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À prendre ou à laisser : mon expérience d’assistant à la Javeriana

« Si tu lis ces lignes et que tu te demandes si ça vaut la peine de partir sur un autre continent, loin de ta famille, de tes ami/e /s, de ton confort … Je déclare CARRÉMENT que c’est dur quelquefois, mais tu ne regretteras pas d’avoir vécu des expériences nouvelles ».

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Erwan Audebert

Assistant de français

Avril 2017 – Hôtel Wyndham de Bogotá

« Mais il fout quoi ce con ?! Ça fait 40 minutes qu’il m’a dit qu’il arrivait !». J’attends avec impatience à la réception de l’hôtel avant de me rendre à la FilBo (Feria Internacional del Libro de Bogotá) dont le pays d’honneur est la France. L’invité que j’accompagne s’appelle Patrice Killoff er, il est dessinateur, scénariste et illustrateur de bande dessinée. Il a rendez-vous avec des étudiants d’arts mais hier il a fait la fête et il pue l’alcool quand il arrive (enfi n !). Il porte des lunettes noires pour cacher les excès de la veille et mache un chewing gum pour cacher sa mauvaise haleine. Nous avons RDV à la Javeriana. Je l’ignore encore mais cette université m’accueillera trois ans plus tard comme assistant de professeur de français.

Septembre 2020 – Bogotá- calle 72 # 17

Le téléphone sonne mais j’hésite à répondre. On ne sait ja-

« En classe de français à la Javeriana » mais dans la rue… Le numéro est inconnu. Je décroche, c’est le responsable pé« Entre le début et ces dix années, tu cherches, tu tâtonnes, tu expérimentes…Ce n’est pas parfait mais le dagogique de l’ambassade sera-t-il un jour ? Je m’ôte le poids de de France; il la classe sensationnelle. » m’annonce que l’assistant de la Javeriana est bloqué en France à cause de la crise sanitaire. Le poste est libre : « à prendre ou à laisser » comme on dit. La pandémie de Covid-19 a changé le cours de la vie pour beaucoup de monde, moi inclus. Alors que j’étais aff ecté à la UniValle de Cali mon poste d’assistant là-bas n’était plus garanti.

« BANCO ! J’accepte. »

Entre un hypothétique poste d’assistant à Cali ou commencer dès octobre à la Javeriana, je pense avoir choisi la bonne décision.

Pourquoi ? Parce que je suis accompagné d’une équipe pédagogique professionnelle, j’apprends un nouveau métier et j’étudie mon Master FLE (Français Langue Etrangère). Peu importe si j’aurai fait trois semestres sur quatre en virtuel parce que cette expérience d’assistanat est l’occasion de mettre

en pratique toute la théorie pédagogique du Master que j’étudie en France. C’est une chance inouïe ! Et puis, si je me trompe, ce n’est pas grave, j’apprends. J’ai lu qu’il faut environ dix ans avant d’être un professeur aguerri. Entre le début et ces dix années, tu cherches, tu tâtonnes, tu expérimentes…Ce n’est pas parfait mais le sera-t-il un jour ? Je m’ôte le poids de la classe sensationnelle. Si la classe ne fonctionne pas, je la retravaille et ça sera mieux la prochaine fois.

J’apprécie intervenir dans toutes les classes avec tous les niveaux : d’Elemental à Avanzado. Si les premiers ont du mal au début, ce qui est normal, qu’ils observent les niveaux supérieurs pour se motiver. S’ils ont réussi alors toi aussi tu peux. J’apprends ainsi à adapter ma méthodologie au public d’apprenant. Mon discours s’ajuste ; Je ne fais jamais la même chose et c’est excitant.

J’aime que les thématiques des classes soient imposées. Pas le choix, s’il faut travailler la grammaire, alors ce sera de la grammaire. Besoin de développer les compétences culturelles ? Pas de problème. Un travail sur Aimé Césaire ? Allez, motivé. C’est vrai qu’il m’arrive de me dire « Oh là là ! mais qu’est-ce que je vais faire de cette thématique ?! ». Puis je découvre, j’apprends, et je conçois le cours comme un artisan conçoit sa prochaine commande. Je suis intellectuellement excité, je relève des défi s toutes les semaines et je trouve cela sain pour l’esprit.

A côté de mes interventions en classe, j’anime des ateliers. Dans cet espace, j’ai plus de liberté. C’est l’occasion de me rapprocher des apprenants. L’idée, c’est de sortir du cadre classique de l’enseignement pour sans délaisser le but principal de tout cela : l’enseignement/apprentissage en français ; ici, pas trop de règles ni d’explications grammaticales interminables. On pratique, pratique et pratique encore. Tant pis si tu commets des fautes de français, c’est normal d’en faire, surtout au début, et puis les erreurs, en général c’est drôle. (Par exemple), quand j’ai débarqué à Buenos Aires en

« Puis je découvre, j’apprends, et je conçois le cours comme un artisan conçoit sa prochaine commande. Je suis intellectuellement excité, je relève des dé s toutes les semaines et je trouve cela sain pour l’esprit. »

2013 avec le peu d’espagnol que j’avais, je disais des conneries tout le temps !

Si tu lis ces lignes et que tu te demandes si ça vaut la peine de partir sur un autre continent, loin de ta famille, de tes ami/e /s, de ton confort … Je déclare CARRÉMENT que c’est dur quelquefois, mais tu ne regretteras pas d’avoir vécu des expériences nouvelles. Personnellement, je fais des choses que jamais je n’aurai imaginé faire. A titre d’illustration, j’anime une petite capsule audio pour l’émission de radio Francofonias qui sera diffusée à partir de mars 2022 sur Javeriana Estéreo (91.9 FM). Avant cela, je n’étais jamais rentré dans un studio d’enregistrement pour participer à une émission radiophonique, ni même rédiger un article pour une revue étudiante. C’est kiffant !

De la radio à la vidéo, il n’y a qu’un pas. Pour promouvoir mes ateliers, mais aussi la Faculté de Communication et Langues Modernes, Je fais de courtes vidéos développent succinctement une curiosité linguistique francophone.

J’écris le scénario, enregistre et fais le montage pour enfin les diffuser sur les réseaux sociaux de la faculté ; le ton est léger mais pas démuni de contenu d’apprentissage.

Après l’assistanat, tu rentreras chez toi comme un serpent qui a fait sa mue, c’est toujours toi mais tu as un peu changé. Tu sauras parler une langue nouvelle, tu auras apprivoisé une culture différente de la tienne. Bref, être assistant, c’est s’ouvrir intellectuellement et s’ouvrir des horizons professionnels. C’est faire des rencontres, vivre des moments inédits et apprendre tout le temps.

Finalement, je pense animer un atelier « bande dessinée ». La tache finale sera d’écrire une planche en français sur un évènement personnel. Pour l’inspiration, sera étudié le travail de Patrice Killoff er. Ainsi la boucle sera bouclée

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