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Chapitre 8 : Cuisine métropolitaine
from "Une cuisine à soi" : Quand le discours architectural se confronte aux codes de représentation.
by Salila Sihou
En 1941, période où l’occupation et la collaboration s’intensifient en France, un jeu intitulé « Jeu des échanges France-colonies » est produit par l’Office de publicité et d’impression. Destiné aux enfants français métropolitains, ce jeu venait refléter une certaine stabilité politique du pays ; ne laissant rien transparaitre des bouleversements de la guerre à ce moment [391]. Sur une couche de lin fin, le plateau était constitué d’un noyau central où se trouve une carte du monde et où les règles du jeu sont dictées : « REGARDEZ ; Ci-dessous la carte du monde : • La France et son Empire, c’est toutes les tâches rouges que vous y voyez inscrites. Nous nous proposons d’admirer, avec vous, en jouant, toute la grandeur de l’oeuvre coloniale française. • Mettre un jeton « Colonie » sur sa case, c’est cultiver cette colonie. • Mettre un jeton « Drapeau » sur sa case, c’est construire dans la colonie un hôpital, une école, etc. • Mettre un jeton « Bateau » sur sa case, c’est le moyen de transporter vers la France les produits coloniaux. • Ce sont les immenses richesses de ses Colonies qui font la grandeur de la France. Ce jeu vous en donnera une vivante image. ». Le but du jeu est relativement simple : il s’agit pour chaque joueur de développer ses colonies pour exporter des produits vers la métropole et « Le joueur qui a exporté le premier la production de toutes ses Colonies est le gagnant à la condition qu’il ne lui reste aucun jeton en trop ». La catégorie « Colonie » regroupe la plupart des territoires encore colonisés par la France à cette période [392], indiquant sur chaque jeton le nom donné à ce territoire et la ou les ressources qui peuvent être exploitées au sein de celui-ci – des denrées alimentaires, des matériaux, des minerais, des animaux, etc. Parmi ces produits figurent des ressources essentielles dans la consommation moderne de l’hexagone depuis le début du XXème siècle – café, sucre, cacao, mais aussi, caoutchouc et phosphate.
L’accent est mis sur le fait qu’il s’agirait d’un échange entre les peuples car la France leur fournirait des infrastructures et des institutions modernes pour se développer. Cette idée se manifestait, d’ailleurs, dans les éditions du Salon des Arts ménagers des années 1930 qui déployait pour la première fois une section consacrée à l’Algérie, Madagascar et l’Indochine. Associée aux préparatifs de l’Exposition coloniale de Vincennes, cette initiative visait, selon le Grand Palais, à « valoriser les colonies » [393]. Cependant, cette valorisation de l’empire colonial semble avoir laissé place à d’autres enjeux commerciaux aux lendemains de la Seconde Guerre mondiale (Cf. infra chapitre 7). La fin des colonies a entraîné l’indépendance de certains territoires, tandis que d’autres ont été territorialisés et départementalisés au sein de la nation française. Dès lors, certains produits issus des anciennes colonies intégraient la consommation française sans qu’il n’y ait besoin de parler explicitement de leur origine. La place de ses produits dans les campagnes publicitaires [394] et les livres de recette [395] témoignent de ce tournant : si à l’entre-deux guerres, il s’agissait plutôt de mettre en avant leur aspect « exotique » et la distance géographique de leur production, la démocratisation de leur consommation en a fait, d’une part, des produits français comme les autres, et d’autre part, des produits de consommation de masse.
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D’après le chercheur et politologue Malcolm Ferdinand, le mode de consommation métropolitain ne peut être compris sans prendre en compte la manière dont les colons européens ont décidé d’habiter les premiers territoires qu’ils ont « découvert » à partir du XVème siècle. Dans son ouvrage Une écologie Décoloniale, il propose d’approcher les problématiques environnementales et climatiques actuelles à partir du rapport d’exploitation intensive des terres, d’êtres humains et d’êtres nonhumains que la logique coloniale a implanté dans le monde caribéen. Ce rapport se serait concrétisé par la Plantation coloniale, en tant que modèle économique : « La Plantation n’est pas limité aux frontières de la propriété terrienne ou de l’usine. Elle désigne les injustices spatiales globales, les rapports de pouvoir et de dépendance entre des lieux situés à différents emplacements de la Terre. La violence de la Plantation est ainsi confinée dans un lointain là-bas, tandis que les produits finis sont consommés dans un paisible ici » [396]. En dépeignant une économie plantationnaire, le Jeu des échanges France-colonies révèle-t-il le caractère métropolitain de toute cuisine moderne ?

Jeu des échanges France-colonies, 1941, O.P.I.M. (Office de publicité et d’impression), Breveté S.G.D.G.
