

TOURING



SPOILER ALERT

Céline Zufferey est écrivaine. Elle se passionne pour l’image et la mémoire, et était loin de se préoccuper de sport, jusqu’à ce qu’elle découvre les points communs entre sa pratique et celle des athlètes. P. 96

Lou Boyd souhaitait depuis longtemps interviewer la popstar sud-africaine
Moonchild Sanelly. « Elle a tellement de puissance, dit la journaliste anglaise. Son histoire et son parcours vers le succès sont vraiment inspirants. » P. 62

vit entre Zurich et Los Angeles, photographie des stars mondiales et des icônes du sport, dont Daniela Ryf. « Grâce à son engagement inflexible, il a été facile de capturer la dynamique des disciplines du triathlon dans cette série de photos. » P. 40
Nous vivons un automne merveilleusement coloré – que ce soit sous
l‘eau ou au sommet d‘une paroi rocheuse. La photographe d‘escalade Claudia Ziegler nous emmène dans des hauteurs vertigineuses (p. 26).
À Nazaré, au Portugal, le surfeur professionnel Nic von Rupp apprend à surmonter sa peur des profondeurs grâce à l‘apnéiste Morgan Bourc’his et découvre même l’aspect méditatif de cette discipline (p. 52).
Au crépuscule de sa carrière, la triathlète suisse Daniela Ryf se montre exceptionnellement ouverte et pleine de sagesse dans notre entretien (p. 40).
Enfin, le nom Moonchild Sanelly devrait te parler – la Sud-Africaine a, par exemple, déjà produit des chansons avec Beyoncé et Gorillaz (p. 62).
La Rédaction
Sandro Baebler
TOUJOURS PLUS HAUT, ENSEMBLE.
Tu peux compter sur ta Cornercard –n’importe où, n’importe quand. cornercard.ch


8 Galeries
16 L’addition, SVP !
18 Hype-Check
Héros & héroïnes
Lily Gladstone 20
Comédienne
Oli France 22
Aventurier
Lee Jung-jae 24
Comédien
Art au sommet 26
Claudia Ziegler est l’une des photographes d’escalade les plus recherchées au monde. Pour nous, elle a constitué un portfolio très personnel.
Plongée en apnée
Le grand blond du Grand Bleu
Lorsque le surfeur Nic von Rupp et l’apnéiste Morgan Bourc’his se rencontrent sur la côte portugaise, le calme plane malgré les grosses vagues.
Musique
Moon Landing
Moonchild Sanelly a tracé sa voie grâce aux paroles de sa mère, à une belle confiance intérieure, et à des lettres à l’univers.
Bike Life
Prouesses mécaniques
Le motocross urbain sous un autre angle, avec un cascadeur des temps modernes : Facene. Portfolio
Triathlon
La tête dans le guidon 40
L’athlète exceptionnelle Daniela Ryf réfléchit ouvertement sur la pression, les joies et l’intensité d’une longue carrière au sommet.
81 Voyage
85 Montre
86 Biohacking
87 Playlist
88 Accessoires
94 Agenda
96 On a Positive Note
98 Clap de fin

Moonchild Sanelly brille dans le ciel du ghetto-funk, et travaille étroitement avec de grands noms du milieu.


La main droite qui agrippe le bord de la planche, la main gauche qui caresse l’intérieur de la vague, le regard focus tourné vers le bout du tube : le photographe Domenic Mosqueira a immortalisé la surfeuse américaine de 18 ans, Caitlin Simmers, dans un moment magique au cours duquel la précision et la désinvolture sont palpables. Voici le portrait d’une athlète dans la pleine expression de son style. domenicmosqueiraphoto.com
Teahupo’o, Tahiti À plein tube

Schmallenberg, Allemagne
Au-dessus du lot
Sur cette photo de Lorenz Holder, on voit la star du slopestyle Erik Fedko effectuer un saut depuis une plateforme de 24 mètres de haut au Green Hill Bikepark, pour son clip Above The Trees, en réalisant un flair parfait. Hors champ, douze personnes se sont activées pendant onze semaines pour construire ce tracé, à l’aide de deux camions de bois et 22 000 vis. Le résultat est impressionnant. lorenzholder.com

Berlin, Allemagne
Sens dessus dessous
La star du skateboard Leandre Sanders défie la gravité, littéralement la tête à l’envers. La loi de la gravité ? Visiblement, elle ne s’applique pas à lui. « Je ne comprendrai probablement jamais comment il a réussi ce looping », déclare le photographe de 26 ans Mason Miller en commentant cette image prise dans le cadre de Red Bull Illume. « C’est pourquoi je préfère prendre les photos et lui laisser le skate. » domenicmosqueiraphoto.com


Jakarta, Indonésie
Sous tension
Voici Queen Badraw lors du Red Bull Dance Your Style en Indonésie, capturée par Rosmadhany Rais. Cette série de concours de street dance all styles fait escale dans plus de cinquante pays. Du hip-hop à la house, en passant par le locking et le popping, les danseur· euse·s doivent conquérir le vote du public. C’est ce dernier qui décidera également qui remportera la finale mondiale le 9 novembre à Mumbai, en Inde. Instagram : @queenbadraw.scratch
Les infos sur la finale mondiale accessibles via le code ci-contre :


Zurich, Suisse
Choc des titans
Ce qui n’était qu’une blague à la base est devenu l’un des événements sportifs les plus spectaculaires de l’année. En 2022, le Norvégien Karsten Warholm mettait le Suédois Armand « Mondo » Duplantis au défi de s’affronter dans un sprint de 100 mètres. Le premier est coureur de 400 mètres haies ; le second, sauteur à la perche ; les deux sont recordmen dans leur domaine. Le 4 septembre dernier, le duel a enfin eu lieu, sur la piste de la Diamond League. Le vainqueur ? Mondo, en 10,37 secondes. Karsten (10,47 secondes) a réalisé son gage et endossé le maillot de son adversaire pour ses épreuves d’athlétisme.

Scanne le code ci-contre pour lire l‘histoire et voir la vidéo de cet événement invroyable : 100m to Settle it All!

Lara fait à nouveau des siennes
Avec son top, son mini-short et sa soif d’aventure, Lara Croft s’apprête à conquérir le monde du streaming avec une nouvelle série animée, dès le 10 octobre.
3
personnages ont inspiré le graphiste Toby Guard pour la conception du personnage de Lara Croft : Indiana Jones, l’héroïne de BD Tank Girl et la chanteuse pop Neneh Cherry.
1 230
unes de magazines dédiées à l’aventurière, soit plus que n’importe quel topmodel humain — ce qui lui a valu une entrée dans le Guinness des records.
3 050
objets divers et variés constituent la collection Lara Croft de l’Espagnol Rodrigo Martin Santos, ce qui en fait la plus grande au monde.
3
actrices ont joué le rôle de la jeune archéologue dans le reboot du film Tomb Raider, en 2018. Alicia Viander incarne Lara Croft adulte, Emily Carey est Lara enfant, et Maisy de Freitas l’ado.
épisodes composent la série animée Tomb Raider —The Legend of Lara Croft, diffusée en première mondiale sur Netflix le 10 octobre 2024.
250 80 000
de dollars de recettes pour Lara Croft: Tomb Raider La production hollywoodienne est un succès lors de sa sortie en 2001, et lance la carrière d’Angelina Jolie, qui incarne alors la protagoniste casse-cou.
1968
c’est l’année de naissance de Lara Croft, « née » un 14 février. L’aventurière apparaît pour la première fois dans un jeu vidéo en 1996 : elle a alors 18 ans. Elle en aurait 56 aujourd’hui. 8
1
rue a été rebaptisée « Lara Croft Way » dans la ville anglaise de Derby, en 2010, car c’est là que Core Design, les développeurs de Tomb Raider, avaient initialement établi leur siège.

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C’étaient les mensurations de l’héroïne dans le tout premier jeu vidéo- elle devait cependant un tel tour de poitrine à une erreur de programmation.

Le nouveau California L’aventure commence
Le camping-car le plus populaire de Volkswagen Véhicules Utilitaires incarne depuis des décennies une mobilité de camping exceptionnelle combinée à une utilité quotidienne au plus haut degré. Le nouveau California perpétue cette tradition et l’associe à des idées et fonctions innovantes, comme le tout nouveau concept à 3 espaces avec cuisine d’été et sièges flexibles. Le camping intelligent à l’état pur. Montez à bord et profitez pleinement du quotidien et de vos aventures.
Énergie verte
Le kit Swytch est censé transformer n’importe quel vélo classique en e-bike en un tour de main. Est-ce que ça fonctionne vraiment ?
Notre expert high-tech Kirafn nous donne son avis.
Kirafin de son vrai nom Jonas Willbold, a 29 ans et divertit son 1,3 million de followers sur TikTok avec des formats humoristiques. En parallèle, il nourrit sa passion pour les produits et tendances technologiques.


L’objet
Le kit comprend une roue avant avec un moteur de 250 watts, un capteur de pédalage et une batterie, qui peuvent être montés sur n’importe quel vélo en trois gestes simples. Il suffit de tout connecter avec un câble, et un vélo ordinaire devient un e-bike capable de rouler à 25 km/h.
La vague hype
Fini le pédalage fastidieux ?
C’est tentant. Pas étonnant que la communauté cycliste s’emballe et poste une multitude de vidéos sur ce kit. Rien que la vidéo de @thejunglebadger a déjà accumulé 18 millions de vues.
L’avis
Les e-bikes sont souvent assez encombrants. Pas celui-ci. Le kit complet pèse, selon le modèle, entre 2,2 et 3,7 kilos. Quant à l’autonomie, elle est correcte : la version la plus chère atteint jusqu’à 90 kilomètres. Cependant, à 500 euros, elle n’est pas si bon marché.
BILAN
Indispensable pour… ... qui envisage depuis longtemps de passer à l’e-bike mais ne veut pas se séparer de son vélo adoré.
Superflu pour… … qui n’utilise son vélo que pour aller acheter les croissants le dimanche matin.



Lily Gladstone
Le film Killers of the Flower Moon a propulsé l’actrice sous le feu des projecteurs.
Ses origines indigènes jouent un rôle inattendu dans ce succès fulgurant. Mais en quoi ce patrimoine a-t-il changé la donne pour elle ?
Non pas une seule personne mais une tribu entière d’autochtones américains a failli remporter l’un des Oscars les plus importants attribués cette année. En efet, si Lily Gladstone avait reçu la récompense pour le flm Killers of the Flower Moon, pour lequel elle était nominée dans la catégorie meilleure actrice, la victoire aurait été célébrée au pluriel : « J’aurais gagné ce prix pour toute la communauté tribale », témoigne l’actrice. Cet esprit de partage, très présent dans les communautés indigènes, contraste fortement avec celui des sociétés occidentales, plus porté sur l’individualisme et l’épanouissement personnel.
L’union fait la force
« Bien sûr, j’ai aussi une certaine ambition personnelle, précise la jeune femme de 38 ans, mais je sais que si j’ai réussi tout cela, c’est parce que je viens d’une communauté qui m’a fait prendre conscience de mes points forts et qui m’a toujours encouragée à poursuivre mon chemin. » Elle ajoute : « Quand tu grandis parmi les Blackfoot, tu apprends dès l’enfance quelle est ta place dans le groupe et quel but tu y poursuis. Quand tu deviens adulte, tu sais exactement qui tu es, que le but de cette vie est de servir un plus grand ensemble, et de transmettre la culture de ta communauté aux générations futures. »
C’est pourquoi, contrairement à certains ou certaines de ses collègues du grand écran, Lily Gladstone n’a pas choisi de partir conquérir New York ou Los Angeles pour faire carrière dans le cinéma. « Je préférais rester dans le Montana, dans ma communauté et dans la région où j’ai été heureuse », explique-t-elle. Après avoir
Focus
Née à Kalispell, Montana (USA) ; âge 38 ans ; la première personne native américaine à remporter un Golden Globe ; le 26 mars, elle est célébrée par la Blackfeet Nation à l’occasion du « Lily Gladstone Day »
obtenu un Bachelor of Fine Arts à l’université, la jeune diplômée s’est lancée dans une première carrière de professeure de théâtre. Elle a donc commencé à enseigner l’art de la scène au sein de sa propre communauté indigène. « Il était important pour moi d’enseigner aux jeunes des techniques de théâtre qui leur permettraient de construire une nouvelle confance en eux. » Le concept du « théâtre de l’opprimé », développé par le Brésilien Augusto Boal, a été un des piliers sur lesquels s’est basé son enseignement. « Tu peux y exprimer les traumatismes qu’une communauté a vécus, et si tu y parviens, tu acquières un contrôle sur ces traumatismes. Cela a quelque chose de très réparateur. »
Aux côtés de DiCaprio
Bien qu’elle n’ait pas voulu faire une grande carrière à Hollywood, elle s’est retrouvée aux côtés de Leonardo DiCaprio et de Martin Scorsese. Jusqu’alors, elle avait joué dans des productions indépendantes et n’avait été récompensée que pour son rôle d’ouvrière de ranch abattue dans Certain Women. Scorsese ne lui a pourtant pas immédiatement déroulé le tapis rouge. Initialement, l’actrice incarnait un personnage secondaire, dont la réplique tenait sur trois pages. Mais l’histoire a subi des modifcations conséquentes par la suite. Le point de
vue dominant étant devenu celui des populations autochtones, Lily Gladstone s’est retrouvée projetée sur le devant de la scène, et a fni par incarner la femme de DiCaprio. Et il n’a pas fallu attendre longtemps avant que son talent soit reconnu. Dès la première du flm au Festival de Cannes 2023, la presse mondiale ne parlait que de l’extraordinaire force d’interprétation de l’actrice. Ce fut le début du buzz.
La danse des générations À l’heure actuelle, on peut retrouver Lily Gladstone en tête d’afche de Fancy Dance. Le flm, qui met en scène le quotidien d’une ado dans la tribu des SenecaCayuga, refète mieux que nul autre le point de vue et les valeurs de l’actrice autochtone. Une scène de danse illustrant le pow-wow, une rencontre culturelle d’indigènes américains, en est le parfait exemple. Ici encore, l’esprit communautaire est de mise. « Nous dansons aussi pour ceux qui ne peuvent pas être présents : pour les ancêtres, pour les générations futures, pour les disparus, pour les vieux. C’est une célébration de la vie, où tu ressens le lien avec tous les autres. »
Ainsi, la carrière de Lily Gladstone donne raison au dicton selon lequel le succès viendrait précisément à celles et ceux qui le poursuivent le moins. Au contraire, l’actrice nous confrme que la solidarité, la patience et la modestie sont les clés d’une réussite assurée.
Loin de la démesure et des folies du showbiz, la jeune femme conserve toujours une authenticité et une forte connexion avec ses racines. Fidèle à ellemême et à ses origines, ni la renommée ni le prestige n’ont jamais été ses motivations pour exceller. Et la passion restera son moteur : « Il y a deux ans, j’ai travaillé avec un collègue canadien qui m’a rappelé ce qu’est vraiment le métier d’acteur : je fais ça parce que j’aime ça. Mais je n’en ai pas besoin. Ce dont j’ai besoin, c’est de ma famille et de ma passion, d’être heureuse. Et je ne peux pas être heureuse si je suis séparée des gens que j’aime. »
Instagram : @lilygladstone Fancy Dance, sur AppleTV Under the Bridge, sur Disney+
Texte Rüdiger Sturm

