The Red Bulletin FR 11/22

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HORS DU COMMUN FRANCE NOVEMBRE 2022 Votre magazine offert chaque mois avec Comment BRANDON SEMENUK est devenu une légende vivante du VTT freeride AU-DESSUS DU LOT

15 ANS D’AUDACE ET D’ORIGINALITÉ

Le premier numéro du mensuel The Red Bulletin a été publié en Autriche en octobre 2007, avec cette baseline : hors du commun. Un mensuel envisagé comme le premier magazine “mindstyle” dédié à des personnes dont la façon de penser et d’agir engendre leurs modes de vie non conventionnels (mindset et lifestyle, donc).

Contrairement aux apparences, notre publication n’est pas destinée qu’aux adeptes d’extrême et d’action sports, ou seule ment à des lecteurs et lectrices évoluant dans des scènes core (vélo, sports mécaniques, musique, etc.). Dans les pages du TRB, ou en digital, des talents exceptionnels vous transmettent inspiration et motivation, qui que vous soyez, sans exclusivité.

Pour ce numéro anniversaire, nous revenons sur certaines des plus belles productions photo de l’édition française (11 ans au compteur, du rap aux requins, via le surf, le ski big air, la danse urbaine ou le skate), prenons l’air avec l’ovni Semenuk, décou vrons l’odyssée vraiment unique de Lucky Love et l’histoire très américaine de Victor, le B-Boy qui a concrétisé les rêves hip-hop de son père. Une approche éditoriale audacieuse qui fait l’origi nalité du Red Bulletin… depuis 15 ans.

Bonne lecture ! Votre Rédaction

UN BOSS DU VTT

AU NATUREL

Kevin Arnold face à Brandon Semenuk dans une extension de la propriété du rider, son spot perso, décoré de dizaines de vélos utilisés lors du Red Bull Rampage et d’autres événements.

DE NOVEMBRE

NEAL ROGERS

L’auteur américain et ancien rédacteur en chef de VeloNews and CyclingTips s’est plongé dans l’univers de la légende du freeride Brandon Semenuk pour notre article de couverture.

« Je connaissais le nom depuis des années, mais très peu de choses sur l’homme, dit-il. J’ai donc entrepris d’écrire, à son contact, son profil définitif. » Page 26

LAUREL GOLIO

La photographe basée à Brooklyn a photographié le champion B-Boy Victor Montalvo dans un studio et dans les rues de Chinatown, dans le sud de Manhattan.

« Victor a apporté une très belle énergie sur le shooting, dit-elle. Il était prêt à tout et a été très coopératif – c’était vraiment un plaisir de travail ler avec lui. » Golio a collaboré avec The New York Times et des marques comme Nike, H&M et Puma. Page 58

NOTRE ÉQUIPE
Éditorial
4 THE RED BULLETIN TOBY COWLEY (COUVERTURE)

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Depuis 2019, nos équipes s’engagent au quotidien pour une téléphonie plus responsable en concevant des smartphones, des tablettes ainsi qu’un écosystème d’accessoires faits pour durer. Ultra-résistants et garantis 5 ans, ils accompagnent les utilisateurs dans tous les environnements, même les plus intenses.

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CONTENUS

novembre 2022

8 Galerie : votre dose mensuelle de folie photographique

14 Musicien, compositeur, prof et PDG : la playlist de Bill Laurance

16 Leur trip en vélo en Islande n’était finalement pas le plus gros défi

17 Un livre (qui pèse) dédié au bling des plus grosses stars du rap US

18 Une idée tellement simple, mais qui pourrait sauver tant de vies

20 Du ski au spi, le freerideur Aurélien Ducroz s’attaque au Rhum

22 Le mordu de longue distance Sofiane Sehili s’est offert le monde à vélo

24 Quand Pauline Ado surfe, elle fait bien mieux que surfer

26 Star malgré lui

Tout ce que voulait le pilote VTT Brandon Semenuk, c’est s’élever

38 Les vies de Luc

Lucky Love : une existence sans équivalent où le chaos a laissé place à une plénitude artistique

46 Plein la vue !

Pour une fois, The Red Bulletin regarde dans son rétro

58

70

Enfant du breaking

Une histoire comme seule la culture hip-hop peut les écrire

La forme de l’eau

Une plongée dans le surf avec le photographe Zak Noyle

83 Voyage : folies aux Bahamas

88 Fitness : la jouer fine avec le sucre

90 Gaming : des airs de Motus

92 Matos : le VTT première classe

96 Ils et elles font The Red Bulletin

98 Photo finale : le boss, c’est Bruni

Le surf en grand avec Zak Noyle. 70 La vie au max avec Lucky Love.
38 6 THE RED BULLETIN ZAK NOYLE, FIFOU, LAUREL GOLIO, JB LIAUTARD/COMMENCAL
Le breaking à l’âme avec Victor. Le TRB au top avec le best-of.
58
46 THE RED BULLETIN 7

Refets de France

À l’exception de quelques semaines par an, le Chéran est en plein débit et inaccessible à Adrien Petit. Mais à sa quatrième tentative en trois ans, le photographe atteint son objectif. « Après la première fois ratée, je suis revenu seul et j’ai pris des photos du site sous tous les angles, raconte le finaliste du Red Bull Illume 2021. Quand j’ai vu ce miroir d’eau, j’ai su que c’était l’endroit à photographier. » Dans le reflet, on peut admirer le skateur du coin Antoine Force.

Instagram : @petio.74 redbullillume.com

HAUTE-SAVOIE
9 ADRIEN PETIT/RED BULL ILLUME DAVYDD CHONG

LES GETS, FRANCE Suprême

Imbattable ! Le 28 août dernier, Pauline Ferrand-Prévot décroche son 4 e titre de championne du monde de cross-country au terme d’une course dominée de bout en bout (deux jours après un titre de cham pionne du monde en short track). Dès le départ, elle creuse l’écart dans les premiers virages, et à l’issue du premier tour, PFP dispose déjà d’une marge de 22 secondes sur la Suissesse Jolanda Neff. La native de Reims porte même son avance à plus de 1 minute après le 2e tour. Plus per sonne ne la reverra. Pauline termine la course avec 1 minute 35 d’avance sur sa dauphine, un drapeau français en main. Instagram : @paulineferrandprevot

11 BARTEK WOLINSKI/RED BULL CONTENT POOL

Air Lenny

L’Hawaïen Kai Lenny est une légende parmi les surfeurs de grosses vagues, et un sujet photo de choix. Mais pour Christian Stadler, qui a pris ce cliché spectaculaire, la providence a quand même joué un rôle. « C’était ma première participation à l’événement big-wave de Nazaré, explique l’Allemand, et je n’avais rien prévu de spécial. Puis, le jour de l’entraînement, j’ai vu que Lenny avait beaucoup de temps de vol. Alors, j’ai fixé mon attention sur lui. » Une place en demi-finale du concours Red Bull Illume a été sa récompense. Insta : @stadlerphoto ; redbullillume.com

NAZARÉ, PORTUGAL
CHRISTIAN STADLER/RED BULL ILLUME DAVYDD CHONG
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BILL

Puppy love

Le membre des Snarky Puppy parle des chansons qui ont orienté ses passions.

Bill Laurance est un homme de la renais sance. Producteur de musique, multiinstrumentiste et membre du groupe de jazz-fusion Snarky Puppy, lauréat de quatre Grammy Awards, ce Londonien de 41 ans est aussi compositeur de musiques de films, professeur d’univer sité, passionné de sciences et PDG du label Flint Music. Il n’est donc pas sur prenant que ses inspirations soient si variées. « J’aurais pu faire une liste bien plus longue que celle qui figure ici. Mais ces quatre chansons me représentent. Elles retracent ma vie et les moments qui ont façonné qui je suis aujourd’hui. »

L’album de Laurance, Affnity, sort le 21 oct. ; billlaurance.com. Empire Cen tral, dernier album des Snarky Puppy, est dans les bacs ; snarkypuppy.com

Stevie Wonder Golden Lady (1973)

« Vous ne pouvez pas faire une playlist sans y inclure Stevie Wonder. C’est vraiment le roi.

J’ai eu la chance de le rencon trer il y a environ cinq ans par hasard, sur un bateau de croi sière en mer de Chine méridio nale et il m’a donné une perle de sagesse : “Les musiciens sont le ciment de la société, et c’est notre rôle d’apporter l’amour et l’unité à la planète.”

J’emporte cela avec moi par tout où je vais. »

John Adams Hallelujah Junction: 1st Movement (2004)

« J’admire le compositeur amé ricain depuis des années, et j’ai entendu ce morceau pour la première fois dans le film de Luca Guadagnino, Call Me by Your Name. On y voit deux pianistes qui semblent impro viser, mais tout est noté. C’est l’exemple le plus remarquable de composition mêlée à un sens de l’improvisation que j’ai jamais entendu. Un morceau de musique stupéfiant. »

James Brown It’s a New Day (1970)

« Le maître du groove. Personne ne peut rivaliser avec le groupe de Brown dans les années 70 et au début des années 80, The J.B.’s, en termes d’articulation d’un rythme qui vous fait bouger de votre siège. On l’avait en boucle dans le bus de tournée de Snarky Puppy. Avec la boucle de fin, plus le groupe est dans le riff, plus le groove devient profond, et il en devient hypnotique. »

Julie London

Our Day Will Come (1963)

« Quand j’étais petit, ma mère était chanteuse. Dans les London Fields, en été, elle chantait dans des groupes de soul et de blues, et je faisais le tour du parc en disant à tout le monde que ma mère était sur scène. Elle chantait sur les enregistrements de Julie London. Ce titre est passé en boucle à la maison pendant des années, et ma femme et moi l’avons choisi comme pre mière danse à notre mariage.

»

Scannez ce code QR pour écouter notre podcast avec Bill Laurance sur Spotify.
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14 THE RED BULLETIN SEB PETERS LOU BOYD
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À la conquête de l’amitié

Le voyage a duré huit jours sur des fatbikes équipés de pneus de 11 cm, sans suspen sion, et de crampons à neige pour rouler sur la glace com pacte. Portant chacun une charge d’environ 30 kg (eau, nourriture et matos de survie), les cyclistes ont dû affronter des tempêtes de neige, le vertige et un froid extrême.

« Le plus difficile était de rester au chaud, se souvient Burkard. Nous avions un million de couches sur nous lorsque nous roulions. »

L’un des points culminants du voyage – la traversée à minuit du glacier Mýrdalsjökull, haut de 1 493 mètres – fut aussi l’un des moments les plus difficiles lorsque le vélo de Burkard a crevé et qu’une assistance d’urgence a dû être appelée sur place. « Nous nous sommes relayés, l’un d’entre nous se réchauffant les mains, un autre travaillant avec les outils, et l’autre pompant un pneu, dit-il. C’était sauvage. »

Mais c’est au retour, après le trip, que son plus grand défi attendait Morton. Burkard et Rusch rentrent chez eux, mais les protocoles du COVID inter disent à Morton, citoyen aus tralien, d’entrer aux USA et le contraignent à passer deux semaines au Mexique. « En Islande, nous avons réalisé que Gus avait été confronté à la toxicomanie et qu’il venait de devenir sobre, raconte Burkard. Sauf que, coincé au Mexique, il a rechuté. »

L’Islande en hiver révèle un paysage saisissant. Les ondes vertes des aurores boréales illuminent le ciel nocturne et la neige forme une couverture blanche sur la roche volca nique noire. Pour l’athlète d’endurance américaine Rebecca Rusch, le cycliste pro devenu réalisateur Angus « Gus » Morton et le photo graphe Chris Burkard, il était impossible de résister. En avril 2021, le trio se lance dans la traversée de l’île à vélo du nord au sud, un voyage de plus de 500 km que relate un film documentaire, I Am Here

Au début, Morton était gêné à l’idée de demander de l’aide. Après une telle aventure, la dépendance prenait le des sus sur lui ? « Beaucoup d’ath lètes d’aventure sont des toxi comanes et recherchent les extrêmes, déclare Burkard. La frontière est très mince entre choisir quelque chose de constructif et quelque chose de destructeur. »

Morton a fini par entrer en contact avec des personnes pour le soutenir. « Vous vivez ces expériences culminantes et vous vous tirez mutuelle ment d’affaire, dit Burkard. Vous réalisez que vous n’êtes pas aussi fort que vous le pen siez, car vous avez besoin de vos amis. En Islande et après, nous avons appris l’impor tance de demander de l’aide. » I Am Here sortira l’an prochain. Plus de détails sur Instagram : @chrisburkard

Chris Burkard, Rebecca Rusch, Gus Morton et leurs énormes gants.
I AM HERE
Un nouveau film montre un groupe d’athlètes s’attaquant au paysage magnifique et brut de l’Islande, et les défis relevés à leur retour.
16 THE RED BULLETIN CHRIS BURKARD TOM WARD

Let it bling

Les stars du hip-hop et les métaux précieux dont ils et elles se parent sont au cœur de ce nouvel ouvrage remarquable.

Des noms et des slogans sur des bagues à plusieurs doigts qui ressemblent à des poings américains. Des cordes en or massif assez épaisses pour tracter un camion. Des dia mants si éblouissants qu’ils doivent être protégés 24 heures sur 24 et qu’il vaut mieux les regarder à travers des lunettes de soleil.

De Run-DMC et LL Cool J à A$AP Rocky et Megan Thee Stallion en passant par Jay-Z et Missy Elliott, les vedettes du rap et les MC qui ont fait de leurs bijoux et de leurs métaux précieux un élément central de leur culture font désormais l’objet d’un livre, Ice Cold A Hip-Hop Jewelry History.

Son auteure, Vikki Tobak, s’est immergée dans le monde du hip-hop au début des années 90 – elle a travaillé pendant quatre ans comme directrice du marketing et des relations publiques pour le label newyorkais Payday – et n’a cessé,

depuis, d’écrire sur la musique, ses créateurs et ses créatrices. C’est en travaillant sur son livre de 2018, Contact High: A Visual History of Hip-Hop, que la jour naliste a commencé à réfléchir plus profondément à la façon dont les gens – et pas seule ment les artistes hip-hop – se parent. « Nous nous soucions tous de ce que nous portons et de la façon dont nous nous présentons, dit-elle. Dans le hip-hop, une énorme partie de

cela est la personnalisation des vêtements et des baskets, mais aussi des bijoux. Il s’agit de se démarquer avec quelque chose que personne d’autre ne pos sède.

»

Aujourd’hui, les artistes commandent des pièces uniques à des orfèvres dont la célébrité et la demande dépassent presque la leur comme Greg Yuna, Martine Ali et Joe Avianne (qui a inspiré le personnage d’Adam Sandler, Howard Ratner, dans Uncut Gems, un film dont l’action se déroule dans le Diamond District de New York, où une grande partie du merchandi sing d’Ice Cold a été fabriquée). Avec des centaines de photos réparties sur 388 pages, Ice Cold est un voyage visuel exu bérant et extravagant. Vikki Tobak est la guide idéale, sa prose perspicace étincelle aux côtés des pierres précieuses et des maillons. Les amateurs de hip-hop apprécieront le palma rès des artistes, et l’évolution des bijoux eux-mêmes est fascinante. Ce qui est égale ment clair, à partir du milieu des années 2000, c’est la pré sence croissante des femmes.

« Au début, certaines femmes portaient des chaînes en corde, comme Salt-N-Pepa et Roxanne Shanté, explique Tobak, mais au fur et à mesure que le pouvoir et l’autonomie des femmes se sont dévelop pés dans l’industrie, avec des personnes comme Cardi B, Megan Thee Stallion et Kash Doll, elles ont pris leurs propres décisions et avaient suffisam ment d’argent pour le faire.

Maintenant, les femmes évo luent sur le même terrain de jeu que les hommes. Il y a plus de femmes créatrices de bijoux, et plus de créateurs noirs, aussi.

Ça pèse : 388 pages chargées d’or et de diamants pour les fans de rap.

