pièces chorégraphiées par Sol León et Paul Lightfoot, une par Edward Clug, et la dernière par Alexander Ekman.

Le temps et la chambre Alain Françon met en scène un texte d’un des auteurs allemands contemporains les plus joués dans le monde (traduction française Michel Vinaver). Botho Strauss dépeint, dans une écriture émancipée de linéarité classique, multipliant les souvenirs qui surgissent, la vie d’une femme qui se remémore, dans la solitude de sa chambre, ses rencontres, ses amours, ses déceptions. Distribution prestigieuse, avec, parmi neuf comédiens renommés, Dominique Valadié et Jacques Weber. © Rahi Rezvani

28 février & 1er mars Théâtre Molière, Sète 04 67 74 66 97 theatredesete.com 7 & 8 mars Théâtre Molière, Sète 04 67 74 66 97 theatredesete.com

Circassien, acteur, danseur, musicien et metteur en scène, Yoann Bourgeois est aussi le codirecteur du Centre Chorégraphique National de Grenoble. Beaucoup de cordes à l’arc de cet artiste qui multiplie d’autant les langages de ses spectacles. Dans celui-ci, qui tombe, donc, il s’agira pour les six interprètes de défier un plateau suspendu au-dessus de la scène, qui les menace et les attire. Tomber pour mieux se relever. À partir de 8 ans.

22 & 23 février Théâtre sortieOuest, Béziers 04 67 28 37 32 sortieouest.fr


103075

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66 au programme cinéma marseille

Le corps dansé

3000 nuits

Vidéo FID 2017 2

Graine de Champion, de Simon Lereng Wilmont et Viktor Kossakovsky © Les Films du Préau

Faire mémoire et transmettre « une actualité de films de danse plurielle », c’est ce que propose le Ballet National de Marseille avec BNMCINE. D’abord dans ses locaux, un mardi par mois à 19h, puis dans les cinémas marseillais partenaires : Le Gyptis, le Prado, l’Alhambra, le Chambord, Les Variétés et le Pathé Madeleine. Ainsi, le 14 février, l’historienne Geneviève Vincent présentera au BNM Les raretés de la Collection de la Cinémathèque de la Danse suivi de la Nudité en danse. Et le 18 février, au Gyptis à 14h30, on pourra rencontrer un danseur du BNM à l’occasion de la projection de Graine de champion de Simon Lereng Wilmont et Viktor Kossakovsky, un documentaire tout en délicatesse sur trois enfants voués à la performance. Cinéma Le Gyptis, Marseille 04 95 04 96 25 lafriche.org

04 91 32 72 72

Le 21 février à 20h, dans ses locaux, le FID propose Munster de Martin Le Chevallier, un film qui raconte le naufrage d’une utopie. En 1533, un peuple qui se croyait élu a instauré un régime communiste en Allemagne du Nord. Mais ce rêve, nourri d’espérance mystique, s’est vite écroulé. La ville a été assiégée puis vaincue. Deux assiégeants incarnant le candide et l’historiographe, tout à la fois acteurs, témoins et commentateurs observent la cité retranchée et nous retracent la gloire et la chute de ce royaume éphémère.

Munster, de Martin Le Chevallier © Phantom Productions

04 95 04 44 90

FIDMarseille fidmarseille.org/dynamic/

3000 nuits, de Mai Masri © JHR Films

Le 3 mars à 19h30, au Gyptis, dans le cadre du Printemps du film engagé, projection du film de Mai Masri, 3000 Nuits. Venue du documentaire, la réalisatrice choisit ici une fiction inspirée par le réel. Années 80, à la veille de Sabra et Chatila, une prison israélienne. La révolte gronde parmi les détenues politiques palestiniennes. Une jeune institutrice de Naplouse condamnée à tort pour un attentat, vient d’arriver. Elle partage la cellule d’Israéliennes condamnées pour droits communs. Enceinte, elle décide de garder l’enfant. « Allez voir le beau film de Mai Masri, il vous racontera le combat des femmes palestiniennes et vous expliquera pourquoi notre poète Mahmoud Darwish a dit un jour : «nous souffrons d’un mal incurable appelé l’espoir”» Leila Shahid. Cinéma Le Gyptis, Marseille 04 95 04 96 25 lafriche.org

BNM, Marseille ballet-de-marseille.com

En territoire palestinien

Gaza 36 mm, de Khalil Al-Mozian © X-D.R.

La Palestine, déclinée en films, rencontres et débats, sera au programme du MuCEM pendant une dizaine de jours. Un document rare ouvrira le cycle, le 9 mars : les films des frères Lumière réalisés en 1896 en Palestine ; ils seront suivis de Off Frame, du cinéaste palestinien Mohanad Yaqubi, qui sera présent. Le 11 plusieurs courts-métrages à l’affiche, dont The Shooter d’Ihab Jadallah. Le 12, Gaza 36 mm de Khalil Al-Mozian sera suivi d’une intervention du réalisateur. Palestine :Territoire, mémoire, projections du 9 au 12 mars et du 16 au 19 mars MuCEM, Marseille 04 84 35 13 13 mucem.org

Un Dimanche sud-américain sur la Canebière Le 26 février pour les Dimanches de la Canebière dans le cadre de Travelling Marseille (Collectif des associations de cinéma), l’ASPAS et le cinéma Les Variétés proposent deux films. À 14h, Chala, une enfance cubaine, second long métrage d’Ernesto Daranas qui aborde le problème de l’éducation à travers le regard d’un enfant, laissé pour compte du progrès social cubain. À 16h30, Tudo que Aprendemos Juntos (Le Professeur de violon) de Sergio Machado : Laerte, talentueux violoniste, rêve depuis toujours d’intégrer l’Orchestre symphonique de São Paulo. Dévoré par le trac, il échoue à l’audition et accepte à contrecœur d’enseigner la musique à des adolescents d’Héliopolis, la plus grande favela de la ville….

04 91 48 78 51

ASPAS, Marseille aspas-marseille.org/

Cinéma Les Variétés, Marseille 08 92 68 05 97 cinemetroart.com/

Génération Climat Le 10 mars à 20h30, au cinéma Les Variétés, dans le cadre du Festival du Film Engagé, avant première de Irrintzina, le cri de la génération climat, en présence de l’équipe du film. Dans la lignée du Demain de Mélanie Laurent, ou du Merci Patron de François Ruffin, ce documentaire de Sarah Blondel et Pascal Hennequin, autoproduit, réalisé grâce à un financement participatif, montre des initiatives pour contrer les multinationales de la finance et des énergies fossiles. Il suit sur les routes de France, de Navarre et d’Europe pendant plus de 18 mois, des militants du mouvement pour la justice climatique, Alternatiba. Irrintzina, le cri de ralliement des bergers basques, cri d’alarme, de reconnaissance ou de joie, devient celui d’une génération déterminée à agir contre le réchauffement climatique et les catastrophes écologiques annoncées. Cinéma Les Variétés, Marseille 08 92 68 05 97 cinemetroart.com/


au programme cinéma bouches-du-rhône 67

En territoire lynchien

Une année romaine

Ciné goûter

Catherine Deruas sera au cinéma Les Variétés le 17 février à 20h00 à l’occasion de la sortie nationale, le 15 février, de L’Indomptée déjà couronné du Prix du Jury Jeune, du Prix de la meilleure musique au festival européen des Arcs et sélectionné à Locarno. Séance spéciale animée par Florence Pazzottu pour ce film qui met en scène quatre personnages : une photographe, Axelle, un couple d’écrivain, Camille et son mari, et la Villa Médicis ellemême, « un endroit hors du temps, une bulle entre rêve et réalité » où ces trois-là vont se rencontrer, se découvrir.

Que faire pendant les vacances de ski pour ceux qui ne vont pas au ski ? Aller au ciné, pardi ! Les 15 et 23 février, le Cinéma Renoir et la Cinémathèque Prosper Gnidzaz à Martigues proposent deux après-midis consacrés aux enfants. Le 15 au Renoir, Alice Comedies, qui rassemble les premiers films de Walt Disney, sera à l’affiche. La préparation d’un zootrope, jouet optique pour animer les images est également au programme. Le 23, à la Cinémathèque, un parcours de jeux autour de l’invention du cinéma sera proposé.

Cinéma Les Variétés, Marseille 08 92 68 05 97 cinemetroart.com

Eraserhead, de David Lynch © Diaphana

Le 17 févier, à l’Eden Théâtre de La Ciotat, soirée spéciale David Lynch, présentée par Guy Astic, directeur des éditions Rouge Profond et auteur d’ouvrages sur le réalisateur. À 18h30, David Lynch, the art life de Jon Nguyen, un portrait inédit du cinéaste, et à 21h Eraserhead (1977) son premier film, tourné en noir et blanc, dont le scenario est qualifié par son auteur d’« une sorte de poème en style libre ». 04 88 42 17 60

Eden Théâtre, La Ciotat edencinemalaciotat.com

Des courts l’après-midi L’association Des courts l’après-midi propose le 4 mars à 15h, au Cinéma le Miroir du Centre de la Vieille Charité à Marseille, une séance de courts en présence d’Alain Della Negra et Kaori Kinoshita qui présenteront Neighborhood : des adeptes du jeu Les Sims racontent la vie de leur avatar, semant la confusion entre le réel et le virtuel et proposant une représentation originale de leur double vie. On pourra voir aussi Decorado d’Alberto Vasquez ainsi que Que vive l’Empereur d’Aude Léa Rapin.