L’habitation coloniale : l’imposition d’un nouveau mode d'habiter
En 1982, le Centre Pompidou s’intéresse à « l’habitat créole » [397]. Cachée dans la salle de documentation du C.C.I [398], une petite exposition met à l’honneur l’oeuvre de l’architecte guadeloupéen Jack Berthelot, écrite aux côtés de Martine Gaumé et publiée plus tôt cette même année : Kaz Antiyé jan moun ka rété – en français « L’Habitat populaire aux Antilles » [399]. Dans Le Monde, l’intérêt de cette exposition est résumé ainsi : il s’agissait de « revaloriser un patrimoine déprécié, de démontrer que la petite case est une architecture liée à un mode de vie » [400] ; une véritable « découverte » [401] que l’on doit à Berthelot. Effectivement, le long de son ouvrage, l’architecte présente une évolution typologique et architecturale de la case rurale, en tant que symbole du mode d’habiter antillais, tout en prenant en compte ses multiples variations et ses caractéristiques communes selon les îles. En revanche, l’approche qu’il choisit d’adopter ne se restreint pas à un constat de spécificités architecturales : pour comprendre pourquoi la case persiste à être le modèle d’habitat populaire aux Antilles, c’est depuis l’histoire économique, sociale et culturelle de ces territoires qu’il analyse cette architecture ; une histoire inéluctablement liée à celle de la métropole. Dans un sens, comprendre l’histoire de la case, c’est également comprendre ce qui caractérise l’habitation métropolitaine.
Indéniablement, l’abolition de l’esclavage a marqué un tournant dans l’histoire de la case [402]. Pour Berthelot, ce n’est qu’à partir de 1848 que son rôle s’est enfin (ré)affirmé : une forme d’habitat inscrite dans un ensemble productif tournée vers l’auto-subsistance et basé essentiellement sur les cultures vivrières. En effet, l’architecte soulève l’ancrage antérieur de ce statut, déjà visible dans les manières d’habiter des peuples caribéens à l’époque pré-colombienne. Bien que les seules sources qui puissent en témoigner sont les récits des chroniqueurs européens, leurs descriptions générales confirmaient qu’il y avait déjà des formes d’habitats comparables à des cases quand ils ont débarqué aux Caraïbes. Parmi les premiers colons arrivés en Guadeloupe en 1635, le Père Breton décrivait des cases « faites de fourches d’arbres, plantées en terre, jointes avec d’autres pièces de bois qui tiennent l’une à l’autre » [403]. Le grand bâtiment autour duquel elles s’organisaient mesurait environ « 60, 80 et cent pieds de long » [404] et était à usage commun : le Carbet. En arrivant, les colons ont utilisé les mêmes techniques pour construire – ou faire construire [405] – leurs maisons ; celles des plus pauvres étant relativement similaires aux cases des populations natives.
Pour autant, ces dernières conservaient quand même des caractéristiques d’origine européenne, listées par Berthelot au sein d’un tableau [406] : l’accès principal qui se fait dans la longueur par une façade orientée vers la route, décorée et axée sur la porte (souvent entourée de deux fenêtres), l’introduction des jalousies et la technique du vide sanitaire utilisée pour isoler le sol de l’humidité. Ces éléments venaient alors se croiser aux techniques de construction locales déjà employées par les populations natives pour s’adapter au climat et au régime des vents antillais. Parmi les éléments que les européens se sont appropriés, on note essentiellement « la façon d’utiliser les matériaux du pays, feuilles de latanier, de balisier, de palmiste et de roseaux qu’on fixait avec des lianes souples sur des gaulettes, pour obtenir de grandes tuiles végétales couvrant la toiture et fermant les deux extrémités de la hutte » [407] –, et le principe de « vie à l’extérieur » – une séparation rigoureuse entre l’espacefoyer, en tant que lieu communs, et les cases, en tant qu’espaces intimes utilisés uniquement pour dormir [408]. Les colons ont repris ce dernier principe particulièrement avec la cuisine : « La cuisine est toujours séparée de la case. Elle est composée d’un petit appentis de cinq ou six pas au-dessous du vent. On pend la marmite avec un gros bâton posé sur deux fourches, et on fait cuire en commun chez les habitants de très moyenne condition toutes les viandes : mais chez les plus riches la cuisine est murée comme une case particulière » [409].