« J’aurais gagné le prix de la communauté tribale. »
Lily Gladstone est étroitement liée à la culture indigène.
Oli France
L’aventurier
et chef d’expédition
anglais est en train d’écrire l’Histoire en voyageant du point géographique le plus bas jusqu’au sommet des plus hautes montagnes sur les sept continents.
Texte Tom Ward Photo Aaron Rolph
Des déserts aux jungles, des calottes glaciaires aux océans, l’aventurier anglais Oli France a traversé 75 pays avant ses 33 ans. Son dernier défi, The Ultimate Seven, verra le chef d’expédition et membre de la Royal Geographical Society devenir la première personne à voyager du point géographique le plus bas au plus haut sur les sept continents, en n’utilisant que sa force musculaire. Cet exploit d’endurance s’étendra sur 24 000 km et vingt pays. France a terminé l’étape africaine en septembre dernier, parcourant à vélo 2 634 km de Djibouti à la Tanzanie avant de gravir le Kilimandjaro. En mars, il a accompli la deuxième étape, parcourant à vélo 5 774 km de la Vallée de la Mort, en Californie, à l’Alaska avant de grimper au sommet du Denali. Ensuite, il prévoit une rando à vélo de 2 400 km en Argentine, de la lagune salée Laguna del Carbón suivie d’une ascension de 6 961 m de l’Aconcagua. Ici, il évoque les hauts et les bas de la vie d’aventurier…
the red bulletin : Comment as-tu transformé l’aventure en carrière ? oli france : J’ai grandi dans un milieu ouvrier, jouant au foot et au rugby. Je voulais passer chaque instant à l’extérieur. J’ai découvert l’exploration en participant à un week-end d’escalade à l’âge de 17 ans. Pour la première fois de ma vie, personne ne me disait de descendre ; on m’encourageait à monter. Suite à ça, j’ai étudié le leadership en plein air à l’université. J’ai rencontré des personnes partageant les mêmes idées et j’ai passé mes étés à travailler au Moyen-Orient, en Afrique, en Amérique du Nord… J’ai développé cette passion pour l’aventure.
Focus
Naissance Wigan (Angleterre) ; membre de la Royal Geographical Society ; au sommet du Denali il fait - 30 °C ; son sac à dos contient 200 objets ; leçons de ses voyages : même dans les endroits les plus sombres, il y a de la beauté.
Tu as accompli des choses incroyables. The Ultimate Seven est encore un cran au-dessus. Comment est venue l’idée ? J’ai consacré la majeure partie de ma vie adulte à l’aventure. Au fur et à mesure, j’ai toujours eu de nouvelles idées. Certaines ont disparu, mais celle-ci, née il y a une décennie, est restée. Au début, je pensais que c’était trop grand, trop effrayant, trop compliqué logistiquement. Puis, en développant mes compétences et mon expérience, je suis arrivé au stade où j’ai pensé que je pouvais me lancer dans sept voyages vraiment audacieux, qui me mettraient au défi de toutes les manières possibles.
Quel a été le plus grand défi que tu aies rencontré jusqu’à présent ?
Faire en sorte que les expéditions se réalisent est vraiment difficile. La partie en Amérique du Nord a été la plus grande et la plus coûteuse que j’aie jamais organisée, ce qui signifiait convaincre beaucoup de gens de m’aider. Et cela m’a vraiment mis à l’épreuve sur le plan physique. Trois jours après le début de l’expédition, mon corps était en miettes alors que j’avais dix semaines à tirer ! Je prenais des antidouleurs pour dormir. Je devais gérer les dangers et évaluer les risques. J’étais assailli de doutes : « Est-ce que je vais y arriver ou est-ce que je vais décevoir tout le monde ? »
Comment équilibres-tu les risques ?
Nous avons passé trois semaines et demie sur le Denali, à progression constante. Plus je m’élevais, plus les risques augmentaient, que ce soient les crevasses ou les avalanches. Il faut mettre son ego de côté et ignorer la « fièvre du sommet ». En montagne, il existe des forces beaucoup plus puissantes que nous.
Qu’est-ce qui te motive ?
La question du « pourquoi » évolue avec le temps. J’ai grandi avec un planisphère accroché au mur, je voulais voir le monde. En me lançant dans le guidage, j’étais motivé à rencontrer le plus de gens possible. Avec The Ultimate Seven, je veux inspirer mes deux enfants. Sur le Denali, je ne me voyais pas leur dire : « J’ai essayé quelque chose de très difficile, mais c’était trop compliqué, alors j’ai juste abandonné. » Avoir cette conversation était impensable.
Qu’est-ce que tu attends avec le plus d’impatience en Amérique du Sud ?
Ce sera une première mondiale. Dès le premier jour, le défi sera en fait d’arriver à la ligne de départ. Le point le plus bas en Amérique du Sud est un terrain privé, donc il pourrait y avoir des difficultés. Et le point le plus haut sera aussi le plus haut que j’aurai grimpé de ma vie.
Quel conseil donnerais-tu aux futur·e·s aventuriers et aventurières ?
Historiquement, les aventuriers viennent souvent d’un milieu élitiste. J’étais vendeur de cuisines avant de me lancer dans les expéditions – je ne suis pas né avec une cuillère en argent dans la bouche, et personne ne m’a pris par la main pour me guider dans la vie. Il y avait tant de raisons pour lesquelles je n’aurais pas dû faire cela. Maintenant, je passe une partie de mon temps à aller dans les écoles et à partager mon parcours. J’espère que les jeunes pourront s’en inspirer et avoir la force et la conviction d’essayer. Personne ne vous soutiendra, personne ne croira en vous. La plus grande chose que vous puissiez faire est de croire en vous-même. Si vous pouvez faire cela, vous pouvez accomplir de grandes choses.
Instagram : @oli_france

« J’étais vendeur de cuisines. Je ne suis pas né avec une cuillère en argent dans la bouche. »
L’aventurier Oli France a pris un chemin peu fréquenté.
Lee Jung-jae
Lee Jung-jae était déjà une étoile du cinéma en Asie avant que l’Occident ne le découvre dans Squid Game. Voici comment un succès planétaire efface les différences culturelles.
Texte Holger Potye
La nouvelle série Star Wars, The Acolyte, a démarré en battant un record d’audience : 4,8 millions de spectatrices et spectateurs en seulement 24 heures se sont immergé·e·s, en juin dernier, dans le nouvel univers Star Wars, établissant un beau record sur Disney+ cette année. La série se déroule à l’époque de la « Haute République », cent ans environ avant les événements de La Menace Fantôme, le premier des neuf flms Star Wars, et 132 ans avant le classique La Guerre des Étoiles (1977). Dans cette série thriller/ mystère, nous suivons le maître Jedi Sol dans ses enquêtes. Au Festival de télévision de Monte Carlo, l’acteur a troqué son hoodie de Jedi contre un costume blanc haute couture. Avec sa cravate bien ajustée, il est sans conteste le maître Jedi le mieux habillé de la galaxie. Cela peut être dû au fait qu’il a commencé sa carrière comme mannequin, découvert alors qu’il était serveur dans un café du quartier Gangnam-gu à Séoul (célèbre grâce au hit K-Pop Gangnam Style). Peu de temps après, l’industrie du divertissement frappait à sa porte. Depuis, il poursuit une carrière forissante en Corée. En 2021, il a joué dans la série à succès Squid Game le rôle de Seong Gi-hun, un joueur compulsif –Numéro 456 – et a attiré l’attention du monde du cinéma occidental.
the red bulletin : Comment ta carrière a-t-elle évolué depuis Squid Game ? La série Netfix a-t-elle été un tremplin vers l’univers Star Wars ? lee jung-jae : Avant Squid Game, j’avais déjà joué dans de nombreux flms et séries télévisées, inconnus en dehors de
Focus
Né à Séoul, en Corée du Sud
Accès à la célébrité tardif
grâce à la série Netflix Squid Game, et la nouvelle série de Star Wars The Acolyte Âge 51 ans Penchant pour la mode ; il est ambassadeur de la marque Gucci Collectionneur d’œuvres d’art IG @_jjlee ; 3,8 M de followers
la Corée. Squid Game a tout changé. Du jour au lendemain, Hollywood avait les yeux sur moi. Leslye Headland, la créatrice et productrice artistique de la série The Acolyte, m’a voulu pour son projet. Et la deuxième saison de Squid Game va bientôt sortir.
En quoi le plateau de tournage de Star Wars difère-t-il des plateaux de tournage coréens ? Il y a peu d’histoires de science-fction dans notre culture. En ce qui concerne les plateaux, Hollywood et la Corée travaillent de manière similaire. Mais l’univers Star Wars fait exception. La conception des décors, les costumes, les efets spéciaux, les accessoires – tout est surdimensionné. Le mythe Star Wars a commencé dans les années 70 et son cosmos a évolué jusqu’à aujourd’hui. Surtout au niveau technique, les progrès ont été révolutionnaires. Je dirais que c’est ce qui le diférencie le plus de l’industrie cinématographique coréenne.
De plus en plus d’acteurs asiatiques font également carrière à Hollywood... Les productions asiatiques me semblent populaires depuis longtemps aux ÉtatsUnis et en Europe. Autrefois, c’étaient
les flms japonais, chinois ou hongkongais. Depuis Squid Game, la Corée est in. Mais tout est fux. La vie est un fux dans lequel nous baignons tous. C’est un grand fux universel, en particulier via les réseaux sociaux. Ces derniers sont comme une loupe. Autrefois, seuls les cinéphiles connaissaient les grands flms asiatiques. Grâce au web, tout se passe de manière plus globale. J’ai de la chance d’en profter. J’en suis reconnaissant. Il y a encore de nombreux trésors cachés dans le cinéma asiatique. J’espère que nos cultures échangeront davantage à l’avenir.
Ton rôle de maître Jedi « Sol » dans The Acolyte était ton premier rôle en anglais. Est-il difcile de jouer dans une langue étrangère ?
Très difcile. Ma langue est habituée au coréen (rires). Les muscles de ma langue ne voulaient pas s’adapter à l’anglais. Chaque fois que je devais dire quelque chose, j’avais l’impression d’avoir un embouteillage dans la bouche. Ma langue se bloquait (rires). Mais je n’avais pas le choix. J’ai dû apprendre en peu de temps à parler cette langue étrange sans m’essoufer. Pendant le premier mois de mon apprentissage, j’avais du mal à déglutir et à manger.
As-tu toujours été fan de l’univers
Star Wars ?
La première fois que j’ai vu Star Wars –j’étais à l’école primaire – j’étais secoué et très ému. La grandeur de l’univers créé, l’histoire, les personnages, les designs –tout était surdimensionné. Je suis devenu fan et j’ai vu chaque flm au cinéma. Mais je n’aurais jamais pu imaginer, même dans mes rêves les plus fous, faire partie de ce monde un jour.
Comment te transformes-tu en chevalier Jedi ?
Au départ, j’étais très nerveux. Le rôle de Jedi est le Saint Graal des personnages de Star Wars. J’ai alors pris le parti de le rendre aussi humain que possible. Pas surdimensionné. Ni surpuissant. J’ai misé sur la notion de « superpouvoirs contre humanité ». Mon Jedi devait montrer des émotions. Le déf a été de savoir doser la part d’humanité et de réalisme que mon personnage pouvait adopter.

« La vie est un flux dans lequel nous baignons. »
Le Coréen mise sur plus de connexions dans le cinéma à l’internationale.

Claudia Ziegler Prises de vue
Texte Simon Schreyer
Photos Claudia Ziegler

Décembre 2016, première ascension hivernale de White Magic (8b+), une voie sur la face nord du Kleiner Barmstein près de Salzbourg, ouverte par Alex Huber. Mich Kemeter lutte et tremble de froid : « Les prises étaient minuscules et il faisait un temps glacial, c’était vraiment très dur. Contrairement à nos calculs, les rayons du lever du soleil n’atteignaient pas la paroi mais illuminaient la mer de nuages en contrebas dans la vallée. Une vraie galère mais de super photos », explique Claudia.

Plein air, lumières naturelles et bonne humeur presque palpable sont la marque de fabrique de Claudia Ziegler. La photographe autrichienne a constitué un portfolio très personnel qui réunit des alpinistes professionnels du monde entier en pleine action sur la roche.
La paroi ombragée d’Amalu, à Tafraoute, est un point de mire parmi les falaises abruptes de l’Anti-Atlas marocain. Son granit tigré d’orange offre des conditions idéales. Ici, on voit Inbal Katznelson dans la voie Ninja Berber (7b), en 2019.
Inbal Katznelson photographiée en 2022 dans son pays natal, en Israël. Comme il s’agit d’un instantané, la voie au second plan importe peu, l’objectif se focalise sur le jeu des ombres et des lumières sur le visage et l’expression d’Inbal. Une image en forme d’hommage aux peintures de la Renaissance.

Claudia Ziegler fait partie des très rares femmes dans le cercle fermé des photographes d’escalade les plus convoités au monde. Quelle a été sa première passion, la photo ou l’escalade ? Réponse : « J’ai reçu mon premier appareil photo à l’âge de six ans, c’était un petit modèle rouge. La montagne, c’est venu bien plus tard, vers la vingtaine. »
Depuis, elle capture régulièrement les plus grands alpinistes du monde dans son objectif.
Liberté, plein air, voyage : un triptyque essentiel dans le quotidien de cette Viennoise d’origine installée près de Salzbourg depuis une douzaine d’années.

Et dans sa photographie ? « Pour moi, le plus important est l’aspect humain et les émotions. L’autre thème central est la lumière ainsi que les formes et les couleurs des rochers que je photographie. Il m’arrive souvent de choisir moi-même la tenue des grimpeurs avant les séances photos, pour créer une parfaite harmonie avec les tons du décor. » claudiaziegler.com ; Instagram : @claudia.ziegler
En 2017, Claudia
(à droite), dans la grotte d’Hayonim (Israël) : « On n’escalade pas seulement les parois extérieures de la grotte en grès, mais aussi les parois intérieures. Des voies ont été spécialement équipées et l’air y est plus frais. Pour photographier Rannveig sur la voie Samurai (7b), je suis descendue en rappel dans l’ouverture de sortie de la grotte, qui se rétrécit vers le haut comme une cathédrale. »
accompagne la grimpeuse norvégienne Rannveig Aamodt


D’origine lituanienne mais tyrolienne d’adoption, la grimpeuse et spécialiste de bloc Egle Kirdulyte s’est frottée aux Gorges du Verdon en 2015. L’escalade étant un sport très complexe, Claudia doit en connaître par cœur les règles et les techniques pour en restituer fidèlement l’esthétique dans ses clichés. Son propre niveau d’escalade est de 8- sur l’échelle de cotation de l’UIAA (Union Internationale des Associations d’Alpinisme).



La grimpeuse égyptoitalienne Wafaa Amer en 2017 sur un bloc dans la forêt de Ginzling, l’un des plus anciens secteurs de bloc du Zillertal (Autriche). Cette variante sur l’arête de la voie Leischtl n’est pas trop complexe (6c+), mais la photo renvoie parfaitement ce sentiment d’intense concentration dans la quiétude de la forêt.