Balade irlandaise

Cinéma Jean Renoir, Martigues 09 63 00 37 60 cinemartigues.com

Atelier cinéma

Sing street, de John Carney © Mars Films

Art et Essai Lumière propose le 12 février à 18h30 à L’Eden de La Ciotat, Sing street de John Carney, une plongée musicale dans le Dublin des années 80. Conor (Ferdia WalshPeelo), un garçon timide, tente de conquérir la jolie Raphina en lui proposant de jouer dans le clip de son groupe de musique, qui n’existe pas encore. Il placarde une annonce dans son école, « groupe futuriste cherche musiciens ». L’aventure commence… Et pour le prochain rendez-vous, le 8 mars, ce sera Vierge sous serment de Laura Bispuri. Neighborhood, d’Alain Della Negra et Kaori Kinoshita © Capricci films

Cinéma Le Miroir, Marseille descourtslapresmidi.fr

Alice Comedies, de Walt Disney © Malavida

Art et Essai Lumière, La Ciotat 06 64 85 96 40 artetessailumiere.fr

Entre janvier et avril, la Cinémathèque Prosper Gnidzaz de Martigues, associée au Cinéma Renoir, propose un atelier cinéma de programmation et de réalisation. Ce sera la quatrième édition de cette opération, animée par la Compagnie d’Avril. Intitulé Fiction et documentaire : frontières et passages, l’atelier se tiendra sur un rythme d’une séance hebdomadaire, le lundi ou le jeudi. L’intervenante sera la cinéaste Elise Tamisier. L’inscription est gratuite et ouverte pour un groupe d’adultes d’une quinzaine de personnes. Cinéma Jean Renoir, Martigues 09 63 00 37 60 cinemartigues.com


68 au programme cinéma bouches-du-rhône vaucluse var hérault

Un paese di Calabria

Les Intemporels du cinéma

Les nouveaux chiens de garde

Il Boom, de Vittorio de Sica © Acacias Films

Les intemporels du cinéma propose de voir ou revoir les grands classiques du cinéma international, à commencer par Vivement dimanche !, célèbre comédie policière de François Truffaut (28 février et 7 mars à Grans, 27 février et 7 mars à Port-Saint-Louis et 22, 26 février et 1er, 3 mars à Fos). On verra aussi Il Boom, comédie italienne de Vittorio De Sica (14 et 21 février à Grans, les 13, 21 février à Port-Saint-Louis et 12, 15, 17 février à Fos), et Pat Garrett & Billy the Kid, incontournable western de Sam Peckinpah (13 mars à Port-Saint-Louis et 9, 12 mars à Fos). Cinéma l’odyssée, Fos 04 42 11 02 10 Espace Robert Hossein, Grans 04 90 55 71 53 Espace Gérard Philipe, Port-Saint-Louis 04 42 48 52 31

Si les médias jouent un rôle essentiel dans nos sociétés occidentales, et se proclament de « contre-pouvoir », ils sont loin d’être tous indépendants, la plupart d’entre eux appartenant à des grands groupes industriels ou financiers, proches du pouvoir. Les Nouveaux chiens de garde, documentaire de Yannick Kergoat et Gilles Balbastre (2012), pose la question de l’impartialité, la crédibilité et la place du journaliste, qui est aujourd’hui plus que jamais au cœur du débat public. La projection, le 9 mars, sera suivie d’une rencontre avec Caroline Proust.

Les Nouveaux Chiens de garde, de Gilles Balbastre, Yannick Kergoat © Epicentre Films

04 98 07 01 01

Qu’est-ce qu’on attend, de Marie Monique Robin © M2R Films

Le documentaire de Marie Monique Robin, tourné en 2016, est le récit d’une utopie réalisée. Dans le village d’Ungersheim, en Alsace, la solidarité entre les habitants et avec la terre nourricière n’est pas un simple slogan. Le maire et ses 2200 concitoyens y ont adopté un mode de vie où les mots démocratie et écologie ne sont pas vidés de sens. L’association Foll’avoine organise la soirée, où seront présents Vincent Delahaye, conseiller municipal d’Avignon, et Roger Fernandez, initiateur du projet d’électricité solaire Lucisol.

Le liberté, Toulon theatre-liberte.fr

22 février Cinéma Utopia, Avignon 04 90 82 65 36 cinemas-utopia.org

Algérie du possible

Sur le chemin de l’école Jackson est Kenyan, Samuel indien, Zahira marocaine et Carlos argentin. Tous ont entre 10 et 15 ans, et parcourent chaque jour à pied, en fauteuil roulant, ou à cheval, des dizaines de kilomètres dans une nature aussi dangereuse que sublime pour une même chose, apprendre. Ce périple courageux et nécessaire est le sujet du documentaire césarisé de Pascal Plisson qui sera projeté le 15 février au théâtre Liberté de Toulon.

Sur le chemin de l’école, de Pascal Plisson © The Walt Disney Company France

20 février Cinéma Utopia, Avignon 04 90 82 65 36 cinemas-utopia.org

À l’heure où l’Europe se transforme en forteresse, où l’accueil et la solidarité envers les migrants sont passibles des tribunaux, ce film offre une autre perspective. Riace, petit village de Calabre, mourait lentement de l’exode rural. A la fin des années 90, 200 Kurdes débarquent sur les côtes toutes proches. Ils vont s’installer au village qui peu à peu reprendra vie. Shu Aiello et Catherine Catella, les réalisatrices, seront présentes lors des projections. 13 février Cinéma Utopia, Montpellier 04 67 52 32 00 cinemas-utopia.org

scenesetcines.fr

Qu’est-ce qu’on attend

Un paese di Calabria, de Shu Aiello et Catherine Catella © Aloest Distribution

04 98 07 01 01

Le liberté, Toulon theatre-liberte.fr

Algérie du possible, de Viviane Candas © Les Films de l’Atalante

Ce film de Viviane Candas évoque l’Algérie peu après l’indépendance. Sous l’impulsion de Ben Bella, le pays devient « le phare du tiers-monde ». Autogestion des domaines agricoles, projet révolutionnaire, soutien et présence de Che Guevara, la lutte pour un monde plus juste est en marche. Puis viendra le coup d’état de Boumediene. Yves Mathieu, avocat né en Algérie, est l’un des acteurs de cette époque. Il meurt en 1966 dans des circonstances obscures. Il était le père de la réalisatrice, qui nous conte son histoire. 27 février Cinéma Utopia, Montpellier 04 67 52 32 00 cinemas-utopia.org


au programme cinéma

Nouv.o.monde

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Quinze premières fois

Du 9 au 12 mars, Rousset accueille le cinéma du monde et la salle Emilien Ventre devient « l’espace où se croisent et se décroisent, en version originale, toutes les aspirations du monde… sous l’œil enrichi des cinéastes. » : c’est Nouv. o.monde, proposé par Les Films du Delta. En ouverture, le 9 à 20h30, le cinéaste Chad Chenouga présentera en avant première De toutes mes forces, dont le scénario est inspiré de la pièce de théâtre qu’il a lui-même mise en scène en 2011. L’histoire de Nassim, 16 ans, placé dans un foyer à la mort de sa mère toxicomane, qui refuse d’être assimilé aux jeunes de ce centre. Il s’est inventé une autre existence, semblable à celle de ses potes du grand lycée parisien où il poursuit ses études. Tel un funambule, Nassim navigue entre ses deux vies, qui ne doivent à aucun prix se rencontrer... Cerise sur le gâteau : les comédiens Khaled Alouach (Nassim) et Yolande Moreau (sous réserves) rencontreront le public après la projection. On pourra voir aussi partager le combat d’Alma pour retrouver l’arbre centenaire vendu à une multinationale dans L’Olivier d’Iciar Bollain, ou 11 moments de vie de citadins contemporains qui vont s’entrecroiser et s’entrelacer dans 11minutes de Jerzy Skolimowski. Masaan, le premier long-métrage de Neeraj Ghaywan, nous fait suivre les affres d’une jeunesse indienne en quête d’émancipation dans un pays tiraillé entre tradition et modernité, et Soleil de Plomb de Dalibor Matanic, trois histoires d’amour, à travers trois décennies, dans deux villages voisins des Balkans marqués par une longue histoire de haine interethnique. Sans oublier, le 11 mars à 20h30, La Jeunesse Suit son Court, une soirée courts métrages et mix de musiques de films avec DJ Ckel. En clôture, le 12 mars à 17h, Christian Philibert sera présent pour son dernier film, en avant première, Massilia Sound System le film, « porteur de sens et de valeurs, débordant de joie et de chaleur humaine à l’image du Massilia Sound System ». La projection sera suivie d’un concert de Dancehall Balèti. Et avant ces belles propositions de cinéma à Rousset, des films à Trets (le 3 mars) et à Aix (le 7). ANNIE GAVA

Le Concours, de Claire Simon © Andolfi

Quinze premiers films documentaires, courts, moyens ou longs sur grand écran, disponibles aussi dans la caravane-vidéothèque installée pour 2 jours sur le Cours Julien, des rencontres avec les réalisateurs, un atelier de travail autour de deux films en chantier, un accompagnement concret des jeunes cinéastes, des échanges, des moments conviviaux : c’est ça le Festival la Première Fois ! Il se déroule du 28 février au 4 mars, à Aix et Marseille, et commence au cinéma Les Variétés en présence de l’invitée d’honneur de cette 8e édition : Claire Simon (28 février à 19h). Avec elle, on ira à la rencontre de ceux qu’elle a croisés au bois de Vincennes avec Le Bois dont les rêves sont faits. (lire sur journalzibeline.fr). Et on la retrouvera, le 1er mars, de 14h à 17h, à l’École Supérieure d’Art d’Aixen-Provence, pour une master class ouverte au public. L’occasion de revenir sur son parcours et de présenter son dernier opus, Le concours, où l’on suit le déroulement de l’examen d’entrée à la FEMIS, côté candidats et côté jurys. Comme tous les ans, la sélection privilégie les approches singulières. Que ce soit celle de Paula Ortiz dans Miedo, qui nous plonge dans une petite ville colombienne dont la tranquillité n’est qu’apparente, de Mayence Voiseux qui, dans Les Héritiers, se penche sur la transmission des métiers de la viande en Artois, ou encore de Marie-Eve De Grave qui, dans Belle de nuit - Grisélidis Réal, autoportraits, entrelace fiction et archives documentaires pour retracer le destin de cette suissesse hors du commun, écrivaine, peintre et putain ! Des films qui s’ouvrent souvent sur un monde pas forcément tendre, celui des migrants de Melilla (Les sauteurs d’Abou Bakar Sidibé, Moritz Siebert, Esteban Wagner), celui des petites mains de Marrakech aux pieds des remparts (La Route du pain de Hichma Elladdagi), celui des habitants des bidonvilles (Remember your name, babylon de Bram van Cauwenberghe, Marie Brumagne), mais qui témoignent tous de l’énergie humaine et du désir toujours renouvelé d’en rendre compte par la caméra. ÉLISE PADOVANI