C’est vraiment important. » En enregistrant ce changement et bien d’autres choses encore, le livre de Tobak est un bijou pop-culturel en or 24 carats. Ice-Cold. A Hip-Hop Jewelry History, en anglais ; taschen.com

THE RED BULLETIN 17 COURTESY OF TASCHEN PAUL WILSON

Sauve qui peut

L’idée géniale de cet étudiant britannique, qui utilise des chutes de bois et des bouteilles recyclées, pourrait sauver des milliers de personnes chaque année.

Ewan Morrell, étudiant en design au Royaume-Uni, ne s’attendait pas à se balader dans les eaux glacées de la mer du Nord en hiver – encore moins à le faire en portant l’une de ses propres inven tions. Pourtant, grâce à un raisonnement ingénieux, c’est exactement là où le jeune homme de 23 ans s’est retrouvé en février de cette année. « La température de l’air était d’environ 2 °C, raconte Morrell. C’était gla cial. » Malgré le froid, ce fut un grand jour : son gilet de sauve tage Bot a réussi son premier grand test. Morrell a conçu ce gilet de flottaison simple,

village inondable de Corbridge, dans le Northumberland. Après des recherches plus poussées, il a découvert que le Bangladesh était non seule ment l’un des pays les plus touchés par de graves inonda tions, mais aussi l’un des plus pollués par le plastique. « J’ai donc imaginé une solution : utiliser les déchets plastiques dans un gilet de sauvetage. »

Pour créer son prototype, Morrell a fouillé les poubelles de tissus usagés et a imaginé six modèles de gilets de sauve tage différents en utilisant divers matériaux, du velours côtelé au calicot. « J’ai compris qu’un gilet de sauvetage pou vait être fabriqué à partir de n’importe quel matériau », explique-t-il. La flottabilité est assurée par des bouteilles en plastique récupérées qui s’insèrent dans des poches verticales du gilet et sont maintenues en place par des boucles. Le gilet de sauvetage est également imprimé avec des instructions infogra phiques faciles à lire. Et lors qu’il est enroulé, il est plus petit qu’une bouteille de 500 ml, ce qui le rend facile à transporter et à stocker.

fabriqué à partir de matériaux recyclés, dans le but premier d’aider les habitants des pays en voie de développement.

Alors qu’il effectuait des recherches pour le projet final de son cours de design pour l’industrie à l’université de Northumbria, il a été stupéfait d’apprendre qu’environ 19 000 personnes se noyaient chaque année au Bangladesh pendant la mousson, dont 80 % d’enfants.

« J’ai toujours été intéressé par les catastrophes naturelles et les projets qui fournissent des produits d’aide aux pays en développement », explique Morrell, qui a grandi dans le

Conscient que le coût de production pouvait être un obstacle, Ewan Morrell a décidé de contacter des marques comme H&M, Primark et Zara, qui fabriquent toutes des vêtements au Ban gladesh. Il a proposé d’utiliser les chutes de tissu pour créer des gilets dans un cadre cari tatif. « Cela ne leur coûterait rien, dit-il. Tout ce qui leur reste peut être découpé en gabarits et cousu ensemble. »

Morrell attend toujours que les marques de fast-fashion donnent suite à sa proposition, mais les premiers retours ont été positifs et il reste optimiste quant au financement de la production en série du gilet de sauvetage. « Un jour, espéronsle, le Bot sauvera des vies. » designforindustry.online/ Ewan-Morrell

Une merveille flottante : Ewan Morrell, inventeur du gilet de sauvetage Bot.
18 THE RED BULLETIN NINA ZEITMAN

Go far. Stay close.

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Profession ski(pp)eur

Ce boss du ski freeride s’est passionné pour la navigation au point de prendre la mer en solo le 6 novembre prochain pour la mythique Route du Rhum. Après des galères, il part à point.

Le Chamoniard de 40 ans, fils d’un guide de haute montagne et d’une monitrice de ski a eu un début de parcours tout tracé : sur les trem plins de saut à skis d’abord avec trois titres de champion de France junior puis en ski freeride où il décroche deux titres de champion du monde en 2009 et 2011. Cette même année, changement de trajectoire : tout en gardant un pied dans le ski, il se découvre une passion pour le spi. Jusqu’à décrocher le titre de cham pion du monde de Class40 en juin dernier avec son écurie Crosscall Sailing Team. Mais, si la carrière bicéphale d’Aurélien est une réussite et qu’aujourd’hui il a plus de traver sées de l’Atlantique que de sommets du Mont-Blanc à son actif, la transi tion de la montagne à la mer n’a pas été un long fleuve tranquille.

the red bulletin : Comment s’est opéré votre changement de ter rain de jeu ? aurélien ducroz : On m’a demandé d’être le parrain du bateau d’Adrien Hardy en 2007 qui partait sur la mini-transat. Je ne connaissais pas ce milieu du tout. Mais ça m’a passionné, j’ai trouvé ça extrême ment impressionnant et je me suis dit aussi que c’était un sport de glisse. L’idée a mûri, soutenue par Adrien qui m’a dit :« Fonce, si ça te plaît ! » En 2010, j’achetais mon pre mier bateau et un an après, je traver sais l’Atlantique en solo lors de cette même mini-transat.

Vous avez été droit dans la pente, en bon montagnard…

Oui et c’est grâce à ce démarrage par la face Nord que les choses sont allées assez vite. Mais je suis passé par beaucoup de galères. Comme être incapable de sortir du port de Lorient et devoir attendre quatre jours pour que quelqu’un – en l’oc currence David Sineau avec qui j’ai couru ma quatrième Jacques Vabre – m’aide ! La première année, j’ai enchaîné les sketches : pour l’une de mes qualifications pour la mini-tran sat, je me suis échoué en Bretagne, un bateau de pêcheur m’a sauvé, je suis reparti et j’ai arraché le safran trois jours plus tard ! Une autre fois, c’est mon mât qui est tombé sous 30 nœuds de vent… J’ai fait des grosses erreurs qui me semblent complètement dingues aujourd’hui.

Côté sponsors, ce fut aussi le par cours du combattant ?

J’ai connu des gros moments de découragement, d’autant que j’ai mené longtemps cette double car rière de compétiteur – j’ai arrêté la compétition en ski en 2015 tout en continuant à être pro-rider, et à vivre à Chamonix avec ma famille. Cela prend un temps fou, la recherche de sponsors, et il a fallu que je devienne crédible en ayant des résultats. Ça fait partie intégrante du métier de marin professionnel et il faut mettre énormément d’énergie. Mais, tout ce temps, j’ai eu la chance de toujours naviguer avec des skippeurs d’expé rience comme Romain Attanasio, Louis Duc, ou Yannick Bestaven.

Et au final tous mes partenaires sont des gens qui m’ont aussi suivi dans le ski, comme Crosscall (fabriquant de smartphones et tablettes pour l’aven ture, ndlr) qui était mon partenaire dans ce milieu depuis 2014.

En quoi votre carrière de skieur vous a-t-elle aidé à devenir skippeur ?

La montagne m’a aidé à appréhender la mer : finalement, il fallait que je sois bon dans la gestion des éléments et même si je partais dans l’inconnu, j’arrivais à m’en sortir au bout de quelques jours grâce à ma capacité à lire le terrain et à éviter les pièges.

Vous parliez de crédibilité : quand est-elle survenue ?

En 2019, lorsque Crosscall m’a fait confiance pour la construction d’un nouveau bateau qui a débuté un an plus tard. Là, j’ai eu l’impression de passer un sacré step. Comme pour mes skis, je me suis investi à 200 %, et je suis fier du résultat de ce boulot de titan : c’est un bateau ultra-puis sant, le plus puissant et le plus poly valent de la flotte des Class40. Et je me dis qu’on n’a pas été trop nuls sur ce coup puisque tous les plus grands de la catégorie ont repris nos moules. On a aussi fait en sorte que ceux-ci soient réutilisables, que toutes les parties non structurelles soient en lin et on a construit le tout en France pour réduire notre impact.

Pour cette Route du Rhum, qu’en est-il de la technologie embarquée ?

Avec Crosscall, on a, entre autres, développé des tablettes intégrées à bord qui me permettent de suivre les infos du bateau : finis les écrans avec des boutons et 25 pages de docu ments à lire ! J’ai juste à switcher pour tout savoir. Elles ont déjà fait trois transats et elles sont nickel. Notre bateau, c’est le meilleur labo au monde pour tester la solidité et l’étanchéité de nos produits hi-tech !

Faire la Route du Rhum, ça veut dire quoi pour vous ?

C’est un truc de barjot, je n’en reviens toujours pas. C’est la course au large qui m’a attiré, et la raison pour laquelle je fais du bateau. C’est la suite d’un apprentissage incroyable avec une équipe qui l’est tout autant.

Aurélien Ducroz
aurelienducroz.com
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« Notre bateau, c’est le meilleur labo au monde. »
THE RED BULLETIN 21

Rouleur sans frontières

Ce kid de Colombes (Hauts-de-Seine) explique comment

il est passé de coursier parisien à rouleur international de légende, et quelles sont les routes qu’un vélo peut ouvrir.

26 août 2022 : Sofiane Sehili, 40 ans, 25 000 km par an au compteur (prin cipalement en VTT et gravel) vient à peine d’atterrir après un roller coaster d’émotions au Kirghizistan, pays sublime qu’il avait traversé une première fois en 2017 lors d’un cyclotrip de Paris à Taïwan. Il se remet tout juste des 1 900 km sur une selle à enchaîner 37 000 km de dénivelé positif. Le cycliste vient de remporter la Silk Road Mountain Race, monu ment de la course d’ultra-distance à vélo, pour la deuxième fois consécu tive. « Le niveau plus relevé que l’an passé m’a poussé, et au fil de la course que j’ai mal commencée étant malade, je me suis senti de mieux en mieux et j’ai fini par prendre la tête et la garder. » Si tout le monde peut faire du vélo, tout le monde n’est pas Sofiane. La preuve.

the red bulletin : Comment en êtes-vous venu au vélo ? sofiane sehili : C’était un moyen de transport que j’utilisais pour aller à l’école, à la fac et au bureau. Pour aller travailler (Sofiane était docu mentaliste à Télérama, ndlr), je rou lais 30 km par jour. Fin 2010, je suis parti en rando tout seul en Asie du Sud-Est, et je me suis rendu compte qu’il manquait quelque chose à mon aventure. Je me suis acheté un vélo en cours de route et j’ai fini mon trip sur deux roues.

Ça été la transition pour devenir coursier à vélo ?

Oui, j’ai fait un autre grand voyage à vélo l’année suivante et, en 2012,

je me suis retrouvé à court d’argent. Je suis devenu salarié d’une boîte de coursiers, jusqu’en mars 2020 avec des interruptions notamment en 2016, où j’ai participé à mes premières courses.

À quel moment l’esprit de compé tition a-t-il émergé ? En devenant coursier : 400 km par semaine, c’est un bon entraînement. Assez vite, je me suis rendu compte que j’étais aussi fort que les plus forts. J’ai commencé par faire des courses de coursiers, et quand j’ai entendu parler des formats bike packing en autonomie sur des lon gues distances, je me suis dit, c’est pour moi. Depuis mes débuts en cyclotourisme, j’ai toujours été dans une logique de légèreté maximale. Et quand je roulais en mode cyclo, je faisais déjà des distances plus lon gues que la moyenne.

Comment devient-on si endurant ? Mon corps ne m’a jamais lâché en compétition. Peut-être que ça vient d’une volonté farouche, presque une capacité d’aveuglement, que j’ai de me convaincre que dans cet instant précis, toutes les fibres de mon être doivent se concentrer vers un seul objectif. Dans ce moment, rien n’est plus important que de franchir la ligne d’arrivée... de préférence en première position.

Vous avez commencé les longues distances avec peu de moyens. Tou jours possible à l’heure actuelle ? Il y a cette image véhiculée par les mastodontes du secteur : on met des gens très beaux, très minces, dans des vêtements très moulants sur des vélos très chers. Et on vous dit : c’est

ça, un cycliste. Ça met une pression, c’est une sorte de dictature comme on en a vu dans les magazines fémi nins. Et je note que ces marques représentées par les influenceurs ne m’ont jamais approché car je n’ai pas une image très lisse, et pas cette capacité à répéter des photos sans marque de sueur ni pli au maillot.

Alors oui, étant coureur pro depuis 2021, sponsorisé par des grandes marques, ça m’arrive de publier un cliché bien habillé sur un beau vélo.

Mais durant ma période cyclotou riste, j’avais un maillot Décathlon et des montages à 2 000 euros, peu cher quand on considère les 100 000 km que j’ai fait depuis 2010. Ce que je veux avant tout, c’est don ner l’envie de rouler aux gens qui me suivent ! Le vélo est un sport popu laire et il faudrait qu’il le reste.

En quoi le vélo est-il le meilleur allié pour découvrir le monde ? Le cycliste est en accès libre. On a ce contact immédiat et l’air inoffen sif, on ne perturbe rien. On attire la sympathie car on se retrouve souvent à avoir besoin d’aide.

Certains pays sont-ils plus réceptifs aux cyclistes ?

Globalement, je constate que les gens, partout dans le monde, sont bien intentionnés. Le Kirghizistan est un des pays qui m’a le mieux accueilli : on vous propose direct de monter dans le camion, même quand on est en train de pédaler !

Avec quels outils organisez-vous vos vadrouilles à vélo ?

Je suis ambassadeur Komoot. Je pla nifie tous mes itinéraires avec cette appli ultra simple et puissante qui marche partout dans le monde. Où que j’aille, je trouve en 30 secondes les rides que font les locaux.

Des projets d’ici à la fin d’année ? Fin octobre, je participerai pour la première fois à la Rhino Run, 2 750 km en Afrique du Sud et Namibie. Un gros morceau !

Retrouvez cinq routes conçues par Sofiane avec Komoot sur redbull.com ; sofianesehili.com

Sofiane Sehili
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« Le vélo est un sport populaire et il faudrait qu’il le reste. »
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Surfeuse sentinelle

Préserver l’océan, et sa santé, tout en surfant ? Pauline Ado, surfeuse pro de 31 ans, veut répondre à cette problématique en participant à un programme de détection de la pollution.

Curl : c’est le nom de code de ce pro gramme initié en juillet 2021 par Surfrider Foundation et dont l’objec tif est d’évaluer le niveau d’exposi tion des spécialistes de la baignade et du surf aux polluants chimiques présents dans les eaux récréatives littorales. Si les résultats de cette étude ne seront connus que début 2023, Pauline Ado, septuple cham pionne d’Europe WSL et qui surfe tous les jours, dans son Pays Basque natal ou à l’autre bout du monde, peut d’ores et déjà donner son res senti sur cette pollution invisible qui menace sous la surface.

the red bulletin : Que constatezvous comme dégradation dans l’eau depuis que vous surfez ? pauline ado : Difficile de quantifier ! Quand j’ai commencé le surf, il y a treize ans, la pollution était déjà un problème, on organisait des ramas sages de déchets d’ailleurs. J’ai aussi vécu des marées noires, des plages interdites à la baignade, donc des évé nements qui marquent un peu. C’est vrai qu’on n’a pas l’impression que ça s’arrange. Même sur une plage qui semble propre : quand on y regarde de plus près, on découvre plein de déchets et c’est encore pire après une tempête… Beaucoup de plastique.

Le plastique, c’est la partie visible. Parlez-nous de cette pollution chimique qu’on ne voit pas…

Comment se manifeste-t-elle ?

C’est bien le problème : la plupart de ces polluants ne sont pas décelables à l’œil nu. Sauf peut-être les hydro carbures, où on va sentir une texture

huileuse, une odeur désagréable. Mais le reste, à savoir les médica ments, ou encore les engrais, on ne sait pas. On nage en plein inconnu et l’objectif de ce programme est bien d’éclairer ces zones d’ombre.

Comment vous impacte-t-elle phy siquement cette pollution, quels dangers pour la santé ?