Regard vers le ciel : Ofer Blutrich pend comme un minuscule pantin en haut d’une grotte karstique creusée en forme de soucoupe à Keshet (Israël) en 2020. Depuis, l’escalade y a été interdite, comme dans beaucoup d’autres endroits du pays. Cette voie en surplomb, une 8a très exposée en suspension, est appelée « Icarus ». Ofer n’a plus que quelques mouvements à faire pour atteindre enfin le sommet libérateur. « Il n’y a rien à redire sur cette photo. Je l’adore », raconte Claudia.
Shauna Coxsey est une des meilleures grimpeuses britanniques de sa génération. Elle a remporté la Coupe du monde de bloc en 2017 et coprésenté les compétitions d’escalade lors des Jeux olympiques d’été de 2024. Ce portrait de 2015 est tiré du recueil photos de Claudia, The Young Savages : « Cette image me fait sentir toute l’ouverture d’esprit et la décontraction de Shauna, et les miennes par la même occasion : je me sens très proche d’elle ! »
« Si je fais tout mon possible pour restituer au mieux ma vision concrète d’une image, je prévois toujours des alternatives. S’accrocher trop fermement à une idée ne rend pas toujours heureux, dans la photo comme dans la vie réelle. »

« Pour que les autres s’ouvrent devant ton objectif, il faut t’ouvrir toi aussi ! »

L’alpiniste sud-tirolien Simon Gietl (au premier plan) et son collègue suisse Roger Schäli viennent d’en finir avec une très longue voie sur l’île grecque de Kalymnos, en 2016. On le sent bien dans l’expression corporelle et faciale de Roger, les deux compères sont complètement épuisés.
« Même si le soleil s’était déjà couché, il faisait encore si chaud que les deux ont fini la descente en rappel sur les rotules », se souvient Claudia.
DES AIIILES POUR L‘HIVER.

NOUVEAU
STIMULE LE CORPS ET L’ESPRIT.
Iced Gummy Bear

SES PLUS BELLES ANNÉES

Texte Christof Gertsch
Photos Sandro Baebler Styling Patrick Häusermann
Concentration maximale. Lors de notre séance photo à Zurich, la triathlète d’exception Daniela Ryf ne se contente pas de passer en revue ses trois disciplines, elle dirige également le programme d’échauffement.

« AVEC AUTANT DE SACRIFICES, JE VOULAIS LA VICTOIRE ENCORE PLUS FORT. »

Course à pied, natation, cyclisme. Le triathlon est l’un des sports les plus exigeants qui soient, et nécessite une concentration et une discipline absolues.

Vision en tunnel : elle en avait besoin pour l’entraînement rigoureux qui l’a propulsée au sommet mondial et qui l’y a longtemps maintenue.
« JE
REVIVRAIS BIEN LES DIX
DERNIÈRES ANNÉES : LES VICTOIRES, LES CÉLÉBRATIONS,
LA JOIE. MAIS JE NE VOUDRAIS PAS POUR AUTANT ACCOMPLIR
UNE SECONDE FOIS
TOUS
CES EFFORTS. »
the red bulletin : Vous souvenez-vous de votre toute première course ?
daniela ryf : Bien sûr, c’était en 1999 à Zuchwil, dans le canton de Soleure. J’avais douze ans.
Avec ce que vous savez aujourd’hui, que diriezvous à votre moi de l’époque ?
(Rires.) Rien, je pense. De toutes façons, le moi de l’époque ne m’écouterait pas. Je faisais ce que je voulais, je n’écoutais personne. Il y a peu, j’ai relu d’anciens cahiers d’entraînement et me suis rendu compte que, déjà, ce que j’aimais le plus, c’était les défs extrêmes. Aller dehors et me donner à fond – j’ai toujours eu ça en moi. Mais oui, il y a une chose que j’aurais bien aimé savoir plus tôt : que j’avais aussi le droit de prendre les choses à la légère de temps en temps et d’en profter un peu. La question étant de savoir si j’aurais été aussi loin dans ce cas-là... Je n’en sais rien.
Votre carrière de triathlète s’étend sur un quart de siècle. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi vous avez continué si longtemps ?
En fait, la seule fois où j’ai pensé prendre ma retraite, c’était après les JO de Londres en 2012. J’ai continué parce que je n’avais rien d’autre. Quand on a une alternative, c’est plus facile d’arrêter. À cette époque, le triathlon, c’était toute ma vie. C’est quand j’ai commencé à suivre un cursus de Food Science & Management à la Haute école des sciences agronomiques, forestières et alimentaires de Zollikofen que les choses ont changé. À partir de là, j’ai su que j’avais un plan B si jamais ça devait s’arrêter un jour.
La vie de triathlète a-t-elle pu être trop difcile ?
Vers la fn, oui. Je revivrais bien, disons, les dix dernières années : les victoires, les célébrations, la joie. Mais je ne voudrais pas pour autant accomplir une

La devise de Daniela Ryf : « Y aller et tout donner. » Elle n’a pas changé au cours de sa longue carrière.
Après une piqûre de méduse, loin d’abandonner, elle a réalisé un record personnel !

« CURIEUSEMENT, C’EST À HAWAÏ QUE J’AI RÉALISÉ
MON MEILLEUR TEMPS, UNE FOIS LA PRESSION RETOMBÉE. »
seconde fois tous ces eforts. C’était une période intense. Chaque année se divisait en trois phases : six mois tranquilles, trois mois de concentration et enfn les trois mois avant l’Ironman d’Hawaï, qui étaient loin d’être agréables. J’étais comme dans un tunnel, sous tension, à feur de peau, à la limite. Je devais me mettre dans cet état pour réussir à m’entraîner aussi dur qu’il le fallait. Et en même temps, je me renfermais tellement sur moi-même que cela me mettait une pression de dingue. Avec un tel niveau de sacrifce, je voulais d’autant plus décrocher la victoire.
La pression était-elle parfois trop forte ?
Oui, souvent. En même temps, tout se passait bien. Curieusement, c’est à Hawaï que j’ai réalisé mon meilleur temps, une fois la pression retombée.
En 2018.
C’est ça. C’est là que je me suis fait piquer à l’aisselle par une méduse, juste avant le départ de la natation. Ça me brûlait horriblement, je ne savais pas si c’était grave ou pas. J’ai quand même commencé à nager, mais j’ai tout de suite été distancée par les meilleures.
J’hésitais à laisser tomber. Dans ma tête, je me voyais déjà en train de pleurer dans ma chambre d’hôtel, déçue d’avoir abandonné. Alors j’ai continué. Je me suis dit : « Peu importe si je suis super lente, il faut que j’aille jusqu’au bout – pour moi, mais aussi pour tous ces gens venus à Hawaï pour me soutenir. » Je n’avais plus de pression, plus d’attentes. J’étais libérée.

Quand je suis sortie de l’eau, j’avais dix minutes de retard, mais j’ai pu me rattraper avec le vélo et la course à pied. J’ai gagné en 8 h 26 min 18 sec, aucune femme n’avait jamais été aussi rapide avant cela.
Comment avez-vous géré la pression toutes les autres fois où vous n’avez pas eu la « chance » de vous faire piquer par une méduse ? Quand la pression était vraiment trop forte, je me forçais à réaliser toute l’insignifance de ce que j’étais en train de faire. Ça peut paraître bizarre, mais ça m’a beaucoup aidée. Je mettais ma course en perspective avec ce qui compte réellement dans la vie, et je me disais que ce que j’étais en train de faire, c’était du luxe.
Diriez-vous que la pression est une bonne chose ? Il y a deux types de pression. D’un côté, le climat de compétition, cette légère tension nerveuse, la poussée d’adrénaline parce qu’on sait que ça va être un moment décisif. C’est une bonne pression, elle envoie au corps et à la tête le signal que quelque chose est en train de se passer. Mais à côté de ça, il y a une pression très diférente. On la crée soi-même, mais elle vient aussi des attentes du public. C’est une pression très pesante et je ne pense pas qu’il y ait du bon làdedans. On peut peut-être la gérer plus ou moins bien, mais elle n’a rien de vraiment positif. Plus on arrive à s’en libérer, plus on a de chances de réussir.
Dans quelle autre discipline sportive auriez-vous aimé faire partie de l’élite mondiale ?
(Rires.) Dans une discipline qui nécessite moins d’entraînement. Mais la vérité, c’est que le triathlon est quand même un sport assez gratifant : déjà, c’est une discipline honnête – plus on s’investit, plus le bénéfce est grand. Et puis, on peut pratiquer le triathlon à un niveau élevé plus longtemps que d’autres sports.
TRIOMPHE
L’incroyable athlète a remporté cinq fois l’Ironman d’Hawaï, dont quatre victoires consécutives. Alors que beaucoup l’avaient déjà reléguée au second plan, Daniela Ryf est revenue en force.

2015
Huit courses, huit victoires : c’était le bilan de cette année-là. Daniela Ryf a surpassé toutes les autres. Même si à Hawaï, elle était tendue – plus qu’elle ne le serait jamais par la suite – parce que son entraîneur Brett Sutton lui avait dit, après sa deuxième place l’année précédente, que si l’on ne gagnait pas à Hawaï lors d’une de ses premières participations, on n’y arriverait jamais. Sans compter qu’elle avait ses règles, ce qui s’accompagnait toujours de douleurs extrêmes chez elle. Quand elle a franchi la ligne d’arrivée en tête, il y a surtout une chose qu’elle a ressentie : un profond soulagement.

2016 On dit qu’il n’y a rien de plus difficile que de réitérer un succès. Daniela, bien que tenante du titre, ne pensait pas encore faire partie des meilleures du monde cette année-là. Elle allait devoir faire ses preuves à nouveau. Mais au final, cette deuxième victoire à Hawaï a été « facile » – peut-être plus facile pour elle que pour n’importe qui d’autre. Avec près d’une demi-heure d’avance sur la deuxième, l’écart n’avait jamais été aussi grand.

2017
Trois victoires d’affilée : avant elle, seules la recordwoman Paula Newby-Fraser, ainsi que Natascha Badmann et Chrissie Wellington, avaient réussi cet exploit. Pourtant, Daniela n’avait pas misé sur la victoire. Toute la saison, elle avait souffert de douleurs dans le dos et Lucy Charles-Barclay, qui allait devenir sa principale rivale, lui avait juré une attaque en règle… qui n’a finalement rien donné.

2018
Inoubliable : l’année de la méduse. Une surprise de taille. Daniela a bouclé l’Ironman d’Hawaï plus rapidement qu’aucune autre femme avant elle, alors qu’elle pensait encore à abandonner pendant la natation. C’est dire la douleur qu’elle ressentait après s’être fait piquer par une méduse juste avant le départ.

2021 Sa dernière victoire à Hawaï, ce n’est pas à Hawaï que Daniela l’a remportée, mais à Saint George, dans l’Utah, où le légendaire triathlon s’est exilé cette année-là pour cause de Covid. En 2019, elle avait été malade à Hawaï et, pour la première fois, elle n’avait pas réussi à se hisser sur le podium. Beaucoup à l’époque avaient déjà fait une croix sur elle, estimant que sa carrière était terminée. Cette cinquième victoire a donc énormément compté pour elle – elle a cloué le bec aux sceptiques et aux mauvaises langues.

Y a-t-il un autre sport que vous maîtrisez bien ?
Avant, j’étais très bonne en ski, je n’avais peur de rien. Mais j’ai dû arrêter à cause du risque de blessure.
Quel fut le moment le plus difcile de votre carrière ?
Récemment, quand j’ai dû décider de tout arrêter et d’avancer ma retraite, qui était prévue pour la fn de l’année. Je suis du genre à vouloir aller au bout des choses. Je voulais une dernière chance de tout donner et profter des dernières courses. Mais je n’ai pas réussi à me débarrasser de cette infammation au bas de la colonne vertébrale. Sur certaines sessions d’entraînement, je me suis dit cinq fois que je ne réussirais pas à aller plus loin. Mais j’ai continué. Jusqu’à ce que je comprenne qu’il fallait que j’écoute mon corps.
Quel a été le plus beau moment de votre carrière ?
(Réféchit longuement.) Je ne pourrais pas vous citer une compétition en particulier, ni une ligne d’arrivée plus que les autres. J’ai remporté trop de victoires
« SE DEMANDER SUR QUOI ON PEUT FAIRE LE PLUS DE PROGRÈS, ET SE CONCENTRER LÀ-DESSUS. »
toutes diférentes pour cela. Mais si vous me demandez ce à quoi je préfère repenser, ce ne sont pas les médailles, les coupes ou les prix. Ce sont les moments passés avec mes amis et ma famille le soir après une course. Après avoir accompli quelque chose qui, non seulement, me faisait plaisir à moi, mais aussi aux autres. J’ai vécu un de ces moments l’année dernière, après l’Ironman de Roth. La préparation avait été difcile, je ne m’étais pas assez entraînée à cause d’une gastro-entérite. Si j’ai pris le départ, c’est uniquement parce que je ne voulais pas décevoir ma mère, qui avait déjà planifé ses vacances d’été autour de cette date. Et fnalement, tout s’est très bien passé, j’ai même remporté la victoire – avec le meilleur temps mondial sur la distance de l’Ironman en plus. Le soir, on a cherché un endroit pour manger pour tout le groupe, mais les restaurants étaient tous complets. Alors, on s’est fait livrer des pizzas et on s’est posés tous ensemble sur une aire de jeux. C’était génial.
De quoi êtes-vous fère ?
D’avoir réussi à faire en sorte que mon bonheur dans la vie ne dépende pas que du sport, et cela, en partie grâce à ma compagne, Jenny.
Comment savoir s’il faut abandonner ou si l’on peut encore continuer ?
(Rires.) Grande question. On pourrait écrire un livre dessus. Je dirais que tant que c’est moins douloureux de continuer que de s’arrêter, on peut persévérer.
Faut-il être insatisfaite pour se faire soufrir ?
J’ai toujours été étonnée par la brièveté de la sensation de joie après une victoire. Y compris après les grandes victoires. J’ai travaillé pendant un an, j’ai remporté l’Ironman d’Hawaï – et j’ai peut-être été
« LES TRIATHLÈTES
ACCORDENT UNE
GRANDE IMPORTANCE
À L’OPTIMISATION DE SOI.
JE NE SUIS PAS CERTAINE
QU’IL FAILLE EN FAIRE
AUTANT DANS LA VIE DE
TOUS LES JOURS. »
vraiment heureuse pendant trois jours. Bien sûr, c’est très gratifant à long terme de remporter une épreuve aussi importante, mais je me suis toujours retrouvée assez rapidement à un stade où je me disais : « Okay, maintenant il faut que je me remette au travail pour pouvoir encore m’améliorer. » Est-ce que c’était de l’insatisfaction ? Je ne sais pas. Je dirais plutôt de l’envie. Je pense que le fait d’être profondément satisfait de sa vie n’est pas incompatible avec la capacité de s’entraîner très dur. Mais pour ma part, j’ai constaté que cela me demandait plus d’eforts de me faire soufrir quand j’étais heureuse.
Qu’est-ce qui vous a rendue le plus heureuse : l’entraînement ou la compétition ?
L’entraînement. Malheureusement, je n’ai jamais pu profter longtemps de cette agréable sensation d’avoir accompli quelque chose, parce qu’en tant que triathlète, on doit s’entraîner trois fois par jour. Quand je rentrais de la natation, tout ce qui m’importait, c’était de manger le plus vite possible pour pouvoir ensuite me coucher le plus tôt possible afn de réussir à enfourcher mon vélo le plus rapidement possible. Et ainsi de suite.
Comment s’entraîne-t-on à faire des choses pour lesquelles on n’a pas de talent ?
Ce n’est sûrement pas vrai pour tout, mais d’une manière générale, je dirais que c’est dans les domaines que l’on maîtrise le moins que l’on a le plus de marge de progression. Cela peut aider de s’en souvenir.
Vaut-il mieux accentuer ses points forts ou améliorer ses points faibles ?
Laissez-moi vous poser une autre question à la place : est-on vraiment obligé de tout optimiser dans la vie ?
Bien sûr, jusqu’à présent, je vivais selon cette devise, les triathlètes accordent une très grande importance à l’optimisation de soi. Mais je ne suis pas sûre qu’il faille en faire autant dans la vie de tous les jours. Pour un Ironman, je dirais qu’on ne peut pas
vraiment se permettre d’avoir de faiblesse. Si on fanche dans une discipline, on est déjà sur la touche à peine la compétition commencée. En cas de doute, vu qu’on n’a généralement pas assez de temps pour tout, je dirais qu’il faut se demander sur quoi on peut faire le plus de progrès, et se concentrer là-dessus. Pour la plupart, ce sera un point faible. Mais pour d’autres, cela peut aussi être leur force.
Quelles sont les gens que vous admirez ?
Personne que je ne connaisse pas personnellement. Je n’ai jamais eu d’idoles, je n’ai jamais été du genre à avoir des posters d’athlètes ou de pop stars dans ma chambre quand j’étais petite. J’ai aussi toujours eu du mal à comprendre comment des gens qui ne me connaissent pas personnellement pouvaient m’admirer. Je me disais que je n’étais pas si exceptionnelle que cela, qu’il s’avérait que j’étais seulement un peu plus douée que les autres en natation, en vélo et en course à pied. Moi, ce qui m’impressionne, ce sont plutôt les gens de mon entourage, comme cette collègue qui a une famille avec deux enfants – et qui, en plus, a lancé une entreprise de ftness qui marche bien, et qui gère tout cela à merveille.
À quoi pensez-vous quand vous ne pensez plus à rien ?
Je n’en sais rien. Tout ce que je sais, c’est que ces moments sont extrêmement rares. Mais ce sont les meilleurs moments. Je suis plutôt du genre à trop penser, même pendant une épreuve. Cela m’est rarement arrivé d’entrer dans cet état de fow absolu, où tout se déroule de manière fuide, sans qu’il faille réféchir à quoi que ce soit. C’est à vélo que j’y parvenais le plus facilement, quand je roulais vite et que mon corps savait exactement ce qu’il avait à faire. Mais de toute façon, pour moi, le meilleur endroit pour entrer en transe, cela n’a jamais été un lieu de compétition. Ça a toujours été le dancefoor.
Qu’envisagez-vous de faire après ?
J’ai beaucoup de projets en tête que j’aimerais réaliser, certains sont déjà bien avancés. L’année prochaine, je souhaite collaborer encore plus étroitement avec l’application de ftness Muuvr. J’ai également rejoint Humango, une application de coaching où chacun peut se préparer à un objectif personnel – par exemple, au Wings for Life World Run. En mars, j’organise une safari à vélo au Kenya, où nous collecterons des fonds pour ma fondation. La cerise sur le gâteau : je mets en jeu mon vélo de contre-la-montre de l’année dernière pour cela.
danielaryf.ch danielaryf-foundation.com