De toutes mes forces de Chad Chenouga © Ad Vitam

Nouv. o.monde 9 au 12 mars Salle Emilien Ventre, Les Films du Delta, Rousset 04 42 53 36 39 filmsdelta.com

Festival la Première Fois 28 février au 4 mars Divers lieux, Aix, Marseille 06 48 08 52 87 festival-lapremierefois.org


70 au programme cinéma bouches-du-rhône

Habiter la Terre Les douzièmes Rencontres du cinéma é c o c i t o y e n de Gardanne apportent leur lot de pépites et de sujets qui nous poussent à envisager le monde autrement. Débats, rencontres avec les réalisateurs et les associations, enrichissent chaque séance et redonnent des raisons de penser que, s’il est des choses La Bataille de Florange de Jean-Claude Poirson © Human Doors Films peu louables parmi les actions humaines, il appréhension neuve de la vie. L’approche en est d’autres qui rendent leur dignité à de la vie sauvage trouve son acmé dans le l’humanité. On s’intéressera ainsi en ouverture film de Jean-Michel Bertrand, Vertige d’une à L’éveil de la permaculture d’Alain Bellay, rencontre : le réalisateur (qui sera présent cette « révolution déguisée en jardinage » le 14 mars), « se rend invisible » pour filmer qui implique une nouvelle façon de vivre et l’aigle du Champsaur. L’effacement, mot-clé de s’accorder au monde. Ce qui nous unit à pour atteindre l’harmonie… Qu’est-ce qu’on la terre se décline avec Le lien de Frédéric attend ? s’exclament les habitants d’une Plénard et Dominique Cottereau : des petite ville d’Alsace, modèle de la transition enfants de la ville sont immergés dix jours énergétique, filmée par Marie-Monique en pleine nature, aventure qui scelle une Robin. Contre-point essentiel à Trashed de

Candida Brady : les déchets envahissent le monde, constat glaçant, malgré les solutions que l’on invente… Habiter le monde c’est aussi vivre avec les autres, le village de Calabre, Riace, est devenu, en dépit de sa pauvreté un havre de paix pour les réfugiés. Une utopie réalisée, dont rend compte Un paese di Calabria de Shu Aiello et Catherine Catella (en sa présence). Et que l’on aimerait tangible pour Romeo et Kristina (par Nicolas Hans Martin) qui abritent leur histoire d’amour sous le pont de la Gare Saint-Charles à Marseille. Résistance enfin pour la dignité et le droit au travail, celle des ArcelorMittal de Florange, dans le film documentaire La bataille de Florange de Jean-Claude Poirson (qui sera présent). Et comme il y a toujours un début, l’enfance est choyée avec Le voyage en ballon d’Anna Bengtsson plus un goûter et un atelier…. MARYVONNE COLOMBANI

Rencontres du cinéma écocitoyen 10 au 14 mars Cinéma 3 Casino, Gardanne 04 42 51 44 93 cinema3casino.fr

Féminin pluriel À Martigues, cela va faire dix ans que l’on contemple le monde à travers les yeux des femmes. Le festival de cinéma Regard de femmes -4 jours d’images, de débats, de rencontres, d’histoires- raconte et questionne le monde féminin contemporain. En soi, la démarche est déjà assez originale pour qu’on s’y intéresse. Mais c’est surtout la volonté de l’équipe municipale, soucieuse d’intégrer les habitants à l’élaboration même du programme, qui donne à cette manifestation un beau cachet de véritable action culturelle partagée. Des fictions, des documentaires, des courts-métrages proposent un éventail varié, entre films « grand public » et thèmes plus pointus. Les luttes sont bien différentes, suivant les zones géographiques, les milieux sociaux, les âges des protagonistes. Mais il s’agit finalement toujours d’imposer, à force d’obstination et de courage, sa place de femme dans notre monde d’aujourd’hui. Le comité de sélection, en partenariat avec les Maisons de quartier de la ville, propose cette année encore un choix à la fois éclectique et pointu. Il y aura du romantisme, avec Carol (Todd Haynes, 2016), histoire d’amour entre deux

Carol, de Todd Haynes © Wilson Webb - Number 9 Films

femmes de milieux différents dans l’Amérique étriquée des années 50 (n’y verra-t-on pas un funeste retour à une situation qui semble se répéter aujourd’hui ?...), la folie comique et tellement émouvante de Victoria (Justine Triet, 2016), avocate renommée qui ne parvient pas à vivre les choses simples du temps qui passe, l’impressionnante Alma qui réussira à renouer les liens familiaux autour de son grand-père adoré (L’Olivier, Iciar Bollain, 2016),… Des documentaires aussi : Sonita, de Rokhsareh Ghaem Maghami, multiprimé au Sundance film festival 2016, qui suit le parcours

d’une jeune afghane clandestine en Iran dont le rêve est de chanter, envers et contre les traditions culturelles. Les volleyeuses de l’équipe norvégienne Les Optimistes (Gunhild Westhagen Magnor, 2015) défient elles aussi tous les codes : elles ont entre 66 et 98 ans, et sont bien décidées à jouer et profiter furieusement de leur présent. Les élèves de 1ère Option Cinéma du lycée Jean Lurçat proposent leurs Jeunes regards, sélection de 4 courts-métrages suivi de la projection du film de Radu Mihaileanu, La source des femmes (2011) À conjuguer au féminin. ANNA ZISMAN

10e Festival Regard de femmes 8 au 11 mars Cinéma Jean Renoir et Cinémathèque Gnidzaz, Martigues 04 42 10 82 90 ville-martigues.fr


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Manosque au soleil levant A

ux Rencontres cinématographiques de Manosque, on a la chance de voir des films inédits tels La deuxième nuit d’Eric Pauwels, ou des avant premières comme Le Concours de Claire Simon. Mais aussi des films peu diffusés en France, tel Saudade de Katsuya Tomita, un des deux cinéastes japonais invités pour cette 30e édition.

Paradis perdus Sorti en 2011 au Japon, à un moment où le pays était en pleine crise, Saudade, que ce réalisateur, chauffeur routier par ailleurs, a tourné tous les week-ends durant un an et demi avec ses amis d’enfance, laisse un goût amer. Il y suit de jeunes ouvriers du bâtiment aspirant à une vie meilleure. « La Thaïlande c’est le paradis. » Seiji délaisse sa compagne, pour une hôtesse thaïlandaise rencontrée dans un bar qu’il fréquente assidument avec son ami Osaka. Takeru, lui, fait partie d’un groupe de hip hop à tendance nationaliste qui veut défier un groupe de la communauté Bangkok nites, de Katsuya Tomita © Survivance brésilienne. Un montage « au couteau » nous fait passer d’un groupe à l’autre, d’un couple à un autre, du japonais au thaï ou au portugais, montrant la complexité de la ville d’enfance du cinéaste, Kōfu, superbement filmée, où des gens se rencontrent, s’aiment, se haïssent, à travers le regard de jeunes un peu perdus et souvent en souffrance. Le film, porté par ses acteurs non professionSayonara, de kôji Fukada © Survivance nels et par les compositions d’un groupe de hip hop de Kōfu, a bien le ton filme pas les scènes de sexe mais les moments mélancolique de la saudade. où elles se vendent, leurs conversations ; C’est par un « Bangkok…shit ! » lancé par l’une d’entre elles confie que les clients ont une jeune femme à la fenêtre d’un luxueux mauvaise haleine ou bavent quand ils lui appartement, d’où l’on aperçoit les tours lèchent les seins. Parmi eux, il y a Ozawa illuminées des multinationales de la capitale (interprété par le réalisateur lui-même), vétéran thaïlandaise, que commence Bangkok Nites. des Forces japonaises d’autodéfense, le seul La femme c’est Luck (Subenja Pongkorn), dont Luck refuse l’argent. Elle en était tombée « numéro 1 » d’un bordel de la rue Thaniya amoureuse cinq ans auparavant et le retrouve destiné à une clientèle japonaise, venue, dès dans un bain de mousse ! Quand Ozawa doit ses 16 ans, de l’Isan pour subvenir aux besoins partir en mission au Laos -repérage pour un de sa nombreuse famille. Luck et ses collègues, hospice de luxe, paradis pour les vieux !-, Luck professionnelles du sexe, leurs patrons, leurs l’accompagne et va le présenter à sa famille. rabatteurs, le cinéaste les a approchés durant Katsuya Tomita nous emmène alors, en 4 ans et leur a proposé de jouer leur propre rôle de longs travellings, dans cette campagne dans une démarche quasi documentaire. Il ne du Nord-est de la Thaïlande, proche de la

frontière laotienne, le long du Mékong, sur les terres magiques du cinéma d’Apichatpong Weerasethakul. On y croise des fantômes nocturnes qu’Ozawa est le seul à voir, un homme énigmatique, des ombres fuyant dans la forêt… Au Laos, Ozawa découvrira les cicatrices de la guerre, les cratères qu’ont creusés les bombes américaines devant lesquels des rappeurs, comme dans Saudade, chantent leur misère ou leurs revendications. Durant trois heures, Bangkok Nites nous aura proposé un voyage intense, bouleversant, superbe, à pied, en tuk-tuk, en péniche, de jour et de nuit surtout, dans ce « paradis perdu ».

