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CONSTRUIRE SANS OBSTACLES

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À VOS CÔTÉS

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VISITE-DÉCOUVERTE AU CSO

Chef de chantier en fauteuil, comment ça se passe?

Ramon Stauber – paraplégique depuis peu – aimerait revenir à son métier de chef de chantier. Pour savoir si c’était faisable, il a fait un essai au CSO.

Marcel Strasser

En tant qu’organisation à but non lucratif, notre Centre construire sans obstacles a tout intérêt à donner un aperçu de son travail aux personnes touchées qui sont dans la même branche d’activité. Cela fait partie de la réinsertion professionnelle. Nous avons donc répondu favorablement à la demande du CSP et accueilli durant deux jours Ramon Stauber, qui était chef de chantier avant son accident. Il a pu ainsi tester le déroulement d’une journée de travail «normale», tout en apprenant énormément sur nos activités. En plus, nous connaissions déjà Ramon que nous avions conseillé lors de l’évaluation de son logement.

«Au tout début de la rééducation de Ramon Stauber à Nottwil, j’ai reçu une demande d’entretien-conseil par son médecin traitant. La semaine suivante, Ramon m’a fait savoir qu’il voulait poursuivre sa carrière de chef de chantier malgré son handicap physique», raconte Stefan Staubli, coach professionnel responsable au CSP.

Au vu de ses restrictions motrices et sensorielles, Ramon Stauber s’est demandé pendant un court instant s’il allait devoir complètement revoir son orientation professionnelle. Dans le cadre de ses recherches de base, Ramon a pu effectuer une visitedécouverte de deux jours dans les bureaux de nos architectes à Muhen AG. Il s’est dit impressionné par leur travail et au final, cette visite s’est avérée très enrichissante du point de vue du conseil en matière de réinsertion.

20 Séance de planification: Micha, Marcel, Ramon (de g. à. d.)

Entretien avec Ramon Stauber

Après ton apprentissage de charpentier, tu as intégré l’école qui forme les chefs de chantier. As-tu exercé les deux professions? Oui, après mon apprentissage, j’ai travaillé pendant trois ans en tant que charpentier. J’ai ensuite eu la chance de relever un nouveau défi dans un bureau de direction des travaux, en tant que chef de chantier. Depuis, je dirige des projets de construction.

Voulais-tu travailler à nouveau dans le bâtiment après ton accident? Après une première période de doute, je suis arrivé à la conclusion que je ne voulais pas repartir encore une fois à zéro. À l’avenir, j’aimerais continuer à utiliser les connaissances approfondies et la base professionnelle que j’ai acquises.

Qu’est-ce qui t’a frappé pendant tes deux jours parmi nous? L’ampleur de certains projets de transformation sans obstacles et le fait que de bonnes solutions soient possibles en cas de situations complexes, comme un ascenseur extérieur sur une maison en terrasse! J’ai aussi été surpris par les problèmes qui peuvent surgir lorsqu’on aménage des petites salles de bain toutes simples. Et il est fascinant de voir à quel point les besoins des personnes touchées divergent.

Tu n’as passé que quatre mois en rééducation au CSP. Es-tu prêt à reprendre la vie quotidienne à la maison? C’était parfois stressant, car j’ai fait un séjour éclair en rééducation. Beaucoup de choses, comme mon nouvel appartement, n’étaient pas encore prêtes. Grâce au délai très court d’Orthotec, ma voiture était transformée quand je suis sorti de clinique. En fin de rééducation notamment, il s’est accumulé un certain nombre de choses qu’il fallait régler rapidement.

Après ta rééducation, tu as dû organiser toi-même les aménagements dans ton appartement. Cela s’est-il bien passé? Oui, la plupart des travaux ont été achevés cette semaine. Seul le siège rabattable de la douche sera installé la semaine prochaine suite à un délai de livraison. Par contre, le déménagement en lui-même a été pénible, je ne vais sûrement plus bouger de sitôt. sur les chantiers de construction. Mais il faut être réaliste, je vais probablement devoir renoncer à cette partie.

