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«Grooves» ou pas «grooves», telle est la question
Beaucoup de choses vont changer en 2010, mais l’essentiel ne bougera pas – c’est toujours la même histoire avec le matériel. Nous jouons au golf depuis longtemps et un club restera toujours un club, un driver est un driver, un fer est… ben oui, c’est un fer! Chaque année, les fabricants nous promettent l’arrivée de clubs plus performants. Mais comment est-il possible d’améliorer encore le matériel? Et que faut-il vérifier lorsqu’on l’achète? Une chose est sûre: quelque chose de véritablement important va changer et ce sont les «grooves»
Celui qui tape «grooves» sur Google se retrouve avec des millions de mauvaises pistes. Elles mènent essentiellement à la musique et soulignent une atmosphère et une ambiance décontractées. Le dictionnaire est un peu plus précis: rainure est la définition française du mot anglais «groove». Pour un club de golf, on parle aussi volontiers de stries et ce sont donc ces stries qui sont aujourd’hui le sujet à la mode, mais qu’en même temps l’on connaît si mal! Ce qui est certain, c’est que les clubs vont avoir de nouvelles «grooves», autrement dit, de nouvelles stries. Les nouvelles rainures auront une forme légèrement différente, avec surtout moins de volume et une arête plus arrondie. Le thème des «grooves» est ancien et passablement compliqué. Il justifie qu’on lui consacre une petite digression et qu’on remonte le temps vers une période où les fers étaient encore forgés à la main et où les stries étaient réalisées sur la face du club avec une masse et un poinçon. Les clubs étaient donc très différents les uns des autres sur ce plan-là, mais la démar- che restait la même: donner plus de grip à la face du club, afin de produire du backspin à la balle – car il faut savoir que c’est le spin qui permet de contrôler la balle, mais qui lui donne aussi les caractéristiques aérodynamiques susceptibles de voler loin et droit.
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Depuis cette époque, les techniques industrielles de la fonderie ont fait d’énormes progrès, si bien que les clubs ont complètement changé d’allure et se jouent très différemment. Il y a 40 ans, Karsten Solheim fut un pionnier; il a trouvé un nouvel alliage et un système de moulage qui ont débouché sur des fers aux formes totalement nouvelles. Avec ces têtes de clubs moulées, on pouvait aussi modifier le lie et le loft. Ce qui fut le début du club fitting, qui reste la marque de fabrique de Ping aujourd’hui.
Le modèle Ping Eye-2, qui est sorti en 1982, a plus révolutionné le golf que toutes les innovations réalisées jusque-là dans ce sport.
Avec le moulage des têtes de club –comme pour les clubs forgés qui sont pressés à partir d’un bloc de métal – les stries sont intégrées dans la face. Leur forme, leur volume et leur arête, en relation avec la surface de la balle, sont décisives pour le volume de spin conféré à cette dernière. On a d’ailleurs étudié les stries depuis les années 80 et comme par hasard, c’est à nouveau Solheim et sa marque Ping qui ont écrit l’histoire. En 1984, l’USGA a établi un règlement qui autorisait une nouvelle forme de stries en U, alors que jusque-là, seules les stries en V étaient conformes. Ceci afin de faciliter le moulage des têtes pour les fabricants. Il s’en suivit une procédure juridique entre Ping, l’USGA et le PGA Tour pour savoir si les stries – par ailleurs extrêmement performantes – du Ping Eye-2 correspondaient ou non au règlement, en terme de distance entre les rainures. Le cas fut réglé en dehors du tribunal en 1993, mais reste dans les mémoires à cause des grooves
La balle recule
La forme des stries en U a deux avantages par rapport à celle en V (qui se montre en revanche plus facile à graver dans la face): les arêtes sont plus tranchantes et il y a plus de place pour les déchets dans la strie ellemême. On pense par exemple à l’herbe qui s’y accumule lors d’un coup joué dans le semi rough et qui n’empêche pas de produire un bon backspin à la balle, au contraire de stries en V, qui seront plus vite remplies et perdront leur effet mordant. Ce qui nous amène directement à la nouvelle réglementation, que nous allons expliquer en détail!
Le tout nouveau «CG 15 Zip Grooves» de Cleveland, avec en comparaison un sandwedge usagé appartenant à un joueur de club moyen...