Si pendant les vingt premières années de colonisation aux Antilles les différences architecturales entre les habitats des européens et des populations caribéennes ne dépassaient pas vraiment l’échelle de la case et ses éléments constructifs, le dernier quart du XVIIème siècle voyait émerger un tout autre mode d’habiter fondé sur l’économie de plantation et l’institution de l’esclavage. Selon Berthelot, l’habitation en est l’unité de base. En tant que micro-société, elle comprend autant l’ensemble des bâtiments domestiques et industriels, les terres, les cultures, le bétail, que le maître, sa famille, ses employés et ses dizaines – voire plusieurs centaines – d’esclaves. Dès le début, le rôle de domination conféré à la maison de maître au sein de l’habitation s’ancrait plus symboliquement que matériellement. Cette dernière n’était pas particulièrement luxueuse telle qu’on pourrait l’imaginer car, comme les premiers colons projetaient de repartir en France après s’être enrichis, ils investissaient plutôt dans les outils utiles à leur production agricole [410]. À partir de la fin du 17ème, il y avait un plan type de la maison de maître dans l’ensemble des colonies françaises d’Amérique : « des salles basses, séparées intérieurement en deux ou trois pièces, dont l’une sert de salle, l’autre de chambre à coucher, la troisième de garde-manger » [411]. En bref : un lieu de réception, un lieu de stockage et un lieu de repos. Comme au début de la colonisation, la cuisine était construite à distance de la maison pour les risques d’incendies. Cette séparation faisant alors partie de l’habitation, elle devenait autant sociale qu’architecturale : la cuisine était utilisée uniquement par les esclaves domestiques pour préparer à manger pour les maîtres – d’ailleurs, « une chambre à nègre lui est parfois adjointe » [412]. Au XVIIIème siècle, beaucoup de maisons de maîtres en Guadeloupe et en Martinique se construisaient en maçonnerie, et la cuisine, en tant que dépendance, était incarnée par un bâtiment à part, souvent en plan carré, accolée au potager.

Plan de l’habitation L’anse Latouche (1726) © Archives Nationales d’Outre-Mer.
En s’inscrivant dans cet ensemble nommé l’habitation – ou « bitation » en créole [413] –, la case devenait alors la case-nègre, une appellation qui venait affirmer sa place dans un système esclavagiste raciste. Les cases étaient désormais regroupées dans un quartier à part et disposées géométriquement en files séparées par des ruelles [414] – « rue cases-nègres » [415]. Souvent située en hauteur, la maison du maître permettait au propriétaire de surveiller ce village servile [416]. Au sein de ce système, la case se normalisait, autant dans ses matériaux que dans ses dimensions. Comme le démontre Berthelot, qu’il s’agisse de l’agrandissement de la case (par ajout d’autres modules), de sa subdivision (la deux-pièces case) ou encore de sa mobilité, ces caractères architecturaux n’apparaissaient pas avant la colonisation européenne [417]. Cette période de colonisation a fait évoluer la case architecturalement, mais aussi, socio-économiquement, car sa fonction première d’auto-subsistance se voyait réduite par le système asservissant de l’habitation. L’opposition sémantique « case-maison » [418] reflète d’ailleurs la domination de ce nouveau mode d’habiter : dans l'unité de production qu'est l'espace de l’habitation, la maison s’érige comme l’opposé du mode d’habiter caribéen qu’incarne la kaz antiyé.
L’exploitation humaine : condition préalable de la Plantation
Lorsque Berthelot publie cet ouvrage dans les années 1980, la colonisation de ces territoires était abolie depuis environ 40 ans mais la case traditionnelle était toujours l’habitat commun des îles antillaises. Dans un article consacré à l’oeuvre de Berthelot, le professeur en histoire contemporaine Roméo Terral explique que les recherches de l’architecte venaient combler un manque, voire un vide, dans la recherche universitaire à propos de l’habitat populaire antillais, et plus particulièrement, de son évolution architecturale [419]. Certaines recherches ethnologiques s’y étaient intéressées au début du siècle, notamment avec l’essor des études dites américanistes. En revanche, leur approche avait tendance à figer les sociétés caribéennes dans un contexte précolombien – écartant l’évolution du continent avec la colonisation, les phénomènes d’acculturation qui en découlent, mais aussi, l’émergence d’une population Afro-américaine [420]. D’ailleurs, il a fallut attendre 1969 pour qu’un numéro spécial du Journal de la Société des Américanistes soulève ces « particularités » de l’américanisme français. En fait, quand Berthelot sort son livre, les représentations des territoires anciennement colonisés s’étaient déjà polarisées le long du siècle entre, d’un côté, des démarches plus scientifiques instituées par l’ethnologie et l’anthropologie – qui étudiaient les sociétés des Autres sans nécessairement aborder les dynamiques coloniales –, et d’un autre côté, des démarches publicitaires et pédagogiques qui tenaient à valoriser les « échanges » avec ces territoires et la consommation qui en découlaient [421]. L’approche adoptée par son oeuvre à la fin du siècle vient judicieusement faire un lien entre la façon d’habiter qui s’est implantée aux Antilles et le modèle économique de production et de consommation qui s’est constitué dans les métropoles. Dans ce sens, le symbole des sociétés esclavagiste est, pour lui, un modèle d’habitation spécifique : l’habitation-sucrerie.

Schéma d’une Habitation sucrière selon G. Lasserre, d’après une description du Père Labat (Lasserre, 1961, II, p. 355).