Solitudes Autre réalisateur venu du pays du soleil levant, kôji Fukada, qui avait enchanté les Rencontres 2015 avec une chronique douce amère à la mode rohmérienne Au revoir l’été, et un Ga-nime (concept d’animation qui utilise dessin, peinture, musique) où le réalisateur donnait vie à 70 tableaux de Fukazawa, La Grenadière. Il présentait cette année Harmonium, Prix du jury à Un Certain regard et, en avant première, Sayonara. Deux films très différents sur la solitude humaine. Le premier terrible, cruel, raconte l’implosion d’une famille à l’arrivée d’un mystérieux étranger, fantôme d’un passé


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L’Orient glauque et refoulé, révélateur du malaise du couple et des désirs de chacun. Un scénario très écrit -Rohmer demeure le maître de Fukada-, mis en scène comme une partition, sur le rythme impulsé par le métronome avec lequel la fillette de la maison travaille son instrument, un film où la position des personnages dans le plan et le code couleur suffiraient presque à décrypter le récit, où la violence sourd de chaque plan sous le polissage social, où la culpabilité ouvre des béances vertigineuses. Le second transforme une pièce d’Oriza Hirata de 15 min en un film de 2h27 d’une beauté sidérante. Dans un Japon frappé par l’explosion des centrales nucléaires s’organise l’évacuation de la population vers le reste du monde, selon des critères sociaux très stricts. Certains ont peu de chances d’être choisis. En raison de leur passé, de leur statut, de leur état, comme Tania, jeune femme blanche, malade, née en Afrique du Sud, venue au Japon enfant avec sa famille pour fuir la vengeance des Noirs libérés de l’apartheid. À l’écart de la ville, entre champs et forêt, Tania vit dans une maison isolée avec son androïde Leona, aux jambes endommagées, qui se déplace en fauteuil roulant. Tania attend son fiancé d’origine coréenne qui partira, une amie japonaise qui ne partira pas, la floraison miraculeuse des bambous et une mort certaine. Léona la nourrit, converse avec elle, et pour accompagner, soulager, conjurer sa solitude, lui récite du Rimbaud, du Wakayama, du Carl Busse. Le robot au masque impassible (un vrai robot Geminoid F, dirigé comme un acteur), qui a mémorisé les émotions de sa maîtresse depuis des années, sait-il ce qu’est la beauté ? Cadrée en plan fixe sur un canapé devant une fenêtre, auréolée de soleil, allongée dans le contrejour, sculptée par les ombres, saisie dans des travellings en vélo dans la lumière poudrée des graminées, vue de dos posant sa main doublée de noir sur les images vidéo de son enfance, ou encore en gros plans, déformée par des anamorphoses, la blonde Tania fait ses adieux à un monde irradié et splendide. Palette des ocres, et des bleus, dramaturgie du ciel changeant, le temps se fait lumière. Magnifique travail de la chef op Akiko Ashizawa. Magnifique film qui sublime la fin de l’humanité. Sayonara, ce titre renvoyait aux Rencontres, les dernières. Tout comme le film de clôture : Poesia sin fin de Jodorowsky. Le réalisateur de 88 ans, qui n’avait pu se déplacer, a envoyé un message à Pascal Privet et à son équipe ovationnés par le public qui, même si mémoire et poésie demeurent, sait que la perte est lourde. ANNIE GAVA ET ELISE PADOVANI

à la portée de tous

Diamond Island, de Davy Chou © Les Films du losange

L

es cinémas de Scènes&Cinés -à Fos, Grans, Istres, Miramas et PortSaint-Louis- accueillent la 9e édition de la manifestation Panorama, qui a pour thème Les cinémas d’Extrême-Orient. Après avoir parcouru les univers des cinémas des pays d’Europe -Allemagne, Espagne, Italie, Royaume-Uni, Belgique… et celui du cinéma américain indépendant-, il fallait agrandir le cercle et aller voir plus loin. Alain Bombon, directeur artistique de Scènes&Cinés et du Panorama, pour qui le propos, chaque année, « est d’essayer de donner une image de la production d’un pays ou d’une région à un moment donné », explique que le cinéma d’Extrême-Orient (à savoir japonais, chinois, coréen et philippin) offre « une grande diversité entre auteurs qui font partie du patrimoine, avec aussi bien des films de grand spectacle que des films de genre ». Contrairement aux années précédentes, les films retenus couvrent une période plus large : ceux qui sont sortis en salle il y a un ou deux ans, ou prévus d’ici le mois de juin, côtoieront des films plus anciens dont les copies sont restaurées et rééditées en numérique. C’est notamment le cas de Sanjuro et de Ran, d’Akira Kurosawa et de Tampopo de Juzo Itami. Autre nouveauté, et de taille, les interventions des professionnels invités à présenter chacune des soirées organisées dans tous les cinémas s’apparenteront à de passionnantes « leçons de cinéma », compte tenu de la spécificité de ce cinéma « dont la culture nous est plus lointaine » rappelle Alain Bombon. Ainsi, lors de l’ouverture le 10 mars, Jean-Michel Frodon (journaliste et enseignant) présentera le cinéma d’Extrême-Orient en le resituant dans le cinéma contemporain mondial, avant la projection de Diamond Island de Davy Chou ; l’historien Dominique Chansel interviendra lors de deux soirées, dont une traitera de la place du repas et de la cuisine dans ce cinéma ; Pierre-Alex Vincent (spécialiste du cinéma japonais) lors d’une soirée dédiée au film de sabre… ainsi que les journalistes Mathieu Macheret et Vincent Tabouret pour d’autres soirées. Petit aperçu de quelques-uns des 28 films qui seront projetés, en VO, sauf rares exceptions : Vers l’autre rive de Kiyoshi Kurosawa, Harmonium de Kôji Fukada (en avant première), Yourself and yours de Sang-soo Hong, The Strangers de Na Hong-jin, Notre petite sœur de Hirokazu Koreeda, Ta’anh, un peuple en exil entre Chine et Birmanie de Wang Bing ; et pour le jeune public, entre autres, Mon voisin Totoro, Princesse Mononoké et Le Voyage de Chihiro de Hayao Miyazaki. DOMINIQUE MARÇON

Les Rencontres cinématographiques de Manosque ont eu lieu du 31 janvier au 5 février

Panorama – Les cinémas d’Extrême-Orient du 10 au 19 mars Fos, Grans, Istres, Miramas et Port-Saint-Louis scenesetcines.fr


74 critiques arts visuels

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Di Rosa en forme et en creux Soixante-dix artistes, plus de deux cents œuvres, et un portrait. Celui d’Hervé Di Rosa, célébré au Musée International des Arts Modestes (MIAM) qu’il a fondé dans sa ville natale de Sète

Lydie Jean Dit Pannel, Chambre à louer © Pierre Schwartz

C

’est un beau portrait en creux qu’a élaboré Julie Crenn, commissaire de l’exposition En toute modestie – Archipel Di Rosa. L’exercice était compliqué : principal inventeur du mouvement de figuration libre dans les années 80, il revendique, depuis la création du MIAM en 2000, de faire œuvre en diffusant cet art qu’il a nommé modeste. « Mon œuvre, c’est ce musée, où je ne suis pas. » Sous la douce pression du conseil d’administration, l’artiste a cette fois accepté que son nom soit associé à la nouvelle exposition, confiée à une jeune commissaire « totalement extérieure à notre cercle, et d’une autre génération. » Julie Crenn a choisi de présenter une profusion de productions qui dialoguent avec le parcours du sétois (dont seulement 6 œuvres sont exposées ici). La notion d’art modeste est élégamment traitée, sans l’aborder de front. Il ne s’agit pas ici de définir une énième fois ce que modeste signifie dans le paysage artistique contemporain, mais bien de réunir une multitude d’énergies créatrices qui s’inscrivent dans une mouvance à la fois amicale et patrimoniale, qu’elle a su retrouver dans le travail d’artistes plus jeunes. Cet archipel constitue une contrée

extrêmement riche, et les rencontres entre les œuvres sont finement présentées. La liste des artistes exposés impressionne. « Jamais je n’aurais imaginé présenter un jour des œuvres de Dubuffet, Hockney, ou Léger ! » En tissant des liens pertinents entre les courants et les influences, entre les sujets mêmes des œuvres, en se permettant de subtils clins d’œil (titres qui se répondent, images qui se prolongent

d’un tableau à l’autre, amis qu’elle expose côte à côte) Crenn a su se dégager de l’exercice hagiographique et invite les visiteurs à découvrir la contrée mouvante et sans cesse renouvelée de cet art dit modeste. Belle entrée en matière avec l’installation Chambre à louer (Lydie Jean dit Pannel) : un mur couvert de centaines d’écriteaux suspendus aux portes d’hôtels. « Ne pas déranger », décliné

Voyages Vecteur, l’exposition en cours à la Fondation Vasarely ne manque pas d’intérêt mais laisse un certain goût d’incomplétude

C

’est une proposition intéressante que cette exposition de Jean-Pierre Husquinet, par sa convergence avec le projet de Victor Vasarely d’imbriquer art et science, mais qui souffre d’une présentation peu convaincante et au potentiel sous exploité. Voyages Vecteur est constituée d’une trentaine de dessins géométriques vectorisés réalisés grâce à des programmes informatiques rappelant formellement les mandalas, et de trois installations distinctes. Un « Champ étendu », fait de cordages polychromes noués sur tiges métalliques comme autant de fleurs artificielles. « Champ étendu est une installation de trente deux nœuds multipliés par trois ( qui représentent 3 instruments), chaque nœud étant un

accord musical, la forme du nœud représentant l’instrument » ; un empilement de 450 tasses en verre dépoli servant de support à une forme géométrique en rosace inachevée, qui rappelle les dessins vectoriels exposés au mur ; une sorte de puzzle/ plancher gigantesque composé d’une vingtaine d’éléments découpés dans des plaques de bois en forme de flocon de neige démesurés. Si chaque pièce retient un certain intérêt, l’ensemble ne convainc pas complètement, comme le titre de l’exposition qui reprend les initiales du fondateur de la fondation éponyme. « Le «fil conducteur» (sans

Jean-Pierre Husquinet, Voyages Vecteur, vue partielle de l’exposition, Fondation Vasarely, 2017. © C.Lorin/Zibeline

