Perspectives Med N°. 108 - Avril - Mai 2016

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PERSPECTIVES Méditerranée

DIRECTEUR DE PUBLICATION : ALLAL EL MALEH | EDITIONS POPMEDIA: PUBLICATIONS DE REFERENCE | PRIX PUBLIC : 30 DH | N°108

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UNE NOUVELLE DOCTRINE

LE TEMPS DES RUPTURES L E S C H O I X S T R AT É G I Q U E S E N M U TAT I O N De nouvelles lignes force émaillent, en creux, les choix stratégiques réaffirmés du Maroc depuis l’enceinte du Conseil de coopération du golfe (CCG). Les ruptures, souverainement annoncées, touchent les alliances. La barbarie de Daech n’en finit pas d’ensanglanter le monde. Eclairages sur la nouvelle doctrine royale. La Belgique a été frappée, en son cœur, par

un commando de la terreur. La réplique de ce terrifiant séisme, dont l’épicentre se trouve au Proche-Orient, n’a épargné aucune nationalité à Bruxelles. Marocains, Américains, Français… ont été victimes du double attentat kamikaze. Le bilan est lourd et traumatisant: plus de 30 morts et 300 blessés !

Avril - Mai 2016


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ÉDITORIAL LA PRESSE ET LE JONGLEUR ALLAL EL MALEH

L

a commémoration de la journée mondiale de la presse permet au corps meurtri d’une profession en déperdition d’évaluer les temps perdus en terre marocaine. Non pas parce que le secteur a essentiellement mal à sa gouvernance corporatiste, une réalité qui mérite un autre éclairage, mais à cause de la gestion de l’avenir de tout un métier par des apprentis sorciers dont la reconversion en politique les prédispose à « décider » de tout et de rien à la fois. Nul besoin de rappeler, ici et maintenant, que les médias en général ont de tout temps représenté un réel défi pour le pouvoir. Et les marges de liberté qui permettent encore à une frange du métier de survivre, loin des rapports d’asservissement et de vassalisation, ont tendance à s’éroder avec le temps. Comme cela transparait à travers les moutures du Code de la presse et du Statut des journalistes présentés par l’Exécutif au pouvoir législatif pour adoption. Au ministère en charge de la Communication, on pérore sur les avancées réelles ou supposées apportées auxdits textes. Une logique récusée par les professionnels regroupés aussi bien au sein de la Fédération des éditeurs que parmi les membres du syndicat national de la presse. Et pour cause ! La tutelle réserve le gibet aux journalistes. Ce corps devant être trainé en justice suivant la procédure pénale en vigueur. C’est donc à l’aune du Code pénal que l’on calculera désormais les écarts journalistiques et que l’on instruira les procès. Dès lors, la liberté de la presse a de quoi trinquer, et sérieusement, si le processus vicieusement entamé par la tutelle aboutirait aux résultats escomptés. Certes, une telle progression liberticide a de quoi échauder les partisans de la construction démocratique qu’ils soient de gauche ou de droite. Comme elle a déjà alarmé les instances en charge du dossier des droits humains. Mais

faut-il se contenter de « constater » les faits sans réagir contre les concepteurs d’une légistique qui s’inscrit en faux vis-à-vis des préceptes consacrés par la Constitution du pays ? Souvenons-nous de la levée de boucliers suscitée par le même département à l’orée de son investiture lorsqu’il présenta, toute honte bue, les fameux « cahiers des charges » auxquels les médias audiovisuels devaient se conformer. Ce corsetage de la liberté qui exprime, dans ses entrailles, une tentative visant la réinitialisation du mode de vie et de pensée des Marocains, avait suscité tout un tollé. Lequel a permis d’épargner au paysage audiovisuel marocain tout basculement dans le conservatisme et forcé ses promoteurs à mettre en sourdine leurs prétentions à vouloir régenter la société selon les préceptes d’un courant d’idées empestant l’enfermement. C’est de cet élan-là, libérateur à souhait, que la profession des médias a cruellement besoin pour assumer, dans la plénitude et avec responsabilité, les nobles missions qui sont les siennes : informer l’opinion et éclairer les citoyens. Car pour vivre, la démocratie qui se construit dans le pays ne saurait se priver de la liberté dans son acception la plus large. Les professionnels des médias, imbus qu’ils sont de l’éthique qu’exige le métier et des règles déontologiques qui en constituent le socle, ne sauraient sacrifier la liberté sur l’autel de l’audience à tout prix. Celle qui, fort malheureusement, fait le succès de quelques pales copies locales des feuilles de choux britanniques qui n’ont d’intérêt que pour leur formule de gain construite autour des trois « S » : sexe, sang et sport. Ce n’est certainement pas parce que des « brebis galeuses » sévissent dans la profession qu’il faut mettre tout le monde dans le même panier…à salade ! La médiocrité peut-être traitée autrement que par le recours au Code pénal.

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POINTS CHAUDS

PARTENARIATS STRATÉGIQUES

LE MAROC VEILLE À LA MULTIPOLARITÉ

P20

SOMMAIRE 17

CHRONIQUE

Bonjour les dégâts MOUILLER LE PÉTARD…

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NATION

Bataille des législatives ELARGIR LE CONSENSUS…

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MONDE

L’Algérie remet ses pendules à l’heure DE LA VACANCE DU POUVOIR

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CHRONIQUE

vu ici QUELLE DÉCHÉANCE !

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POINTS CHAUDS

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POINTS CHAUDS

Partenariats stratégiques LE MAROC DIVERSIFIE SES CARTES

Le Roi s’en prend aux USA NON AU DIKTAT ! 23

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NATION

Le 1er mai aux couleurs syndicales COMBIEN DE DIVISIONS ?

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MONDE

Normalisation en Libye RIEN N’EST ENCORE PLIÉ !

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MONDE

NATION

Sahara UNE MANCHE DE GAGNÉE…

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MONDE

Effondrement du monde arabe CEUX QUI SE NOURRISSENT SUR LA BÊTE…

En France, « Nuit Debout » LA SOMME DES DÉSILLUSIONS

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MONDE

panorama DE TOUT ET DE PARTOUT


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ÉCONOMIE CULTURE

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ÉCONOMIE

Croissance économique en panne LES « NON-DITS » DE A. JOUAHRI

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ÉCONOMIE

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CULTURE

SPORT

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ÉCONOMIE

Commerce extérieur LE DÉFICIT SE CREUSE

MARCHÉ

Croissance potentielle LES MARGES À INVESTIR

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ÉCONOMIE

La Cour des comptes audite DÉFAILLANCES À TOUS LES ÉTAGES

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CULTURE

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ÉCONOMIE

Balance des biens et services créatifs HANDICAPS ET DÉFICITS

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MARCHÉS

Bourse de Casablanca UN BON CRU 2015 ?

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CULTURE

Poètes, philosophes et artistes non gratae VOS PAPIERS !

Impressions castillanes COMMENT OUBLIER DAECH…

Jim Harrisson tire sa révérence L’ÉPICURIEN PUR JUS…

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CHRONIQUE

SPORT

SPORT

Grand prix de Chine Sociétés sportives MERCEDES CONFIRME SA SUPRÉMATIE DÉCONCERTANT FATRAS JURIDIQUE

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Juste pour rire L’HEURE DE LA DÉBANDADE !

DIRECTEUR DE LA PUBLICATION & DE LA RÉDACTION: ALLAL EL MALEH | RÉDACTION: ABDERRAHMANE EL MALEH - A. BEN DRISS - ABOUMARWA - SAID AKECHEMIR - LAMIA MAHFOUD - OULED RIAB - MOHAMMED TALEB - MUSTAPHA EL MALEH - YAHYA SAÏDI | ONT COLLABORÉ À CE NUMÉRO : ABDERRAHMANE MEKKAOUI| RESPONSABLE ADMINISTRATIF & FINANCIER : FATIMA EL MALEH | CRÉATION: ABDELKABIR BOUMKIL / PM DÉVELOPPEMENT | PORTRAITISTE: HELMA LALLA | PHOTOS: PM EDITIONS | MENSUEL ÉDITÉ PAR POP MÉDIA SARL: 8, BD. YACOUB EL MANSOUR MAARIF – CASA | TÉL.: 05 22 25 76 17/ 05 22 25 76 54/05 22 25 77 84/ FAX: 05 22 25 77 38/ E MAIL : CONTACT@PERSPECTIVESMED.MA/ WWW.PERSPECTIVESMED.MA/ IMPRESSION: IDÉALE | DISTRIBUTION : SOCHEPRESS | N° DÉPÔT LÉGAL: 2005/0101 | ISSN : 1114-8772 | CE NUMÉRO A ÉTÉ TIRÉ À 15.000 EXEMPLAIRES

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ENTENDU TOXICOMANIE

LES JEUNES RAVAGÉS COP 22

TOUT S’ANNONCE BIEN Alors que la communauté internationale célébrait, à New York, la 46e Journée de la Terre, la signature de l'Accord de Paris par 160 pays, dont le Maroc, qui fait partie des premiers signataires, a représenté une occasion de plus confirmant l’optimisme ambiant quant au succès de la COP 22 prévue au Maroc. La princesse Lalla Hasnaa a représenté le roi Mohammed VI à la cérémonie de signature lors de ce premier grand rendez-vous pour le climat après la COP21, en attendant la COP22, qui aura lieu en novembre prochain à Marrakech.

ADMINISTRATION TERRITORIALE

REDÉPLOIEMENT ÉLECTORAL

Le ministère de l’Intérieur fait preuve, à l’approche des législatives, d’une particulière fébrilité en matière de quadrillage du territoire. Ainsi, ce sont près de 2500 mokadem et cheikh qui seront déployés à la veille des élections du 7 octobre. Une action qui se veut proactive, l’administration étant particulièrement tatillonne en matière de « neutralité » souvent décriée par des formations politiques. En sus, l’Intérieur a même promis d’augmenter les émoluments de ces agents de l’Etat pour qu’ils restent à l’abri de toute tentation.

SAHARA MAROCAIN

LE PENTAGONE IMPLIQUÉ Les Américains n’excluent pas les provinces sahariennes de leur champ de coopération avec le Maroc. En effet, l’aide militaire octroyée par les Etats-Unis au Maroc au titre de l’exercice 2015-2016 incluait bel et bien le Sahara marocain. Bien plus, à l’occasion de l’exercice African Lion se déroulant dans le Sud marocain, les soldats de l’AFRICOM arboraient des badges d’identification avec la carte du Maroc qui va de Tanger à Lagouira.

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Les résultats d’une étude du ministère de la Santé auprès des jeunes âgés de plus de quinze ans, a de quoi mettre en pétard les responsables. Nos jeunes sont ravagés par la toxicomanie : 2% des jeunes consomment l’alcool, 3.3% consomment des substances illicites et plus de 2.8% sont des toxicomanes. L’étude révèle en outre que l’âge de la première consommation de drogue est de dix ans ! A ce rythme là, il y a de quoi craindre pour la société…

LOIS ÉLECTORALES

ENTRE SEUIL ET LISTES…

En prévision des législatives d’octobre, les lois électorales sont en train d’être amendées. Si le seuil électoral baissera à 3% et les alliances préélectorales seront possibles, l’affaire des listes électorales qui appelle à être révisée n’est toujours pas tranchée. Partis politiques et ministère de l’Intérieur s’opposent sur cette question cruciale. D’un côté, on milite pour que le vote se base sur la CIN, les listes devant s’établir sur cette base, tandis que de l’autre on privilégie les campagnes de sensibilisation des populations pour l’inscription volontaire sur ces listes. L’enjeu est capital puisque seuls 7 à 8 millions de personnes votent au Maroc. Or le corps électoral, sur la base de l’inscription volontaire, est estimé à 15 près de millions de personnes, ce qui donne un taux de participation de l’ordre de 50%, comme aux précédentes élections communales et régionales de 2015 (53,67%), ou aux législatives de 2011 (45%). Si on élargit ce corps électoral aux détenteurs de la carte nationale (27 millions de personnes), le taux baisse à 25% environ…


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ENTENDU SEBTA ET MILILLIA :

DÉCOLONISATION REPORTÉE ?

SÉCURITÉ

COLLABORATION MAROCO-BELGE Mohamed Hassad, ministre de l’Intérieur et Abdellatif Hammouchi, directeur général de la sûreté nationale et de la surveillance du territoire, ont effectué le 22 avril dernier, à Bruxelles, une visite de travail. Invités par le vice-premier ministre et ministre de l’intérieur et de la sécurité du royaume de Belgique, Jan Jambon, les deux responsables marocains ont profité de cette réunion pour exprimer la solidarité du Maroc avec la Belgique et rassurer quant à la pleine disposition des services de sécurité marocains à renforcer davantage la concertation et l’échange de renseignements avec leurs homologue belges.

LUTTE CONTRE LE TERRORISME

LE MAROC AUX CÔTÉS DE LA HOLLANDE Le ministre délégué auprès du ministère des Affaires étrangères et de la coopération, Nasser Bourita, a pris part, à La Haye, à la cérémonie marquant la passation de la Co-Présidence du Forum Mondial de Lutte contre le Terrorisme (GCTF). Le Maroc, porté à l'unanimité à la co-présidence de ce Forum lors de la 7ème Réunion du Comité de Coordination du GCTF tenue en mai 2015 à Doha, accèdera à cette haute responsabilité à la suite d'une période de transition codirigée par les Pays-Bas et la Turquie. "Le Maroc est honoré de reprendre cette lourde responsabilité avec nos partenaires néerlandais", a affirmé Bourita lors de cette cérémonie. "Une co-présidence pleine de signification: elle consacre la conviction profonde du Maroc que la lutte contre le terrorisme est une responsabilité collective de l'ensemble de la communauté internationale dans sa diversité et ses réalités régionales et sous régionales. Elle conforte la détermination du Maroc à contribuer au renforcement des valeurs d'ouverture, de dialogue, de coopération et de partage des expériences et des bonnes pratiques pour répondre efficacement à la menace terroriste et extrémiste", a affirmé Bourita. Le GCTF est composé de plus de 30 membres en plus de nombre d'Etats et d'organisations partenaires dont l'ONU. Il réunit régulièrement des décideurs et des experts dans les domaines clés de lutte contre le terrorisme qui sont issus de différentes régions.

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Sur Luxe Radio, l’animateur du « Grand Oral » a passé sur le grill Mbarka Bouaida, ministre déléguée aux Affaires étrangères, en abordant la question de la décolonisation de Sebta et Melillia. « Aujourd’hui, il y a une priorité pour le Sahara. Il y a tout un processus qui est mis en marche et on espère qu’un jour on aura aussi un processus politique pour récupérer Sebta et Melilia», a affirmé la ministre. Mais elle a nuancé ses propos en soulignant: «On le réclame à chaque fois qu’on a la possibilité de le faire, mais sur le plan international rien n’est encore fait, il n’y a pas de processus de négociations officiellement annoncé».

DROITS HUMAINS

L’AMDH CRITIQUE Le dernier rapport annuel établi par l’AMDH sur la situation des droits humains confirme que le Maroc enregistre nombre de régressions. Si la loi interdit la torture, note l’AMDH à la tête de laquelle trône Annahj Ad-Dimoukrati, pas moins de 60 cas ont été recensés. Bien plus, des retours sur les aquis démocratiques sont observés, comme c’est le cas de l’interdiction des activités de l’Association.

DRAA-TAFILALET

CHOUBANI SUR LA SELLETTE

Assurément, rien ne va plus pour le Président de la région Draa-Tafilalet. Lahbib Choubani qui était en viste dans la localité Aghbalou Nkerdous a été surpris de voir écrit noir sur balnc sur une pancarte « Dégage ! ». Le Président de la région Daraa-tafilet n’est pas à sa première polémique près. Il a déjà été épinglé pour une sombre histoire de location d’une villa de « fonction » aux frais du contribuable…


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• Chichaoua : 05 24 35 37 74 • Marrakech 1 : 05 24 44 84 22 • Marrakech 2 : 05 24 35 47 20 • Agadir 1 : 05 28 84 29 95 • Agadir 2 : 05 28 83 81 19 / 90 / 91 • Dakhla : 05 28 93 14 12 / 53 • Errachidia : 05 35 79 26 45 / 47 / 48 • Rabat 1 : 05 37 72 58 46 • Rabat 2 : 05 37 29 08 82

• Salé : 05 37 88 63 19 / 21 / 23 • Kénitra : 05 37 37 99 66 • Karia Ba Med : 05 35 62 89 32 • Rommani : 05 37 51 66 71 • Meknès 1 : 05 35 55 12 70 • Meknès 2 : 05 35 30 05 19 / 543 / 548 • Fès 1 : 05 35 62 59 51 • Fès 2 : 0535 72 14 21 / 22 • Berkane : 05 36 64 51 80 / 81

• Oujda 1 : 05 36 52 40 20 • Oujda 2 : 05 36 70 60 23 • Nador : 05 36 35 98 78 / 79 / 80 • Al Hoceima : 05 39 98 01 40 / 42 • Tétouan : 05 39 71 52 05 • Tanger : 05 39 95 11 11

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ENTENDU APRÈS CLINTON

AL JAZEERA ENCENSE LE PJD HAMMOUCHI À MOSCOU

LA SÉCURITÉ AU MENU Le patron de la direction générale de la sureté nationale (DGSN) et de la direction générale de surveillance du territoire (DGST), a été reçu dernièrement au Kremlin, par Nikolaï Patrouchev, secrétaire général du conseil de sécurité de Russie, l'organe consultatif auprès du président russe, chargé des affaires de sécurité. Une visite qui intervient en application des accords sécuritaires entre les deux pays, conclus lors de la visite du 16 mars, du Roi Mohammed VI à Moscou, rappelle un communiqué du Conseil russe. Les entretiens qui ont eu lieu à cette occasion ont porté sur la situation sécuritaire en Afrique du Nord et au Moyen-Orient, et sur ‘‘l’interaction de la Fédération de Russie et le Royaume du Maroc dans le domaine de la sécurité afin de lutter efficacement contre .’’le terrorisme international

TERRORISME

COLLUSION ENTRE LE DRS ET LE BORGNE Les liaisons entre le pouvoir algérien et les groupes terroristes .comme AQMI et ses filiales, se confirment Selon un Email reçu par l’ancienne secrétaire d’Etat américaine, Hillary Clinton, le 17 janvier 2013 à 10h du soir, et publié par Wikileaks, le 16 mars dernier et auparavant par le département d’Etat américain, le 29 février dernier, le pouvoir algérien entretient des relations secrètes avec le groupe terroriste, appelé avant, « Les Signataires par le sang », que dirige le terroriste algérien, Mokhtar Bekmokhtar Cet Email a été envoyé à Hillary Clinton, par Sidney Blumental, un .ancien Conseiller spécial du président américain Bill Clinton Dans sa lettre, Sidney Blumental rapporte des renseignements des services secrets français, faisant état de la découverte de cette liaison criminelle entre les services secrets algériens, le DRS, et le terroriste .Mokhtar Belmokhtar, alias le Borgne

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Les islamistes marocains sont uniques en leur genre. Ils « n’adoptent point d'idéologie internationaliste et ne militent pas pour une globalisation islamiste ou pour le rétablissement d’un empire califal ». Ainsi a estimé le site d’Al Jazeera chaine qatarie connue pour son alignement pro-Frères Musulmans, en reproduisant une tribune de Souhail Ghannouchi, ancien président de « l’American Muslim Society ». Cette tribune fait suite aux déclarations faites par H. Clinton, candidate à la Maison Blanche, qui versent dans le même creuset. Une saillie critiquée par plusieurs .formations politiques marocaines

COURSE AUX ARMEMENTS

LE MAROC DERRIÈRE L’ALGÉRIE Les dépenses militaires mondiales ont augmenté en 2015 du fait de la multiplication des tensions dans le monde, a indiqué mardi 5 avril l'Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (Sipri). Sur l'ensemble de l'année, les dépenses militaires se sont élevées à 1676 milliards de dollars, une hausse de 1% sur un an. Avant 2015, les dépenses militaires avaient connu quatre années de recul. Outre cette hausse globale, principalement portée par l'Europe de l'Est, l'Asie et le Moyen-Orient, le centre de recherches a constaté que la diminution des dépenses militaires en Occident avait ralenti. Les États-Unis restent le pays qui dépense le plus, de très loin. Leur budget, de 596 milliards de dollars, est en repli de 2,4% par rapport à l'année précédente, soit .moins que les années précédentes En termes d’importations, le Maroc se classe à la 17 ème position de.vancé par l’Algérie qui occupe la 11ème place

POLISARIO

…DES AGENTS À DÉCOUVERT L'Office des Nations Unies à Genève (ONUG) a éconduit une séparatiste du polisario qui usurpait le statut officiel de représentant permanent de l'entité fantoche auprès de l'ONUG, a-t-on appris de sources diplomatiques marocaines. Omeima Abdeslam a dû confirmer par écrit au bureau de liaison des ONG de l'ONUG que cette usurpation de qualité, contestée et vigoureusement dénoncée par la mission permanente du Maroc, ne se répétera plus. Il ne s’agit pas là d’un précédent puisque un « soumarin » du Polisario a été éjecté manu militari des couloirs des Nations Unies, à New York, où il officiait sous le titre falla.cieux de représentant du Polisario


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ENTENDU CHÔMAGE

LE MILLION DÉPASSÉ Selon la dernière note du HCP sur l’emploi au Maroc, l’économie nationale a perdu 13 000 postes d’emploi entre le premier trimestre 2015 et la même période en 2016, résultat d’une perte de 28 000 postes en milieu rural compensée par une création de 15 000 postes en milieu urbain. Par branche, 10 000 postes ont été créés dans le secteur des services, et 6 000 dans celui des BTP. A l’opposé, le secteur de « l’agriculture, forêt et pêche » a perdu 15 000 postes et celui de l’industrie y compris l’artisanat 14 000. L’analyse des principales caractéristiques de la population active en chômage révèle que 79,2% des chômeurs sont des citadins, 63,9% sont des jeunes âgés de 15 à 29 ans, 31,6% détiennent un diplôme de niveau supérieur, 53,6% sont primo-demandeurs d’emploi, 66,1% chôment depuis plus d’un an, 25,7% se sont retrouvés au chômage suite à un licenciement et 5% suite à l’arrêt d’activité de l’établissement employeur. En conséquence, le chômage s’est accru de 12 000 personnes, fixant le volume global à 1 169 000 personnes à l’échelle nationale. Ainsi le taux de chômage ressort à 10% au premier trimestre 2016 contre 9,9% une année auparavant.

INDUSTRIE AUTOMOBILE

ACCÉLÉRATION ACTÉE

MAMDA

EXPÉRIENCE EXPORTÉE En marge du SIAM, la Mutuelle Agricole Marocaine d'Assurances (MAMDA) a signé une convention avec le ministère de l'Agriculture de la Palestine en vue de transposer le modèle marocain en Palestine. Cette convention, inscrite dans le cadre de l'accompagnement du Fonds de Prévention des Risques et des Assurances Agricoles de Palestine, prévoirait le développement d'une approche assurantielle agricole pour les cultures spécifiques de la Palestine, le transfert de savoir-faire dans la gestion des souscriptions et la gestion des sinistres (évaluation et indemnisation, réseau d'experts...) ainsi que la réassurance des risques agricoles auprès de la MAMDA. Cette dernière a également été sollicitée par une délégation officielle tunisienne pour présenter son expérience assurantielle des risques climatiques ainsi que le rôle qu'elle a joué dans le développement de l'assurance agricole au Maroc.

FORUM ÉCONOMIQUE ARABO-JAPONAIS

LES NIPPONS EN FORCE Plus d’une soixantaine de personnalités officielles japonaises et plus de 250 hauts dirigeants de grands groupes nippons étaient au rendez-vous à Casablanca ces derniers jours pour appréhender les opportunités d’affaires et d’investissement au Maroc, dans le monde arabe et en Afrique. Venus à l’occasion du Forum économique arabo-japonais, les investisseurs sont venus étendre leur influence dans le monde arabe. Selon les statistiques japonaises, les échanges commerciaux entre le Japon et les pays arabes sont passés de 102,2 milliards de dollars (Mrds $) en 2009 à 108,97 Mrds $ en 2015, soit une évolution moyenne de près de 3%. Une évolution qui ne semble pas être du goût des investisseurs. Leur forte participation à cet événement témoigne des visées qu’ils développent sur la région.

OFFSHORING Les ministre de l’Industrie, du commerce, de l’investissement et de l’économie numérique et de l’Economie et des finances ont présidé la cérémonie de présentation des écosystèmes du secteur des industries mécaniques et métallurgiques, au cours de laquelle il a été procédé à la signature, avec la profession, des contrats de performance. Ces derniers concernent les filières de la valorisation des métaux cuivre et aluminium, les nouveaux métiers "machines agricoles et bicyclettes" et le travail des métaux. A noter qu’à terme, la mise en œuvre des écosystèmes lancés contribuera à créer 13 340 emplois, 2 Mrds Dhs d’investissement et 2,3 Mrds Dhs de gain en termes de balance commerciale. Et pour accompagner le développement de ce secteur, un soutien adapté sera apporté aux entreprises, via le Fonds de développement industriel et d’investissement (FDII), un accès plus aisé au foncier (57 hectares destinés au secteur) et la mise en place d'une offre de formation couvrant l’ensemble des besoins des écosystèmes.

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NOUVEAU CONTRAT PERFORMANCE Alors qu’il vient de signer un contrat performance avec le ministère de l'Industrie, du Commerce, de l'Investissement et de l'Economie numérique, le secteur de l’offshoring vient de se révéler sur une mauvaise pente. N’ayant pas encore savouré le contrat performance signé entre l’APEBI et le ministère de tutelle, les opérateurs du secteur, en particulier ceux qui font du télémarketing, vont devoir songer à faire face à un facteur exogène qui aura sans nul doute un impact important sur leur activité. Il s’agit, en fait, du système Bloctel d’interdiction du démarchage téléphonique qui devrait être opérationnel à partir du 1er juin en France. Selon des déclarations de certains responsables de la filière, ce nouveau dispositif ne devrait concerner le secteur des centres d’appels au Maroc que de façon marginale. Et ce, du fait que le télémarketing ne représente pas plus que 20% de l’activité du secteur.


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CHRONIQUE BONJOUR LES DÉGÂTS

MOUILLER LE PÉTARD… Par: Said Akechmir

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eux qui ont perdu le Nord, électoralement parlant, ont eu le réveil difficile. Surtout depuis que les régionales ont conforté Elias El Omari, bête noire du PJD, tout particulièrement de sa direction, dans sa double dimension de leader d’une région et de patron d’un parti retors. Ils ne voient plus clair du tout lorsqu’ils assimilent un simple débat sur le kif, ses vertus, mais aussi ses méfaits, que comme le prélude au lancement d’un vaste chantier de transformation de Ketama et de son hinterland en un immense fumoir à ciel ouvert. Avec, en prime, une politique de coffee-shop qui relèguerait bars et bouges au second plan… Car ne voilà-t-il pas que le joint, produit bio par excellence, disposerait de tous les atouts pour risquer d’investir les étals et faire tourner, à grand renfort de « Zig-zag », l’économie régionale… au profit d’une nouvelle classe composée de narcotrafiquants. Bref, c’est d’une Bolivie bis qu’Elias El Omary rêverait quitte à plonger le pays dans les affres de l’instabilité, comme cela se vérifie au Mexique. Et pas seulement ! Sauf que dans leur démarche crispée, les cadors du PJD sont mal avisés, eux qui savent que le pays a déjà déployé une stratégie pour le développement de la zone Nord dans laquelle l’économie du Kif pourrait bien servir la région du Rif. Si la reconversion de la culture du cannabis n’a pas été d’un franc succès et si le trafic y afférent n’arrête pas de pousser, malgré les efforts conjugués de tous les services en charge de lutter contre le trafic des stupéfiants, c’est qu’il faut réadapter les outils et changer d’approche. Et là aussi, les barbus devraient se rendre à l’évidence que le Maroc ne cherche pas à réinventer la poudre alors que des expériences sont menées ailleurs pour « normaliser » la situation d’une économie parallèle chaotique. N’est-il pas temps, pour les Rifains, de jouir de leurs récoltes autrement qu’en succombant, à cause des interdits justement, aux sirènes de narcotrafi-

LE PJD S'OPPOSE AU KIF ET LA PAM FUSTIGE "L'OPIUM DU PEUPLE"

quants? Ceux-là mêmes qui tirent le meilleur parti d’une situation anachronique en renforçant les pauvres hères du Rif dans leur misère. Car il faut bien ouvrir les yeux sur les vertus du kif : on peut en tirer non seulement la résine, mais aussi l’huile essentielle devant enrichir l’industrie pharmaceutique, des produits dérivés pour la cosmétologie (que même les « sœurs » pourraient utiliser sans risque pour la santé) et assurer une révolution dans le textile. Il y a bien des cordes en chanvre qui assurent une résistance à toute épreuve, même en étant exposées à un environnement marin des plus corrosifs. Mais de tout cela, le PJD n’en voudrait pas, lui qui n’aura découvert les vertus des figues de barbarie que sur le tard. Comme bon nombre de nos concitoyens, d’ailleurs. Car les leaders de ce part ont une dent contre le téméraire El Omary qui ose voir en leur démarche un large processus d’enfumage de l’opinion, idéologiquement basé sur « l’opium du peuple» qu’ils cultivent dans les têtes. Du coup, il faut bien éliminer du circuit cette « bête politique » qui rue dans les brancards. Au risque de leur faire perdre quelques milliers de voix qui voteraient, « métoui » en poche, pour leur pire ennemi ! Rien de plus normal dans tout ça. Car nos barbus se sont forgés des idées bien arrêtées, marquées du sceau de l’interdit. Si on tolère les figues de barbarie, c’est juste parce que les transformateurs locaux n’ont pas encore trouvé le moyen de tirer de leurs fruits une eau de vie qui serait hors de prix. Alors, de là à oser parler du kif et de ses vertus… Eux s’empêchent de s’en mêler. Sauf pour clouer au pilori leur ennemi politique de l’heure. En déconsidérant son initiative au point d’en réduire l’effet à celui que produirait un pétard mouillé. Difficile de croire en un jour qui réunirait les deux ennemis jurés pour une cérémonie de réconciliation les portant à enterrer la hache de guerre et à fumer le sebssi de la paix. En tout cas, côté PJD, il ne faudrait pas s’attendre à un miracle eux qui font tout un ramdam pour priver les cafés de la chicha. Et tant pis pour ses amateurs s’ils doivent s’envoler, par contingents entiers, pour le Machrek pour tirer quelques bouffées salvatrices. Là bas, il paraît que Daech recule… Et ses interdits aussi !

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POINTS CHAUDS

SOMMET STRATÉGIQUE ENTRE LE MAROC ET LE CCG

CONSTRUCTION MULTIPOLAIRE

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e Maroc a choisi son camp. En se lançant dans la quête d’une alliance stratégique avec les pays du Conseil de coopération du golfe (CCG), c’est pour mieux décliner une nouvelle politique arabe, voire aussi islamique par extension, après les constats d’échec dans la construction maghrébine (le CCG servant pourtant d’exemple d’action unitaire) et des sommets de la ligue arabe s’apparentant à des cénacles où résonne le vide si ce n’est l’invective. Le discours royal prononcé à Riyad, lors du sommet Maroc-CCG, aura apporté les éclaircissements nécessaires sur le dépit ressenti au niveau de l’action arabe commune, Rabat ayant décliné la réunion sur son sol d’une rencontre au sommet, et expliqué les contours de son «option golfique». Le délitement que la scène arabe subit, sous les coups répétitifs des partisans d’un « chaos » créateur de nouvelles frontières, avec pour seuls ferments le repli confessionnel et l’exacerbation des dérives ethniques, explique la démarche royale qui tend à sauver ce qui peut l’être encore. Et le CCG qui présente l’image d’une construction unitaire assez résistante face aux desseins de partition et de morcellement de l’espace

arabe constituerait, dès lors, un repère solide à l’aune duquel la possibilité d’une reconstruction arabe pourrait être envisagée. Et le Maroc, lui aussi objet d’une meccano diabolique de déstabilisation, peut compter sur l’élan solidaire du CCG et le fait savoir. D’ailleurs, ce n’est pas pour rien que la réaffirmation, avec force, de la constante position de ce regroupement d’Etats sur le dossier saharien a été faite en marge de ce sommet. Un acquis de taille d’une « Jet Diplomacy » déployée sur plusieurs fronts à la fois. En scellant son sort à celui des pays du CCG, le Maroc n’en exprime pas moins la singularité de son modèle fait d’ouverture et de construction démocratique. Un modèle qui s’accommoderait bien d’une capacité d’atténuation de l’exacerbation de la tension qui persiste entre les deux branches de l’Islam représentée par le sunnisme, et le Royaume assume son appartenance à cette communauté, et le chiisme. Un modèle qui dispose d’une doctrine à l’aune de laquelle sont déclinées ses options géostratégiques et géoéconomiques. Souverain, le Maroc s’investit dans un monde multipolaire comme l’attestent ses ouvertures vers la Russie, la Chine et l’Inde. Qui dit mieux !

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POINTS CHAUDS

PARTENARIATS STRATÉGIQUES

LE MAROC DIVERSIFIE SES CARTES Désormais, entre le Maroc et les monarchies du Golfe on assiste à l’émergence d’une nouvelle ère de coopération et de partenariat stratégique. L’alchimie de cette nouvelle symbiose ne se fera pas au détriment du modèle marocain et de sa singularité. Le discours royal a été des plus parlants à ce sujet. Par : Allal El Maleh

P

our ceux qui suivent de près l’évolution de la scène arabe, le déplacement du Roi à Riyad pour prendre part au sommet Maroc-CCG revêt une importance des plus singulières. D’abord, parce que ce rendez-vous est évalué par nombre d’observateurs à l’aune de la solidarité agissante entre les divers membres du « Club des monarchies arabes » pour conjurer les effets pernicieux de ce qu’il est convenu d’appeler « Printemps arabe ». Le CCG étant aussi lié à la Jordanie, rappelle-t-on, par un accord stratégique. Mais c’est surtout au vu des changements en profondeur que la scène arabe subit depuis quelques années déjà qu’un tel déplacement est passé au filtre de l’analyse.

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Bien des commentateurs inspirés croient déceler en ce rapprochement stratégique entre Rabat et les autres capitales du Golfe les ferments d’un éloignement de l’Occident. Surtout que le séjour royal à Riyad avait fait suite à une visite d’Etat à Moscou au terme de laquelle la réaffirmation d’un « partenariat stratégique approfondi» entre Moscou et Rabat a été mise en avant. Et coïncidé aussi avec le déplacement de Barak Obama en Arabie Saoudite pour une visite d’adieu. Un déplacement qui aura marqué les esprits par la tiédeur de l’accueil saoudien réservé à l’hôte de la Maison Blanche. Une tiédeur qui s’explique par les tensions ayant marqué ces dernières années les relations entre Washington et


les monarchies du Golfe avec, en pointe, la famille qui règne à Riyad.

NOUVEAUX PARADIGMES

Il faut croire que la dynamique du « chaos créateur » projetée dans le monde arabe et qui a fini par souffler nombre de régimes (en Tunisie, en Libye et en Egypte) et détruire nombre d’autres (la Syrie et le Yémen) explique, dans une large mesure, les changements d’attitude à l’égard des puissances occidentales, l’Amérique en tête. Car tous les soupçons de déstabilisation pèsent sur l’Empire qui ne semble plus intéressé, au moins selon les stratèges du moment, par un Machrek qui en plus d’être rétif aux changements souhaités par l’administration US, ne revêt plus d’intérêt stratégique pour l’Amérique. La fin de la dépendance énergétique US vis-à-vis des barils du Golfe explique cet état de fait. Mais pas uniquement. Le basculement du monde vers le Pacifique, c’est ce que les laborantins de la stratégie US ont trouvé de mieux pour s’assurer de la domination de l’Empire en ce début de millénaire, rend plus intéressant un désenga-

gement marqué d’une scène proche-orientale minée de bout en bout ce qui la prédispose davantage à accepter le fait colonial israélien. Et comme pour mieux sceller un tel dossier, rien de mieux que de trouver un pacte avec l’Iran qui mettrait en compétition tous les prétendants à un leadership régional. Si l’Egypte est aujourd’hui dans l’incapacité de pouvoir se projeter dans la compétition, le pays des Pharaons peine à rester debout depuis le départ de Moubarak, la porte est ouverte à d’autres challengers pour combler le déséquilibre né d’un retour de l’Iran sur la scène internationale. On comprend dès lors pourquoi l’Arabie Saoudite rue dans les brancards quitte à habiller cette compétition géopolitique d’un voile religieux derrière lequel s’opposent sunnisme et chiisme. Surtout qu’il est avéré que la « mollarchie » iranienne nourrit l’ambition de jouir d’un rôle régional plus prononcé, atout perdu naguère sous les coups de l’embargo devant juguler ses ambitions nucléaires. Mais la compétition ne se limite pas à ces deux acteurs puisque la Turquie s’invite aussi à la table en faisant valoir ses

prétentions néo-ottomanes. C’est dans cette alchimie instable qu’il faut placer le déplacement royal à Riyad. Un déplacement qui affirme, si besoin est, que le Maroc reste, malgré l’éloignement géographique, un partenaire sur lequel les pays du CCG peuvent compter. Un partenaire qui, lui aussi, nourrit plein d’inquiétudes à l’endroit d’une aire géographique soumise à de très fortes pressions hégémoniques. Car «l’effet papillon » vérifiable en terme climatique reste aussi valable en géopolitique. Surtout lorsque tous les stratèges parlent des « guerres par procuration » que l’on n’hésite plus à déclencher pour alimenter le chaos et la désolation dans des pays souverains. Le discours que le Roi a prononcé le 20 avril devant ses pairs du CCG réunis à Riyad aura servi à mettre en évidence, avec une rare franchise, les inquiétudes qu’un pays arabe ressent. Et il n’est pas le seul à les ressentir. Tout en exprimant haut et fort ses critiques à l’endroit de partenaires stratégiques qui font tout sauf jouer franc jeu. « Ce sommet se tient dans une conjoncture délicate. La

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POINTS CHAUDS

région arabe vit, en effet, au rythme de tentatives de changement de régimes et de partition des Etats, comme c’est le cas en Syrie, en Irak et en Libye, avec tout ce que cela comporte comme tueries, exodes et expulsions d’enfants de la patrie arabe », a souligné le Souverain. Poignant est le constat établi par le Roi. Constat qui rappelle l’inanité de ce qui fut « présenté comme un printemps arabe qui a occasionné tant de ravages, de désolations et de drames humains ». Un processus qui n’aura pas encore dit son dernier mot, insiste le Souverain : « nous voilà vivre aujourd’hui un automne calamiteux, avec le dessein de faire main basse sur les ressources des autres pays arabes et de briser les expériences réussies d’autres Etats, comme le Maroc, en portant atteinte à son modèle national original qui le distingue ». L’espace arabe reste des plus bouillonnants comme le démontre la multiplicité des crises toujours ouvertes en Irak, en Syrie, au Yémen ou encore en Libye. Les répliques de ce séisme de grande ampleur sont à craindre au vu de l’absence de toute sortie de crise susceptible d’atténuer le chaudron. Le Souverain l’a rappelé avec maestria. «Nous respectons la souveraineté des Etats et respectons leurs choix et leurs orientations, pour établir et développer leurs relations avec les partenaires qu’ils veulent. Nous ne sommes pas ici pour demander, les uns aux autres, des comptes sur nos choix politiques et économiques. Il y a cependant de nouvelles

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alliances qui risquent de conduire à des divisions et à une redistribution des cartes dans la région. Ce sont, en réalité, des tentatives visant à susciter la discorde et à créer un nouveau désordre n’épargnant aucun pays, avec des retombées dangereuses sur la région, voire sur l’état du monde ».