Tous les développements accumulés ont permis aux pros de frapper des coups de départ qui volent et roulent 30 voire 40 mètres plus loin qu’il y a une vingtaine d’années. Alors qu’un drive de 270 yards était une belle valeur dans els années 80, aujourd’hui, les meilleurs frappeurs dépassent allégrement la ligne des 300 yards. Mais il n’y a pas que les drivers qui ont progressé: la balle a également fait une avancée importante, en même temps que la préparation physique des joueurs leur a donné une véritable stature d’athlètes. Phénomènes auxquels il faut ajouter une préparation plus soignée des parcours. Et même si certains terrains ont été rallongés, on est arrivé aujourd’hui sur l’US PGA Tour à un style de jeu que les pros qualifient de «bomb and gauge»: il s’agit de frapper la balle aussi loin que possible, pour ensuite attaquer le green avec un wedge, club qui permet d’imprimer beaucoup de spin à la balle, même si cette dernière se trouve dans le rough. Cette stratégie a été largement adoptée aux Etats-Unis, notamment pace que de nombreux parcours sont plats et ne disposent pas d’un rough dissuasif (naturellement, il en va autrement pour l’US Open). Pour lutter contre ce phénomène, on a pensé qu’il faudrait que les balles jouées depuis le rough disposent de moins de backspin. Afin qu’elles ne tiennent plus sur les greens et que la stratégie soit modifiée vers une recherche systématique du fairway, là où le contrôle de la balle et du spin est facilité. Pour diminuer la quantité de spin depuis le rough, il faut simplement que les stries offrent moins de volume pour les déchets d’herbe et que leurs arêtes soient moins tranchantes.

Nouvelles règles, que pour les pros


Dès 2010 – donc l’année prochaine… – les pros de tous les circuits devront jouer avec des clubs qui seront conformes aux nouvelles prescriptions définies ci-dessus (les détails sur www.randa.org). Mais les amateurs vont pouvoir utiliser leurs clubs actuels pendant quelques années encore.
La question reste entière: est-ce que les hypothèses des associations vont se vérifier? Est-ce que les coups depuis le rough produiront moins de backspin et rouleront plus, lorsque la tête du club aura des stries moins profondes et moins tranchantes? Il va falloir le constater; il y a peu d’experts actuellement qui veulent se prononcer sur ce sujet ni aucun pro d’ailleurs. Il y a en revanche une chose sur laquelle tout le monde est d’accord: tout l’art réside dans le contrôle du backspin. On peut d’ailleurs supposer que les meilleurs joueurs n’auront pas besoin de beaucoup de temps pour s’habituer à leurs nouvelles faces de club.
On peut donc affirmer que les nouvelles règles conviendront parfaitement aux pros qui disposent d’un large répertoire de coups. Tiger Woods a d’ailleurs laissé entendre qu’il s’entraînait depuis des mois avec les nouveaux wedges, sans avoir de problème à les maîtriser…
Comme il fallait s’y attendre, l’USGA, secondée par le R&A, a déjà effectué des tests de laboratoire avec son «Iron byron», le robot qui frappe
Callaway







des balles; en parallèle, le plus grand magazine de golf de la planète, «Golf Digest», a organisé des tests avec des pros et des amateurs, auxquels il a fait frapper des milliers de balles avec différents clubs (entre le fer 8 et le lobwedge), dans différentes positions. Et il y a quelque chose de concret dans l’histoire des grooves. Voilà les conclusions que l’on peut tirer:

- Il n’y a pas de grandes différences avec les coups joués depuis le fairway.
- Lors de coups joués dans le rough, avec une grande vitesse de swing, les différences de backspin sont assez importantes; les balles roulent plus sur les greens.


- Pour les pitches joués depuis le fairway, les différences sont détectables.


- Pour tous les coups, les différences dans la longueur du vol et dans le roulement sont plus grandes qu’auparavant; il y a plus de dispersion.
Le dernier point est celui que les experts américains considèrent comme le plus important. Car cette inexactitude potentiellement plus grande devrait déboucher sur une capacité de précision réduite. Et lorsqu’un joueur perd sa régularité aux approches, il va se mettre à douter du club qu’il doit jouer – on sait qu’au golf, l’essentiel du résultat fait partie du domaine mental.
Les joueurs de club peuvent dormir tranquille
Il en résulte que le jeu des pros et des bons amateurs va être concerné par le changement de réglementation. Car celui qui n’avait pas une grande vitesse de tête de club ne pouvait de toute façon pas imprimer de backspin à la balle, afin d’arrêter celle-ci ou même de la faire reculer. Il faut être capable de produire une vitesse de tête de club supérieure à 100 miles par heure avec le driver pour arriver à des vitesses de l’ordre de 80 miles par heure avec des fers moyens (des valeurs personnelles qu’un fitting vous permettra de connaître).
Alors que les nouvelles règles seront en vigueur pour les pros dès 2010 –autrement dit plus ou moins tout de suite – les amateurs peuvent continuer de jouer avec leur équipement actuel. Les tournois amateurs (internationaux et nationaux) pourront être disputés avec les stries larges jusqu’à fin 2013. Dès 2014, les nouveaux fers et nouveaux wedges entreront alors en vigueur. Mais les joueurs de club pourront conserver leur matériel actuel pendant 15 ans encore: ce n’est qu’en 2024 qu’ils devront impérativement changer de clubs.
Voilà ce qu’il en est du règlement, mais comment réagissent les fabricants face à ces nouveautés?
Le fils de Karsten Solheim, John A. Solheim, actuel patron de Ping, n’a évidemment pas gardé sa langue dans sa poche. Il a accusé l’USGA de négligences et de mauvaises interprétations dans la récolte des données, quand l’association a pris sa décision. Voilà quelles sont les principales critiques de Solheim:
- La relation entre les grooves et les résultats dans les tournois du PGA Tour n’est pas statistiquement avérée.