Là encore, nous n’avons pas d’évalua tions scientifiques, mais il arrive que suite à une session à l’eau, on puisse contracter des infections ou des maladies. J’ai le souvenir d’une com pétition au Brésil où le spot sur lequel on surfait était une sortie de rivière et où les trois-quarts des athlètes ont attrapé une gastro. C’était peut-être lié à une pollution plus bactériolo gique que chimique, on ne saura jamais. Il y a trop d’inconnus. Dans la série des interrogations, on se demande par exemple si la pollution aux antibiotiques ne modifierait pas nos réactions immunitaires.

Depuis l’été 2021, vous êtes donc waterwoman testeuse, autrement dit surfeuse sentinelle : concrète ment, comment collectez-vous les données ?

On s’équipe d’une sorte de jambière qui se fixe avec un scratch au niveau du mollet de notre combinaison dans laquelle sont insérés des capteurs ou échantillonneurs passifs qui servent à collecter les particules de pollution. Une fois hors de l’eau, on retire les quatre capteurs et on les conserve ensuite au frigo pendant environ cent heures avec des infos comme la date et lieu de collecte, et le temps passé dans l’eau. Ensuite, on les envoie dans des laboratoires pour analyser notre exposition à ces polluants.

Y a-t-il des secteurs de collecte définis ?

Au contraire, on surfe normalement, en fonction des conditions du jour. On pratique pour collecter.

Comment s’en protéger, de cette pollution, si elle s’avère au final importante et dangereuse ?

Ces prélèvements vont justement nous aider à surveiller et à mener les bonnes actions. C’est ce qu’on fait déjà en analysant la qualité de l’eau et en interdisant la baignade quand cela se révèle nocif.

Outre ces collectes, quelles autres pistes pour préserver l’océan ?

Le fait de participer à des collectes de déchets m’incite à réfléchir sur ma façon de consommer. Je donne un exemple : lors de ces ramassages, on trouve des petits bâtons blancs. Ce ne sont pas des bâtons de sucette, mais des cotons-tiges qui sont jetés dans les toilettes et finissent dans l’océan. Ça peut inciter les gens à ne plus acheter ce genre de produits, ou pour certains autres, à agir diffé remment comme laver ou réutiliser. Plus que de rendre les plages propres, tout cela permet de réfléchir au par cours des objets, comme ces billes de plastique qu’on ne voit pas de prime abord : en se demandant d’où elles viennent, on peut peut-être limiter leur impact. En matière de pollution chimique, c’est la même chose. En prenant conscience qu’elle existe, on peut changer nos choix de consommation en tant que citoyen et citoyenne et passer le message aux industries pour qu’elles évoluent dans leur façon de produire.

Concernant les choix de consom mation que vous évoquez, quelle est l’implication d’Alpina, maison horlogère qui vous soutient ? Je me suis tournée vers cette marque car Alpina s’engage concrètement en concevant des modèles de montres éco-responsables, et qu’elle fait partie des entreprises qui ont envie de faire mieux. Et ça c’est toujours positif.

Instagram : @paulineado

Pauline Ado
24 THE RED BULLETIN RIBLANC/ALPINA

« En matière de pollution, on nage en plein inconnu. »

THE RED BULLETIN 25
Brandon Semenuk, 31 ans, photographié en Colombie-Britannique, le 2 août dernier.
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MALGRÉ

Texte NEAL ROGERS Photos KEVIN ARNOLD
STAR
LUI Que vous connaissiez BRANDON SEMENUK ou pas ne l’empêchera pas de dormir la nuit. Il ne vous le dira sans doute jamais lui-même, mais c’est l’un des plus grands freerideurs VTT de tous les temps…
À couper le souffle : la précision, l’ampli tude et la poésie pure du riding de Semenuk, avec ce tailwhip exécuté dans la forêt de Sunshine Coast en Colombie-Britan nique (Canada). STERLING LORENCE/RED BULL CONTENT POOL

Cet OVNI est le rideur qui a remporté le plus de fois le mythique et impitoyable Red Bull Rampage.

POOL
28 DAVE MACKISON/RED BULL CONTENT

Quelque part sur la Sunshine Coast, en Colombie-Britannique, au Canada. Pas du genre à glander, Brandon Semenuk est en train d’assembler un porte-vélo chez lui tout en répondant à des questions au télé phone. Questions qu’il connaît par cœur.

Première chose à savoir : véritable légende du freeride et du slopestyle, le vététiste canadien a déjà remporté cinq fois le Red Bull Joyride de Whistler (Colombie-Britannique) entre 2011 et 2017. Dans la même période, il a égale ment remporté trois titres de la série Free ride Mountain Bike World Tour. En 2015, il réalise un ride révolutionnaire pour la vidéo de VTT unReal, flmé en un seul plan-séquence sur une piste construite sur mesure en Californie. Une vidéo qui tota lise plus de six millions de vues. Il est éga lement le seul à avoir remporté quatre fois le Red Bull Rampage, quintessence des compètes de VTT freeride dont la partici pation n’a lieu que sur invitation.

Au Rampage, les plus grands rideurs au monde rivalisent de virtuosité, de cou rage, de vigueur et d’ingéniosité dans l’éblouissant décor naturel des canyons du parc national de Zion, dans l’Utah (États-Unis), passant deux jours sous une chaleur écrasante à creuser une ligne à fanc de montagne à la pelle pour la déva ler ensuite de la manière la plus spectacu laire et la plus créative possible. Seule la crème de la crème y participe ; peu lui arrivent à la cheville.

Lors de sa première participation en 2008, Semenuk en devient le plus jeune vainqueur à 17 ans pour en devenir le plus vieux à l’âge de 30 ans en 2021. À la même époque, il est le premier à rempor ter deux victoires consécutives et le seul à réussir un fat drop tailwhip avant de cou ronner son ride victorieux par un magis tral backfip tailwhip.

Semenuk n’était pas forcément venu pour gagner à nouveau : plutôt pour

Brandon Semenuk

Le spot maison de Semenuk comprend une dépendance aérée avec des rampes et une série de ses vélos hors service ornant les murs.

essayer de nouveaux tricks. « Je suis ravi du résultat, mais ce n’était pas mon but. Je voulais juste avoir la chance de venir ici et faire quelque chose de différent. »

Semenuk n’a peut-être pas le même niveau de notoriété que les autres stars des sports d’action qui ont redéfni les limites de leur discipline comme Tony Hawk, Kelly Slater ou Shaun White, mais il occupe le même rang dans le monde du VTT. Il est le meilleur de tous les temps, point barre. À son style à la fois fuide et d’une précision irréprochable s’ajoute un niveau de grâce et de technicité inégalé. Les tricks de Semenuk défent autant le risque que les superlatifs. « C’est comme écouter un morceau de jazz, il donne l’im pression que c’est super simple », explique Mike Ferrentino, journaliste à BIKE Maga zine passionné de VTT depuis près de cin quante ans. Mais Semenuk n’aime pas cette étiquette de « meilleur de tous les temps ».

« Je ne suis pas d’accord, répond-il impassible tout en continuant à bricoler son porte-vélo. Il y a tellement de gens extraordinaires. J’ai déjà entendu cette phrase, mais je ne pense pas que ce soit l’avis de tout le monde. »

Deuxième chose à savoir : Semenuk a beau avoir passé toute sa vie adulte sous le feu des projecteurs, c’est une célébrité malgré lui. Contrairement à certaines stars dans le milieu des sports extrêmes, il n’est pas du genre à attirer l’attention sur lui, ni couvert de tatouages, ni un habitué des bars. « Brandon est quelqu’un de calme, d’introverti et de modeste, explique Cam Zink, 36 ans, pionnier amé ricain du freeride et l’une des premières infuences de Semenuk. Il met sa vie pri vée et ses préparations de côté pour lais ser parler son art. »

En fait, Brandon s’en fout pas mal que vous lisiez cet article ou pas. Ce qui l’inté resse, c’est de progresser, tant au niveau technique que dans ses vidéos ou désor mais dans son incursion professionnelle dans les courses de rallye. Si répondre aux questions de cet article pouvait l’aider à progresser sur le plan créatif ou athlé tique, il changerait peut-être de point de vue, mais comme ce n’est pas le cas, il fait la part des choses. Rien de personnel.

« Il n’y a pas eu énormément d’inter views où je me suis dit : “Oui, ça va faire avancer les choses et me faire évoluer ou intéresser quelqu’un”, explique-t-il. Si rien ne permet d’améliorer le silence, pour quoi parler ? » On pourrait décrire la per sonnalité de Semenuk comme une porte

fermée à double tour dont la clé permet tant de l’ouvrir s’appelle la confance.

Si sa carrière a pris une telle direction, c’est grâce à deux décisions majeures. La première remonte à son adolescence, lorsqu’il quitte Whistler pour s’acheter une maison de plusieurs hectares sur la Sunshine Coast, en face de l’île de Van couver. Il transforme le terrain derrière chez lui en un parcours de slopestyle privé, avec des rampes, des jumps et une énorme réception airbag. Plusieurs chambres d’amis sont prêtes à accueillir tous ses potes rideurs. Selon Semenuk, le fait de pouvoir pratiquer ses sauts chez lui a permis de progresser à une vitesse incroyable.

« Y’a pas photo : avec tous ces trucs sous la main, c’est beaucoup plus simple de se réveiller avec une idée en tête et d’aller l’essayer directement, de jouer un peu avec ou de construire un nouveau truc. C’est mon propre espace que je peux moduler selon mes envies ou mes besoins.

»

Deuxième décision cruciale : à 24 ans, Semenuk fonde sa propre boîte de pro duction vidéo, Revel Co, avec le réalisa teur Rupert Walker. Il obtient ainsi un contrôle créatif total tout en accélérant cette phase de transition qui le voit s’éloi gner de la compétition pour réaliser ses propres projets.

« Les compètes étaient en train de me brûler à petit feu, précise-t-il dans une interview pour le podcast Unclicked en 2021. J’ai fni par réaliser que je n’étais pas obligé d’essayer de gagner encore et toujours les mêmes compétitions. C’est

évident que j’aime gagner mais si je suis deuxième, j’ai l’impression d’être nul parce que tout le monde s’attend à ma victoire. Je ne voulais pas me retrouver coincé là dedans ; j’avais besoin de nouveaux projets et de sortir tous ces tricks et toutes ces fgures de ma tête. J’ai passé les années sui vantes à dépenser tout mon salaire pour faire des flms et d’autres trucs très cool. C’était un investissement à long terme. »

Ce passage à la production lui est inspiré par Life Behind Bars, une série vidéo Red Bull diffusée entre 2012 et 2014 qui suit les aventures d’une bande de jeunes freeri deurs entre vie sur la route, compètes et rides endiablés. À l’évocation de cette série, Semenuk se souvient de quelqu’un de « très différent », mais explique que c’est cela qui l’a décidé à prendre le contrôle du contenu.

« C’est cool que les gens adorent ces vidéos, mais je n’étais pas plus emballé que ça, relativise-t-il. C’était une super opportu nité grâce à laquelle j’ai fni par com prendre quelle route je voulais suivre. »

La vidéo Parallel, tournée en 2019 en Californie sur un parcours construit dans la propriété du journaliste Ferrentino, en est une parfaite illustration : pendant des semaines, Ferrentino observe l’équipe de Semenuk s’échiner jour et nuit pour se frayer un parcours à coups de pelle dans la boue gorgée de pluie. « Dans cette colline boisée, il a fallu racler, creuser, tas ser et tracer deux pistes ne fgurant sur aucune carte et n’étant mentionnées nulle part, rapporte Ferrentino pour le magazine BIKE. Les lignes n’existent que dans la tête de Semenuk, et lui et R-Dog (le coureur

Avec son trophée et son casque peint pour l’occasion, Brandon savoure sa victoire au Red Bull Rampage 2021, quatrième sur cet événement légendaire.
Brandon Semenuk
THE RED BULLETIN 31 BARTEK WOLINSKI/RED BULL CONTENT POOL, TOBY COWLEY/RED BULL CONTENT POOL

américain Ryan Howard, ndlr) se servent de cette page blanche offerte par une pente entre les arbres pour les tracer. »

Le montage fnal, deux minutes d’images tournées par Walker après trois semaines de travail intensif, montre Semenuk et Howard roulant côte à côte sur des pistes parallèles, se croisant et se frayant un chemin entre les chênes et les clairières. Howard considère ce projet comme le summum de sa carrière.

« C’est Brandon qui a eu toutes ces idées et trouvé tous ces endroits, précise le rideur. Il tire toutes les fcelles en coulisses.

»

Autre exemple plus récent du talent physique et artistique de Brandon : la vidéo Red Bull Raw 100, coproduite en 2020 avec Walker et flmée dans une mine abandonnée de Colombie-Britannique. Semenuk a découvert l’endroit sur Google Maps et, comme dit Walker, « lui a donné vie avec ses idées ». Le clip se termine par un enchaînement de malade avec un 360 table top, un manual et un back fip depuis un énorme fat drop. Le tout flmé avec une utilisation magistrale du décor, de la cinématographie, du montage et du talent brut et visionnaire de Semenuk. Le contenu totalise plus d’un million de vues sur YouTube et 1 700 commentaires du genre : « À ce niveau de compétition, il n’a plus qu’un seul adversaire : lui-même. »

C’est à Whistler, véritable paradis du VTT, que Semenuk grandit avec son père Mark et son demi-frère Tyler West, son aîné de sept ans. Sa mère Linda vit à quelques heures de là, sur l’île de Vancouver, de l’autre côté de la baie.

Propriétaire du magasin de vélos et de snowboards Evolution Whistler, Jenine Bourbonnais devient la première sponsor de Brandon alors qu’il n’a que sept ans. Elle se souvient qu’il suivait son frère, qu’elle parrainait déjà. Brandon lui remet un CV manuscrit résumant ses passions en lui disant le plus sérieusement du monde qu’il veut faire partie de son équipe. « Ce gamin est aussitôt devenu mon meilleur ami. On l’aidait autant qu’on pouvait en lui fournissant des pièces ou en réglant son vélo. On faisait partie de sa vie. Il faisait tellement de vélo qu’il lui fallait toujours quelque chose. »

Comme ses parents se sont séparés et que sa mère a quitté Whistler, Jenine devient une mère de substitution, l’aide à faire ses devoirs ou répare ses jeans déchi rés. Elle se souvient que tout gosse déjà, il se débrouillait aussi bien sur un VTT que

sur un skate, un snowboard ou une paire de skis. À l’âge de 12 ans, Seme nuk remporte l’épreuve canadienne de cross-country chez les moins de 14 ans avant de gagner un an plus tard le championnat de Colombie-Britannique, parcourant les 38 km de la course avec plus de treize minutes d’avance sur le prochain concurrent.

Alors que Brandon poursuit son développement, Jenine Bourbonnais reste en contact avec plusieurs de ses commanditaires par l’intermédiaire des représentants des marques qu’elle vend dans son magasin. « Quand il a eu 14 ans, j’ai commencé à lui dénicher des sponsors. Je leur disais toujours : “Appelez-le vous-même, parlez un peu avec lui et vous verrez que c’est le genre de personne qu’il vous faut pour repré senter votre marque.” Brandon reste toujours calme, confant, poli et hon nête. Quand il donne des interviews, il ne se précipite pas pour dire les choses. Je me demande si cela fait partie de son talent ; il maintient ce calme en toutes circonstances. »

Rideur professionnel, le Canadien Andrew Shandro n’a pas oublié non plus sa première rencontre avec Bran don. Il s’entraîne sur un terrain de dirt avec son fls Ethan quand celui-ci fait une chute. Avant que Shandro ait pu faire un geste, un Brandon de 14 ans l’aide déjà à se relever et à se nettoyer. « J’ai bien vu que ce gamin était super doué, se souvient il, mais j’ai surtout vu qu’il avait le cœur sur la main. »

Lorsqu’ils se recroisent au même endroit quelques semaines plus tard, Shandro, sponsorisé par Trek, lui pro pose de monter sur un VTT de la marque. Peu après, Semenuk devient pro et quitte le lycée pour voyager et faire de la compétition ; depuis, il n’a plus quitté Trek. Shandro devient son coach et lui décroche un contrat avec l’équipe de freeride de la marque, le C3 Project (les 3 C correspondant à Compétition, Cinématique et Créativité).