Bien que dans le Jeu des échanges France-colonies le sucre ait intégré comme une denrée parmi les autres, c’est, en effet, à travers la culture de canne à sucre que le mode d’habiter des colons s’est développé [422] ; l’habitation-sucrerie en serait sa concrétisation architecturale. Comme l’explique Malcolm Ferdinand, c’est après avoir tenté une politique extractiviste dans les premières îles caribéennes que les européens se sont dirigés, le long du XVIème siècle, sur l’agriculture intensive et la vente de peaux de vache [423]. En s’inspirant du modèle agricole effectif à Madère, ils colonisaient d’autres îles caribéennes directement avec des plantations de tabac, d’indigo et de coton. Cette première phase d’agriculture intensive a laissé place, face à la production concurrentielle de la colonie de Virginie au XVIIème siècle, a une seconde phase consacrée presque exclusivement à la culture de la canne à sucre.
Ainsi, c’est dans ce contexte que la Compagnie des îles d’Amérique était chargée de coloniser activement d’autres îles des petites Antilles, faisant de La Martinique et de La Guadeloupe, en 1635, des possessions françaises destinées à la production de sucre pour la métropole. De la fin du XVIIème siècle jusqu’au début du XIXème siècle, les bateaux négriers rapportaient du sucre de canne des colonies après avoir effectué le fameux circuit triangulaire (France-Afrique-Amérique).
Si l’histoire du sucre de canne ne se réduit pas au commerce triangulaire, la démocratisation de sa consommation dans l’hexagone reste liée au système économique de la Plantation ; un modèle qui a toujours impliqué un mode d’organisation hiérarchique de la production et une exploitation massive d’êtres humains. En effet, au début de la colonisation, les premières personnes qui cultivaient étaient des « engagés » – des travailleurs blancs pauvres – venus de l’hexagone pour travailler 36 mois avec un salaire à la fin. Or, comme une grande majorité d’entre eux mourraient avant la durée de leur contrat et que la traite négrière transatlantique commençait à se développer, il paraissait plus « rentable » pour les propriétaires de réduire en esclavage des personnes africaines à vie et de le légitimer par des principes racistes [424]. De plus, bien plus tard, après l’abolition définitive de l’esclavage dans les colonies en 1848, l’ « engagement » de populations venues principalement d’Inde, de Chine et de l’Afrique de l’Est était organisée pour remplacer l’ancienne main-d’oeuvre esclavagisée dans l’industrie sucrière, notamment à l’île de La Réunion et à l’île Maurice. Bien que leur statut ait été différent de celui des esclaves, de nombreuses recherches démontrent une proximité flagrante entre leur condition de travail et l’esclavage, et également, entre leurs conditions d’emploi et la traite négrière [425]. Les outils de production avaient évolués, ils s’étaient industrialisés, mais les dynamiques de pouvoir implantées par l’habitation-sucrerie restaient manifestes socialement et spatialement : jusqu’à la fin de la colonisation française, le système de production de sucre de canne reposaient sur ce rapport d’asservissement.
De l’auto-subsistance à la monoculture intensive : la rupture écologique
À travers l’analyse de Berthelot, on comprend que, pour réaffirmer son mode d’habiter originel après l’abolition de l’esclavage, le modèle de la case caribéenne a due composer avec l’héritage du système esclavagiste. Tout comme l’habitation, la case post-abolition ne se réduit pas à un bâtiment de résidence ; elle comprend les espaces environnants : « espaces d’utilisation (cuisine, sanitaires, coin lessive), espaces de production et de consommation (vergers/jardins caraïbe), espace d’occupation (élevage, basse cour) » [426]. En revanche, contrairement à l’habitation, elle s’articule sur une même unité de production/consommation : il s’agit de « la transcription spatiale d’une économie d’autosubsistance qui s’est constituée en marge de l’économie de plantation » [427]. D’autre part, les cases peuvent être implantées en groupement familial, multipliant ainsi ces unités. Celles-ci sont séparées par un espace tampon, tout en étant intégrées dans un système de solidarité communautaire.

Le groupement familial en Martinique, Jack Berthelot et Martine Gaumé, Kaz Antiyé jan moun ka rété. Perspectives créoles, 1982, p.74.
Reflétant l’héritage de pratiques amérindiennes, africaines, mais aussi, asiatiques – particulièrement dans le cas des territoires colonisés dans l’Océan Indien –, le « Jardin créole » – ou « Jardin Caraïbe » pour les Antilles – s’est implanté comme élément clé de la case post-abolition. D'une certaine façon, il représente parfaitement le concept de la « créolisation » introduit par l'écrivain et poète Edouard Glissant en 1997 : « la mise en contact de plusieurs cultures ou au moins de plusieurs éléments de cultures distinctes, dans un endroit du monde, avec pour résultante une donnée nouvelle, totalement imprévisible par rapport à la somme ou à la simple synthèse de ces éléments. » [428]. Cependant, tel que l’auteur le précise « la créolisation ne suppose pas une hiérarchie des valeurs […] ne se limite pas à un métissage, dont les synthèses pourraient être prévues. » [429]. Ce serait donc après que son évolution architecturale et son organisation socio-économique ait été en quelque sorte « écartelée entre deux cultures d’origine » [430], que la case traditionnelle se serait affirmée à travers la créolisation ; laissant apparaître des composantes imprévues, telles que le Jardin créole, en tant que véritables formes de résilience.