« Je suis très rarement entrée dans cet état de flow où tout se passe naturellement, sans que j’aie à réfléchir », déclare Daniela Ryf. Quand cela arrivait, c’était le plus souvent dans sa discipline favorite, le vélo.

Sous la planche
Texte Lisa Hechenberger
Photos Andre Carvalho
PLONGÉE EN APNÉE

Morgan
L’apnéiste
Bourc’his (à gauche) avec le champion de surf Nic von Rupp pour sa première séance d’apnée.
Légende du surf de grosses vagues,
Nic von Rupp se sent comme à la maison au milieu des vagues immenses et périlleuses. Mais ôtez-lui sa planche et les choses se compliquent. En compagnie de l’apnéiste professionnel français Morgan Bourc’his, le Portugais affronte son angoisse des profondeurs et redécouvre ainsi son second chezsoi avec un regard et un calme régénérés.

Born to dare. Nic von Rupp (à gauche) et Morgan Bourc’his se sont connus au GP de Formule 1 de Barcelone, lors d’un événement organisé par leur sponsor commun, Tudor Watch. Coup de foudre amical immédiat pour ces deux amoureux de l’océan.

Premiers secours. Le jet skieur professionnel Sergio Cosme est toujours aux côtés de Nic pour le sortir de la zone de danger après un wipe-out (autrement dit une chute grave) et avant l’arrivée de la prochaine vague.

Nic a peu de temps pour respirer entre l’entraînement, le surf et la production de contenu pour les sponsors et les réseaux sociaux !
Premières sessions d’apnée pour Nic dans la piscine de l’hôtel
Arribas Sintra, situé à quelques mètres de l’océan Atlantique.

« Il faut être en bonne santé physique pour faire de l’apnée, mais au final, tout tourne
autour de la sérénité absolue. »
Morgan Bourc’his

Morgan prépare Nic au prochain workout et lui montre comment étirer les abdos obliques et latéraux.
S«i je ne suis pas remonté dans cinq minutes, vous saurez que c’en est fini pour moi », plaisante le surfeur Nic von Rupp juste avant de se laisser glisser du speed boat dans les eaux froides de l’Atlantique. Un membre de son équipe lui demande s’il est nerveux. « Je ne sais pas..., répond-il l’air étrangement sérieux. Il y a beaucoup d’émotions qui se bousculent dans ma tête, là. »
48 heures plus tôt
Le soleil se lève à peine sur le village portugais de Nazaré mais on sent déjà que la température va monter en flèche. C’est dans la zone portuaire que se trouve l’entrepôt de Nic, qui lui sert à la fois d’espace de stockage, de bureau et d’atelier. Et c’est là aussi que se déroule la première rencontre entre lui et le plongeur en apnée, Morgan Bourc’his, venu de France pour une séance photo avec leur sponsor commun, Tudor Watch. Pour une plongée vraiment spéciale. Morgan est clairement impressionné par la décoration alentour, avec les planches de surf de Nic, de différentes tailles et modèles, celles que le Portugais d’origine germano-américaine et suisse utilise actuellement, et toutes les autres qui n’ont pas survécu à la dernière vague. À côté, des lycras multicolores ornent les murs, souvenirs de ses nombreux succès, le plus récent remontant au Biggest Wave Award 2023, lors duquel Nic a dompté une vague de 27 mètres à Nazaré, à seulement un mètre du record du monde actuel.

Entraînement au sec. Morgan pousse Nic à ses limites. But de l’exercice : faire monter le rythme cardiaque et simuler une situation où Nic est pris dans une grosse vague et doit retenir son souffle le plus longtemps possible malgré l’épuisement.

Le grand saut. Nic saute d’un tremplin de 3 mètres avec une ceinture de poids de 10 kilos pour augmenter l’impact à la surface de l’eau. Les vagues elles-mêmes sont parfois aussi dures que du béton.
« Le surf, c’est bien plus qu’un sport. C’est un mode de vie, une manière d’être », explique Nic, éternel sourire aux lèvres, regard vert-azur brillant, saluant les pêcheurs qui passent d’un signe amical de la main. Il a commencé à surfer à l’âge de neuf ans et signait déjà ses premiers sponsors à onze ans. « Ici, on profite de l’océan Atlantique et de certaines des plus grandes vagues du monde, explique l’athlète. Les gens du coin sont habitués aux conditions extrêmes, ce qui explique pourquoi je me sens aussi à l’aise dans les grosses vagues, selon moi. » Un sentiment de bien-être qui n’exclut pas un immense respect pour ces vagues massives et potentiellement mortelles. « Mes parents et ma petite amie ne sont jamais très rassurés quand je surfe. Mais ils savent que je suis prudent et que je prends mes
décisions de manière très consciente. J’ai bien l’intention de vivre longtemps, et en bonne santé. »
C’est pour cette raison que Morgan est ici. Passer le plus de temps possible sous la surface de l’eau, avec une seule inspiration, c’est la spécialité du Français de 47 ans. Dans le jargon, on appelle cela le CNF, pour Constant weight, no fins. Triple champion du monde de plongée en apnée, son dernier titre remonte à 2019, avec une marque personnelle de 91 mètres de profondeur. C’est cet art qu’il veut enseigner à Nic.
« Forcément, il ne s’agit pas que de retenir son souffle, quoique finalement… » rigole Morgan, bien conscient des années de travail acharné pour accomplir de telles performances et pouvoir, comme lui, survivre sept minutes et demie sous l’eau sans reprendre une seule fois son souffle.
« Même si j’ai grandi à Joué-lès-Tours, loin de la côte, j’ai toujours eu une relation très spéciale avec la mer. J’ai eu la chance de beaucoup voyager avec mes parents, notamment en Méditerranée. Ce sont des lieux qui sont restés gravés dans ma mémoire. J’avais déjà 22 ans quand, au cours de mes études de sport, j’ai ressenti l’appel irrésistible de l’océan. Et comme je voulais faire des recherches sur la physiologie cardiovasculaire en apnée, j’ai déménagé à Marseille et suis devenu mon propre cobaye. »
L’heure H. Morgan Bourc’his donne ses derniers conseils. Une routine pour lui même s’il ne s’en lasse jamais. Nic écoute, l’air concentré. Le but fixé : une plongée à 15 mètres.
Calendrier serré
L’objectif commun est clair : la toute première séance de plongée en apnée de Nic von Rupp, pour qu’il ait à l’avenir moins peur et plus de contrôle en cas de wipe-out (situation potentiellement mortelle où un surfeur est projeté violemment de sa planche et entraîné sous l’eau). « Sans planche, je ne me sens pas à l’aise dans la mer, reconnaît Nic. Je n’aime pas la profondeur, et l’une de mes plus grandes peurs est de manquer d’oxygène. » Les futures séances d’entraînement avec Morgan sont censées le préparer à cela. La première a lieu sur place dans l’entrepôt, avec quelques bases d’apnée comme le fait de respirer lentement et profondément du ventre et les inspirations rapides et rythmées. « Certes, il faut être en très bonne forme physique pour faire de l’apnée, mais au final, tout tourne autour de la sérénité absolue. Plus on est serein, fluide et détendu, plus c’est simple », confie Morgan à Nic avec une zen attitude que bien des maîtres yogis lui envieraient.
Peu importe l’exigence du programme, des gestes furtifs (une tape amicale sur l’épaule, un compliment, une conversation animée) viennent régulièrement souligner le respect mutuel entre les deux athlètes et le lien qui unit ces deux amoureux de l’océan, chacun à sa manière. Même quand Morgan (lui d’ordinaire si tranquille) hurle à pleins poumons “Go! Go! Go!” lors d’une séance intense au gymnase où Nic sue à grosses gouttes en pédalant férocement sur un vélo elliptique. Ou encore lors de la « session statique dans l’eau », comme l’appelle Morgan, exercice assez curieux à observer avec un Nic immobile, flottant sur le ventre dans la piscine, pendant que Morgan le tourne, le pousse et lui donne des instructions,

Sous pression
L’art de l’apnée exige une sérénité absolue, dans la tête comme dans l’eau. Par contre, le reste du corps s’agite dans tous les sens.

Pilote automatique
Des réflexes se déclenchent dès que le visage est immergé dans l’eau froide, avec, entre autres, diminution du rythme cardiaque et centralisation de la circulation sanguine (bloodshift).
Arrête ton cinoche « Il faut s’habituer au manque d’oxygène, explique Morgan, sinon ton cerveau te répète sans cesse que tu vas mourir, et ton corps passe en mode panique et consomme encore plus rapidement l’oxygène. »
Les poumons … se compriment à mesure que la profondeur augmente. À environ 40 mètres sous l’eau, ils atteignent leur volume résiduel et ne peuvent plus se rétracter davantage.

Un père pour la mer. Aujourd’hui, Morgan ne participe plus activement aux compétitions mais se consacre à la protection des océans et des créatures qui y vivent en participant à différentes expéditions de recherche et divers projets à travers le monde.

Bol d’air. La bouée de Morgan permet aux deux athlètes de flotter à la surface de l’eau avec un minimum d’effort lorsqu’ils remontent pour respirer et se reposer brièvement entre deux plongées, sans avoir à retourner sur le bateau.
jusqu’à la tombée de la nuit et que les lumières de la piscine indiquent qu’il est temps de garder ses forces pour le lendemain.
M. Parfait et la maîtrise du souffle
Le moment est enfin arrivé. Le speed boat quitte le port de Sesimbra, à environ 160 km au sud de Nazaré, pour longer la côte vers l’Atlantique. Le maître zen semble avoir un objectif précis en tête. « L’environnement est extrêmement important pour le premier essai », précise Morgan qui a l’habitude d’accompagner les novices pour leur première plongée en apnée.
Une fois arrivés là où l’eau est calme et le vent peu violent, Morgan commence à gonfler une bouée presque aussi grosse qu’un pneu de voiture. Il enfile
« Jusqu’ici, toutes mes expériences sous l’eau étaient brutales et violentes, mais là ça n’avait rien à voir. C’était comme de la méditation. »
Nic von Rupp
sa combinaison en néoprène, attache des cordes, vérifie minutieusement ses palmes, ses ceintures de poids et son tuba. Ce n’est pas pour rien qu’on le surnomme « Monsieur Parfait ». Il tend un masque à Nic, déjà prêt dans sa propre combinaison et visiblement moins bavard qu’à son habitude. Tous deux flottent dans l’eau à quelques mètres du bateau, accrochés à la bouée qui sert d’ancre de sauvetage et de point de repère. Morgan donne les dernières instructions. Par exemple, comment Nic peut se débarrasser de la ceinture de cinq kilos qui l’aide à descendre, au cas où il paniquerait. Et il lui rappelle le signe sans doute le plus important en plongée, ce cercle formé en réunissant le pouce et l’index, synonyme que tout va bien. Bientôt, il ne reste plus d’eux que quelques bulles venant crever la surface de l’eau.
« C’est un truc de fou !, est la réaction immédiate de Nic lorsqu’il remonte à bord une heure et demie plus tard suivi de près par Morgan. Jusqu’ici, toutes mes expériences sous l’eau étaient brutales et violentes, mais là, c’était complètement différent. C’était comme de la méditation, on est complètement centré sur soi. Je n’avais jamais plongé comme ça ! » Morgan rayonne aussi, car c’était également sa première expérience dans les eaux portugaises. Comme des gosses surexcités, ils se racontent leur aventure, les poissons rencontrés et la grotte découverte sous l’eau. Nic a atteint une profondeur de treize mètres.
« Je pense que j’aurais pu descendre encore plus bas, mais j’avais des problèmes de pression dans les oreilles », dit-il. Mais cela ne semble pas gâcher sa joie. Il se tourne de nouveau vers Morgan et le prend dans ses bras. Et comme avant de plonger, les mots lui manquent, mais pour une tout autre raison. Il est sûr d’une chose : « C’était peut-être la première fois, mais sûrement pas la dernière. »
Instagram : @nicvonrupp ; morganbourchis.com

Ghetto Funk
La pétillante artiste sudafricaine, Moonchild Sanelly, a toujours su qu’elle était une superstar et elle est en train de le prouver au monde entier.
Texte Lou Boyd
Photos Benedikt Frank Stylisme Toni-Blaze Ibekwe
Maquillage Yong-chin
Marika Breslin