DESTIN EN MAIN

S’il est une évidence qui transparaît à travers ce discours royal aussi singulier que sincère, c’est que le constat du délitement qui s’opère dans la région ne semble guère susciter d’intérêt de la part des partenaires d’antan. Ceux qui ont forcé les alliances d’hier et qui s’empressent aujourd’hui de s’en débarrasser. Triste est la logique qui fait bouger les grands de ce monde, celle qui confine à dire « pas d’intérêt, pas d’action ». Comment dès lors s’affranchir de ce carcan qui a démontré ses limites en termes de stabilité et de concorde pour ne laisser filtrer que la désolation et les déchirements ? La démarche appropriée consiste à ne pas mettre tous ses œufs dans un seul et même panier. Là aussi, le roi s’est voulu clair en assurant que « tout en restant attaché à la préservation de ses relations stratégiques, le Maroc n’en cherche pas moins, ces derniers mois, à diversifier ses partenariats, tant au niveau géopolitique qu’au plan économique ». D’où le tournant que le Royaume compte imprimer à ses relations avec les forces qui, dès à présent, montent au créneau pour remettre l’ordre du monde à l’endroit,

loin de l’unipolarité et de ses prétentions. Le séjour royal à Moscou intègre cette logique qui soutient, en creux, l’avènement d’un monde multipolaire, et donc moins risqué. Un palier de franchi par le Maroc en attendant d’autres qui prendront corps avec le lancement de partenariats stratégiques avec l’Inde, mais aussi avec la Chine. C’est donc d’un affranchissement de la doctrine du Maroc, souvent présenté comme pro-occidental, qu’il s’agit. Une prise de distance mûrement réfléchie puisque capable de garantir un rééquilibrage des alliances, loin des rapports de dépendance qui s’avèrent aliénants. Le Roi l’a dit, avec une précision et une netteté exemplaires. « Le Maroc est libre dans ses décisions et ses choix et n’est la chasse gardée d’aucun pays. Il restera fidèle à ses engagements à l’égard de ses partenaires, qui ne devraient y voir aucune atteinte à leurs intérêts », a-t-il martelé. Voilà qui en dit long sur les changements en profondeur qui s’opèrent déjà au sein des nations arabes. L’alignement atavique sur Washington, et ses alliés, n’est plus de mise... Le monde arabe a tout intérêt à œuvrer pour l’émergence d’un monde multipolaire au sein duquel les géants, comme les petits Etats ont leur mot à dire. Serait-ce le prélude à la fin de l’ère du diktat ?


LE ROI S’EN PREND AUX USA par: A.E.M.

NON AU DIKTAT ! Le Maroc qui est liés aux Etats-Unis d’Amérique par une amitié historique et des liens de partenariat stratégique se sent trahi. Et il le signifie franchement à qui veut l’entendre. Désormais, entre Washington et Rabat, rien ne sera plus comme avant…

R

ien ne va plus entre le Maroc et les Etats-Unis d’Amérique. Le Roi l’a fait savoir, en creux, dans l’allocution stratégique faite lors du sommet Maroc-CCG, à Riyad. Un coup de froid qui explique qu’il n’y ait pas eu de rencontre officielle entre Mohammed VI et Barak Obama dans la capitale saoudienne. L’hôte de la Maison Blanche ayant pris soin de charger son secrétaire d’Etat de répondre à un appel téléphonique royal. Il n’aura pas fallu plus pour que le Souverain remette les pendules à l’heure. En soulignant, depuis Riyad, que le Maroc reste souverain dans ses décisions et ses choix stratégiques. Surtout qu’au sein de l’administration US, l’évaluation du déplacement royal à Moscou et l’annonce du partenariat stratégique approfondi qui lie désormais le Maroc à la Russie s’est faite sous le prisme déformateur de « l’ami de mon ennemi »… Mais si Washington a son agenda, Rabat dispose aussi du sien. C’est ce que « le libre choix » rappelé par le Souverain consacre en permettant l’ouverture du Royaume non seulement vers la Russie, mais aussi l’Inde et la Chine. Un « libre choix » qui permet aussi de critiquer un partenaire de la taille des Etats Unis d’Amérique. Le Roi l’a clairement fait savoir en soulignant devant ses pairs des pays du Golfe que « les plans d’agression attentatoires à notre stabilité se poursuivent toujours et ne cesseront pas. En effet, après avoir morcelé et détruit nombre de pays du Machrek arabe, les voilà qui s’en prennent aujourd’hui

à son flanc occidental. Le dernier en date concerne les manœuvres orchestrées contre l’intégrité territoriale de votre deuxième pays, le Maroc ». Et c’est bien sûr le dossier du Sahara marocain qui sert d’alibi et de faire valoir. « Ils tentent, selon les conjonctures, soit de délégitimer la présence du Maroc dans son Sahara, soit d’appuyer l’option de l’indépendance et la thèse séparatiste, ou encore d’affaiblir l’initiative d’autonomie dont la communauté internationale atteste le sérieux et la crédibilité ». Le message royal s’est voulu clair en rappelant que « le mois d’avril, qui coïncide avec les réunions du Conseil de sécurité sur l’affaire du Sahara, est devenu un épouvantail qu’on agite à la face du Maroc et, parfois, un moyen de pression ou d’extorsion». Tout y est dit. Surtout lorsqu’on sait que c’est l’administration US qui a cherché, il n’y a pas si longtemps, à élargir la mission des casques bleus pour superviser les droits humains dans les provinces sahariennes. Sincère auprès de ses frères du Golfe, le Roi du Maroc n’a pas manqué de résumer, avec dépit, le traitement que des alliés traditionnels réservent à leurs partenaires. « La situation est grave, surtout au regard de la confusion patente dans les prises de position et du double langage dans l’expression de l’amitié et de l’alliance, parallèlement aux tentatives de coups de poignard dans le dos ». Dans la bouche du Roi du Maroc, l’affaire est tout sauf à être considérée comme anodine.

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NATION BATAILLE DES LÉGISLATIVES par: A. Ben Zeroual

ELARGIR LE CONSENSUS… Surprise ! Le seuil électoral a été abaissé à 3% au moment même où d’autres partis réclamaient de le porter de 5% à 10%. Pour autant, ira-t-on vers une balkanisation de la vie politique ? Rien n’est moins sûr. Même s’il faut s’attendre à ce que cette « largesse » profite à des formations progressistes valeur aujourd’hui « inaudibles ». Point de révolution donc à attendre quant au poids réel des « machines électorales » rodées pour gagner. Le leadership vacille entre PJD et PAM. A moins que les législatives d’octobre n’offrent une rentrée politique inédite.

L

a classe politique met tout en sourdine, ou presque si l’on excepte la mobilisation autour du dossier saharien, pour se projetter déjà en octobre prochain. Même la coalition bigarrée qui pilote l’Exécutif se contente de « gérer les affaires courantes» pour mieux négocier les prochaines législatives dans un esprit de reconquête. Et c’est à cette aune là que l’on pourrait placer « le pacte » qui lie désormais le sort du PPS à celui du PJD; « gouverner ensemble ou faire l’opposition ensemble ». Ce LA COMPLEXITÉ DU CHAMP mariage peu catholique entre POLITIQUE PROMET DES une formation islamiste et un RESTRUCTURATIONS ET DES parti qui se réclame du camp ALLIANCES progressiste (on le voit répondre, par exemple, à l’invitation formulée par l’USFP pour tenter de réunir les composantes d’une gauche éparpillée) ne fait que sceller une « union d’intérêts», le pragmatisme de l’allié du PJD, inattendu dans sa fidélité, lui servant de « faire valoir » inespéré. Le PPS volant au secours de ses alliés de circonstance au tout début de ces « noces » pour « vider l’abcès » des fameux « cahiers des charges » d’El Khalfi, pour finir

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par « les retrouvailles » entre Benkirane et les partenaires sociaux pour une relance du dialogue social.

RÉINITIALISER LE CONSENSUS

Mais dans cette quête d’alliances pré-électorales, on n’oubliera pas de souligner la quête du PJD à vouloir « pactiser » avec l’Istiqlal, parti salafiste par excellence, dont le leader avait osé voler dans les plumes de Benkirane en décidant de claquer la porte à la coalition au gouvernement. On comprend dès lors pourquoi PJD et PI ont exprimé leur refus de voir le seuil électoral abaissé de 6% à 3%. Et envisageaint même de monter une coordination pour contrer l’offre du ministère de l’Intérieur. Mais depuis, et au-delà des positions de principe exprimées autour de cette proposition susceptible de changer l’architecture des prochaines échéances électorales, le risque de «balkanisation » de la scène représentative étant mis en évidence, les deux formations ont fini par capituler devant la décision non négociable de l’Intérieur. Comme quoi, en politique, les promesses n’engagent que ceux qui y croient. L’affaire du seuil qui heurte a priori les principales forces électorales qui craignent de se voir pénalisées lors du futur scrutin législatif n’a pas de quoi alimen-


ter « une guerilla » contre le ministère de l’Intérieur. Surtout de la part du PJD qui est à la tête de l’Exécutif. Ne serait que de peur de voir les dissonnances qui mettent à rude épreuve la majorité sortante défrayer la chronique, avec ce que cela suppose comme questions occultées quant à la propension du Chef du gouvernement à s’accommoder de secteurs névralgiques dans la gouvernance du pays qui lui échappent. Mais il faut croire que la révision du seuil à la baisse dépasserait ce cadre « formel » pour toucher une autre dimension, très politique celle-là, liée au succès des prochaines échéances. Des indiscrétions font état de la prise en charge, par l’Intérieur, d’arguments massus développés par des partis de l’opposition. C’est leur participation, ou non, au prochain scrutin qui a été mise sur le tapis. Nul besoin de souligner à ce propos qu’une telle perspective « conditionnée » qui sort de l’unanimisme ambiant avait de quoi, en cas de boycott des élections par quelques formations, remettre en question le processus démocratique en construction. En somme, en acceptant que l’échafaudage des prochaines législatives soit remanié, c’est l’édifice démocratique dans son ensemble qui en sort renforcé. C’est donc à une réinitialisation du consensus que l’on a procédé. M. Hassad s’étant chargé de mener les négociations à bon terme en arrondissant les ongles ici et là.

BALKANISATION PRÉVISIBLE ?

Contre mauvaise fortune, A. Benkirane ne pouvait faire que bon cœur. Tout en tentant de calmer bien des milieux qui, au sein des instances du PJD, ont poussé des cris d’orferaies dès qu’il a été question de revoir les taux à la baisse. Eux qui tablaient plutôt sur une réévaluation dudit taux à hauteur de 10% pour mieux « filtrer » la représentativité partisane et « empêcher ainsi une forte balkanisation du paysage » qui rendrait difficile l’action de toute coalition gouvernementale. N’a-t-il pas, à Salé, harangué les foules de ses affidés en leur promettant une victoire éclatante en octobre, lui qui s’est déclaré, à l’occasion, fin prêt pour affronter tous ses adversaires ? Mais de « la balkanisation » dressée comme un épouvantail, il faut convenir qu’elle relève plus de la vue d’esprit que d’autre chose. Car ceux qui passent à la moulinette la performance électorale des formations politiques en lice savant que le paysage politique tel qu’il se présente aujourd’hui est formé, pour l’essentiel, de deux « grands blocs » idéologiquement éclatés. Ainsi, le PJD côtoie son pire ennemi le PAM, avec l’Istiqlal et le RNI. A eux quatre, ces partis ont raflé 67% des

suffrages exprimés aux législatives de 2011 et gagné un point de plus lors du dernier scrutin des communales et régionales. L’abaissement du seuil, selon de nombreux pronostics, n’affecterait en rien leur performance au regard de la capacité de mobilisation dont ils font preuve à chaque échéance. Et leur corps électoral est connu d’avance pour le vote utile, c’est-à-dire le vote éminemment politique. Et ce qui court pour ce premier bloc court aussi pour le deuxième constitué du Mouvement populaire, de l’USFP, du PPS et de l’UC. Ce bloc réussit à glaner, lors des échéances électorales, autour de 28% des suffrages exprimés. Et la pespective de l’abaissement du seuil agirait, comme une assurance, en cas de mauvaise performance de l’une de ses composantes pour s’assurer de la constitution d’un bloc a minima au sein du parlement. L’enjeu reste, il est vrai, lié aux autres formations politiques qui ne réussissent à mobiliser que 6% des suffrages. Pour ces formations, on s’attend à ce que l’abaissement du seuil profite essentiellement au bloc en construction représenté par la Fédération de la gauche démocratique regroupant autour du PSU, le PADS et le Congrès Ittihadi. Et quand bien même ce dernier bloc réussirait à performer, il ne constituerait pas plus d’un groupe minoritaire au sein du parlement. Mais il est vrai que l’enjeu capital demeure lié au découpage territorial des circonscriptions et de la capacité des partis à se familiariser, rapidement, avec le mode de scutin choisi. C’est donc autour de l’architecture élecorale que le débat devrait être centré pour assurer le succès de la consultation d’octobre. Une consultation

qui pourrait aussi bien consacrer la préeminence des Islamistes qui pilotent l’actuel gouvernement, en se classant en tête à l’issue des décomptes. Que livrer une autre configuration dans laquelle le PAM ravirait la vedette et au PJD et à l’Istiqlal, comme au RNI d’ailleurs. On comprend dès lors les raisons qui poussent les «Pjidistes» à maintenir une forte pression sur les « Pamistes », le tracteur ayant pris soin de défricher le terrain. Dure sera la concurrence. Mais est-ce pour autant sain de voir les élites politiques s’écharper et se porter des coups en-dessous de la ceinture ?

REPRÉSENTATIVITÉ DES FEMMES QUOTAS ET ÉGALITÉ Les femmes parlementaires, de l’opposition et de la majorité, ont décidé de mener une bataille commune pour s’assurer d’une représentativité digne de ce nom. Quitte à heurter les états-majors des formations politiques qui restent traditionnalistes dans l’approche genre. Pour ce faire, une requête officielle devait être déposée auprès du chef du gouvernement, du ministre de l’Intérieur et des chefs de partis. Lors des discussions du projet de loi sur les listes électorales, les femmes parlementaires, de la majorité comme de l’opposition, ont interpellé, à l’unisson, les deux ministres pour solliciter une rencontre officielle dans les plus brefs délais. Objectif ; présenter une circulaire préparée pour garantir une meilleure représentativité lors des prochaines élections législatives. Le tiers des sièges en jeu, soit 132 en tout, doivent leur revenir. Tel est le quota qu’elles exigent. Plus, les femmes parlementaires sollicitent aussi la suppression de l’article 5 de la loi organique du Parlement qui interdit à une parlementaire ayant déjà bénéficié de l’avantage de la liste nationale d’obtenir une second mandat. Une requête qui ne semble pas du goût de tous les chefs de partis...

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NATION LE 1ER MAI AUX COULEURS SYNDICALES par: A. Ben Zeroual

COMBIEN DE DIVISIONS ? L’Exécutif reste droit dans ses bottes dès lors qu’il est question du dialogue social et du traitement des revendications syndicales. Sans accord, le 1er mai n’aura donc pas dérogé à la règle. Les principales centrales syndicales sont montées au créneau pour fustiger les dérives d’un gouvernement en fin de mandat.

L

e Chef du gouvernement n’a pas manqué de faire le déplacement à Casablanca, capitale économique dont les artères vibrent, chaque 1er mai, au rythme des marches syndicales. Car Abdelilah Benkirane dispose aussi du « bras syndical » du PJD qui s’est hissé au rang de partenaire invité à la table du « dialogue social». "LE DIALOGUE SOCIAL" GAGFace aux militants de la FNT, le patron de l’ExécuNERAIT À NE PAS ÊTRE CONtif a préféré enfiler le costume du militant du PJD SIDÉRÉ COMME UNE SIMPLE prompt à s’enflammer pour dénoncer les injustices, et FORMALITÉ il a choisi les représentants de l’administration territoriale pour distiller ses critiques, et fustiger ses adversaires politiques, ceux qui nourriraient, à ses yeux, l’ambition de mettre sous contrôle les forces politiques qui luttent contre la domination.

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Du dialogue social, il n’en a pas pipé mot. Lui qui avait formulé, à la veille de la fête du travail, une fournée de mesures susceptibles de calmer les esprits. Mais tout ne semble pas coïncider avec l’agenda du Chef du gouvernement. Lequel invoque les difficultés financières que traverse le pays pour reporter sine die la prise en charge des revendications syndicales.

UNE OFFRE LIMITÉE

Mais sur quoi repose exactement l’offre du gouvernement faite aux partenaires du dialogue social, les centrales syndicales, bien sûr, mais aussi la Confédération patronale CGEM ? On y trouve réunis, pêle mêle, la revalorisation des allocations familiales de 100 Dh, de la prime des naissances portée à 500 Dh et une augmentation de l’indice des émoluments pour une nouvelle catégorie de fonctionnaires de bas échelle. Outre une baisse de 2% de l’Impôt sur le revenu (IR) en


deux tranches. Un « package » qui ne semble pas être du goût des centrales syndicales qui l’ont fait savoir lors de la rencontre du 4 mai entre le gouvernement, les syndicats et le Patronat. L’UGTM, comme la CDT, ont choisi de claquer la porte de cette réunion présidée par A. Benkirane. Ce qui en dit long sur l’absence de tout compromis avec les partenaires sociaux. Et si l’UMT a choisi de rester jusqu’au bout de la réunion, c’est certainement par égard à son allié politique historique qui se trouve être au sein de la coalition gouvernementale. Le PPS, ayant à charge le maroquin de l’Emploi, s’étant évertué à raccommoder ce qui peut l’être entre un Chef du gouvernement qui avait fait preuve d’autisme à l’endroit du « cahier revendicatif » qui lui a été transmis et les principales syndicales. Si le gouvernement a tenté de désamorcer la crise née avec les syndicats, depuis l’épreuve de force engagée autour de la réforme du système des retraites, en mettant sur la table des négociations une offre ficelée qui ne mettrait pas en péril l’équilibre budgétaire, cela n’a pas réussi à calmer les ardeurs des syndicats. A la sortie de la réunion, plusieurs voix syndicales se sont élevées pour expliquer la position de refus des syndicats. Expliquant que la baisse de deux points de l’impôt sur le revenu (en 2017 et 2018 selon toute vraisemblance) n’aura qu’une incidence limitée sur les employés qui varie entre 50 Dh et 200 Dh par mois au maximum. Même la CGEM est sensible à l’argument développé par les syndicats, la pression fiscale sur les revenus demeurant assez forte pour assurer une quelconque revalorisation conséquente des salaires. Dès lors, les syndicats qui se trouvent acculés face à un Exécutif qui fait preuve de rigidité n’ont eu d’autre choix que de se replier sur les revendications qu’ils avaient déjà fait valoir auprès du gouvernement. En réclamant une augmentation de 600 Dh pour les fonctionnaires, une revalorisation du Smig pour les salariés du privé et une augmentation plus conséquente des allocations sociales. Une position « ante » que l’UMT avait déjà jugé obsolète face au coût de la vie. Il y a lieu de rappeler que le 12 avril dernier, les centrales avaient adressé un mémorandum au Chef du gouvernement en prévision de la relance du dialogue social. Un mémorandum qui englobe, outre la revalorisation des salaires et des allocations sociales, les libertés syndicales, la réglementation du travail et la réforme globale

des régimes de retraites, bien au-delà du seul dossier de la CMR qui a fait couler beaucoup d’encre.

BLOCAGE EN VUE

Même le Patronat n’hésite pas à afficher ses désaccords et avec le gouvernement et avec les syndicats. La CGEM étant particulièrement réticente à toute revalorisation du SMIG au motif que les augmentations consentis pour revaloriser les allocations familiales sont suffisantes. Et qu’une augmentation du salaire minimum avait déjà été actée en 2015. L’Exécutif mesure dès lors l’épaisseur des différends qui l’opposent aussi bien aux syndicats qu’au Patronat. Et c’est pour gagner du temps que le Chef du gouvernement a invité les syndicats à reformuler leurs revendications dans un esprit raisonnable pour les intégrer à l’ordre du jour des prochains rounds du dialogue social. On comprend dès lors pourquoi les leaders des principales centrales syndicales ont développé des discours assez musclés à l’égard du Chef du gouvernement et de la gestion des rounds du dialogue social qui ont repris après une série de grèves. El Miloudi Moukharik persiste à croire que l’actuel Exécutif n’arrive pas à évaluer «les retombées sociales dramatiques de sa politique impopulaire ». Ce vieux routier qui haranguait les foules que l’UMT réussit à drainer n’a pas cherché à cacher son scepticisme vis-à-vis d’un dialogue social biaisé. Le trublion Noubir Amaoui qui retrouve les foules de la CDT n’a pas manqué, non plus, de fustiger la politique suivie par Benkirane. Depuis cinq ans, on assiste à un recul systématique sur les acquis sociaux opéré par un gouvernement incapable de lutter contre la prévarication,

laisse-t-il entendre. Sans compromis, tout prête à croire c’est vers une nouvelle épreuve de force que l’on s’achemine. Une épreuve de force qui handicape, à n’en point douter, un climat social déjà tendu. Gouvernement et syndicats se rejettent la responsabilité quant aux répercussions de l’échec du « dialogue social».Un jeu de rôles qui n’est pas sans arrières pensées politiciennes. Car à l’approche des législatives, le patron du PJD estime n’avoir rien à perdre en se mettant à dos les syndicats. Imbu qu’il est du fait de leur faible représentativité et, partant, de leur « échos » au sein de la société. Mais il fait tomber de ses calculs le fait que tout raidissement de sa part est à même de favoriser la crispation de pans entiers de la société qui continuent à bouder les urnes. L’enjeu du dialogue social est éminemment politique. Et dans toutes les démocraties, les avancées sociales se font avec les corps intermédiaires qui agissent en véritables partenaires. Dès lors, il serait illusoire de persister à évaluer les syndicats en termes de poids. Même dans leur division, ils ne sont pas à assimiler à des « tigres en papier ». Ni le pouvoir, ni le patronat ne l’ignorent…

LES SYNDICATS DONT ON MINORE LE RÔLE ONT I,E FONCTION STRATÉGIQUE NE SERAIT-CE QU'EN TERME DE STABILITÉ

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NATION LE DOSSIER DU SAHARA PASSE LE CAP DU VOTE ONUSIEN par: A. Ben Driss

UNE MANCHE DE GAGNÉE… Le 29 avril dernier, la résolution du Conseil de sécurité 2285 a fini par être adoptée par les membres du Conseil de sécurité. Le soulagement est le lot de la diplomatie marocaine qui a ferraillé dur pour mettre en échec les manœuvres de la cause saharienne marocaine. Celles qui consistaient à régénérer la vieille rengaine du référendum d’autodétermination. Une bataille de plus de gagnée. Mais la hache de guerre n’est pas pour autant enterrée. La vigilance reste de mise.

A

près de très longues journées de négociations, d’heures passées au téléphone et des allers-retours dans les couloirs des nations Unies, à New York, les diplomates marocains ont pu pousser le « ouf» du soulagement. Car jamais l’élaboration d’un rapport de l’ONU sur le dossier saharien n’aura subi autant de remodelages. Pour, finalement, consacrer les mêmes constats, réitérer les mêmes appels et, point de discorde nodal, demander les rétablissement de la délégation politique de la Minurso que le Maroc avait pris soin de bouter hors du sol marocain. On comprend dès lors la réaction toute mesurée, même si elle est teintée d’une réelle satisfaction, du Maroc. La résolution des Nations Unies réaffirmant, selon un communiqué du ministère des Affaires étrangères et de la coopération, «les paramètres de la solution politique, tels que définis par le Conseil de Sécurité depuis 2004 et précisés, en termes opérationnels, en 2007. Elle constitue, à ce titre, un revers cinglant pour toutes les manœuvres du Secrétariat Général de l’ONU, notamment celles opérées lors de la visite du Secrétaire Général et celles insérées dans son dernier rapport. Ces manœuvres visaient à altérer les paramètres de la solution politique, à ressusciter des options dépassées et à introduire des éléments non-reconnus par le Conseil de Sécurité.» Echaudé,

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le Maroc l’a été depuis que le patron de l’ONU a multiplié les provocations depuis Tindouf et, bien après, à Bir Lahlou, localités dans lesquelles il s’était rendu pour y renconter les responsables du Polisario et faire un bain de foule pour finir par saluer le drapeau d’une entité fantôche et par déclarer « l’occupation » par le Maroc du Sahara. Une attitude inamicale de la part d’un haut fonctionnaire des Nations Unies qui semble s’être fait une raison pour attaquer bille en tête le Maroc, pays souverain, et le réduire, dans son rapport controversé, au rang d’un ramassis de sécessionistes à la solde d’Alger. Une progression jugée inacceptable par le Royaume et renforçant les doutes déjà exprimés à l’endroit d’un messi dominici qui a fait fi des règles liées à sa démarche : l’observance de la neutralité.

FERMETÉ PAYANTE

C’est la raison pour laquelle Rabat a fermement réagi aux dérapages ayant marqué la tournée saharienne de Ban Ki-moon et notifié, par lettre officielle, « ses réserves sur le dernier rapport dès sa publication, et son rejet total de certaines assertions » qui l’émaillent. La vigilance était de mise à l’heure où les ennemis de la cause nationale tentaient de profiter de la vive tension pour pousser jusqu’au changement de la


nature du mandat de la Minurso et son élargissement à des missions « non-convenues et à des actions étrangères à sa raison d’être », affirme le MAEC. Et dans ce dossier, force est de rappeler une première : pour la première fois dans la gestion de ce dossier, la résolution de l’ONU a subi les fourches caudines du vote. Ce qui n’empêche par le Maroc de se féliciter du fait que cette résolution « constitue, à ce titre, un revers cinglant pour toutes les manœuvres du Secrétariat Général de l’ONU, notamment celles opérées lors de la visite du Secrétaire Général et celles insérées dans son dernier rapport. Ces manœuvres visaient à altérer les paramètres de la solution politique, à ressusciter des options dépassées et à introduire des éléments non-reconnus par le Conseil de Sécurité ». Un satisfecit qui n’empêche pas le Royaume de décocher des flèches aux EtatsUnis d’Amérique sous forme de regrets. Surtout que ses représentants en charge de « la formulation et de la présentation du premier projet de résolution » ont, précise

SI LE MAROC A REMPORTÉ LA BATAILLE D'AVRIL, RIEN N'EST ENCORE GAGNÉ ! le communiqué du MAEC, «introduit des éléments de pression, de contraintes et d’affaiblissement, et agi contre l’esprit du partenariat » scellé entre Rabat et Washington. D’ailleurs, des démarches ont été entreprises par la diplomatie du Royaume invitant l’Administration américaine à clarifier sa position concernant le dossier du Sahara et les relations entre les deux pays liés par un partenariat stratégique dans plusieurs domaines et d’abord en matière de sécurité et de lutte contre le terrorisme. Une réaction qui dépasse le cadre de « l’épidermique » puisque dans un discours fondateur au sommet Maroc-CCG, le Roi qui réaffirmait les bases de sa doctrine, socle sur lequel repose ses options stratégiques, n’avait pas hésité, le 20 avril, à critiquer les inconstances de l’Empire, sans le nommer, dans le dossier saharien. «La situation est grave, surtout au regard de la confusion patente dans les prises de position et du double langage dans l’expression de l’amitié et de l’alliance, parallèlement aux tentatives de coups de poignard dans le dos», avait-il martelé depuis Riyad. Capitale qui avait accueilli, dans une atmosphère des plus tièdes, l’hôte de la Maison Blanche en

visite d’adieu...

VEILLE CONSTANTE

La fermeté avec laquelle le Maroc a réagi aura donc permis de limiter les dégats pressentis par un alignement flagrant de Ban Ki-moon sur les thèses séparatistes. En effet, la résolution de l’ONU a réaffirmé les paramètres de base qui, aux yeux de Rabat, restent déterminants pour la gestion de l’équation saharienne dans le giron national. La solution ne peut être que politique, consensuelle, mutuellement acceptable et basée sur l’esprit du compromis et du réalisme. Avec, en prime, la prééminence de l’initiative marocaine jugée crédible et serieuse, puisque le Conseil réaffirme la caducité des propositions antérieures à 2004. L’Algérie a été sommée, une nouvelle fois, à s’investir davantage dans le règlement de ce différend et la résolution du Conseil a reconnu que le règlement de ce problème et la coopération entre les pays de la région sont à même s’assurer paix et sécurité dans la région sahélo-saharienne. Le Conseil n’a pas manqué de saluer l’action menée par le Royaume sur le plan des droits humains et loué particulièrement le rôle des commissions régionales du CNDH en activité à Laayoune et à Dakhla. Et last but not least, il a appelé pour la cinquième année consécutive au recensement des populations séquestrées dans les camps de Lahmada. La récurrence de cet appel vise, selon la diplomatie marocaine, à corriger une anomalie humanitaire internationale s'adresse particulièrement à l'Algérie en tant que pays hôte afin de permettre au HCR de procéder à l'enregistrement de ces populations, ce que l'Algérie continue de refuser depuis 40 ans. Bien entendu, le Royaume reste assez flexible pour gérer les mois à venir au mieux de ses intérêts. C’est la raison pour laquelle les discussions reprendront avec le secrétaire général de l’ONU ainsi qu’avec les pays amis pour trouver un accord permettant à la Minurso de travailler « le plus normalement possible », selon le représentant du Royaume à New York. A cet égard, il est opportun de rappeler ce que le communiqué de la diplomatie marocaine spécifié en soulignant que « le Royaume du Maroc poursuivra, dans le plein respect des décisions qu’il a prises, le dialogue pour parvenir à un paquet de sortie de crise qui permette l’atténuation des dérapages graves du Secrétaire Général lors de sa visite dans la région, et la garantie du bon fonctionnement de la Minurso, essentiellement dans ses missions fondamentales de surveillance du cessez-le-feu et de déminage dans la zone tampon à l’Est du dispositif de défense.»

En outre, et c’est là une preuve d’un dynamisme nouveau qui marque la diplomatie marocaine, le Maroc va participer à la conférence des donateurs qui sera organisée à Genève au profit des réfugiés de Tindouf. Histoire de mettre la pression sur les donateurs pour hâter un processus que la diplomatie algérienne, très manœuvrière, a réussi jusqu’ici à esquiver ; le recensement de la population saharaouie. Et de livrer bataille pour le retour au pays de tous ceux qui en expriment la volonté. Nul besoin de souligner, à ce propos, les pratiques inhumaines auxquelles sont assujettis les séquestrés de Tindouf et d’ailleurs aussi bien de la part des autorités algériennes que de leurs affidés du Polisario. Comme il est aussi opportun de rappeler que les aides que la communauté internationale accorde aux séquestrés s’est transformée en une véritable rente qui profite aussi bien aux généraux algériens qu’au cadors du séparatisme.

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MONDE L’ALGÉRIE REMET SES PENDULES À L’HEURE par: A.B.Z.

DE LA VACANCE DU POUVOIR ! Il ne faut pas être capable de lire dans le marc pour voir que l’Algérie vit un des pires moments de son histoire post-indépendance. Avec un président grabataire à sa tête, la vacance du pouvoir interpelle non seulement les Algériens, mais aussi les chancelleries. Car rien n’est arrêté pour une succession qui s’annonce difficile. Si elle ne prend pas les allures d’un chaos.

P

eut-on déstabiliser tout un pays en 40 secondes chrono ? L’Algérie a trouvé la réponse à un million de dinars. Une séquence télé qui montre de l’hôte d’El Mouradia un cadavre sur chaise roulante. Du coup, c’est le pays entier qui est au bord de l’apoplexie. Une partie de la classe politique est montée au créneau pour dénoncer la vacance du pouvoir. L’ancien chef de «L’OPPOSITION A EU RAISON gouvernement Sid-Ahmed a vue en cette D’APPELER À LA TENUE D’UNE Ghozali séquence « combien est grande la difficulté de PRÉSIDENTIELLE ANTICIPÉE». l’Algérie à entrer dans l’Etat de droit. Le prestige de l’Algérie est terriblement atteint par un Président qui ne préside pas». Sur quoi, Abdelaziz Rahabi, ancien ministre, renchérit en soulignant que «l’état dans lequel est apparu Bouteflika affaiblit considérablement les capacités de représentation de son pays. Je pense que le Président manque de discernement et que

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son entourage manque de dignité et l’Algérie en prend un coup», dès lors, «l’opposition a eu raison d’appeler à la tenue d’une présidentielle anticipée». Mais il faut croire que le système n’a pas d’autre horizon que d’accompagner celui qui fustigeait ses détracteurs qui le surtaxaient de « trois quart de Président » en s’accrochant à son 4ème mandat jusqu’à son dernier souffle. Quitte à ce que la maison du pouvoir s’embrase au rythme de la guerre des chefs que cristallise les cadors du FLN et du RND. L’Algérie est-elle en proie à une «malédiction» comma l’a résumé Soufiane Djilali qui préside aux destinées de Jil Jadid en évoquant le dossier sulfureux de Chékib Khali aux affaires ? En tout cas, voilà un scandale d’Etat de plus qui émaille la chronique algérienne. Ce qui ne fait nullement déciller les « valeurs sûres » sur lesquels s’appuie le système (l’armée jetée dans les bras de Gaïd Salah et le frère Bouteflika, Saïd de son prénom) qui fait état d’une surdité à toute épreuve face aux revendications d’une opposition en mal d’alternatives. Aujourd’hui, la main de l’opposition reste toujours tendue, mais ignorée par ceux qui pré-


destinent l’Algérie à un dessein des plus sombres. Surtout que la rente pétrolière fond à vue d’œil et que les dangers de déstabilisation rodent autour des frontières, à l’Est comme au Sud. Le FFS croit que pour remettre le pays sur les rails de la sécurité et de la prospérité, l’impératif de « la reconstruction du consensus national » est l’unique alternative. Mohamed Nebbou n’en démord pas. Lui qui a rappelé l’attachement de sa formation au projet de consensus national. «Pour réaliser les aspirations à la liberté, à l’égalité devant la loi, à la justice sociale, à la dignité de tous les Algériens, nous n’avons qu’un chemin à ouvrir et à sécuriser ensemble, celui de l’unité, de la paix civile et de la solidarité nationale. Des aspirations qui ne peuvent être réalisées qu’avec la mobilisation et la vigilance», prêche-t-il. Dans le désert ? De son côté, l’Instance de suivi et de coordination de l’opposition (ISCO) a clôturé son deuxième congrès, à Zéralda, par un appel au peuple en vue d’«accompagner sa démarche et soutenir ses efforts pour la construction d’un avenir meilleur pour tous». Un nouveau projet s’articulant autour d’une vision prospective de l’Algérie de demain, serait en élaboration. Projet devant définir les grandes lignes qui peuvent servir de base pour un dialogue national permettant d’élaborer des solutions pouvant sortir l’Algérie de la crise économique, sociale, sécuritaire, morale et financière. Mais là aussi, il faut croire que l’urgence a été gommé du calendrier alors que l’ISCO fait sienne «une transition démocratique» susceptible d’assurer le dépassement de l’«impasse politique » et le « changement du système». C’est comme si depuis le 10 juin 2014, l’Algérie n’a rien connu qui puisse faire bondir toutes les bonnes volontés. De l’aveu même de cette instance, c’est l’absence d’un rapport de force favorable que tout doit être axé sur les moyens de trouver une nouvelle dynamique. Ue plus grande proximité du peuple s’avère nécessaire, aux yeux de ses initateurs, pour changer un tant soi peu le rapport de forces et exiger une «transition négociée et graduelle». L’approche timorée de l’ISCO explique-t-elle l’insuccès de cette deuxième rencontre boudée par des figures de l’opposition comme Mouloud Hamrouche, Sid-Ahmed Ghozali, Saïd Sadi, Mokdad Sifi, Mustapha Bouchachi, voire Mohcine Belabbas, patron du RCD ? «Quand on veut représenter une alternative crédible à un système aussi figé que celui qui a confisqué l’indépendance, il faut être d’une li-

sibilité exemplaire (…). Tant que nous n’aurons pas résolu ce malentendu, notre cohésion sera aléatoire, car ce même malentendu est porteur de germes des infiltrations et des instrumentalisations des clans», lance, dans son intervention, Ouamar Saoudi, représentant du RCD, appelant ainsi à se concentrer sur les objectifs tracés dans la plateforme de Mazafran I. Si le malaise fut palpable, les animateurs de l’ISCO se déclarent «attachés à la nécessité de maintenir cette union entre les différents segments de l’opposition», ce qui est une première dans les annales. «L’opposition a réussi à se réunir malgré les facteurs de dénigrement et de suspicion», a affirmé Abdelaziz Rahabi, président de la séance. L’ISCO agirait-elle comme une soupape de sécurité pour le système? La question mérite d’être soulevée à l’heure

où des accusations ont été lancées de part et d’autre dans le débat. Mais il faut convenir que tous les intervenants ont chargé le système et ses hommes-lige qui «menacent désormais, même l’avenir de l’Etat». Ali Yahia Abdennour, Ali Benflis, Abderrazak Makri, Soufiane Djilali, Karim Tabbou… et tous les intervenants se sont accordé à établir le même constat sur la crise politique et économique, mettant en garde contre ses conséquences sur le plan social. Selon eux, le discours de la peur est rejeté, d’autant plus que la menace pour la cohésion du pays vient du pouvoir. L’évolution telle qu’elle se profile en Algérie a de quoi inquiéter. Non seulement les seuls Algériens. Mais aussi les chancelleries et les voisins. Car si rien n’est tranché en terme de succession, il faudra craindre le pire.