S’éloignant de la composition régulière et géométrique du Jardin à la française, l’organisation spatiale minutieusement réfléchie du Jardin créole permet d’assurer principalement une autarcie alimentaire et une auto-médication [431]. Ces deux fonctions révèlent l’autre fondement majeur qui distingue le mode d’habiter caribéen originel du mode d’habiter de l’habitation : la diversité des espèces végétales. En effet, la mise en place du modèle de la Plantation dans les Caraïbes impliquait, tout d’abord, la parcellisation et le dimensionnement des terres – la bande des « 50 pas géométriques » [432] est, d’ailleurs, toujours en place dans les départements d’outre-mers –, puis, le défrichage intensif et la monoculture des espèces. Pour Ferdinand, l’abattage du bois était une condition de cet habiter colonial ; alors que les Amérindiens coupaient quelques arbres pour faire leur agriculture vivrière, les colons considéraient que « habiter c’est défricher, habiter c’est abattre l’arbre » [433]. Dans ce sens, la monoculture a rompu avec les équilibres biologiques des écosystèmes qui, jusque-là, assuraient un maintien global des ensembles d’espèces animales et végétales. En quadrillant les paysages, elle venait simultanément homogénéiser les cultures et perturber les effectifs des espèces présentes sur une parcelle. Cette démarche impliquait de couper la plante au ras du sol pour que tous les nutriments extraits du sol soient transformés sous forme de sucre et soient exportés en Europe le plus rapidement. Or, du XVIème au XVIIème siècle, la culture de la canne s’est faite sans fumure. C’est pourquoi, la méthode des « planteurs », diffusée par les multiples livres sur l’agronomie tropicale publiés à cette période [434], a entretenue une asymétrie dans les échanges écologiques : la redistribution des nutriments ne garantissait plus une fertilité du sol et le modifiait d’une façon métabolique [435].

Agriculture, sucrerie et affinage des sucres, 1762. © Ministère de la Culture - Médiathèque du Patrimoine, Dist. RMN-Grand Palais / image RMN-GP
Érigée comme la façon de planter, cette logique de redistribution inégale agissait à toutes les échelles. Les préfaces de ces ouvrages laissaient explicitement comprendre que ces territoires n’étaient que des « matières à exploiter » pour les intérêts économiques de l’Europe et que la condition de cette agriculture intensive est bel et bien le travail forcé [436]. Néanmoins, on peut remarquer que ce discours changeait à partir du moment où les mouvements d’abolition de l’esclavage agitaient la société française ; laissant place à une alliance entre abolitionnisme et colonialisme. Effectivement, la fin de l’esclavage ne signifiait pas la fin de la Plantation mais une application différente du système colonial : les planteurs allaient être indemnisés pour leur « perte » et les travailleurs·euses, désormais affranchi·e·s, allaient continuer à travailler pour leur propriétaire dans un cadre salarial [437].

Gaston Prost, Le cacao des colonies françaises, ca. 1930s, Lithographie, 81 x 60 cm © Getty Research Institute, Los Angeles, California, (970031), ACHAC collection, 1880-ca. 1975.
On constate finalement un ensemble de littérature pédagogique qui s’est diffusée du XVIIIème au XXème siècle pour promouvoir les bénéfices de la colonisation à plusieurs niveaux et mettre à distance le rapport asymétrique d’exploitation intensive et massive que cela impliquait. Les manuels agronomiques visaient explicitement les hommes – car propriétaires –, pour qu’ils puissent donnaient les directives agricoles depuis l’hexagone ; les recueils de recettes, adressées explicitement aux femmes, intégraient ces denrées dans les pratiques culinaires françaises pour affirmer une certaine légitimité métropolitaine de consommation ; et enfin, les ouvrages et illustrations qui vulgarisaient le parcours des denrées coloniales proclamaient aux enfants que le système colonial serait une forme d’échange [438].