Peu de temps après, Semenuk, maintenant âgé de 15 ans, signe avec la marque de sport Nike 6.0 et se rend pour la première fois en Europe pour des compétitions. Il commence à passer ses hivers avec ses amis à Aptos, petite bourgade balnéaire californienne per due au milieu des séquoias qui a accueilli pendant vingt ans les Post Offce Jumps sur l’un des spots de dirt

TOBY COWLEY
Brandon Semenuk
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Semenuk part pour un tour sur une structure d’un autre monde, la Sphère, qu’il a aidé à concevoir.

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jump les plus mythiques au monde. Quand les amis californiens de Semenuk louent une maison à Whistler en été, il reste avec eux, allant parfois jusqu’à dormir dans un placard.

Semenuk dit avoir fonctionné avec un haut degré d’autonomie aussi long temps qu’il s’en souvienne. « Mes parents n’étaient pas super contrôlants, ils ne se sentaient pas très concernés, ils me laissaient avoir ma liberté, dit-il. J’ai toujours été autonome et indépendant. Je n’ai jamais vraiment eu à faire de rap port, je pouvais rentrer chez moi ou par tir quand je voulais, je pouvais rester chez ma mère, je pouvais rester chez mon père, cela n’avait pas d’importance. Mon frère est aussi beaucoup plus âgé, il avait déjà pris sa liberté, et je pense que j’ai profté du fait qu’ils étaient souples avec lui, donc ils sont restés souples avec moi. J’ai juste eu à faire mon truc.»

Nous sommes en août, et Semenuk doit prendre une décision ; ou peutêtre l’a-t-il déjà prise sans être tout à fait prêt à l’annoncer. Le Red Bull Ram page 2022 aura lieu les 15 et 16 octobre prochains et c’est lui le champion en titre. Mais c’est exactement à la même date que se déroule la dernière manche de la série du championnat national de l’American Rally Association (ARA), course profes sionnelle de voitures tout-terrain sur un circuit de gravier sinueux à des vitesses pouvant atteindre 130 km/h.

Assisté d’un copilote, Brandon conduit une WRX STI pour l’écurie Subaru Motorsports. Il a passé la saison au coude à coude avec Travis Pastrana, légende vivante du motocross. Au moment d’im primer ce magazine, et à trois épreuves de la fn, il est en tête du classement. Après avoir signé avec Subaru au printemps 2020, Semenuk a terminé deuxième du

classement général et troisième en 2021, mais n’a pas encore remporté de titre de série. Assez tentant de deviner quel sera son choix quand on sait qu’il est « tout le temps inspiré par de nouveaux trucs ».

Quand on lui demande s’il ne se sent pas obligé de défendre son titre lors de la plus célèbre épreuve de VTT de son spon sor, Brandon évite le sujet. « Je ne dirais pas qu’il y a de la pression, je suis sûr qu’ils aimeraient que je sois là, comme beaucoup de monde. Mais beaucoup de monde voudrait aussi me voir sur l’autre compétition. Il faut être réaliste : combien d’années vais-je encore pouvoir participer au Rampage ? Si je n’y vais pas cette année, je pourrais toujours y retourner l’année prochaine. » Depuis cette déclara tion, Brandon a été confrmé au line-up de l’édition 2022 du Red Bull Rampage.

S’

il est diffcile de comprendre l’as cension de Semenuk dans le rallye auto, son entrée dans le VTT slope style nous éclaire un peu : il est devenu pro parce qu’il aimait ça et que son niveau s’améliorait constamment. Pareil pour les courses de rallye. Il a commencé par plai sir, est devenu très bon, puis y a trouvé un intérêt économique après avoir signé avec Subaru : plus besoin de louer une voiture de rallye ou de s’assurer soi-même pour les compétitions.

« J’ai eu la chance de trouver quelque chose que j’aime vraiment faire et dans lequel je suis bon ; c’est là aussi une pas sion de longue date, explique-t-il. J’ai passé dix ou onze ans à faire du rallye pour le plaisir, mais je ne pensais pas que je pourrais en faire un jour à un niveau professionnel. Quoiqu’avec mon côté obsessionnel, j’essaie toujours de voir où sont mes limites WRC-2 et c’est sûrement ce qui m’a permis de progresser. »

Rallye et VTT freeride sont deux uni vers opposés, même si les compétences requises sont similaires : concentration extrême, nerfs d’acier, évaluation immé diate de l’adhérence des pneus sur terrain instable. À ses yeux, le fait que ces deux passions se complètent est primordial.

« Me forcer à m’éloigner du VTT a du bon : Je me sens tellement bien en voiture que quand je retourne sur mon vélo, j’y retrouve un plaisir nouveau. Ça me donne un gros boost d’énergie et de motivation. »

Si l’ARA regroupe les plus grandes compétitions de rallye, c’est la série du championnat du monde des rallyes de la FIA, le WRC, qui occupe le haut du tableau. Juste en dessous se trouve le

Semenuk et son ami Ryan Howard roulent ensemble pendant le tournage de Parallel, en février 2019.
Brandon Semenuk
34 THE RED BULLETIN IAN COLLINS/RED BULL CONTENT POOL
Cam Zink, un autre pionnier du freeride, appelle Semenuk « le plus grand et le plus captivant rideur de tous les temps ».

Semenuk affiche son style caractéristique et son flow naturel pendant le tournage de Realm, une nouvelle vision du slopestyle.

championnat du monde des rallyes 2 (WRC-2). Les courses se déroulent sur les mêmes circuits que le WRC au cours des mêmes week-ends. Logiquement, pour Semenuk, la prochaine étape est de dispu ter des courses au niveau WRC-2, même si c’est loin d’être simple. Sur le calendrier de 2022, dix des treize épreuves ont lieu en Europe et aucune en Amérique du Nord. Il reste donc assez pragmatique quant à la possibilité d’atteindre les som mets qu’il a atteints en VTT.

« Je ne serai jamais le pilote le plus rapide au monde ; j’ai grandi en faisant du VTT, et j’ai dû commencer très jeune pour atteindre le niveau que j’ai aujourd’hui. Après, je peux sûrement me défendre à un niveau mondial comme le WRC-2. Je fnirai bien par le faire, his toire de voir comment ça marche, et com ment se débrouillent les autres pilotes. Ce sera une bonne expérience. »

Bien sûr, Semenuk n’ignore pas les dangers qu’il court avec ces deux carrières parallèles. Il n’est pas à l’abri des erreurs, ce qui lui a valu une fracture du poignet qu’il a fallu opérer fn 2020, ou encore des fractures de la clavicule plus tôt dans sa carrière. « La dernière chose dont j’ai envie est de me lancer sans préparations, me blesser et être privé de vélo pendant plusieurs semaines ou plusieurs mois, a-t-il expliqué sur Unclicked à ce sujet. Honnêtement, c’est ce qui me fait le plus peur. Je me prépare énormément. »

Et comment accepte-t-il le fait de firter régulièrement avec la mort ?

« Je n’y pense pas vraiment, à vrai dire, répond-il. Je ne ressens pas forcément le besoin de me pencher là-dessus. »

Dernière chose à savoir : Brandon reste fdèle à la plupart de ses spon sors depuis plus de dix ans déjà, fait très rare dans le monde des sports extrêmes. Parmi eux, Red Bull, Trek, SRAM, RockShox, Maxxis, Troy Lee Designs et Smith Optics.

« J’ai reçu plusieurs offres, précise-t-il. J’aurais probablement pu gagner plus d’argent ailleurs, mais ce qui compte le plus pour moi c’est de me sentir bien là où je suis, ce n’est pas mon genre de courir après l’argent comme d’autres sportifs. »

Fidèle à cette aura quasi mystique qui l’enveloppe, Semenuk ne poste que des images et des vidéos de bonne qualité de ses performances sur les médias sociaux. Jamais rien de privé, et seulement quand il a le temps, pas comme certains comptes de sportifs qui ressemblent à un feuve

auto-promotionnel pour attirer les spon sors. Ni selfes ni vidéos improvisées sur un smartphone sur son compte Instagram (qui compte plus de 640 000 followeurs et followeuses) et encore moins de posts appréciateurs rédigés par des sponsors ; un simple commentaire de quelques mots sufft. Quand on lui dit que son statut de plus grand parmi les plus grands rideurs VTT au monde lui permet bien ces mes sages lapidaires et impersonnels et qu’il jouit d’une certaine liberté de promotion par rapport à d’autres sportifs, Semenuk se défend avec énergie. « Je pourrais choi sir la solution de facilité et poster des trucs tout le temps, mais ça ne m’inté resse pas, dit-il. Évidemment, mes spon sors ont besoin de savoir que je repré sente une certaine valeur pour eux, mais en même temps, je vis pour mes passions. Si je commence à faire des trucs qui ne me plaisent pas, ça ne sert plus à rien. Je ne vais pas risquer ma vie si je ne suis pas motivé à 100 %.

»

Demandez autour de lui et les doutes concernant son éthique de travail sont aussitôt balayés. « C’est l’un des mecs les plus bosseurs que j’aie jamais vus, confrme Howard. Le matin, on fait un

ride, puis il envoie des mails pendant deux ou trois heures, on refait une ses sion le soir et il envoie encore des mails jusqu’à minuit. Oui, c’est une passion pour lui, mais c’est aussi son boulot. Il veut être le meilleur. Je lui dis : “Tran quille, mec, profte un peu de ton style vie.”

»

Et où va donc le conduire ce style de vie ? Combien de fois encore se jettera-t-il du haut d’une falaise rocheuse dans l’Utah ? A-t-il déjà pensé au prochain chapitre de sa carrière ?

« Pas vraiment, répond-il. J’ai des envies et des objectifs, mais je peux aussi bien me contenter de travailler avec les opportunités qu’on me propose. » Une réponse pour le moins tiède. Une fois encore, si la réponse à cette question avait pu l’aider à progresser, il aurait peut-être répondu différemment. Mais comme ce n’est pas le cas, il ne le fait pas. « Mon but n’a pas changé : je veux évoluer dans mon sport, explorer le VTT et le reste, conclut-il. Je suis toujours fdèle à cette idée qu’il faut que ça res semble à de l’art. Quand je fais quelque chose, je le fais de mon mieux. »

Instagram : @brandonsemenuk

La construction d’un terrain de jeu de slopestyle élaboré et adaptable dans son jardin a aidé Semenuk à modifier la trajectoire de sa propre carrière.
Brandon Semenuk
THE RED BULLETIN 37 TOBY COWLEY

LES VIES DE LUC

LUCKY LOVE a enchainé les métamorphoses artistiques avant d’atteindre un état célestiel grace a la musique. Prenant conscience que son corps pouvait être le vecteur d’idéaux inclusifs plus grands que sa propre histoire, il offre une porte d’entrée vivifiante a sa vision idéaliste du monde avec un premier album engagé.

38 LUCKY LOVE PORTE UNE TENUE PATRICK CHURCH

« Nous étions des estropiés exclus de la société qui rêvions, un jour, d’être acceptés. »

C’est a l’hotel Amour, a Paris, un jour pluvieux, que nous rencontrons Lucky Love, 29 ans, de son vrai nom Luc Bruyere. Si l’envie nous séduit de croire que l’artiste charismatique vetu d’un manteau tres pop (a poil rose) et aux allures punk a emprunté son pseudonyme au morceau éponyme d’Ace Of base (qui commence ainsi : “Life is a paradise...”), en résonance avec son premier single Paradise, la réponse est non. Son nom, il le doit a son parcours, beaucoup de résilience et une once de chance qui l’a fait se trouver au bon endroit au bon moment.

Addictions

L’odyssée de Luc Bruyere débute en Belgique. Apres s’etre fait renvoyer a plusieurs reprises des établissements catholiques dans lesquels il se trouve, l’adolescent entiché d’art passe le concours de Saint-Luc, l’école supérieure des arts située a Bruxelles, ou il y reste trois ans a étudier l’art conceptuel dans le but devenir plasticien. Pour la premiere fois, a 15 ans, le jeune homme né avec une agénésie (manque de croissance pendant la grossesse, qui peut toucher n’importe quel membre ou organe) se retrouve dans un environnement qui

lui correspond. « Au moment ou je suis rentré a Saint-Luc, c’est la que ma vie a commencé. Un peu. » Il trouve dans le systeme éducatif belge –qu’il met volontiers en opposition au systeme francais dans lequel il a évolué jusqu’a la fin du college – l’opportunité de s’exprimer, et de se découvrir : « En France, les ados, on les opprime, on les oppresse beaucoup. À cet âge-la, tout ce qu’on ressent on le garde pour soi, alors qu’en Belgique, on tutoie nos profs, parce qu’on est dans une démarche artistique, il n’y a pas l’idée de sanc tion et on nous pousse a trouver notre propos et ce qui nous anime. »

En ce temps-la, Luc habite a Louvain-la-Neuve, a 27 km de Bruxelles, dans un kot (maison étu diante belge) avec le rappeur belge Roméo Elvis. Période pendant laquelle il découvre des dérives potentielles de la vie étudiante. Luc se drogue et fini par devenir accro, a l’âge de 18 ans. « J’étais anorexique, je faisais 47 kilos pour 1,86 m, je n’étais pas beau a voir. » Si l’addiction n’est pas méconnue dans le milieu artistique et que de nombreux artistes se sont essayés a l’utilisation de substances pour la création, dans le cas de Luc il s’agit bien uniquement de défonce. Le jour de ses 19 ans, il est emmené de force a l’hopital du fait de sa toxicoma nie, ou on lui annoncera au meme moment sa séro positivité. « C’était tres bizarre… et en meme temps, c’est comme si cela m’avait permis de comprendre que j’étais en vie. J’adorais ca. »

Désarroi

Et si la meilleure facon de repartir de zéro était de quitter Bruxelles, carrefour européen de la drogue a prix bas selon lui, et changer totalement d’environ nement ? Entre désamour pour sa propre personne et déchéance, Luc qui deviendra quelques années plus tard Lucky Love, s’octroie un fresh start, dans la capitale de l’amour ou il déménage en 2013 sur les recommandations d’un ami. « Moi a cette époque, je ne m’aimais pas beaucoup, j’avais des problemes avec mon bras, ma sexualité

De mes 11 a mes 15 ans il a fallu que je traverse le handicap, ma sexualité, et le jour de mes 19 ans, on m’annonce ma séropositivité » Une fois installé

Lucky Love THE RED BULLETIN 41 LUCKY LOVE PORTE UNE TENUE HELENE ZUBELDIA

Lucky Love

en France, Luc se retrouve sur le tournage du film La Vie d’Adele, d’Abdellatif Kechiche, en tant que figurant. Le réalisateur, désireux de le voir évoluer, lui propose d’intégrer la classe libre des Cours Florent (école de théatre réputée pour former les acteurs de demain) a Paris. Une nouvelle vie se dessine et le comédien en herbe réalise une fois de plus qu’il « a du froler la mort pour réellement com prendre [qu’il] étai[t] en vie ». Au meme moment, il est repéré par Romeo Castellucci, un grand metteur en scene de théatre contemporain italien, qui le caste pour danser dans Moses und Aron, de Schonberg, a l’opéra Bastille, fin 2015. Par la suite, la piece est programmée par le Teatro Real de Madrid, Luc arrete les cours Florent et s’envole pour l’Espagne. Il y reste sept mois avant de revenir a Paris. Où il retombe dans un désarroi : c’est quoi, l’apres ?