TRAFIC D’ARMES SURPRENANTES SAISIES ! L’Algérie devient-elle, sans le vouloir, une plaque tournante pour le trafic d’armes sophistiquées ? La question mérite d’être soulevée à l’heure où des armes de plus en plus lourdes et en quantités sont saisies par l’armée algérienne. La grande muette tient à communiquer sur ses faits d’armes en février. Dans le lot du matériel militaire saisi, figurent 11 canons antiaériens DShK de 12,7mm et KPV de 14,5mm au niveau de les wilaya d’El Oued d’Adrar et Tamanrasset. A cela s’ajoute tout un arsenal meurtrier composé d’une soixantaine de kalachnikovs, 17 mitrailleuses FMPK et deux mortiers. Ainsi que six lance roquettes anti-chars dont les Etats du Golfe avaient doté les milices Fadjr Libya. De quoi inquiéter les militaires algériens qui patrouillent tout le long des frontières de l’Algérie dans les zones jugées vulnérables aux infiltrations des djihadistes. L’affaire d’In Aménas, site gazier attaqué, a de quoi les échauder. « Il est possible que les armes aient précédé une infiltration d’hommes, toujours plus facile sans équipements lourds », commente-t-on. Bref, il y a de quoi permettre aux hommes qui en seraient dotés soit de « tenir un siège longue durée ou d’opérer de grandes offensives meurtirières ». Selon toute vraisemblance, ces armes en parfait état seraient orignaires de Libye et non plus comme les reliques saisies naguère et dont l’origine est à situer au niveau des terrains de la guerilla du Soudan et du Tchad.

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MONDE NORMALISATION EN LIBYE par: L.M.

RIEN N’EST ENCORE PLIÉ ! La normalisation de la situation en Libye est-elle sur les bons rails ? Ambassadeurs et ministres européens se sont succédé à Tripoli en signe de soutien au gouvernement El Sarraj. Mais le langage de la diplomatie a été ponctué de celui de la canonnière. Quo vadis ?

A

quelques encablures de la résidence du vice-président du gouvernement libyen, Ahmed Myitigue, à la cité El Andalous, le staccato des armes légères et missiles à marqué la scène. C’est l’œuvre de la milice Thouar Tarablous (les Révolutionnaires de Tripoli), qui compte parmi les plus fortes de Tripoli. Son leader Haythem Tajouri, connu pour sa proximité avec Nouri Bousahmine, président du Conseil national général, a donc LA QUESTION QUI RESTE PENvoulu avertir que toute normalisation doit se faire DANTE EST LIÉE À LA SITUATION avec son assentiment. Surtout que l’entrée du gouSÉCURITAIRE ET À LA LUTTE vernement El Sarraj à Tripoli n’a pas bénéficié de son « ok ». Cette démonsCONTRE DAECH tration de force intervient dix jours après la valse diplomatique que Tripoli a connu avec l’arrivée d’ambassadeurs européens (Italie, Espagne, Grande-Bretagne, France et Allemagne), talonnés par le ministre italien des Affaires étrangères, et ultérieurement par ses homologues français et allemand. Tout le monde veut exprimer son soutien à l’installation du gouvernement El Sarraj à Tripoli. Fayez El Sarraj a également

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obtenu le soutien d’Erdogan à Istanbul et de l’émir du Qatar à Doha. Une quarantaine d’institutions internationales réunies à Tunis, avaient exprimé auparavant leur disposition à soutenir la reconstruction en Libye. Il en est ainsi du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) va parrainer des projets en faveur des municipalités libyennes pour améliorer les conditions de vie des citoyens. Mais la question qui reste pendante est liée à la situation sécuritaire et à la lutte contre Daech. En tout cas, si pour le gouvernement El Sarraj, les interventions étrangères devraient être bannies, cela ne semble guère être l’avis des puissances étrangères. Federica Mogherini, commissaire européenne, avait mis en avant la disponibilité de l’Union européenne à aider le gouvernement libyen par une force de maintien de la paix. Les ministres italien, allemand et français ont parlé de formation de troupes libyennes. Ils ont dit que ces formations sont prévues en dehors de la Libye. Des pourparlers ont même été engagés en Tunisie, depuis décembre dernier, pour abriter ces formations. Mais cette perspective semble pour le moins éloignée à l’heure où El Serraj avait négocié un compromis avec les milices pour qu’elles gardent armes et pouvoir dont elles se sentent investies.


Même si pareil compromis reste, en principe, limité dans le temps. Moussa Kouni, vice-président du gouvernement El Sarraj, ayant souligné que «les milices vont être intégrées dans les rangs de la police et de l’armée». Cette perspective-là ne semble agréer les formations politiques en présence. Mahmoud Jibril, Président de l’Alliance des forces nationales (AFN) appelle à «faire des sessions de formation de soldats pour les initier à la neutralité et à la discipline de l’armée et éviter d’engager les miliciens». Si tout concorde pour dire que la pression à laquelle est soumis El Serraj de la part des Européens vise à raassurer quant à leur appui à toute transition rapide, il n’en reste pas moins qu’une telle précipitation obéit à un double objectif. Tout retour à la normale devrait, en principe, éliminer le risque majeur de voir le flux des immigrés sub-sahariens, comme d’autres, continuer à bénéficier de la zone grise qu’est devenue la Libye depuis la chute de Kadhafi. Ce qui devrait conférer toute sa plénitude à l’accord passé avec la Turquie au prix de… 6 milliards d’euros. Ensuite, il s’agira pour l’Europe de pouvoir compter sur un allié capable d’endiguer le danger terroriste que représente Daech. L’Organisation Etat Islamique comptant entre 4.000 et 6.000 combattants, soit le double des estimations faites il y a une année à peine. Bien entendu, les assurances quant à l’inopérabilité de toute intervention, sans le consentement des autorités libyennes, continuent de fuser de toutes parts. Rejoignant en cela les inquiétudes formulées par les voisins de ce vaste pays qui offre le plus grand arsenal guerrier à ciel ouvert, l’Algérie et la Tunisie. Même l’Egypte, dont les chasseurs avaient bombardé des cibles djihadistes en représailles contre l’assassinat d’un groupe de ses ressortissants, a fini par s’allier à la logique de la solution interne pour clore le dossier djihadiste. Toutefois, il ne faut pas perdre de vue que les intérêts occidentaux, ceux des USA en tête, pourraient dicter à tout moment une intervention, comme le planifie l’OTAN. Surtout si les calculs des Américains quant à l’isolement des combattants de Daech tombent à l’eau. Pour l’heure, le feu n’a pas encore pris aux lacs. L’EI qui contrôle Syrte, ville en ruine située à 450 km à l’est de Tripoli, serait pris actuellement en tenaille entre la capitale libyenne et Benghazi. Sans réussir, dans ses diverses tentatives, a faire d’autres percées dans d’autres villes. Rien n’est encore définitivement plié. Car le gouvernement de transition doit bénéficier de l’aval du parlement de Toubrouk. Là où les négociations s’avèrent difficiles…

LES ILOTS DE LA CONTESTATION EN TUNISIE

KERKENNAH S’EMBRASE La Tunisie passe par une période aussi difficile que trouble. Si la majorité bat de l’aile, au risque de pousser le chef du gouvernement vers la porte de sortie, le champ de la contestation dépasse le cadre politique pour se placer dans le social. Le chômage ambiant reste le terreau de la contestation.

E

ncore une affaire de « pétrole » ? En tout cas, il n’aura pas fallu attendre longtemps pour que le dossier de l’exploitation des hydrocarbures soit réouvert dans l’île tunisienne de Kerkennah (centre est du pays). Cristallisant ainsi la colère des jeunes désoeuvrés qui n’arrivent pas à sortir de la misère dans laquelle ils s’engluent au fur et à mesure que la crise économique se renforce. La situation reste tendue après une nuit de heurts entre habitants et forces de l’ordre près du port de Sidi Youssef. La contestation sociale est liée aux activités d’une société pétrolière britannique, Petrofac, dont les camions ont été empêchés de quitter le port. Aux jets de pierre, les protestataires ont installé plusieurs barrages à travers l’île pour bloquer l’activité de la flotte de Petrofac, amenant les forces de l’ordre à recourir aux gaz lacrymogènes pour tenter de les disperser et d’ouvrir le passage aux camions. Certes, si l’ile qui fait face à Sfaxe est loin de rivaliser avec la colère qui s’est emparée de Kasserine, en janvier dernier, après le décès d’un jeune chômeur, il n’en reste pas moins qu’elle révèle la fragilité des équilibres que l’alliance entre Nidaa

Tounes, parti majoritaire à l’issue des législatives, et les islamistes d’Ennahda tentent de sauvegarder. D’ores et déjà, des informations font état d’une crise gouvernementale qui risquerait, à terme, de couter au Premier ministre son poste. Ceci est d’autant plus vrai que les critiques nourries à l’endroit de la coalition sont focalisées sur une relance économique promise. Mais loin d’être tenue. On comprend dès lors pourquoi l’UGTT que dirige Houcine Abbassi monte au créneau pour exger des comptes d’un Exécutif désarmé face à l’ampleur des défis socio-économiques. Certes, le FMI vole au secours de ce pays en transition en lui accordant une ligne de crédit d’une peu plus de 2 milliards de dollars sur quatre ans. Mais le pays a besoin de davantage pour assurer une reprise susceptible d’alléger la pression ressentie fortement sur le plan social. Mais les bailleurs de fonds ne semblent pas pressés pour venir en aide à un pays fragilisé aussi bien par une coalition politique qui bat de l’aile que par la mobilisation sécuritaire le long de ses frontières de l’Est, avec la Libye et à l’Ouest avec l’Algérie, pour endiguer le danger djihadiste.

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MONDE

EFFONDREMENT DU MONDE ARABE par: L.M.

CEUX QUI SE NOURRISSENT SUR LA BÊTE… Qui a dit que les frontières établies par les accords de Sykes-Picot, frappées de caducité, devaient être redessinées subséquemment à « la théorie du chaos » mise en branle dans le Proche-Orient? Les tensions sanglantes auxquelles on assiste dans cette partie du monde donnent à croire que «l’opération chirurgicale» est bien avancée.

L

e monde arabe est mal parti. Des craintes s’expriment de plus en plus fortement quant à un remodelage, au forceps, des frontières traditionnelles. Du coup, pareille perspective ne saurait que donner plus de crédit à tous ceux qui ont glosé sur «la théorie du complot » dont les Etats-Nations devraient TEL AVIV FAIT AVANCER SES souffrir. En tout cas, « le chaos créateur» prend de PIONS. OBJECTIF: FAIRE MAIN la consistance, inexorablement, avec la crise BASSE SUR LE GOLAN politique qui n’en finit pas de secouer l’Irak, en butte aussi aux hordes djihadistes de l’organisation « Etat Islamique » qui les a vu naitre. Avant de pousser leurs pions dans la Syrie voisine qui peine à contenir l’afflux de « combattants » en provenance

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d’Irak… Mais aussi de la Turquie voisine. N’eut été l’intervention musclée de la Russie, pour sauver ses intérêts géostratégiques en Méditerranée, une partie du Nord syrien aurait déjà été amputée par le pouvoir turc (et la « no fly zone » était programmée dans ce cadre-là) qui ne se prive pas d’intervenir, militairement, en Irak pour mater du Kurde. Ankara a d’ailleurs fait savoir que toute autonomie des zones kurdes, en Irak, comme en Syrie, ne saurait être tolérée et agité, dans ce sens, le facteur casus belli qui légitimerait son intervention militaire. D’ailleurs, le ralliement d’Ankara aux thèses déstabilisatrices préprogrammées pour la Syrie, dans la perspective de la déstructuration du « croissant chiite », défendu mordicus par la Jordanie, pays qui joue ainsi la partition des monarchies du Golfe, y trouve une certaine « légitimité ». Le modèle turc entrant en compétition avec les autres puissances régionales pour assurer le leadership sunnite.


LE REPÈRE DU GOLAN

Dans cette perspective, Damas représente la cible de choix à conquérir, via un affaiblissement à inscrire dans la durée grâce à l’alimentation constante des foyers insurrectionnels. Victime d’une « guerre par procuration », la Syrie tente de sortir de l’ornière, avec l’appui de Moscou, mais aussi de ses alliés régionaux (Iran et Hezbollah), en grignotant petit à petit les territoires qui échappent à son contrôle. Et les pourparlers de Genève servent de faire valoir à une réconciliation syrienne, difficilement négociable au regard de la multiplicité des acteurs aux intérêts fort divergents en présence, qui pourrait redonner espoir au régime de Damas. Les acquis militaires obtenus sur le terrain de la reconquête des territoires perdus servant d’arguments de poids dans la balance. Sauf qu’un intervenant de dernière minute vient de s’inviter à la table pour claironner haut et fort que le principe de l’intégrité territoriale de la Syrie, auquel s’accroche la Russie, comme l’Egypte d’ailleurs, ne la concerne point. Netanyahou, pour ne pas le nommer, ne se compte pas rétrocéder le Golan au motif que son occupation, près d’un demi-siècle durant, le prédispose à l’intégrer définitivement à l’entité sioniste. Réunissant en grande pompe son cabinet sur cette portion du territoire syrien, il a laissé croire que la souveraineté israélienne sur le Golan est chose entendue avec les USA, J. Kerry en ayant déjà été informé, et qu’il comptait aussi s’en ouvrir aux Russes lors de sa visite à Moscou. Cela atteste-t-il de la véracité de la thèse selon laquelle le tracé des frontières historiques du Moyen Orient est devenu caduc?

Certes, l’initiative israélienne que l’on impute, entre autres, à un prétendu renforcement du 4è mandat de Netanyahou interpelle à plus d’un titre. Notamment sur le véritable bénéficiaire du programme de dépeçage que l’on réserve à la région. S’agirait-il de la Turquie qui négocie, aujourd’hui, les termes d’une réconciliation avec Israël, après avoir lamentablement échoué à confirmer sa doctrine régionale de « zéro problème » avec les voisins ? Ou encore de l’Iran, puissance chiite qui opère un retour en force dans la région, depuis que l’accord sur le nucléaire a été scellé, après avoir réussi à intégrer à sa sphère d’influence aussi bien l’Irak que la Syrie ? Peut-on se hasarder à avancer que les mo-

AU CAIR, LA CONTROVERSE AUTOUR DES ÎLES CÉDÉES AUX SAOUDIENS RISQUE D’EMFLER DAVANTAGE narchies du Golfe, impliquées directement ou non dans ce qu’il est convenu d’appeler « Printemps arabe », arriveraient à tirer un quelconque bénéfice du chaos ambiant ? Où est-ce Israël qui réussit à rafler la mise, à la barbe de tous, en réussissant un triplé dans l’Histoire de la région. En marginalisant la question palestinienne, le processus d’Oslo étant « mis en bière » par ses

soins, en annexant le Golan tout en soufflant sur les braises de l’insurrection, rejoignant en cela les autres acteurs régionaux dont les appétits géoéconomiques et géopolitiques ont été aiguisés par le marché du gaz ? En tout cas, si les hordes de djihadistes en activité en Syrie ont montré leur insoumission aux donneurs d’ordre qui les avaient soutenus (financièrement et militairement), comme le laisse entendre la série d’attentats perpétrés aussi bien dans la région qu’en Europe, et bien au-delà, il est pour le moins étonnant que de constater qu’ils n’ont jamais osé s’attaquer à Israël. Pas un obus n’a été tiré ni par Al-Nosra, filiale d’Al-Qaeda en Syrie, ni par Daech sur les positions de « Tsahal ». Bien au contraire, leurs blessés sont pris en charge par l’armée israélienne… Le calme plat sur ce front-là incite à se poser bien des questions. Surtout lorsque les responsables israéliens insistent, auprès de leurs vis-à-vis, que la dangerosité est à situer plus au niveau de l’Iran, de la Syrie et du Hezbollah qu’au niveau de Daech.

ET TIRAN ET SANAFIR ?

Une logique qui semble largement partagée par les monarchies du Golfe. Et qui explique les indiscrétions de responsables israéliens quant aux contacts poussés qu’ils ont pu instaurer avec des partenaires arabes. Faut-il accorder moins de crédit qu’il n’y paraît à de telles assertions israéliennes? Quoi qu’il en soit, le fait est que la campagne du Yémen qui dure depuis plus d’une année, avec son concert de désolation, est encore loin de permettre la percée d’une quelconque lueur d’espoir. Quand bien même

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des contacts directs auraient réuni les protagonistes dans plusieurs capitales golfiques et à plusieurs niveaux. Et si les Houthis, communauté chiite yéménite sont de la partie, la hache de guerre est encore loin d’être enterrée. La coalition continue dans ses frappes aériennes et dans ses guerres de position. Et il ne faudrait pas s’attendre à une solution dans l’immédiat au vu des crispations entre Téhéran, représentant attitré des chiites dans la région, et Riyad qui semble en passe de jouer du chéquier pour asseoir sa suprématie dans le monde sunnite. Cela se vérifie avec la Turquie… Mais aussi, et surtout, avec l’Egypte. Lors de son récent séjour au Caire, le Roi Salmane a présidé avec le Président hôte Al-Sissi une série de conventions totalisant plus de 17 milliards de dollars. Cela sans compter le financement de contrats d’armes conclus aussi bien avec la France que la Russie. Bien entendu, tout cet investissement saoudien ne s’accommode pas que des seuls critères mis en avant de « la fraternité arabe », pour empêcher l’effondrement du Géant du Nil, mais aussi et surtout d’intérêts géopolitiques bien compris. Le Caire qui a volé au secours de Riyad dans son équipée yéménite (dont la facture a toutes les chances d’aboutir à une nouvelle partition d’un pays volontairement réunifié) a fait une sourdine sur l’offre de constitution d’une « force arabe» dont le siège se situerait en Egypte au profit de la « force islamique » montée par les Saoudiens. Avec, en prime, la mise en pratique de cette mobilisation à travers de grandes manœuvres englobant tous les corps d’armée. Mais aussi, et c’est un sujet qui alimente une très forte controverse en Egypte, l’abandon au profit de Riyad de la souveraineté sur les deux îles Tiran et Sanafir. Un témoignage de plus, s’il en fallait un, de la reconfiguration de la carte du monde arabe. Si crédit est accordé à la thèse selon laquelle le processus de survie des Etats-nations serait engagé, il faudra s’attendre à ce que la partie de « jeu de quilles » s’achève avec des frontières avec d’autres contours. A moins que la Syrie ne fasse preuve d’une solide résistance qui la prédisposerait, avec ses partenaires, à tenir la dragée haute aux instigateurs du chaos régional. Auquel cas, ni la Turquie qui nourrit le rêve de ré-asseoir un modèle néo-ottoman sur d’autres bases, ni Israël qui caresse le rêve du Grand Eretz, ne verraient leurs scenarii aboutir. Voilà pourquoi la crise syrienne cristallise, à elle seule, toutes les passions et le maximum de convoitises. En particulier du côté des prédateurs qui entendent se nourrir sur la bête…

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OR NOIR : L’AUTRE ARME DE COMBAT C’est à un effondrement des cours de pétrole que l’on assisté à l’ouverture des marchés asiatiques. Un effondrement appelé à s’inscrire dans la durée faute d’un consensus sur le gel de la production entre les pays exportateurs d’or noir. Sans surprise aucune, les cours du pétrole resteront au plus bas après l’échec de la réunion de Doha devant amener, en principe, les pays producteurs à un gel de la production. Le 18 avril, le brent Brent de la mer du Nord a perdu près de 7 % dans les premiers échanges pour revenir tout juste au-dessus de 40 dollars le baril. De son côté, le cours du baril de “light sweet crude” (WTI) pour livraison en mai s’est délesté de 2,11 dollars ou 5,23 % par rapport au prix affiché trois jours plutôt, soit 38,16 dollars. Quant à celui du “Global benchmark Brent” pour juin il a chuté de 4,71 %, soit 2,03 dollars. Ce charivari est la conséquence de la réunion, au Qatar, entre les principaux pays exportateurs de pétrole, l’Opep, et d’autres grands producteurs comme la Russie, qui s’est soldée par un échec. Les représentants de ces pays, en charge de finaliser un accord dans le pipe depuis février, aurait stabilisé la production jusqu’en octobre 2016 à ses niveaux de janvier. Mais aucun consensus n’a été trouvé d’autant plus qu’un grand pays producteur, l’Iran en l’occurrence, a choisi la politique de la chaise vide pour signifier son rejet de

tout plafonnement de la production. Le pays des Mollahs qui envisage de développer son industrie pétrolière, après la levée programmée des sanctions, n’entend pas se lier par un accord qui limiterait la portée de l’exploitation de tout son potentiel en hyrocarbures. Une position qui s’oppose à celle affiché par Riyad, les Saoudiens qui agissent comme chef de file de l’OPEP militant pour un gel global de la production, y compris celle de l’Iran. La réunion qui a duré cinq heures a donné lieu à des discussions très animées entre l’Arabie saoudite et la Russie sur la formulation d’une éventuelle déclaration finale. Sans que cela n’aboutisse à un quelconque résultat. Délégués et ministres ont annoncé qu’aucun accord n’avait été trouvé. “Il nous faut davantage de temps pour parvenir à un accord entre tous les membres de l’Opep et les principaux producteurs afin de geler la production, ce qui pourrait intervenir d’ici juin”, a indiqué une source de l’Opep. Mais l’Arabie saoudite a menacé d’accroître sa production si aucun accord n’était trouvé. En noyant le marché, Riyad ne fait qu’user de l’arme économique pour arracher des concessions géopolitiques. Ce que ni les Russes, ni les Iraniens n’entendent lui concéder. Et la bataille se fera d’autant plus rude si l’Irak, comme la Libye, retrouvent leur place d’antant dans le club.


CHRONIQUE VU ICI

QUELLE DÉCHÉANCE ! par: Mustapha El Maleh

D

écidément, rien ou presque, ne réussit à François Hollande. A treize mois des présidentielles, il vient d’essuyer un sérieux revers avec sa décision d’enterrer sa loi portant sur la déchéance de nationalité pour les binationaux et l’introduction de l’Etat d’urgence dans la Constitution. Au lendemain des attentats de novembre 2015, il déclara solennellement devant le Congrès, réuni à l’occasion au château de Versailles, sa volonté de réformer la Constitution en y introduisant la déchéance de la nationalité aux terroristes français coupables d’actes terroristes. Emportés par l’émotion post-attentat, c’est une salve d’applaudissements qui suivit la déclaration solennelle du Président de la République qui avait pris soin, très tôt, de recevoir les responsables de tout l’éventail politique hexagonal. Mais très vite, plusieurs interrogations allaient mettre à mal l’unité du Parti socialiste et même celle des Républicains, principale formation d’opposition. Cette proposition est une revendication du Front National partagée depuis peu par quelques députés Républicains. De là à ce qu’elle soit portée par le Parti Socialiste, c’est tout simplement du pain béni pour la formation d’extrême droite. Introduire une telle nuance entre les Français est un précédent grave que nous avons dénoncé dans cette même tribune il y’a quelques mois avec MÊME EN RECULANT cette simple interrogation SUR LE DOSSIER adressée aux gouvernants : Sommes-nous des Fran"DÉCHÉANCE çais à part entière ou des DE LA NATIONALITÉ", Français entièrement à C'EST LE FN part ? De plus, pour un terQUI EN BÉNÉFICIE roriste qui veut se donner la mort en croyant qu’elle lui ouvre la porte de l’éternité, en quoi la déchéance de nationalité serait-elle un frein à tout passage à l’acte ? Il y’a des questions qui ne trouvent leur réponse que dans la récupération politique avec comme objectif les élections de 2017… Bref, on continue de surfer sur les vagues de l’émotionnel à des fins purement politiciennes. Entre temps, ce sont des centaines d’heures de débat qui furent consacrées à cette question au sein de l’Assemblée Nationale. Sous la poussée des Frondeurs du Parti socialiste, des Verts et du Front de Gauche, il a été enfin décidé

d’étendre cette mesure à tous les Français, de « souche » et les « binationaux » avec, comme épine aux pieds des législateurs, la création d’apatrides ! Arrivée sur les pupitres des sénateurs, en majorité de droite, la proposition fut remaniée pour reprendre sa forme initiale énoncée par le Président de la République à Versailles. Dès lors, il était impossible de la présenter en congrès puisque les moutures de la proposition de modification de la Constitution doivent être identiques entre les deux chambres. Alors qu’il ne s’en est même pas ouvert à ses propres ministres, le chef de l’Etat annonce renoncer à présenter ce projet de révision constitutionnelle, égratignant au passage la droite et les autres opposants de gauche. Sacrifiée sur l’autel de cette pseudo réforme, Christiane Taubira, l’ex ministre de la Justice, s’est félicitée dans un tweet posté juste après l’allocution du Président : « Nous voilà libres, la parenthèse d’un long égarement s’est fermée ». A entendre Combadellis, le patron des Socialistes, la majorité est tout simplement sonnée par une telle gifle. Mais son aile gauche est tout simplement ravie de constater avec joie que ce débat stérile est clos. Mais l’amertume est toujours là compte tenu du temps passé inutilement à pinailler et à ergoter sur un problème qui n’avait pas lieu d’être. Car les Français veulent, certes, de la sécurité, mais surtout du travail, et l’amélioration de leur pouvoir d’achat. Ecouté et entendu, le gouvernement leur propose une loi ou règne la flexibilité comme mot d’ordre qui libérerait le travail. Depuis trois semaines, les protestations ne cessent de s’amplifier chez les salariés comme les chez les étudiants. A droite, on savoure la reculade du Président et on lui renvoie la balle de la responsabilité d’un tel échec. S’il y’a échec, il se situe au niveau des deux grandes formations qui sortent affaiblies aux yeux des Français qui attendent l’unité nationale en de telles circonstances tout en constatant que les manœuvres politiciennes priment encore et encore sur l’intérêt général. Reste le Front National qui, tout en dénonçant le retrait, se frotte les mains. Car dans tous les cas de figure, c’est lui seul qui sort gagnant de cette bataille inutile. Quelle déchéance !

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MONDE EN FRANCE, « NUIT DEBOUT » OCCUPE LA RUE par: Abou Sarah

LA SOMME DES DÉSILLUSIONS Alors que l’on croyait la France et le peuple français en panne d’idées face à une crise politique, économique et sociale qui dure depuis des décennies voilà que l’étincelle vient d’en bas. « Nuit Debout » est l’élan citoyen qui exprime le ras-le-bol généralisé à l’endroit de politiques qui ne font plus rêver… Véritable lame de fond ou simple scélérate?

L

a s des promesses en tout genre dites et répétées par des professionnels de la politique de gauche comme de droite, une partie des Français lorgne de plus en plus le vote d’extrême droite. Un comble diriez vous dans le pays des Lumières, de la Révolution Française, de mais 1968? Non, car la France c’est aussi les JAMAIS LES lobbies esclavagistes et colonialistes au XIX°siècle, c’est l’Affaire POLITIQUES N'ONT Dreyfus, les Ligues d’extrême SENTI UNE FRANCE droite des années 30, le gouvernement de Vichy et la collaboraAUSSI VACILLANTE. tion tout azimut de pans entiers LE COLLÈRE SOURD... de la société Française avec l’horreur nazie … c’est enfin les groupuscules nazillons qui s’agitent depuis la décolonisation dure en Indochine, en Algérie, etc. Alors, un petit coup à droite n’est pas une nou-

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veauté. Sauf qu'avant que cela ne se produise, femmes et hommes de grande valeur sont en passe de prendre possession de l’espace public en dépit des cris de vierges effarouchées poussés par la droite qui considère le peuple comme la plèbe avec tout le mépris qui va avec. Déjà, l’élection de François Hollande, le chantre de la social-démocratie en 2012 « est illégitime » dans l’imaginaire de ces jeunes aux cheveux longs et gras qui dénoncent pêle-mêle les connivences et autres compromissions entre le capital, les grandes entreprises et les politiques de ce pays et au-delà. Dépassé, parce que déboussolé par une aile «réformatrice » de droite et une autre véritablement sociale portée par des députés frondeurs, le parti socialiste ne sait plus où donner de la tête si ce n’est en essayant de récupérer des bribes du mouvement, de surfer sur des slogans que lui-


même a vidé de tout sens. Baptisé « Nuits debout », ce mouvement a commencé avec pour slogan premier le refus de la loi El Komri. Mais très vite d’autres frustrations, d’autres revendications s’y sont greffées pour assurer la convergence des luttes. Au sein de ce mouvement qui touche désormais toutes les grandes villes françaises, étudiants, intellectuels, chômeurs, paysans en détresse, ouvriers sans lendemain dans une mondialisation féroce, actifs du public et du privé se rencontrent, débattent sur les maux qui frappent la société en cherchant de véritables solutions à dégager face aux réponses atones des politiques en place depuis des décennies et qui poussent vers une droitisation mortifère. Dès lors, le leitmotiv partagé par toutes ces bonnes volontés c’est que l’extrême droite est tout sauf « La solution ». Courir derrière elle à travers la proposition de réforme Constitutionnelle portant sur la déchéance de la nationalité, l’inscription de l’Etat d’urgence dans le socle démocratique, est une fausse route que l’actuel hôte de l’Elysée s’est essayé d’emprunter avec la déconfiture que l’on sait, lui qui bat tous les records d’impopularité. La précarisation des statuts des travailleurs publics et privés pour « gagner la bataille de la mondialisation » portée par le gouvernement Valls, applaudi par le Medef et la droite, est une très mauvaise réponse au problème du chômage qui frappe le pays en son cœur ; la jeunesse. Interrogés par notre consœur Léa Salamé sur France Inter, Julien Bayou du mouvement EELV, explique d’emblée que «parce que le mouvement dure c’est déjà une réussite en soi ». Pour lui, les partis politiques «doivent se réinventer », à commencer par son propre parti. A noter que le parti des « verts » s’est fait phagocyter lors du dernier remaniement ministériel avec l’entrée d’une partie de ses leaders au gouvernement contre la ligne du parti et de ses adhérents qui estiment que F. Hollande a trahi ses promesses. En marge de ces rassemblements, la société civile cherche un candidat pour l’élection présidentielle de 2017. C’est ainsi que plusieurs collectifs et associations ont lancé une primaire citoyenne pour désigner un candidat de la société civile pour l’élection présidentielle. La première étape de leur démarche consiste en une pétition en ligne avec pour ob-

jectif de «réunir au moins 500 000 signatures, une masse critique pour faire démarrer le processus», a expliqué l’écrivain Alexandre Jardin. Sur France Info, Alexandre Jardin, a déclaré que ce mouvement citoyen « veut une primaire non contrôlée par les partis. La question est de savoir si, à l’automne, on va se retrouver avec la primaire des petits partis de droite et la primaire des petits partis de gauche. Je dis petits partis parce que, dans la réalité, si vous additionnez les gens qui sont au Parti socialiste ou chez les Républicains, ça fait moins de monde que dans la Fédération française de pétanque ou de canoë-kayak. On veut une primaire non contrôlée par les partis». En parallèle à l’intervention de François Hollande sur « France 2 », le site Mediapart a décidé d’organiser une édition spéciale avec au menu les suites à donner au mouvement « Nuit Debout » … Déjà, ce sont plus de 30 000 signatures

qui ont été collectées. De quoi pousser le monde politique traditionnel à ne plus tourner en rond. De quoi demain sera-til fait ? Même Emmanuel Macron, avec son «En mouvement» est incapable d’avancer un quelconque pronostic excepté la démarche consensuelle qu’il offre, loin des clivages par trop saillants.

"NUIT DEBOUT" RÉCONCILIE LA FRANCE DE LA FRAUDE SOCIALE ET POLITIQUE

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PANORAMA ESCLAVAGE : LE DOLLAR COLORÉ

INTERCEPTIONS LE JEU DU CHAT ET DE LA SOURIS Un avion militaire américain de reconnaissance (Boeing RC-135) a été intercepté par un chasseur russe (Soukhoï Su-27) de façon « dangereuse et non professionnelle» lors d’un vol de routine dans l’espace aérien international au-dessus de la mer Baltique, a annoncé le Pentagone. «L’avion américain opérait dans l’espace aérien international et à aucun moment il n’est entré en territoire russe», a affirmé, Laura Seal, porte-parole du Pentagone. Cet incident est le deuxième en une semaine entre les armées américaine et russe. Des avions russes n’ont cessé de survoler le destroyer américain USS Donald Cook, et un bombardier Soukhoï SU-24 distant de neuf mètres faisait preuve d’une «configuration d’attaque simulée», selon le centre européen de commandement de l’armée américaine. Coté Russe, on nie tout caractère provocateur de ces interceptions qui tombent sous les sens…

IMMIGRATION L’HÉCATOMBE MÉDITERRANÉENNE… Des témoignages de réfugiés arrivés à Kalamata, dans le sud-ouest de la Grèce, confirment un drame humaniatire. Car seules 41 personnes de Somalie, d’Ethiopie et un Soudanais ont pu survivre alors que leur embarcation, partie de Libye, comptait 200 autres personnes. Mais le bilan s’avère plus lourd puisque ces miraculés ont signalé avoir été conduits de nuit vers un autre bateau, plus grand, où se trouvaient déjà 300 personnes. Sous le poids des passagers et des vagues, le grand bateau a fini par couler…

Pour la première fois dans l’histoire des USA, une femme noire, l’abolitionniste et ancienne esclave Harriet Tubman, figurera sur un billet de banque de 20 dollars. Une décision historique prise par le Trésor américain alors que le racisme n’a pas encore définitivement disparu dans l’Empire où les policiers continuent à tabasser les négro-africains. Ce qui n’a pas empêché Hillary Clinton de saluer la décision du Trésor.

OTAN-RUSSIE LA SOMME DE TOUTES LESPEURS L’Alliance atlantique renoue avec la Russie alors que le dernier conseil qui les avait réunis remontait à juin 2014, soit trois mois après l’annexion de la Crimée. L’OTAN avait alors suspendu toutes les formes de coopération pratique avec la Russie. Ce «réchauffement » paraît symbolique même si des sujets de grande importance sont au menu des discussions entre les 29 diplomates conviés à ce forum tels l’Afghanistan, l’Ukraine avec la mise en application complète des accords de Minsk. Moscou qui regrette « la politique inamicale de l’Otan à son égard », selon les termes du Premier ministre Dimitri Medvedev exprime aussi ses craintes liées au renforcement de la présence militaire alliée à ses frontières baptisée « présence avancée » par l’OTAN dont le prochain sommet se réunira en Pologne. Cette relance du dialogue intervient, rappellet-on à l’heure où les interceptions « risquées » se multiplient entre avions et navires alliés et les appareils et sous-marins russes. Les Occidentaux qui entendent préconiser la réduction des risques et la prévisibilité ne pouvaient que rouvrir les canaux diplomatiques et militaires avec Moscou. Reste à savoir si l’ouverture otanique dissipera les craintes de la Russie. « La confiance a été détruite, et il sera très difficile de la restaurer », a déclaré Dimitri Peskov, qui parle de « triomphe de la méfiance mutuelle absolue ».

PRIMAIRES AMÉRICAINES : NEW YORK RÉUSSIT À CLINTON ET… TRUMP ! Tout est-il désormais plié à un an de la Présidentielle aux Etats Unis d’Amérique ? En attendant celles de l’automne, les primaires qui viennent de s’achever, à New York, auront confirmé le leadership de Donald Trump, côté républicain, et de Hillary Clinton, côté démocrate. C’est donc un grand pas de franchi, pour les deux candidats, vers l’investiture pour l’élection présidentielle du 8 novembre, aux Etats-Unis. Le milliardaire américain aurait obtenu 60 % des voix, contre 25,2 % pour le gouverneur de l’Ohio John Kasich et 14,8 % pour le sénateur du Texas Ted Cruz. Réussira-t-il pour autant à damer le pion à ses détracteurs lors de la convention du

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Grand Old Party, l’été prochain à Cleveland ? Quant à Hillary Clinton, elle aurait raflé la mise dans l’Etat de New York, où elle a été sénatrice durant deux mandats, avec 57,7 % des voix, contre 42,3 % pour Bernie Sanders, pourtant natif de Brooklin. Mais l’investiture du parti n’interviendrait pour l’ex-Première Dame que lors de la convention de Philadelphie prévue en juillet. Reste à M. Trump comme à Mme Clinton de confirmer leur suprématie le 26 avril lors des consultations organisées dans le Connecticut, le Delaware, le Maryland, la Pennsylvania et à Rhode Island.


PANORAMA INTIFADA

KABOUL ATTAQUÉE

DU COUTELAS AUX BOMBES

LE RÉVEIL DES TALIBANS

Le mouvement de la résistance islamique Hamas a salué l’opération de Jérusalem contre un autobus israélien à l’ouest de Jérusalem. Le porte-parole du Hamas, Sami Abu Zuhri, a dit dans une brève déclaration que l’opération est une réponse naturelle aux crimes israéliens, en particulier les exécutions sur le terrain et la profanation de la mosquée al-Aqsa. La bombe qui a explosé dans le bus a fait au moins 21 blessés, dont deux graves, et provoqué un important incendie. Un autre bus et une voiture à proximité ont été endommagés par l’explosion survenue dans la rue Moshé Baram, proche de la ligne séparant le secteur occidental de la ville du secteur oriental à majorité palestinienne. Cette opération tranche avec le mode opératoire observé depuis quelques mois lorsque le soulèvement « habba » était ponctué d’attaques à l’arme blanche ou via des voitures bélier. De quoi donner du fil à retordre aux Israéliens qui rejettent toute solution politique au conflit qui dure depuis 1948.

BRÉSIL: CA SENT LE ROUSSI POUR DILMA Manifestations monstre, coalition éclatée et votes sanction… Voilà qui ponctue la vie politique brésilienne en proie à une grande instabilité sur fond de « triche » et de scandales de corruption. Pourtant, la présidente brésilienne ne désarme pas. Dilma Rousseff a réagi au vote des députés brésiliens pour sa destitution en se déclarant « indignée par cette décision », et être une « victime d’une profonde injustice». D. Roussef qui a cherché à placer son mentor Lula à ses côtés, sans succès, reste ferme face à ce que ses partisans appellent « coup d’état ». «Mais je ne me laisserai pas abattre, le combat ne fait que commencer. J’ai le courage, la force nécessaire pour affronter cette injustice.», a martelé la Présidente. D. Rousseff a rappelé que les tours de passe-passe budgétaires qui lui sont reprochés «ont été pratiqués par tous les présidents avant moi et ont été considérés légaux». «On me réserve un traitement qui n’a été réservé à personne», s’est-elle insurgée… Suspens continu…

Un attentat-suicide à la voiture piégée et une fusillade ont fait au moins 30 morts et 320 blessés dans le centre de Kaboul. L’attaque a été revendiquée par les talibans, une semaine après avoir annoncé le début de leur « offensive de printemps » baptisée « Opération Omari », en mémoire du fondateur du mouvement le Mollah Omar. Les talibans ont revendiqué cet attentat-suicide contre la police et l’armée afghanes, ainsi que les services de renseignement, qualifiés de « larbins » des forces étrangères déployées en Afghanistan, depuis la chute de leur régime fin 2001. L’attentat visait un bâtiment appartenant au gouvernement afghan dans le centre de la capitale. Et «des combattants sont entrés à l’intérieur du complexe», selon Zabiullah Moudjahid, porte-parole habituel des talibans. Des tirs nourris à proximité d’un bâtiment que le NDS, les services de renseignement afghans, disent avoir occupé par le passé, ont été entendus. De même source, le complexe serait aujourd’hui utilisé par la présidence.