De l’inachèvement

mauvais jeu de mots) de l’ensemble des pièces et mes préoccupations principales tournent autour du labyrinthe, du nœud, tissage, nouage, etc... J’aime cette idée de réseau/fragmentation, relier ce qui est épars » précise Jean-Pierre Husquinet dans une note. Pourtant, on reste bien perplexe devant cette hétérogénéité et


dans une multitude de langues, d’alphabets, de graphismes, de couleurs. Défendre une intimité de plus en plus difficile à préserver, et revendiquer le droit momentané de s’abstraire des folies du monde. Le mur de la salle principale est lui aussi totalement investi par des centaines de productions. À lui seul, il constitue une installation muséographique remarquable (réalisé avec la scénographe Morgan Denzler). Depuis le rez-de-chaussée, les escaliers ou le premier étage, on peut suivre des chemins différents entre les artistes, les matières, les époques. Les sculptures, vidéos, broderies, tapisseries, dessins, peintures, ready-made, et photos s’agrègent les uns aux autres, produisent un discours puissant. À l’inverse d’un aplatissement, le mélange dans l’accumulation propose un tout qui multiplie les sens. En face, les œuvres sont disposées plus classiquement. Immense richesse aussi. Ton tour est terminé, de Gretel Weyer, fascine. Un âne supposé en plastique, éventré, ses entrailles de bonbons éparpillées au sol : la corde de la piñata a cédé. Le tout en céramique couleurs acidulées. Glaçant. Les Ponsées, contraction de poncé et pensées, de Régis Perray émaillent le parcours. Il chine des « croutes », ces tableaux de peintres du dimanche, et les ponce, jusqu’à obtenir un motif qui raconte une autre histoire. Le support lui-même évolue, la toile réapparait sous les coups de pinceau, pixélise l’image, fragilise le sujet, impose le doute. L’art modeste poétisé. ANNA ZISMAN

En toute modestie – Archipel Di Rosa jusqu’au 17 septembre MIAM, Sète 04 99 04 76 44 miam.org

le lien ne se fait pas solidement, d’autant que le visiteur est laissé quasi sans information (quelques documents plutôt elliptiques, masquant quelques livres posés dans une vitrine) et desservi par une mise en espace bien pauvre. On aurait imaginé notamment un projet spécifique plus en rapport avec le lieu. En particulier grâce aux possibilités offertes par le travail des cordages polychromes (l’artiste en est spécialiste) dans un projet de structuration de l’espace architectural, rejoignant par là les réflexions de Victor Vasarely en ce domaine. Ce sentiment d’insatisfaction est d’autant plus présent que la fondation tente de retrouver un second souffle, non seulement par la réhabilitation du bâtiment et des œuvres monumentales, mais aussi à travers une programmation construite en grande partie autour des technologies (collaborations diverses comme avec l’école des Beaux-Arts de la ville ou l’association tournée vers les arts numériques Seconde Nature, par exemple). Il serait dommage que ce renouveau ait un goût d’inachevé. CLAUDE LORIN

Voyages Vecteur jusqu’au 5 mars Fondation Vasarely, Aix-en-Provence 04 42 20 01 09 fondationvasarely.org

collectifs.paca@


76 critiques arts visuels

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Les unes avec les autres Zawieja et Betty Woodman - d’horizons différents, mais qui s’inscrivent dans la même direction artistique que la célèbre peintre, figure importante de l’abstraction géométrique. Sous le commissariat de Romain Mathieu, et sur une proposition de la galerie Béa-Ba, Les unes avec les autres... à Shirley Jaffe confronte une diversité d’œuvres proches visuellement mais aux techniques, supports, dimensions, Vue d’exposition, Armelle de Sainte Marie, Odyssée 29, acrylique sur toile 162 x 130 cm, 2016 Olympe, acrylique sur toile 162 x 130 cm, 2016, © Amélie Raux matériaux, formes et couleurs différents. Restent en commun usqu’au 25 mars, la Galerie du 5e fait « une façon d’envisager le protocole » avec la place aux femmes ! En hommage à l’artiste « volonté farouche de peindre » (Armelle de américaine récemment disparue Shirley Sainte Marie), un regard féminin sur le monde, Jaffe, qui vivait en France depuis 1949, le 5e sur l’art contemporain, un engagement dans étage des Galeries Lafayette réunit les œuvres l’abstraction, manière de « jouer avec les limites de 9 artistes contemporaines – Marie-Claude et les frontières en les franchissant » (Marie Bugeaud, Claire Colin-Collin, Nathalie Ducate). Le commissaire n’a pas cherché à Da Silva, Armelle de Sainte Marie, Marie faire valoir une « esthétique commune » ; c’est Ducaté, Yigat Gat, Julia Scalbert, Marie la démarche, le processus qui rassemblent

J

ces œuvres, l’acte créatif, le cheminement, un positionnement en tant qu’artiste et en tant que femme. Une rencontre s’opère entre artistes et entre leurs productions. Ainsi Olympe d’Armelle de Sainte Marie, acrylique sur toile, objet mouvant, figure en mouvement, abstraction vibrante à la fois minérale, aquatique et organique, dialogue avec une œuvre textile de Marie Ducate, une soie teintée, vive et nuancée, où limites et contours se perdent dans l’expressivité de la couleur. Cette exposition sera aussi, le 8 mars, le théâtre de rencontres et performances, à l’occasion de la Journée de la Femme. Certaines artistes de l’exposition seront présentes pour discuter et débattre des enjeux et du statut de la femme artiste, dans la peinture contemporaine particulièrement. AMÉLIE RAUX

Les unes avec les autres... à Shirley Jaffe jusqu’au 25 mars La Galerie du 5e, Galeries Lafayette, Marseille 04 96 11 35 00 galerielafayette.com

le cadre de la manifestation Femmes en Mouvement, Introspections Dans l’exposition Immersion Sensibles propose une édition

E

n passant de la chapelle Sainte-Anne au Palais de l’Archevêché, de l’autre côté de la place de la République, cette quatrième édition ambitionne de dépasser les références habituelles liées au féminin selon le souhait de sa commissaire, Clémentine Feuillet. Les repères usuels liés au genre, les phantasmes et stéréotypes accolés au féminin, le plus souvent attachés à un premier regard, sont donc pour cette fois mis au ban. Le projet structure un parcours suivant six thématiques conçues à partir de la notion de temps : poétique, actuel, mémoire, symbolique, imaginaire, énigme. Invitant dix-neuf artistes (14 femmes, 5 hommes), l’exposition est l’occasion d’entrer en affinité avec des approches et des médiums artistiques pluriels – peinture, sculpture, vidéo, installations et comme pour les éditions précédentes, principalement la photographie. Alyz Tale ou Jean-Pierre Maurin développent une vision décalée empruntée du monde de la mode. Mayliss et Lukas Zpira interrogent le rapport pèrefille lors de leurs nombreux voyages autour du monde. Les jeunes filles sont les sujets de Karine Degiorgis ou Charity Thomas, qui laisse entrevoir « l’étrangeté du temps

ouverte sur la temporalité de l’intime et de la diversité des féminismes.

© Charity Thomas

qui s’écoule d’un point à un autre de l’espace et des sentiments ». On remarquera aussi la recherche singulière chargée de spiritualité de l’artiste iranienne Sajede Sharife dans une lecture du Coran à contre-courant. Dans un travail plus plasticien, Stéphanie Gerbaud réinvente des objets-livres, uniques et précieux, quand la série sur l’ouïe de Cécile Hug concilie esthétique minimaliste et naturalisme poétique. Mélanie Fontaine a conçu pour

l’occasion une installation visible depuis des fenêtres et de nuit. Marie Docher présentera la série photographique « Au commencement » et sera à la médiathèque d’Arles pour la projection de son film documentaire « Ni vues, ni connues » suivie d’un débat avec le public. A travers les témoignages de cinq photographes et une plasticienne confrontées aux stéréotypes de genre dans leur métier, la réalisatrice questionne la visibilité des femmes dans la photographie. Samedi 11 février à 14h, puis vernissage au Palais de l’Archevêché à 18h. CLAUDE LORIN

Immersions sensibles jusqu’au 18 mars Palais de l’Archevêché, Arles 06 76 99 69 44 immersionsensibles.blogspot.fr


Zone de sécurité temporaire Exposition 4 mars—29 mai 2017

Anne-Marie Filaire Mucem Mucem.org

Esplanade du j4, 7 promenade Robert Laffont, 13002 Marseille

Design : Spassky Fischer

Sérigraphie : Lézard Graphique


78 au programme arts visuels

Anne-Marie Filaire Les lieux du conflit : entre Israël et la Palestine (1999-2007), après la guerre israëlo-libanaise (2006), à la frontière jordano-syrienne (2014), autant d’espaces essorés, marqués par l’affrontement, qui sont le décor et le corps des photographies d’Anne-Marie Filaire. Cherchant lumière et violence dans le paysage, son travail s’articule autour d’une réflexion sur les frontières et zones tampons, ces espaces communs, politiques et divisés qui déterminent une place, une propriété, une identité individuelle. Un regard d’artiste sur des espaces quadrillés par les photo-reporters. A.R. Zone de sécurité temporaire du 4 mars au 29 mai Fort Saint-Jean, Marseille 04 84 35 13 13 mucem.org Désert du Danakil, Érythree, novembre 2001 © Anne-Marie Filaire

Ouverture La création d’un espace d’exposition permanent vient concrétiser sept ans de collaboration artistique entre le Centre Richebois et l’association pour l’art contemporain voyons voir. Une première avec les œuvres d’artistes impliqués dans cette aventure : Vincent Bonnet, Gilles Gerbaud & Aude Lavenant, Franck Lesbros, Yazid Oulab, Emilie Perotto, Arnaud Vasseux. Et une programmation à suivre tout au long de l’année. C.L. Entrée en matières, avec vue imprenable jusqu’au 31 mars Centre Richebois, Marseille 04 42 38 73 46 voyonsvoir.org Entrée en matières, avec vue imprenable, Centre Richebois, vue partielle de l’exposition, œuvres de Gilles Gerbaud, Aude Lavenant, Arnaud Vasseux. © voyons voir

Le ciel et l’eau Peintre de Venise et Constantinople, admirateur de Claude Gelée dit « Le Lorrain » Félix Ziem n’a eu de cesse de restituer les impressions offertes par la fusion de ces deux éléments. Une sélection issue du fonds permanent du musée constituée principalement de marines évidemment, et d’un surprenant « Vol de mouettes ». En parallèle, présentation d’une partie de la collection Edmond Bigand-Kaire (Rodin, Claudel, Moreau…) dont plusieurs œuvres graphiques, très fragiles à la lumière, présentées exceptionnellement. C.L. Félix Ziem, entre terre et mer 15 février au 23 avril Musée Félix Ziem, Martigues 04 42 41 39 60 ville-martigues.fr Félix Ziem, Vol de mouettes, 1870-1880, huile sur toile, 69x81 cm, musée Ziem, Martigues © Gérard Dufrêne

