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Métier
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QUESTIONS À UNE contractuelle
Magaly Gisclon est assistante de sécurité publique à Lausanne. Un métier qui nécessite sang-froid et courtoisie. Et qui ne consiste pas qu’à coller des prunes.
Texte: Patricia Brambilla Photo: Jeremy Bierer
1 Comment doit-on vous appeler, Madame Pervenche ou Aubergine? Je suis une ASP, une assistante de sécurité publique. Les autres appellations sont plus anciennes... En tout cas, on nous reconnaît à nos uniformes dans la rue, peu importe le nom qu’on nous donne. 2 Votre métier n’est pas le plus populaire qui soit. Pourquoi l’avoir choisi? J’ai toujours été intéressée par le métier de policier… Mais avant de me lancer dans cette profession, je me suis renseignée sur l’activité d’assistante de sécurité publique. Et je me suis dit pourquoi pas? On verra plus tard si je poursuis avec l’École de police. En tout cas, j’adore ce que je fais actuellement. 3 Est-ce que coller des prunes, ça s’apprend? J’ai suivi une formation de deux mois et demi à Savatan, avec des cours de psychologie, de police de proximité, de droit, de français, de police judiciaire, de sport, d’éthique ainsi que de self-défense. On y fait de la théorie et de la pratique: on nous met en situation pour nous préparer à gérer les éventuels conflits. 4 Arpenter chaque jour les mêmes rues, n’est-ce pas lassant? On passe généralement une semaine dans le même secteur, mais c’est tellement grand que l’on n’arrive parfois pas à le parcourir en entier… Il m’arrive de faire 15 km par jour, tout dépend du travail. On ne met pas que des amendes, on s’occupe aussi d’aide à la circulation en cas d’accidents, de manifestations, ainsi que des objets perdus comme de conseiller les automobilistes pour trouver leur chemin. 5 Où trouvez-vous la motivation chaque matin? J’aime vraiment mon travail et si je peux aider les gens, je le fais volontiers! Bien sûr, mettre des amendes en fait partie. Pour certaines personnes, c’est un peu comme un jeu: elles n’ont pas envie de payer le parcmètre et tentent leur chance, elles savent qu’elles peuvent gagner ou perdre. Quand je les rencontre, je ne suis pas là pour leur faire la morale. Parfois les gens ne sont pas au courant qu’il existe des possibilités, comme la carte à gratter ou le parking longue durée. Je me fais un plaisir de leur expliquer. 6 Comment gérez-vous les automobilistes agacés? Certains sont énervés, mais l’acceptent, d’autres sont carrément de mauvaise foi. Si je mets une amende, c’est qu’elle est justifiée et que j’ai une preuve. Mais je laisse toujours la personne s’exprimer, je ne fais pas de surenchère et je garde un ton neutre. Si la personne n’accepte pas l’amende, je lui dis qu’elle a toujours la possibilité de la contester. 7 Est-ce qu’il vous arrive de lever une contravention? Oui, on est humain quand même. On doit évaluer chaque situation. C’est aussi une question de bon sens. Quand une voiture est mal stationnée devant une église à cause d’un enterrement, on ne va pas rajouter une peine Bio express
Magaly Gisclon, 29 ans, a d’abord terminé un apprentissage dans la vente du textile, avant de travailler quelques années comme employée Migros. Curieuse de nouveaux horizons, elle se lance en avril 2020 dans la fonction d’assistante de sécurité publique. Avec, dans un coin de la tête, l’envie d’entrer un jour à l’École de police.
8Les gens sont-ils de plus en plus irascibles?
Oui, j’ai l’impression que ça se dégrade. On nous insulte régulièrement, mais je ne le prends pas pour moi. J’ai ma carapace personnelle. Il faut dire qu’en ville, il y a moins de places de parc, certaines personnes perdent patience. Ils sont coincés dans les bouchons, arrivent en retard à leurs rendez-vous et ne savent pas où garer leur voiture… La contravention, c’est un peu la goutte d’eau qui fait déborder le vase.
«On peut parfois faire un geste. Mais certaines fautes, comme les véhicules stationnés sur le trottoir, on ne peut pas les laisser passer»
supplémentaire. De même, on peut parfois faire un geste pour se montrer plus souple. Mais ça doit rester exceptionnel. Certaines fautes, comme des véhicules stationnés sur le trottoir, on ne peut pas les laisser passer. 9 Avez-vous des trucs pour repérer les voitures en infraction? Je ne vous donnerai pas toutes les astuces… Mais je repère ceux qui changent simplement le disque. En tout cas, je fais une photo de tous les véhicules amendés. Certaines situations sont traitées une année plus tard, il est difficile de se souvenir de tous les cas. 10 Comment vous ressourcez- vous après une sale journée? Je me dépense beaucoup dans le sport. J’ai un abonnement de fitness, je vais à la salle et j’évacue tout à ce moment-là. Au tout début, j’ai eu quelques cas difficiles, mais j’ai vite compris qu’il fallait mettre une barrière pour se protéger. On ne peut pas tout prendre sur soi, sinon on ne s’en sort plus. MM