OCI: TERRORISME DIVERGEANT Un «Interpol islamique», telle est la proposition que le président turc Recep Tayyip Erdogan a faite aux 56 dirigeants musulmans qui ont participé au 13e sommet de l’Organisation de la conférence islamique (OCI) à Istanbul, en Turquie. L’objectif consisterait à pouvoir échanger des informations relatives aux personnes suspectées d’actes de terrorisme et de mettre en place une stratégie de lutte contre ce fléau au niveau des pays musulmans. Une structure devant aussi faciliter l’échange éventuel d’informations entre les pays membres, l’entraînement et le déploiement rapide de forces armées pour faire face à toute menace terroriste. Reste à savoir si la proposition faite par le Nouveau Calife trouvera l’écho auprès des membres de l’Organisation qui ne partagent pas tous les mêmes convictions en la matière. La classification des organisations terroristes obéissant à des impératifs divergeants…

U.A : ALGER AUX AGUETS ! Finalement, l’Algérie n’a pas présenté de candidat pour succéder à la Sud-Africaine Nkosazana Dlamini-Zuma à la tête de l’Union africaine (UA), elle y a finalement renoncé. Même si le nom de Ramtane Lamamra, actuel ministre des Affaires étrangères, circulait depuis des mois comme « le candidat idéal » pour une Algérie qui entend imposer sa puissance au sein de l’UA. Le retrait algérien s’expliquerait par la volonté de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) de rempiler pour un deuxième mandat.

Mais le forcin a été exercé pour le maintient de la candidature de Smaïl Chergui à sa propre succession au poste de commissaire à la paix et à la sécurité. L’élection du nouveau président de la Commission qui doit avoir lieu à Kigali, en juillet, départagera les trois candidats en lice : Pelomini Venson-Moitoi, la ministre des Affaires étrangères du Botswana soutenue par la SADC ; Agapito Mba Mokuy, son homologue équato-guinéen ; et Specioza Wandira-Kazibwe, l’ancienne vice-présidente ougandaise.

PALESTINE DERRIÈRE LES BARREAUX… Les palestiniens ont célébré le 17 avril la journée du prisonnier. Une journée désormais commémorée depuis 1975… Et qui permet de faire le point sur la situation des exactions israéliennes. Le dernier décompte fait étant de 7000 Palestiniens et Palestiniennes à croupir dans les geôles israéliennes dans des conditions inhumaines. Dans la population carcérale, 400 enfants et 69 femmes y figurent. Quant aux prisonniers dits «administratifs», détenus sans inculpation ni jugement pour des périodes de 6 mois renouvelables indéfiniment, ils ont atteint le nombre de 750.

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PANORAMA OBAMA À LANGLEY DAECH EN TÊTE Barack Obama a effectué le 13 avril dernier une visite rare au siège de la CIA, à Langley en Virginie, pour discuter de la campagne à mener contre le groupe Etat islamique au Moyen-Orient et en Afrique. L’hôte de la Maison Blanche qui était accompagné de ses principaux conseillers responsables de la sécurité nationale aux Etats-Unis, dont le vice-président Joe Biden et John Kerry, s’est réuni deux heures durant avec plusieurs dizaines de fonctionnaires de la célèbre agence US. Il a tenu un discours rassurant aux acteurs de la guerre de l’ombre. « En Irak et en Syrie, l’EI est sur la défensive. Notre coalition de 66 membres, y compris nos partenaires arabes, est sur l’offensive. Nous avons le vent dans le dos. Nous continuons d’éliminer leurs dirigeants, leurs commandants et ceux qui préparent des attaques terroristes. Chaque jour, leurs chefs se réveillent en sachant que ce sera peut-être leur dernier », rappelle le président américain. Pour Obama, « cela reste un combat difficile et complexe, mais nous allons le gagner ».

NIGÉRIA : FORCING ANTI-DJIHADISTE ? Khalid al-Barnawi, l'un des chefs d’Ansaru, un groupe armé islamiste fondé en 2012, est tombé entre les mains de l’armée nigériane, dans le centre du pays, dans l’Etat du Kogi. Faisant partie de la liste des terroristes les plus recherchés par les Etats-Unis, ce djihadiste représenterait le maillon fort dans la nébuleuse islamiste nigériane en faisant le lien entre les groupes nigérians et ceux d'Afrique du Nord et du Moyen-Orient. Pourtant, le groupe Ansaru est moins actif que Boko Haram et sa dernière action revendiquée remonte à un an lors une attaque meurtrière contre des soldats dans l'Etat de Bauchi. Si Abuja fait grand cas de cette arrestation, voir on y évoque la fin d’Ansaru, il est trop tôt pour l’affirmer. Selon des spécialistes, la capacité de nuisance de ce groupe n’est pas à minorer, lui qui serait capable de mener des opérations jusqu’au Sud du pays, là où les intérêts économiques sont importants, alors que Boco Haram reste replié sur la région Nord-Est du pays. - Nouveau pas dans le processus de normalisation des relations entre l’entité sioniste et les pays arabes, avec la réception le 4 avril dernier, de M. Ronald Lauder, actuel Président du Congrès Juif Mondial, par le souverain du Bahreïn. Ronald Lauder, puissant milliardaire israélo-américain, Président ultra-sioniste du Congrès juif mondial depuis 2007 et farouche opposant à la reconnaissance de la Palestine par l’ONU, a rencontré le Roi Hamed ben Issa Al Khalifa, après avoir été reçu la semaine dernière, au Caire, par le Président égyptien Abdel Fatah Sissi.

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AU LIBAN : « ZORRO » ABATTU « Zorro », a été assassiné, à Saïda alors qu’il se rendait à Aïn el-Héloué où il devait se réunir avec les membres du Comité populaire palestinien chargé de la sécurité des camps. Une charge piégée, placée sous le siège de sa voiture, a explosé au niveau du rond-point des Américains, à proximité de deux casernes de l’armée, l’une abritant des soldats chargés de la sécurité à Saïda et l’autre accueillant les services de renseignements de la ville. Depuis plusieurs semaines, les habitants de Saïda s’attendent au pire dans le camp de Aïn el-Héloué. Le dernier round de combats, qui s’était achevé il y a une dizaine de jours, avait duré une semaine.À l’intérieur de Aïn el-Héloué, le Fateh est divisé en plusieurs factions, il est donc plus difficile de négocier un cessez-le-feu avec la branche armée de l’OLP qui n’a plus de position unifiée. La même situation existe du côté des factions jihadistes du camp. En outre, selon diverses sources à Saïda, le Fateh et les islamistes ont reçu récemment des armes supplémentaires. Le camp de Miyé w Miyé était tenu par le Fateh jusqu’en 2014 lorsqu’une faction islamiste baptisée Ansar Allah, a commencé à prendre de l’envergure. En 2014, des combats l’avaient opposée au Fateh. Fathi Zeidan, qui était un homme consensuel et apprécié de tous dans les camps de Saïda, devait occuper plus tard un poste de responsabilité au sein du Fateh au Liban.

DARFOUR RÉFÉRENDUM CONTESTÉ La partition du Soudan n’en finit pas… Ou presque. Ainsi, le référendum sur le statut administratif du Darfour s’est déroulé dans cette région de l’ouest du Soudan en proie à des troubles entre le pouvoir central et les rebelles. Sauf que les principaux groupes contestataires ont annoncé leur boycott de la consultation. Les électeurs doivent décider s’ils veulent conserver la structure actuelle du Darfour (divisé en cinq Etats) ou la transformer en une seule et même région. La première option est soutenue par le président Omar El Béchir critiqué pour sa propension à vouloir renforcer davantage son emprise sur cette région d’environ 500 000 km2 dont le sous-sol recèle d’importantes richesses.


BDS DANS LE VISEUR D’ISRAËL INQUIÉTANT CIBLAGE !

TCHAD AGITATION POLITIQUE

Une nouvelle rébellion baptisée Front pour l’alternance et la concorde au Tchad (FACT), opposée au régime du président Idriss Déby Itno, vient de voir le jour au Tchad. Le FACT «a pour objectif la réalisation des aspirations fondamentales du peuple tchadien (...), la concrétisation de l’alternance politique», selon le communiqué. Cette rébellion est une branche dissidente de l’ex-Union des forces pour la démocratie et le développement (UFDD), mouvement fondé par l’un des plus influents chefs rebelles, le général Mahamat Nouri.

AFRIQUE LE PAM INQUIET De hauts responsables de l’ONU tirent la sonnette d’alarme. Ils ont prévenu dernièrement qu’il était de plus en plus difficile de répondre aux besoins humanitaires en Afrique et qu’il fallait développer des façons de travailler différemment, lors d’une réunion de l’Assemblée générale de l’ONU. «Le contexte humanitaire a changé. Il y a dix ans, nous étions tous concentrés sur la réinstallation et la résilience», a souligné la directrice exécutive du PAM. «Dix ans plus tard, l’augmentation des conflits (…) prolonge non seulement les crises existantes mais crée de nouveaux déplacements à l’intérieur de l’Afrique et dans les régions voisines», a-t-elle noté.

L’Observatoire des droits de l’homme euro-méditerranéen est très inquiet de «l’appel» du ministre israélien des Transports et de l’Intelligence, Yisrael Katz, à «un effort de prévention ciblé» contre les leaders et les activistes du mouvement Boycott, Divestment and Sanctions (BDS). Cet appel a été annoncé lors de la première conférence nationale israélienne pour combattre la pression montante de BDS, campagne mondiale ayant pour but d’augmenter la pression politique et économique sur Israël pour le respect des droits des Palestiniens. Katz a fait allusion à des assassinats ciblés pour arrêter les leaders et activistes de BDS. Il l’a justifié en accusant le BDS de travailler en partenariat avec des éléments hostiles à Israël. Katz est allé encore plus loin dans son accusation en concluant qu’Israël peut légitimement répondre à l’activisme de BDS par «l’isolement des activistes et la transmission d’information les concernant aux services de renseignements du monde entier». Pour les animateurs de l’Observatoire des droits de l’homme euro-méditerranéen, il s’agit bien évidemment d’«une incitation particulièrement alarmante». «Que l’on approuve ou non les buts de BDS, cela reste une forme de protestation pacifique pratiquée dans différents pays du monde entier, particulièrement en Europe et aux Etats-Unis» explique Ramy Abdu, président d’Euro-Med. «L’appel du ministre israélien est, en fait, une incitation à violer les droits de l’homme et les normes du droit international concernant la sécurité des personnes», a-t-il poursuivi.

OBAMA À DJEDAH ET LES DROITS HUMAINS ? Onze organisations non gouvernementales pressent le président américain, Barack Obama, à aider à la libération des défenseurs des droits de l’homme dans les monarchies du Golfe, dont il a rencontré les dirigeants en Arabie Saoudite. Dans une «lettre ouverte» publiée par le Gulf Center for Human Rights (GCHR), les signataires exhortent le Président US à «faire pression pour la libération de tous défenseurs des droits de l’homme détenus» dans les monarchies du Golfe «uniquement en raison de leurs activités pacifiques et légitimes».

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ÉCONOMIE &

MARCHÉS

D QUÊTE D’ÉMERGENCE

PROBLÉMATIQUE PANNE !

ANS UN ENVIRONNEMENT MARQUÉ PAR DE NOMBREUSES INCERTITUDES, LA RÉSILIENCE DE L’ÉCONOMIE MAROCAINE EST MISE À RUDE ÉPREUVE COMME EN TÉMOIGNE LE PEU D’ÉLAN QU’ELLE ENREGISTRE EN CE PREMIER TRIMESTRE. DANS CE SENS, TOUS LES PRONOSTICS OFFICIELS PRÉVOIENT UNE DÉCÉLÉRATION DE LA CROISSANCE EN 2016, MÊME SI À FIN 2015 LES GRANDS INDICATEURS AFFICHAIENT DE BONS SCORES, DANS UN CONTEXTE MARQUÉ PAR LA CHUTE DES PRIX DU BARIL DE PÉTROLE ET LA REPRISE DES EXPORTATIONS. LE MAROC QUI DEMEURE TRÈS VULNÉRABLE AUX EFFETS CLIMATIQUES, PLUS PARTICULIÈREMENT À LA SÉCHERESSE QUI CONTINUE D'EXERCER UNE IMPORTANTE PRESSION SUR LE PIB, A VU AINSI SES PERSPECTIVES DE CROISSANCE BALLOTÉES D’UNE INSTITUTION À L’AUTRE. CERTAINES, COMME LE FMI OU LA BANQUE MONDIALE, CONTINUENT DE NOURRIR L’ESPOIR QUANT À LA RELANCE AVEC DES PRONOSTICS DE CROISSANCE DU PIB DE L’ORDRE DE 2.3% ET 1.7% RESPECTIVEMENT EN 2016, ALORS QUE LES INSTANCES NATIONALES COMPRIMENT L’ÉVOLUTION DU PIB À 1% POUR BANK AL-MAGHRIB, ET À 1,3% POUR LE HCP. DES CHIFFRES QUI DEMEURENT LOIN DES PRÉVISIONS DE 3% DE CROISSANCE DU GOUVERNEMENT CONTENUES DANS LA LOI DE FINANCES 2016. DANS LA RÉALITÉ, ET PRIS DANS LEUR ENSEMBLE, LES DIVERS INDICATEURS CONJONCTURELS TÉMOIGNENT DU RALENTISSEMENT DE LA CROISSANCE. DE LA PLUVIOMÉTRIE AU MORAL DES PATRONS, EN PASSANT PAR LA DEMANDE INTÉRIEURE OÙ ENCORE LE FINANCEMENT BANCAIRE, TOUS LES VOYANTS TOURNENT AU ROUGE ET LE CONSTAT EST SANS APPEL : UN RALENTISSEMENT À TOUT LES ÉTAGES QUI APPELLE À UNE VRAIE REFONTE DU MODÈLE ÉCONOMIQUE DU PAYS AVEC, À LA CLÉ, LA PRISE EN COMPTE DES FACTEURS ENDOGÈNES DE CROISSANCE QUI PEUVENT CONSTITUER DES RELAIS D’UNE CROISSANCE DURABLE ET RÉSILIENTE. CE QUI NE SAURAIT SE FAIRE SANS L’ACCÉLÉRATION DU TRAIN DES RÉFORMES STRUCTURELLES QUI CONTINUENT, EN ACCUSANT RETARD SUR RETARD, DE PÉNALISER LE CLIMAT GÉNÉRAL DES AFFAIRES TOUT EN OFFRANT PEU D’ATTRAIT AUX INVESTISSEURS DÉSIRANT CONFORTER LE CHOIX DU MAROC COMME HUB AFRICAIN.

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ECONOMIE CROISSANCE ÉCONOMIQUE EN PANNE par :

LES « NON-DITS » DE A. JOUAHRI C’est en faisant preuve de grande lucidité que le Wali de la banque centrale a confirmé la panne qui s’est saisie de l’économie du pays. En dépit des éclaircies conjoncturelles, lorsque la clémence du ciel est de la partie, les moteurs d’une croissance structurellement créatrice de richesse et d’emplois semblent à bout de souffle. Les prévisions de croissance du PIB pour 2016 le confirment.

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e Maroc renoue avec le plus mauvais taux de croissance vécu depuis la fin des années quatre-vingt-dix a affirmé, le 22 mars dernier, Abdelatif Jouhari, le gouverneur de Bank Ai-Maghrib. Après une performance de 4,2% en 2015, portée par la conjonction de facteurs temporaires positifs, notamment une bonne campagne agricole et un faible coût de l’énergie, les moteurs de l’économie tourneront au ralenti en 2016 avant de reprendre en 2017. Sa prévision pour 2016 a été revue à la baisse, soit 1% du PIB, sur la base des estimations de la production céréalière qui glisserait vers un plancher de 38 millions de quintaux (contre 70 millions annoncés en décembre). Et pour cause, le retard des pluies qui serait très dommageable pour l’agriculture qui constitue 14% du PIB et emploie près de 40% des actifs. Un constat qui n’a pas manqué de

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ranimer les questions sur la capacité de l’industrie et des services à soutenir l’économie en cas de déficit pluviométrique, le Plan vert n’étant pas encore assez efficient pour se jouer des contraintes climatiques. A. Jouahri qui s’exprimait face aux Patrons, dans le cadre du Conseil national de l’entreprise organisé à Agadir, a dévoilé un diagnostic des plus alarmants des secteurs secondaire et tertiaire. Chiffres à l’appui, il a démontré comment ces secteurs ont stagné ces cinq dernières années. Et ce, indépendamment de l’éclosion des nouvelles branches industrielles tournées vers l’export (automobile, aéronautique ou pharmaceutique), dont le poids significatif n’est pas encore palpable : «Nous n’avons pas pu cerner l’impact de cette performance à l’export sur l’emploi et sur la croissance, ni mesurer le taux d’intégration», a soutenu A. Jouahri lors de son passage dans la capitale du Souss.

RALENTISSEMENT GÉNÉRALISÉ

Selon la présentation servie sur place, la reprise lente de l’activité économique dans la zone euro avec un


niveau de chômage qui reste élevé, notamment chez les principaux partenaires du royaume, se traduit par l’atonie de la demande étrangère adressée au Maroc. Cette synchronisation du cycle d’activité se traduit plus côté croissance non agricole. Outre les effets du choc de 2009, la croissance non agricole s’est inscrite sur un nouveau palier bas oscillant autour de 3% contre 4,8% en moyenne entre 2000 et 2008. «La croissance des industries de transformation a ralenti de 3,4% entre 2000 et 2008 à 0,9% sur la période 2012-2015» a affirmé le patron de BAM, rappelant que l’emploi dans le secteur s’est inscrit sur une tendance baissière depuis 2009. Pis, la part de ces activités dans le PIB est passée de 17% entre 2000 et 2007 à 15,5% sur la période 2008-2014 et de 12,8% à 11,9% dans l’emploi. La morosité dont pâtit l’industrie semble s’étendre aux autres pans de l’économie. Dans ce sens, et après plusieurs années de dynamisme, le BTP a fortement décéléré, sa croissance moyenne étant revenue de 7,5% entre 2000 et 2007 à 4,3% entre 2008 et 2011 et à 1,4% entre 2012 et 2015. La décélération de ce secteur qui constitue traditionnellement un refuge pour les jeunes sans diplôme s’est traduite par des pertes d’emploi sur la période 2012-2014, avant de reprendre légèrement en 2015. Même son cloche côté secteur tertiaire. Ce dernier qui reste toutefois le secteur moteur de la croissance connait une forte décélération bien que sa part s’est améliorée de 51,3% entre 2000 et 2007 à 51,9% entre 2008 et 2014 dans le PIB et de 35,4% à 38,6% dans l’emploi. Une décélération dont l’image pourrait être celle du secteur du tourisme qui continue de pâtir de l’atonie de l’activité des pays partenaires et du climat d’insécurité régional.

UNE CROISSANCE SANS EMPLOI

Autant dire que dans ses fluctuations anémiques, l’économie nationale génère de moins en moins d’emplois. Le nombre de créations nettes est passé de 168 mille en moyenne entre 2001 et 2008, à 80 mille entre 2009 et 2012 pour chuter à 56 mille entre 2013 et 2015 : «Après la baisse tendancielle entamée en 1999, le chômage s’est inscrit en hausse depuis 2012, passant de 8,9% en 2011 à 9,9% en 2014 et ce, malgré la baisse sensible du taux d’activité», affirme le gouverneur de BAM. Les services restent le pre-

mier pourvoyeur d’emplois mais le rythme de création s’essouffle. Les emplois dans ce secteur restent précaires, notamment dans le «commerce et réparation» et les «services personnels et domestiques». S’agissant du sous-emploi, sa hausse entamée depuis le troisième trimestre 2013, avec un taux passant de 10,3% à 11,1%, atténue quelque peu l’aggravation du taux de chômage aussi bien en milieu urbain que dans le rural. Par secteur d’activité, les services ont connu la plus importante progression du taux de sous-emploi avec 1,2 point de pourcentage à 10,7%, suivis par l’agriculture avec 0,9 point à 10,8% et l’industrie avec 0,5 point à 8,2%. Le secteur du BTP, qui demeure le plus concerné par ce phénomène, a accusé, en revanche, une baisse de 0,5 point à 17,6%. Pour l’ensemble de l’année 2015, le

XX XXXXX XXXX XX taux de chômage a reculé de 9,9% à 9,7% dans un contexte de baisse du taux d’activité de 48% à 47,4% parallèlement à une faible création d’emplois de 33.000 postes. Ces nouveaux postes sont le résultat d’une augmentation du volume d’emploi de 32.000 postes dans les services, de 18.000 postes dans le BTP, de 15.000 dans l’industrie y compris l’artisanat et d’une perte de 32.000 postes dans le secteur agricole. Enfin et afin de stabiliser le taux de chômage à son niveau de 2015, A. jouahri estime que les créations nettes d’emplois devraient avoisiner 160 000 postes en moyenne annuelle.

UNE CONFIANCE À RECONQUÉRIR

A côté de la baisse de 13,8% de la valeur ajoutée agricole, la stagnation du non agricole à 2,9%, la croissance devrait aussi pâ-

tir de la décélération de la consommation finale des ménages, sous l’effet, particulier, de l’affaiblissement des revenus agricoles. De même, le rythme de croissance de l’investissement devrait ralentir, comme en témoigne la décélération du crédit au secteur non financier, traduisant l’attentisme des opérateurs privés, en lien avec les incertitudes entourant les perspectives de l’économie nationale ainsi que le manque de dynamisme de la consommation privée. Un attentisme contre lequel BAM a sorti plusieurs de ses instruments monétaires sans pour autant réussir à inverser la tendance. Du conventionnel comme la baisse du taux directeur au non conventionnel tel le Fonds de soutien financier aux TPME, Jouahri a passé en revue les multiples actions de son institution pour ranimer le tissu productif du pays et sa demande de financement. Pour le patron de BAM, la prochaine étape serait la transition vers un régime de change plus flexible. Flexibilité qui ne peut être que graduelle, nécessitant un certain nombre de prérequis dont des équilibres macro-économiques maîtrisés de façon permanente, en particulier budgétaire, un niveau suffisant des réserves de change, un secteur bancaire solide, des opérateurs bien préparés en matière de gestion des risques de change et une stratégie de communication appropriée pour accompagner la transition… Le tout pour mieux préparer les opérateurs, en particulier les entreprises exportatrices. Il a aussi rappelé la rencontre organisée avec la CGEM, les différentes fédérations professionnelles et le GPBM et qui s’est soldée par plusieurs mesures à application immédiate mais, surtout, l’élaboration d’un mémorandum à adresser au Gouvernement et portant les doléances du secteur privé (délais de paiement ; participation des PME aux marchés publiques ; statut d’auto-entrepreneur ; financement des collectivités territoriales ; création d’un fonds de restructuration des entreprises). Pour A. Jouahri, l’ensemble de ces actions ont pour but final de concourir à soutenir la compétitivité du pays et, en fin de compte, à améliorer la croissance et la création d’emploi. Tout un « package » nécessairement subordonnée au maintien de la confiance des opérateurs économiques, en particulier les investisseurs. Le changement de modèle économique attendra, donc…

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ECONOMIE CROISSANCE POTENTIELLE Par: A.M

LES MARGES À INVESTIR Faire le distinguo entre ce qui relève de la conjoncture et ce qui relève de tendances plus profondes, la mesure de la croissance potentielle de l’économie est essentielle pour la conduite de la politique économique, tant dans sa composante conjoncturelle (réponse aux chocs de court terme) que structurelle (réformes permettant d’augmenter le potentiel de croissance). Pour nombres d’experts, le Maroc roule en sous régime et, faute d’investissement et de bonne gouvernance, le gap continue de se creuser entre sa croissance potentielle et celle effective pénalisant son accès à l’émergence.

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bserver la croissance économique ne suffit pas pour se faire une idée de la dynamique de fond d’une économie dans le sens où beaucoup d’événements peuvent influer ponctuellement sur la croissance : comme un hiver particulièrement aride, une augmentation ponctuelle des dépenses publiques, une récession chez un partenaire commercial... Ainsi l’image qui en ressort est floutée d’où l’intérêt du calcul de la croissance potentielle : le PIB GRAND GAP IL Y A ENTRE réel mesure la croissance telle qu’elle est à travers la somme des valeurs ajoutées tandis que le PIB potentiel PIB RÉEL ET PIB renseigne sur le niveau de croissance POTENTIEL. QUID DU qu’une économie pourrait atteindre si toutes ses ressources productives RÉAJUSTEMENT ? étaient exploitées. Structurellement, la croissance économique effective «dérive» de la croissance potentielle, si bien que ce concept constitue à la fois un instrument d’analyse économique, utile à la gouvernance budgétaire et

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monétaire, en plus d’être un instrument permettant de formuler des prévisions économiques à moyen et long terme, par-delà les vicissitudes du cycle économique, ainsi que des recommandations de nature structurelle. L’objectif étant d’en améliorer les perspectives en termes de taux d’activité de la population en âge de travailler ou de recherche et développement. Pour le cas du Maroc, le pays pâtit d’une sous-exploitation de ses ressources, qui représentent autant de marges de croissance pour relancer son économie. Dans ce sens, l’économie marocaine affiche un taux de croissance qui demeure en deçà de son potentiel, nourri surtout par la consommation (publique et privée), alors même que le Maroc peut se targuer d’afficher un taux d’investissement parmi les plus élevés au monde : le taux de croissance du PIB a atteint en moyenne 4% durant les 10 dernières années alors que sa croissance potentielle est de 7 à 8 %. Ce qui en dit long sur le gap charrié par la capacité inutilisée de l’économie.


INVESTISSEMENT ET RENDEMENT Si le Maroc a pratiqué, depuis son indépendance, une politique d’investissement massif visant la mise à niveau du secteur agricole et l’installation d’une activité industrielle de substitution à l’importation et de promotion des exportations, force est de constater que la rentabilité des ressources financières mobilisées demeure loin des objectifs escomptés. Dans ce sens, une récente étude du Haut-commissariat au plan décortique le rendement du capital physique accumulé durant des décennies. Selon les experts de l’institution, les années 2000, caractérisées par une politique volontariste d’investissement, ont connu une dynamique du processus d’accumulation du capital physique, en rupture avec les tendances passées. Le taux d’investissement est passé de 24,8% du PIB en 1999 à 35,1% en 2010 et à 32% en 2014. Le stock de capital s’accroit, pour sa part, de 6,2% par an, au lieu de 4,6% observé dans les années 80-90, pour représenter ainsi trois fois le PIB, et 3,4 sur les cinq dernières années de cette phase. Cependant, et malgré cet effort d’accumulation du capital durant la décennie 2000, la croissance économique, bien qu’en nette amélioration par rapport aux années 80-90 dominées par le Programme d’Ajustement Structurel (PAS), n’a pas connu le même rythme d’évolution que l’investissement. Avec un taux moyen annuel de croissance de 4,4% par an durant cette période et un investissement de 6,2%, l’efficacité marginale s’est détériorée. Le coefficient marginal du capital (ICOR) se situe à près de 7 unités en 2014. Or, avec un taux d’investissement d’environ 28% du PIB, des « pays émergents et en développement » ont réalisé un taux d’accroissement annuel moyen de près de 6% durant la période 2000-2013. Ce qui signifie que le pays n’a pas encore accumulé suffisamment de capital physique et le potentiel de croissance disponible n’est pas encore exploité. Ceci étant, l’évaluation du rendement de l’investissement selon l’évolution de la productivité de l’économie fait ressortir une amélioration notable de la création de la richesse au cours des années 2000. Le PIB par actif occupé s’est accru de 3,4% par an, entre 2000 et 2014, au lieu de 1,7% au cours des années 60-70 et 1% durant

la période du PAS. Cette amélioration de la productivité de l’économie a été réalisée sous l’effet de l’accroissement de l’intensité capitalistique, c’est-à-dire le renforcement du stock de capital disponible par actif occupé. Cela sans occulter la productivité globale des facteurs, c’est-à-dire une meilleure combinaison des facteurs de production grâce à l’amélioration du cadre sociétal et institutionnel de la gestion économique du pays.

Dans cette perspective, la croissance économique potentielle du Maroc devrait se situer globalement entre 7 et 8% en moyenne annuelle. Mais à l’impossible nul n’est tenu…

EFFORTS À MULTIPLIER L’étude comparative sur le rendement de l’investissement produite par le HCP démontre que le Maroc est appelé à poursuivre le processus d’accumulation de son capital physique. Quel que soit le rendement de l’investissement, l’amélioration de l’intensité capitalistique accroit la productivité du travail et, partant, la richesse nationale, l’emploi et les revenus. Une analyse en benchmark du niveau d’accumulation du capital montre que le Maroc n’a pas encore atteint le niveau observé dans d’autres pays comparables. L’intensité capitalistique de la Turquie représente deux fois celle du Maroc alors que celles de la Corée du Sud et de la Malaisie sont de 6,3 et 3,5 fois respectivement. Aussi, ne faut-il jamais être tenté de résoudre les contraintes du financement de l’économie par la baisse de l’investissement au lieu d’une politique favorable à l’amélioration de l’épargne nationale. Dans ce cadre, le Maroc est appelé à revisiter l’allocation sectorielle des investissements afin de valoriser les larges marges de croissance et d’emploi disponibles dans des secteurs où les taux d’investissement sont en-deçà de leur contribution à la valeur ajoutée nationale. Ce qui est de nature à engager le pays dans une réforme profonde de ses structures économiques et une ouverture sur un nouveau modèle de croissance donnant aujourd’hui des signes évidents d’essoufflement. Dans ce sens, l’approche de la croissance endogène montre que la transformation des structures économiques au Maroc, confortée par les intensifications capitalistiques dans l’agriculture et l’industrie, tout en étant accompagnée par la poursuite de l’accumulation du capital humain et l’amélioration de la gouvernance, permettraient, à terme, des gains de croissance de plus de 3 points.

CONTRE L'ATONIE ? UN NOUVEAU MODÈLE DE CROISSANCE EST À DÉFINIR!

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ECONOMIE CONJONCTURE Par: A.M

MOROSITÉ CONFIRMÉE PAR LE HCP Selon la note de conjoncture du HCP, la croissance économique aurait sensiblement ralenti au premier trimestre 2016, s’établissant à 1,7%, en rythme annuel, au lieu de 5,2% un trimestre auparavant. Ce ralentissement aurait été, principalement, le fait de la contraction des activités agricoles, alors que hors agriculture, la valeur ajoutée aurait progressé de 2,5%, en variation annuelle, au lieu de 3% au quatrième trimestre 2015.

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elon les derniers indicateurs collectés jusqu’à fin février 2016, ainsi que des estimations sectorielles établies pour le premier trimestre 2016, la croissance économique nationale se serait établie à 1,7% au premier trimestre, rapporte le HCP, au lieu de 5,2%, lors du trimestre précédent. Dans ELLE BOITE, L'ÉCONOMIE le détail, la dynamique de la croissance agricole se serait heurtée, en 2016, à NATIONALE, DONT LA des aléas climatiques ayant particulièCROISSANCE EST TIRÉE EN- rement réduit l’installation et le développement des semis d’automne. La CORE, PAR L'AGRICULTURE sécheresse qui se serait étalée sur les mois de novembre et décembre 2015 et janvier 2016, avec des déficits hydriques oscillant entre 57%, 94% et 82%, par rapport aux normales saisonnières, aurait réduit le potentiel de production des cultures de 17,6%, en comparaison avec la moyenne quinquennale. Les régions de Tensfit, du Tadla, du Souss, du haut et moyen Atlas en auraient

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été les plus sévèrement touchées. Le développement des cultures printanières et la reprise modérée des activités d’élevage, permis par le retour des conditions pluviométriques favorables à partir de la mi-février, et la mise en action des mesures de soutien des prix des aliments de bétail, auraient amorti, quelque peu, la chute de la valeur ajoutée agricole établie, au premier trimestre 2016, à -9,2%, en comparaison avec la même période de 2015.

DÉCÉLÉRATION DE L’INDUSTRIE ET DES SERVICES Quant aux activités non-agricoles, elles auraient été moins dynamiques au premier trimestre 2016, affichant une hausse de 2,5%, en variation annuelle, au lieu de 3% un trimestre auparavant. Cette décélération aurait été induite par une nette modération du rythme de progression des branches secondaires, dans le sillage du ralentissement conjugué des exportations et de la consommation des ménages. Les activités tertiaires


auraient, ainsi, continué à constituer le principal soutien de la croissance non-agricole, bien qu’en légère décélération par rapport au dernier trimestre 2015. Au sein des branches secondaires, ce sont principalement les industries manufacturières et électriques qui auraient connu un sensible mouvement d’inflexion. C’est ainsi qu’après avoir clôturé l’année dernière sur une performance de 4,5%, la valeur ajoutée industrielle aurait marqué un retour vers un rythme plus modéré, avoisinant les 2,9%, au premier trimestre 2016, en variation annuelle. Cette évolution aurait été, principalement, le fait des faibles performances des branches du textile et des autres industries, alors que l’agroalimentaire, la chimie et les IMME auraient conservé leur dynamique enregistrée à fin 2015, affichant des hausses respectives de 3,4%, 5,4% et 4,3%, en variations annuelles, tirées par l’amélioration de la demande extérieure. L’activité des mines se serait accélérée au premier trimestre 2016, atteignant 5,1%, en rythme annuel, au lieu de 2,1% le trimestre précédent. Ce regain de croissance aurait été, principalement, alimenté par le raffermissement de l’activité phosphatière, qui semble connaitre un nouveau cycle d’expansion sous l e double effet d’une demande industrielle locale favorablement orientée et des exportations en hausse continue depuis octobre 2015. En variation annuelle, la production du phosphate brut se serait améliorée de 6,1%, au premier trimestre 2016. En revanche, la production des métaux non-ferreux se serait ralentie suite au repli des expé-

ditions de plomb, de zinc et du cuivre, en ligne avec la baisse respective de leurs cours internationaux de 6,2%, 23,3% et 21,7%. De leur côté, les activités de construction se seraient accrues au premier trimestre 2016 de 1,7%, en variation annuelle, au lieu de 2,9% un trimestre auparavant. Cette progression aurait été particulièrement notable au niveau du bâtiment, comme en atteste le raffermissement de l’utilisation des matériaux de construction qui lui sont liés, notamment le bois, la peinture, le sable et le ciment, dont les ventes se seraient accrues de 5,2%. Cette évolution aurait été confirmée par les résultats des dernières enquêtes de conjoncture : les carnets de commandes des entrepreneurs du bâtiment auraient conservé leur évolution ascendante et leurs anticipations pour le premier trimestre 2016, s’inscrivant en hausse, alors qu’au niveau des gros œuvres, l’activité se serait plutôt tempérée, notamment au niveau de la construction des voies ferrées, des autoroutes et des réseaux fluides.

RALENTISSEMENT CONTINU L’économie nationale poursuivrait son ralentissement au deuxième trimestre 2016, sous l’effet d’une contraction de la production agricole, après une campagne 2015/2016 exceptionnelle. Le redressement des cultures à cycle végétatif court et des activités annexes à l’élevage, attribuable à une saison printanière relativement pluvieuse, ne suffirait pas à compenser la baisse des productions de céréales, de légumineuses et de cultures maraîchères.

Globalement, une baisse de 10,9% de la valeur ajoutée agricole serait prévue au deuxième trimestre 2016. Par ailleurs, et sous l’hypothèse d’une poursuite de l’amélioration de l’environnement international, notamment dans la zone euro, principal partenaire du pays, les industries exportatrices, en particulier l’automobile et l’agroalimentaire, devraient bénéficier d’une hausse de 4,4% de la demande mondiale adressée au Maroc, en variation annuelle. Le recul des cours des matières premières, dans un contexte d’offre mondiale excédentaire en particulier de céréales et des métaux industriels, jouerait en faveur d’un allégement du déficit commercial. L’activité des industries manufacturières devrait, ainsi, rester soutenue, affichant une hausse de 2,8%, au deuxième trimestre 2016, en variation annuelle. L’activité minière connaîtrait, en revanche, une légère baisse de régime, due au moindre affermissement de la demande étrangère adressée aux dérivés de phosphate, notamment aux engrais, et à la poursuite des faibles performances des métaux non ferreux. Quant aux services, leur valeur ajoutée croîtrait au même rythme que celui enregistré au début de 2016, contribuant pour presque moitié à la croissance économique globale. Dans l’ensemble, la valeur ajoutée hors agriculture devrait s’améliorer de 2,4%, au deuxième trimestre 2016, en variation annuelle, situant, ainsi la hausse du PIB global à 1,5%, au cours de la même période, au lieu de 4,3% une année auparavant.

PERSPECTIVES MED

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ECONOMIE COMMERCE EXTÉRIEUR Par : A.M.

LE DÉFICIT SE CREUSE

D

ans un contexte où le commerce mondial de biens aurait crû de 2,7%, au premier trimestre 2016, entravé par la faiblesse persistante des importations des pays émergents, la demande mondiale adressée au Maroc, toujours résiliente face à la modération du commerce mondial, se serait orientée en hausse de 3,5%, en glissement annuel, tirée notamment par celle en provenance des principaux partenaires européens. Cependant, les exportations de biens en valeur auraient ralenti au premier trimestre 2016, ne profitant que partiellement de l’orientation favorable de la demande extérieure. Toujours pilotées par les ventes de l’industrie agro-alimentaire et du secteur automobile, notamment du segment de la construction, les exportations n’auraient augmenté que de 2%, en variation annuelle, après 4,6% et 5,5% enregistrés deux trimestres auparavant. Hors automobile, les ventes extérieures auraient même légèrement reflué, influencées par la baisse

L’EFFET «CONSTRUCTION AUTOMOBILE» SE FAIT SENTIR

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PERSPECTIVES MED

des expéditions des engrais naturels et chimiques et des articles de la bonneterie. Les importations se seraient, pour leur part, redressées de 2,3%, après une baisse durant l’année 2015, alimentées par les acquisitions des biens de consommation (voitures de tourisme et médicaments), d’équipement (machines, appareils divers et voitures industrielles), des demi-produits (matières plastiques, papier et carton) et des produits alimentaires (céréales et sucre). En revanche et malgré la hausse des achats en tonnage des gasoils et fuels, du gaz de pétrole et autres hydrocarbures, en vue de compenser la suspension temporaire des importations de pétrole brut, suite à l’arrêt de la raffinerie la Samir, les importations de produits énergétiques auraient poursuivi leur tendance baissière, dans un contexte de reflux des cours mondiaux énergétiques. Le déficit de la balance commerciale se serait, ainsi, creusé, au premier trimestre 2016, de 3%, en glissement annuel, après sept trimestres d’allégement, en raison de la hausse des importations par rapport aux exportations. Cette évolution se serait traduite par une légère baisse du taux de couverture estimée à 0,2 point, pour atteindre 60,8%.


