Édition 2018 Journal des évolués
LA VOIX DU CONGOLAIS LA VOIX DU CONGOLAIS
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EDITORIAL
Politique D’emancipation1
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ne certaine presse étrangère a entamé ces derniers temps une propagande particulière intense en vue d’amener les nations colonisatrices à faciliter le plus rapidement possible l’émancipation des peuples qu’ils ont sous leur tutelle. Une autre presse, à caractère subversif, pousse ceux-ci à briser ces liens tutélaires au nom de cette sacro-sainte liberté des peuples à disposer d’eux-mêmes. Le continent africain n’échappe pas à cette propagande qui peut devenir profitable pour les uns mais qui s’avère très périlleuse pour les autres. Aujourd‘hui, personne ne peut plus douter des aptitudes des Noirs. Plusieurs universitaires de couleur ont donné la mesure de leurs capacités. Ces privilégiés manifestent une autorité et une science que nous ne contestons pas. De plus le nombre des nègres (ce vocable n’a rien de péjoratif) ayant déjà une solide culture, quoique n’ayant pas fait leurs humanités, est déjà considérable. Ne nous emballons cependant pas après de telles constatations, car l’expérience a démontré que les
©Isaac Sahani
Noirs émancipés par un contact de plusieurs siècles avec les Européens éprouvent encore d’énormes difficultés à se gouverner eux-mêmes. Que dire alors de ceux qui ne connaissent que depuis un demi-siècle les bienfaits de la civilisation ? Croit-on que ceux-là soient ca-
pables de gérer seuls leurs propres affaires ? L’expérience du Liberia à laquelle on fait souvent allusion doit nous faire réfléchir. Précisons notre pensée et supposons un instant que nos tuteurs nous abandonnent. Pourrions-nous nous diriger sans guide ? Une telle hypothèse
nous fait sourire, car nous sentons combien nous serions désemparés, et il n’est pas difficile d’entrevoir à quelle pagaille notre Congo serait instantanément livré. Il faudrait donc les remplacer. Par qui ? Par d’autres blancs ? Mais la tutelle des Belges est la plus bienveillante