Moonchild Sanelly n’avait encore qu’une vingtaine d’années quand elle a fait de sa coiffure une marque déposée. Encore inconnue à l’époque, la poète, danseuse et musicienne sud-africaine née Sanelisiwe Twisha récitait ses poèmes sur des scènes ouvertes à Durban la nuit, tout en étudiant la mode à l’université le jour. La jeune artiste, qui n’était pas encore une personnalité publique, était déjà bien décidée à protéger par copyright ses fameuses tresses en laine bleu saphir en les qualifiant légalement de moon mop (trad. serpillère lunaire). Une décision logique selon elle.
« J’étais consciente de mon pouvoir, dit-elle rétrospectivement. Les gens me prenaient pour une dingue, mais je savais que j’allais devenir une star. Et je savais qu’on allait essayer de piquer mon truc avant que j’aie une chance de briller sous les projecteurs. Donc, non merci. » Comme elle s’y attendait, ces tresses caractéristiques et le visage qu’elles encadrent sont désormais reconnaissables sur tous les continents.
Le “future ghetto-funk” est un genre qu’elle a ellemême inventé, mélange d’influences locales comme l’amapiano (fusion de groove deep house, de jazz et de rythmes traditionnels sud-africains) et le gqom, sousgenre de la house, avec de l’électronique, de l’afropunk, de la pop et du hip-hop, sans oublier la touche personnelle de Sanelly, un brin de sexualité positive et un zeste de sa langue maternelle, le xhosa. « Je ne suis pas limitée par les étiquettes, déclare-t-elle. Mes récits sont épiques, quel que soit le genre. Donnez-moi un style et je vous raconterai une histoire. »
Avec Rabulapha!, son premier album sorti en mars 2015, Sanelly fait une entrée explosive sur la scène musicale. Douze morceaux électroniques chaotiques et expérimentaux qui lui valent une nomination pour le meilleur album alternatif aux 22e South African
« Les gens riaient quand je disais que je voulais travailler avec Beyoncé. Qui rigole, maintenant ? »
Music Awards, et une place de choix sur la scène gqom de son pays. Une série de singles, dont Buthi Madlisa (avec l’artiste hip-hop sud-africain Jay Cubed), Guestlist en 2016, ainsi que des collab sur les morceaux d’autres musicien·ne·s viennent renforcer son statut. Puis en 2019, Sanelly reçoit l’appel qui va changer sa vie. Beyoncé la contacte et lui propose de coécrire et chanter sur son prochain morceau, My Power, qui figurera sur la compilation The Lion King: The Gift. « J’ai bossé dur sur ce morceau ! », rit-elle. Elle continue sa progression avec la sortie d’un EP (Nüdes) l’année suivante, et d’un autre album studio (Phases) en 2022. Désormais, Sanelly attire l’attention des plus grands noms de l’industrie musicale et collabore sur des morceaux d’artistes comme Diplo, Wizkid, Ghetts ou encore Steve Aoki. « Moonchild est une future superstar mondiale », déclare Damon Albarn, fondateur de Gorillaz et leader de Blur, avant de l’inviter à rejoindre la tournée mondiale de Gorillaz en 2022. Des collaborations qui ne sont pas le fruit du hasard dans la trajectoire de Sanelly. « Cela m’a aidée à me faire un nom dans différents endroits du monde, dit-elle dans un sourire. C’est autant une question d’inspiration que de tirer parti de chaque opportunité qui nous est offerte. »
Au mois de juin dernier, elle s’est unie à une autre artiste unique et charismatique, Rebecca Lucy Taylor, plus connue sous le nom de Self Esteem. Morceau pop plein de bruit et de fureur, Big Man est écrit du point de vue du « bon petit ami ». Un succès ajouté au weekend triomphal de Sanelly où elle se produit neuf fois sur sept scènes différentes lors du Festival de Glastonbury. À cela s’ajoute le single Scrambled Eggs (sorti en mai) et une apparition sur la chaîne YouTube ColorsxStudios (en juillet) qui la propulsent plus que jamais sous le feu des projecteurs. Un succès surprise pour n’importe quel·le artiste mais pas pour Sanelly. « Je suis exactement à ma place, estime-t-elle. La domination mondiale fait partie de ma liste. Je suis une superstar mondiale née en Afrique du Sud. »
Le matin de sa séance photo pour The Red Bulletin à Londres, l’inépuisable Sanelly danse sur le plateau avec son manageur, danseur et ami Ashwin Abioye Bosman. Arrivée dans une longue robe dorée transparente et des sous-vêtements noirs, ses tresses si

pour
Moonchild Sanelly et ses looks incroyables : la chanteuse sudafricaine photographiée à Londres en juillet
The Red Bulletin

C’est un personnage public sans tabous avec le goût de la sexualité positive.
Happy Place : en toute occasion, Moonchild Sanelly laisse libre cours à sa créativité.
reconnaissables rebondissent tandis qu’elle traverse le studio à la rencontre de l’équipe de stylistes.
Au cours des heures suivantes, Sanelly sort de la salle d’essayage dans une série de tenues extravagantes, son énergie et son excitation ne faisant qu’augmenter au cours de la journée. « C’est ton moment de bonheur ! », hurle un membre de son équipe dans le studio pour taquiner Sanelly qui se tord, twerke, sautille et flirte devant la caméra, ne s’arrêtant que pour se pencher parfois devant le moniteur et montrer son appréciation des photos.
Un terreau fertile
En plus des rythmes pêchus et entraînants qui ont fait sa réputation, le troisième album studio de Sanelly, Full Moon, enregistré avec le producteur Johan Hugo (Mumford & Sons, Kano), dont la sortie est prévue début 2025, proposera une facette plus personnelle, introspective et méconnue de l’artiste sud-africaine ; son style typique entre bravades et textes espiègles s’accompagnera de morceaux plus mûrs et plus profonds.
Sanelly admet que cet album l’a terrifiée. « Ça m’a vraiment foutu la trouille de libérer ces émotions. Je me suis laissée aller, j’ai accepté de ressentir toutes ces choses, un torrent de mots a surgi et j’ai enfin pu m’exprimer sans peur. »
Sanelly fait référence à des expériences qui remontent au tout début de sa carrière et de son enfance. Elle grandit à Port Elizabeth, ville officiellement connue sous le nom de Gqeberha depuis 2021 et située dans la province du Cap oriental (Afrique du Sud). Elle est élevée par sa mère, chanteuse de jazz. « Ma mère m’a appris à briller et à ne pas étouffer mon pouvoir, dit-elle. Elle aimait et connaissait des personnes de tous les horizons, elle tenait un club de jazz où toutes et tous se réunissaient. J’ai donc grandi au milieu de cette diversité, je côtoyais des couples de criminels et de flics, des enseignants pas encore sortis du placard, je connaissais tout le monde. »
Petite dernière de la famille, Sanelly est plongée très tôt dans le bain de la créativité. Elle voit ses frères et sœurs, cousins et cousines faire carrière dans la danse kwaito ou la production de hip-hop, un terreau propice à une vie d’artiste, donc. « Ma mère n’a jamais traité mes rêves comme des lubies, explique-t-elle. Ces derniers temps, j’ai réalisé que j’avais grandi dans un univers créatif privilégié, entourée de personnes hautes en couleur, des artistes qui me disaient d’être moi-même, de faire ce que je voulais et de croire en ma créativité. Quand ma mère me voyait suivre un groupe d’amis, elle me disait que je devais être une meneuse, quoi que je fasse. C’était une battante. » Puis tout change pour elle à l’âge de 17 ans. Sa mère meurt
Top 5 des meilleures collab de Moonchild Sanelly

DJ MAPHORISA & SHIMZA feat. Moonchild Sanelly Makhe
Sorti en 2018, cet hymne gqom a solidifié la présence de Sanelly sur la scène de la house sud-africaine. Ne vous laissez pas tromper par le rythme synthétique et le clip vidéo sur le dancefloor : ce morceau est porteur d’un profond message sur les agressions sexuelles et la culture misogyne.
BEYONCÉ feat. Moonchild Sanelly, Yemi Alade, Nija Charles, Tierra Whack, Busiswa Gqulu et DJ Lag
My Power
Beyoncé s’est entourée de cinq magnifiques voix féminines noires (et du producteur gqom DJ Lag) pour ce morceau de l’album compilation
The Lion King: The Gift. Avec son rythme entraînant et ses paroles sur la conscience sociale, l’émancipation et la solidarité, la chanson célèbre le pouvoir intrinsèque de chaque femme noire tout en tirant la sonnette d’alarme sur les systèmes qui cherchent à le leur retirer.
MAJOR LAZER
feat. Moonchild Sanelly et Morena Leraba Hands Up
Présent sur l’édition Reloaded de l’album Music is The Weapon de Major Lazer sorti en 2020, le titre Hands Up fait la part belle à la diversité et aux artistes internationaux· ales. Le refrain, avec les voix caractéristiques de Sanelly et du rappeur Morena Leraba ainsi qu’une prod solide de Diplo aux commandes, est repris en chœur dans les clubs.
GORILLAZ
feat. Moonchild Sanelly With Love to An Ex Cette ode à la liberté et à l’indépendance mélange parfaitement les univers sonores de Sanelly et de Gorillaz. En racontant l’histoire d’un ex qui refait surface, les vers de Sanelly expriment le besoin d’émancipation et d’en finir avec les relations toxiques ou réductrices du passé.
MOONCHILD SANELLY
feat. Ghetts Strip Club
Sorti en 2022, Strip Club est la 2e collab de Sanelly avec le rappeur Ghetts après Mozambique, un titre qui rend un vibrant hommage aux strip-teaseuses et aux twerkeuses qui se battent pour survivre : « Viens dans le strip-club, viens voir les nanas danser, viens leur filer du fric. »
soudainement, et Sanelly perd le soutien qu’elle avait dans son foyer. Elle décide de partir vivre seule à Durban et poursuivre des études de mode. « Je me suis enfuie de chez moi à 19 ans pour ne jamais revenir. Je ne vais pas m’apitoyer sur ce manque de soutien de ma famille mais ils ne me verront jamais échouer. »
Livrée à elle-même dans la ville côtière, Sanelly poursuit des études de mode à la Linea Academy tout en se faisant un nom sur la scène hip-hop locale. Elle fait du slam et vit de la vente des vêtements qu’elle confectionne. Alors qu’elle s’apprête à partir à Johannesburg avec l’équivalent de 30 francs en poche, elle apprend qu’elle est enceinte. Sanelly décide qu’elle pourvoira à ses besoins et à ceux de sa fille sans renoncer à ses ambitions artistiques.
Autant d’expériences qu’elle évoque dans son nouvel album. Morceau inhabituellement doux et contemplatif, Falling permet au public de jeter un rare coup d’œil sur la vulnérabilité et l’incertitude de Sanelly. “I’m scared of falling, scared of losing… Bitch, I know
« Ma mère m’a appris à briller et à ne jamais étouffer mon pouvoir. »

“Future ghetto-funk”, un style aussi personnel que séduisant et son message sexuellement positif lui ont valu des éloges et des fans dans le monde entier.
my family looking” (trad. J’ai peur de tomber, peur de perdre… meuf, je sais que ma famille regarde), chante-t-elle. “It’s not my baby,’ that’s what he said. Kicked me out without a test. Had to find a house for kids, now I’m in it.” (trad. Il a dit que c’était pas son gosse, m’a jetée à la rue sans faire de test, j’ai dû trouver un toit pour mes gosses, et j’y suis arrivée).
Une chanson révélatrice dont Sanelly est très fière. « Écrire Falling faisait partie d’un certain processus, celui du pardon ; et je savais qu’il y aurait encore un processus par lequel j’allais devoir passer, celui du lâcher prise. » On peut donc supposer que c’était un défi d’écrire et d’enregistrer des chansons aussi personnelles. Mais Sanelly s’amuse de cette idée et balaie le concept du blocage de l’écrivain de ses doigts parfaitement manucurés. « Je vais écrire une chanson tout de suite, dit-elle. Vous ne verrez pas souvent une autrice aussi rapide que moi. Je trouve toujours un moyen de finir ma chanson. Probablement parce que je raconte beaucoup de conneries, et que j’ai toujours des films et des histoires qui me trottent dans la tête. Mon esprit galope toujours tout seul. »
Autre morceau marquant de son nouvel album, To Kill a Single Girl (Tequila) fait ressortir une autre facette de l’histoire de Sanelly : son personnage public sans tabous et son goût de la sexualité positive. La chanson raconte une nouvelle relation qui lui a permis de transcender les stéréotypes : « Je suis plus qu’un coup d’un soir, chante-t-elle, et il s’en rend compte. »
Safe sex et assertivité
Sanelly est détendue et s’exprime ouvertement pendant l’interview, fait d’autant plus impressionnant que par le passé, elle a été mal interprétée et conspuée par les médias en raison de sa fluidité sexuelle et parce qu’elle défendait la libération sexuelle pour tou·te·s. En 2018, après avoir évoqué le bien-fondé des soirées safe sex lors d’une interview, on s’est mis à dire qu’elle voulait ouvrir un bordel en Afrique du Sud. Le bruit s’est répandu dans le monde entier et Sanelly a découvert qu’on l’avait interdite de contracter des prêts ou de louer des biens dans son pays d’origine pendant un an. « Ce sont les conséquences de l’ignorance. Ce journaliste n’avait aucune idée de ce que sont réellement ce genre de soirées. »
En fait, Sanelly parlait de quelque chose de très intéressant : « Je voulais proposer des soirées safe sex pour la communauté noire, explique-t-elle. Un espace où la forme, la taille ou le genre de ton corps n’a aucune importance, où tu peux évoluer librement sans avoir peur de te faire tripoter. Un endroit où tout le monde comprend ce qu’est le consentement. Pour moi, c’est justement dans le genre d’endroits tolérés par la société (les boîtes classiques, ndlr) qu’on se fait enlever, mettre de la drogue dans les verres et la main aux fesses. Il y a encore trop de gens qui ignorent l’existence de ces espaces où l’on peut se sentir en toute sécurité quand on a un vagin. »
Cela lui a coûté du temps et de l’argent, mais Sanelly n’a pas laissé ces propos mal interprétés l’empêcher de clamer sa conviction que ces espaces de liberté sont plus que nécessaires. « Ce sont des endroits où tu peux choisir ce qui te plaît. Tu es libre. Tout ce que je voulais, c’était que ma communauté apprenne


Entre détermination et manifestation, il y a un lien : celui de l’intention. Moonchild Sanelly a appris très tôt à compter sur elle, et à se donner les moyens d’accéder à sa meilleure vie. Et sans jamais se défaire de son immense sourire.
que ces lieux existent et qu’ils peuvent y aller, parce que j’ai toujours été la seule fille noire dans ces espaces et je sais qu’il y a d’autres funky motherfuckers comme moi, tu vois ? » Alors qu’elle était en Suède pour l’enregistrement de son nouvel album, Sanelly a commencé à faire le buzz dans son pays d’origine, ce qui est malheureusement devenu une habitude pour elle.
« Je n’étais même pas là et encore une fois, tout le monde en Afrique du Sud me traitait de prostituée, de pute et j’en passe, dit-elle en levant les yeux au ciel. Certains Sud-Africains pensent qu’en raison de mon homosexualité (Sanelly est sexuellement fluide et a fréquenté des hommes et des femmes par le passé, ndlr), je baise comme je respire. Tout ça parce que mon corps m’appartient, que je remue mon cul et que je fais tous ces trucs, poursuit-elle. Je sais pertinemment que si j’associais ma semi-nudité à la tradition, ce serait perçu différemment. Il y en a d’autres qui remuent leur cul en Afrique du Sud, mais comme c’est associé à la musique traditionnelle, c’est autorisé. Et moi, j’arrive