MASSE MONETAIRE

HAUSSE DE 5,7% DE L’ENCOURS DE M3

Selon les dernières statistiques monétaires de BAM, l’agrégat de monnaie M3 s’est soldé par une hausse de 5,7% à fin février 2016 pour se chiffrer à 1 130 Mrds Dhs. L’évolution de M3 recouvre une accélération de 6,3% des comptes d’épargne auprès des banques à 140,2 Mrds Dhs, une hausse de 7% de la monnaie fiduciaire à 191,4 Mrds Dhs, un accroissement de 8,3% des dépôts à vue auprès des banques à 453,4 Mrds Dhs et une progression de 8,9% des comptes à terme et bons de caisse auprès des banques à 170,1 Mrds Dhs. En revanche, les titres OPCVM monétaires ont enregistré un recul de 9,8% à 56,3 Mrds Dhs. Côté contrepartie, les créances nettes sur l’Administration Centrale se sont repliées de 4,6% à 140,9 Mrds Dhs, A contrario, les crédits bancaires ont progressé de 1,4% à 764,1 Mrds Dhs. S’agissant des réserves internationales nettes celles-ci ont bondi de 27,6% à 233,8 Mrds Dhs. Par catégorie de crédit, les prêts à la consommation se sont accrus de 5,2% à 46,8 Mrds Dhs, les crédits à l’équipement se sont affermis de 1,5% à 146,5 Mrds Dhs, les comptes débiteurs et crédits de trésorerie ont baissé de 4% à 166,7 Mrds Dhs et les crédits immobiliers se sont améliorés de 0,9% à 240,8 Mrds Dhs (+5,7% pour le crédit habitat et -10,9% pour le crédit à la promotion immobilière). Concernant les créances en souffrance, celles-ci se sont accentuées de 10% à 57,8 Mrds Dhs, se traduisant par un taux de contentieux de près de 7,6%.

450 M $ C’EST LE MONTANT DÉBLOQUÉ PAR LES USA DANS LE CADRE DU DEUXIÈME FINANCEMENT OCTROYÉ PAR LE PROGRAMME “COMPACT II” DU MILLENIUM CHALLENGE CORPORATION. CETTE CONTRIBUTION EST CONSACRÉE AU FINANCEMENT DE DEUX PROJETS: “ÉDUCATION ET FORMATION POUR L’EMPLOYABILITÉ DES JEUNES” ET “PRODUCTIVITÉ DU FONCIER”, ET DEVRAIENT BÉNÉFICIER À PRÈS DE 2,2 MILLIONS DE PERSONNES POUR LES DEUX PROCHAINES DÉCENNIES.

PRODUCTION BAISSE DE L’INDICE DES PRIX Selon le Haut-Commissariat au Plan (HCP), l’indice des prix à la production des industries manufacturières a affiché au titre du mois de février 2016 un recul de 0,1%, en glissement mensuel. Ce résultat intègre des replis de -1,5% de l’indice de fabrication d’équipements électriques, de -1,4% du raffinage et de celui l’industrie du papier et du carton et de -0,4% de la métallurgie. En revanche, des progressions ont été enregistrées au niveau des baromètres de l’industrie d’habillement (1%) la fabrication d’autres produits non métalliques (0,5%), de la fabrication de textiles (0,2%) et des industries alimentaires (0,1%). Pour ce qui est des indices de la « production et distribution d’électricité » et de la «production et distribution d’eau », ceux-ci ont connu une stagnation. Pour sa part, l’indice des industries extractives a affiché une légère hausse de 0,1%.

DETTE EXTERIEURE 30,4% DU PIB EN 2015 ! Selon la dernière publication de la direction du Trésor et des finances extérieures, l’encours de la dette extérieure publique marocaine augmente de 8,2% à 300,8 M Dhs à fin 2015, soit 30,4% du PIB contre 30,1% une année auparavant. Cette dernière est détenue à hauteur de 45,2% par les institutions internationales, 28,4% par créanciers bilatéraux, notamment les pays de l’UE (19,9%) et 26,4% par les Marchés Financiers Internationaux -MFI- et les Banques commerciales. Par emprunteur, le Trésor concentre 46,8% de l’encours global de la dette extérieure du Maroc, suivi des Etablissements publics (46,8%), du secteur bancaire (0,2%) et des collectivités territoriales (0,1%). Par devise, la dette extérieure est majoritairement libellée en Euro et en Dollar avec des parts respectives de 63,1% et de 23,6%. Enfin, les charges de la dette augmentent de 5,4% à 16,0 Mrds Dhs en principal et de 17,5% à 8,7 Mrds Dhs en intérêts tandis que les tirages diminuent de 29,1% à 52,7 M Dhs à fin 2015.

PERSPECTIVES MED

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ECONOMIE DEMANDE INTÉRIEURE Par : A.M.

CONSOMMATION EN BERNE

A

près avoir été relativement soutenue au quatrième trimestre 2015, la demande intérieure privée aurait légèrement ralenti au premier trimestre de 2016. Le rythme de croissance de la consommation domestique aurait, quelque peu, décéléré, enregistrant une hausse de 3,3%, en variation annuelle, au lieu de 5% un trimestre auparavant. Ce ralentissement serait attribuable à une baisse des revenus ruraux et à une quasi-stagnation des transferts des MRE, dans un contexte d’une modération des prix à la consommation (0,7%, au lieu de 1% un trimestre plus tôt). La hausse des dépenses de

LA CONSOMMATION DANS LE RURAL ACCUSE LE COUP...

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PERSPECTIVES MED

consommation, alimentées, en partie, par un accroissement d’environ 5,2% des crédits à la consommation, aurait plutôt profité aux importations de biens de consommation, dont la hausse se serait établie à 11,7%, au premier trimestre 2016. Du côté de l’investissement productif, il aurait affiché un accroissement de 3,6%, au premier trimestre 2016, en variation annuelle, au lieu de 6,7% un trimestre auparavant. Cette évolution aurait été, particulièrement, attribuable à une légère amélioration des investissements en construction, en ligne avec le raffermissement de 5,2% des ventes de ciment et l’accroissement de 5,7% des crédits à l’immobilier. Le rythme de croissance de l’investissement en produits industriels aurait, pour sa part, poursuivi sa tendance haussière, dans le sillage d’un renforcement de 11,2% des importations de biens d’équipement et d’une progression de 1,5% du flux des crédits accordés à l’équipement.


2,3% DE CROISSANCE DU PIB TELLE EST LA PRÉVISION DU FMI POUR LA CROISSANCE MAROCAINE EN 2016, PLUS OPTIMISTE QUE LES INSTITUTIONS NATIONALES.

TRAFIC PORTUAIRE CFC

FIRST PLACE Selon le classement du Global Financial Centers Index (GFCI) -indice de référence des centres financiers internationaux- Casablanca Finance City (CFC) est devenue la première place financière africaine, surclassant sa rivale sud-africaine de Johannesburg, désormais deuxième sur le podium continental. Au niveau mondial, CFC occupe la 33ème position, toujours selon ce classement. Près de cinq ans après sa création, la place financière panafricaine basée à Casablanca a donc réussi à s’imposer dans le paysage financier continental et mondial. A noter que le GFCI permet d’établir un classement des places financières en fonction d’un critère principal:

L’EFFET RO-RO Selon les statistiques de l’ANP à fin février 2016, le trafic portuaire global se hisse de 2,8% à 17,1 MT comparativement à la même période de l’exercice écoulé. Cette progression recouvre d’un côté une hausse de 11,5% à 13,2 MT du trafic national, suite à l’amélioration de 15,5% à 8,4 MT des importations conjuguée à l’accroissement de 5,3% à 4,2 MT des exportations et une bonification de 3,1% à 584,2 KT du cabotage. Et d’un autre côté un recul de 18,3% à 4 MT du transbordement des conteneurs au port de TANGER MED. Par mode de conditionnement (hors transbordement), le trafic brassé par les vracs solides augmente de 3,2% à 6,1 MT tandis que celui drainé par les vracs liquides affiche une croissance de 23,2% à 3,2 MT. Pour sa part, le trafic des marchandises générales (conteneurs, Ro-Ro et divers) s’accroît de 17,2% à 3,9 MT. Par ville, le port de TANGER MED s’accapare 35,2% du trafic portuaire, talonné par la plateforme de Casablanca avec 25,7%, le port de Jorf Lasfar avec 19,9% et celui d’Agadir avec 5,5%.

leur compétitivité. Pour cela, il se base sur des données externes (agrégeant et intégrant 105 indices de compétitivité parmi lesquels ceux de la Banque Mondiale, du WEF, de l’ONU ou de l’OCDE) et le résultat d’évaluations de professionnels internationaux de la finance qui doivent répondre à un questionnaire comparatif intégré évaluant les places entre elles.

RATING MAROC STABLE POUR S&P Selon le dernier rapport de STANDARD & POOR’S, la note attribuée au Maroc a été maintenue à BBB-/A-3 avec des perspectives stables. L’agence américaine de rating a, en effet, constaté un niveau de « qualité moyenne inférieure » à court et long terme relatif à l’efficacité de la gouvernance, aux perspectives de croissances du PIB et à la maîtrise de la dette publique impacté par la baisse du PIB par habitant, l’augmentation de la demande sociale et la détérioration du déficit budgétaire. Les analystes de l’agence affirment que malgré la stabilité de l’environnement politique et social du pays, les manifestations des syndicats et les marches de protestation non violentes dans les secteurs de la Santé et de l’Education ont influencé la notation et pourraient accroître les défis sociopolitiques que devra affronter l’actuel gouvernement à l’approche des élections prévues en Octobre 2016. Enfin, l’agence table sur un ralentissement de la croissance pour 2016 à 1,8% dans la perspective d’une faible production agricole. Toujours selon l’agence US, la croissance devrait tourner autour de 4% à moyen terme. Une grande partie de cette croissance dépendra de la stratégie d’industrialisation du Maroc notamment dans le secteur automobile.

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ECONOMIE BALANCE DES BIENS ET SERVICES CRÉATIFS par: Mohammed Taleb

HANDICAPS ET DÉFICITS Peu connu ou pas, le secteur quaternaire au Maroc siège parmi les parents pauvres des stratégies économiques nationales. Longtemps enlisé dans l’ignorance, ce secteur vient d’être décortiqué par la DEPF. Résultats : l’économie créative au Maroc peine à émerger.

P

endant que ceux qu’on appelle, sous d’autres cieux, les « créatifs » (artistes, concepteurs, architectes, designers, éditeurs, artisans, etc.) apparaissent comme une force économique dans les pays développés, et même dans certains pays en voie de développement comme l’Égypte, les nôtres même à se LE SECTEUR QUARTENAIRE CU- peinent structurer. Ce déficit en fédération et en MULE LES DÉFICITS. EN SERArassemblement a toujours empêché la déT-IL AUTREMENT SANS RÉELLE termination du réel potentiel de ce secteur. POLITIQUE CULUTURELLE ? Alors qu’ils sont classés, dans les pays développés, en « secteur quaternaire » pour les différencier des autres secteurs, ces acteurs qui naviguent dans ce qu’on appelle « l’économie créative», ne bénéficient pas de la même reconnaissance ici-bas. Leur capacité de participer au développement

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PERSPECTIVES MED

du pays n’est même pas reconnue. Peu sont ceux qui croient en la capacité de ce secteur à être un levier de croissance, un facteur de développement durable et humain et d’inclusion sociale. Ayant toujours été enlisé dans l’ignorance, ce secteur vient d’être mis sous les rampes des projecteurs par la Direction des études et prévisions financières (DEPF). Habituée à faire le tour des questions économiques, cette direction relevant du ministère de l’Economie vient de se livrer à un périlleux exercice ; dessiner le panorama et déterminer le potentiel de ce secteur. Un travail inédit qui s’est intéressé au capital intellectuel qui génère déjà des revenus, des emplois et des recettes d’exportation tout en favorisant l’inclusion sociale, la préservation de l’authenticité de notre identité, mais aussi de la diversité culturelle et l’essor du savoir moderne (technologie) sans oublier le développement humain. Intitulée « Économie créative : Panorama et potentiel », cette étude a tout en rappelant le poids des industries culturelles et créatives dans l’économie mondiale (537,2 milliards de dollars) et dans l’Union européenne (4,2%


du PIB et 3,3% des emplois en 2012), pointé du doigt le déficit de la balance des biens et services créatifs marocaine.

POTENTIEL SOUS-EXPLOITÉ

Les initiateurs de ce travail louable ont passé en revue l’essentiel des services créatifs existants dans le royaume. Ils ont abordé, notamment, la publicité, les études de marché et sondages d’opinion, les services d’architecture, d’ingénierie et techniques, la recherche-développement, les services personnels, culturels et relatifs aux loisirs, et les services audiovisuels et connexes. Sans oublier les services liés à l’informatique et l’information, et aux redevances et droits de licence. Dans ce sillage, l’étude qui s’est, entre autres, intéressée aux revenus générés par ce secteur à l’export, par segment, et a livré des éléments comparatifs par rapport au marché mondial de l’économie créative, a conclu que le secteur quaternaire national accuse des retards énormes. Dans le détail, la DEPF indique que malgré une croissance annuelle de 5,9% depuis 2003, les exportations marocaines des biens créatifs, essentiellement vers l’Europe (87%), n’ont atteint que 250 millions de $ en 2012, au moment où les importations se sont élevées à 788 millions, soit un taux de couverture de 32% contre 48%. Autrement dit, quoique ce chiffre ne figure pas sur la présente étude, le déficit de la balance commerciale des biens et services créatifs aurait été de 315,2% en 2012. Un chiffre qui en dit long sur les efforts que le Maroc doit fournir pour faire fructifier son économie créative, véritable levier de développement socio-économique et culturel. D’autant plus que le pays, qui

connaît un débat ponctuel et existentiel sur son modèle de développement, a plus que jamais besoin d’accoucher d’un modèle capable de faire converger toutes ses potentialités (économie, savoir-faire technologique, culture et créativité) dans le but de générer de la richesse, de l’emploi, et permettre plus d’inclusion des popu-

LA CRÉATION EST AUSSI UN LEVIER DE DÉVELOPPEMENT À ACTIONER POUR ASSURER LE DÉCOLLAGE

lations vulnérables. Dans cette attente, le chiffre d’affaires de ce secteur n’excède pas les 17,2 milliards de dirhams (Mrds Dhs). En termes d’emplois, le bilan est plus modeste. Ce secteur fourmillant essentiellement de TPE, voire de travailleurs indépendants, génère des emplois permanents ne dépassant pas les 39.000. En somme, il ne représente que 5% du CA et 7% de l’emploi permanent total des industries de transformation (chiffres 2013), détaille l’étude.

EN MAL D’ÉMERGENCE

Alors qu’un nouveau modèle de développement se dessine dans le monde, dans lequel l’économie et la culture sont étroi-

tement liées et englobent des aspects économiques, culturels, technologiques et sociaux du développement à diverses échelles, le poids économique de ce secteur, au Maroc, reflète sa faiblesse. Que de constats établis par la DEPF. Pour conclure que « la promotion de ce secteur ne pourrait que contribuer au développement durable du Maroc et à perpétuer les valeurs et le patrimoine nationaux dans leur richesse et leur diversité et consolider le capital immatériel du pays». Autant dire que les pistes ne manquent pas. Renforcer tout ce qui relève des nouvelles technologies, la filière numérique, et créer des passerelles entre des secteurs modernes et traditionnels… Cela sans oublier de favoriser l’émergence du tourisme créatif qui n’est pas aussi développé au vu du potentiel existant. Chose qui s’avère difficile vu que le tourisme culturel est en train de perdre pied à la faveur du balnéaire. Cependant, on n’arrive toujours pas à dénicher dans les bénéfices engendrés par les tournages de films, de moins en moins nombreux, à Ouarzazate qui peine à garder son éclat. Grosso modo, on n’arrive toujours pas à faire fructifier est surtout capitaliser sur le capital immatériel existant. Hormis quelques initiatives élitaires qui ont donné une impulsion importante au marché de l’art, les pouvoirs publics ne semblent pourtant pas prêts à donner des coups d’éclat à ce secteur. Tout au plus assiste-t-on, désarmés, aux saillies d’un Chef du gouvernement qui minore l’art et la création artistique. Il faut croire que la proximité avec Sbihi n’aura pas réussi à déteindre sur le patron de l’Exécutif, un politique qui ne rêve que de technostructure. Et encore !

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ECONOMIE LE MAROC DANS L’ÉCONOMIE MONDIALE Par: M.T

TAUX MARGINAL Malgré quelques « avancées », le Maroc a fait du surplace en termes de compétitivité durant les quinze dernières années. Alors que des pays concurrents ont enregistré des améliorations de leurs performances, « la part de marché du pays dans les exportations mondiales stagne autour de 0,13% (0,129%) depuis 2000 ». Ce constat de la DEPF s’avère plus qu’alarmant. Qui n’avance pas… recule.

L

e Maroc ne perd pas de parts de marché à l’exportation à l’échelle mondiale. C’est ce qui découle d’une étude de la Direction des études et des prévisions financières (DEPF) du ministère de l’Economie et des finances. Cela aurait pu être une bonne nouvelle pour l’économie marocaine si l’on était dans un monde où il n’existe pas de concurrence. Hélas, nos concurrents plus rapides et plus efficaces ne dorment pas sur leurs MÊME EN GRAPILLANT lauriers. Alors que l’ « appareil de production » nationale n’a pas su, depuis QUELQUES POINTS, LE MAl’an 2000, développer sa capacité de ROC RESTE MARGINAL DANS générer de façon durable un revenu et un niveau d’emploi relativement L'ÉCONOMIE MONDIALE élevés, des produits de qualité et à forte valeur ajoutée, tout en restant exposé à une concurrence internationale de plus en plus acharnée. C’est en substance ce qu’affirme l’étude intitulée « Décomposition de la compétitivité structurelle du Maroc : Marges intensives

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et extensives de nos exportations ». Selon celle-ci, bien qu’elles aient enregistré des avancées en matière de renforcement des échanges ou tout simplement d’ouverture économique depuis l’adhésion à l’OMC en 1995, d’attraction des IDE et de modernisation du tissu productif, les exportations marocaines calent toujours devant de nombreux défis à relever notamment en termes de compétitivité par les prix, la qualité, la diversification des débouchés et la création de l’emploi.

DYNAMISME LIMITÉ Dans un contexte mondial « fortement concurrentiel et en perpétuelle mutation », « la recherche de la compétitivité constitue un souci majeur et permanent», indiquent les auteurs de ladite étude. D’autant plus que le choix de l’ouverture « a mis à rude épreuve la capacité du tissu productif du pays » à atteindre les niveaux adéquats en matière de prix et de qualité «pour affronter la concurrence mondiale, et ce, en


raison de la persistance de fragilités structurelles ». Il s’agit, selon la même source, « en particulier du dynamisme limité de l’offre exportatrice nationale, sa concentration sur quelques produits et sur quelques marchés, une forte dépendance aux importations incompressibles, la prédominance de produits à basse technologie et à forte intensité en ressources naturelles et en main-d’œuvre conjugués à une faible qualification de la main d’œuvre et de la productivité comparativement à des pays concurrents particulièrement asiatiques ». Dans ce cadre, l’analyse comparative de la compétitivité du Maroc a montré une « quasi-stagnation au cours de la dernière décennie autour de 0,129% (en moyenne annuelle), alors que certains pays concurrents ont amélioré leurs performances à l’export durant cette période ». C’est le cas, entre autres, de l’Egypte qui a devancé le Maroc en voyant sa part de marché mondial croître entre 2000 et 2014 de 0,08% à 0,19%, de la Turquie (de 0,4% à 0,9%), de la Pologne (de 0,5% à 1,1%), du Brésil (de 0,9% à 1,3%), de l’Inde (de 0,7% à 1,7%) et surtout de la Chine dont la part est passée de 3,9% à 12,3%, indique la même source. Si l’on s’attarde sur ces chiffres, on remarquera facilement que l’ensemble de ces pays, hormis la Chine qui fait des avancées spectaculaires, ont tous doublé leurs parts de marché. Pourquoi dès lors le Maroc n’a-til pas pu faire autant ? La réponse, selon les

économistes de la DEPF, résulte entre autres dans le fait que les exportations marocaines n’ont pas pu dépasser significativement la croissance des importations mondiales ». Ce qui trouve son explication dans trois facteurs, à savoir « une spécialisation sectorielle dans des biens pour lesquels la demande augmente à un rythme relativement lent », « une orientation géographique vers des marchés à croissance plus lente », et « l’incapacité à livrer une concurrence efficace à l’échelle internationale, soit, en d’autres termes, une perte de compétitivité».

L’OUVERTURE TUE L’EMPLOI Sur le volet conclusions et recettes pour sortir du lot, la présente étude a, tout en fustigeant le fait que les exportations marocaines se caractérisent par une concentration importante des produits et des marchés : seulement 3,5% des produits exportés et 6,4% des marchés (9 pays) à l’export couvrent 80% de la valeur globale des exportations en 1998 (concentration géographique sur l’Europe pour l’agroalimentaire et concentration sur deux marchés essentiels à savoir la France et l’Espagne), appelée à plus de diversification. Afin de ne pas tomber dans le piège de la simplicité, les analystes de la DEPF, qui ont procédé à la « décomposition de la croissance des exportations » afin de permettre de « juger de l’importance de ces différents facteurs », ont conclu chiffres à l’appui que l’ouverture

commerciale a stimulé les importations plus que les exportations. De ce fait, la balance en emplois des échanges marocains est apparue négative sur toute la période 1999-2013. « Si la concentration sur les seuls secteurs traditionnels d’exportation, tels que le textile et l’agroalimentaire, n’a pas permis au Maroc de profiter pleinement des avantages de l’ouverture, le développement en parallèle de secteurs plus intensifs en capital physique (secteurs industriels) « permettrait de diversifier l’offre exportable du pays, d’élargir ses parts de marché et de le doter de nouvelles potentialités créatrices d’emploi répondant au mieux aux exigences internes d’équilibres macroéconomiques et externes de compétitivité internationale ». Au-delà des déséquilibres commerciaux qui impactent à la baisse les créations nettes d’emploi, « l’intensification capitalistique des processus de production, elle aussi liée à l’ouverture, constitue un autre facteur de destruction d’emploi, qu’il s’agisse des emplois contenus dans les exportations ou de ceux relatifs à l’offre globale en général », précisent les auteurs de ladite étude. Ce développement technologique, favorisé par la libéralisation économique et motivé par les impératifs de la compétitivité au niveau international, devrait par contre inciter à un repositionnement de l’économie nationale en faveur de secteurs plus créateurs de richesse.

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ECONOMIE TRANSPORT MARITIME Par: M.T.

ET VOGUE LA GALÈRE ! Acculé entre des frontières fermées à l’est et des obstacles naturels au sud, le Maroc, assure 95 % de son commerce extérieur via les voies maritimes. Quoiqu’il ait amélioré manifestement sa connectivité maritime (16ème en 2015 alors qu’il était 83ème en 2005), son pavillon tangue dangereusement depuis des lustres. Au risque de couler !

D

oté d’un linéaire côtier de près de 3500 km, le Maroc, qui cherche tant bien que mal à se frayer une place dans le commerce international, est bien loin d’être une nation maritime. Et pour cause : la flotte marchande compétitive fait défaut. Les faillites des compagnies nationales se poursuivent depuis des années. SI LE PAVILLON Après la Comarit et la Comanav, c’est autour de l’armateur marocain InterNATIONAL COULE, national Maritime Transport CorpoEST CE UNE FATALITÉ? ration (IMTC) de subir les mêmes avaries. Le dernier épisode dans le RIEN NE LE PROUVE ! long feuilleton de la déconfiture du pavillon national est la vente aux enchères du ferry « Le Rif » d’IMTC. Vendu par l’ANP au prix de 9,7 MDHS, ce navire fait partie des rares unités reprises par des Marocains. En effet, l’acquéreur n’est autre que Detroit World Logistique, société appartenant à Hakim Rahmouni et gérée

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depuis deux mois par Ali Kadiri et Ahmed Belkhayate. Si jamais Detroit World Logistique n’avait pas la possibilité de mettre sur la table un prix supérieur à celui des sept repreneurs sur les rangs, on aurait assisté au même sort que celui réservé aux 3 porte-conteneurs cédés, en 2013, par IMTC à Lloyds list, compagnie allemande. Et la liste ne s’arrête pas là, d’autres ferries de la compagnie, qui détenait, avant 2013, 7 porte-conteneurs, 2 rouliers, 2 car ferries, sont assignés à quai à Tanger Med 2 et attendent aussi repreneur. Un dénouement qui rappelle celui des quatre bateaux (Al Mansour, Ibn Batouta, Al Boughaz et Banasa) de la Comarit-Comanav. Abandonnés plusieurs années sur la baie d’Algésiras, ces navires avaient été vendus aux enchères par les autorités portuaires espagnoles à un armateur grec. Ce naufrage de la flotte nationale, qui a laissé l’Etat indifférent pendant des décennies, a fait réagir la Direction des études et des prévisions financières (DEPF) en consacrant une étude aux raisons


de cette catastrophe. Tout en déplorant l’amenuisement incessant et le dépavillonnement des navires vers d’autres pays, la DEPF a tiré la sonnette d’alarme sur la menace de disparition totale.

AU CREUX DE LA VAGUE ! En épinglant les maux d’un secteur névralgique de l’économie, la DEPF regrette qu’au moment où le développement des infrastructures du transport maritime bat son plein au Maroc, l’offre maritime peine à suivre. Son évolution est loin d’accompagner le progrès de l’offre portuaire, et ne reflète pas la progression continue de l’activité commerciale du pays. Les 86 navires que compte la flotte à présent, sont menacés de subir le même sort que celui qui a été réservé aux groupes Comarit-Comanav et IMTC. Composée de de 7 porte-conteneurs (53,3% du tonnage total), de 71autres navires (32,7%), de 6 navires de charges classiques (6%) et d’un pétrolier (3,3%), le pavillon national est doté d’un tonnage de 145 Mtpl (mille tonnes poids lourd). Un chiffre insignifiant par rapport à la capacité de 593 mTPL que le Maroc avait atteint en 1992. Depuis, le pavillon national a régressé de 7% annuellement, constate l’étude intitulée « Le transport maritime des marchandises au Maroc : Evolution et perspectives ». De moins en moins compétitif, le pavillon marocain participe de manière très limitée au commerce extérieur pour la simple raison que le pays ne dispose pas d’armateurs sur le segment du trafic en vrac (secs et liquides : céréales, charbon, phosphates et hydrocarbures) qui représente la majorité du trafic maritime (77%). Par conséquent, la participation du pavillon marocain au commerce extérieur est quasi nulle par rapport à celle des armateurs étrangers qui s’accaparent de 95% en 2015. Cette situation on ne peut plus alarmante « s’est reflétée sur la balance des paiements qui accuse un déficit important en matière des services maritimes», déplore la direction.

COMPÉTITIVITÉ EN BERNE Malgré les grands efforts engagés au cours de ces dernières années, rappelle la DEPF en citant la réforme portuaire, la mise en service du port Tanger Med, le développement des lignes régulières et la stratégie en marche

visant le développement harmonieux de 6 pôles portuaires, qui ont permis de renforcer la connectivité maritime du pays, le pavillon national n’a pas profité de l’expansion de la flotte mondiale. Tout au contraire, l’expansion de cette dernière de 4,2% entre 1990 et 2015 s’est accompagnée d’une régression de 9% pour la flotte marocaine. De fait, la part de la flotte nationale dans la flotte mondiale demeure insignifiante (0,01%). Plusieurs raisons expliquent cet état de fait. La DEPF cite entre autres que les navires battant le pavillon marocain sont inscrits au registre international marocain (RIM) qui s’est montré «non attractif pour les cargos aussi bien nationaux qu’internationaux», selon les termes de la DEPF. Pendant ce temps, des pays comme le Panama, Chypre, le Libéria ont préféré créer leur propre registre, des «registres parallèles» qui proposent une meilleure réglementation fiscale offrant aux propriétaires/exploitants des avantages de fiscalité et qui sont de facto beaucoup plus attrayants. La DEPF précise, dans ce sens, que la tendance mondiale est la fuite des pavillons nationaux vers des régimes plus souples et moins onéreux, des sortes de paradis fiscaux pour bâtiments navals. Preuve par les chiffres : 76 % de la flotte mondiale ne bat pas pavillon national. Ce manque de souplesse de la législation marocaine a favorisé les concurrents structurés à l’image des majors de cette activité comme le danois MAERSK, l’italien MSC et le français CMA-CGM qui arrivent à optimiser leur exploitation grâce à différents moyens. En termes de législation, le pavillon marocain est automatiquement inscrit au « registre international marocain » qui répond aux conditions d’immatriculation des navires issus de la convention des Nations Unies de 1986. Appelant les choses par leurs noms, la DEFP a émis plusieurs recommandations. Elle a, dans ce sillage, jugé nécessaire d’encourager le rapprochement entre chargeurs et armateurs pour optimiser l’exploitation du pavillon national. Parmi les pistes à explorer, la direction prône de pérenniser l’exclusivité du cabotage national aux hydrocarbures et envisager l’opportunité de l’élargir à d’autres segments tels que les matériaux de construction, et ce, dans une logique d’ouverture plus

prononcée sur les régions du Maroc, notamment les provinces du Sud. Cette exclusivité pour le pavillon national pourrait être envisagée sur certains produits importés (charbon, pétrole raffiné, soufre, blé tendre) avec un quota déterminé (deux tiers du tonnage en tonnes miles) tout en se donnant les moyens pour garantir une offre maritime à même de préserver l’approvisionnement et de garantir la compétitivité des opérateurs tels que les distributeurs pour le cas des produits pétroliers raffinés. Elle propose ainsi la création d’un deuxième registre incluant d’une manière progressive les segments du transport maritime en commençant par le vrac solide qui représente 77 % du trafic maritime mondial. Une refonte du Dahir portant code de commerce maritime (DCCM) datant de 1919 n’est pas à écarter du point de vue de la DEPF. Mais de quoi demain sera-t-il fait ?

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ECONOMIE TOURISME DE MAL EN PIS Par:

QUI DIT MIEUX ? Ceux qui ont cru que 2016 serait l’année de la reprise du tourisme ont du vite déchanter. Le bilan « maussade» des deux premiers mois en dit long sur ce qui attend le secteur. Un coup dur pour un secteur qui peine à sortir la tête de l’eau. A moins que le marché russe assure la surprise !

«P

eu enviable », telle est la mention qui résume la situation dans laquelle se trouve le tourisme marocain. Sans jouer aux Cassandre, le secteur va de mal en pis. Au moment où certains responsables de la corporation s’efforcent de croire en une reprise prochaine, les derniers indicateurs laissent prédire que l’embellie n’est pas pour demain. La L'ANNÉE DÉMARRE MAL. chute des arrivées se poursuit et se reflète naturellement sur les nuitées plombant REVOIR L'OFFRE POURRAIT ainsi la rentabilité en ce début d’année. Le dernier rapport de l’Observatoire maREBOOSTER rocain du tourisme en fait foi, lui qui indique que les arrivées aux postes frontières ont LA DESTINATION atteint 1,2 million de touristes, en baisse de 1,5% par rapport à la même période de l’année écoulée. Plus alarmant, cette chute est plus conséquente au rang des touristes étrangers -4,7%. Cela dit, quoique les professionnels se montrent pessimistes, les perspectives sur le long terme restent, en revanche, prometteuses. L’analyse 2016 de l’impact du voyage et du tourisme dans l’économie, récemment livrée par le Conseil mondial du voyage et du tourisme

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(WTTC), est optimiste. Le WTTC qui a dans son rapport 2014 précisé que le Maroc arrive tant bien que mal à tirer son épingle de jeu par rapport aux autres pays du continent et de la région pronostique que le secteur aura un impact plus important sur l’économie que durant les dernières années. Se basant sur quatre principaux indicateurs, à savoir la contribution du secteur dans le PIB, l’emploi généré, l’argent dépensé par les touristes et les investissements qu’attire le secteur, ledit rapport prévoit une augmentation du revenu généré par le secteur voyage et tourisme de 2% à 76,9 milliards de dirhams (Mrds Dhs) en 2016 contre 75,5 Mrds Dhs en 2015. Cet optimisme est à tempérer. « Le conseil verse dans l’optimisme, la réalité du secteur est beaucoup moins rose. Et son impact sur l’économie est de moins en moins important », regrette un fin observateur du secteur.

MAUVAIS DÉPART Avec des arrivées qui totalisent 666.452 (contre 699.116 durant la même période de l’année dernière), la variable dépressive n’a été compensée que par une


progression des arrivées des Marocains du monde de 2,6%. Néanmoins, celle-ci n’a pas de quoi réjouir les professionnels. Etant donné que malgré leur progression de 519.977 en 2015 à 533.754, d’après les données de la Direction générale de la sûreté nationale, les Marocains du monde ne sont pas forcément des clients des établissements touristiques. «Le flux des Marocains du monde qui représente 45% en moyenne des arrivées ne contribue pas aux nuitées hôtelières », martèle l’ancien directeur général de l’Office national marocain de tourisme (ONMT), Samir Sahraoui Kheldouni. De l’avis de cet initié, pour faire profiter le secteur de l’afflux des MRE « il faut inventer un produit ou des produits touristiques adaptés à leurs attentes ». En attendant le recul des arrivées s’est répercuté sur les nuitées. Entre janvier et février, celles-ci se sont élevées à 2.456.702, enregistrant ainsi une contraction de 1,2% par rapport à la même période de l’exercice écoulé (2.487.145). Affaissement non négligeable quand on met en évidence sa répercussion sur la recette moyenne par client au niveau des établissements hôteliers. Surtout ceux qui relèvent de la catégorie « classés » qui ont vu leurs nuitées totales réalisées chuter de 5,6% pour les touristes non-résidents… Baisse relativement compensée par une progression de 8,8% pour les résidents.

AU-DELÀ DU CONSTAT Pour le président de la Commission Stratégie et Investissement au sein de la Confédération nationale du Tourisme, « la crise que traverse

le tourisme marocain est le résultat de plusieurs facteurs combinés ». Pour ce qui est des facteurs exogènes, S. Sahraoui précise que la « crise financière internationale dont les retombées sur le Maroc et son activité touristique sont arrivées tardivement » a eu des effets négatifs qui « impactent plus l’investissement que le flux de touristes internationaux vers le Maroc ». « La toile de fond géographique instable qui a créé un effet d’amalgame dont souffre notre destination » n’est pas pour rien dans cette histoire regrette le président du cabinet Chorus consulting. Lui qui soutient qu’ « il est urgent de réagir par une communication innovante dont la responsabilité n’incombe pas au seul Office du Tourisme, mais aussi à notre diplomatie et nos responsables politiques ». A l’image d’autres professionnels, S. Sahraoui fustige le fait que « la stratégie 2010 et son prolongement Vision 2020 ont renversé de façon relativement arbitraire le positionnement de la destination Maroc. Du culturel exotique vers le balnéaire, la transition n’aura pas été réussie. D’autant plus que « la stratégie a été pensée il y a de cela 15 ans à présent ». Et d’aller plus loin en diagnostiquant les réalisations de l’ancienne vision. « Certes, les objectifs 2010 ont été atteints en arrivées, mais pas du tout en nuitées, ni en recettes », a-t-il précisé. La destination Maroc n’a atteint, trois ans après l’échéance, que 34% seulement des objectifs de la vision 2010. Pourtant, « la vision 2010 avait privilégié des objectifs quantitatifs, essentiellement en arrivées, au lieu d’opter

résolument pour des objectifs qualitatifs exprimés en recettes, ce qui aurait donné lieu à une toute autre approche marketing produit en termes de choix des sites, de positionnement, de taille, de concepts et d’aménagements», regrette-t-il. Alors, la solution passe-t-elle par le marché domestique ? Même avec une croissance importante, le tourisme national devait avoir plus de place dans la stratégie, estime S. S. Khaldouni. Mais là aussi, le « Plan Biladi » souffre d’une offre « peu séduisante » aussi bien pour la clientèle ciblée que pour les investisseurs. Sur le plan du développement du secteur, l’ancien DG de l’ONMT note que « l’investissement reste grevé par le prix du foncier et l’insuffisance des incentives aux investisseurs, sachant qu’en Turquie par exemple, le foncier est mis à la disposition des investisseurs sur la base de baux et non de cession marchande, contre un cahier des charges ». Et quand bien même ce gap serait dépassé, « les taux d’intérêt pratiqués par les banques pour la promotion de l’investissement touristique restent prohibitifs ». Ce professionnel n’a pas manqué, par ailleurs, de pointer du doigt « une représentation professionnelle en mal d’organisation, de mobilisation, et tétanisée par une tutelle colérique et peu ouverte au débat ». Un débat rendu nécessaire par les changements politiques en cours et la perception que l’on se fait du tourisme : économiquement et socialement important, mais « nuisible pour la société marocaine ».

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ÉCONOMIE ENQUÊTE NATIONALE SUR LA DEMANDE EN HABITAT Par: M.T.

LE TIR À BLANC DE BENABDALLAH Le ministère de l’Habitat vient de lever le voile sur l’enquête nationale sur la demande en habitat. En décortiquant ses résultats, on se croirait dans un pays autre que le nôtre. Or, la réalité est beaucoup moins rose. La preuve, les écarts flagrants entre ses résultats et ceux du recensement général de la population, plus récents, et plus exhaustifs.

E

n fin de mandat, nul ne saurait priver un ministre de redorer son blason. Quitte à consacrer quelques millions de dirhams à l'éfford. Nabil Benabdellah, à la tête de l’Habitat et de la Politique de la ville, a attendu 3 ans pour présenter quelques résultats de l’enquête nationale sur la demande en habitat. Réalisée en 2012, cette étude de plus de 2000 pages, dont seulement un petit fascicule a LES MAROCAINS SONT-ILS SATIS- été délivré aux représentants des médias, contient quelques FAITS DE LEURS LOGEMENTS ? LES perles rares en ce qui concerne les indicateurs de satisfaction CHIFFRES DE L'HABITAT DÉMEN- et autres statistiques relatives aux conditions d’habitation des TIS PAR LE HCP ! Marocains. Une simple confrontation des chiffres de cette enquête avec ceux du Recensement général de la population, outre ceux relatifs à la qualité de vie et du bien-être ressenti dans le domaine du logement qui découlent des « Déterminants de la perception par les citoyens, de la qualité de vie dans leur vécu quotidien » du Haut Commissariat au Plan (HCP), laisse

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apparaître d’innombrables déphasages, voire, d’énormes disproportions. Au moment où le HCP affirme que l’indécence des prix, la qualité médiocre et l’espace réduit, ajoutées au surpeuplement et au manque d’accès aux services publics font du logement la première source du mal-être des Marocains, le département de N. Benabdallah essaye tant bien que mal de nous faire croire que « le logement constitue une source de satisfaction de 76% des ménages marocains. Pas moins de « 55% des ménages sont satisfaits et 21% sont très satisfaits », assure-t-on.