Et à long terme? La construction sans obstacles m’intéresse beaucoup et j’aimerais bien me spécialiser dans cette voie. Au quotidien, beaucoup de choses sont presque impossibles à faire seul quand on est en fauteuil roulant, surtout si on utilise les transports publics et les équipements collectifs, et c’est encore plus marqué dans les zones rurales.

Dans le bâtiment aussi, chez nombre de planificateurs, la prise de conscience de l’importance de ce sujet n’est pas encore aussi forte, comme en témoigne le seuil très élevé de la porte du balcon de mon nouvel appartement, qui ne répond absolument pas aux exigences de la norme SIA, en vigueur depuis longtemps.

L’appartement a pu être aménagé grâce à un pré-financement de la Fondation suisse pour paraplégiques. Sans ce soutien, j’aurais probablement dû me passer de ces transformations. Je n’ai encore reçu aucune nouvelle de l’AI, bien qu’il ne s’agisse que de modifications mineures et de quelques aides. Cela m’étonne que ces vérifications prennent autant de temps, et cela me déçoit aussi un peu. À la Suva, tout se déroulait de manière beaucoup plus efficace.

La rééducation a été très rapide pour toi. Est-ce que ce sera aussi le cas de ta réinsertion professionnelle? Ce ne sera pas aussi simple. Je vais devoir mieux m’organiser et je pourrai agir avec moins de spontanéité qu’avant, car beaucoup de choses prennent plus de temps. Je dois aussi planifier le déroulement de ma journée de manière plus précise: il y aura moins d’insouciance et de spontanéité.

Comment se présente ton avenir professionnel? En janvier, je reprends le travail en essai thérapeutique chez mon ancien employeur, à hauteur de 20%, et je tâcherai ensuite d’augmenter progressivement mon taux d’occupation. À l’avenir, je travaillerai principalement dans la planification. Avant l’accident, je passais près de 30% de mon temps Aimerais-tu suivre une formation? Je vais probablement commencer l’école technique l’année prochaine afin d’approfondir encore la planification technique.

Quel bilan tires-tu de ta visite au CSO et à Parawork? J’ai pu explorer et travailler avec le programme de dessin ArchiCAD. J’ai tout essayé, même les représentations en trois dimensions. Le programme est assez complexe de par ses nombreuses possibilités. Cette formation m’a donné l’occasion d’utiliser judicieusement le temps passé en rééducation pour ma vie future.

Par ailleurs, j’avais un très bon contact avec Stefan Staubli qui a remarqué que je m’ennuyais un peu au CSP entre les nombreuses thérapies. C’est lui qui m’a incité à venir découvrir le CSO. C’était les premiers temps où je me retrouvais en fauteuil roulant toute la journée. Je devais d’abord me faire une idée de ce que je pouvais supporter et de mes propres limites. Cela m’a fait beaucoup de bien.

En fauteuil roulant dans le bâtiment

Il y a un peu plus d’un an, le CSO a embauché une personne en fauteuil roulant. Micha Waefler travaille à Muhen comme dessinateur en bâti ment. En échangeant avec lui, Ramon Stauber a pu aussi profiter de ces bonnes expériences. Le thème abordé montre que les différentes organisations de Nottwil sont étroitement liées, qu’elles collaborent bien ensemble et que des solutions inhabituelles sont parfois examinées.

Dans le cas de Ramon Stauber, un plan de réinsertion professionnelle a pu être convenu avant la fin de sa rééducation primaire grâce à son grand engagement, même si tous les détails n’ont pas encore été clarifiés. D’autre part, en organisant la visitedécouverte, le CSO lui a offert sans contrepartie un large éventail d’expériences. Selon Parawork, ces initiatives contribuent à renforcer la motivation personnelle et il n’est pas rare que de cette façon, une nouvelle porte s’ouvre. En outre, l’entretien montre que le métier du bâtiment est à même d’offrir des opportunités aux personnes en fauteuil roulant.

Ramon a non seulement accepté avec gratitude les offres de soutien, mais il a également pris sa vie en main. Il a fait les premiers pas pour se réinsérer en tant que chef de chantier. Nous sommes persuadés qu’il parviendra à relever ce défi, et c’est aussi un peu grâce au CSO.

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