« Je ne suis pas limitée par les étiquettes. Mes récits sont épiques, quel que soit le genre. »
avec mon corps qui n’appartient qu’à moi et ils ne le supportent pas. Du coup, je me dis : “Allez vous faire foutre, bande de connards. Vous êtes des animaux et mon corps m’appartient.” »
C’est le ton qui fait la chanson
La manifestation est l’une des méthodes que Moonchild Sanelly utilise le plus pour écrire ses morceaux et atteindre ses objectifs, autrement dit pour verbaliser un résultat spécifique et demander à l’univers de le lui fournir. Une technique qu’elle utilise depuis qu’elle est adulte. « Quand je n’avais plus un sou, que je m’étais enfuie de chez moi et que j’étais enceinte, je n’avais que mon carnet. J’ai commencé à écrire des trucs du genre : “D’ici ce soir, je mangerai un morceau de custard slice” (une sorte de millefeuille, ndlr). J’ai compris que quand j’écrivais quelque chose, je finissais par l’obtenir avant la fin de la journée. Je me suis concentrée là-dessus, je me suis mise à réfléchir, à me dire : “Attends, et si je me mettais à écrire des trucs plus glorieux ?” Et c’est là que tout a commencé. »
Elle exprime des souhaits plus ambitieux, écrit qu’elle veut sortir un album, devenir une artiste mondiale, travailler avec Beyoncé, Diplo et l’un de ses groupes préférés, Gorillaz. Et peu à peu, ces déclarations ont commencé à se réaliser. « Tes mots, c’est ta lettre d’amour à l’univers, déclare Sanelly. Appliquetoi à écrire ta lettre, utilise les bons mots, et tout le reste viendra à toi. Mets de l’intention dans ton discours. Tu peux avoir tout ce que tu veux. Et ceux qui n’y croient pas, qu’ils aillent se faire foutre. Ils ont tous ri quand j’ai dit que je voulais travailler avec Beyoncé. Eh bien, qui est-ce qui rigole maintenant ? » Manifestation ou personnalité à la force irrésistible ? Peu importe, Sanelly a déjà parcouru un long chemin depuis ses débuts. Avec son nouvel album, une tournée européenne et le monde entier accroché à ses lèvres, elle n’est plus la jeune fille de 19 ans sans le sou ni la jeune mère à la poursuite d’un rêve. Désormais, elle est une reine de la pop de 39 ans avec trois filles déjà ados, a accompli un tas de choses et s’apprête à en accomplir encore plus. Sur le dernier morceau de Full Moon, Sanelly médite sur le chemin parcouru jusqu’ici. “I was so young, in love, from home I ran, you took me in, for that I’m glad, so thanks” (trad. J’étais si jeune et amoureuse, j’ai quitté mon foyer, vous m’avez accueillie et je vous en remercie), chante-t-elle à son public.
« Si je lève les bras au ciel, c’est parce que je suis fière de celle que je suis devenue. »
De tous ses triomphes, Sanelly explique que celui dont elle est la plus fière est d’avoir suivi la leçon de sa mère de ne jamais étouffer son pouvoir, autant pour elle que pour ses trois filles. « Si je devais mourir maintenant, j’aurais la certitude qu’à travers ma manière de vivre, elles ont grandi en sachant qu’elles peuvent croire en leurs rêves. Quand je suis allée à Johannesburg, je me suis dit que je n’allais pas me contenter d’apprendre à mes enfants à survivre, mais leur montrer comment gagner le gros lot, pour qu’elles sachent que tout est possible. J’ai financé toute leur existence en vivant mes rêves. Et personne ne peut les convaincre du contraire, parce que ce n’est plus un rêve mais la réalité. » IG : @moonchildsanelly

Un Superman, debout sur la selle, en wheeling.
Aisance : casqué sous sa capuche, Facene réalise un wheeling sur une voie fermée du Val-d’Oise. Ses skills à motocross lui ont ouvert le monde du cinéma, entre autres.

Le flow urbain
Texte PH Camy Photos Chris Saunders
Ces pages sont le fruit d’une rencontre
entre un cascadeur mécanique de talent, Facene, et un photographe animé par les nouvelles expériences visuelles, Chris Saunders. Une collaboration pour le plaisir des yeux – et vous faire apprécier différemment la Bike Life.
Venu de l’Est parisien, Facene, la trentaine, a très tôt été attiré par ces motos sur lesquelles des types issus des grands ensembles urbains faisaient des tricks, des moves incroyables, levant leurs roues, lâchant les mains, faisant entrer des engins dédiés au cross, à la terre, dans des dimensions plus bétonnées. Sur son histoire personnelle, il reste discret, seul lui importe le partage de sa passion pour le motocross. Pour lui, ce fut bien plus que faire comme d’autres dans son arrondissement (le XIXe, à Paris). La moto l’intrigue, l’anime au point de devenir un mode de vie, l’emmenant vers des sphères pros et une reconnaissance dans les milieux de la production audiovisuelle.
Ce « cascadeur mécanique » participe à de nombreux tournages pour des films, clips vidéo ou pubs. « Avec mon métier de cascadeur, je suis beaucoup à l’étranger pour les tournages, explique-t-il. Quand je suis à Paris, j’ai plein d’autres centres d’intérêts dont les sports de combat et le football. J’aime voir ma famille, mes amis, faire plein de choses qui ne concernent pas forcément mon travail ni la moto. »
Nous avons retrouvé Facene sur un site de banlieue parisienne dont les voies ont été fermées pour notre utilisation exclusive et l’avons présenté au photographe Chris Saunders. Quelques heures d’un après-midi d’août, les deux talents se sont apprivoisés et entendus pour produire les plus belles images, dans un mode réfléchi, rigoureux. Leur but, vous faire apprécier l’esthétique et le talent d’un rider dont les images défilent souvent bien trop vite, que beaucoup de gens associent à une discipline illégal qui s’apparente à du rodéo.
Pour Facene, rien n’est fait au hasard, et la sécurité prime. Il est reconnu et sollicité en tant que performeur et cascadeur professionnel, dont les skills sont appréciées par des productions parmi les plus réputées, en France et à l’international. Au bout de quelques heures de shooting, Facene nous demande de stopper la production pour de bon, il ne souhaite pas poursuivre ses tricks. « Je pense que c’est important de connaître ses limites, dans tous les domaines, développe-t-il. La maturité et la connaissance de mon corps font que je sais quand je ne dois pas dépasser la ligne rouge. »
En bref : toutes les images que vous voyez ici ont été réalisées en contrôle, en limitant les risques au maximum. Nous vous laissons apprécier les créations exclusives du duo Facene-Saunders, et vous dévoilons un peu plus le pilote, en ses propres termes.
Genèse
« Comme une majeure partie des riders, j’ai commencé par le vélo. Les aînés se baladaient sur leur roue arrière. Nous, les plus jeunes, roulions aussi à vélo, on voulait faire comme eux. Sauf qu’on poussait un peu le truc, on se donnait des défis : manual (figure de BMX, ndlr), avec une main, longue distance en roue arrière. J’ai tout de suite accroché à la sensation d’être en équilibre sur la roue arrière. Mais je me suis vite rendu compte que le vélo était limité, de par son fonctionnement. C’était devenu trop facile, et ma soif de vélo s’est transformée en faim de découvrir la moto. »

Kid fou de cross, Facene a poussé son envie de perf jusqu’à professionnaliser sa pratique, au service de productions vidéo dans le monde culturel.
Une passion
« J’ai grandi dans le nord de Paris, il était rare de voir passer une moto en roue arrière, mais je savais que ça existait. J’ai commencé à regarder des vidéos de moto en général. J’aimais beaucoup le pilote de MotoGP espagnol Carlos Checa, je ne sais pas pourquoi. Comme tout enfant passionné de moto, j’étais rêveur et j’ai cherché à savoir comment devenir pilote. J’étais déjà très mature pour mon âge. J’ai vite compris que c’était un métier élitiste, donc quasiment impossible à atteindre. J’avais aussi déjà vu des mecs faire des roues arrière à moto dans les clips américains, comme ceux de DMX, mais je n’arrivais jamais à retrouver la page profil des riders. Je ne sais plus où exactement, mais un jour j’ai entendu les mots “Bike Life”… et c’est à ce moment-là que j’ai découvert ce mouvement américain, cette notion de trickser sur un motocross, en ville. J’ai tout de suite compris que j’avais découvert ma véritable passion. »
Taxiphone
« La connexion Internet était très lente chez moi à cette époque. J’allais beaucoup au taxiphone du quartier pour étudier leurs faits et gestes sur Dailymotion et YouTube. J’étais fan de la maîtrise et de l’assurance dégagées par Chino Mmg ou Lor Dev aux USA, des riders
FOCUS BIKE LIFE
La « Bike Life » motocross, inspirée des USA et pratiquée en ville, consiste en une pratique du motocross en zone urbaine. Les motard·e·s exécutent des tricks dans des zones publiques, sur des routes, parkings et espaces urbains. Popularisée via les réseaux sociaux, cette pratique attire par son côté spectaculaire et rebelle, mettant en avant la maîtrise technique et l’audace des riders et rideuses, malgré les risques. En France, Facene est l’un des rares pilotes à avoir professionnalisé et officialisé cette pratique.

Griffe mode d’un ami, « ode à la liberté prônant le travail acharné pour atteindre cet idéal ».
de Baltimore. Parmi les autres noms américains que je peux citer en référence, il y a WOWBOYZ, Meek Mill, DMX, 12 O’Clock Boys, Benmore, Wheelie Wayne… Je me suis aussi aperçu qu’il y avait également des Français dans le mouvement : DouDou Cross Bitume, Vinou L’bleufeur, Fromage Bavette. »
Première bécane
« Le prix des machines te refroidit, surtout quand tu es jeune. Je me suis débrouillé pour m’acheter une mini moto au début, mais j’ai eu la même sensation que quand j’étais arrivé à bout du vélo : une frustration, par manque de puissance. J’ai acheté de plus en plus gros, de plus en plus puissant. Ma première vraie moto était une YZ 125 de 2004 que j’ai achetée pour les pièces de base, en plusieurs cartons… Sur l’annonce, elle était en miettes. (rires) J’étais parti récupérer ces pièces en RER avec un pote, le vendeur a eu pitié de nous voir repartir avec tout ça en direction du train ; il nous a raccompagnés chez nous en camion. Pour compléter, j’ai fait l’acquisition de plusieurs pièces quand j’avais un p’tit billet, chez un revendeur qui s’appelait Arnoroule. J’ai mis presque un an à la remonter/réparer entièrement. Je roulais avec à la sortie des cours, tous les week-ends. C’est là que tout a commencé. En 2014-2015, quand j’ai acheté une MT-07 et réalisé des tricks Bike Life sur une moto homologuée, c’est comme ça que je me suis fait connaître. Puis j’ai passé un autre step avec ma chaîne YouTube. »
Apprendre
« Comme dans toute discipline, ce qui compte pour progresser, c’est l’entraînement, mais comparé à d’autres, je me suis plus concentré sur l’exercice du flow que sur celui du trick pur. Apprendre certains tricks comme le no-hand, ça peut prendre des mois, et ça implique de nombreuses chutes. »
Busy
« Je travaille pour le cinéma, sur des shootings pour des marques de vêtements, pour des produits moto. J’apparais dans des vidéos en collaboration avec des équipementiers, je suis sollicité pour des interviews ou des publicités pour des constructeurs moto. »
Les tournages
« Je suis cascadeur mécanique, en auto et moto. J’ai performé sur les films Athena, Vermines, Loin du périph, Le dernier mercenaire, 3 jours max, Roqya et d’autres pas encore sortis. Aussi sur la série Lupin. Lors de ma première journée sur un film, l’ampleur de l’organisation m’a surpris, et c’est sur Athena que j’ai pris le plus de plaisir, car c’était la première fois qu’on me contactait pour réaliser ce que je sais faire de mieux. Les tournages m’ont beaucoup enrichi au niveau du travail d’équipe. Étant fan des belles images, j’échange souvent avec les cadreurs, le réalisateur, à la pause du midi, sur les différentes techniques, et autres. Les tournages m’ont permis de développer ma patience, ma concentration, ma gestion du stress, ma rigueur, et plein d’autres points similaires. Chaque scène, chaque film est différent. Je suis généralement présent pour réaliser des cascades mais je m’intéresse toujours au scenario, au caractère du personnage de l’acteur que je double. Ainsi, je cerne l’énergie à donner à ma cascade. »

« Je sais ce que je veux, ce qui marche et ne marche pas. »
Touch Ground, toujours en roue arrière, avec une des deux mains qui touche le sol.

« Les tournages ont développé ma patience, ma concentration, et ma rigueur. »
Facene et une Yamaha YZ250F 2024 prêtée pour le shooting.
Merci à Seb Billault et Autos-Motos Saint-Dizier.
USA, Dakar…
« Toute mon adolescence s’est résumée à dédier l’entièreté de mes économies à des motos. Je ne voyageais pas, je voyais ça comme une perte d’argent dédié à un plaisir éphémère. J’ai commencé à me faire connaître sur les réseaux sociaux, et des gens de différents pays : Sénégal, Brésil, ÉtatsUnis, Italie, Angleterre… m’envoyaient des invitations. Je me suis organisé avec des pionniers du mouvement locaux de différents pays pour voir comment la Bike Life se pratiquait chez eux, en Californie, ou à Dakar. Les États-Unis, c’est à part ! C’est un must pour se frotter aux cracks du milieu. J’y suis allez plusieurs fois, c’était un voyage logique et un passage obligatoire pour moi. C’est la moto qui me fait voyager. Je ne suis jamais parti nulle part sans faire de moto. »
Émotion x plaisir
« Certains ont besoin de faire le vide pour faire le plein, moi c’est l’inverse. Il n’y a que sur une moto que je déconnecte totalement. J’en ai fait toute mon enfance, il y a donc une émotion, des souvenirs qui remontent. Quand je collabore avec un photographe, c’est différent du freeride pur. Avec une équipe de shooting, il y a toujours la pression de vouloir bien faire, de donner le max, c’est du travail. Quand je suis seul, je cherche juste à prendre du plaisir. »
Déterminé
« Je sais ce que je veux, ce qui marche et ce qui ne marche pas. Ce qu’il faut que je renvoie en termes de photos, vidéos. Je m’occupe moi-même de la direction artistique de mes projets. C’est l’acquisition d’expérience qui fait que je fonctionne ainsi. »
Innover
« Quand j’ai commencé la moto, les réseaux, la Fame et tout ce qui va avec ne m’intéressaient pas. J’ai eu des comptes Instagram et YouTube très tard, j’avais des comptes privés sur ces plateformes juste pour regarder ce que faisaient les autres dans ma discipline. Ce sont mes amis qui m’ont poussé à poster. À l’époque, en termes de vidéo, hormis les Américains, je trouvais que personne n’innovait, personne ne postait de belles choses, de qualité, tout était focalisé sur la performance. Je me suis allié avec des amis qui étaient dans l’image pour réaliser des vidéos qualitatives. J’ai toujours été passionné par les caméras, la musique, l’image et sa technique : comment mettre en valeur un sujet, le jeu des lumières et tout ce qui va avec. J’ai beaucoup appris sur des documentaires de réalisateurs américains. Mon travail est venu tout accentuer niveau connaissances. »

Facene en No Hand : « Ôter les deux mains du guidon en restant en équilibre sur la roue arrière. Trick compliqué car difficilement rattrapable en cas de mauvais dosage des gaz ou manque de précision dans le calage de l’angle, ou de gainage insuffisant. Mais l’un des plus beaux, car il est la définition première de la sensation ressentie grâce à cette pratique : la liberté. »
Se démarquer
« La rue n’est pas obligatoirement l’endroit pour débuter. Un rider en apprentissage sera plus en sécurité sur une zone déserte. Mais pour moi, le flow s’acquière dans la rue, avec les obstacles du milieu urbain. Ils font naître un flow naturel qu’un rider qui roule uniquement en zone déserte n’aura pas. En ne regardant qu’un seul run d’un rider, je sais te dire s’il a pour habitude de rouler en zone rurale ou urbaine. C’est très compliqué d’évoluer en Bike Life, car ce milieu est officiellement illégal et très mal vu du grand public. La scène a besoin d’être encadrée pour les jeunes qui aimeraient s’exercer en toute tranquillité. Je pense que la première chose à faire est de se démarquer, et c’est tout de suite ce que j’ai essayé de faire, en étant créatif. Bien utilisés, les réseaux peuvent être un beau support pour transformer l’essai. »
Le motocross pro
« Je suis plus Sx que MxGP, c’est le seul sport mécanique que je suis pleinement. Je vais voir des courses quand j’en ai l’occasion. J’échange avec des pilotes pros comme l’Italien Mattia Guadagnini ou le Portugais Hugo Basaúla, et d’autres. Ils m’envoient leurs maillots en début de saisons. J’aime et respecte les pros en motocross. »
Vision
« J’ai envie de faire découvrir quelque chose de différent, peut-être d’inconnu, ou sous un autre angle pour qui a déjà entendu parler de la Bike Life. Mais faire changer les avis sur la Bike Life n’est pas mon objectif et ne l’a jamais été. Je veux juste faire entendre à celleux qui possèdent une certaine ouverture d’esprit qu’il y a peut-être quelque chose d’intéressant à voir derrière tout type de personne, de passion, de métier – même si on n’y adhère pas. Il n’y a pas que les routes classiques pour y parvenir. »
IG et YT : @facene_mmg
DÉJÀ PLUS RUSÉ QUE LES CONFIRMÉS ?