SATISFACTION SUBJECTIVE

Rien qu’en avril dernier, le HCP avait précisé lors de la présentation « des déterminants de la perception par les citoyens de la qualité de la vie dans leur vécu quotidien », que le logement constitue la principale préoccupation des Marocains (60%) suivi par le revenu (45%). Et voilà que le ministère de l’Habitat sort de sa retraite pour annoncer le contraire : les deux tiers des Marocains seraient satisfaits!


Pour ceux qui ont la mémoire courte, l’enquête sur la perception de la qualité de vie des citoyens dans leur vécu quotidien avait révélé que le « niveau moyen de satisfaction quant au logement demeure inférieur à la moyenne, soit 4,7 sur 10 ». Autrement dit, seuls 47% des ménages sont satisfaits de leur situation d’habitation. Un chiffre beaucoup plus inférieur que celui du département de tutelle (29% d’écart !). Pis, cette moyenne passe à 2,5 sur 10 pour les personnes éprouvant au moins 10 affects négatifs, indique l’étude du HCP en montrant qu’à l’échelle nationale, l’indice synthétique des difficultés et affects négatifs éprouvés à l’égard du logement montre que les conditions du logement contribuent à raison de 64% à ces difficultés ». Au moment où le département d’Ahmed Lahlimi Alami assure que l’envolée des prix de l’immobilier, des loyers, de l’eau et de l’électricité a affecté des millions de familles marocaines mettant ainsi le logement au centre de leurs inquiétudes, celui de N.Benabdallah voit les choses autrement. Pour ce qui est du branchement à l’eau potable, la présente enquête affirme que 95% des Marocains dispose de cet équipement de base, tandis que l’enquête sur le bien-être indique que 22% de Marocains n’ont pas encore eu le privilège d’avoir accès à l’eau potable et 5% n’ont pas d’accès à l’électricité. Pire, le dernier recensement souligne que le raccordement à l’eau potable ne concerne que 72,9% des ménages en 2014 (57,5% 2004). Si cette proportion s’élève à 91% dans le milieu urbain (83% 2004), elle n’est que de 38,3% dans le milieu rural (18,1% en 2004). Dans le registre des exagérations, le département de N. Benabdallah énonce un taux de 97% de raccordement à l’électricité, tandis que le HCP souligne que même si la part des ménages raccordés au réseau d’électricité a augmenté de 71,6% à 91,9%, 8,1% des ménages ne disposent pas encore de cet équipement de base et cette propension est de 14,7% dans le rural. L’amplification des indicateurs à laquelle a eu recours notre enquête n’a pas épargné « l’assainissement (91%)» qui ne dépasse pas selon le statisticien 88,5% des très chanceux ménages urbains. Et la ce-

rise sur le gâteau c’est que dans les campagnes, les fosses septiques avec 50,5% et les puits perdus avec 20,8% constituent le mode d’évacuation des eaux usées le plus utilisé. La liste des disproportions est loin d’être fermée. Toujours sur le volet des équipements, l’enquête sur la demande en habitat prétend que 99% des logements sont dotés de toilettes. Un chiffre qui est également à mettre en cause lorsqu’on sait que 6,3% des ménages ne disposent pas encore d’une latrine en milieu urbain contre -malgré une nette progression- 16,3% en milieu rural (41% en 2004). De même, Benabdallah se vante du fait que « la salle de bains est présente dans 61% des foyers », au moment ou ce taux n’excède pas 45,4 % dans l’urbain selon le HCP qui détaille que seuls « 9.7% des ménages ruraux disposent de cet équipement en 2014 ». Et il va sans dire que l’évacuation des déchets ménagers n’est assurée qu’à hauteur de 67,7% seulement par les services communaux, tandis que 4,8% des ménages urbains en 2014 continuent de jeter leurs déchets dans la nature. Situation bien pire dans le rural où 89,3% des ménages recourent à ce dernier mode d’évacuation et que les services communaux et les camions ne dépassent pas 2,7% et 5,9% respectivement. Par ailleurs, 6,3% des ménages ne disposent pas encore d’une latrine dans le milieu urbain contre -malgré une nette progression- 16,3% en milieu rural (41% en 2004). Près d’un ménage urbain sur deux ne disposent pas d’une douche (45,4%). Bien que cette proportion ait doublé durant la période intercensitaire, seuls 9.7% des ménages ruraux disposent de cet équipement en 2014. Même si elle dépeint le paysage de l’habitat en rose, cette étude n’a pas manqué de relever des aspects fortement préoccupants ! Entre autres, elle a précisé que les habitations du tiers des Marocains sont concernés à degrés divers par l’insalubrité. Plus de 11 millions de Marocains vivent dans des habitats non réglementaires, menaçant ruine, se trouvant dans les zones à risques et dans les bidonvilles. Ainsi, l’étude initiée par le ministère dirigé s’est fixée une panoplie d’objectifs. Ratés ! En s’attardant sur ses résultats, on remarque facilement que cette enquête,

qui s’est fixé comme objectif, entre autres, de « connaitre les conditions d’habitation des ménages », en a laissé de côté l’identification pour ne s’atteler que sur les « aspirations » des ménages. Du moins, c’est ce qui ressort du petit fascicule livré aux médias.

N. BENABDELLAH A RATÉ LE COCHE EN DÉVOILANT LE CONTENU DE L'ÉTUDE DE L'HABITAT

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ÉCONOMIE LA COUR DES COMPTES AUDITE par: Mohammed Taleb

DÉFAILLANCES À TOUS LES ÉTAGES Pas un rapport de la Cour des comptes ne sort sans qu’une kyrielle d’établissements, d’entreprises, de communes et autres d’institutions ne soient épinglés. Devenus habituels, manquements et dysfonctionnements mis en lumière choquent de moins en moins l’opinion publique. D’autant plus que la juridiction administrative n’est pas maître des poursuites.

R

apport après l’autre la Cour des comptes lève à chaque fois un coin du voile sur les irrégularités et anomalies qui gangrènent le tissu administratif national. C’est dans ce sillage qu’est intervenu le rapport 2014 de l’institution que préside Driss Jettou récemment publié. Entre la Direction des transports routiers et de la sécurité routière et le Bureau marocain des droits d’auteur en passant par la Direction de la MétéoLE NOUVEAU TOUR DE PISTE rologie Nationale, l’Institut national de la reDES LIMIERS DE LA COUR DES cherche agronomique, la Société Al Omrane COMPTE CONFIRME PLEIN DE Tamesna, la Société d’aménagement Ryad, l’Office marocain de la DÉFAILLANCES propriété industrielle et commerciale, l’Office de commercialisation et d’exportation, l’Office de développement de la coopération et le Centre marocain de promotion des exportations, les magistrats de la Cour ont mis au grand jour d’innombrables lacunes enfouies sous le tapis. Sur la liste des départements

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qui en ont pris pour leur grade, on trouve, pêle-mêle, les Transport, Affaires étrangères, Agriculture, Commerce extérieur, Habitat et Industrie. Parallèlement, les missions de contrôle de la Cour qui traitent de problématiques à dimension horizontale ont été poursuivies afin d’évaluer les missions communes à différents organismes, comme c’était le cas, à titre d’exemple, de « la fiscalité locale », « la gestion du contentieux judiciaire de l’Etat » et la « Gestion budgétaire, agents locaux et réseau des comptables relevant du réseau diplomatique et consulaire. Sans oublier la gestion des affaires locales, durant la période sur laquelle porte le rapport, la Cour a programmé en partenariat avec les cours régionales des comptes plusieurs missions, notamment dans les domaines de la santé et de l’enseignement.

TRANSPORT HORS PISTE

S’étant invités chez la Direction des transports routiers et de la sécurité routière (DTRSR) relevant du ministère du Transport, les contrôleurs de la Cour ont pointé du doigt plusieurs manquements qui portent, notamment, sur le système d’immatriculation défail-


lant, la constatation automatisée des infractions, le manque d’organisation et l’anarchie des centres d’immatriculation. S’agissant du système d’immatriculation, le traitement des dossiers des cartes grises souffre, signalet-on, de « défaillances et de dysfonctionnements liés notamment à la visite technique, au traitement des opérations et à l’exploitation du front et back office ». Voilà ce qui peut expliquer, quoiqu’en partie, l’hécatombe qui se poursuit sur nos routes. Selon les inspecteurs de la Cour, « l’état mécanique critique des véhicules ne constitue pas un motif de rejet de la mutation de la propriété ». Pis, «les certificats de visites techniques sont perçus comme un simple document administratif, et la vérification de leur authenticité s’avère souvent difficile». Pour autant, la liste des anomalies qui entachent le processus d’immatriculation est loin d’être bouclée. Il y a lieu de citer, notamment, les dysfonctionnements au niveau de l’identification des véhicules, l’homologation à titre isolé, l’immatriculation des véhicules en provenance de l’étranger… et la prise en charge des oppositions. En effet, la gestion de l’identification par les centres d’immatriculation (C.I.) présente certaines insuffisances liées au manque d’effectif qualifié techniquement, à l’absence d’un contrôle de 2ème niveau et au large pouvoir discrétionnaire des agents qui en sont chargés. Pour l’homologation à titre isolé des véhicules neufs entrant dans la compétence des CI, « elle se réduit, dans la pratique, à la détermination de la puissance fiscale ». Selon ledit rapport, la défaillance du système actuel de gestion et l’absence d’une plateforme d’échange entre les différents acteurs entraînent une détérioration de la qualité du service public rendu, et ouvrent la voie au risque de fraude, notamment, la falsification des certificats de dédouanement et des certificats de visite technique, ainsi que l’immatriculation de véhicules à numéros de châssis poinçonnés. Les magistrats de la Cour ont relevé les dysfonctionnements liés à la constatation automatisée des infractions qui réduisent l’efficacité et mettent en cause sa crédibilité. En substance, le parc national des radars est défectueux, mal entretenu et positionné et loin d’être conforme à la réglementation. Dans le détail, les magistrats sont revenus sur le scandale « Logisoft » sans pour autant le nommer. Le rapport souligne que ces dysfonctionnements sont dus, entre autres, à l’acquisition des 150 radars fixes, « engagée largement en avance de l’adoption du cadre réglementaire qui organise leur mis en œuvre, tout en tenant compte de l’impact négatif que cela puisse avoir sur la gestion du parc des radars et sa maintenance». Pour rappel,

ce marché de 70 MDH remporté, du temps de Karim Ghellab, par Logisoft (entreprise marocaine) en consortium avec l’Allemand Robot, sentait le soufre. L’audit mené par le département de Aziz Rebbah en 2014 avait établi que « sur les 150 radars de contrôle de vitesse installés au Maroc depuis 2008, le tiers n’a jamais fonctionné puisque jamais branchés ». La Cour a, par ailleurs, épinglé plusieurs insuffisances dans la gestion des cartes grises et permis biométriques. De l’avis des magistrats, les services du ministère de l’Equipement et du transport ne maîtrisent pas le système de gestion des documents biométriques.

MÉTÉOROLOGIE OMBREUSE

A travers la configuration des cibles de la Cour, on remarque clairement qu’il s’agit d’une institution qui capte mieux que d’autres les signaux cadrant les politiques publiques et déterminant les grandes orientations du pays. C’est dans ce cadre, que l’institution de Driss Jettou s’est intéressée à la Direction de la Météorologie nationale (DMN). Alors que le Maroc, qui s’apprête à accueillir la

LE MAROC SANS MÉMOIRE CLIMATIQUE... NUMÉRISÉE Cop22, se veut un pionnier en matière de développement durable, l’institution centrale devant veiller sur l’évolution du climat à même de permettre au pays d’envisager ses changements, pâtit de plusieurs dysfonctionnements. « Au vu de l’importance du secteur et de la taille atteint par la DMN, il a été relevé que le cadre institutionnel et juridique est devenu dépassé », lancent d’emblée les magistrats de la Cour. Car, selon eux, « le statut de SEGMA n’est plus adapté pour le développement de la direction et ne permet pas de répondre avec l’efficacité voulue aux attentes croissantes des acteurs économiques et institutionnels, ainsi qu’à celles des citoyens dans les domaines de la météorologie et du climat, et de ce fait là, il ne permet pas d’améliorer son niveau professionnel et scientifique ». Cette situation handicape, d’après la même source, « le développement d’une vision globale et intégrée du secteur », et constitue l’une des raisons qui retarde « la concrétisation d’un contrat-programme, fixant les

orientations stratégiques et des plans d’actions clairs touchant, non seulement, le métier de la prévision météorologique, mais également les aspects liés aux enjeux de la lutte contre le changement climatique, et l’appui à la gestion des risques naturels, sanitaires, environnementaux et technologiques qui constituent des menaces pour notre pays ». Le Rapport va plus loin en fustigeant la faiblesse de la recherche au sein de cet établissement. « (…) la part de la recherche au niveau de la DMN est faible, et ne permet pas de remplir sa mission en matière des études et recherches atmosphériques, de météorologie et de climatologie théoriques, expérimentales et appliquées, ainsi qu’en matière des études et recherches connexes en rapport avec sa mission », précise-t-on. S’agissant des dysfonctionnements en relation avec le développement de cet établissement, la Cour assure que la DMN n’a pas suffisamment développé son expertise à l’aune de l’évolution du secteur. « En dépit de son savoir-faire reconnu, la DMN souffre encore d’un retard au niveau de la météorologie sectorielle », peut-on lire. A l’exception du soutien apporté à la navigation aérienne, le rapport note que « la DMN n’a pas su développer suffisamment les outils et techniques appropriés pour faire face aux besoins des secteurs économiques, notamment l’agriculture, dont les opérateurs ne cessent d’exprimer leur besoin de l’assistance de la DMN ». S’y ajoute également les anomalies liées à la base de données climatologiques incomplète. Dans ce cadre, le rapport indique que « les données climatologiques constituent un patrimoine national. Ce qui invite à conserver la mémoire du climat en assurant la disponibilité́ d’une base de données climatologiques actualisée et fiable ». Et de constater que « la base des données climatologiques informatisées n’est pas encore complète ». En effet, les données anciennes sont toujours conservées sur papier en attente de leur numérisation. De même, la DMN ne dispose pas d’un système performant de gestion de l’archive des documents climatologiques, sachant qu’elle a passé quatre marchés de saisie des données climatologiques entre 2010 et 2014 pour un montant de 1.798.929,12 dirhams ».

TAMESNA, LA VILLE ANCIENNE

Ayant été pris pour cible par les inspections de la Cour à maintes reprise, le groupe Al Omrane revient sous les sunlights à travers la société « Al Omrane Tamesna » (SAT). Le contrôle de cette société a permis de relever plusieurs observations qui expliquent l’échec de cette « ville nouvelle » ! La création de

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ÉCONOMIE

Tamesna « n’a pas été entourée par des conditions nécessaires à sa réussite », indique le rapport en soulignant qu’elle « n’a été ni précédée ni suivie par un encadrement juridique approprié» capable de permettre de « retracer les limites entre une opération de lotissement normal et celle qui débouche sur la création d’une ville nouvelle ». En effet, à l’exception de la circulaire du ministère de l’Habitat, n°364/1000 du 12 janvier 2005, sur la réalisation des villes nouvelles, les textes en vigueur qui régissent les secteurs de la construction et de l’aménagement, n’apportent pas une réelle indication sur le concept de ville nouvelle qui reste toujours assez vague ». La Cour soutient, dans ce sillage, que l’attribution de la gestion de cette ville nouvelle à une commune rurale « qui n’a pas les capacités nécessaires pour assurer cette fonction », a été parmi les causes de son échec. A ce niveau, ledit rapport précise

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qu’à ce jour, la commune n’a pas réceptionné le lotissement dit «Tamesna-îlots». De ce fait, elle n’assure ni l’entretien de la voirie, ni de l’éclairage public et du réseau d’assainissement. A cet effet, la société Al Omrane « Tamesna » continue, toujours, d’être chargée de ces fonctions en l’absence d’un plan d’aménagement de la Ville dûment approuvé par les instances compétentes. Le manque de vision ou la réflexion préalable défaillante pointée du doigt par la Cour s’illustre également dans le fait qu’aucune route appropriée pour accéder à la ville n’a été programmée. Pire, sur les trois routes qui devraient être réalisées entre 2007 et 2010, seule la route principale 4022 a été réalisée. Sur les 118 équipements que devaient construire les partenaires publics, seuls 20 ont été réalisés à fin décembre 2014. Sur les 43 terrains à acheter pour fabriquer des établissements scolaires, seuls six terrains ont été effectivement acquis. La ville ne comprend qu’un centre de santé. Pour les mosquées, le ministère des Habous et des affaires islamiques s’est engagé à construire, en 2007 et 2008, la grande mosquée du vendredi. A ce jour, cette mosquée est non fonctionnelle. La défaillance constatée chez les partenaires publics l’est aussi chez les partenaires privés. Les partenariats public-privés signés n’ont pas été aussi concluants. Le taux de réalisation n’a pas excédé 30% sur 51.095 unités de logements prévues par les conventions, soit près de 15 138 unités produites. Pour ce qui est des équipements, seuls six unités sur 28 ont été réalisées. Concernant les investissements réalisés, la Cour des comptes ne peut pas donner le taux de réalisation puisque SAT n’assure pas leur suivi. Notons que tous ces retards enregistrés malgré le lancement d’un plan de relance de mars 2013 impactent les ventes. Le stock d’unités non vendues est de plus de 1 600 à fin 2014.

GESTION LOCALE CHAOTIQUE

Comportant une synthèse des rapports relatifs à 120 missions effectuées par les Cours régionales des comptes, le rapport 2014 a mis à nu de nouvelles anomalies dans la gestion des collectivités territoriales, des services délégués et de l’emploi des fonds publics. Dans ce cadre, il s’est intéressé entre autres à la gestion des recettes communales, du domaine de l’urbanisme et du patrimoine communal. En matière de gestion des recettes communales, le rapport blâme la non-vérification des déclarations produites par les assujettis à certaines taxes communales. Les inspecteurs de la Cour ont constaté que les services fiscaux de la majorité des communes ne procèdent pas à la vérification de la sin-

cérité des déclarations relatives à certains droits et taxes, et qui concernent, principalement, la taxe sur l’extraction des produits de carrières, la taxe sur les eaux minérales et de table et la taxe sur les débits de boissons, et de la redevance d’occupation temporaire du domaine public communal par des biens meubles et immeubles. Sur le même registre, la Cour déplore la « non-application de la taxe sur les terrains urbains non bâtis. La Cour qui a, auparavant consacré un rapport entièrement à la fiscalité locale, critique incessamment le non respect de la loi n° 47.06. « Contrairement aux dispositions du dernier paragraphe de l’article 42 (…) de ladite loi, et quoique, jusqu’à fin 2013, aucun permis d’habiter relatif aux permis de construire délivrés en 2010 n’a été obtenu, les services fiscaux communaux n’ont pas procédé, à l’encontre des redevables concernés, au recouvrement, sans préjudice de l’application des pénalités et majorations prévues par la loi, de la taxe sur les terrains urbains non bâtis », peut-on lire sur le rapport. S’agissant de la gestion du domaine de l’urbanisme, la Cour a encore une fois pointé les « insuffisances du suivi et du contrôle des opérations d’urbanisme ». Le rapport que nous avons sous la main précise que « le contrôle du respect des lois et règlements d’urbanisme n’est pas effectué de manière régulière au niveau de la plupart des communes contrôlées. A ce titre, il signale que « l’insuffisance des moyens humains et matériels affectés au suivi et au contrôle des opérations d’urbanisme, eu égard à l’étendue des territoires communaux et à la multitude des projets structurants, a généré la prolifération des constructions non réglementaires». Sur ce registre, le rapport a également mis a nu les défaillances dans l’application des mesures relatives aux infractions commises dans le domaine d’urbanisme, entre autres, le retard enregistré entre le constat de l’infraction et l’émission de l’ordre d’arrêt immédiat des travaux de construction et le non-respect du délai réglementaire octroyé aux contrevenants pour procéder aux rectifications nécessaires avant le recours aux procédures . Et ce, sans oublier l’octroi de permis de construire sans respect des dispositions légales et réglementaires. Quant à la gestion du patrimoine communal, les auteurs dudit rapport ont fortement critiqué le non recours par la majorité des communes contrôlées, qui disposent de terrains et de biens immeubles sans disposer pour autant de leurs titres de propriété, « aux mesures nécessaires à la régularisation de la situation juridique du patrimoine communal ».


MARCHÉS BOURSE DE CASABLANCA Par :A.M.

UN BON CRU 2015 ? En ligne avec la croissance économique du pays, les résultats des sociétés cotées au titre de l’année 2015 témoignent d’une reprise relative dans plusieurs secteurs : Banques, cimenteries, compagnies minières et distributeurs affichent de bons résultats avec des bénéfices en hausse, alors que les autres secteurs continuent de tirer vers le bas la performance de la place casablancaise.

E

LES DIVERSES COTATIONS ONT RAPPORTÉ 26,8 MDS DE DH. DES BÉNÉFICES QUI AURAIENT PU ÊTRE PLUS CONSISTANTS...

n dépit de l’avalanche des alertes sur les résultats d’entreprises s’attendant à des contractions de leurs bénéfices en 2015, et en écartant les réalisations annuelles du raffineur Samir et d’Alliances, les sociétés cotées à la Bourse de Casablanca ont généré, en 2015, une masse bénéficiaire de 26,8 Mrds Dhs, en amélioration de 1,4% par rapport à l’année 2014. Dans ce sens, sur les 75 sociétés cotées, 42 ont clôturé l’exercice 2015 sur des bénéfices en croissance. Le reste de la cote casablancaise a affiché des résultats en berne et limité ainsi la croissance de ses bénéfices. Il s’agit notamment des secteurs des télécoms, les assurances, l’immobilier, le pétrole & gaz, les sociétés de financement, les services aux collectivités, les loisirs & hôtels, la chimie, le transport, l’ingénierie & biens d’équipement industriels. A l’opposé, on retrouve les secteurs des banques, de l’électricité, des distributeurs, de l’agroalimentaire, du bâtiment & matériaux de construction, des mines et des nouvelles technologies. Cet ensemble a assuré le peu de croissance enregistrée cette année. Cependant, au niveau du résultat net part du groupe, 42 sociétés ont affiché une rentabilité en appréciation, contre 40 l’année dernière. En agrégé, le chiffre d’affaires consolidé de l’ensemble des sociétés de la cote a cru de 4,5% à 214,9 Mrds Dhs, performance attribuable à hauteur de 91% à 4 valeurs seulement. Il s’agit en l’occurrence de Maroc Telecom, dont les revenus se sont appréciés de 17,1% à 34,1 Mrds Dhs, et du producteur privé d’électricité, Taqa Morocco, qui a vu son CA en 2015 dépasser les prévisions du Business Plan avec une croissance de 19,9% à 8,88 Mrds Dhs. Le groupe Auto Hall pointe en troisième contributeur avec un CA consolidé de 29,6% à 4,40 Mrds Dhs et enfin le sucrier national, Cosumar, qui affiche en 2015, un CA consolidé en appréciation de 15,3% à 6,96 Mrds

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MARCHÉS Dhs. Abstraction faite de ces quatre valeurs, le CA agrégé aurait affiché une croissance limitée à 0,5%.

YOYO SECTORIEL

Si l’on se penche sur les détails des variations sectorielles, le «secteur bancaire» coté demeure le premier contributeur à la masse bénéficiaire 2015 du marché boursier casablancais avec un poids de 37,6 %. Les industriels des matériaux de construction ont eux aussi pu tirer leur épingle du jeu en 2015 affichant une croissance bénéficiaire de 2,7%. Une performance réalisée, notons-le, malgré le déficit enregistré par Sonasid et le recul du résultat net de Holcim Maroc. Cette croissance bénéficiaire résulte du bon comportement de l’activité de Ciments du Maroc et de Lafarge Ciments dont la dynamique commerciale et l’effort continu d’optimisation des coûts, notamment énergétiques, ont maintenu leur activité à flot. Côté compagnies minières, le secteur a réalisé, à contre-courant, un chiffre d’affaires et des bénéfices en croissance respectivement de 11,5%, à 5,8 Mrds Dhs, et 2,6%, à 626 M Dhs. Les distributeurs cotés ont pour leur part enregistré un bon exercice 2015. Leur chiffre d’affaires agrégé s’est bonifié de 17%, à 16,2 Mrds Dhs. Le secteur agroalimentaire a lui aussi performé avec un chiffre d’affaires et un résultat net en hausse de 10% et 5,7% respectivement. Quant aux sociétés de financement, touchées par le ralentissement du crédit, la concurrence acharnée des banques sur le segment du crédit à la consommation et la persistance d’un niveau élevé d’impayés, elles ont pu ré-

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sister à la conjoncture et ont vu leur bénéfice net s’améliorer de 5,2%. Enfin, le secteur informatique a signé une croissance du chiffre d’affaires de près de 13% et un bénéfice net en progression de 26%. Affaibli par la contre-performance du marché Actions (-7,2 %) en 2015, le secteur des «Assurances» cotées génère une régression de 3,3 % de ses bénéfices nets au titre de

l’exercice. De son côté, le secteur immobilier accuse une baisse de 8,5 % de sa masse bénéficiaire à, seulement, 1,31 Mrds, sachant que la quote-part n’intègre pas les réalisations de la société Alliances. L’indice «Pétrole & Gaz» clôture l’exercice 2015 sur un bénéfice sectoriel en repli de 1,9 % à 709,8 M Dhs… Sans les réalisations de Samir.

DÉFAUT DE COMMUNICATION

L’AMCC EN QUESTION Si la majorité de la cote casablancaise a respecté les règles de droit quant à la publication des résultats, force est de constater que des moutons noirs persistent dans leur pratique opaque sous les yeux des autorités de contrôle. Si ces dernières ont pu réagir promptement aux pluies de Profit Warning, leur omerta est de rigueur coté défaillance de communication des résultats. Ce sont quatre entreprises qui semblent échapper à la règle du 31/03. A côté du raffineur Samir, déjà pris dans la procédure de liquidation judiciaire, on retrouve des émetteurs qui jadis furent des valeurs « sûres » de la place.

Il s’agit du groupe immobilier Alliance, Stroc Industrie et Maghreb Steel. Ces entreprises qui traversent des difficultés connues de tous, se retrouvent en plein délit de défaillance de publication des bilans qui n’ont pas bénéficié de l’agrément des commissaires aux comptes. Ce qui en dit long sur l’état des chiffres présentés et des situations respectives de ces firmes. En attendant, l’autorité de contrôle se doit d’agir afin de garantir une vraie transparence du marché et assurer la protection des investisseurs qui continuent de bouder la place faute de contrôle et de régulation.


ENTREPRISES LES BANQUES PERFORMENT Par: ABOU MARWA

DANS LA PRUDENCE

L

e secteur bancaire ne connait pas de crise, ou presque. Les bénéfices de l’ensemble des banques cotées se sont appréciés de 5,1% pour dépasser pour la première fois la barre des 10 Mrds Dhs. A l’exception du Crédit du Maroc dont la capacité bénéficiaire a été impactée par la hausse du coût du risque et l’impact du contrôle fiscal dont il faisait l’objet, les bénéfices sont en hausse pour les cinq autres groupes à savoir Attijariwafa bank, BCP, BMCE Bank of Africa, BMCI et CIH Bank. Cette situation est attribuée en grande partie à la baisse du coût du risque qui, après trois années d’escalade, s’est étiolé à 9%, totalisant 8,6 Mrds Dhs pour l’ensemble des opérateurs. Les banques de la place étant plus frileuses à l’exposition au risque, comme en témoigne la progression en 2015 des crédits bancaires limitée à 2,7%, elles resserrent plus les conditions de financement des entreprises des secteurs jugés « plus exposés» à la conjoncture. Chose qui a contribué à contenir la progression des créances en souffrance dont la progression s’est limitée à 7%

PLUS DE 10 MDS DE BENEFICES POUR LES BANQUE ? A QUEL PRIX...

en 2015 contre 20% l’année précédente. Cette hausse est due au secteur l’industriel pour près de 14 Mrds Dh d’impayés, soit 24,3% des créances en souffrance. Parallèlement à la maitrise du risque, les banques marocaines ont pu profiter de la montée en puissance de leurs activités à l’international. Côté profitabilité, et en dépit de la baisse attendue du résultat des activités de marché, le contexte étant moins favorable qu’en 2014 où la baisse des taux obligataires avait propulsé les résultats de cette ligne de métier, le produit net bancaire sectoriel continue de progresser (+1%) pour dépasser 53 Mrds Dhs grâce à la progression de la contribution des filiales africaines et à la hausse de la marge d’intérêt, profitant de la baisse du coût des ressources au Maroc. La composante « activités de marché » du chiffre d’affaires a ainsi baissé de 24% pour Attijariwafa bank, de 45% chez BMCE Bank et dans une moindre mesure la BCP à 1,2%. En revanche, le résultat brut d’exploitation du secteur affiche une baisse de 3,7% à 26,2 Mrds Dhs, due à la hausse du coefficient d’exploitation du secteur (51,3 % contre 48,5 % en 2014), alourdi par le poids des investissements entrepris en Afrique et au Maroc. Voilà de quoi réjouir les actionnaires. Surtout que la masse des dividendes s’est hissée de 5,2 % à 5,04 Mrds Dhs, portée principalement par l’appréciation des dividendes du trio de tête: Attijariwafa bank, BCP et BMCE Bank of Africa.

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ENTREPRISES BRASSERIES DU MAROC ÇA MOUSSE !

CAM CROISSANCE SOUTENUE A l’issue de 2015, le Crédit agricole affiche un PNB en croissance de 3,6% à 3,1 Mrds Dhs en dépit d’un résultat des opérations de marché en recul de 21,5% à 177,4 MDhs. Cette progression du PNB intègre la bonification de 4,1% à 2,6 Mrds Dhs de la marge d’intérêt (86,4% du PNB) combinée à la hausse de 6,4% à 349,4 M Dhs de la marge sur commissions. Parallèlement, les charges générales d’exploitation s’alourdissent de 6,1% à 1,6 Mrds Dhs, établissant le coefficient d’exploitation à 53% (+1,3 point). Pour sa part, le RBE s’améliore de 19% à 1,6 Mrds Dhs, intégrant également un redressement du résultat des autres produits d’exploitation non bancaire. Dans ces conditions et en dépit d’une charge d’impôt moins importante de 109,1 M Dhs, le RN ressort en repli de 21,9% à 336,2 M Dhs. En consolidé, on note la progression de 4,7% à 64,1 Mrds Dhs des dépôts de la clientèle et de 3,8% à 63,9 Mrds Dhs des crédits à la clientèle. De même, le PNB consolidé a connu une bonification de 5,9% à 3,2 Mrds Dhs, face à une hausse de 7% à 1,6 Mrds Dhs des charges générales d’exploitation, fixant ainsi le coefficient d’exploitation à 56% (+0,1 point). Le coût du risque s’est pour sa part détérioré de 12,3% à 621,2 M Dhs. Dans ces conditions le RNPG a connu une appréciation de 5,4% à 540,6 M Dhs profitant notamment de l’allègement de 84 M Dhs des pertes nettes sur d’autres actifs. En terme de perspectives, le groupe compte dépasser le seuil de 2 millions de clients à horizon 2017 en élargissant le panel.

Après plus de 5 années de tendance baissière sur l’activité boissons alcoolisées, le groupe Brasseries du Maroc-SBM- renoue avec la hausse, avec des volumes de ventes en légère progression de 0,9% à 772 576 hectolitres. Sur l’activité eau, le groupe poursuit son trend haussier, enregistrant une amélioration des volumes de ventes de 31,2%. En revanche et intégrant vraisemblablement un effet prix négatif, le chiffre d’affaires consolidé limite sa croissance à 0,4% pour se fixer à 2 265,3 MDhs. Dans une ample mesure et grâce à la maîtrise des charges opérationnelles, notamment le coût des matières premières et les dépenses marketing, l’EBE consolidé s’élargit de 12,3% à 552,5 MDhs. De ce fait, la marge d’EBITDA gagne 2,6 points à 24,4%. De son côté, le résultat d’exploitation consolidé s’accroît de 26,7% à 454,3 MDhs, établissant la marge opérationnelle à 20,1% contre 15,9% en 2014. Enfin, le résultat net part du groupe s’améliore de 5,6% à 263,3 MDhs. De facto, la marge nette se bonifie de 0,6 point à 11,6%. En social, l’EBIT progresse de 26,1% à 411 M Dhs pour une capacité bénéficiaire en expansion de 9,4% à 244,6 MDhs.

RISMA LE POIDS DES IRRÉGULARITÉS Dans un contexte sectoriel caractérisé par un ralentissement de l’activité touristique (-6,3% des nuitées), RISMA a vu son taux d’occupation baisser de 3 % pour se situer à 64% (40% seulement pour le marché). Dans ces conditions, le chiffre d’affaires consolidé de la société s’est contracté de 5,3% à 1 474,5 M Dhs. Une contreperformance attribuable particulièrement au segment «luxe & haut de gamme» liée principalement à la sortie du Sofitel Fès (-47 M Dhs) et au segment économique (IBIS) de -20 M Dhs. Il convient de souligner que les comptes consolidés à fin 2015 sont impactés par un ajustement de -127 M Dhs (impact capitaux propres de -113 M Dhs et impact RNPG de -13 MDhs) relatif à la correction comptable des irrégularités constatées sur un complexe hôtelier du Groupe (dissimulations de charges et détournements de fonds). Le RNPG accentue son déficit pour se chiffrer à -71,4 M Dhs (Vs. -38,6 M Dhs en 2014). En termes de perspectives, RISMA prévoit pour l’année 2016 la construction de 3 IBIS (Rabat, Agdal, Casablanca Gare et Abdelmoumen). Sur un autre plan, le groupe est engagé dans une démarche stratégique pour améliorer sa rentabilité d’exploitation, maîtriser ses équilibres financiers et optimiser son portefeuille d’actifs.

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ALLIANCES RÉSULTATS EN ATTENTE

Le groupe Alliances vient de publier un communiqué expliquant le retard de publication de ses réalisations annuelles de l’exercice 2015. Dans ce sens, le groupe rappelle avoir lancé son plan de restructuration qui comporte un certain nombre d’actions, parmi lesquelles figurent la mise en place d’une nouvelle gouvernance, la réorganisation du groupe, la réduction des charges de structure, la réduction de la dette bancaire, la réduction de la dette privée ainsi que le recentrage sur les métiers historiques, et ce, via la liquidation des sociétés EMT. Selon la société immobilière, ce plan de restructuration, mené avec l’accompagnement de conseillers professionnels, permettrait de donner une meilleure visibilité sur la période 2016/2018. Dans ce sens, la société a jugé nécessaire de reporter la tenue des conseils d’administration d’arrêté des comptes 2015 au 10 mai 2016 en vue de présenter les comptes clos au 31 décembre 2015 et les projections issues de ce plan de restructuration.

LESIEUR CRISTAL

MACHINE HUILÉE

Lesieur Cristal affiche des résultats financiers en amélioration à fin 2015, grâce notamment à la poursuite de la dynamique d’innovation produits : EL KEF liquide et TAOUS gel douche, le renforcement de la marque LESIEUR et sa nouvelle formule LESIEUR 3G, l’augmentation des capacités de production en savon sur les segments à forte valeur ajoutée, le développement de l’activité export, et la montée en puissance de l’amont agricole. Dans ce contexte, le chiffre d’affaires consolidé du groupe s’établit à 3,9 Mrds Dhs, contre 3,8 Mrds Dhs en 2014, en hausse nette de 166 M Dhs. Ce niveau des ventes est soutenu principalement par la catégorie « huile de table » qui constitue 72% du chiffre d’affaires, suivi par le savon à 13% et l’huile d’olive à 11%. En outre, le résultat d’exploitation ressort à 303 M Dhs à fin 2015 en progression de 48 M Dhs par rapport à l’année précédente.

ALD AUTOMOTIVE

ÇA ROULE ! Frederic Banco, DG de ALD Automotive, l’un des principaux acteurs de la location longue durée de véhicules multimarques, a déclaré que l’entreprise a connu une année réussie, ce qui constitue une belle performance dans un secteur en croissance. Ainsi, le parc de véhicules géré par ALD Automotive est passé de 7 240 au 1er janvier 2015 à 8 220 véhicules au 31 décembre 2015, soit une croissance de 13 %. Et la filiale location longue durée du groupe Société générale a vu son chiffre d’affaires faire un bond de 15 % pour s’établir à 649 M Dhs dont 180 M Dhs correspondent à la vente de 1 742 véhicules d’occasion. Pour ce qui est des perspectives, le groupe entend s’attaquer au marché des PME afin de prolonger l’évolution soutenue de l’entreprise.

LA BANQUE ISLAMIQUE DE DÉVELOPPEMENT ET LA SOCIÉTÉ D’INVESTISSEMENT ENERGÉTIQUE ONT PARAFÉ UN MÉMORANDUM D’ENTENTE POUR LA MISE EN PLACE D’UN FONDS DE 300 M $ DÉDIÉ AU FINANCEMENT DE PROJETS AU MAROC ET EN AFRIQUE.

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ENTREPRISES

RENAULT MAROC INTÉGRATION CIBLÉE Afin d’atteindre les objectifs d’intégration promis lors de son implantation dans le Royaume, le groupe Renault a signé un nouvel accord avec les autorités portant sur la mise en place d’un Ecosystème autour de la marque. Pas de promesses sur l’emploi ou les investissements, mais l’objectif de parvenir à 20 Mrds Dhs par an de sourcing au Maroc d’ici à 2023 ou d’atteindre 65% d’intégration locale pour ses usines. Pour M.H. Elalamy, ministre de l’Industrie cet ''Ecosystème Renault'' devrait s’accompagner de 900 millions d’euros d’investissements industriels au sein du groupe et de ses fournisseurs et de 50 000 emplois attendus au sein de la filière. Cependant, ces chiffres n’ont pas été repris par le constructeur au losange dans son communiqué sur l’opération. Quant au montage financier de cette opération, le ministre a joué, comme le constructeur de la marque au losange, la carte du silence.

APM TERMINALS ET DE DEUX ! APM Terminals, la plus grande société d’exploitation des Ports et Terminaux en Afrique en termes de volumes de conteneurs traités, a été désigné comme l’opérateur du nouveau terminal de transbordement dans le complexe portuaire de Tanger Med 2. APM Terminals est déjà présent sur le premier terminal de Tanger Med 1, opérationnel depuis juillet 2007 et réalisant aujourd’hui un trafic de 1,7 million EVP. Le nouveau terminal disposera d’une capacité annuelle de cinq millions EVP. L’investissement dans le nouveau terminal devrait représenter au total 758 millions d’euros. Maersk Line figurera parmi les clients majeurs de ce terminal qui entrera en exploitation en 2019, selon les termes d’un contrat de concession de 30 ans signé avec l’Agence Spéciale Tanger Med (TMSA) en charge du développement et de la gestion du complexe portuaire Tanger Med. APM Terminals Med Port Tangier se dotera d’une installation hautement automatisée opérant sur 2000 mètres de longueur de quai et disposera d’une technologie pionnière, lancée pour la première fois au Terminal Maasvlakte II de Rotterdam ouvert en 2015.

