TRUCK & BUSINESS 279 (décembre 2021)

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PROFESSION

Obligation de retour des poids lourds

Une mesure pour rien ? Avec la publication mi-2020 du Paquet MobilitĂ©, l’Europe a envoyĂ© un signal clair de son implication dans la lutte contre le dumping social et la concurrence dĂ©loyale dans le transport. La dĂ©cision la plus frappante est l’obligation de retour des poids lourds. Pas sĂ»r que cela puisse changer grand’chose


On est encore loin d’un ‘level playing field’.

Le ‘Paquet Mobilité’ comprend trois volets : de nouvelles rĂšgles sur les temps de conduite et de repos, sur les licences et le cabotage et enfin en matiĂšre de dĂ©tachement. Le deuxiĂšme volet implique notamment que le poids lourd doit retourner dans le pays d’immatriculation toutes les huit semaines. Aujourd’hui, les vĂ©hicules des pays Ă  bas salaires – principalement des États membres d’Europe centrale et orientale – ne reviennent en pratique qu’une fois par an pour le contrĂŽle technique. Cette mesure entrera en vigueur le 2 fĂ©vrier 2022. Elle vise Ă  lutter contre le dumping social, mais vise Ă©galement un mouvement de relocalisation de l’Europe de l’Est vers l’Europe de l’Ouest. « Ce n’est pas le moyen le plus efficace de lutter contre le dumping social, mais c’est l’un des plus faciles Ă  contrĂŽler », explique Frederik Vanden Bogaerde, spĂ©cialiste des transports chez TL Advocaten. « Du point de vue de l’Europe de l’Est, c’est une mesure d’intimidation, qui suscite beaucoup de ressentiment chez les transporteurs 26

des pays pĂ©riphĂ©riques comme la Lituanie, la Roumanie ou le Portugal ». Il donne l’exemple de la Roumanie. « On estime que 80.000 camions roumains circulent en Europe et ne reviennent en Roumanie qu’une fois par an. Pour les entreprises roumaines, l’obligation de retour reprĂ©sente donc un coĂ»t Ă©norme, car il y a peu de marchandises Ă  transporter entre l’Europe occidentale et ce pays ». Un certain nombre de pays (principalement d’Europe de l’Est) se sont tournĂ©s vers la Cour de Justice europĂ©enne pour contester cette obligation. Cependant, ils ont peu de chances de renverser la vapeur, estime Vanden Bogaerde. CONTRÔLES

Par le passĂ©, les rĂšgles europĂ©ennes restaient parfois lettre morte car insuffisamment contrĂŽlĂ©es. Ce risque existe Ă©galement avec l’obligation de retour du poids lourd. « Cela fait partie de la lĂ©gislation sur les licences. Le contrĂŽle doit donc ĂȘtre effectuĂ© dans le pays qui dĂ©livre le permis.

Des pays comme la Roumanie ou la Bulgarie risquent d’ĂȘtre laxistes Ă  ce sujet : si un transporteur perd sa licence, cela aura des consĂ©quences pour l’emploi et l’économie », dĂ©clare-t-il. « Il y aura aussi des contrĂŽles en Belgique. Mais comment les tribunaux vont-ils se positionner si des infractions sont constatĂ©es ? », nuance-t-il. C’est aussi la crainte de Roberto Parrillo, responsable de secteur pour CSC/ACV Transcom. « On se demande si les contrĂŽles seront effectifs. Le premier volet du Paquet MobilitĂ©, et le droit de

« L’obligation de retour fait l’objet de beaucoup d’attention, mais le vrai problĂšme rĂ©side dans les rĂšgles de dĂ©tachement. »


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