Bonjour Madame

Juxtaposé au Divan du Monde, le cabaret Madame Arthur est, depuis les années 50, un temple du travestissement qui affole les nuits parisiennes en reprenant les grands classiques de la musique d’Alain Bashung, Serge Gainsbourg ou Queen, voire meme Beyoncé. Un lieu d’éveil et de curiosités castafioresques, dont le directeur artistique inter pelle Luc, un soir, alors qu’il est venu se divertir : « Tu chantes ? » Lui : « Sous la douche. » Suivi de : « Ça te dirait de chanter ici ? » Luc accepte. S’il n’a jamais envisagé de se travestir auparavant, il voit cette opportunité comme un role de composition et non comme quelque chose de lié directement a sa sexualité ou a la communauté LGBT, mais plutot une interprétation qu’il va pouvoir travailler sur la longueur et développer au fur et a mesure des shows. Cette idée lui plaît. Lui qui n’avait jamais chanté auparavant reste cinq ans au Madame Arthur, de 2015 a 2019, en développant parallele ment une carriere de mannequin entouré de sa chosen family : l’acteur Félix Maritaud, la top model transgenre Raya Martigny et la mannequin, DJ et actrice Dustin Muchuvitz. Ensemble, l’équipe forme une « famille de déglingos » qui a force d’huile de coude et de persévérance s’insere dans les industries les plus redoutables. Les mots de Luc : « Notre point

commun, c’est que nous étions des estropiés exclus de la société qui revions, un jour, d’etre acceptes, sans jamais qu’on le nomme ou qu’on se le dise. »

Un soir a Pigalle. Repéré dans un bar du quartier par un directeur de casting qui n’avait pas preté attention a son agénésie, il se voit proposer un rendez-vous le lendemain, pour un shooting photo. Le jour J, le directeur artistique du projet découvre que Luc n’a qu’un seul bras et « au lieu de se dire que c’est un probleme, il trouve ca incroyable », pensant juste pouvoir concrétiser des projets qui sortiraient des sentiers battus ! Mais la réalité est autre, l’industrie de la mode n’est pas encore prete a accueillir certains physiques singuliers. La tres réputée agence Elite le refuse… C’est alors qu’il recoit un appel qui changera la donne : le photo graphe de mode anglais Craig McDean le veut pour une série dans le magazine Vogue International, shootée a New York, en mars 2018. De la, les agences se l’arrachent. Cette expérience, une épreuve que l’artiste a tres mal vécue, c’est un peu comme les douze travaux d’Hercules : Luc ne sait jamais quelle sera la suite. Il raconte : « La mode, c’est un endroit entre attraction et répulsion. Les clients voulaient bien de moi, mais l’industrie n’é tait pas encore prete pour ce que je représentais. Les agences n’avaient pas confiance. À l’époque, il n’y avait pas de personnes transgenres comme Raya et toute la diversité qu’on observe aujourd’hui. J’étais l’un des premiers a sortir du lot. Et puis je sentais que mon bras était utilisé, que j’étais uti lisé. » Il faut bien comprendre que pour Luc, le trau matisme potentiel lié a son bras absent n’existe pas : « Je n’ai pas l’impression qu’il me manque quelque chose, mon corps est juste différent. Il est complet. Je peux tout faire car je n’ai jamais connu autre chose. Je ne sais pas ce que ca fait que de croiser les bras, donc ca ne peut pas me manquer. C’est aussi ca mon chemin, je dois expliquer aux gens qu’il n’y a pas de probleme. Je ne le dis pas pour qu’ils soient a l’aise avec moi mais, parce que, réel lement, c’est le cas. »

Puis, un beau jour, les choses ont changé, Luc et sa clique sont partout : défilés, campagnes mode et a l’écran, et retournent le game. Luc : « On avait des

« Apprendre ma séropositivité le jour de mes 19 ans, c’était tres bizarre… et en meme temps, c’est comme si cela m’avait permis de comprendre que j’étais en vie. »
Mannequin, chan teur, performeur, acteur : Lucky Love a décidé de fonc tionner à l’instinct et à la passion.
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La vie lui a donné des coups, mais Luc s’est relevé, pour s’imposer, sans concessions. Il s’épanouit à présent dans la musique.

choses a dire et c’est ce qui a fait notre réussite. Je ne me suis jamais travesti pour la mode, je n’ai jamais fait semblant, et je pense que c’est important. Rester soi-même et ne pas faire de concession. On a vraiment du conquérir ce monde. »

Coup de theatre

S’ensuit pour l’artiste un début de reconnaissance : il participe a quelques performances pour Bruce LaBruce (réalisateur de cinéma expérimental qui uti lise la pornographie comme une arme politique) via lequel il rencontre celle qui deviendra son tout, sa vie : l’actrice Béatrice Dalle, avec qui il partagera les planches des Folies Bergères pour jouer Elephant Man a l’automne 2019. Au début de cette pièce, Luc chante une chanson qu’il a écrite exprès, et qui éveille la curiosité de Sandrine Runser, directrice du label Belem Music, chez Wagram, qui vient a sa ren contre : « Si tu veux faire de la musique un jour, dismoi, parce que j’aime vraiment beaucoup ta voix. » Le temps passe. Pendant le confinement, le chanteur Jérémy Chatelain, qui l’a vu se produire chez Madame Arthur, lui propose de passer a son studio pour faire un essai. « Si ca marche c’est cool, si ca ne marche pas on se sera amusés », me dit Luc. Deux jours leur auront suffit pour composer trois mor ceaux que Luc a envoyé a Sandrine, qui se montre plus que satisfaite du travail abouti : « Banco, c’est trop bien! » L’aventure commence enfin, avec la mai son indépendante Wagram, qui « ne voulait pas [le] travestir mais [le] célébrer véritablement », explique Lucky Love. Autre moment fort pour Luc cette année, la création d’une prothèse esthétique concue surmesure pour son bras, et désignée par Sophie de Oliveira Barata, de The Alternative Limb Project. La créatrice a su répondre a ses attentes et combler le jeune artiste en « transformant [s]on handicap en une œuvre d’art incroyable ! », se réjouit Luc.

Maintenant, c’est divin

Si de nombreux médias qualifient la voix de Lucky Love d’androgyne, ce n’est pas sa perception : « Si c’était le cas, elle le serait davantage quand je parle que lorsque je chante. J’ai certainement une voix particulière a cause de mon vibrato très présent

«

Qu’une idee qui sort de mon imaginaire puisse parler a autant de personnes, c’est magnifique ! »

mais ma voix me fait plus penser a des vieux chanteurs comme Jacques Brel, parce que mes “R” sont belges, donc mon phrasé est très vieux francais. » On le constate d’ailleurs avec son titre Toutes mes verites, sur lequel il a invité Juliette Armanet. Entre sensibilité et fragilité, notre amou reux de l’amour nous donnera bientôt les clefs de son être avec son premier album (pour l’instant sans titre, a paraître dans le courant de l’automne).

Ce disque est un peu comme un coussin de velours qu’on serre le soir entre ses bras pour se réconforter. Un moment d’introspection empreint de volupté qui tend au fur et a mesure vers un senti ment de plénitude et donne envie de se célébrer, de célébrer Luc pour la sincérité dont il fait preuve, a l’image d’un lien privilégié. « Ma musique, c’est une relation. »

L’artiste signe ici un premier album qui s’inscrit dans sa contemporanéité, a l’image de ses expériences vécues, de ses valeurs et du message qu’il porte : « L’humanité c’est ce qu’il y a de plus sacré. Ma musique, je la voulais comme une traduc trice de l’époque. Je veux qu’elle soit en lien avec la société d’aujourd’hui. Les préoccupations de ma musique sont les préoccupations du monde dans lequel je vis. » Il s’agit d’un fil rouge « entre la fête et la tristesse après la fête, ou la tristesse avant la fête et la fête après la tristesse ». Un constat selon lequel il n’existe pas de divin, car « le divin , c’est nous, dit-il, le divin, c’est l’humanité, c’est le présent. Arrêtons de courir après des idées, ou après de l’impalpable et observons la divinité qui se trouve dans le maintenant ».

Chaque chanson de son album est une partie de l’ame de Lucky, dont la volonté est de fédérer autour d’une prise de parole qui transpire l’amour. « Quand je dis “Je suis ca” je veux que les gens me disent “moi aussi je suis ca” a leur manière, avec leur interprétation de ma chanson. Qu’une idée qui sort de mon imaginaire puisse parler a autant de per sonnes, c’est magnifique ! » Lucky Love veut bouscu ler le monde tel que nous le connaissons a l’heure actuelle en espérant créer une nouvelle commu nauté. Ou l’acception de l’autre est le mot d’ordre.

Instagram : @thisisluckylove

Lucky Love
THE RED BULLETIN 45 STYLISME : BELISHI MAQUILLAGE : ANTOINE L’HEBRELLEC ; LUCKY LOVE PORTE UNE TENUE MUGLER

Plein la vue !

Texte PH CAMY
The Red Bulletin célèbre ses quinze ans et nous revenons pour vous sur quelquesunes des productions photographiques les plus fortes de notre édition française (lancée en 2011). Faites-vous plaisir.

La France et le VTT, c’est une longue histoire, sur les vélos et derrière les caméras et appareils photos qui ont documenté l’évolution incroyable de cette scène. Le travail de JB Liautard est puissant.

Une apparition Nicolas Terrier, photographié par JB Liautard, édition de mars 2021
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La reine du gros

Justine Dupont, photographiée par Rick Guest, mai 2020

Nous avons accueilli la surfeuse Justine Dupont trois fois dans The Red Bulletin. Une première fois pour recueillir son envie de surfer du gros. Ensuite, pour qu’elle nous explique à quel point l’apnée était bénéfique à son évolution sur les grosses vagues. Enfin, pour une couverture où nous avons mis à l’honneur celle parvenue au sommet des plus gigantesques vagues au monde.

Le ciel est sa limite

Sofiane, photographié par Felipe Barbosa, novembre 2018 Il n’y a pas deux Sofiane dans le rap français. Plus qu’un MC, le rappeur s’est fait entrepreneur, décideur et recruteur d’une scène qui n’a cessé d’exploser ces dernières années. Un cover shot inattendu pour un artiste hors des cases.

The Red Bulletin a 15 ans THE RED BULLETIN 49
« Le but est d’être au cœur de l’action sans être enfermé dans la vague, et d’avoir toujours une solution de sortie. »
Le photographe Ben Thouard

Au pied du mur

Matehau Tetopata, photographié par Ben Thouard, septembre 2021

À force de photographier des spécialistes du surf en Polynésie, Ben Thouard s’est peu à peu concentré sur les vagues elles-mêmes plutôt que sur celles et ceux qui osent les chevaucher. Fasciné par l’eau dans toute sa puissance, il montre ici le surfeur en spectateur. Bluffé.

The Red Bulletin a 15 ans
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Le futur Tess Ledeux, photographiée par Sandro Baebler, février 2022 Quelques semaines après notre photo shooting, la freestyleuse remportait la médaille d’argent de ski big air aux JO d’hiver en Chine. Derrière son masque, une jeune athlète qui a encore énormément à offrir.

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Skater l’art Christian « Muze » Plettner, photographié par Dave Van Laere, décembre 2017 Beau à voir, bon à skater, avec le Français Raphaël Zarka, auteur d’un livre sur l’art et le skate, plus précisément dédié aux émérites du skate ridant des œuvres d’art en Europe, et à ceux qui les prennent en photo. The Red Bulleitn a 15 ans

New York state of mind

Thierry Henry, photographié par Lee Powers, novembre 2011

Qui de mieux qu’un champion du monde 98 pour lancer la version fran çaise du Red Bulletin en 2011 ? Évo luant à l’époque aux New York Red Bulls, Titi s’est prêté au jeu pour une interview et une séance photo au som met d’un gratte-ciel new-yorkais.

The Red Bulleitn a 15 ans
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Déterminée Mavinga, photographiée par Little Shao, octobre 2019 Pour la finale mondiale du concours de danse libre Red Bull Dance Your Style en France, Mavinga était l’un des espoirs attendus. Sur le toit d’un immeuble parisien, la danseuse a pu libérer la force intérieure qui la caractérise.

Top Gun

Tom Pagès, photographié par Oliver Godbold, février 2022 Boss solitaire du FMX (freestyle motocross), le Français Tom Pagès a décidé d’emporter sa disci pline ailleurs, encore plus haut. À Avoriaz, en équipe, il a élaboré une performance dans laquelle moto et BASE jump se sont imbri qués pour un plaisir visuel décuplé.

Un style en béton

Diablo, photographié par Chris Saunders, juin 2019

C’est au cœur du quartier des Moulins, à Nice, où il a grandi, que le danseur Diablo a tenu à nous recevoir pour le sujet de couverture que nous souhaitions lui dédier. Là, c’est dans une bloc party, entouré de tous ses amis talentueux (cuistots, cinéastes, rappeurs, producteurs...) que Diablo nous a reçus. Une journée aussi intense que ses moves.

Le joueur au grand cœur

Rudy Gobert, photographié par Kevin Couliau, novembre 2017 À l’initiative de Red Bull France, le joueur français de NBA Rudy Gobert était venu à Paris pour rencontrer des enfants soutenus par le Secours populaire. Nous avions organisé une séance photo avec le géant de 2,16 m sur le playground de la marque branchée Pigalle, à Paris, designé par le collectif Ill-Studio.

La toute première couverture de la nouvelle revue The Red Bulletin en 2007 : un portrait de la légende néerlan daise du windsurf, Bjørn Dunkerbeck.

15 ANS DU RED BULLETIN

PHOTOS STARS

Quand le magazine The Red Bulletin (publié par Red Bull Media House) a été lancé en 2007 en Autriche, il s’est d’entrée positionné comme un média « hors du commun ». Et il devait donc proposer des contenus photographiques de qualité supérieure, avec de l’âme. Lancée en novembre 2011, la formule française du magazine s’est inscrite dans la même lignée, et nous n’avons cessé, depuis, d’y mettre en avant des profils atypiques, que nous voulons toujours photographier en exclusivité, malgré leurs agendas parfois embouteillés.

Pour honorer les 15 ans du TRB, nous avons sorti des archives certaines des parutions photographiques parmi les plus marquantes de notre jeune histoire. Au cœur de ces images, des talents et des vies, de l’action et de la réflexion, de la conviction et de la détermination. Surtout : l’envie de vous transporter là où le normal et la banalité n’existent pas. Dans les yeux de nos héros et héroïnes, chaque mois, se trouve une dose d’autre chose. De l’inspiration. theredbulletin.com

The Red Bulletin a 15 ans
EIN FAST UNABHÄNGIGES MONATSMAGAZIN NUMMER 1, NOVEMBER 2007 DIE NUMMERWWW.REDBULLETIN.COM
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BREAKING ENFANT DU 58
Texte JEFF WEISS Photos LAUREL GOLIO
Depuis près de dix ans, VICTOR MONTALVO tient le haut du pavé dans les compétitions internationales de breaking, mais l’histoire du B-Boy remonte bien plus loin… avant même sa naissance.
Victor représentera les US lors de la finale mondiale du Red Bull BC One à New York le 12 novembre. En 2015, il avait déjà remporté la finale mondiale à Rome.
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histoire de Victor Montalvo, l’un des plus grands B-Boys de sa génération, ne remonte pas à sa découverte du breaking quand il a eu 6 ans. Sa première appari tion dans les cyphers de Floride centrale il y a quinze ans, démontrant une telle précocité que l’adolescent alors inconnu est rapidement devenu le sauveur du breaking américain, n’en est pas non plus le point de départ. Le conte de fées de B-Boy Victor, champion international de breaking qui devrait offrir une belle chance de médaille aux USA lors des Jeux olympiques de Paris en 2024, commence réellement à Puebla (Mexique) plus de dix ans avant sa venue au monde.