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Lancement du projet Palm Immobilier La société immobilière Résidences Dar Saada vient de compléter son offre dans le résidentiel de « standing supérieur» avec son nouveau projet «Palm Immobilier ». RDS Dans ces conditions, la société a programmé deux proLANCEMENT DU PROJET jets totalisant 2 400 unités à Casablanca. Ces derniers PALM IMMOBILIER sont composés d’appartements et de duplexes aux prestations et à l’architecture de qualité. De plus, des équipements de proximité seront également mis à la disposition des futurs résidents.

PROGRAMME #TEEP 2016 DU SANG NEUF Ce ne sont pas moins de 1.000 entrepreneurs dont une Marocaine qui ont été retenus pour le cycle 2016 du programme Esprit d’Entreprise Tony Elumelu (TEEP). Lancé en 2015, le TEEP est la plus importante initiative philanthropique africaine consacrée à l’entrepreneuriat. Le TEEP représente un engagement sur dix ans de 100 millions de dollars, pour identifier et soutenir 10 000 entrepreneurs africains, créer un million d’emplois et injecter dix milliards de dollars de revenus à l’économie africaine. Dès l’ouverture des inscriptions, plus de 45 000 entrepreneurs issus de 54 pays africains ont présenté leur projet, doublant le nombre de demandes reçues en 2015. Les candidats retenus représentent diverses industries dont les plus importantes sont l’agriculture et les TIC. Toutes les cinq régions d’Afrique sont représentées : Nord, Est, Sud, Centre et Ouest. Au cours des neuf prochains mois, la cohorte 2016 recevra la formation intensive en ligne, le réseautage et le mentorat qui lui fournira la boîte à outils pour le succès et la pérennité de leur projet. Ils participeront également au Forum Elumelu de l’Entrepreneuriat, la plus grande réunion annuelle de talent entrepreneurial africain qui s’étalera sur trois journées.


HUAWEI

ÇA CARTONNE

CARREFOUR AFRICAIN

LES PISTES SUBSAHARIENNES 1500 jeunes diplômés, cadres et professionnels ayant entre 2 et 15 ans d’expérience ont participé à la deuxième édition du « Carrefour Africain » qui a eu lieu à Casablanca le 2 avril 2016. Cette initiative accompagne les entreprises marocaines et multinationales dans leurs projets en Afrique visant à faciliter l’échange entre eux, en réunissant les talents et les compétences souhaitant s’expatrier ou revenir travailler dans leurs pays d’origine. Le forum est devenu le rendez-vous incontournable qui offre des opportunités de carrières et ambitionne de devenir la référence pour l’emploi en Afrique.

Présente depuis plus de 10 ans au Maroc, la marque chinoise de smartphones Huawei enregistre une hausse de 33% dans son résultat annuel de 2015. Cette hausse lui permet d’être la première entreprise chinoise a dépasser les 100 millions d’unités vendues en 12 mois. Fidèle à son engagement dans l’innovation et l’excellence dans les solutions de haute technologie Huawei investit sans cesse dans la recherche et le développement afin de diversifier son offre au maximum. Sur le marché marocain, Huawei fournit les trois opérateurs de télécommunication et emploie plus de 400 personnes. Pour l’année 2016, Huawei souhaite accroître cette recette qui gagne en se concentrant d’avantage sur sa capacité à innover. Les ressources futures seront d’ailleurs développées afin de répondre au mieux au besoin du consommateur tout en s’adaptant à son mode de vie.

HOLMARCOM

PERCÉE À DAKA Le groupe Holmarcom via sa filiale sénégalaise Peacock investments vient de signer une convention avec le Port autonome de Dakar, visant la construction d’un lot de maisons au profit de ses salariés. Situées dans la périphérie de Dakar, ces maisons seront déclinées en deux types de villas économiques, construites sur une superficie de 150 m2. Il est à noter que Peacock investments a obtenu en Juillet 2013 un agrément de l’Etat sénégalais lui permettant de construire 5000 logements sociaux. Le groupe précise qu’un investissement global de 630 millions de dirhams a été consenti pour la construction de 2 850 unités sur un terrain de 72 hectares à Diamniadio, située à une trentaine de kilomètres de Dakar. A ce jour, Peacock Investments y a construit 260 villas, viabilisé 450 lots de terrain et livré 150 maisons.

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NUMÉRO

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MAI 2016

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CULTURE

HARO SUR LA CRÉATION

SILENCE, ON ISLAMISE !

ABDELILAH BENKIRANE N’EST PAS UN ILLUSTRE INCONNU POUR OSER VOUER AUX GÉMONIES POÈTES, PHILOSOPHES ET ARTISTES. POURTANT, LE CHEF DU GOUVERNEMENT A OSÉ LE FAIRE. ET EN PUBLIC, SVP! FIDÈLE EN CELA AU DIKTAT QUI CONSISTE À DIRE QUE SEULS « LES ÉGARÉS SUIVENT LES POÈTES». L’AFFAIRE EST ASSEZ GRAVE POUR UN PAYS QUI CHERCHE ENCORE À FORGER UN SOFT POWER QU’IL N’A PAS. TOUT CELA SANS QUE LE MINISTRE PPS DE LA CULTURE NE RÉAGISSE. VOILÀ QUI ATTESTE QUE L’ON S’ÉLOIGNE, CHAQUE JOUR UN PEU PLUS, DE LA RICHESSE DES IDÉES AVANT-GARDISTES. VOILÀ QUI N’AUGURE RIEN DE BON.

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CULTURE POÈTES, PHILOSOPHES ET ARTISTES NON GRATAE par: Lamia Mahfoud

VOS PAPIERS ! Loin d’être anodine, le chef du gouvernement a prononcé une phrase assassine. A l’encontre des poètes, des philosophes et autres artistes. A ses yeux, le pays n’en a guère besoin. C’est à peine s’il ne les considère pas, tous autant qu’ils sont, comme des apostats. Justes propres à subir la sentence qui leur est promise: le bûcher ! Dramatique épilogue…

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n matière de politique culturelle, le Maroc se contente du minimum syndical. Rien de plus normal au regard de la vétusté du budget alloué au département ad hoc. On persiste à faire de ce ministère le parent pauvre par excellence. Il s’agit-là d’une réalité avec laquelle compose la société marocaine depuis l’indépendance. Car ce qui primait Y A -T-IL UNE NATION aux yeux des politiques d’autres consiDANS LE MONDE QUI TOURNE relevait dérations consistant plutôt à alimenter la LE DOS À SES PENSEURS ET machine à endormir les masses. Car un peuple CRÉATEURS ? éveillé fait peur. Quitte à passer à côté de ce que l’on appelle le « soft power ». N’empêche, la scène culturelle nationale ne manquait pas de ressorts pour s’opposer, avec les faibles moyens dont elle disposait, à une culture mainstream. Celle que véhiculaient les médias de masse, radio comme télé, et auxquels se greffaient d’autres véhicules du nivellement par le bas : la mobilisation des zaouïas, le

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soutien financier des multiples chapelles est toujours à l’ordre du jour, et une propension à « revivifier » le répertoire des chansonnettes via la promotion de festivals gérés par des associations arborant au fronton des appellations d’origine hybrides mêlant oueds et plaines. C’est pratiquement la logique telle que développée par Ciceron qui était en vigueur. « Panem et circenses » en vigueur à Rome reste d’une actualité brûlante. Rien de plus normal, dès lors, que de voir Abdelilah Benkirane entonner la chansonnette dans laquelle il a baigné par-devers lui. En insistant sur le fait que le pays n’avait besoin ni de poètes, ni de philosophes, les matières « littéraires » étant une perte de temps qui ne rapporterait rien au regard des véritables besoins de la société en « technostructure ». Pareil discours, tenu à l’occasion d’un Conseil d’administration de la Formation professionnelle, en dit long sur la piètre estime dont un chef de gouvernement tient et l’art et la culture dans le pays auquel il appartient. Pays dont il rêve sanglé dans une « uniformité » encadrée par l’islamo-conservatisme que distille le Mouvement unicité et réforme (MUR), bras idéologique du PJD. Car, n’en déplaise aux


thuriféraires des « symboles » de la période transitoire que traverse le pays, l’objectif occulte tapi derrière les discours du patron du PJD n’est en rien innocent. Même s’il se drape tantôt de « l’éthique » ancestrale qui rompt avec le 3ème millénaire pour plonger ses racines dans un magma « hors sol » qui nous rappelle aux bons souvenirs des premières années de l’hégire, tantôt d’une «vertu» qui consacre la survivance d’un traditionalisme pur et dur, figé dans le temps… Comme dans les esprits ! On comprend dès lors que cette nouvelle saillie du chef du gouvernement n’ait fait qu’un tour pour pousser nombre d’intellectuels à sortir de leurs gonds. Pour fustiger des propos irresponsables proférés par un dignitaire de l’Etat. L’Union des écrivains du Maroc (UEM) a d’ailleurs organisé, dans la foulée, une rencontre à Harhoura pour évoquer la question de la création. Mais point de communiqué incendiaire à l’endroit de A. Benkirane. C’est à croire que les composantes de ce « cénacle » peinent à se départir de leur couardise pour appeler un chat un chat. Seul un ex-ministre de la Culture, Mohamed Al-Achaari, pour ne pas le nommer, a pris sur lui de qualifier de « très grave pour l’avenir du pays » la déclaration de Benkirane. Quant à la blogosphère… Il faut dire que le buzz n’a pas été le lot des défenseurs de la culture. Celle qui libère au lieu d’emmitoufler les esprits dans la reproduction d’un patrimoine mortifère et d’étouffer la raison par tous les moyens disponibles. En tout cas, il ne faut plus se leurrer sur les avancées que le pays peine à enraciner sur la voie du progrès et de la modernité. Le cador du PJD l’a dit et a tout résumé. C’est la logique de la fermeture des champs culturels qui est ainsi promue alors que le pays se dote de musées et de

théâtres rutilants et modernes. Le déphasage est bien là. Et c’est ce qui rend actuel le combat incessant, de tous les jours, que doivent déployer les îlots de résistance contre le « raz de marée » pré-programmé de l’idéologie salafiste. Une idéologie dont les ténors partent en guerre contre les idées novatrices, émancipatrices et mobilisatrices. Celles qu’ils ne peuvent pas affronter, car ils les redoutent

"LE CAHIERS DES CHARGES" DE A. BENKIRANE POUR LA CULTURE EST CLAIR : "ALLEZ EN ENFER !" comme la peste. Surtout que « l’islamisme ne pense pas », tout au plus se contente-t-il de croire. Heureusement que dans ce pays qui affiche tous les signes de la régression, il y a encore des esprits qui résistent. Comme le démontre la célébration du cinquantenaire de la revue « Souffles ». Une occasion saisie au vol par l’esprit rebelle du poète syrien Adonis pour annoncer que « celui qui ne célèbre pas la culture, ni la poésie, ne saurait célébrer ni sa terre ni son identité ». Un anniversaire qui rappelle aux générations montantes qu’au sein de l’élite marocaine, il y a toujours ceux qui osent la résistance contre « le cahier des charges » du repli identitaire que propose le PJD et consorts au peuple marocain. D’ailleurs, il n’est pas étonnant de voir que la flamme du combat ne s’est pas définitivement éteinte

dans les yeux de nombre d’intellectuels venus célébrer un moment de bonheur partagé autour d’une équipée intellectuelle qui a marqué le pays de son empreinte entre 1966 et 1972. Abdellatif Laâbi n’a-t-il pas lancé un manifeste, il y a quelques années à peine, pour la revivification de la culture marocaine dans les règles de l’art ? Un appel prémonitoire au vu du reflux que le pays endure sur le plan intellectuel face à l’envahissement de la société par deux phénomènes des plus pernicieux. « La culture kitsch », dénoncée naguère dans les colonnes de « Souffles », et « le bouillon culturel » rétrograde qui empêche toute tentation d’exégèse, cet « ijtihad » dont le Maroc aussi bien que le reste de l’espace arabe a cruellement besoin. La réédition des exemplaires de la revue est une initiative des plus louables dans la mesure où elle met entre les mains des générations montantes un matériau culturel assez singulier. Car il reposait sur des contributions de valeur charriées par des noms qui ont marqué la scène nationale. Mohammed Khaïr-Eddine, Mostafa Nissabouri, Abdellatif Laâbi, Farid Belkahia, Mohammed Chabaa, Mohamed Melehi… Un legs mémorable qui, sur moins de sept ans, durée de vie de la publication qui allait aussi engendrer « Anfass » en arabe, peut nourrir les esprits assoiffés d’une autre (perception de la) culture, loin des miasmes d’un mainstream des plus acculturants. Au yeux d’A. Laâbi, cette célébration relève du « devoir de mémoire » qui est « plus que jamais d’actualité, au regard du repli réactionnaire et identitaire, en contradiction avec la modernité. » Alors qu’Adonis y voit un outil qui a « participé à la déconstruction d’un discours figé dans le passé et mérite largement l’hommage qui lui est rendu. »

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REPORTAGE

IMPRESSIONS CASTILLANES par: Abou sarah

COMMENT OUBLIER DAECH… Fierté est dépit ! Le mélange de ces deux sentiments enserre tout arabe et musulman en nous chaque fois qu’il foule le sol espagnol. Cette terre hospitalière recèle en elle une mosaïque d’émotions si fortes que l’on sort chaque fois avec une plaie guérie et cousue par le fil de l’Histoire mais une plaie qui garde des cicatrices qui font mal et dont nous sommes responsables, que dire coupables. Retour sur un séjour en Terre Castillane.

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ubliés les plis des autoroutes interminables arpentées et la hâte d’arriver à bonne destination : Tolède. C’est une belle halte, prometteuse, dans les terres de Don quichotte de la Mancha qui s’annonçait. Cette terre est la permanence de l’atmosphère et du cœur. Son âme n’est pas seulement permanence mais elle est diversité. Tolède est un concentré de ce que nous étions, musulmans ouverts et tolérants, et ce que nous aimerions JUDAISME, CHRISTIANISME être, loin des sentiers de la perdition que nous proET ISLAM OU LA SYNTHÈSE À mettent les hordes de Daech et consorts. Cité de taille LA CASTILLANE QUI CHARRIE moyenne, elle a abrite un cœur historique qui bat toujours au rythme du paL'ADMIRATION trimoine qui a survécu à la Reconquista. Barrès écrivait au début du XX° siècle que « les raisons de Tolède, c’est un superbe dialogue entre la culture chrétienne et l’arabe, qui s’assaillent et puis se confondent ». Cité attirante et gaie, elle est fertile en couleurs et bruits

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multiples. Tolède est la définition par excellence de l’art mudéjar. Ici, les portes jadis des Bab, sont toujours aussi majestueuses avec l’apport Occidental en prime. Elles veillent jalousement sur un patrimoine puissant et magnifique. Discret à Bisagra, l’apport maure se dévoile avec la puerta d’El Sol qui résume dans sa majesté l’art mudéjar. Jugez par vous même comment les deux expressions artistiques se confondent à merveille. Plus loin la Puerta d’Alcantara est un l’un des rares vestiges intact de style omeyade. Son nom est un pont entre les deux cultures qui ont façonné ce pays en général et Tolède, Cordoue, Séville, Grenade en particulier. Etroites mais hospitalières, les ruelles rappellent nos derbs et autres dribas qui serpentent dans nos anciennes cités jusqu’au cœur palpitant des médinas. Elles transpirent la vie, les odeurs mêlées au tumulte des artisans, des commerçants et autres touristes. Certes la vivacité des médinas est plus intense, peutêtre par une densité de population plus élevée, ou par une démographie plus jeune, enfin par un autre contexte, mais on n’est pas loin. Les échoppes de souvenirs qui longent les rues du Commercio, de la Trinidad et autre


Cristo de la Luz proposent tout un panel de l’artisanat de la coutellerie héritée pour partie de la présence arabe. De toutes taille et de toutes formes, sabres, couteaux, et autres objets contendants de cuisine ou de décorations ornent les vitrines. Le damasquinage est l’autre fierté de la ville. C’est un art typiquement tolédan. Son principe consiste à créer des dessins et des formes - qui rappellent dans les plus traditionnelles d’entre eux les bijoux qu’on trouve dans les joailleries des kissarias de nos médinas - sur des métaux en enchâssant des fils d’or ou d’argent. Enfin, les boulangeries pâtisseries proposent le savoureux massepain hérité de la présence arabe. Mélange de pâte d’amande et de sucre, il est l’une des marques gastronomiques de la ville qui rappelle si besoin est nos cornes de gazelles. Cette flânerie ne peut faire oublier à tout visiteur averti, le fabuleux patrimoine cultuel et culturel de la ville. C’est par milliers qu’ils se comptent pour dire combien l’art s’accommode de l’économie et vice-versa. A l’opposé, enfin apaisés et reposants à la fois, les lieux de culte, chrétiens, juifs et musulmans sont les témoins, encore debout, de l’importance de ce carrefour cultuel depuis l’époque romaine. On a une pincée au cœur lorsqu’on se remémore la virée destructrice des hordes d’un El Baghdadi à Palmyre. Pauvre Syrie ! Et on n’oublie pas, bien sûr, ce qu’a subi l’Irak, ni ce que Tombouctou a enduré… Et touchons le bois, ce qui risque d’advenir en Libye, voire ailleurs, dans le Sinaï. En sus de plusieurs églises et autres cathédrales, la visite de la mosquée Bab El Merdoum, bâtie au X°siècle, est un moment de douceur. Transformée en édifice chrétien et rebaptisée San Cristo de la Luz, elle est aujourd’hui un musée ouvert à tous. Désacralisée, comme l’est la synagogue du Transito, ces lieux de paix ont pris les allures

de musées d’une rare beauté ou le travail des maçons maures est sublimé par la lumière et l’architecture des lieux. Pour ce qui est de l’art pictural, nous sommes dans les terres d’El Greco. Ce peintre d’origine crétoise se fixe à Tolède et devient l’interprète génial de la société espagnole de son temps. Il a exécuté des tableaux religieux pour les innombrable couvent et églises de la ville. Mais son œuvre magistral reste « L’enterrement du comte d’Orgaz ». Visible à Tolède, ce tableau représente le mythe fondateur de cette cité. Dommage que la visite soit écourtée par l’affluence massive des visiteurs quelque soit l’heure de la journée. Pour approcher au mieux la vie de ce peintre d’exception, la visite de la Casa d’El Greco, musée qui reconstitue sa maison nous replonge dans l’art Tolédan. Les salles ouvertes sur un patio, règne de la verdure, sont meublées avec raffinement. Des toiles sont réunies pour le bonheur des initiés pour prendre la mesure de l’évolution de l’artiste. Une fois les plaisirs des yeux et de l’âme rassasiés, place à celui des papilles… A y réfléchir de près, après s’être concurrencées pour nous vendre les meilleurs chemins pour accéder au paradis, les trois religions se sont mises d’accord ici bas pour nous en donner un avant goût exquis de l’Eden gastronomique réservé en priorité aux chantres de l’humanisme. Décidément, ce n’est pas pour rein que l’UNESCO a hissé Tolède et sa gastronomie parmi les villes espagnoles du patrimoine mondial. C’est là l’origine de la fierté qu’on ressent une fois le pavé battu à Tolède. Mais que de désenchantement en pensant à l’état de décrépitude de nos médinas. Cupides pour la plupart, ignorants du lustre du patrimoine dont ils sont dépositaires dans leur extrême majorité, nos élites ont reproduit un schéma qui n’est point le leur ce qui conduit nos villes à l’abime. Parce que la consommation effrénée, nourrie par une prédation féroce qui

habite les édiles, est devenue la règle. On est loin de la notion de partage qui permet à des villes comme Tolède de continuer à briller. Et ce n’est qu’un retour sur investissement. En visitant le quartier juif de Tolède et surtout les lieux de culte israélites, le logo de la fondation Orange, mécène de la restauration, est omniprésent. Mais qui se soucie, parmi les oligarques arabes, du sort de Bab El Mardoum ? Nos milliardaires du Maghreb et surtout du Machrek rivalisent en Yachts, châteaux et hôtels particuliers, acquis sur les plus belles avenues des capitales européennes, ne gagneraient-ils pas à inscrire leurs noms dans la postérité en redonnant une seconde vie, une vraie, à des médinas, espaces urbains, lieux de savoir être et de savoir vivre? En visitant comme tout touriste lambda les vestiges arabes légués en Espagne, comme ailleurs, ne se sentent-ils pas touchés par la grâce qui émeut tout amoureux de la Civilisation ? Ce cri du cœur ne traduit nullement la moindre nostalgie et encore moins le fait de nourrir un passéisme par définition révolu. C’est juste un constat doux et amer à la fois. Une reconnaissance pour le génie dont on fait preuve nos ancêtres. Et un désarroi face à ce que causent certains de nos contemporains prisonniers des lois abhorrées d’un luxe tapageur si ce n’est d’une tentation suicidaire…

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CULTURE GHASSAN SALAMÉ CANDIDAT À LA DIRECTION DE L’UNESCO par: L.M.

« NOUS NE SOMMES PAS DES CLONES » Fin de partie pour Irina Bukova à la tête de l’UNESCO. La dame qui a particulièrement fait entendre sa voix lorsque Daech a commencé à saccager et dynamiter le patrimoine universel irakien et syrien veut camper à la tête de l’ONU. Son fauteuil est au centre de toutes les convoitises. Ghassan Salamé, ancien ministre libanais de la Culture se porte candidat. Avec un programme ambitieux…

G

hassan Salamé fait partie de ces intellectuels que le pays du Cèdre enfante pour porter au loin la voix singulière d’un Orient « compliqué » objet de tant de drames et de déchirures. A l’UNESCO, l’enfant prodige du Liban, naguère considéré comme la Mecque des intellectuels arabes pourchassés par des régimes qui ne toléraient pas de voix discordantes, et encore moins celles de l’engagement pour le changement, pourrait contribuer à faire porter la culture et le combat qui va avec au sommum de l’intérêt international. Surtout par les temps conflictuels qui courent et qui, dans une ignorance crade, assimilent la lutte contre le terrorisme islamiste à une « guerre des civilisations ». Armé de quarante ans dans l’enseignement supérieur et la culture, G. Salamé qui a participé activement à la rédaction de la Convention internationale sur la diversité culturelle et sur la protection du patrimoine immatériel serait l’homme qui sied à la mission. « Après avoir

MÊME SANS L’APPUI DE L’ÉTAT LIBANAIS, G. SALAMÉ SE PORTE CANDIDAT

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présidé la Conférence ministérielle de la francophonie, ou encore avoir créé Afac, après des années au service de l’Onu, je pense que ma candidature est légitime et que je peux beaucoup apporter à cette organisation » a-t-il laissé entendre aux médias libanais. Le politologue et professeur des universités à l’Institut d’études politiques de Paris place sa candidature sous de meilleurs auspices au vu de ce qui se passe dans le monde arabe et qui se répercute ailleurs. « Certainement vers un consensus autour de valeurs humanistes irréductibles et partagées. Certainement sous le signe d’une mise en valeur de ce qui nous réunit dans un siècle où on insiste beaucoup trop sur ce qui nous différencie. C’est là une tâche énorme. Mais où mieux qu’à l’Unesco peut-on la mener ? Je crois fondamentalement qu’il est légitime et très significatif qu’un tel projet soit aujourd’hui porté par un enfant du Liban et du monde arabe. » Le monde connaît et/ou subit des chamboulements qui l’interpellent. « Il change d’une manière où la culture irrigue plus que jamais la politique internationale. Malheureusement, elle ne l’irrigue pas toujours avec de l’eau pure, mais trop souvent avec des crispations et de la violence, parfois intolérables. Se


déroulent sous nos yeux des dérives culturelles et idéologiques qui affectent négativement les relations internationales et nous posent un défi extraordinaire et sans précédent, au moins depuis plusieurs décennies. C’est pourquoi je pense que la plupart des organisations internationales doivent redéfinir leur rôle en fonction de ces dérives. L’Unesco, en particulier, a un rôle primordial en la matière et un rôle nouveau qui se dessine devant elle, si elle se décide à le jouer. » Dans sa vision, «l’Unesco a été créée fondamentalement au service d’une socialisation politique optimale des jeunes générations et pour garantir une interaction interculturelle paisible et sereine. Or le défi n’a jamais été aussi important qu’aujourd’hui. » D’autant plus que les enjeux culturels sont aussi multiples que compliqués en ce début de millénaire où « les autoroutes de l’information » véhiculent tout avec, en prime, l’éclipse des traditionnels intermédiaires. « C’est vrai qu’il ne faut pas pousser la culture dans des ghettos, mais il ne faut pas non plus la mettre à toutes les sauces sans véritablement poser la question préalable de la représentation. Il faut faire attention lorsqu’on introduit la culture inopinément dans tout et partout, telle une summa causa pour expliquer le monde. » G. Salamé a combattu, avec grande lucidité, les dérives simplistes aux répercussions dangereuses. «Lorsqu’on parle du choc ou du dialogue des civilisations, qui autorise qui à parler au nom d’une civilisation entière? On entend dire : Ma culture, ma civilisation pense ceci, pense cela. Ma première réaction à cela est : mon gars, qui t’a autorisé à parler au nom de millions de personnes ? Qui t’a mandaté ? C’est là que se pose la question de représentation. Ce n’est pas parce que je suis un homme que je peux parler au nom de tous les hommes. On n’est pas nécessairement mandaté simplement parce qu’on appartient à un groupe religieux, confessionnel ou culturel pour le représenter et parler au nom de tout ce groupe». Que n’a-t-il pas soutenu, sans discontinuer, que le dialogue intercivilisationnel est un dialogue qui se fait entre des individus, des groupes, des États, mais les « civilisations » en elles-mêmes ne sont pas des acteurs. «Elles sont des viviers dans lesquels nous puisons collectivement et individuellement nos valeurs, les ingrédients de notre identité. » Mais qui aborde la question de l’identité, avec le corollaire qui lui colle à la peau, celui du repli constaté ici et là, à travers le globe, c’est la diversité qui est promue par l’ancien responsable. « Je veux faire l’éloge de cette convention pour la diversité culturelle à laquelle j’ai œuvré en tant que ministre du Liban avec une immense fierté jusqu’à ce jour. Nous étions une trentaine ou une quarantaine de ministres

de la Culture à avoir participé à son élaboration, puis à sa promotion. Elle est capitale, parce qu’elle a posé la base de l’acceptation de la diversité culturelle en droit international. Nous ne sommes pas les clones les uns des autres. L’aspiration à la diversité est inscrite dans les sociétés humaines et ce n’est pas par hasard que toutes les grandes religions reconnaissent la diversité. C’est le rôle de l’Unesco aujourd’hui de protéger cette diversité, non seulement la biodiversité de la nature – ce qui est une tâche extraordinaire au moment où les grandes catégories de la faune et la flore peuvent disparaître –, mais aussi de protéger le souci des gens et des groupes de sauvegarder leur identité politique, religieuse, linguistique, etc. » Aux yeux de l’intellectuel, la culture n’est pas une question superflue qui incite la puissance publique à s’en détourner. Le désengagement relève de l’exercice périlleux. Pour G. Salamé, « il ne faut pas laisser la culture uniquement à la loi du marché, sans occulter l’importance de ce dernier. Cela suppose bien sûr que les États doivent, par ailleurs, pouvoir agir pour promouvoir les cultures, mais c’est un autre débat. Quoi qu’il en soit, il est évident que si on laisse les choses avancer sans régulation, le monde pourrait devenir un cimetière de petites langues et de petites cultures disparues.» Il pousse le raisonnement plus loin en soulignant que « comme on le sait aussi par l’anthropologie culturelle, les civilisations disparaissent quand elles se renferment sur elles-mêmes, quand elles ne sont pas en interaction les unes avec les autres, quand elles ne s’enrichissent pas entre elles. C’est pour cette raison que cette convention cherche non seulement à promouvoir la diversité, mais aussi à encourager les interactions. Il ne faut pas transformer les civilisations en objets muséographiques, car elles s’assécheraient. Il faut qu’elles restent vivantes, et pour cela, elles doivent interagir avec les autres». Bien entendu, ce panorama ne doit surtout pas occulter la question centrale à laquelle G. Salamé entend redonner ses lettres de noblesse : l’école et la lutte contre l’analphabétisme. «Mais pour l’Unesco, dont l’éducation est une des missions centrales, il faut aller plus loin», estime-t-il. Et de poser les questions à voix haute : quelles sont les valeurs que l’on transmet à nos enfants ? Est-ce qu’on leur transmet des valeurs de paix, de tolérance, de respect de l’autre, de convivialité ? Ou est-ce qu’on leur transmet des valeurs liées à la crispation, à l’exceptionnalisme, à l’extrémisme ? C’est essentiel en cette phase particulière de la politique internationale. «Je ne l’aurais pas dit il y a dix ans ou quinze ans. Mais aujourd’hui, je

pense que regarder d’un peu plus près les valeurs et les idées que l’on transmet aux adultes de demain est devenu une priorité essentielle. Père de deux filles, ce souci m’a toujours taraudé, mais regarder le monde que nous allons laisser à nos enfants rend la question bien plus urgente.»

L’ENJEU DE L’ÉDUCATION EST PRIMORDIAL DANS LA DÉMARCHE DU SUCCESSEUR DÉCLARÉ

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CULTURE JIM HARRISSON TIRE SA RÉVÉRENCE

L’ÉPICURIEN PUR JUS… par: L.M.

« Légendes d’automne », « Dalva »… C’est l’Amérique qui est dépeinte dans ses moindres détails, mais aussi dans ses moindres défauts par le grand romancier que fut Jim Harrison. Car ce génie de la littérature, boudé naguère par les éditeurs, a fini par s’éclipser en ferraillant sur un poème. A l’âge de 78 ans, une crise cardiaque ne pardonne pas. Surtout pour un hédoniste qui ne boudait ni la bonne bouffe, ni les senteurs de tabac et encore moins les vapeurs de l’alcool.

C’

est dans le Michigan que le Grand Jim Harrisson a vu le jour, en 1937. Et c’est dans l’Arizona, à Patagonia, que l’immense créateur a livré le dernier souffle, tenté qu’il était par la muse. Une belle mort dont rêverait tout écrivain rétif aux artefacts des temps modernes, lui qui appréciait encore l’odeur du papier et de l’encre. C’est ce que témoigna son compère Philip Caputo, écrivain septuagénaire et auteur du best-seller «A Rumor of War» sur ses souvenirs de guerre au Vietnam, en saluant sur sa page Facebook un ami qu’il connaissait de longue date. «Il a eu une mort de poète, et avait littéralement un

GRANDS ESPACES, FANNE SAUVAGE... C'EST LE DADA DE JIM HARRISSON

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stylo à la main, il était occupé à écrire un nouveau poème» lorsqu’une crise cardiaque l’a frappé, avance son ami, affirmant avoir constaté le décès de son compère au domicile de celui-ci. Ce fou des grands espaces, et il faut dire que l’Amérique le lui rendait bien, lui qui prenait soin de s’exiler loin de chez lui lorsque l’envie lui prenait de plancher sur un nouveau roman, a laissé derrière lui plusieurs ouvrages, traduits en français, qui ont connu un grand succès. Jim Harrison a écrit 21 ouvrages de fiction, 14 recueils de poésie, ainsi que des essais, ses mémoires et un livre pour enfant. Outre les trois nouvelles de «Légendes d’automne» publiées en 1979, l’une de ses plus grandes œuvres est «Dalva» (1988) qui raconte la quête d’une femme dont l’enfant a été adopté. Fin observateur de ses semblables, l’écrivain qui a perdu un œil lorsqu’il était encore enfant, n’était point aveugle


dès lors qu’il s’agissait de plonger jusqu’au fin fond de l’abîme de ses personnages. «Quand vous êtes très jeune, une infirmité comme celle-là vous isole. Vous vous sentez très particulier. C’est pourquoi je suis parti dans les forêts, près des lacs et des rivières, loin des gens. Et que je suis devenu artiste» affirmait-il. Observateur dans l’âme, son œuvre l’atteste amplement, était un outil qui lui a permis d’explorer la nature… Mais pas uniquement, lui qui a donné aussi un tempo bien à lui de «la vie de l’esprit » et traduit ses péchés mignons, les plaisirs de la chair. Sur un plateau de télé, il avait assuré à un animateur vedette de la scène littéraire qu’il avait succombé aux charmes de la table française en honorant, trois fois en une semaine, des « têtes de veau». N’a-t-il pas écrit dans ses « Aventures d’un gourmand vagabond » ce qui lui trotte dans la tête en songeant à la table. «Dans une boucherie, je vois une demi-carcasse de bœuf premier choix sur un bloc de bois d’érable. Ramper vers elle et la déchiqueter à bonnes dents avec une caisse de vin et une boîte de sel, voir quelle quantité je pourrais en manger. Puis fumer un Havane à 3 dollars, purgé des problèmes humains ; ne plus avoir que des problèmes de bœuf, et ceux-ci brièvement résolus avec le goût de la viande, du vin, du sel et de la fine feuille du tabac dans ma bouche.» Même si la goutte dont il souffrait devait l’inciter, en principe, à ne pas trop déborder. Du goût, il écrivait que c’est «un mystère qui trouve indéniablement sa meilleure expression dans le vin». Mais c’est oublier que les tentations qui l’assaillirent, tout au long de sa vie chargée, faisaient aussi le charme du personnage qu’il qualifia, sans gêne aucune, de « maniaco-dépressive ». Bref, le grain de sel qui le distinguait des autres… Jim Harrison aimait citer Horace: «Un buveur d’eau ne sera jamais poète ».L’hédonisme dont il se revendique n’a pas empêché Jim Harrison de produire. Un signal de combat. Mais surtout de vie. Il a publié deux ouvrages cette année lui qui a publié sa première nouvelle en… 1971. «Wolf : mémoires fictifs» est l’épopée d’un homme traquant le loup dans les bois du Michigan, que l’auteur expliquait avoir écrit pendant sa convalescence après un accident de chasse. Cette passion pour la nature, les grands espaces et la faune sauvage transparaît dans toute son œuvre, le romancier partageait son temps entre l’Arizona où il chassait «toutes sortes de choses» et le Montana «où il tirait avec enthousiasme sur les serpents à sonnette colonisant son jardin», relèvent ceux qui l’ont approché de près. Qu’ils soient connus ou non, comme Jack Nicholson, ils sont plusieurs à avoir succombé au magnétisme qui le caractérisait.

NADHEM OULD AHMED TIRE SA RÉVÉRENCE UN POÈTE LUMINEUX S’ÉTEINT Un poète s’éteint. En Tunisie, terre qui a scandé sa révolution au rythme des strophes d’Aboulkacem Chabi. Mais Nadhem Ouled Ahmed n’est pas n’importe quel poète. Lui qui assurait, juste avant son éclipse, terrassé par un cancer, qu’il ne gardait de la vie que les lettres qui composaient la terre à laquelle il appartient : la Tunisie. C’est au lendemain de son 61ème anniversaire, fêté dans une chambre d’hôpital en famille, qu’il a expiré… Laissant derrière lui des poèmes dont les Tunisiens tirent une ferté: tellement ils étaient chargés du souffle de l’engagement pour le changement démocratique tant attendu, ces lendemains qui chantent. Le père de « La Maison de la poésie » qui a vu le jour en 1955 à Sidi Bouzid, centre urbain qui cristallise la colère de tout un peuple, était habité d’un sacerdoce : populariser la poésie tunisienne. Animateur culturel qui a fait des études de psychologie en France, il assuma les fonctions d’attaché culturel au ministère tunisien dédié (1993 à 1997), il savait soupeser le poids des mots, ceux-là mêmes qui mettent entre les mains des masses les outils conceptuels du changement. Militant à ses heures perdues, il a fait sienne la cause du peuple duquel il s’est rapproché dans ses pérégrinations journalières. Il n’hésitait pas à se lier avec ce que le système considère comme « déchets » de la société pour les entendre parler et faire entendre leur voix. A sa manière. Assurément, Sghaïer Ouled Ahmed a su se faire le porte-parole d’une génération oppressée, éprise d’un vent de liber-

té et d’un esprit de révolte. Opposant, il l’a été jusqu’au bout, que ce soit sous les régimes de Habib Bourguiba ou de Zine El-Abidine Ben Ali. Point de conciliation si ce n’est avec la cause du peuple. Il publia son premier recueil de poésie en 1984, frappé de la censure et interdit de diffusion durant 4 ans. Mais la revanche des mots a eu raison de l’esprit du censeur. En 1993, le défunt refusa l’Ordre national du mérite culturel que le président déchu lui a décerné. Rien de plus logique aux yeux d’un intellectuel dont l’engagement n’a pas été entamé… Jusqu’au dernier de ses soupirs. Sa prose « a toujours été dictée par [son] amour démesuré pour la Tunisie », a-t-il expliqué en 2015 lors d’une soirée organisée en son honneur par le ministère de la Culture et de la sauvegarde du patrimoine. « Tounes [Tunisie en arabe], c’est aussi le prénom de ma mère », a-t-il laissé entendre. On comprend dès lors pourquoi de tout l’alphabet, celui qu’il a pu dompter pour en faire des mots de combat et des strophes d’engagement, il a laissé entendre qu’il n’avait de préférence que pour ceux qui composaient sa terre natale. Celle qui refuse les formes d’intégrisme et récuse les causes faillies de l’obscurantisme. Ennahda, formation islamiste qui a réussi à mettre en équation la Tunisie post-révolutionnaire n’a pas échappé à son ire. La Tunisie a perdu un de ses fils les plus lumineux. Mais sa riche faconde lui survivra. Et c’est en cela que l’on mesure la grandeur d’un artiste. Adieu !

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BLOC-NOTES « VIVA L’ALGÉRIE !» LA RÉVOLTE DE K. AKKOUCHE

A. MABANCKOU

LA NÉGRITUDE AUTREMENT L’écrivain franco-togolais Alain Mabanckou a défrayé la chronique depuis l’automne où il a été reçu au Collège de France. Le romancier qui a déjà à son crédit un prix Renaudot (arraché il y a dix ans de cela) reste ce conteur talentueux dont on boit les paroles qui s’oppose à la crispation identitaire qui étouffe la France, son pays d’adoption. Enseignant la littérature subsaharienne à l’Université de Californie à Los Angeles (UCLA), là où il ne perçoit pas de crispation, il n’hésite pas à heurter les certitudes, comme lorsqu’il fait valoir la logique imparable du Camerounais Achille Mbembe pour qui le «nègre» n’est pas nécessairement le Noir, mais l’exploité. «C’est une autre façon de reconsidérer notre humanisme». Arborant une tenue colorée, quoique guindée (le costume reste l’élégance même pour ce romancier), il rappelle à ses vis-à-vis que « le monde est une addition, une multiplication, et non une soustraction ou une division.» Une autre manière d’assimiler une négritude que d’aucuns vouent aux gémonies s’ils ne la déclassent pas.