Vincent, Alice et Rebecca La nouvelle programmation de la Fondation Van Gogh met en jeu tradition et innovation dont l’œuvre de Van Gogh serait emblématique, avec sept peintures issues de la collection de l’industriel suisse Emil Bührle, complétées par L’Entrée dans une carrière, prêt annuel du musée d’Amsterdam. L’artiste américaine Alice Neel a côtoyé les révolutions esthétiques du XXe tout en préférant la figuration humaine, dont un singulier portrait d’Andy Warhol mis (presque) à nu. Un Totem monumental en bronze de Rebecca Warren accueillera les visiteurs dès la cour d’entrée. C.L. Calme et exaltation, Van Gogh dans la collection Bührle Alice Neel : peintre de la vie moderne 4 mars au 17 septembre Fondation Van Gogh, Arles 04 90 93 08 08 fondation-vincentvangogh-arles.org

Ginny et Elizabeth, 1975 Huile sur toile, 106,7 x 76,2 cm Succession d’Alice Neel © Ethan Palmer


Léo Lelée C’est la lumière de la Provence et la passion pour une Arlésienne qui le feront s’installer dans le pays d’Arles. Une soixantaine d’œuvres, peintures, affiches et dessins dépeignent le parcours de cet illustrateur influencé par l’Art Nouveau, le japonisme, l’Orient, entre tradition et modernité, remarqué par Mistral et renommé pour ses portraits d’Arlésiennes et de gitans. C.L. Léo Lelée, Regard d’un esthète entre tradition et modernité 11 février au 5 juin Musée de Région Auguste Chabaud, Graveson 04 90 90 53 02 museechabaud.com

Léo Lelée, Pas de danse, 1937, gouache sur papier, 60x40cm. © Musée Chabaud/Jérémy Laïdi

Inauguration

À Nice, clic de fin pour le Théâtre de la photographie et de l’image mais pleine ouverture le 16 février à 17 heures pour un nouveau lieu, place Pierre Gautier. La programmation s’appuiera sur des expositions monographiques ou thématiques, œuvres de toutes époques et tendances jusqu’au numérique et promotion des jeunes talents. L’œuvre ô combien iconique d’Helmut Newton a été choisie pour inaugurer l’événement. C.L. Helmut Newton – Icônes 17 février au 28 mai Musée de la Photographie Charles Nègre, Nice 04 97 13 42 20 museephotographie.nice.fr

Helmut Newton, Amica, Mailand, 1982 © Helmut Newton Estate

Road-trip Première exposition d’un cycle consacré à la photographie américaine au Pavillon Populaire, Notes sur l’asphalte réunit six chercheurs (architectes, urbanistes, paysagistes) qui ont accumulé une matière photographique documentaire d’une richesse exceptionnelle. 200 photographies de Donald Appleyard, John Brinckerhoff Jackson, Allan Jacobs, Chester Liebs, Richard Longstreth et David Lowenthal, entre catalogue scientifique et regard sensible. A.R. Notes sur l’asphalte, une Amérique mobile et précaire, 1950-1990 jusqu’au 16 avril Pavillon Populaire, Montpellier 04 67 66 13 46 montpellier.fr

Station-service et magasin de souvenirs, Route 66, McLean, Texas, novembre 1972 © Richard Longstreth

Jonathan Meese Place à l’artiste déjanté Jonathan Meese au Carré Sainte-Anne. Univers outré, violent, burlesque, chaos de formes et de couleurs, mise en scène de sa propre folie, les ingrédients de son succès se retrouvent dans cette exposition articulant œuvres éphémères, installations et peintures sur toiles autour d’inspirations légendaires (Arthur) et cinématographiques (Kubrick) ou littéraires (Sade). Pertinent et sulfureux. A.R. Dr. Merlin De Large (Marquis Zed de Baby-Excalibur) 15 février au 30 avril Carré Sainte-Anne, Montpellier 04 67 60 82 11 montpellier.fr

MAN KANN ES TROTZDEM MACHEN... (K.U.N.S.T.), 2016 © Photography Jan Bauer.net Courtesy Jonathan Meese.com


80 critiques livres

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« Cet enfoiré de sa mère ! »

«

Cet enfoiré de sa mère », c’est Antoine Lazenec, un promoteur immobilier véreux, qui a mis sur la paille une petite ville de bord de mer. Beaucoup ont investi dans ce projet chimérique, dans des appartements avec vue imprenable… qui ne verront jamais le jour. Martial Kermeur est de ceux-là : comme si son divorce ne suffisait pas, sa prime de licenciement part ainsi en fumée. Un jour, au comble de l’exaspération, face à une surenchère de mauvaises nouvelles et cette fripouille que rien n’arrête, il commet le pire en le jetant par-dessus le bastingage de son Merry Fisher... C’est irréparable, mais ça soulage ! Le roman commence par ce meurtre, puis remonte aux sources du mal : Martial raconte en détail les événements au juge chargé de son procès. Il vide son sac, déverse des années de frustrations dans un monologue haletant, touchant, sincère : il est ce mari qui joue au loto les mêmes chiffres depuis des années sauf le jour où ils sortent enfin, ce père qui défaille à l’occasion d’un incident de manège... Martial est vulnérable,

en plus profond, de plus en plus cinglant, jusqu’au coup de théâtre final pour mieux nous interroger sur un quotidien qui trop souvent lamine le commun des mortels pris dans la tourmente d’un système économique ogresque, porte ouverte de tous les abus, toutes les dérives. On pense par ricochets aux Nouveaux Sauvages de Damiàn Szifròn, série de courts-métrages mettant en scène des personnages au bout du rouleau, au bord de la crise de nerfs, et qui, ne pouvant avaler une couleuvre de plus, disjonctent, transgressent, se déchaînent ! Alors pour qui a rêvé un jour, pour une raison ou une autre, de passer à l’acte, pas d’hésitation, c’est le livre qu’il vous faut ! attendrissant, un anti-héros, un monsieur Tout-le-monde, votre voisin, vous peut-être ! Belle réflexion sur la crédulité, la paternité, la justice et l’humanité, le dernier roman de Tanguy Viel surprend, monte en puissance l’air de ne pas y toucher, avec force et élégance. L’écriture est vive, incisive, farceuse, douceamère ; le propos s’épaissit, se veut de plus

MARION CORDIER

Article 353 du code pénal Tanguy Viel Les Editions de Minuit, 14,50 €

Comment peut-on être facho ?

C

ette question, Philippe Pujol se la pose depuis longtemps. Parce que l’extrême-droite n’est pas vraiment sa tasse de thé : longtemps journaliste à La Marseillaise, collaborateur à Libération et autres médias de gauche, le lauréat du prix Albert-Londres 2014 n’est pas connu pour ses sympathies ultra nationalistes. Et parce que son cousin germain, Yvan Benedetti, lui, l’est. Et pas qu’un peu. Leader du plus extrême des partis fascistes français, l’Œuvre française (dissoute aujourd’hui). Tellement radical qu’il a été exclu du FN, c’est dire. D’où cet ouvrage que l’auteur de La fabrique du monstre appelle « récit ». Mon cousin le fasciste évoque les liens étranges qui unissent ceux que l’on appelait autrefois en Corse Gros Patapouf et Fifounet. Des liens familiaux indéfectibles, en dépit de divergences idéologiques abyssales. Il retrace aussi quelques épisodes d’un voyage en pays fasciste. Une petite dizaine de chapitres, dont les titres reprennent des phrases prononcées par le cousin, du genre « Je suis antisioniste, antisémite, antijuif » ou « De Gaulle, c’était un

général de merde ! » et donnent le ton : direct, familier, comme le sont les rapports des deux hommes. De veillées d’armes en pérégrinations fascistes, le texte est brutal, mais souvent drôle. Ainsi la baston que Pujol a involontairement déclenchée lors de l’inauguration d’une stèle commémorant l’OAS au cimetière de Marignane ou le pèlerinage sur l’île d’Yeu

en hommage à Pétain. La description de la « volaille » nostalgique de l’Algérie française, celle des cathos intégristes nostalgiques du Maréchal sont franchement comiques. La visite au chef de la Phalange espagnole à Madrid l’est beaucoup moins et la métamorphose du cousin saisissante : « Un vérin puissant aux mâchoires, une bataille dans le regard. Gros patapouf avait disparu. » Saisissante, la fin du récit, intitulée « La période nous est très favorable », l’est également. Car la doctrine d’Yvan « rien de moins qu’instaurer une dictature en France » a un « pouvoir de fascination » terrifiant. Un récit à lire pour mieux comprendre cette idéologie nauséabonde. Et résister. FRED ROBERT

Mon cousin le fasciste Seuil, 15 €

Philippe Pujol


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Toujours des histoires d’amour mais pas que…

L

ors des Correspondances de Manosque, une rencontre réunissait Clémentine Beauvais et Arnaud Cathrine, dont les derniers livres étaient sélectionnés pour le Prix littéraire des Adolescents des Alpes de Haute Provence. Ils ont en commun de mettre en lumière des adolescents d’aujourd’hui qui utilisent les SMS, les réseaux sociaux, se replient sur leurs premiers émois amoureux, consomment alcool et pétards à l’occasion. La parenté des deux livres s’arrête là. Clémentine Beauvais réussit brillamment un exercice étonnant. Elle s’est lancé le défi de moderniser Eugène Onéguine, le fameux roman en vers de Pouchkine ; elle utilise le vers libre et l’alexandrin, conserve les situations mais modifie la fin. Retrouvant par hasard Tatiana, Eugène flashe sur celle qu’il avait repoussée dix ans auparavant et les rôles s’inversent. L’histoire intimiste est banale, mais la forme est tonique et originale : alternance des paroles des personnages avec leurs pensées rédigées dans des registres

ados sont confrontés à la réalité des horreurs du terrorisme, au racisme, à la montée des idées du Front National et basculent brutalement du monde de l’adolescence à celui des adultes, celui des engagements. Arnaud Cathrine a déclaré s’intéresser à la confrontation entre l’émoi amoureux, le « regard désirant » et la violence de notre société. Laissons-lui la parole : « Un livre ne change pas le monde mais il n’est pas là pour rien ». CHRIS BOURGUE

différents, calligrammes, écriture manuscrite, interventions loufoques de la narratrice, emprunts à des poètes connus… Arnaud Cathrine, quant à lui, adopte un récit à la première personne. Caumes est en terminale, il a trois super copains et tombe amoureux dingue d’Esther. La force de ce roman vient de ce qu’il s’inscrit dans l’histoire contemporaine, celle des événements de 2015, des attentats de Charlie et de l’hypermarché cascher. Ces