Même si tous ces enjeux ne ressortent pas particulièrement de la lecture proposée par l’exposition du Centre Pompidou, le livre de Berthelot serait aussi architectural que politique [439] car il remet en question ce qui fait histoire dans l’architecture – l’histoire considérée comme « naturelle ». Au final, l’auteur rejoint globalement le constat de Ferdinand : pour eux, la rupture qu’a institué le système colonial se situerait, dès le début, dans l’usage de la terre. La récurrence de chroniques écrites par des Pères – désignés comme missionnaires –, soulève d’ailleurs l’enjeu du sacre dans cette de « prise de la terre » [440]. Les peuples autochtones, qui n’avaient pas de notion de propriété privée, n’étaient, en fait, pas considérés comme des habitants, tels que les européens le concevaient. Ces derniers proclamaient une nécessité de « faire habiter » [441] ces îles : considérant qu’elles n’étaient « possédées par des princes chrétiens », ils en seraient les premiers habitants. Alors que ces peuples avaient des conceptions protectrices et sacrées de ce milieu de vie, composées de nombreux esprits et d’êtres non-humains, les européens venaient recouvrir ces terres d’un nouveau sacre, aussi impérialiste que patriarcal – les deux étant fondamentalement liés [442] (Cf supra chapitre 9). À travers une (re)bâptisation des terres – avec des noms souvent liés aux leurs – et de multiples cérémonies, la nouvelle sacralisation se basait, non plus sur une préservation des terres, mais sur une propriété absolue qui légitimait son exploitation. Ainsi, l’acte d’habiter s’affirmait en tant que geste principiel de la colonisation. La notion de l’habiter colonial qu’introduit Ferdinand propose finalement de lire la fracture qui s’est opérée à partir de la colonisation européenne des Amériques comme les fondements d’une modernité. Dans ce sens, en révélant que le mode d'habiter métropolitain engage la mise à distance d’« une manière singulière, violente et destructrice d’habiter la Terre » [443], l’économie plantationnaire dessinée par le « Jeu des échanges France-colonies » admet que les cuisines modernes en sont un parfait aboutissement.
[391] Dans un dossier intitulé « Apprendre l’Empire, un jeu d’enfants ? », Elizabeth Heath s’intéresse à l’ensemble des objets éphémères fabriqués à l’intention des « petits Français » pendant l’entre-deux guerres (lithographies, revues, jeux, etc.), et notamment à ceux qui sont liés à la consommation de chocolat. En analysant la visée commerciale de ces objets, elle met en relation leur dimension genrée et l’imaginaire impérial qu’ils viennent introduire dans l’esprit des enfants. voir Elizabeth Heath, « Apprendre l’Empire, un jeu d’enfants ? » Clio. Femmes, Genre, Histoire 40, 2014, p. 69-87.
[392] On note qu’il y a deux jetons « Guadeloupe » mais pas de jeton « Martinique », comme si les personnes qui ont produit le jeu considéraient que, étant donnée leur proximité géographique et productive, il n’était pas nécessaire d’inscrire les deux.
[393] Caroline Dubail, « Un Grand Palais pour les Arts Ménagers (1926-1960) : Hommage à Jules-Louis Breton ». Les Dossiers pédagogiques du Grand Palais 7. RmnGP, 2020, p. 13.
[394] On peut penser par exemple à la marque Banania créée en 1914 pendant la Grande Guerre, qui s’est banalisée le long du XXème siècle dans l’hexagone. Cet aliment, composé uniquement de produits d’importation coloniale (cacao, banane, sucre), visait à incarner une image patriotique et stéréotypée du « brave tirailleur sénégalais amateur de chocolat et balbutiant le français » qui se battait fièrement pour la France. voir Emmanuelle Sibeud, « “Y’a bon” Banania ». Histoire par l’image [en ligne], 2016.
[395] « Les régimes alimentaires des non-Occidentaux étaient décrits dans les articles de curiosité gastronomique comme désagréables et dégoûtants, preuves de l’infériorité culturelle et de la différence biologique des autres races. Le dégoût est une émotion puissante qui entretient les frontières sociales. En décrivant les non-Occidentaux comme des consommateurs d’aliments repoussants, voire non comestibles, les auteurs d’articles de curiosité gastronomique définissaient les limites de l’exotisme culinaire et de son exploration. Les desserts français composés des fruits tropicaux et les plats, également français, relevés de curry étaient acceptables parce qu’ils évoquaient l’exotisme sans jamais laisser penser aux convives qu’ils mangeaient comme des Africains, des Antillais ou des Indiens. voir Lauren Janes, « Curiosité gastronomique et cuisine exotique dans l’entre-deux-guerres. Une histoire de goût et de dégoût ». Vingtième Siècle. Revue d’histoire 123, n o 3, 2014, p. 69-84.
[396] Malcolm Ferdinand, Une écologie décoloniale : Penser l’écologie depuis le monde caribéen. Seuil, 2019, p. 84-85.
[397] Frédéric Edelmann « L’habitat créole au Centre Pompidou - Permanences ». Le Monde, 17 décembre 1982.
[398] « Kaz Gwadloup, Habiter créole. ». Exposition au Centre Pompidou, Salle de documentation du CCI (24 novembre 1982 - 24 janvier 1983)
[399] Jack Berthelot et Martine Gaumé, Kaz Antiyé jan moun ka rété. Perspectives créoles, 1982.