RED BULL DONNE DES AIIILES.
Voyage / Montre / Biohacking / Playlist / Accessoires / Agenda

SENTIERS DE MONTAGNE
En VTT au Colorado
VOYAGE/
DIAMANTS BRUTS
Après avoir sillonné tous les sentiers de vélo d’Europe, notre auteur s’embarque pour le Colorado, patrie spirituelle du sport de plein air aux États-Unis. Là-bas, il redécouvre l’amour de son sport entre falaises gigantesques et désert lunaire.

Au terme d’une ascension abrupte, le manque d’air au-dessus de 2 000 mètres irrite mes bronches. Mais dans cette région à l’ouest du Colorado, c’est surtout la vue sur la vallée en contrebas et sur mon prochain objectif, la ville de Grand Junction, située à 1,5 kilomètre, qui me coupe le souffle. Les gens du coin ont surnommé ce parcours « Wineglass » (verre à vin), car il débute sur une roche lisse en forme de calice avant d’emprunter un sentier étroit comme une tige.
C’est l’une des premières difficultés du RibbonTrail, un parcours de descente en VTT de 4,5 kilomètres (niveau diamant noir) qui fait partie des Lunch Loops, un réseau de sentiers qui encerclent la ville. Guide local et photographe, Devon Balet me met en garde : ici, on atteint vite les 100 km/h.
Le Wineglass sera mon dernier grand défi de la journée. Voilà cinq jours que j’explore le Colorado sur mon vélo. Ayant parcouru la plupart des sentiers et des routes du Royaume-Uni et d’Europe, il m’était difficile de refuser cette opportunité de découvrir enfin le cœur spirituel du VTT. Singletrails de granite, montées et descentes de montagnes enneigées, paysages désertiques lunaires : le Colorado propose un condensé de tout ce que les États-Unis peuvent offrir de meilleur, aucun autre endroit abritant une telle variété de sentiers.
Sommets gigantesques en vue
Le premier jour, je pars de la bourgade de Fort Collins, à une heure au nord de Denver. De là, je commence par sillonner les pistes à l’ouest du Horsetooth Reservoir. Tout se passe bien au départ de mon excursion au bord de la rivière : j’entame une ascension d’environ une heure, 500 mètres sur 5 kilomètres, assez technique mais gérable. Seule la section finale très accidentée me force à descendre de selle pour pousser mon vélo. Mais heureusement, la beauté du paysage à l’ouest des imposants sommets du Front Range, la chaîne pré-montagneuse des Rocheuses, atténue la douleur de mes efforts.
CHEVAUCHÉE SAUVAGE
L’auteur Charlie Allenby négocie l’un des passages techniques compliqués du Horsetooth Reservoir.

« Singletrails de granite, parcours alpins enneigés, paysages désertiques lunaires : un véritable concentré de ce que les États-Unis peuvent offrir de meilleur. »
De nouveau dans le flow
C’est dans la descente du Wathen, une pente de 2 kilomètres classée diamant noir, parsemée de rochers de quartz scintillants et de virages élevés et ondulants, que tout s’écroule, littéralement. Britannique de mon état, je confonds les freins avant et arrière sur ce vélo made in America, et fais deux chutes coup sur coup sur des racines glissantes.
Je termine cette descente étroite et sinueuse en redoublant de prudence, le souffle court, le cœur battant à tout rompre. Je finis par atteindre le fond de la vallée et en profite pour reprendre mes esprits. Être crispé sur le vélo n’aide pas sur un terrain aussi accidenté, bien au contraire. Je dois retrouver ma sérénité et mon flow. Finalement, le reste de la journée se déroule sans accroc. Aérien, impassible, j’enchaîne les descentes de

À FLANC DE ROCHE Allenby admire la vue depuis la falaise au départ du Ribbon Trail.
DESCENTE ENTRE LES PEUPLIERS Allenby slalome entre les troncs blancs.


« Mon dernier challenge : une section surnommée “Hospital Hill”. »
RESPIRER UN BON COUP
Allenby contemple les vignobles et les vergers de pêchers de Palisade.
PICK-UP PARADISE
Pour se mettre dans l’ambiance, un coup d’œil sur la route de Palisade suffit !
rochers en grès rouge de cette doubletrack flanquée de prairies.
Le lendemain, je traverse la ligne de partage des eaux continentales et continue vers l’ouest de l’État. Si le village de montagne de Snowmass est moins connu que la célèbre station de ski d’Aspen, ses sentiers cyclistes surpassent largement ceux de son illustre voisine, avec des montées raides en lacet à travers des forêts de peupliers aux troncs blancs, et une vue dégagée dans toutes les directions depuis les crêtes exposées. Les jumps du Deadline Trail, spécialement creusés pour les vététistes, me permettent de retrouver ma confiance perdue à Fort Collins.
MILE HIGH CITY
Avec une altitude moyenne de 2 074 mètres au-dessus du niveau de la mer, le Colorado est l’État le plus élevé des États-Unis. Des vols directs relient Zurich à la capitale, Denver, surnommée « Mile High City » en raison de son altitude de 1 609 mètres. Une fois au Colorado, mieux vaut louer une voiture, même s’il existe des correspondances depuis l’aéroport principal.
Et soudain, le désert
Mon voyage se poursuit le long du tumultueux fleuve Colorado. Les sommets vertigineux laissent place à des collines plates et étendues, la végétation verdoyante à un paysage désertique et aride. Tel un mirage, les vergers de pêchers de Palisade se profilent à l’horizon, mais toute mon attention est fixée sur l’imposant sommet au sud de la modeste bourgade. Culminant à 3 454 mètres au niveau du Crater Peak, le Grand Mesa est le plus grand plateau au monde. C’est aussi là que se trouve le Powderhorn Bike Park et son impressionnante descente de Palisade Plunge, longue de 51 kilomètres.
C’est la première fois que je roule sur du grès, et ça n’est pas une mince affaire. Mon guide me recommande de garder constamment la roue avant en mouvement sur un Rock Roll de quatre mètres de haut, une roche ronde et escarpée en grès que l’on ne trouve qu’ici. À chaque défi relevé, je sens une grosse montée d’adrénaline. Dernier challenge : une section appelée « Hospital Hill ». Je repense à tout ce que j’ai vécu au Colorado et décide de finir à pied. Pas besoin de nouvelles cicatrices, je sais déjà que mon voyage restera… inoubliable !
Charlie Allenby est un écrivain londonien passionné de course à pied, de cyclisme et d’aventures. Instagram : @charlie.allenby
MONTRE/ LA REINE
DES OCÉANS
Avec la Seascoper 600
CarbonTech, dernier modèle de la maison horlogère Titoni, les athlètes, aventuriers et aventurières modernes vont s’offrir une plongée dans l’excellence.

La valve à hélium située sur le côté permet de relâcher l’hélium lors de la remontée et empêche ainsi une surpression dans le boîtier.
La marque Titoni, fondée il y a plus d’un siècle par la famille Schluep, fait le pari de la perfection avec son premier modèle en carbone. Aussi robuste que légère, cette montre au design sportif équipée du mouvement manufacture T10 certifié COSC se distingue par une finition mate en carbone, une lunette résistante aux rayures et une lisibilité optimale grâce aux pigments luminescents SuperLumiNova pour toujours plus de fiabilité et de précision. La Seascoper 600 est étanche jusqu’à 600 mètres, elle ravira autant les aventuriers et aventurières des fonds marins que les passionné·e·s de l’écologie avec son bracelet en plastique océanique recyclé. 2 850 CHF, titoni.ch
BIOHACKING/ PENSÉE ÉLASTIQUE
En quoi une bande élastique a son utilité à la maison et ne sert pas qu’aux athlètes.
On devrait éviter les anglicismes autant que possible, mais c’est impossible ici car nous parlons de flossing. Non, pas de la danse du fil dentaire, mais de l’effet presque magique d’une bande élastique de la largeur d’une main sur les articulations douloureuses.
J’ai essayé récemment la technique du flossing, lorsque mon genou droit s’est soudainement et fortement manifesté. À tel point que faire un pas devenait presque impossible. Heureusement, un physiothérapeute expérimenté m’a conseillé. Il a palpé mon genou, testé quelques mouvements, dit « hum, hum », puis il a enroulé et serré autour de mon genou la bande élastique qu’il avait apportée, si fortement qu’elle a coupé la circulation. Il m’a ensuite fait faire quelques mouvements actifs et passifs pendant environ deux minutes, puis a retiré la bande. Résultat incroyable : la douleur avait disparu. (Un grand merci à Julian Gunkel pour son intervention salvatrice !)
Seulement deux minutes suffisent
Une bande élastique combinée à quelques mouvements peut faire des merveilles pour aider nos articulations à travailler. On peut l’utiliser en cas de douleurs aiguës, mais aussi à titre prophylactique.
Pourquoi cette technique si simple fonctionne-t-elle aussi bien ? Probablement en raison de trois effets combinés.
Premièrement, après le relâchement de la bande, le sang afflue plus fort dans les tissus, améliorant ainsi l’apport en nutriments et favorisant l’élimination des déchets.
Deuxièmement, la compression puis la libération peuvent desserrer les adhérences dans les tissus, améliorant ainsi de manière significative la mobilité mécanique de l’articulation.
Troisièmement, une désensibilisation des mécanorécepteurs se produit. Comme lorsqu’on se masse fort la main après s’être cogné, la pression de la bande élastique couvre les signaux de douleur et peut entraîner un reset de la perception de la douleur dans le cerveau. Je l’ai moimême vécu, l’effet anesthésiant a été durable.

ANDREAS BREITFELD est le biohackeur le plus connu d’Allemagne. Il fait de la recherche dans son laboratoire à Munich. Pour simplifier, on peut dire que le biohacking regroupe tout ce que les gens font de manière autonome pour améliorer leur santé, leur qualité de vie et leur longévité.
PLAYLIST/ COUPS DE POUCE
La musicienne anglaise Nilüfer Yanya, 29 ans, évoque quatre chansons qui l’ont aidée dans l’écriture de son dernier album.
La musique de Nilüfer Yanya, cocktail d’émotions entre indie-pop, jazz et rock, n’a cessé de faire grimper la chanteuse-autrice-compositrice anglaise plus haut sur l’Olympe de la musique depuis ses débuts, il y a déjà huit ans de cela. Ses deux derniers albums ont été classés parmi les meilleurs de l’année par le New York Times. Depuis, elle joue régulièrement à guichets fermés aux États-Unis, en Australie, en Asie et en Europe. En tournée en ce moment, elle se produira deux soirs de suite à Paris, les 28 et 29 novembre, à l’occasion de la sortie de My Method Acting Afin de livrer cet album, elle s’est coupée de toutes influences extérieures avec sa complice d’écriture Wilma Archer. Un retour à l’essentiel. « Il faut du courage pour ne se fier qu’à son instinct », déclare-t-telle. Elle cite ici quatre titres qui l’ont guidée dans cette démarche.
niluferyanya.com

PJ Harvey
Rid of Me (1993)
« Je l’adore, elle est d’une telle simplicité. On entend un cliquetis sourd tout au long de la chanson. Il se passe tellement de choses, mais ce cliquetis ne change pas, et c’est ce qui fait la force de ce titre. J’ai l’impression que c’est ce que je cherche à atteindre avec ma musique, même si je ne sais pas exactement comment m’y prendre. C’est bon de savoir que de telles chansons existent. »


Kae Tempest
More Pressure (2022)
« J’aime toutes les chansons de Kae, mais surtout celle-là. Le riff est dynamique, un vrai moteur. La dernière fois que j’étais en tournée, je l’écoutais tout le temps à l’hôtel, pendant mes sessions de gym. J’ai déjà vu Kae Tempest en live une paire de fois. Elle est toujours renversante. Je suis fan de son story telling aussi, c’est un peu ce que j’essaie de reproduire dans mes textes… »

Westerman
Easy Money (2018)
« Bien que plus très récente, je l’écoute tout le temps. Westerman a une voix extraordinaire, et incroyablement old school. J’aime bien ces sonorités alternatives indie, dans lesquelles il incorpore aussi des éléments folks. C’est étrange de connaître personnellement l’auteur, et de ressentir l’œuvre de l’artiste d’une manière complètement différente que la personne qu’on connaît en privé. »

Big Thief
Simulation Swarm (2022)
« Quand je travaillais à mon dernier album avec Will, on se disait que ce serait vraiment top d’avoir un son homogène sur l’ensemble de l’album. Et on s’est souvent inspiré de cet album. Mais il est insaisissable… C’est comme si tous les titres avaient la même source. C’est épatant quand des groupes arrivent à faire ça. Peut-être parce qu’ils sont ensemble depuis longtemps et se comprennent instinctivement. »
AMOUR DE JEUNESSE Yanya Nilüfer a débuté la guitare à l’âge de 12 ans. Depuis, elle a trois albums à son actif.
Rédaction
Karin Boba, Paul Neusiedler
Photos Max Manavi-Huber
Conception du set & stylisme
Karin Boba

1/ Vision intelligente. Lunettes de soleil connectées légères avec caméra 12 MP, ultra grand-angle, et système audio à cinq micros. Meta Wayfarer de Ray-Ban ; à partir de 312 CHF
2/ Avant-gardiste. Montre connectée performante Galaxy Watch Ultra avec processeur 3 nanomètres, capteur BioActive et technologie Galaxy AI. Samsung, 679 CHF ; samsung.com
Tenue/ Veste Retro Denali par The North Face, 220 CHF, casquette Roam 6 Panel de Mons Royale, 39,95 CHF 1/
1/ Pratique. Enceinte Bluetooth compacte pour l’extérieur avec tuner DAB+ et FM intégré. Woodland Mini de Pure, 79,99 CHF ; pure-audio.com
2/ Cinématographique.
Caméra d'action robuste et étanche Insta360 X4 avec vidéos 360 ° en 8K. Effet perche à selfie invisible et stabilisation FlowState. Particulièrement cool : montage assisté par IA. Insta360, à partir de 530 CHF ; insta360.com

3/ Belles performances. Smartphone pliable Galaxy Z Flip 6 avec nouveaux capteurs de 50 MP et 12 MP ultra grand-angle pour des prises de vue nettes et détaillées. À partir de 1 149 CHF ; samsung.com
4/ Radical. Casque audio robuste et flexible AirPods Max avec un excellent ajustement et une suppression active du bruit. Apple, 500 CHF ; apple.com
ULTRA SMART
Vingt objets hyper branchés et réconfortants (mention spéciale aux tourne-disques) pour amorcer la période pré-hivernale en douceur.