« Mon père m’a toujours dit : “Quoi que tu fasses, donne-toi à 100 % et sois le meilleur. Tu deviens gardien d’immeuble ? Très bien, mais sois le meilleur gardien d’immeuble possible !” », confie B-Boy Victor pour expliquer l’état d’esprit qui l’a amené au plus haut. Nous sommes au mois d’août. Après une longue journée d’entraînement, B-Boy Victor se pose tranquillement sur le canapé de sa salle d’entraînement couverte de tags située à West Los Angeles. C’est là qu’il a choisi

de s’installer quelques années plus tôt en vue de saisir d’éventuelles opportunités dans le secteur du divertissement. « Mon père me racontait toujours qu’il voulait devenir champion de breaking, mais il n’a jamais pu concrétiser son rêve. »

Retour à l’automne 1983. Dans un quartier pauvre de Puebla, une métropole nichée dans les hauts plateaux subtropi caux à environ 130 kilomètres de Mexico, où les ouvriers dépensent une bonne par tie de leur salaire pour occuper de minus cules logements de fonction complète ment vétustes, les jumeaux Bermudez découvrent le breaking, un tout nouvel art venu du sud du Bronx au milieu des années 1970.

Les cinq arrondissements de New York, ils en sont à des années-lumière. Mais alors que le hip-hop est encore confiden tiel dans une grande partie du pays qui l’a inventé, Victor et Hector Bermudez –qui ne sont autres que le père et l’oncle du futur B-Boy Victor – en ont vent grâce à un visiteur venu des US pour visiter un cousin, le voisin des deux frères. Il est équipé d’un lecteur Betamax, et d’un documentaire artisanal sur le breaking qui leur fait découvrir les windmills, les headspins et les downrocks popularisés par le Rock Steady Crew. Inspirés par une telle créativité, les jumeaux Bermudez visionnent la bande jusqu’à l’usure, s’ef forçant de reproduire ces mouvements. Dès l’été 1984, le breaking devient littéra lement incontournable. La sortie de deux films majeurs, Breakin’ et Beat Street, fait

sensation dans le monde entier : les ado lescents découvrent un phénomène qui s’était presque exclusivement concentré sur la côte est des États-Unis d’Amérique et à Los Angeles. Mais à 13 ans, les frères Bermudez ont déjà une longueur d’avance.

« Lorsqu’on allait voir ces films au cinéma, il y avait toujours des gars qui essayaient de breaker juste devant, se souvient Victor Bermudez. Mais comme on avait déjà vu le documentaire, on était bien mieux préparés. Alors quand on se mettait à danser, on avait un succès fou ! »

Alors que la tendance s’enracine au Mexique, les frères Bermudez et leurs amis décident de monter un crew qui devient vite le meilleur de la région. Les jumeaux sont surtout connus pour leurs power moves étourdissants. Pendant 18 mois, ils participent à de grandes com pétitions dans tout l’État de Puebla. Il n’y a pas d’argent à la clé, mais ils sont nour ris, leurs trajets sont payés, et ils sont par fois logés. C’est déjà beaucoup pour des gosses qui entrent à peine dans l’adoles cence, n’ont jamais quitté leur quartier, et rêvent de danse et de gloire.

Mais en 1986, la première vague de breaking s’essouffle. Les frères Bermudez décident de se consacrer à la guitare et à la batterie au sein d’un groupe de death metal. Or, la musique ne permet pas davantage de payer les factures. Dans l’espoir d’échapper à la pauvreté galo pante qui sévit dans la région, les deux frangins rejoignent un gang de rue.

L’ B-Boy Victor THE RED BULLETIN 61

B-Boy Victor

« On a commencé à s’attirer des ennuis… On faisait des choses pas très catholiques. Ma mère m’a averti : si je continuais comme ça, soit j’allais mourir, soit j’allais finir en prison, se rappelle Victor (senior) Bermudez. Elle a insisté pour que je les accompagne aux ÉtatsUnis. J’en ai parlé avec ma femme, qui était encore ma petite amie à l’époque, et on a dit : “Banco !” »

Pour aller aux États-Unis d’Amérique, il faut entreprendre un voyage périlleux, et notamment traverser le désert de Chihuahua. Le manque de nourriture et d’eau se fait souvent sentir. Après avoir passé la frontière, les vingt membres de la famille sont interceptés et entassés dans une camionnette, puis emmenés dans un coin perdu qui leur est totale ment inconnu. Le périple se termine à Kissimmee (Floride), une ville à prédomi nance portoricaine située en périphérie d’Orlando, où la famille finit par s’instal ler. En 1994, l’année de naissance de B-Boy Victor, les deux frères sont embau chés comme chefs dans un restaurant de Disney World, dans la région.

Leurs espoirs de devenir riches et célèbres grâce à la danse s’envolent. Dans leur nouveau pays, les frères Bermudez

se consacrent à leur travail et à leur famille qui s’agrandit. Mais leur passion d’enfance reste dans un coin de leur tête.

Peu après l’an 2000, toute la famille est assise dans le salon et regarde le célèbre battle entre les New York City Breakers et les Bronx Rockers au Roxy dans Beat Street. Hector et Victor profitent de l’occasion pour raconter à leurs enfants l’époque où ils faisaient la même chose à Puebla. Le petit Victor, 6 ans, et son cousin un peu plus âgé éclatent de rire. Ni une ni deux, les jumeaux Bermudez ressortent leurs vieux hoodies du placard et commencent à enchaîner les windmills, les backspins et les pops. Les enfants n’en reviennent pas : ils insistent pour qu’on leur apprenne ces mouvements.

Mais leur engouement est de courte durée : B-Boy Victor et son cousin Hector « Static » Bermudez arrêtent le breaking pendant quatre ans. Lorsqu’ils finissent par s’y remettre, ils ne font pas dans la demi-mesure. Véritablement obsédés par la danse, ils s’entraînent tous les jours et forment un crew avec quelques per sonnes de leur entourage. Aucun d’entre eux n’imagine alors le succès retentissant qui va déferler pour la scène nationale et internationale du breaking. Car nous

sommes au beau milieu des années 2000. La tendance de la fin des années 1990 qui met à l’honneur l’underground et le retour aux fondamentaux est déjà passée de mode. 50 Cent et les crossovers entre pop et rap trustent les charts. Pour la plupart des lycéens de Floride centrale, le breaking, c’est du passé.

« On pensait être les seuls breakers au monde, se remémore B-Boy Victor. On ne regardait pas YouTube… on ne savait même pas ce que c’était ! On n’avait pas d’ordinateur et je n’ai pas eu de télé phone avant mes 18 ans. On se contentait de vieilles cassettes vidéo avec des gars qui faisaient des headspins sur MTV. Et on essayait de les copier. »

Vêtu d’un hoodie bleu marine et d’un pantalon de survêtement, sneakers aux pieds, le jeune homme de 28 ans a les cheveux noirs coupés court et un tatouage qui recouvre tout son avant-bras. L’arché type du B-Boy… enfin, avec des faux airs de pop star.

Pour clore en beauté cette après-midi caniculaire d’août où nous rencontrons le breaker, B-Boy Victor, que l’on appelle le plus souvent Victor, s’en ira à Santa Monica afin de jouer au beach-volley avec quelques amis. Il vient de passer

Sur la piste du Sara D. Roosevelt Park à New York, un champion du monde de breaking évolue en toute décontraction.
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« Mon père m’a toujours dit : “Quoi que tu fasses, donne-toi à 100 % et sois le meilleur.” » THE RED BULLETIN 63
B-Boy Victor
« J’adorais perdre, car cela m’incitait à en faire plus. Plus je perdais, plus je m’améliorais. »
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plusieurs heures à s’entraîner afin de reproduire des power moves qui l’ont fait connaître à une génération entière, en amont de la finale mondiale du Red Bull BC One qui se déroulera en novembre à New York, et pour laquelle il bénéficie d’une wild card et représentera donc les États-Unis d’Amérique.

En regardant Victor danser, on pour rait penser à tort que cette flopée de backspins, d’airflares et de windmills éblouissants lui sont innés, comme s’il avait jadis conclu un pacte avec le diable pour défier la gravité. Certes, le jeune homme est athlétique, souple et agile par nature, mais il lui a fallu des années de

pratique rigoureuse avec son frère et son cousin pour accéder au rang de star. Il n’y avait pas de studio luxueux pour faire émerger leur talent. Pour se protéger plus ou moins lors des entraînements, le crew posait un carton sur la moquette, ou un tapis sur le béton.

« Je m’entraînais dans ma chambre et je le voyais passer sa tête à la porte pour savoir ce que je faisais, raconte son cousin Static. Je lui ai demandé : “Tu veux qu’on apprenne ensemble ?” C’est là qu’on a vraiment commencé à s’entraîner.

On dansait tout le temps, jour et nuit. Il fallait que mon père et mon oncle nous forcent à aller nous coucher. »

Pendant les trois années qui suivent, les deux compères perfectionnent sans relâche leurs mouvements aux côtés d’une demi-douzaine de potes. Sans aucun contact avec le monde du brea king, ils développent un style original qui n’est pas influencé par les tendances de l’époque. Un jour, un membre du crew entend parler d’une session de breaking à Kissimmee. Lorsqu’ils arrivent, on a l’impression de voir les survivants de Lost sur le point de quitter enfin l’île maudite.

« C’était dingue parce que personne ne nous connaissait, se souvient Static. Tout le monde se demandait : “Mais qui sont ces gamins ?” Certains croyaient même que nous n’étions pas du coin. »

À tout juste 14 ans, Victor finit dans le top 16. Lors du tournoi suivant qui se déroule à Gainesville (Floride), le crew rapporte le trophée à la maison. Puis, tout s’enchaîne… enfin plus ou moins. Le chemin vers le circuit international est semé d’embûches. Même les meilleurs B-Boys échouent plus qu’ils ne réus sissent. Cela forge un mental d’acier : il ne s’agit pas d’accepter la défaite, mais de savoir rebondir.

« J’adorais perdre, car cela m’incitait à en faire plus, ajoute Victor. À l’époque, je m’entraînais comme une bête, j’allais à tous les événements, mais je n’arrivais pas à atteindre une place acceptable. Tout ce que je me disais, c’était : “Bon, eh bien il va falloir s’entraîner davan tage.” Puis j’allais à un autre événement et je me qualifiais, mais je finissais par perdre. Et là, je me disais : “Bon, eh bien il va falloir que je m’améliore.” Et plus je perdais, plus je m’améliorais. »

Vers la fin des années 2000, Victor et son crew, Flip Style, achètent des DVD des concours Red Bull BC One… et découvrent la scène internationale du breaking. L’avènement de YouTube leur permet de regarder des vidéos d’événe ments internationaux, ce qui aide Victor à faire évoluer son style et l’incite à voir plus grand. Sa première victoire mar quante a lieu dans le cypher du Red Bull BC One à Tampa en 2011 : elle le qualifie pour la finale nationale à Chicago. Il n’a encore jamais quitté la Floride.

« Les gens se demandaient : “Qui c’est, ce gosse ? Encore un qui ne verra jamais le deuxième tour !”, s’amuse Victor, qui concourt alors à Chicago sous le nom de Vicious Victor. J’étais l’outsider. Personne ne croyait que j’allais passer le premier tour : “Ce petit-là, aucune chance qu’il l’emporte.”

»

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Mais juste quelques mois après son dix-septième anniversaire, Victor touche du doigt le trophée, échouant seulement en finale face à B-Boy El Niño. Une étoile est née. Les invitations aux tournois inter nationaux les plus prestigieux se multi plient. La première de ces compétitions est le Notorious IBE qui se tient chaque automne aux Pays-Bas. Victor rêve de ce moment depuis des années, mais deux problèmes se posent : il n’a pas de passe port et il est en terminale au lycée.

« Ma mère et ses frères et sœurs ne voulaient pas que je parte. Pour eux, c’était réglé ! Même mon grand frère jugeait que c’était une mauvaise idée », raconte Victor.

« Je suppliais ma mère tous les jours, mais mon père, lui, voulait que j’y aille. Il m’a dit : “Tais-toi, plus un mot à ta mère. Tu y vas, un point c’est tout.” »

Alors qu’il a du mal à payer le loyer, le père de Victor débourse plus de 500 dol lars pour obtenir un passeport en urgence à son fils, déterminé à ce que ce dernier réalise les rêves qu’il n’a jamais eu la change de concrétiser lui-même. Après les Pays-Bas, Victor est invité au Battle of the Year en France. Il commence à prendre du retard au bahut. Il décide d’arrêter le lycée et part en Angleterre pendant trois mois.

« Ça n’a clairement pas plu à ma mère et à son côté de la famille, avoue Victor.

Ils pensaient tous que c’était une catas trophe, que j’allais rater ma vie et que je devais retourner au lycée pour trouver un métier digne de ce nom. Mais mon père tenait avec moi. Il me disait : “Ne t’inquiète pas, suis tes rêves. Continue comme ça.” C’était le seul qui croyait vraiment en moi. »

Après plusieurs années pendant les quelles Victor obtient de bons résultats mais gagne rarement, 2014 est celle de la consécration. Il remporte un battle en France, puis un autre à Taïwan. En tant que membre du prestigieux crew Squadron, Victor encaisse encore de nom breuses défaites, mais ses efforts acharnés et son talent à l’état brut lui permettent

Victor et le breaking, une histoire qui a débuté dans le salon familial devant les moves des danseurs d’un film mythique, Beat Street
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sans doute le meilleur B-Boy de tous les temps dans l’univers des compétitions de breaking. »
« C’est
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de faire passer son art du breaking au niveau supérieur. Grâce à son physique athlétique et à son sens de l’improvisation, il atteint un niveau technique inédit, sans pour autant sacrifier les fondamentaux traditionnels des plus grands B-Boys et B-Girls avant lui.

Tout cela nous conduit à 2015. Cette année-là, Victor remporte la finale mon diale du Red Bull BC One à Rome, le championnat Silverback Open à Philadel phie et l’Undisputed World B-Boy Series en France (qu’il remporte une nouvelle fois en 2017). C’est le début d’un par cours dont peu de B-Boys peuvent se tar guer dans l’histoire moderne de la com pétition. Il a gagné trop de battles pour qu’on en dresse une liste exhaustive.

Le succès ne lui tourne pas pour autant la tête : son entourage le décrit comme sympathique, modeste et persé vérant. « C’est un bosseur qui fait preuve de beaucoup d’humilité, précise Kateryna Pavlenko, son épouse, également connue sous le nom de B-Girl Kate. On a l’impres sion qu’il est né sous une bonne étoile. Quand il veut quelque chose, il réussit toujours à l’obtenir. Il a vraiment bon cœur, il est passionné et il a une patience à toute épreuve. C’est d’ailleurs ce qui lui permet de continuer à s’améliorer dans tout ce qu’il veut faire. »

Mais depuis trois ans, Victor éprouve un sentiment de lassitude à l’égard de son sport. Rester au top, ce n’est pas une sinécure… sans parler de la pression. On peut s’entraîner tous les jours, mais on finit souvent par avoir le sentiment de tomber dans la routine et de suivre simplement le mouvement. Au début de l’année 2020, Victor comprend qu’il est temps de faire une pause, qui se trans forme bientôt en interruption forcée avec l’apparition de la pandémie.

« Je n’avais plus le cœur à l’ouvrage, déplore Victor. J’étais convaincu qu’il me fallait un break. C’était peut-être à cause des événements ou de la musique… mais en tout cas, je n’avais plus le même feeling. » En 2020, il rentre en Floride pendant six mois pour retrou ver sa famille. Après la réouverture des frontières, il se rend avec son épouse en Ukraine, le pays d’origine de B-Girl Kate. Pendant son congé sabbatique, Victor se met au muay thaï, au cyclisme et au run ning. Depuis son retour à la compétition, il rafle victoire sur victoire.

« C’est sans doute le meilleur B-Boy de tous les temps dans l’univers des compétitions de breaking, déclare Omar

“RoxRite” Delgado Macias, breaker de légende et membre du crew Squadron. Il se sert de ce qui a déjà été fait pour atteindre des niveaux inégalés et il apporte en même temps sa touche per sonnelle. Il a déjà remporté trois des plus grands événements organisés par la fédération olympique. Autant dire qu’il a de très grandes chances de rem porter l’or en 2024. »

L’or olympique est peut-être l’objectif le plus important et le plus imminent de Victor, mais ce n’est certainement pas le seul. Sous ses airs calmes et discrets, il déborde de projets d’avenir. Il veut fonder une famille, investir dans l’immobilier et créer une entreprise. Dans l’idéal, une salle d’entraînement pour les breakers et d’autres athlètes…

Bien sûr, gagner la toute première médaille d’or olympique de breaking lui ouvrirait de nombreuses portes et pour rait amener Victor à devenir l’ambassa deur de sa discipline sur la scène natio nale et internationale. Mais certaines choses ont plus d’importance à ses yeux, comme la multitude de possibilités qu’une médaille apporterait à son art et à sa communauté.