L’auteur et journaliste algérien vivant au Canada Karim Akkouche n’a pas que des mots tendres pour le pays qui l’a vu grandir… Avant de le censurer. « Allah au pays des enfants perdus », son dernier roman, circulera, comme tant d’autres, sous le manteau. Ce qui ne l’empêche pas d’assener ses quatre vérités au système en place. Florilège. « Le colonialisme ne s’en va pas tout à fait, il laisse derrière lui ses relais, ses relents et ses mauvaises pratiques. La politique d’arabisation pratiquée par les autorités algériennes depuis l’indépendance n’est qu’un médiocre calque de la politique de Jules Ferry. L’Etat algérien est un système «bâtard», c’est le jacobinisme français enrobé d’islam. Il est schizophrène. Un œil regarde la Mecque pendant que l’autre admire la Tour Eiffel. Les Algériens ne savent pas ce qu’ils font ni ce qu’ils sont : berbères, arabes, musulmans ? Menacés par de multiples courants, ils s’accrochent aux épaves. Tout est résumé dans ce slogan absurde : «One, two, three, viva l’Algérie !» Trois langues étrangères et aucune langue nationale ! Le nationalisme démesuré avec des mots importés de l’Occident. La fierté d’être quelqu’un quand on est à peine quelque chose. D’où le titre un peu provocateur de mon roman, mais ô combien évocateur de notre mal-être, de notre crise identitaire, Allah au pays des enfants perdus. Allah est partout, le citoyen nulle part. »

A.MOSTEGHANEMI CHOKRI BELAÏD

DOUBLE ASSASSINAT ! La maison de la culture « Chokri Belaïd », leader tunisien de gauche, abattu froidement par les djihadistes, a été dévalisée dans la nuit du 12 au 13 avril, à Jbel Jelloud. Besma Khalfaoui, veuve du martyr Chokri Belaïd a indiqué que ce vol ne relève pas du pénal mais qu’ « il s’agit d’une continuation de la logique de l’assassinat » et que » ce vol est une façon de tuer Chokri Belaïd encore une fois ». Des équipements dont la valeur est estimée à des dizaines de milliers de dinars ont été volés. L’équipement de cette maison de la culture avait été assuré par la société civile, l’Etat et plusieurs contributions. Comme quoi, il faut s’attendre à tout de la part des voleurs de lumière qui sévissent dans l’espace arabe.

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DÉSILLUSION ET ESPOIR La romancière algérienne la plus lue dans le monde arabe, Ahlem Mosteghanemi qui a présidé le 11e Festival international du film oriental de Genève (FIFOG) n’est pas à sa première dénonciation près de l’extrémisme religieux. L’écrivaine qui fustige l’obscurantisme religieux et les injustices reconnaît n’être plus aussi libre de le faire qu’à 17 ans. «J’ai à présent une responsabilité que je n’avais pas auparavant», a-t-elle affirmé en marge du Festival. Evoquant sa célébrité, elle assure avoir «des comptes à rendre à chaque lecteur». Pour elle, «nous vivons une période de désillusion dans le monde arabe, même les mots ne veulent rien dire», a-t-elle encore déclaré. «Tous les mots ont été trafiqués, comme patriotisme, nationalisme, islamisme. Il faut inventer de nouveaux mots avec de vrais sens.» Campant bien sur ses 60 ans, elle ne désarme pas. «Il faut donner de l’espoir aux gens».


SOCIOLOGIE

M. SAHA CÉLÉBRÉ À PARIS L’association «Les Artistes de la Kasbah» au Maroc rend un hommage international au sociologue, poète et artiste-peintre Mustapha Saha, lors d’une rencontre devant se dérouler du 11 au 16 avril à Paris. Cette manifestation, en plus de soutenir la paix et la tolérance, vise à promouvoir le développement culturel et artistique dans les pays arabes en créant un espace de rencontres entre les artistes arabes et leurs homologues français, ce qui contribuera à enrichir les uns et les autres de nouvelles expériences en s’ouvrant et découvrant la culture de l’autre, selon les organisateurs. Auteur de nombreuses études en sociologie urbaine, artiste exposant dans «Le Maroc contemporain» à l’Institut du Monde Arabe à Paris, Mustapha Saha mène actuellement une recherche sur les mutations civilisationnelles induites par la révolution numérique et sur les transfigurations urbaines. Il vient de publier «De la métamorphose de l’être en spectre urbain» (Archi-

tecture et Environnement, février 2016) et d’écrire l’ouvrage «Haïm Zafrani, penseur de la diversité». Il prépare aussi la sortie de plusieurs livres, dont «L’Arpenteur d’infini» (recueil de poèmes), «Le Traité du diversalisme» et «Le Mausolée littéraire». Le programme de la rencontre comporte plusieurs activités, notamment l’ouverture d’une exposition d’arts plastiques à la galerie parisienne «Alain Challier», avec la participation de 60 artistes de divers pays arabes et européens, des séminaires, ainsi que des sorties touristiques pour visiter et découvrir des monuments, galeries et musées de la capitale française.

ECOTERRORISME

E. DENÉCÉ ET J. ABOU ASSI L’EXPLIQUENT

A.MEDDEB

MARRAKECH FOREVER L’artiste photographe tunisien, Jellel Gasteli, organise à la Galerie 127, à Marrakech, une exposition inspirée des carnets inédits du poète et philosophe franco-tunisien Abdelwahab Meddeb sur la ville de Marrakech. L’exposition qui se déroulera du 15 avril au 7 mai, propose une série de 10 photographies en édition limitée issues des «déambulations» de Jellel Gastelli dans la ville ocre. Elle présentera également une fresque d’Abdelwahab Meddeb, «L’acte pictural», des manuscrits, des vidéos, des portraits et des livres de l’auteur. Amina Meddeb, épouse du défunt poète, s’attache à faire publier les textes de l’auteur sur les villes qu’il a traversées, lit-on dans la note de présentation de cette exposition. Et c’est à Marrakech, ville qu’Abdelwahab Meddeb affectionnait particulièrement, que revient la primeur de la mise en lumière de ses manuscrits. Jellel Gastelli, ami de l’auteur, découvre chez Amina Meddeb les manuscrits sur Marrakech et demande à les lire. Elle lui confie alors l’écho photographique de ses écrits. . «Le lien spirituel avec Abdelwahab Meddeb est indiscutablement présent. Je connais son œuvre, je connaissais l’ami. Je lui rends hommage à ma manière, librement», a dit Jellel Gastelli.

Eric Denécé et Jamil Abou Assi vennent de publier, aux éditions Tallandier, un essai sur « Ecoterrorisme. Altermondialisme, écologie, animalisme : de la contestation à la violence. Dans la présentation de l’ouvrage, on y lit que depuis vingt ans sont apparus des mouvements contestataires agissant au nom de l’éthique : altermondialisme, écologie, défense des droits des animaux. S’ils s’expriment majoritairement à travers des actions légales, ils ont cependant donné naissance à des groupes radicaux partisans d’attaques violentes et à des groupuscules terroristes n’hésitant pas à recourir à des actions « armées ». Ce phénomène porte un nom : écoterrorisme. Depuis le début des années 1990, les Black Blocs livrent une véritable guérilla urbaine aux forces de l’ordre et le Front de libération des animaux ou le Front de la libération de la terre multiplient les actes criminels – sabotages, attentats ou meurtres –, ciblant les entreprises et le « pouvoir de l’argent ». Ils figurent aujourd’hui, aux États-Unis et en Grande-Bretagne, sur la liste noire des organisations terroristes au même titre que Daech et Al-Qaïda. Les pays arabes ne sont pas encore touchés mais tout laisse craindre que se développent dans un avenir proche des campagnes violentes dans quelques pays. Les événements de Sivens, Roybon et Notre-Dame-des-Landes en sont les signes annonciateurs. Cet ouvrage, le premier en France sur le sujet, présente les causes et idéologies contestataires, décrit les groupes violents, leurs modes d’organisation, leurs cibles, leurs opérations, et explique leur évolution du militantisme au terrorisme. PERSPECTIVES MED

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PROFESSIONNALISATION DU FOOTBALL

AU RAS DES PÂQUERETTES!

On s’attendait à plus d’intelligibilité et de lisibilité dans la nouvelle architecture législative du sport. Mais les choses ont évolué autrement, particulièrement pour le Football dont la professionnalisation s’avère chaotique et d’ores et déjà vouée à l’échec. Ni les cadors de la FRMF, ni le ministère de tutelle ne se soucient du dossier « légisport » qui norme les pratiques sportives et les dote des outils, salvateurs, de la transparence. Dès lors, la gouvernance en prend un sévère coup. En attendant des jours meilleurs…

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SPORT SOCIÉTÉS SPORTIVES par: Yahya Saïdi

DÉCONCERTANT FATRAS JURIDIQUE A la Fédération Royale Marocaine de football, « on professionnalise » à tout-va. En faisant bande à part en raison d’une législation régalienne inintelligible et inachevée, les décideurs de la FRMF veulent brûler les étapes sans que le terrain ne soit débroussaillé pour réussir la mutation des associations dites clubs en sociétés sportives. Éclairage.

L

a création d’une société sportive par une association ne date pas de la promulgation de la loi 30-09, mais depuis 1989, année de la promulgation de la deuxième loi sur le sport ( dite loi 06-87), après la loi de 1957. La différence, c’est l’obligation de la mise en place d’une structure sociétaire quand l’association remplit DANS LE MARÉCAGE quelques prérequis tels qu’ils sont énoncés dans l’article 15 de la LEGISLATIF QUI BOUIL- loi 30-09 alors que dans l’ancienne loi (06-87), la création des sociéLONNE, LA FRMF SURFE tés sportives n’était pas contraignante. Cinq années après l’adoption de SANS GËNE ! la loi 30-09, au sein du mouvement sportif et du ministère de la Jeunesse et des Sports, on se fourvoie dans une bourrasque de louvoiements. Et l’on persiste malheureusement à se perdre en palabres où certains frappent

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d’estoc et de taille alors que d’autres peignent la girafe pour ne pas dire qu’ils enc… les mouches.

DÉROGATION …

La création des sociétés sportives par les associations ( loi 30-09) est une dérogation au dahir des Libertés Publiques du 15 novembre 1958 et plus particulièrement à l’article Premier qui interdit aux dirigeants de l’association de se partager ses bénéfices nets. En fait, cet article autorise, implicitement ou explicitement, à l’association d’avoir même un fonds de commerce en vertu du DOC (Droit des obligations et des contrats ) mais sans que les membres n’aient droit au partage des dividendes. Et C’est la raison pour laquelle les dispositions particulières à la loi 30-09, relative à l’Education Physique et aux Sports, constituent une dérogation vu les nombreux particularismes qui caractérisent l’activité sportive. La vraie question se pose en terme du champ d’appli-


Alors que le mandat de l’actuel Comité directeur de la Fédération royale marocaine de football prendra fin la saison sportive prochaine, on veut au nom d’une «vision stratégique de développement du football marocain» qui est dans le pipe, pousser des clubs de la Première Division de la BOTOLA-PRO à créer leurs propres structures sociétaires. Certes, c’est légitime, mais l’on est dans la confusion des genres.

«K» DU FUS ET DU RCA…

A la FRMF , on laisse entendre que les clubs du FUS et du RCA peuvent muer en sociétés sportives à partir de l’année prochaine. Cependant, l’on imagine mal la mise en place d’une structure sociétaire par ces deux clubs qui sont des sections dépendant d’une association omnisports. L’article 8 est clair là-dessus : la section est la propriété de l’association et ne peut s’organiser indépendamment de son autorité faîtière, le Comité Directeur. En plus, comment va-t-on se permettre de créer une société sportive sans que

l’association concernée ne soit agréée par le ministère de la Jeunesse et des Sports et sans que les textes réglementaires de l’article 15 en particulier n’aient vu le jour? En 2012, on a beau légiférer dans la loi des Finances deux mesures incitatives se rapportant à L’IGR et l’IS des sociétés sportives. Car tout au plus s’agit-il, pour le cas d’espèce, de mesurettes. Surtout que l’essentiel consiste à décréter un code d’investissement destiné à l’activité sportive et à s’atteler ipso facto à régler quelques détails pour arrêter une vision transversale. Beaucoup reste à faire dans cette professionnalisation qui ne concerne pas uniquement le football, mais d’autres disciplines. Une professionnalisation dont les concepts ne sont pas définis et qui ne peut être conçue sans substrat technique, sans philosophie de gestion et sans vision idéale de vrais acteurs.Si acteurs il y a ! En attendant, à la FRMF comme au ministère de la Jeunesse et des Sports, on s’emmêle les pinceaux. Et c’est l’hôpital qui se fout de la charité.

cation et c’est là que le bât blesse.

UNE LÉGISLATION «BÂCLÉE»

L’absence de textes intelligibles, les équivoques d’ordre législatif, voire l’impuissance publique du ministère de la Jeunesse et des Sports, voilà autant de raisons qui concourent pour que la situation confuse et diffuse soit le lot de la professionnalisation du football marocain. Situation dans laquelle la FRMF galère. Au lieu d’enclencher le processus d’une vraie professionnalisation en allant du bas vers le haut, on a fait l’inverse en créant une «ligue professionnelle »qui ne porte que le nom. Ce qui n’est pas conforme au schéma conçu par le législateur dans la loi 30-09 qui organise le mouvement sportif sur la base d’une logique ascendante. Ce qui a été enfreint même par le ministère de la Jeunesse et des Sports quand il avait acculé les fédérations sportives à la refonte de leurs statuts conformément à des statuts-types qui n’ont ni queue ni tête !

CODE SPORTIF : UNE SA POURQUOI FAIRE ? L’une des bourdes légiférées dans la loi 30-09 , relative à l’Education Physique et aux Sports, est d’avoir arrêté une seule forme juridique pour créer une société sportive: SA ( Société Anonyme ). Comme quoi, cette forme juridique est contraignante et garantit dans une large mesure la transparence de la gestion. D’abord, cette question de forme juridique relève de ce qui est réglementaire et non de la loi. En plus, vu les spécificités du sport et vu les inégalités économiques et infrastructurelles entre les différentes villes marocaines, il fallait penser à préconiser plusieurs formes juridiques de sociétés sportives tout en les spécifiant dans la loi qui régit les sociétés et non dans la loi sur le sport. Les incitations pour intéresser les investisseurs du secteur privé commencent par là.

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SPORT A. BOULAÏCH PARLE DE LA CRISE DU BASKET-BALL Interview réalisée par Sheherazed Benhammou

TOUT UN PANIER DE DÉRAPAGES ! Ancien joueur du basket-ball et actuel président de l’Ittihad Riadi de Tanger, Abdelouahed Boulaïch est l’un des protagonistes de la balle orange marocaine. Une discipline qui depuis des années peine à décoller. Les dysfonctionnements récurrents qu’on enregistre à la Fédération Royale Marocaine de basket-ball en sont la cause principale. Abdelouahed Boulaich a bien voulu répondre à quelques vraies questions. Sans langue de bois!

PERSPECTIVES MED : AURIEZ-VOUS L’AMABILITÉ DE NOUS PARLER BRIÈVEMENT DE L’IRT?

Abdelouahed Boulaïch: Difficile de résumer en quelques mots les activités de notre club, l’IRT section basket-ball. Mais je peux dire que nous sommes un club le mieux structuré et le mieux staffé à l’échelle nationale malINCONSISTANCE, INgré les contraintes budgétaires qui nous handicapant. Deux COHÉRENCE ET MAUVAISE choses constituent notre force au sein de l’Equipe de gestion GOUVERNANCE MINENT LE composée de bénévoles : nous avons une vision et une volonté. Les observateurs avertis BASKET-BALL peuvent facilement constater de visu le bon travail que nous faisons sur les plans par exemple de la formation au niveau de la catégorie des jeunes, de l’Equipe première masculine qui joue dans la Cour des Grands en jouant

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les finales du championnat et de la Coupe du Trône. Nous avons et continuons encore à préconiser et à souscrire à la logique de développement dans un cadre de partenariat public-privé notamment le secteur de l’Enseignement, de L’INDH et par d’autres moyens adéquats. Se doter de structures d’accueil est notre cheval de bataille. Car il est question de pérennisation et du rôle sociétal que nous devons jouer par le truchement du basket-ball dont le fer de lance est le mini-basket.

PARLONS MAINTENANT DE LA FÉDÉRATION ROYALE MAROCAINE DE BASKET-BALL. LES TIRAILLEMENTS ENTRE DIRIGEANTS POUR NE PAS DIRE LES PROTESTATIONS CONTINUENT À PLOMBER LA FÉDÉRATION. QU’ELLE EST À VOTRE AVIS LE PROBLÈME DE FOND? A.B.: Il faut savoir que c’est la conjoncture qui avait imposé l’actuel Comité Directeur Fédéral. Les diri-


geants compétents qui devaient être élus, en l’occurrence le Dr Fouad Amar, Sâad Mouline entre autres, avaient pris leur distance. A l’époque, c’est à-dire en janvier 2014, nous étions devant un ultimatum : soit répondre positivement à la convocation de l’assemblée générale élective convoquée par le Comité provisoire du ministère de la Jeunesse et des Sports soit boycotter cette AGE en attendant la tenue d’une Assemblée générale en vertu de statuts, adoptés par la FIBA. Je suis parmi ceux qui ont élu l’actuel Comité directeur fédéral mais la contradiction n’est pas là. Elle réside dans le non-respect des statuts en vertu desqueles avait été élu ce Comité directeur. Justement, la disposition transitoire (Article 54) a été faite pour procéder par la suite aux amendements essentiels tels qu’ils sont revendiqués par la FIBA et par la mise en conformité notamment de la loi sur le sport. Cette disposition transitoire est on ne peut plus sans équivoque : le mandat de l’actuel Comité Directeur Fédéral avait pris fin en octobre 2014. Ce que le président de la FRMBB n’a pas respecté en retardant la refonte des statuts qui jusqu’à décembre de l’année dernière a contourné en tenant une Assemblée générale extraordinaire lors de laquelle un tollé de transgressions avait été enregistré. Finalement, les amendements incontournables qui devaient être opérés ont été esquivés pour ne pas tomber dans l’obligation de tenir une Assemblée générale élective d’un nouveau Comité directeur fédéral dont les représentants des ligues régionales ne sont pas élus.

C’EST DONC UN CLIVAGE D’ORDRE JURIDIQUE ?

A.B.: Le clivage n’est pas uniquement d’ordre juridique mais aussi d’incompétence, de conflits d’intérêts et de minoration de tout ce qui institutionnel. Et quand une fédération est gérée par un staff administratif incompétent , la situation est aisément imaginable. Tout ne peut être réglé que s'il y a un consensus fort entre les différents acteurs de la discipline. Mais quel que soit le consensus, je crois que ce volet qui se rapporte à la refonte des statuts et des règlements généraux revêt une importance cruciale, car il s’agit d’un préalable qu’on ne peut minorer. Le basket-ball est le second sport collectif après le football. Il mérite des dirigeants compétents, stratèges et dévoués pour sa fédération. Nous ne ménagerons aucun effort pour que le changement soit fait dans les règles de l’art.

Nous comptons beaucoup sur l’accompagnement de la FIBA afin d’acculer l’actuel Comité directeur fédéral à opérer les amendements nécessaires, non pour élire un Comité directeur fédéral légitime et représentatif, mais pour que les instances d’arbitrage et de discipline soient élues démocratiquement et d’une manière indépendante.

VOUS AVEZ BEAU PARLER DE LA FIBA, C’EST COMME SI LE MINISTÈRE DE LA JEUNESSE ET DES SPORTS N’ÉTAIT PAS CONCERNÉ ?

A.B.: FIBA ou ministère, le problème n’est pas là. Le problème est dans les incohérences de trop qui altèrent les statuts et les Règlement généraux. Nous militons pour l’adoption d’un cadre juridique cohérent pour souscrire à la gouvernance moderne du basket-ball telle qu’elle a été il y a deux ans par la FIBA. Nous regrettons l’ingérence du Secrétaire général de la FIBA-Afrique qui personnalise le problème. Bref, la réforme de la FRMBB n’est pas une lapalissade mais une urgence et une nécessité, car il est question d’intérêt général. Et cette question d’intérêt général est malheureusement réduite par certains à des considérations subjectives, je dirais extra-sportives.

SI ON COMPREND BIEN, IL Y AURAIT UN PROBLÈME DE GOUVERNANCE ?

A.B.: L’actuel Comité directeur fédéral entame sa troisième saison sportive qui prendra fin d’ici deux mois. Quel bilan pourrait-on faire durant ces trois saisons sportives? Catastrophique car chaque saison sportive, nous enregistrons plusieurs dysfonctionnements. Le président de la FRMBB est le premier responsable de cette situation et il persiste à s’y complaire. Ce n’est pas moi qui suis seul à le dire car il y a des membres du Comité directeur fédéral qui ont déjà dénoncé les dérapages et les malversations à telle enseigne qu’il y a des dossiers entre les mains de la justice. Personnellement je ne suis pas de ceux qui s’aventurent à accuser gratuitement les gens, mais ce dont je suis sûr et ce qui est prouvé : la dilapidation des deniers publics car les dépenses de deux subventions, mandatées à la FRMBB par le ministère de la Jeunesse et des Sports, n’ont pas été exécutées ni conformément aux statuts ni aux conventions d’objectifs signées avec le ministère de la Jeunesse et des Sports. Pour ces manquements aux engagements tels qu’ils ont été paraphés

dans les conventions d’objectifs, l’affaire est plus grave que les malversations. Aujourd’hui, il y a officiellement un audit qui concerne une quinzaine de fédérations sportives dont la FRMBB. Les résultats ne vont pas tarder pour confirmer ce que je viens de dire. Car le pourrissement que connaît aujourd’hui la FRMBB n’a jamais dit son nom..

LA PORTE DE SORTIE CONSISTE, IDÉALEMENT, EN UNE REPRISE EN MAIN DE CETTE DISCIPLINE PAR DES PROFESSIONNELS

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SPORT SPORT ET SUBVENTIONS DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES par: Yahya Saïdi

QUID DE L’INTÉRÊT GÉNÉRAL? Le financement des associations sportives par les collectivités territoriales n’obéit pas à la logique du développement. D’où la notion d’intérêt général se retrouve reléguée au second plan. Ceci est d’autant plus vrai que ce financement enfreint jusqu’à la loi suprême : la Constitution.

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e montant global des aides financières publiques que les collectivités territoriales (Communes, Conseils Provinciaux et/ou préfectoraux et Conseils régionaux) consacrent annuellement aux LORSQUE UN MILLIARD DE associations sportives dépasse le milliard de dirhams. Sans DIRHAMS EST EN JEU, ÇA FAIT compter les dépenses indirectes inhérentes au déploiement du SALIVER BEAUCOUP D'ÉLUS personnel des collectivités territoriales et à l’entretien de l’infrastructure (Stades, salles couvertes)... Dans ces subventions sonnantes et trébuchantes affectées aux associations sportives, on enregistre les clubs de football qui s’ac-

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caparent la part du lion. Mais dans tous les cas, les collectivités territoriales ne respectent aucunement la législation en vigueur. D’abord, en commençant par l’article 26 de la Constitution dont les vocables (Appropriation, démocratique et professionnel) ne sont pas traduits d’une manière pertinente dans les termes de la convention d’objectifs et sont même contournés par l’absence à ce renvoi constitutionnel incontournable et à d’autres textes notamment la circulaire 07/2003 du Premier ministre voire des dispositions particulières de la loi sur le sport. En vertu de ces textes, il est clair que la subvention financière ne doit être accordée que si elle revêt le caractère d’utilité publique et/ou l’intérêt général. Quand on se réfère aux dispositions


du dahir portant loi sur l’Education Physique et aux Sports (loi 30-09), les associations sportives qui sont éligibles au concours financier de l’Etat ou des collectivités territoriales, sont celles qui sont agréées par le ministère de la Jeunesse et des Sports. Et la notion d’intérêt général est bien définie par le législateur dans l’article 83 de la loi 30-09 quand bien même il s’agirait d’un crédit financier public mandaté à une société sportive. Et la balle est dans le camp de la Direction Générale des Collectivités Locales dépendant du ministère de l’Intérieur pour astreindre les élus locaux, provinciaux et régionaux à n’accorder ds subventions qu’aux associations sportives qui souscrivent à l’esprit de l’intérêt général tel qu’il est défini par la loi. C’est ce qui est d’autant plus bien engagé dans L’INDH. Le sport n’est pas une “zone de non-droit ‘’. Son mouvement ne peut déroger à la responsabilité et à la reddition des comptes.

DES ÉLUS MALINTENTIONNÉS ?

Les nouvelles chartes qui régissent les collectivités territoriales (Communes, Conseils Provinciaux et /ou préfectoraux et Conseils régionaux) interdisent à tout élu d’entrenir une relation avec une association prétendant à un concours financier de la collectivité dans laquelle il est membre. Cependant, si certains élus ont mis la clé sous le paillasson en démissionnant de leurs postes de dirigeants d’association (Cas du président de L’ASS (Football ), d’autres ont contourné la loi. C’est le cas du président de l’IRT (Football), élu et président du Conseil Préfectoral de la ville de Tanger qui a récemment déclaré que la subvention s’acheminera

vers une association-écran avant d’être virée à L’IRT. On n’en dira pas plus car on est là dans un “détournement “ de deniers publics au nom d’une raison d’un club sportif d’une cité derrière laquelle se cachent des intérêts partisans. Cumulard, le président de L’IRT ignore que le rôle d’un élu est d’accompagner une association et non de s’y substituer. Même constat quand il s’agit d’un fonctionnaire d’une collectivité territoriale. Nombreux sont les fonctionnaires de communes qui sont membres d’associations subventionnées… Comme quoi, on communalise les pertes et on privatise les bénéfices...

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SPORT GRAND PRIX DE CHINE par: Abou Sarah

MERCEDES CONFIRME SA SUPRÉMATIE Avec un palmarès exceptionnel l’an denier, l’écurie bavaroise débute la saison 2016-2017 avec fanfare. Ses deux pilotes, talentueux à souhait, lui apportent encore et encore l’aura qui l’avait abandonné des années durant. Mais cette époque semble désormais révolue tellement les écarts sont abyssaux entre cette firme OVNI et les autres, Ferrari compris. Si les essais à Barcelone ont dépassé les espérances en terme de fiabilité, en terme de vitesse pure, Rosberg et Hamilton ont su tirer le meilleur des monoplaces.

F

ort de son expérience, le pilote britannique devait être le maître de cérémonie en ce début de saison. Mais la dextérité et la rage de vaincre de Rosberg l’empêchent, à ce jour, de se hisser sur la plus haute marche du podium. En effet, Nico Rosberg a brillé de mille feux. Sur la lancée de ses trois succès fin 2015, il débute la saison 2016 en maître de la F1. Véloce, imperturbable et L'ÉCURIE BAVAROISE SEMBLE assuré, il surclasse son coéquipier et rival Lewis Hamilton. Tous les TAILLÉE COMME UN GANT pilotes qui ont remporté cinq succès consécutifs ont été champions du POUR L'ALLEMAND ROSBERG monde. Un bon présage pour Rosberg ?

BON CRU CHINOIS

Trois, six et dix-sept : tel est le palmarès réalisé à ce jour par Nico Rosberg. Trois grands prix gagnés sur trois soit 75 points sur 75. Six Grands Prix gagnés successivement

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au titre des saisons 2015/2015 et, enfin, dix-sept est le nombre de Grands Prix gagnés par Rosberg à ce jour. Certes, on est loin de l’exceptionnel palmarès d’Hamilton, mais la montée en puissance du pilote allemand en dit long sur son appétit. L’école germanique, celle qui se focalise sur un pilote travailleur et acharné, le remporte face à l’école britannique basée sur le feeling et les sensations sur la piste. Mais à l’évidence, les deux mènent à la réussite pourvue que le coup de pouce, à savoir le facteur chance, soit de la partie. En Chine, le weekend d’Hamilton peut se résumer en un mot : désastreux. Alors que Rosberg nageait dans le bonheur. Tout a commencé avec les essais qualificatifs du samedi. L’avarie du système de récupération d’énergie de sa monoplace le condamne à une élimination humiliante dès la Q1 si bien qu’il était bon dernier sur la grille de départ ! Dimanche matin, une fois les bolides lâchés, englué dans le trafic, il percute une autre monoplace et perd son aileron avant. Contraint d’effectuer


son premier arrêt au stand, il ne savait pas qu’il allait refaire cette manouvre à cinq reprises. Sur la piste, il a tout donné, mais le faux plat du châssis et les suspensions en piteux état lui ont joué un mauvais tour. Quant aux pneumatiques, ils n’ont pas répondu aux attentes si bien qu’ils se détruisent rapidement. Dès lors, en dépit de sa dextérité Lewis a fini en bon 7ème. Ce sort, il l’a presque partagé avec Raïkonen et dans une moindre mesure avec Vettel. En effet, dès le premier virage, Vettel percute la Ferrari de son coéquipier, affaiblissant les chances de la Scuderia de remporter le grand prix de Shanghai cher à toutes les écuries. Et si Vettel a su remonter à la deuxième marche du podium, c’est au prix d’une leçon de pilotage assenée à la concurrence, Raïkonen a terminé 5 ème derrière la Red Bull de Riccardo. Ce dernier a crée la sensation dès le premier tour puisqu’il a effectué un excellent départ en se hissant à la première place devant Rosberg. Mais il a dû déchanter très vite victime d’une crevaison pour terminer au pied du podium juste derrière son coéquipier le russe Daniil Kvyat. Qualifié de « torpille » par Vettel, le pilote russe a été vivement critiqué par l’Allemand qui a estimé que sa manœuvre, au premier virage, était tout simplement «suicidaire». Bien au-dessus de ces querelles, Rosberg a survolé la course puisqu’il a terminé avec près de 35 secondes devant la Ferrari. Tout lui a souri, les couacs des adversaires, la safety car, la fiabilité de sa voiture et même les gommes Pirelli.

L’AUDACIEUX D’ABOU DHABI

Quinze jours plus tôt, Mercedes et son pilote allemand avaient déjà frappé fort en dépit du mode de qualification vivement critiqué par les pilotes et les écuries. Le format de qualification pour la saison 2016, avec une élimination d’un pilote toutes les 90 secondes en cours de portion (Q1, Q2, Q3), a créé une énorme polémique dans le paddock. En colère, Vettel a expliqué qu’il n’était pas surpris que ça se passe aussi mal dès le premier round de Melbourne : «C’est de la merde ! Mais nous avions tous dit que ça allait se passer ainsi, je ne sais pas pourquoi les gens sont surpris. On nous a dit d’attendre pour voir. On a attendu, et on a vu.» Alors que professionnels et observateurs s’attendaient à un changement à Abou Dhabi, la Fédération internationale automobile (FIA) a campé sur ses positions pour exacerber les tensions. Ce n’est que le 8 avril que la FIA et Bernie Ecclestone, grand patron de la F1, ont accepté

la proposition unanime des écuries de Formule 1 de revenir au format de qualification de 2015. Dans un communiqué laconique, on pouvait lire que «cette proposition, si elle est approuvée par les organes de gouvernance de la F1, entrera en vigueur dès le Grand Prix de Chine (17 avril). Ce fut chose faite à Shanghai. A Abou Dhabi, l’évènement du début de course fut l’abandon soudain de Vettel à bord de sa Ferrari dès le tour de formation. Avec une troisième place lors des qualifications, il espérait mettre la pression sur les pilotes Mercedes. Dépité, il a déclaré qu’il a « soudainement perdu la puissance, il y avait de la fumée (… ) C’est frustrant. Quand Kimi a eu un problème en Australie, ça nous a surpris, mais nous avions réglé le problème. S’il s’est passé la même chose, ça veut dire qu’en fait, nous ne l’avons pas réglé.» Au même moment, son compatriote Rosberg a réussi un excellent départ et s’est rapidement échappé pour gérer à son avantage la stratégie de la course en dominant ses rivaux. Il y-a avait dans cette maîtrise germanique du

Vettel et du Schumacher réunis qui va se solder par une première place devant Kimi Raïkonen et Hamilton sur la troisième marche du podium. Avec 75 points, Rosberg caracole en tête du classement des pilotes suivi par Hamilton à 36 longueurs. Contre toute attente, c’est l’Australien Danielli Ricciardo à bord de la Red Bull qui pointe à la troisième position avec 36 points, devant Vettel et Räikkönen avec respectivement 36 et 33 points. Pour ce qui est des écuries, c’est sans surprise que l’on retrouve Mercedes avec la bagatelle de 114 points distançant les Ferrari qui ne totalisent que 61 points, mais talonnées par les Red Bull avec 57 points. La scuderia a des soucis à se faire tellement la concurrence est rude. C’est sur le terrain de la fiabilité que la suite de la saison se jouera à coup sûr pour Ferrari comme pour les autres constructeurs. C’est en Russie, dite « Grand Ours», que les moteurs réagiront pour la quatrième manche qui confortera peut-être le futur champion du monde Nico Rosberg. A moins que ….

PRIME D’ANCIENNETÉ

En parallèle au déroulement de la saison avec la controverse sur le mode de qualification, une autre polémique secoue la formule 1. Comme chaque année, la FOM va reverser une partie de ses revenus aux écuries, près d’un milliard de dollars pour la saison 2015. A la lecture du tableau de répartition, on note avec étonnement que ce n’est pas l’écurie championne du monde, Mercedes en l’occurrence, qui va toucher le gros lot, mais sa dauphine Ferrari. En effet, la Scuderia devrait recevoir, selon Autosport, 192 millions de dollars, et Mercedes 171 millions de dollars seulement. Cette différence provient d’une prime de 70 millions de dollars offerte à Ferrari, seule écurie présente depuis le premier championnat en

1950. Mercedes, tout comme Red Bull, ne reçoivent chacune que 35 millions en vertu d’une prime négociée avec la FOM. A la base, le calcul est établi ainsi : 33,5 millions de dollars pour chaque écurie, plus une somme calculée selon le classement obtenu lors du championnat précédent, qui va de 13,5 millions pour Manor à 63,5 millions pour Mercedes. Quatre écuries (Ferrari, Mercedes, Red Bull et McLaren) reçoivent également un bonus qui varie de 32 à 39 millions de dollars. Et donc, Ferrari touche en plus une prime de “présence”. Si ce mode de calcul irrite certaines écuries, dont Force India et Sauber, qui ont porté plainte en septembre dernier devant la Commission européenne, Bernie Ecclestone, le patron de la FOM, estime que le système pourrait être plus égalitaire, mais ne trouve rien à redire au bénéfice dont profite Ferrari.

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CHRONIQUE JUSTE POUR RIRE

L’HEURE DE LA DÉBANDADE ! Par : Ouled Riab

I

l y a ceux qui collectionnent les montres, les réveils, les pendules pour en découdre avec le temps. On imagine mal comment il en serait autrement dans notre pays où le rapport au temps oscille entre une certaine rigueur, comme celle que les muezzins ponctuent du haut des minarets, et une parfaite nonchalance mue par une fatalité désarmante. Alors, une heure de plus ou de moins ne change pas grand chose aux 24 heures qu’une journée dure. Sauf aux yeux d’un halluciné du dard qui ne pense qu’à ça ! Ahmed Al-Chokairi, et il compte parmi les fkihs attitrés du PJD, n’a pas eu que des mots tendres à l’endroit de l’Exécutif qui s’est empressé de rallonger d’une heure notre quotidien. Car il y voit une raison à une fitna dans les… alcôves ! Dur dans sa sortie, l’insurgé de la virilité s’est même emporté en rameutant tous ses semblables au motif que les fidèles assisteront, désarmés, à une grande perturbation de l’exercice coïtal auquel ils doivent sacrifier à des heures bien déterminées de L'INTÉRIEUR AURA FAIT la journée. Sacrilège L'ÉCONOMIE ! Un grand malheur DU RECOURS AUX GOURDINS s’abat donc sur la POUR communauté, si on DISPERSER suit l’honorable fkih LES MARCHEURS DU SEXE dans sa casuistique, les ébats devant être écourtés sous l’effet conjugué de la prière « Al Ichaa» et de la prière « Al Fajr » et de tout ce qui s’y rattache comme ablutions. Peu réjouissant tout ça ! Et le fkih d’oser rappeler que les nouveaux horaires s’inscriraient même en faux par rapport aux heures préscrites par le Coran pour mieux faire l’amour. Allez savoir ! Quoi qu’il en soit, aux yeux d’Al-Choukairi, c’est à un « coït interruptus » que l’Exécutif compte assujettir la communauté… Un non sens historique alors que le bon Dieu invite les croyants à pérpétuer l’espèce. Mais l’histoire n’allait pas s’arrêter en si bon chemin. Il paraît que les « sœurs » allaient même investir la rue, en rangs serrés, pour exiger une meilleure plage horaire pour jouir des bienfaits

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de la vie. Simone de Beauvoir n’a qu’à bien se tenir là où elle est, avec ses thèses de «deuxième sexe». Car l’affaire est bel et bien existentielle pour nos amis barbus qui n’ont jamais senti l’idéologie onirique d’un éternel insurgé comme Sartre. Et n’eut été un brin de retenue, le chef du gouvernement aurait à gérer des manifestations monstres avec pour principale revendication « ne saucissonez plus nos moments de bonheur !» Heureusement que le peu de pudeur qui reste au fond de la jarre a empêché nos barbus, comme nos voilées, d’occuper les artères. Bref, la guerre des lits n’a pas eu lieu. Et le ministre de l’Intérieur aura fait l’économie du recours aux gourdins pour disperser les marcheurs du sexe. Heureusement que les corps expéditionnaires de Hassad qui foncent dans le tas pour assurer un nettoyage par le vide de toutes les manifs ne se projettent pas jusqu’en Asie pour traiter des cas comme ceux qui font la tradition de Kawazaki. Car dans cette cité nipponne dont les Marocains ne connaissent que les rugissants deux roues, le Shinto Kanamara Matsuri représente l’occasion pour les Japonais de défiler, sans fausse puduer, avec trois lourdes effigies de pénis dont une dépasserait la taille de notre fkih. C’est la marche du printemps qui consacre le festival du pénis d’acier… Avec des étals débordant d’objets phalliques. Voilà qui aurait pu déciller nos « frères » qui font tout un culte du bas ventre et de ses exigeances, en croyant qu'ils en ont en bronze. Oseront-ils un jour marcher pour libérer les deux sexes comme l’exigerait le bon sens ? Accepteront-ils un jour que le terreau dans lequel ils évoluent enfanter un Courbet et en admirer l’œuvre qui résume l’origine du monde ? Pour ce faire, asurément, il faut d’abord libérer les esprits. Là où nichent encore les remugles de tous les interdits. Et pour ce faire, il faut se convaincre du nécessaire calage de notre temps sur celui des autres civilisations qui ont osé s’affranchir des archaïsmes qui assuraient la reproduction du sous-développement. Et là, il faut croire que le changement d’horaire est pour le moins cardinal. Et sans la moindre pause, SVP !


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