- Des analyses plus correctes montrent aujourd’hui déjà qu’il existe une relation étroite entre le fait de toucher un fairway et la précision d’une approche. Les approches jouées depuis le fairway ont démontré statistiquement terminer beaucoup plus près du trou que celles jouées depuis le rough.
- Il aurait été beaucoup plus simple de modifier les règles pour la préparation du parcours: fairway, first cut et rough auraient pu être coupés comme c’était le cas dans les années 80, afin d’augmenter le facteur risque dans le jeu.
- Il est complètement faux de vouloir changer le jeu de dizaines de millions
Titleist



• Putter SC Cali Sonoma
• Putter Scotty Cameron Squareback

• Wedges Vokey Design




• Fers AP1 et AP2 retravaillés
• CB Iron forged
• MB Iron forged de golfeurs dans le monde, quand quelques centaines de professionnels seulement sont capables de jouer largement en dessous du par.
- Les clubs de golf qui ont été produits et vendus selon des règles établies ne devraient pas être qualifiés d’illégaux (comme cela sera le cas dès 2024 avec tous les clubs produits jusque-là).
- Il aurait été plus avisé de définir une période d’observation sur plusieurs années sur les circuits professionnels, avant de décider quelles modifications apporter aux clubs.
Dans le proshop
Il est certain que les fabricants vont réagir différemment; l’avis de John A. Solheim devrait rester lettre morte auprès de l’USGA, car l’association américaine, ces dernières décennies, s’est montrée souvent têtue et pas toujours réaliste. Si Ping continue de produire des wedges et des fers sur les standards actuels, les autres producteurs vont réagir rapidement et adapter leur marketing à la nouvelle situation.
On peut dire que la confusion est garantie dans le proshop! Les fabricants n’ont pas encore expliqué comment ils vont aborder la nouvelle situation; on peut d’ailleurs estimer qu’il n’y a presque pas un set de clubs qui est joué plus que 15 ans. Si bien que ce que l’on achète aujourd’hui est encore utilisable pour un moment; les clubs sont libres de tolérer le vieux matériel jusqu’en 2024. Il va se passer en outre autre chose: les fabricants vont trouver de nouveaux moyens de donner plus de spin à la balle. Certaines voies concernent la balle. Il est possible que la surface de la balle redevienne aussi «mordante» qu’à l’époque de la balata – et aussi facile à endommager… Cleveland, l’un des pionniers des wedges et donc une autorité en matière de jeu court, a déjà présenté un wedge qui dispose des nouvelles stries, mais qui a une surface spéciale entre celles-ci, ce qui devrait produire plus de spin. Il faut faire une dernière remarque à l’attention des joueurs de club. Le fait de donner suffisamment de spin à la balle pour qu’elle s’arrête sur un green est lié à quelques facteurs. La vitesse de la tête de club n’est pas facilement influençable; chaque joueur est en effet limité par sa propre technique ou sa propre constitution physique.
On peut choisir le matériel. Il y a déjà aujourd’hui des balles qui réagissent mieux que d’autres. Celui qui joue avec des «cailloux» ne doit pas s’étonner si son approche termine au fond du green. Les surfaces des wedges s’usent très vite; particulièrement le sandwedge, qui est pratiquement poli par les coups dans le sable, mais aussi parce qu’on l’utilise très souvent. Les stries perdent donc de leur mordant. Les pros changent d’ailleurs leurs wedges tous les deux mois environ!
Il faut aussi veiller à la propreté des clubs. S’il y a de la saleté dans les stries, le backspin imprimé à la balle sera diminué – il faut donc nettoyer attentivement ses clubs, spécialement le sandwedge, après chaque approche. A propos, celui qui a de la peine à se discipliner peut faire comme les pros: payer un caddie qui va s’occuper du matériel pendant la partie!
Taylor Made/Adidas
• Adidas Tour 360 4.0
• R9 Ti Fairway Wood



• Putter Rossa Kia Ma Daytona
• Fers R9 TP

Effractions en série dans les clubs de golf suisses