[400] Catherine Humblot, « Jack Berthelot, architecte et révolutionnaire ». Le Monde, 27 juillet 1984.
[401] Frédéric Edelmann, op. cit.
[402] Jack Berthelot et Martine Gaumé, op. cit., p. 99.
[403] Père Breton, Relations de l’île de la Guadeloupe, Basse-Terre, Société d’Histoire de la Guadeloupe, 1978, Tome 1, p. 68. [cité par Jack Berthelot, op. cit., p. 48.]
[404] Ibid.
[405] Christophe Charlery, « Maisons de maître et habitations coloniales dans les anciens territoires français de l’Amérique tropicale ». In Situ 5, 2004.
[406] Jack Berthelot et Martine Gaumé, op. cit., p. 16. Dans un tableau regroupant les caractéristiques architecturales de La Case Antillaise, Berthelot distingue 4 types de de caractéristiques architecturales : celles apportées par la population européenne, celles qui ont émergé depuis le rapport de colonisation, celles qui sont issues culturellement de la population noire esclavagisée et celles qui sont issues culturellement de la population française. Au sein de ces types, les éléments cités définissent les caractéristiques architecturales des cases propres à chaque île antillaise : St Barthélémy, Martinique, Haïti, Guadeloupe, Puerto Rico, Barbade, Ste- Lucie, Bonis.
[407] Jean-Baptiste Delawarde, La vie paysanne à la Martinique, 1937, p. 56.
[408] Jack Berthelot et Martine Gaumé, op. cit., p. 48.
[409] Jean-Baptiste Du Tertre, Histoire générale des Antilles habitées par les Français, Paris, Jully, 1667-1671, réé. Fort-de-France, Horizons Caraïbe, 1973, Tome II, p. 424. [cité par Jack Berthelot, op. cit., p. 50].
[410] Christophe Charlery, op. cit.
[411] Ibid.
[412] Ibid.
[413] Malcolm Ferdinand, op. cit., p. 54.
[414] Jean-Baptiste Labat, Voyage aux Isles: chronique aventureuse des Caraïbes, 1693-1705. Libretto, 2011.
[415] Ce nom de rue, désignant la voie centrale dans les villages des esclaves, s’est popularisé à travers le roman autobiographique de Joseph Zobel publié en 1950 intitulé « La Rue Cases-Nègres » et de son adaptation au cinéma par Euzhan Palcy en 1983.
[416] Jack Berthelot et Martine Gaumé, op. cit., p. 124-125.
[417] Ibid. p. 99-109.
[418] Ibid. p. 54.
[419] « Le fait qu’aucune photo du livre ne soit accompagnée du nom de son auteur prouve que l'auteur s’est, lui-même, improvisé photographe pour combler le manque de représentations iconographiques dans les sources historiques . Son œuvre justifiant ainsi les termes « investigations » et « observation directe » que l'auteur emploie. » Roméo Terral, « Kaz Antiyé jan moun ka rété ». Université des Antilles Guyane, s. d.
[420] Christine Laurière, « La Société des Américanistes de Paris : une société savante au service de l’américanisme ». Journal de la Société des américanistes 95, n o 2 (2009), p. 93-115.
[421] Elizabeth Heath, op. cit.
[422] Que ce soit dans les Caraïbes ou dans l’Océan Indien, l’économie de certaines îles s’est fondée sur l’industrie sucrière, les transformant en « isles à sucre ». Originaire de Nouvelle-Guinée, la culture de la canne à sucre était connue dans le Sud de l’Inde depuis le 1er millénaire avant J.C. Après s’être répandue vers l’Orient, elle a finalement été introduite en Occident par des marchands arabes . Les premiers modèles de cette culture à grande échelle avaient étaient introduits sur l’île de Madère, l’île de Sao Thomé et les îles Canaries par les colons espagnols et portugais. voir Charlotte Radt, « Aperçu sur l'Histoire de la Canne à sucre », Journal d'agriculture tropicale et de botanique appliquée, vol. 17, n°1-4, Janvier-février-mars-avril 1970, p. 141-147.
[423] Malcolm Ferdinand, op. cit., p. 74.
[424] Ibid. p. 65-66.
[425] Xavier Le Terrier, La main-d’oeuvre du sucre : de l’engagisme au colonat (Bourbon / La Réunion – 1848-1914). Centre de Recherches et de Documentation Emile Hugot. Musée Stella Matutina, 2016.
[426] Roméo Terral, op. cit.
[427] Jack Berthelot et Martine Gaumé, op. cit., p. 65.
[428] Édouard Glissant, Traité du Tout-monde. Poétique IV, Paris, éd. Gallimard, 1997, p. 37.
[429] Ibid. p. 194.
[430] Ibid. p. 58.