Songe à la douceur Clémentine Beauvais Sarbacane, 15,50 € À la place du cœur, saison 1 Arnaud Cathrine Robert Laffont, 16 € La remise du prix se fera le 18 mai dans le cadre de la Fête du livre Jeunesse qui aura lieu en mai à Manosque et Forcalquier. eclatdelire.eu croqlivres.blogspot.fr

Les mots en plein cœur

C

ourt, percutant et passionné. Le troisième roman de la jeune Julia Kerninon est sorti début janvier. Une histoire d’amour. Non pas d’un amour humain comme c’était le cas dans Le dernier amour d’Attila Kiss

(Prix Closerie des lilas 2016, voir Zib 94), mais de celui pour les livres et l’écriture. Dès son plus jeune âge, Julia Kerninon a été plongée dans les livres et les mots. On l’imagine jouant avec un livre plutôt qu’avec une poupée. Elle évoque sa découverte émerveillée, à l’âge de 5 ans, de la librairie Shakespeare and Company à Paris, sa fascination, puis sa dévoration de tout ce qui est écrit, depuis les étiquettes et notices jusqu’aux livres, les soirées et les week-ends dédiés à la lecture avec ses parents, chacun dans son espace, leur île déserte. La lecture la faisait se sentir « complète », dit-elle. Elle raconte aussi qu’à 16 ans elle faisait des lectures en compagnie de vieux poètes. Tombée dans les mots comme d’autres entrent en religion, il y a du sacré dans sa façon d’aborder l’écriture. Ainsi à 20 ans, en 2007, elle s’exile une année à l’étranger, sans aucun contact, pour savoir si elle est capable de devenir véritablement écrivain :

« seule au monde », elle écrira deux livres à Budapest. Elle paiera cette liberté d’écrire en travaillant comme serveuse tous les étés jusqu’à l’acceptation de son roman Le buvard au Rouergue en 2014, qui obtiendra le Prix Françoise Sagan. On est séduit par cet itinéraire militant de l’écriture que résume une phrase des dernières pages du livre : « J’arpente la littérature comme un champ dans lequel mes pas laissent l’herbe ployée un instant derrière moi, juste le temps de voir le chemin parcouru, et l’immensité encore inconnue. ». Cela nous promet encore de belles découvertes et de beaux partages ! CHRIS BOURGUE

Une activité respectable Julia Kerninon La brune au Rouergue, 9,80 €


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Le halal, une invention fondamentaliste et néolibérale

L

’anthropologue Florence Bergeaud-Blacker travaille à l’Institut de recherches et d’études sur le monde arabe et musulman (Aix-Marseille Université). Ces vingt dernières années, elle a étudié en profondeur le marché halal, et livre ici un ouvrage extrêmement documenté sur la question. Où l’on apprend que loin de s’appuyer sur une tradition millénaire, le business des aliments ou objets « licites » ou « permis » (à opposer au haram : interdit, sacré) est né à la fin du XXe siècle, sous l’influence du fondamentalisme musulman, la néo-orthodoxie salafiste. Pendant des centaines d’années, les exégètes du Coran n’ont pas édicté de règles, mais proposé des lectures : « Le licite de la théologie était une liberté qui ouvrait l’espace des possibles, le licite des marchands est un prescrit qui ferme le cercle des possibilités ». Au fondamentalisme qui prétend devoir normer tous les aspects de la vie des croyants (si « tout est susceptible d’être haramisé, alors... tout peut

de l’islam fondamentaliste, mais plutôt d’une « action simultanée de ces deux idéologies contemporaines, tournées vers la conquête du monde ». Il est vrai que le monde musulman représente un milliard de consommateurs, et que le rapport à la nourriture et au vêtement est une composante très importante de la transmission religieuse. D’ailleurs les multinationales, de Carrefour à Nestlé, en passant par Mac Donald, adorent le halal, et les techniques marketing rivalisent d’efficacité pour répondre aux angoisses de leurs clients soucieux de suivre les prescriptions... divines ? GAËLLE CLOAREC

être halalisé »), répond parfaitement l’esprit du capitalisme mondialisé, qui considère les différences territoriales et culturelles comme une entrave au commerce. Pour l’auteur, le halal ne résulte ni d’une islamisation du marché, ni d’une marchandisation

Le Marché halal, ou l’invention d’une tradition Florence Bergeaud-Blacker Seuil, 20 €

Meurtres à la japonaise

L

e dernier roman de Nakamura Fuminori suit, au départ, la construction classique de l’enquête. Ici, un journaliste est chargé d’écrire un livre sur un photographe convaincu d’avoir immolé deux femmes par le feu. Rencontres en prison, dans l’attente de la peine capitale, collation de documents,

de témoignages… Construction on ne peut plus traditionnel, mais qui insensiblement s’infléchit, les points de vue se multiplient, des lettres proposent des explications, l’identité des protagonistes devient moins nette, la clarté initiale se perd, et l’intrigue, d’évidente, devient énigme, bouleversant les repères au fur et à mesure qu’ils se mettent en place. Les apparences se brouillent, chaque visage est un masque, chaque mot une charade… La photographie des papillons derrière lesquels se profile une silhouette, est-elle une réponse ? Le nuage ailé qui la dissimule est-il hypnotique au point de faire perdre leur raison à ceux qui le regardent avec trop d’attention ? (un parfum d’Antonioni ?) Et pourquoi n’a-t-on pas retrouvé les photographies des deux jeunes femmes en proie aux flammes ? Qui donc est la sœur du photographe assassin, vénéneuse et secrète ? L’art lui-même est par essence un polar, dans sa capacité à dévoiler. « La photographie, explique l’un des personnages, peut être

considérée comme une duplication du réel (…) une copie, mais supérieure à l’original. (…) L’art est une forme de dévoilement. » Ici, ce qui est exposé n’est parfois qu’un leurre, une illusion, et mettre à nu n’est pas vérité. Les doubles, comme les photographies, se multiplient, poupées aux effigies des morts afin d’en préserver un semblant de présence, mais aussi des vivants, dont elles absorbent l’énergie, plus vraies que leurs modèles… Le roman, dans un style en épure, s’emballe, et nous emporte dans un final vertigineux, se refermant sur lui-même, espace circulaire où tout renvoie au texte, jusqu’à la dédicace initiale. Flamboyant ! MARYVONNE COLOMBANI

L’hiver dernier, je me suis séparé de toi Nakamura Fuminori Éditions Philippe Picquier, 17,50 €


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Jeunes filles à vendre

P

arallèlement à ses nombreux projets et collaborations, à Marseille et ailleurs, Clément Baloup poursuit son travail au service de la mémoire des Vietnamiens contraints de quitter leur terre natale. Ainsi vient de paraître le troisième volet de ses Mémoires de Viet Kieu. Les deux premiers albums, Quitter Saïgon et Little Saïgon, donnaient la parole à ceux que la guerre avait poussés à l’exil. Avec Les Mariées de Taïwan, c’est à une toute autre diaspora que le bédéiste s’intéresse. Un flux migratoire moins connu… mais qui fait froid dans le dos. « Un phénomène qui a commencé à la fin des années 1990, qui n’a cessé de se développer dans les années 2000 et dont le résultat est la présence d’une diaspora vietnamienne composée presque exclusivement de jeunes femmes. » Ces jeunes femmes, qui sont-elles ? Pour la plupart, des filles pauvres qui ont accepté de s’inscrire dans des agences matrimoniales afin d’épouser un mari taïwanais, garantie (croient-elles) d’une vie plus aisée et de revenus substantiels pour leurs familles restées au pays. Pendant tout son séjour à Taïwan, Clément Baloup a donc enquêté, sillonnant l’île, interrogeant

à son émancipation finale, après moult souffrances. La fiction semble s’élaborer à partir des témoignages qui ponctuent l’ouvrage. Des témoignages en pleines pages noir et blanc, qui contrastent avec le splendide travail de la couleur utilisé pour les ambiances et les paysages de l’histoire de Linh. On retrouve avec plaisir la subtilité du dessin de Clément Baloup, son approche sensible, qui ne s’interdit pas la plongée dans l’onirique ou le fantastique. Ce qui confère à son ouvrage une portée poétique inattendue. Et révèle sans aucun doute la grande empathie de l’auteur pour les jeunes Vietnamiennes pauvres, que les dangers continuent de guetter, puisqu’après les Taïwanaises, il semblerait qu’aujourd’hui les Chinois commencent à battre les campagnes en quête de jeunes femmes à « acheter ». journalistes, travailleurs sociaux mais aussi vingt-quatre femmes et même deux hommes. De ce reportage sur un sujet longtemps tabou est né un superbe et émouvant album, à mi-chemin entre fiction et documentaire. Au fil de ses 158 pages, il relate le parcours de Linh, de la première visite de l’entremetteuse

FRED ROBERT

Mémoires de Viet Kieu, T 3 ; Les mariées de Taïwan Clément Baloup La Boîte à Bulles, Collection Contre-Cœur, 22 €

Cas d’école

S

i le Nouveau Réalisme, Supports/Surfaces, le Groupe 70 ou encore Fluxus évoquent quelque chose pour vous de l’histoire de l’art, cet ouvrage devrait réactiver bien des images (bien qu’il soit dépourvu d’illustrations), des événements et surtout des noms incontournables.