« Nous allons gagner le respect des autres sports, assure Victor. Il n’y a pas que les battles dans le breaking, il y a aussi toute une culture. Je tiens à ce que les gens la découvrent, car la compétition peut vite devenir soporifique si on ne comprend pas ce que font les breakers. Je veux que les gens entrevoient tous les aspects du breaking. »

Avec les Jeux olympiques, c’est la pos sibilité de concrétiser un rêve qui s’étale sur plusieurs générations, celui d’un père qui n’a jamais eu l’opportunité de s’épa nouir pleinement dans sa passion, et qui a tout sacrifié pour que son fils devienne le numéro 1 mondial. Une victoire à Paris mettrait Victor en lumière. Mais ce serait surtout l’aboutissement d’un espoir né il y a quarante ans.

« Je n’ai pas eu la chance de le faire, alors je tiens vraiment à ce que mon fils réalise ses propres rêves. Et grâce à lui, je peux vivre les miens, se réjouit son père, Victor Bermudez. J’ai toujours voulu être le meilleur, mais je ne pouvais pas, car j’avais mes enfants. J’étais encore très jeune et je devais travailler. Lorsque mon fils se rend à l’étranger, je regarde ses photos et il m’appelle en visio. Je vois tout à travers ses yeux. Tout ce que je voulais faire, il le réalise aujourd’hui. »

Instagram : @supamontalvo

Près du pont de Manhattan : les pigeons new-yorkais ne volent plus quand Victor exécute ses power moves.
B-Boy Victor THE RED BULLETIN 69

La forme de l’eau

Photographe de sport et d’action, ZAK NOYLE a grandi à Hawaï dans un univers dominé par l’océan et son infinie palette de bleus. Fasciné par la puissance et l’esthétique des vagues, il essaie aujourd’hui, à travers son art, d’en saisir toute la beauté. Démonstration en images.

Première vague Côte nord de l’île d’Oahu, Hawaï, 2019 Zak Noyle : « Ce spot occupe une place à part dans mon cœur, puisque en quelque sorte, c’est grâce à cette vague que ma carrière a débuté : pour pouvoir photographier le surfeur à cette hauteur, j’ai dû me caler dans un creux du riff. »

71
« Je suis le conseil de mon père : prendre beaucoup de photos, mais ne garder que les meilleures. »
Zak Noyle

Ce rêve bleu Pacifique Sud, 2015 Surfeur amateur, Noyle se souvient avec émotion : « C’est ici que nous avons tourné avec Ian Walsh le docu mentaire Distance Between Dreams, pour Red Bull : je n’avais jamais vu d’aussi belles vagues et une eau aussi claire. Une expérience magique qui m’a laissé de jolis souvenirs. »

Zak Noyle
73

Retour aux sources

Makapu’u, Hawaï, 2016

« Le surfeur Ezekiel Lau sur la côte est de l’île d’Oahu – le coin où j’ai grandi et où j’allais toujours nager, étant gamin. Ce que j’aime par ticulièrement, c’est l’at mosphère qui règne juste avant une tempête : ce cliché me ramène à ces instants de pur bonheur. »

«
La mer, les grosses vagues, Hawaï et moi : c’est la passion qui me relie à tout cela. »
74 THE RED BULLETIN
Zak Noyle THE RED BULLETIN 75

Pool Party

Austin, Texas, 2017

« Noah Beschen en train de s’éclater au Waco Wave Pool, à Austin. C’est beau coup plus facile de travailler là-bas parce que les vagues artifi cielles se brisent tou jours au même en droit. » Un avantage qui a permis à Zak Noyle d’expérimenter avec son matériel.

Décollage

Mexique , 2009

« Cette envolée de Jamie O’Brien a une raison bien précise : nous avons passé tout un été au Mexique pour y réaliser un film sur lui, Who is JOB Avec les spectateurs au premier plan, on se rend mieux compte de l’exploit. »

Zak
Noyle 76 THE RED BULLETIN

Soleil levant Japon, 2014

« Un voyage rempli de belles rencontres, en compagnie du surfeur Seth Moniz : des vagues superbes, une nourriture excellente et une population d’une politesse légendaire. »

Vol de nuit Austin, Texas, 2017

« Ford Archbold en train de surfer sous la voûte étoilée – toujours dans le Waco Wave Pool. On était quatre pour la photo, dont deux qui tenaient le flash tout en essayant de ne pas gêner le surfeur. Pari réussi ! »

À table !

Tavarua, archipel des îles Fidji, 2014

« Le surfeur Billy Kemper en pleine partie de pêche : il y avait une houle impressionnante mais ça valait le coup – ce que je préfère, c’est le thon Ahi, un délice à déguster cru. »

Dans la lumière

Costa Rica, 2017

« Le temps semble s’être arrêté sur cette photo, qui montre Alex Knost en action – au moment où un rayon de soleil vient percer les nuages.

Une aubaine ! »

Zak Noyle THE RED BULLETIN 79

ZAK NOYLE

Pourquoi cet artiste hawaïen de 37 ans, qui se défnit lui-même comme un « photo graphe de l’eau », préfère-t-il par-dessus tout prendre les vagues en photo, davantage que les surfeuses et les surfeurs ? « Afn de capturer ces immenses masses d’eau », explique-t-il avec enthousiasme. La plupart des gens – comme sa mère, par exemple –n’osent pas s’approcher trop près des vagues pour en saisir toute la beauté. C’est pour cette raison qu’il veut être au plus près d’elles, pour rendre compte de leur puis sance, de leur essence. Pour cet amateur de surf – d’un niveau plutôt moyen, selon ses propres aveux – la vocation semblait couler de source : « Mon père est photographe de publicité et a travaillé pour des hôtels, des restaurants ou dans la mode. C’est lui qui m’a initié au métier. » Sans l’exemple pater nel, Zak aurait choisi d’étudier l’océanogra phie, son autre passion : « J’aime trans mettre mon amour et mes connaissances de l’océan. » Un univers qu’il connaît par cœur, notamment la faune sous-marine, comme les tortues de mer et les dauphins : « Des créatures d’une infnie curiosité, alors quand je m’approche d’elles, c’est toujours avec beaucoup de respect. » zaknoyle.com ; Instagram : @zaknoyle

« Être présent dans les moments extrêmes – c’est ça qui me fait triper ! »
LE
80 THE RED BULLETIN

Dans le flow

Côte nord d’Oahu, Hawaï

Le pipeline, c’est la vague des vagues, ce rouleau impressionnant que l’on traverse à toute vitesse comme un tunnel – comme ici, avec le surfeur japo nais Taichi Wakita. Zak Noyle : « Au Japon, “Ikigai” désigne ta raison d’être, ce qui te donne la joie de vivre. Pour Taichi, c’est justement cette vague si particulière. » Un déferlement d’émotions !

Zak
Noyle THE RED BULLETIN 81
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CAP SUR LES BAHAMAS

entre

curieux, cochons nageurs et

! Une croisière magique
poissons
escargots frits. PERSPECTIVES Expériences et équipements pour une vie améliorée 83 GETTY IMAGES

Andy Moritzer, 49 ans, écrivain voyageur et navigateur, dévoile son journal de bord.

Plages de palmiers caribéennes, rhum, pirates, James Bond, colo nies de touristes américains et cochons nageurs : voilà ce que j’imaginais avant mon voyage en voilier avec ma femme Mélanie. Depuis, j’ai découvert que les Bahamas recelaient presque autant de surprises que les 700 petites et grandes îles composant cet archipel, le plus insulaire des Caraïbes.

Un véritable paradis aquatique pour navi gateurs et navigatrices, entre défis auda cieux et merveilleux spectacle naturel.

Bienvenue dans les Exumas, région dont les îles (ou cays) s’enfilent comme des chapelets de perles et séparent les eaux peu profondes de l’indomptable océan Atlantique. La plupart de ces îles sont soit privées soit protégées : adieu, tourisme de masse, bonjour, inoubliables paysages et mouillages isolés !

La mafia des chicken wings

Nous quittons New Providence, île la plus peuplée des Bahamas abritant Nassau, la capitale, pour atteindre Exuma après une traversée mouvementée en pleine mer.

Il faut bien quatre à six heures au naviga teur le plus aguerri pour atteindre les pre mières îles situées à 40 miles nautiques (75 km pour les profanes). Nous nous lan çons à l’assaut des vagues en compagnie d’Althario, skippeur pour The Moorings, la compagnie qui nous a loué ce luxueux catamaran à voile Moorings 4500. Parfai tement adapté aux particularités de la région, il accueille huit personnes, un important volume d’équipement de plon gée et une annexe.

Ex-marine pour la Defence Force, Althario connaît chaque grotte et chaque récif de la région comme la poche de son gilet de sauvetage ; normal, puisque son travail consistait à en repousser les

éventuels importuns. Beaucoup ignorent que les pirates existent encore de nos jours : bien loin de l’imagerie romantique de Pirates des Caraïbes, ces contreban diers transportent des produits très demandés, drogues en provenance d’Amérique centrale pour le marché amé ricain ou ailes de poulets surgelées pour les autochtones (sic)

À 33 ans, Althario propose désormais ses services aux touristes en mal d’aven ture souhaitant profiter de son expertise pour naviguer dans ces eaux peu pro fondes mais remplies de pièges. « Les bancs de sable sont fuyants et dange reux, il faut traverser les cours d’eaux lorsque la houle et la marée sont les plus favorables », nous explique-t-il le premier soir autour d’un verre de rhum arrangé au lait et à la banane.

Nous faisons son tour préféré, qui débute par une escale aux abords d’Highbourne Cay, magnifique île privée

«
Avec ses mangroves et ses étroits cours d’eaux, l’île de Shroud Cay est, selon moi, le plus bel endroit au monde. »
Les cochons nageurs des îles Exumas : ces attachants mammifères vivent en liberté mais appartiennent à des fermiers locaux. Notre voilier, un catamaran 4500 ; en tout petit sur le ponton : Althario, notre skippeur.
PERSPECTIVES voyage
84 THE RED BULLETIN UPTOPMEDIA, @WEALTHYADVENTURE ANDY MORITZER

Arrivée

Depuis l’Europe, impossible de se rendre aux Bahamas sans escale. L’archipel dispose de plusieurs grands aéroports. Pour rejoindre les îles Exumas, il faut se rendre à l’aéroport Lynden Pindling de New Providence, situé près de la capitale Nassau.

Pour l’entrée aux Bahamas, un visa n’est pas nécessaire si le séjour n’excède pas trois mois. Par contre, il est indispensable d’être en possession d’un passeport valable au moins six mois après la date de retour. Air Caraïbes assure des vols pour Nassau depuis Paris-Orly, avec escale à San Salvador ou La Havane.

ÎlesExumas

Le chef et ses conques : ces escargots de mer vivent dans des coquillages et sont consommés en friture ou en salade.

Bon à savoir

Indispensable pour un voyage en voilier aux Bahamas.

ZONE DE NAVIGATION

Dès son arrivée dans les Exuma Cays, com posés de 356 îles, parc national compris, on est récompensé par une faune et une flore exceptionnelles. Véritable trésor de paysages sous-marins et d’espèces endé miques, l’archipel se distingue par une culture indépendante très marquée. D’une superficie de 176 km², le parc national ter restre et marin des îles Exumas est le pre mier du genre. Pour l’anecdote, il a été fondé en 1958 par Ilya Tolstoï, petit-fils du célèbre auteur russe. bahamas.fr

PARTENAIRE CHARTER

The Moorings propose des catamarans à voile techniquement irréprochables et équipés de tout le confort. Grâce à son expertise et ses innombrables conseils éclairés, notre skippeur Althario s’est révélé être un guide indispensable pour naviguer entres les eaux basses et tor tueuses du parc national. Les prix varient en fonction de la saison et de la taille du bateau. À partir de 1 300 € par personne et par semaine pour une location complète de huit personnes. moorings.fr

Shroud Cay, merveilleux spectacle naturel : les mangroves servent d’abri aux requinsbouledogues. Les Bahamas Nassau Highbourne Cay Shroud Cay Warderick Wells Cay Big Major Cay ANDROS BIMINI ÎLE CAT ÎLE LONGUE GREAT INAGUA GRAND BAHAMA GRAND ABACO
THE RED BULLETIN 85

où nous jetons l’ancre dans une marina tranquille. Nous sommes accueillis par un banc de requins-nourrices barbotant paisiblement dans les eaux peu pro fondes. Surnommés les « chiens des Bahamas », ces impressionnants masto dontes sont en fait totalement inoffen sifs, ce qui n’est pas le cas de leurs collè gues, les requins-bouledogues, eux aussi occupés à frayer dans le coin. Aussi imposants et dangereux que le « grand requin blanc », cauchemar d’enfance de toute une génération, ces monstres font vite sortir les touristes de ces eaux d’un profond bleu turquoise.

Notre catamaran quitte Highbourne Cay et son sable fin comme du sucre glace pour rejoindre Warderick Wells. Devant désormais consommer unique ment les vivres emmenés à bord, nous jetons l’ancre dans le parc national mari time et terrestre d’Exuma Cays au beau milieu d’une variation de bleus moirés qui dépassent l’imagination.

Des coquillages savoureux

Nos nouveaux compagnons de route, les requins-nourrices, somnolent dans les eaux peu profondes, indifférents aux raies pastenagues, véritables bolides des

fonds marins éclairés par le scintillement des conques. Charmant objet de décora tion, ce grand escargot marin est égale ment un parfait indicateur de la bonne qualité de l’eau. Et surtout, c’est le plat national des Bahamas. Nous le dégustons frit arrosé de la bière du coin, la Kalik. Les puristes le consomment cru en salade aigre-douce, ce que nous n’ose rons faire que quelques jours plus tard

lors de notre détour par la civilisation pour observer les cochons nageurs de Big Major Cay. Ces coquins roses et dodus viennent déjà à la rencontre de notre annexe, le plus grand d’entre eux tente même un abordage. Heureuse ment, nous avons encore des restes de notre étape au parc national (où règne une stricte politique de no-take-noleave), ce qui nous permet de faire diver sion. Ils dévorent joyeusement nos restes de melon et de pâtes, puis, rassasiés, se laissent caresser et posent pour la photo.

« L’escargot se déguste frit ! »

Lors de notre retour vers New Provi dence, une vague de nostalgie nous sub merge en repassant devant Warderick Wells. Les superlatifs nous manquent lorsque nous découvrons l’un des plus beaux endroits au monde, Shroud Cay, îlot recouvert de mangroves et divisé par des cours d’eaux qu’Althario nous fait habilement traverser en annexe. Notre pouls s’accélère un instant lorsqu’un requin-bouledogue apparaît à bâbord, mais Althario n’est pas un ex-marine pour rien. Nous laissons enfin le prédateur et le lagon derrière nous pour replonger dans la mer. Et c’est là, à l’endroit où l’eau douce rejoint l’eau salée, que nous pre nons notre décision : nous reviendrons !

Andy Moritzer, 49 ans, navigateur et fin gourmet. Warderick Wells, île principale du parc national des Exuma Cays : une mer de rêve, le bleu sous toutes ses nuances.
PERSPECTIVES voyage
86 THE RED BULLETIN @WEALTHYADVENTURE ANDY MORITZER

UNE QUESTION DE DOSAGE

De la douceur dans l’effort

Garder un œil sur son taux de sucre c’est la cerise sur le gâteau d’un entraînement ciblé.