[431] « Les travaux de Catherine Benoît (2005) sur les jardins de case guadeloupéens ont mis en évidence l’organisation spatiale selon les usages des plantes qui les composent : “ […] les plantes ornementales et des plantes dites « magiques », dont les usages sont rarement précisés, se trouvent en façade de jardin ; plus proches de la case et protégées du soleil, sont disposées les médicinales ; à l’écart, les épices et les maraîchères ; enfin, derrière la case, les plantes vivrières et les arbres”. ». voir Jean-Valéry Marc et Denis Martouzet, « Les jardins créoles et ornementaux comme indicateurs socio-spatiaux : analyse du cas de Fort-de-France ». VertigO - la revue électronique en sciences de l’environnement [en ligne], Hors-série, n o 14 (septembre 2012).
[432] « Cette zone est une bande de littoral, selon une ancienne mesure créée au XVIIe siècle par Colbert (en tout 81,2 mètres) : elle est zone militaire interdite, à une époque de conflits fréquents dans les Antilles entre colonisateurs européens et à une époque de tentatives de fuite d’esclaves vers ce qu’ils appelaient l’« Autre Bord » : idéalement l’Afrique perdue. Avant la Révolution française, on dénommait cette bande de littoral les « 50 pas du Roi ». voir Yves Bergeret « La case, ancrage symbolique du Cahier d’un retour au pays natal d’Aimé Césaire ». Histoire par l’image, octobre 2007 [en ligne].
[433] Malcolm Ferdinand, op. cit., p. 60.
[434] Du XVIIIème siècle jusqu’au milieu du XIXème siècle, de multiples livres sur l’agronomie, et notamment des monographies sur la cannes à sucre, étaient publiés. Érigés comme de véritables sources d’information sur l’agronomie tropicale, ces ouvrages étaient écrits par des propriétaires eux-mêmes selon leur « expérience coloniale ». Celle-ci laissait, en réalité, transparaître la dimension théorique des techniques décrites. Appuyés par des illustrations et des citations, leurs propos (proches des récits de voyages) tournaient autour des variantes de pratiques agricoles et des recommandations de traitement de la main-d’oeuvre servile. voir Muriel Hoareau, « De l’art de cultiver et de fabriquer des produits coloniaux : livres techniques francophones et anglophones aux XVIIIe et XIXe siècles », dans Le livre technique avant le XXème siècle, à l’échelle du monde. CNRS Editions. Histoire, 2017, p. 425-436.
[435] Malcolm Ferdinand, op. cit., p.80-81.
[436] Muriel Hoareau, op. cit.
[437] Ce contexte post-abolition est notamment dépeint à travers un roman de Raphael Confiant publié en 1994. Le narrateur est le commandeur de l’habitation Bel-Event en Martinique, c’est-à-dire qu’il surveille les travail des coupeurs et des amarreuses. En décrivant les conditions quotidiennes de leur travail dans la plantation dans les années 30, l’auteur met en lumière les dynamiques raciales et coloniales qui subsistent dans l’économie martiniquaise après l’abolition. voir Raphael Confiant, Commandeur du sucre, 1994.
[438] Elizabeth Heath, op. cit. Parmi les objets éphémères pour enfants que l’autrice aborde, elle analyse l’affiche ci-avant produite par le Ministère des colonies : il s’agissait de montrer aux enfants, à l’aide textes et d’images, « le processus par lequel les “indigènes” extraient les fèves des cabosses, fèves qui sont ensuite transformées – grâce à la technologie européenne – en délices pour le palais ».
[439] Jack Berthelot était d’ailleurs militant à l’Union Populaire pour la libération de la Guadeloupe (U.P.L.G.), un mouvement indépendantiste. voir « 23-24 juillet 1984 - France. Mort de quatre militants indépendantistes en Guadeloupe », Encyclopædia Universalis [en ligne].
[440] Malcolm Ferdinand, op. cit., p. 59-60.
[441] « Nous soussignés, reconnaissons et confession avoir fait et faire par ces présentes fidèle association entre Nous […] pour faire habiter et peupler les îles de Saint-Christophe et de Barbade, et autres situées à l’entrée du Pérou, depuis le onzième jusqu’au dixhuitième degré de la ligne équinoxiale qui ne sont point possédées par des princes chrétiens, et ce tant afin de faire instruire les habitants desdites îles dans la religion catholique, apostolique et romaine, que pour y trafiquer et négocier des deniers et des marchandises qui se pourront recueillir et tirer desdites îles et de celles des lieux avoisinants, les amener amener au Havre à l’exclusion de tout autre […]. ». Jean-Baptiste Du Tertre Histoire générale des Antilles habitées par les Français, tome I, Paris, Editions Thomas Lolly, 1667, p. 8-9 (langage modifié par l’auteur). [cité par Malcolm Ferdinand, op. cit.]
[442] Elizabeth Heath, op. cit.
[443] Malcolm Ferdinand, op. cit., p. 67.