Dans cet essai au format de poche, Morgane Nannini revient sur un moment remarquable de l’art contemporain – datant cependant du siècle dernier - sous le vocable d’École de Nice. A contrario de Marcel Alocco, témoin et artiste impliqué dans les mouvements artistiques de cette époque, lui-même auteur d’une Introduction à L’Ecole de Nice en 1995, qui signe ici la préface, l’auteure revendique une vision détachée, davantage objective, favorisée par sa position de jeune historienne de l’art (elle n’a que trente ans). Son travail relevant davantage de la chronique que de l’essai esthétique tente d’appréhender ce que recouvre exactement cette appellation, dans le temps et l’espace, ses protagonistes et leurs postures esthétiques. L’École de Nice désigne une période (1958-1968), sans être un mouvement constitué sous une bannière particulière, « par le refus des esthétiques figuratives ou abstraites dominantes » de cette époque (M. Alocco). Raphaël Monticelli pour sa part établissait quatre catégories afin d’y adouber un artiste. Quand chacun s’accorde

pour dire qu’aucune liste n’est exhaustive, on flirte avec la chronique people lorsque l’auteure brosse certains portraits, recueille les opinions de quelques artistes et personnalités, ou lors de sa visite à la Séguinière (restaurant réputé situé dans la commune de La Gaude). Dans la postface, Robert Roux soulève la question de l’éventuelle survivance de cette « école » à l’ère du numérique. Moins optimiste, comme dans sa récente newsletter (4 février 2017) Ben assène : « La consécration de l’école de Nice : 70% Morts, 20 % Alzheimer ». Gageons cependant que ce petit ouvrage conviendra aux amateurs pour rafraîchir une mémoire incertaine ou découvrir un mythe encore vivace un demi-siècle plus tard. CLAUDE LORIN

L’école de Nice, mythe et réalité Morgane Nannini Baie des anges, 8,50 €


Disparaître

À

la fin il y a un corps emporté sur une civière ; il est mort ; ce n’est pas le narrateur – encore que - et puis de toutes façons le narrateur, lui ben il est mort – ou presque - au début, ce qui ne l’empêche pas de dire « je » et après tout c’est le mieux qu’il ait à faire pour survivre pendant 130 pages étonnantes de maîtrise et d’allant. Le dernier roman de Christian Oster est jubilatoire, comme pas mal des précédents, et déroule bien à plat La vie automatique que désigne le titre parfaitement fiable. Une maison en feu que l’on quitte sans plus d’émotion en tirant sa valise à roulettes et qui donnera lieu à une somptueuse description sèchement lyrique ; la rencontre improbable d’une actrice célèbre (lui joue dans des séries B) qui relance la machine ; le monde du cinéma, des ombres, des apparences et des métamorphoses ; un Japon métaphorique et stylisé où l’on fait un aller-retour rapide et tellement drôle ; un double, un autre en miroir que l’on poursuit jusqu’au bout et surtout des micro-moments, des micro-sentiments gratuits et légers qui renvoient à un monde de détails fragmentés et contingents. Dans sa « consommation hébétée du présent » le personnage aspire à « se mouler dans tout ce qui se présente » et l’auteur construit son roman comme une longue périphrase teintée d’euphémismes et de litotes qui saisirait le monde dans ses pinces délicates. « Nous parlions peu, craignant qu’à trop céder aux mots nous ne finissions par indiquer une direction quelconque à nos projets. » Libre et sujet à la métamorphose comme un personnage de Queneau, burlesque et absent à lui-même comme Monsieur Plume de Michaux, Jean qui ne se fait jamais appeler ainsi est finalement un homme nouveau à chaque ligne. Quelle leçon de littérature souriante ! MARIE-JO DHO

Chaque semaine, un expert GÉOPOLITIQUE ÉCONOMIE URBANISME GRAND TÉMOIN

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La Vie Automatique Christian Oster Editions de l’Olivier 16,50 €

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Incandescences programmées

E

sha tente de vivre à Paris, Mina de résister à Calcutta, Marie va et vient entre les deux ; toutes les trois sont indiennes comme Shumona Sinha qui écrit en français, langue

du pays qu’elle a choisi comme patrie. Dans son quatrième roman l’auteure choisit ( ?) de creuser l’axe de l’identité (le sexe, la race) aux prises avec les lourdeurs ou les contradictions des sociétés décrites : Esha, professeur d’anglais dans un lycée de la banlieue Est parisienne se bat dans une France en crise pour obtenir sa naturalisation, le respect de ses élèves ou des hommes qu’elle rencontre ; Mina, jeune paysanne engagée dans un soulèvement contre l’expropriation des terres et surtout enceinte de son cousin, va se heurter à une violence inouïe et définitive ; quant à la troisième, au prénom d’enfant adoptée, elle promène vainement sa révolte et sa quête des origines entre les deux continents et surtout sur Facebook. Energies et désirs bafoués par la tradition, enfer bureaucratique ou plus sèchement comportement des hommes tels qu’ils sont ici ou là : ce roman terriblement triste dont

le titre, Apatride, suggère que la femme est en exil même dans son propre corps, croise des éléments démonstratifs évidents avec des thématiques à peine plus souterraines comme celle du feu qui consume les deux bouts du récit et embrase l’écriture « en colère » de Shumona Sinha . Le sujet ne manque pas d’intérêt et l’écriture âpre prend le lecteur à la gorge ; on aurait aimé sans doute une petite fissure dans la démonstration ou un regard légèrement de biais ; on ne les y trouve pas. C’est dommage ! MARIE-JO DHO

Apatride Shumona Sinha Editions de l’Olivier, 17,50 €

Bleu d’Égypte

E

n témoignage et écho approfondi de la passionnante exposition donnée au Musée Bleu d’Arles (Musée départemental de l’Arles Antique) à propos de Khâemouaset, le Prince archéologue, grand prêtre de Ptah et fils de Ramsès II, reste un livre remarquable d’érudition et de clarté. Il reprend le cheminement de l’exposition (avec de superbes illustrations) : évoquer Khâemouaset permettait d’analyser avec une grande acuité les mécanismes de la société, de l’organisation politique, des croyances, des mœurs, de la littérature, des « sciences » (la notion étant différente de la nôtre), de l’art, des représentations… Un regard essentiel et pertinent était accordé aux relations entre savoir et pouvoir à l’époque de Ramsès II. Mais n’est-ce pas une manière d’appréhender aussi notre époque ? Et de revenir sur les problèmes de transmission, diffusion et acquisition des savoirs ? Tout contribue à une analyse d’une remarquable intelligence. Fruit d’une collaboration entre le musée du Louvre et celui d’Arles, l’exposition, dirigée Alain Charron, conservateur en chef

fastes comme dans les manifestations du quotidien. Le savoir est investi d’un pouvoir magique, l’écriture révèle ou cache, selon les degrés d’initiation. Laisser des traces est une manière d’accéder à l’immortalité, à la construction du souvenir, essentielle est la tâche d’inscrire son nom sur les monuments, les papyrus, les statues… mais aussi les récits : Khâemouasset, qui a passé sa vie à bâtir la renommée éternelle de son père, est objet de contes, encore aujourd’hui avec la BD (Isabelle Dethan). Mythe et histoire se fondent en un même creuset. L’ouvrage Savoir et pouvoir à l’époque de Ramsès II en est un captivant témoignage. À savourer et méditer ! MARYVONNE COLOMBANI

du patrimoine (Musée de l’Arles antique), secondé par Christophe Barbotin, conservateur en chef du département des Antiquités égyptiennes du musée du Louvre, a acquis le label « exposition d’intérêt national ». Ce sont les vestiges qui ont la parole, donnent les clés de ces époques lointaines, qui peu à peu émergent, dans l’exercice de leurs

Savoir et pouvoir à l’époque de Ramsès II, Khâemouaset, le prince archéologue, sous la direction d’Alain Charron et Christophe Barbotin éditions Snoeck, 30 €


C’est l’imprimerie... Carte

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Du lundi au vendredi de 8 h 30 à 12 h 00 et de 14 h 00 à 19 h 00

13, rue Bérard - 13005 Marseille

✆ 04 91 32 64 54 www.magenta-numerique.com


! S R A M 0 1 E L OUVERTURE BILLETTERIE

PROGRAMMATION

> scene55.fr > reservation@scene55.fr > 04 92 92 55 67 PROCHAINEMENT

10/03 & 11/03

Cirque

18/03

Musique

RON CARTER & RICHARD GALLIANO CONTREBASSE / ACCORDÉON Crédit photo © Christoph Kleiner

24/03

Théâtre

LE PRINCE TRAVESTI COMPAGNIE MIROIR ET MÉTAPHORE Crédit photo © Arnold Jeroki

29/03

Musique

ORCHESTRE RÉGIONAL DE CANNES ET ENSEMBLE DE PERCUSSIONS DE LA CÔTE D’AZUR Crédit photo © Hugues Lagarde

31/03

Danse

LE CORPS DU BALLET NATIONAL DE MARSEILLE BALLET NATIONAL DE MARSEILLE Crédit photo © Alwin Poiana

BLAST

COMPAGNIE CIRQUE FAROUCHE ZANZIBAR Crédit photo © Cirque Farouche

ÉVÉNEMENTS

09/04

Théâtre

27/04 Musique BARBARA HENDRICKS

COMME UNE PIERRE QUI…

Crédit photo © Mats Baker

Crédit photo © Simon Gosselin / Coll. ComédieFrançaise

ET SON BLUES BAND

26/05 Musique actuelle NAIVE NEW BEATERS

LA COMÉDIE-FRANÇAISE

21/04

Marionnette

CHOUETTES COMPAGNIE 1. 2. 3. SOLEIL Semaine de la marionnette Crédit photo © Nathalie Sternalski

18/04

Marionnette

MIX MEX

19/04 Marionnette

20/04

DEPUIS …

BESTIAIRE ALLUMÉ

COMPAGNIE TRO-HÉOL

COMPAGNIE SAMOLŒT

Crédit photo © Martial Anton

Crédit photo © Lidia Chavinskaia

22/04

10/05

Semaine de la marionnette

Marionnette

BELLA

Semaine de la marionnette

Théâtre visuel

LE CLAN DES SONGES

PAYSAGES INTÉRIEURS

Crédit photo © Séverine Cadillac

COMPAGNIE PHILIPPE GENTY

Semaine de la marionnette

Crédit photo © Philippe Genty

ES RÉSERVEZ VOS PLAC R DÈS MAINTENANT SU Crédit photo NNBS-PRESS © Romain Chassaing

SCENE55.FR

Marionnette

COMPAGNIE ARKETAL Semaine de la marionnette Crédit photo © Brigitte Pougeoise

20/05 et 21/05

Marionnette

R.A.G.E COMPAGNIE LES ANGES AU PLAFOND Crédit photo © Vincent Muteau

55, chemin de Faissole 06250 Mougins


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