« Nous roulions sur une autoroute et les voitures nous dépassaient à près de 100 km/h, se souvient Kabir Rachure, ma capacité à garder l’équilibre se détériorait chaque seconde. » Au jour huit de la Race Across America (RAAM) 2019, l’une des plus longues épreuves cyclistes d’endurance au monde, l’ultra-cycliste a des hallucinations si graves qu’il en perd les pédales, littéralement.

Le coureur originaire de Navi Mumbai, en Inde, met trois jours pour refaire sur face, poussé par la crainte de ne pas finir la course dans le délai imparti de 12 jours. Parti d’Oceanside, en Californie, il atteint l’arrivée à Annapolis, dans le Maryland en 11 jours, 22 heures et 4 940 km, plutôt mécontent.

Rachure se penche alors sur les gains marginaux. Il équipe son vélo d’un capteur de puissance pour analyser ses entraînements et étudie les données de son sommeil pour mesurer sa récupéra tion. En décembre dernier, Rachure étoffe son arsenal en plantant un Ultrahuman M1 dans son bras. Ce capteur invasif mesure en temps réel le taux de glycémie dans le sang. Les données transmises à son smartphone lui per mettent d’évaluer les effets de l’exercice, du repos et de l’alimentation.

Lors de sa participation suivante à la RAAM en juin dernier, Rachure réduit son temps de course de plus de 11 heures par rapport à 2019 et se classe troisième dans sa

catégorie d’âge. Il est le pre mier Indien à monter sur le podium en 40 ans d’histoire de l’événement. Et, ses pro blèmes physiques ont dis paru. « J’avais de l’énergie, aucune hallucination, pas de courbatures ni de fatigue », explique Rachure, 31 ans. Voici comment il a surveillé son sucre pour éviter une défaite amère.

Panne sèche

L’alimentation avant l’entraî nement est un terrain miné même pour les athlètes pros.

Rachure n’y prêtait jamais attention, jusqu’à ce que le M1 lui révèle un taux de glycémie trop bas avant une sortie. « J’ai commencé à consom mer boissons énergétiques, gels, beurre de cacahuète, et café, confie-t-il. L’effet est immédiat. Depuis, je vais au bout de toutes mes séances y compris lorsque les inter valles sont intenses. »

Le bon carburant

Durant la RAAM 2019, Rachure opte souvent pour la pizza après la pause sommeil. Au cours de la digestion, les données révèlent alors une chute de glucose pendant trois heures. « J’ai répété l’ex périence cinq ou six fois et les données ne laissent aucun doute », note-t-il. Chaque métabolisme réagit différem ment à un même régime, mais le suivi de la glycémie permet d’établir ce qui va ou pas.

Entretenez la faim

Les cyclistes de la RAAM doivent absorber dix à douze mille calories par jour, en continu. « Une prise de nourri ture ponctuelle importante entraîne une sensation de léthargie, une prise insuffi sante une sensation de fai blesse », explique Rachure. Le suivi de la glycémie l’aide à maintenir un taux optimal. La faim reste constante, mais supportable. « C’est comme en F1, la gestion du carburant améliore la performance. »

Écoutez votre corps

Le biohacking de votre santé n’est plus de la science-fiction, mais l’important est de se rappeler qui est aux com mandes. « C’est comme avoir un coach sur le bras 24/7, mais votre ressenti reste primordial, insiste Rachure. Même si les données montrent que je suis rechargé à 99 %, je demeure celui qui connaît le mieux mon corps. »

»

Kabir Rachure, ultra-cycliste

Instagram : @the_limited_one ; ultrahuman.com

« Gérer votre carburant améliore vos perfs.
PERSPECTIVES fitness
88 THE RED BULLETIN ULTRAHUMAN CHARLIE ALLENBY
plus d’info sur tattoo-planetarium.com

gaming

G R E A T

V O C A B G A M E S A V O I B R A I N

D R A I N D

Remuer ses méninges

Jouer avec (et non sur) les mots pour ne pas les oublier.

L’automne dernier, Josh Wardle, ingénieur informa tique à Brooklyn, crée un jeu (inspiré du jeu TV Motus) pour sa petite amie. Le couple ayant apprécié les jeux d’ortho graphe et les mots croisés du New York Times durant le confinement, il décide de concevoir un jeu en ligne.

L’idée est simple : deviner un mot de cinq lettres en six ten tatives. Les lettres bien pla cées s’affichent en vert et les mal placées en jaune. Wardle baptise son jeu Wordle, un clin d’œil à son patronyme.

Le succès est fulgurant, trois mois après son lance ment, Wordle compte plus de deux millions de joueurs et joueuses chaque jour, ses cases reconnaissables alimentent les réseaux sociaux à mesure que les utilisateurs et utilisatrices partagent leurs résultats (sans spoiler).

« Wordle nourrit la réflexion

sur la linguistique, s’enthou siasme Gareth Carrol, auteur et maître de conférences en psycholinguistique à l’univer sité de Birmingham. La culture et la technologie influencent grandement l’évolution du lan gage. » C’est indéniable.

En janvier, le New York Times achète le jeu à Wardle (pour une somme à sept

chiffres non divulguée), et lance également WordleBot, un utilitaire qui évalue vos performances et vous aide à améliorer votre jeu.

Mais si vous préférez une approche plus organique, Gareth Carrol, être de chair et de sang est à votre disposi tion. Et comme Wordle est désormais un jeu entièrement analogique, du coup il est temps d’affûter le traitement de texte le plus organique : le cerveau humain.

Attaquez fort

Combinez

Les consonnes les plus cou rantes en anglais sont R, T, N, S, L et C, mais Carrol conseille de raisonner par paires, comme ST, CL, SK ou TW. « Pensez aux consonnes et aux voyelles qui s’associent naturellement. Leur position nement est lié à la façon dont nous produisons les sons. » Ne pas négliger non plus les consonnes doubles. LL est le plus courant.

Soyez sociétal

En reprenant Wordle, le New York Times provoque un tollé lorsqu’il supprime les mots SLAVE, LYNCH et WENCH (esclave, lyncher, prostituée).

La réaction est moins due à la censure qu’à la création de deux versions du jeu aux réponses différentes (Wordle est une page Web, et certains profils ont enregistré la version initiale sur leur disque dur).

Pour Carrol, cela révèle le lien permanent entre vocabulaire et culture : « L’évolution de la langue reflète notre histoire sociale, et son évolution. »

Exercez votre cerveau

»

Gareth Carrol, linguiste

En prenant en compte les réponses possibles (le Wordle Bot les limite à 4 500 mots), le choix le plus probable est SLATE. Pourtant, Gareth Carrol penche plus pour PLANE, STRIM ou DOUGH. « Cela couvre toutes les voyelles et un bon nombre de consonnes sans répétition », explique-t-il.

À huit ans, un enfant apprend en moyenne 6 à 7 mots par jour. Un adulte possède un vocabulaire actif de près de 20 000 mots, et un vocabulaire passif deux fois plus important. « La langue est la somme totale de tout ce que vous avez entendu et vécu, explique Gareth Carrol. À partir de cin quante ans, la progression stagne. » C’est là que des jeux comme Wordle prennent tout leur sens. En 2014, une étude menée par l’Université de Saint-Jacques-de-Compostelle auprès de 326 personnes de plus de 50 ans montre que les personnes ayant un vocabu laire plus riche compensent mieux ce ralentissement en puisant dans leur « réserve cognitive ». « Les mots que nous utilisons affectent tous les aspects de notre vie », conclut Carrol.

Wordle: The Party Game est sur wordlethepartygame.com

« La culture et la technologie influencent le langage.
FOCUS
PERSPECTIVES
90 THE RED BULLETIN ALEXANDRA SIMS

HORS DU COMMUN

Retrouvez votre prochain numéro en octobre en abonnement avec et avec , dans une sélection de points de distribution et sur abonnement.

RICARDO NASCIMENTO / RED BULL CONTENT POOL

EVIL EPOCALYPSE

Chaque nouveau modèle Evil fait l’effet d’une bombe. Autant dire que son premier e-bike était très attendu. L’Epocalypse offre 166 mm de débattement arrière grâce à la fameuse suspension Delta compatible avec les 85 Nm de couple du moteur EP8, petit dernier de Shimano. Batterie de 630 Wh suffisante pour les longues sorties sans être trop lourde. Retour de la géométrie chère à Evil : bases courtes, angle de direction faible et pédalier ultra bas pour un côté ludique et dynamique. 12000 €; evil-bikes.com

DU MATOS POUR LES BRAVES

Prêt et prête à tout déchirer en descente, à faire des sauts de malade ou vous éclater entre potes sur les trails ? C’est parti pour le top du top des tous derniers produits VTT.

SANTA CRUZ NOMAD 6

Le petit frère du célèbre Nomad fait son entrée avec une roue de 29 pouces à l’avant pour une adhérence parfaite et 27,5 à l’arrière pour un ma niement souple. Suspension VPP (l’une des plus performantes jamais conçues) et cadre en car bone équipé d’un box de rangement dans le tube diagonal. Centre de gravité abaissé, tige de selle télescopique et disques de freins 200 mm pour des descentes savoureuses sur tout type de ter rain. À partir de 5670 €; santacruzbicycles.com

PERSPECTIVES matos

TRAIL BOSS 3-PIÈCES/3-TÊTES

Un outil modulaire et léger idéal pour façonner vos trails et vos parcours. Les segments du manche (en fibre de verre ou en acier) reliés à des raccords en alu de qualité aéronautique donnent un meilleur effet de levier. Selon la tâche, vous avez le choix entre trois têtes en acier Hardox 450 : houe pour couper et creuser, McLeod pour ratisser et façonner et scie de 30 cm pour couper branches et chutes encom brantes. À partir de 565 €; trailbossusa.com

HAYES DOMINION T4

Kit de frein à disque 4 pistons pour fans de ter rains escarpés. Imbattable niveau modulation et réglage, pistons de 17 mm et grosses plaquettes métalliques pour une accroche et une longévité incomparables. Finition ultra précise au niveau du levier et du contact des plaquettes. L’aligne ment croisé élimine frottements et bruits para sites. Poids plume grâce au levier en carbone et matériel en titane. Garantie étanche à vie. 325 € le frein; hayesbicycle.com

GIRO INSURGENT SPHERICAL

Certifié ASTM downhill et BMX, c’est le premier casque intégral doté de la technologie Spherical mise au point avec MIPS. Ce système permet un mouvement indépendant entre les couches, redirigeant l’énergie nocive lors des impacts d’une chute. Chaque coque est dotée de diffé rents types de mousse afin de protéger contre les impacts à grande et à basse vitesse. Avec vingt trous d’aération, c’est le modèle intégral le plus ventilé de Giro. 350 €; giro.com

SMITH SQUAD MTB

Le masque idéal pour une bonne visibilité quelles que soient les conditions. Ecran ChromaPop amovible, plusieurs options (de lumière grise à plein soleil), compatibilité Tear-Off pour mauvais temps. Traitement antibuée polycarbonate, structure très aérée pour une ventilation maxi male, mousse absorbante pour un ajustement fiable et confortable, strap extra large pour un excellent maintien sur le casque. 60-85 €; smithoptics.com

Très léger, l’élégant North Shore NSR-4 peut transporter quatre vélos.

NORTH SHORE NSR-4

Les élégants porte-vélos North Shore Racks sont bien connus des cyclistes émérites. Version 2023 améliorée et adaptée à davantage de mo dèles de vélos. Pliable pour un rangement com pact, il peut supporter jusqu’à quatre vélos en verticale (jusqu’à 90 kg). Hauteur, recul et angle réglables pour une configuration compatible avec presque tous les véhicules équipés d’un at telage de 5 cm. Ses 15 kg en font l’un des modèles les plus légers. 750 €; northshoreracks.com

ANTI-GRAVITÉ
THE RED BULLETIN 93

CANYON SPECTRAL 125 AL6

Avec une géométrie progressive empruntée aux modèles d’enduros Spectral 160 légèrement modifiée pour offrir une maniabilité polyvalente, cette machine délurée aime les terrains acci dentés. 125 mm de débattement à l’ar rière, amortisseur arrière Fox réglable et 140 mm de débattement à l’avant grâce à la fourche Fox 36 Rhythm. Freins à disques Shimano SLX à quatre pistons pour aborder les drops et les bosses en toute confiance et pneus Maxxis bien larges pour les sentiers secs ou boueux. 3510 €; canyon.com

PERSPECTIVES matos

POUR LE TRAIL

ALLIED BC40 Avec ses quatre barres de suspension et 120 mm de débattement avant et arrière, le BC40 est la machine idéale pour vos longs rides. La géométrie moderne promet un péda lage efficace dans les grosses montées et une direction stable pour les descentes techniques. Le cadre en carbone est fabriqué à la main à Bentonville, Arkansas. Parfait pour des journées de trail ou une sortie débridée tout en confort. Àpartirde7650 €; alliedcycleworks.com

94 THE RED BULLETIN

SHIMANO XT DI2

Inventrice du changement de vitesse électro nique, Shimano propose cette nouvelle version compatible avec son récent moteur EP8. Auto Shift sélectionne le braquet en fonction des cap teurs de cadence, de vitesse et de couple. Free Shift détecte le terrain même en roue libre et change la transmission en fonction de la route à venir. L’appli e-Tube permet de les personnaliser depuis votre smartphone. Disponible uniquement sur les nouveaux e-bikes; bike.shimano.com

Pour up-grader votre VTT, rien de tel que des roues ultra légères. Seul problème : leur prix exorbitant. Ces roues en carbone font le même poids que les modèles haut de gamme. Pneu tubeless-ready fabriqué à partir d’un alliage de carbone signé Toray, l’un des meilleurs producteurs mondiaux. Design asymétrique compatible avec des pneus de 2,2 à 2,6 pouces, moyeux Star Ratchet. 1000 €; logoscomponents.com

EVOC TRAIL PRO 10

Style et sécurité grâce à ce sac à dos assez spacieux pour emporter tout le nécessaire sur vos trails. Poche à outils externe, poche princi pale assez grande pour loger tous vos objets ainsi qu’une poche à eau trois litres (non fournie). Ceinture de hanche Airo Flex rembourrée pour plus de stabilité et pochettes pour en-cas. Rembourrement profilé pour une aération opti misée, protection dorsale Liteshield Plus pour la colonne vertébrale. 240 €; evocsports.com

FOX ENDURO SLIP-ONS

Coudières légères et faciles à ranger pour les longues montées moins techniques ; manches en Lycra anti-humidité et panneaux en nylon arti culés à l’arrière garantissent confort et fraîcheur même en les gardant pendant une ascension. Les inserts en mousse vous protègent des pierres, branches et autres coups de pédale et sont amovibles pour le lavage. Grips en silicone pour le bon maintien des coussinets dans les passages de rochers. 80 €; foxracing.com

AMERICAN CLASSIC MAUKA

Quand on fait du trail, on apprécie les bons gros pneus bien épais, mais il y a des limites. Ce pneu tubeless-ready combine traction en descente et performance de roulement rapide. Les crampons carrés assurent un bon grip dans les virages et la généreuse surface de contact assurent une traction exceptionnelle en ligne droite. Le système Bead To Bead Protection optimise la résistance aux crevaisons. 45 €; amclassic.com

L’Evoc Trail Pro 10 : un sac à dos super léger pour faire le plein de style et de sécurité. THE RED BULLETIN 95

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Samedi 27 août 2022, en Haute-Savoie. Accablé par les blessures depuis le début de la saison, Loïc Bruni rêve de fêter son 5 e titre mondial (après 2015, 2017, 2018 et 2019) dans son pays. Et le fait ! Super Bruni vole sur la piste des Gets lors des Championnats du monde UCI de VTT descente, reléguant ses adversaires à plus de 2,5 secondes derrière lui. Ses fans, bouillants, pètent les plombs. Les Français signent un triplé (dont les gendarmes ne se sont pas remis) avec un podium complété par Amaury Pierron et Loris Vergier.

Le prochain THE RED BULLETIN sortira le 24 novembre 2022.

Pour finir en beauté
98 THE RED BULLETIN BARTEK WOLINSKI/RED BULL CONTENT POOL
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