1/ Tout-en-un. Système hi-fi stéréo parfaitement assorti Colourful Audio System, composé d’une platine vinyle Debut Carbon Evo, des enceintes Speaker Box 5 S2 et de l’amplificateur stéréo MaiA S3. Pro-Ject, 1 950 CHF ; project-audio.com
2/ Polyvalent. Appareil photo léger et compact OM System OM-5 avec capteur autofocus à 121 points pour une mise au point fiable. OM Digital Solution, boîtier, 1 299 CHF, téléobjectif
M.Zuiko Digital ED 100–400 mm F5.0–6.3 IS, 1 599 CHF ; objectif ultra grand-angle
M.Zuiko Digital ED 9–18 mm F4.0–5.6 II, 699 CHF ; omsystem.com
1a/ 1b/ 1c/ Productif.
L'installation de bureau à domicile d'Elgato facilite la vie professionnelle.
1a/ Microphone avec extension de hauteur
Wave Neo pour une qualité audio haut de gamme.
À partir de 95 CHF
1b/ Webcam ultra fluide et ultra nette Facecam Neo pour la diffusion de vidéos en qualité HD Premium.
À partir de 95 CHF
1c/ Streamdeck convivial et compact avec 8 boutons personnalisables et 2 points tactiles Stream
Deck Neo pour gérer les réunions, la musique, les chats en direct, les applis et bien plus encore. À partir de 95 CHF ; elgato.com
2/ Compact. Smartphone pliable Samsung Galaxy Z
Fold 6 avec des performances similaires à celles d'un PC, caméra de 50 MP, fonctionnalités Galaxy AI et batterie longue durée. 1 829 CHF ; samsung.com
3/ Innovant. Casque de streaming/gaming léger
Virtuoso Pro avec conducteur en graphène moderne et design ouvert. Elgato, à partir de 164 CHF ; disponible sur corsair.com

1/ Endurant. Casque haut de gamme Dyson Ontrac avec une excellente isolation acoustique et un confort supplémentaire. Dyson, 499 CHF ; dyson.ch
2/ Polyvalent. Ordinateur de plongée et montre de sport GPS Suunto Ocean avec plus de 95 modes sportifs préconfigurés, cartes hors ligne, fonctions d'entraînement, etc. Suunto, 799 CHF ; suunto.com
3/ Rockstar. Enceinte Bluetooth Fender × Teufel Rockster Cross avec un style vintage rock cool et un puissant son stéréo. Teufel, 389 CHF ; teufel.ch 2/
Tenue/ Veste Windshell NSE × Yinka Ilori par The North Face, 152 CHF.

3/
3/ Haut de gamme. Smartphone avec caméra Zeiss Vivo V40, équipé d'un objectif grand-angle de 50 MP et de la technologie Aura Light, qui capture chaque instant quelles que soient les conditions d'éclairage. Vivo, environ 521 CHF ; vivo.com
4/ Portable. Le SoundBurger Audio-Technica AT-SB727 est un tournedisque Bluetooth portable au design rétro avec une autonomie de 12 heures. À partir de 218 CHF ; audio-technica.com.

1/ Dynamique. Casque OverEar Sonos Ace avec audio 3D, suppression active du bruit et environ 30 heures d'autonomie. Sonos, 499 CHF ; sonos.com
2/ Petit mais puissant. Enceinte innovante Apple HomePod mini avec audio à 360 °et d’infinies possibilités d'utilisation. Apple, 99,35 CHF ; apple.com
AGENDA/ L’AUTOMNE À TA PORTE
Escalade, gaming et acrobaties sur planche : voici les prochains événements à ne pas manquer.

30
octobre au 2 novembre
Red Bull Dual Ascent
Le spectacle d’escalade au barrage de Verzasca revient cette année pour sa troisième édition : 20 des meilleurs athlètes mondiaux s’affronteront en équipes de deux pour grimper le mur de 180 m de hauteur sur deux parcours identiques dans des duels palpitants. Les niveaux de difficulté des six longueurs de corde varient d’un 6c à un incroyable 8b. Les qualifications et les demi-finales auront lieu du 30 au 31 octobre. La finale se tiendra le samedi 2 novembre et sera diffusée en direct sur Red Bull TV. redbull.com/dualascent
31
octobre au 10 novembre
Digital Arts
Des artistes à l’international se réunissent lors de ce festival dédié aux contributions actuelles et socialement en lien avec la culture numérique. Expos, performances, ateliers, conférences et tables rondes au centre-ville de Zurich. da-z.net
11
au 13 octobre
Freestyle Roots
Des pros du freestyle du monde entier éblouiront le public avec leurs performances dans la Stockhorn Arena de Thoune. Des athlètes de BMX, snowboard et skate seront là, ainsi que des stars du break et du beatbox. Un retour aux sources. freestyleroots.ch
3 novembre
Velodux
Les passionné·e·s de cyclo-cross et de gravel se retrouvent à Estavayerle-Lac pour deux événements légendaires : la course de Veldoux et le Gravelodux. Deux jours d’action et d’aventure autour du vélo dans un lieu historique garantis. velodux.ch
10 au 13 octobre
Hero Fest
Dans le cadre de la BernExpo, deux moments forts du gaming auront lieu simultanément : le HeroFest, l’une des plus grandes conventions de gaming en Suisse, ainsi que la SwitzerLAN, la légendaire LANparty avec plus de 2 000 personnes. herofest.ch, switzerlan.ch

18 et 19 octobre
Big Air Chur
Avis aux fans d’action, de sport et de musique : l’élite du ski et du snowboard mondial montrera son talent sur la plus grande rampe de freestyle de Suisse. L’atmosphère est unique lors de cet événement freestyle ultime. bigairfestival.com
25
octobre
Swiss Influence Award
À ne pas manquer : la cérémonie de remise de prix de l’année ! Les personnalités les plus influentes du pays seront à nouveau récompensées. Et cela dans des catégories établies telles que la beauté, le divertissement et les voyages, mais aussi dans des catégories émergentes comme le gaming et les podcasts. Nous t’offrons un programme pratique unique avec des discours d’ouverture et des ateliers animés par des expert·e·s du secteur, ainsi que des opportunités de réseautage. Profite d’un après-midi instructif. swissinfluence.ch/award

2
et 3 novembre
Alaïa Bay Open
La compétition annuelle est la dernière étape de l’Edelweiss Surf Tour, qui en comprend quatre en Suisse. L’événement à Sion marque la fin de la saison à Alaïa Bay, qui rouvrira au printemps 2025. En plus des catégories hommes, femmes et jeunes, deux nouvelles catégories sont introduites cette année : Open Heroes – pour les surfeurs souhaitant se per fectionner dans un environnement moins compétitif –et le bodyboard ! edelweisssurftour.ch
3
novembre
Red Bull Basement
As-tu une idée brillante qui pourrait améliorer le monde ?
Un esprit d’innovation qui n’a besoin que d’une opportunité pour se lancer ? C’est le moment idéal pour agir ! Red Bull Basement recherche des idées et offre la chance de les présenter sur scène. Les gagnant·e·s suisses représenteront le pays lors de la finale mondiale à Tokyo. L’équipe victorieuse gagnera une semaine de mentorat dans la Silicon Valley. redbull.com/basement
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De jeunes talents littéraires de Suisse se livrent sur des sujets qui leur tiennent à cœur, en leur donnant un twist positif.
L’écrivaine
Céline Zufferey comme sportive de haut niveau
Je ne me suis jamais considérée comme une grande sportive. La preuve avec mon métier : je suis écrivaine. La plus grande partie de ma journée consiste à rester assise face à un ordinateur, et, bien que mes doigts s’activent beaucoup et très rapidement, mon nombre de pas par jour, lui, atteint parfois des scores inavouables. J’ai bien essayé de troquer ma chaise de bureau confortable pour une gym ball, faire mes exercices de Pilates tout en cherchant la solution d’un paragraphe, je me sentais bien éloignée de l’athlète. Et pourtant…

ces deux activités ont de nombreux points communs, et les parallèles qu’il esquisse commencent, de mon côté, à faire leur chemin – à petites foulées.
Un jour, je tombe sur un livre de l’auteur
Haruki Murakami : Autoportrait de l’auteur en coureur de fond. Il y parle de sa passion pour la course à pied, presque davantage que de son écriture. Au-delà de leur aspect complémentaire,
L’écriture est une affaire d’endurance. Pour mon premier roman, Sauver les meubles, j’ai écrit pendant deux ans. Pour Nitrate, mon deuxième livre, il m’a fallu cinq ans. Des mois et des mois à maintenir un rythme de travail de cinq jours par semaine, de 9 heures à 13 heures. On ne sait jamais combien de temps durera la traversée. Il faut se lancer, lâcher le bord et croire qu’une rive existe bien de l’autre côté, que c’est vers elle qu’on se dirige. Il n’y a pas de ligne d’arrivée dans l’écriture, on ne sait jamais vers quoi on tend, cette ligne ne cesse de se redessiner, de se transformer : c’est nous-même qui la créons.
Sur le mur face à mon bureau, j’ai affiché l’illustration d’une funambule. Au centre, on la voit droite sur le fil, solide sur ses appuis, un balancier dans les mains. Aux deux coins supérieurs de l’image, il y a un agrandissement de ses pieds, en équilibre sur la corde si fine, qui avancent un pas après l’autre. Pour moi l’écriture demande ça, de la souplesse et de la détermination : regarder droit devant, faire confiance à son instinct pour rencontrer le fil au prochain pas, savoir se rattraper, garder son calme.
C’est bien loin du cliché romantique de l’écrivain alcoolique passant des nuits blanches à griffonner dans sa mansarde sous les toits de Paris. Il n’y a pas de Muses, pas de magie, pas de secret : pour produire quelque chose de bon et tenir la longueur d’un livre, il faut le quotidien stable, contraignant et parfois monotone du sportif en entraînement. Quand j’écris, je me couche tôt, je me lève tôt, je m’enferme tous les matins dans mon bureau, téléphone sous silencieux. Je grignote des amandes à 10 h 30, me fais des repas équilibrés, sans oublier les étirements en fin de séance pour me libérer le dos. Ensuite les courses, le sport et le ménage que je fais l’après-midi n’ont pour but que de me retrouver dans les meilleures conditions pour écrire le lendemain.
L’immense liberté qu’offre le métier d’écrire implique une grande discipline. Je n’ai ni horaires ni deadlines, je me fixe mes propres objectifs et peux mener des projets pendant des années. Ça demande beaucoup de force de choisir de rester assise pendant quatre heures pour écrire. Ça demande beaucoup de force de revenir tous les jours dans ce bureau, face à cette feuille. Ça demande beaucoup de force de créer quelque chose qui, avant, n’existait pas, que personne n’a demandé et qu’on construit de toute pièce. Ça demande beaucoup de force de se confronter au vide, jour après jour, et de le combler avec des choses dont on n’a qu’une intuition impalpable.
Quand j’écris, je n’affronte ni chrono, ni adversaires, ni éléments extrêmes, mais je poursuis le même désir que les sportifs : le dépassement. Aller plus loin en écriture, c’est me confronter à l’incertitude et à une sorte de conviction un peu folle : je ne sais pas ce que je cherche mais je me lance à sa recherche.
Il s’agit d’être endurant et têtu, mais il faut aussi gérer l’échec comme le sportif surmonte la blessure ou la défaite. Je me souviens de périodes où j’avais l’impression d’avoir perdu mon chemin, les obstacles se succédaient, plus rien n’était clair.
« Pour moi l’écriture demande ça, de la souplesse et de la détermination : regarder droit devant, faire confiance à son instinct pour rencontrer le
fil au prochain pas, savoir se rattraper, garder son calme. »
Ces moments de découragement où chaque mot est un effort pénible, où les phrases sonnent faux, les enchaînements manquent de fluidité et où je m’essouffle. Il avait fallu rebrousser chemin, tenter de nouvelles stratégies, abandonner des personnages, tâtonner dans l’obscurité. C’est là qu’on mobilise toute notre persévérance et notre créativité pour réussir à considérer son travail sous un nouvel angle, le réinventer, lâcher une prise sans être certaine de retrouver un autre point d’appui, mais ainsi parfois on trouve une nouvelle voie. Et puis, un jour, ça y est, le roman est terminé. Le livre ne représente que le sommet de l’iceberg, soutenu par des mois, des années de travail patient et acharné, tout comme une course, un match ne sont que le résultat d’une implication et d’un dévouement quotidien. Et là, quand on retourne dans les vestiaires ou quand on met le point final, il faut faire face à la redescente, au vide que laisse le travail accompli. Se reposer demande d’autres ressources : regarder son parcours avec bienveillance, savoir apprécier les petites choses et retourner à la « vie normale ». Il faut souffler, apprendre à se détendre, à se ressourcer afin de pouvoir se relancer, plus tard, dans le jeu.
J’ai mis du temps à considérer cette analogie entre le métier d’écrivain et le sport de haut niveau. C’est que pendant longtemps j’ai considéré mon travail comme non sérieux et me suis vue comme illégitime. Ce n’est qu’après une pratique d’écriture de quinze ans que je m’autorise à me voir comme une professionnelle, que je reconnais mes connaissances et mes capacités techniques en littérature. Je perçois ma place et je m’y sens bien. Et c’est à partir de là, avec l’entraînement, la pratique et la reconnaissance que j’ai derrière moi, que je me sens prête à embrasser mes curiosités, poursuivre mes interrogations de plus belle et donner tout l’espace à mes désirs de s’épanouir, en pleine puissance.

CÉLINE ZUFFEREY Basée à Lyon, la Valaisanne née en 1991 considère que l’écriture consiste en 2 % de talent, et 98 % de labeur. Lauréate de deux prix littéraires, elle a publié plusieurs nouvelles. Ses romans sont parus aux éditions Gallimard. zuffereyceline.com
9 questions à
Raphael Dähler
Le rider de MTB Street Trial et créateur de contenu de 23 ans, originaire de Winterthur, partage les choses (plus ou moins) importantes qui façonnent sa vie.

Si tu pouvais être un animal pour un jour, lequel choisirais-tu ?
Un écureuil. À 100 %. Ils sont petits, agiles et tellement adorables… Et ils peuvent se faufiler partout. Ils ont un air un peu drôle et peuvent faire des tours avec leur queue.

TOUT SOURIRE Environ 30 000 personnes suivent ses cascades sur les réseaux sociaux. @raphael.dahler
Une habitude agaçante ?
(Après une très longue réflexion …) J’ai toujours un peu de mal à estimer le temps. Je veux faire trop de choses en même temps.
Ce que tu aurais aimé savoir plus tôt ?
Que ma formation en tant que serveur m’aiderait plus tard. Ça m’a permis de développer mes compétences sociales. Je ne l’avais pas réalisé à l’époque.
La pire couleur pour un casque ?
Rose néon. Les couleurs flashy en général.
N°1 actuel sur ta playlist ?
Harry Mack, un rappeur freestyle de Los Angeles.
Ce que tu emportes partout avec toi ?
Une clé Allen ou un multitool. Et ma carte d’assurance maladie.


Ta blessure la plus grave ?
Une cheville fracturée. Je suis tombé du mur sur la promenade du lac à Zurich. J’ai passé deux semaines à l’hôpital. Ça a mis six mois à guérir. La plaque est restée en place pendant trois ans.
Tes héros à vélo ?
Danny MacAskill, Joacim Lundgren ; et Fabio Wibmer, aussi parce qu’il a un style de conduite vraiment unique.

Retour vers le futur ou voyage dans le passé ?
Je suis né dix ans trop tard. J’aurais adoré vivre l’âge doré du hip-hop des années 90.



















Elle est petite. Elle est puissante. Elle est arrivée.
L a nouvelle Volvo E X 30 100% électrique.


Notre S U V le plus compact à ce jour séduit par ses per formances puissantes, son design innovant et l’empreinte carbone la plus faible de toutes les Volvo. Souvent, la petitesse s’accompagne de grandeur.





Essayez-la maintenant.










